Language of document : ECLI:EU:T:2023:362

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

28 juin 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale Hofmag – Marque verbale antérieure non enregistrée HOFMAG – Motif relatif de refus – Absence d’utilisation dans la vie des affaires d’un signe dont la portée n’est pas seulement locale – Article 8, paragraphe 4, et article 60, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑452/22,

Hofmeir Magnetics Ltd, établie à Witney (Royaume-Uni), représentée par Me S. Baur, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. E. Markakis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Healthfactories GmbH, établie à Saaldorf-Surheim (Allemagne), représentée par Me C. Vischer, avocat,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme A. Marcoulli, présidente, MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur) et J. Schwarcz, juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Hofmeir Magnetics Ltd, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 3 mai 2022 (affaire R 1367/2021-5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 13 août 2019, l’intervenante, Healthfactories GmbH, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe verbal Hofmag.

3        La marque demandée désignait les produits relevant des classes 9 et 10 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Générateurs de champs magnétiques, autres qu’à usage médical » ;

–        classe 10 : « Appareils électromagnétiques pour la réalisation de thérapies non invasives par champ magnétique à l’aide d’impulsions électromagnétiques ; générateurs de champs magnétiques à usage médical ».

4        Le 5 décembre 2019, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

5        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition dans le formulaire d’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 4, du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

6        Il ressort également du formulaire d’opposition que celle-ci était fondée sur une « marque non enregistrée », à savoir la marque verbale HOFMAG utilisée dans la vie des affaires notamment en Allemagne et en Autriche pour un « dispositif utilisant des ondes magnétiques pulsées à haute intensité pour pénétrer des tissus blessés à l’aide de la technologie PEMF (thérapie de terrain par ondes électromagnétiques pulsées) fournissant un traitement non invasif sans médicaments pour soulager la douleur » (ci-après le « dispositif »).

7        Le 9 juin 2021, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

8        Le 5 août 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif que les éléments de preuve produits par la requérante n’étaient pas suffisants pour démontrer l’incidence économique du signe antérieur en Allemagne et en Autriche au cours de la période pertinente.

10      En effet, la chambre de recours a considéré que, même si le dossier contenait des éléments de preuve montrant l’utilisation du signe antérieur pour des activités promotionnelles intervenues avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 13 août 2019, ces éléments ne suffisaient pas à démontrer l’existence d’une présence significative en Allemagne et en Autriche à cette date. En l’absence d’éléments relatifs aux ventes, elle a estimé être dans l’impossibilité de vérifier que ledit signe avait été utilisé dans la vie des affaires pendant une période continue commençant avant ce dépôt.

11      La chambre de recours a également relevé que les factures relatives aux ventes effectuées par la requérante étaient postérieures au 13 août 2019. Elle a aussi considéré que, même en tenant compte du caractère étroit du marché en cause, les ventes attestées par ces factures ne suffisaient pas à démontrer une utilisation quantitativement suffisante pour prouver que le signe antérieur avait été utilisé dans la vie des affaires et avait une portée qui n’était pas seulement locale.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens exposés dans le cadre du présent recours et de la procédure devant la chambre de recours.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        dans l’hypothèse où une audience serait prévue, condamner la requérante aux dépens.

14      L’intervenante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés dans le cadre du présent recours et de la procédure devant la chambre de recours.

 En droit

15      La requérante invoque en substance deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte le caractère étroit du marché en cause et a ainsi erronément conclu à l’absence d’utilisation dans la vie des affaires du signe antérieur. Le second moyen est tiré de ce que ladite chambre n’a pas pris en compte, pour son appréciation, le signe Hofmag en tant que dénomination commerciale.

 Sur la recevabilité d’une annexe à la requête et la possibilité de se prévaloir des éléments qui y sont mentionnés

16      La requérante a présenté, dans l’annexe A.1 de la requête, un courriel envoyé par un employé d’une société d’audit faisant état du nombre de ventes du dispositif en 2019, en 2020 et en 2021, à savoir, 5 en Allemagne et 7 en Autriche en 2019 ; 14 en Allemagne, 5 en Autriche, 13 en Suisse ainsi que 34 à son agent commercial situé en Autriche en 2020 ; et 23 en Allemagne, 6 en Autriche, 42 en Suisse ainsi que 77 à son agent commercial situé en Autriche en 2021.

17      L’EUIPO fait valoir que l’annexe en cause et les arguments qui s’y réfèrent sont irrecevables, car le document qu’elle contient a été présenté pour la première fois devant le Tribunal.

18      En l’espèce, il importe de relever que l’annexe A.1 de la requête reprend, pour partie, des données déjà présentées lors de la procédure devant l’EUIPO pour la période comprise entre le 16 septembre 2019 et le 4 mai 2020. En effet, lors de ladite procédure, la requérante avait fourni des informations concernant les ventes du dispositif selon lesquelles, en 2019, 5 avaient été effectuées en Allemagne et 7 en Autriche. En ce qui concerne l’année 2020, la requérante a produit, devant l’EUIPO, des données sur les ventes du dispositif jusqu’au 4 mai 2020. Il ressort de ces documents qu’elle a effectué 9 ventes en Allemagne, et 11 ventes à son agent commercial situé en Autriche jusqu’au 4 mai 2020.

19      Pour la période comprise entre le 16 septembre 2019 et le 4 mai 2020, l’annexe A.1 de la requête et les arguments qui se réfèrent à celle-ci ne modifient donc ni le cadre factuel et juridique du litige, ni son objet.

20      Il y a donc lieu de déclarer ces informations recevables en ce qu’elles portent sur la période comprise entre le 16 septembre 2019 et le 4 mai 2020.

21      En revanche, pour la période postérieure au 4 mai 2020, les informations relatives aux ventes du dispositif n’ont pas été produites devant la chambre de recours.

22      Or, selon la jurisprudence, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 72 du règlement 2017/1001, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir arrêt du 29 juin 2022, Hijos de Moisés Rodríguez González/EUIPO – Irlande et Ornua (La Irlandesa 1943), T‑306/20, EU:T:2022:404, point 18 et jurisprudence citée].

23      Il y a donc lieu de déclarer ces informations irrecevables en ce qu’elles portent sur la période postérieure au 4 mai 2020.

 Sur le premier moyen relatif à l’utilisation du signe dans la vie des affaires

24      En substance, la requérante fait valoir que, au titre de son appréciation des conditions prévues à l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, la chambre de recours aurait dû prendre en compte le caractère étroit du marché en cause pour apprécier le critère de l’utilisation du signe dans la vie des affaires et sa portée qui n’est pas seulement locale. Ainsi, ladite chambre n’aurait pas suffisamment tenu compte des factures postérieures à la date du dépôt de la demande d’enregistrement en cause, alors que ces ventes seraient liées aux activités promotionnelles ayant eu lieu avant cette date. Eu égard aux caractéristiques du marché en cause, les éléments de preuve fournis seraient suffisants pour attester l’utilisation du signe antérieur dans la vie des affaires et que sa portée n’est pas seulement locale.

25      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

26      À titre liminaire, il convient de relever que, en vertu de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 46, paragraphe 1, sous c), du même règlement, le titulaire d’une marque non enregistrée ou d’un signe autre qu’une marque peut s’opposer à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne si cette marque non enregistrée ou ce signe remplit cumulativement quatre conditions : il doit être utilisé dans la vie des affaires ; il doit avoir une portée qui n’est pas seulement locale ; le droit à cette marque ou à ce signe doit avoir été acquis conformément au droit de l’État membre où il était utilisé avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque de l’Union européenne ; enfin, cette marque ou ce signe doit reconnaître à son titulaire la faculté d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que, lorsqu’une marque non enregistrée ou un signe ne remplit pas l’une de ces conditions, l’opposition fondée sur l’existence d’une marque non enregistrée ou d’autres signes utilisés dans la vie des affaires, au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, ne peut aboutir [voir arrêt du 24 octobre 2018, Bacardi/EUIPO – Palírna U zeleného stromu (42 BELOW), T‑435/12, EU:T:2018:715, point 43 et jurisprudence citée].

27      Il y a lieu de constater que le recours de la requérante porte uniquement sur les deux premières conditions d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, à savoir celles selon lesquelles le signe doit être utilisé dans la vie des affaires et sa portée ne doit pas être seulement locale. En effet, la chambre de recours ayant conclu que lesdites conditions n’étaient pas remplies, elle n’a pas estimé nécessaire d’examiner les deux autres conditions présentées au point 26 ci-dessus.

28      Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que, pour faire obstacle à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, le signe qui est invoqué à l’appui d’une opposition doit être effectivement utilisé d’une manière suffisante dans la vie des affaires et avoir une étendue géographique qui ne soit pas seulement locale, ce qui implique, lorsque le territoire de protection de ce signe peut être considéré comme autre que local, que cette utilisation ait lieu sur une partie importante de ce territoire. Afin de déterminer si tel est le cas, il convient de tenir compte de la dimension économique de la portée du signe, qui est évaluée au regard de la durée pendant laquelle il a rempli sa fonction dans la vie des affaires et de l’intensité de son utilisation, au regard du cercle des destinataires parmi lesquels le signe en cause est devenu connu en tant qu’élément distinctif, à savoir les consommateurs, les concurrents, voire les fournisseurs, ou encore au regard de la diffusion qui a été donnée au signe, par exemple par voie de publicité ou sur Internet [voir, en ce sens, arrêt du 15 mai 2017, Morton’s of Chicago/EUIPO – Mortons the Restaurant (MORTON’S), T‑223/15, non publié, EU:T:2017:333, points 59 et 60 et jurisprudence citée].

29      En outre, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, la preuve de l’utilisation d’un signe antérieur ne peut être apportée par des probabilités et des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui démontrent une utilisation effective et suffisante du signe [voir arrêt du 19 novembre 2014, Out of the blue/OHMI – Dubois et autre (FUNNY BANDS), T‑344/13, non publié, EU:T:2014:974, point 24 et jurisprudence citée].

30      Par ailleurs, il y a lieu d’appliquer à la condition de l’utilisation dans la vie des affaires d’un signe antérieur sur lequel l’opposition est fondée le même critère temporel que celui expressément prévu à l’article 8, paragraphe 4, sous a), du règlement 2017/1001 pour ce qui concerne l’acquisition du droit audit signe, à savoir celui de la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque de l’Union ou, le cas échéant, de la date de priorité invoquée à l’appui de la demande de marque de l’Union européenne [voir, en ce sens, arrêts du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, EU:C:2011:189, point 166, et du 14 septembre 2011, Olive Line International/OHMI – Knopf (O‑live), T‑485/07, non publié, EU:T:2011:467, point 50].

31      En l’espèce, il est constant que la date pertinente est le 13 août 2019.

32      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve présentés par la requérante n’étaient pas suffisants pour démontrer que le signe antérieur avait été suffisamment utilisé dans la vie des affaires en Allemagne et en Autriche avant la date pertinente, et que sa portée n’était pas seulement locale. Elle a, notamment, indiqué que les seuls éléments de preuve produits par la requérante relatifs aux ventes du dispositif étaient postérieurs à la date pertinente. En outre et en tout état de cause, de tels éléments de preuve ne seraient pas quantitativement suffisants, même en prenant en compte le caractère étroit du marché.

33      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu’il n’est pas contesté que la requérante n’a effectué aucune vente du dispositif avant la date pertinente. Il n’est pas non plus contesté que, peu avant cette date, la requérante a effectué, à compter du mois de juillet 2019, un certain nombre d’activités promotionnelles, lesquelles ont donné lieu, par la suite, à des ventes du dispositif à partir du mois de septembre 2019.

34      En premier lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours a omis de prendre en compte le caractère étroit du marché, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 95, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen à effectuer par l’EUIPO est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Il résulte de cette disposition qu’incombe également aux parties la charge d’invoquer les faits et les preuves utiles à l’appui de ces moyens [voir, en ce sens, arrêt du 11 avril 2019, Inditex/EUIPO – Ansell (ZARA TANZANIA ADVENTURES), T‑655/17, non publié, EU:T:2019:241, point 37 et jurisprudence citée]. Il ressort de cette disposition qu’il appartenait donc à la requérante de prouver le caractère étroit du marché en cause.

35      À cet égard, la requérante rappelle qu’elle avait fait valoir que l’intervenante, bien qu’étant le « leader du marché », présentait des chiffres de vente extrêmement bas, ce qui reflétait le caractère étroit du marché. Elle indique que l’intervenante, selon son propre communiqué de presse, en date du 22 août 2018, aurait vendu 200 de ses produits dans seize pays. Elle en déduit que l’EUIPO s’est fondé, à tort, sur la déclaration de l’intervenante selon laquelle cette dernière aurait vendu environ 540 de ses produits entre 2014 et 2021, alors qu’il n’est pas indiqué si ces ventes portent sur le produit à destination vétérinaire ou humaine et que, en tout état de cause, cela conduirait à une moyenne de 75 à 80 produits vendus par an.

36      Pour sa part, l’intervenante précise que les affirmations la concernant sont erronées. Tout d’abord, elle signale qu’elle ne se revendique pas comme le « leader du marché », mais comme un « leader sur le marché des technologies ». De plus, les ventes moyennes ne seraient pas déterminantes en l’espèce dans la mesure où ces nombres, faibles au départ, ont constamment augmenté au fil des années. En substance, la moyenne établie par la requérante ne serait donc pas révélatrice du marché pour les années 2019 à 2021. L’intervenante conteste donc le caractère étroit du marché et souligne d’ailleurs qu’il existe, en Allemagne, 3 890 000 cavaliers et, en Autriche, 120 000 chevaux. Les chevaux étant exposés à un risque élevé de blessures, les produits en cause s’adresseraient à un nombre élevé de propriétaires de chevaux.

37      Il convient de relever, d’une part, que le communiqué de presse de l’intervenante du 22 août 2018 ne suffit pas à prouver le caractère étroit du marché en cause. Ce communiqué ne fournit pas d’informations sur le nombre de clients potentiels ou sur les éventuels concurrents. En outre, la requérante invoque ledit communiqué pour calculer une moyenne des ventes de l’intervenante, alors que les données utilisées à cet effet ne sont pas assez détaillées, dès lors que, notamment, elles ne donnent aucune information précise sur l’Union européenne, et encore moins concernant l’Allemagne et l’Autriche. À cet égard, l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas compris que pareil communiqué était produit pour prouver le caractère étroit du marché doit être écarté, dans la mesure où, en l’espèce, ce document ne permet pas de prouver un tel caractère.

38      D’autre part, il y a lieu de considérer qu’un prix élevé ne suffit pas, à lui seul, pour conclure au caractère étroit d’un marché. Or, la requérante n’a apporté aucun élément démontrant qu’il n’existe qu’un « groupe limité d’acheteurs », comme, en hypothèse, des données sur le nombre de cavaliers, de centres équestres professionnels en Allemagne et en Autriche et de chevaux utilisés à des fins de compétions professionnelles ou sur ce que représenteraient concrètement ses ventes et l’impact de ses activités promotionnelles par rapport au nombre de clients potentiels.

39      En outre, il n’appartient pas à l’EUIPO de faire des conjectures sur les caractéristiques d’un marché en cause en l’absence d’éléments de preuve présentés à cet égard.

40      Par conséquent, la requérante ne saurait reprocher à la chambre de recours de ne pas avoir pris suffisamment en compte le caractère étroit du marché en cause dans son appréciation, alors même qu’elle n’a pas fourni d’éléments de preuve suffisants pour le prendre en compte.

41      En tout état de cause, il ressort du point 101 de la décision attaquée que la chambre de recours a considéré que, même en tenant compte du caractère étroit du marché en cause, l’usage du signe antérieur ne semblait pas quantitativement suffisant pour prouver que ce signe avait été utilisé dans la vie des affaires et que sa portée n’était pas seulement locale.

42      En second lieu, la requérante conteste les appréciations des éléments de preuve relatifs à l’utilisation du signe antérieur dans la vie des affaires et à sa portée pas seulement locale contenues dans la décision attaquée.

43      À cet égard, il y a lieu de relever qu’il ressort du dossier présenté devant l’EUIPO que la requérante a fait appel à un agent commercial, qui est intervenu à l’occasion de quatre compétitions équestres entre le 18 juillet 2019 et le 11 août 2019, en Autriche et en Italie, lesquelles réunissaient des participants provenant de toute l’Europe. Cet agent a indiqué avoir distribué, à ces occasions, des brochures relatives au dispositif sur lesquelles le signe antérieur était apposé. Il y a également effectué des démonstrations du dispositif sur les chevaux de cavalières professionnelles qui ont ensuite posté des photos sur leurs réseaux sociaux. La requérante a produit des captures d’écran de ces réseaux sociaux, une copie des brochures ayant été distribuées ainsi que des informations sur ces concours. Il ressort également du dossier de l’EUIPO que, à la suite desdites initiatives promotionnelles, la requérante a effectué un certain nombre de ventes du dispositif, notamment en Allemagne et en Autriche.

44      Comme cela ressort des points 30 et 31 ci-dessus, afin d’établir une utilisation du signe antérieur dans la vie des affaires, au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, il y a lieu de prendre en compte les éléments de preuve produits par la requérante portant sur la période antérieure à la date pertinente, à savoir le 13 août 2019.

45      Il en découle, a contrario, que les éléments de preuve portant sur des faits relatifs à la période postérieure à la date du 13 août 2019 ne sont pas pertinents en l’espèce pour l’examen de la condition de l’utilisation du signe antérieur dans la vie des affaires, tel qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 30 ci‑dessus [voir, en ce sens, arrêt du 6 avril 2022, Dorit-DFT/EUIPO – Erwin Suter (DORIT), T‑208/21, non publié, EU:T:2022:228, point 30].

46      En tout état de cause, à supposer même que, comme l’a admis la chambre de recours dans la décision attaquée, de tels éléments puissent être pris en compte pour corroborer des éléments de preuve antérieurs à la date pertinente, notamment en raison de la proximité temporelle entre les activités promotionnelles et les ventes, en l’espèce, ces éléments et les arguments de la requérante s’y référant ne sont pas suffisants pour démontrer une utilisation du signe antérieur dans la vie des affaires.

47      En effet, premièrement, en ce qui concerne les activités promotionnelles, outre sa critique selon laquelle la chambre de recours n’a pas suffisamment pris en compte le caractère étroit du marché en cause, la requérante vise les publications sur les réseaux sociaux et l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle 121 et 354 mentions positives relatives à ces publications ne permettaient pas d’en déduire le nombre d’utilisateurs correspondants. Toutefois, cette critique procède d’une lecture erronée de la décision attaquée dans la mesure où ladite chambre n’a pas évalué le nombre de mentions positives, mais a indiqué, tout d’abord, que le nombre de personnes ayant visualisé ces pages était inconnu, et par ailleurs, que ces initiatives avaient été entreprises pendant une période très limitée avant la date pertinente. Cet argument doit donc être rejeté.

48      Deuxièmement, la requérante conteste l’appréciation du nombre de ventes du dispositif. À cet égard, il convient de rappeler que la requérante a présenté à l’EUIPO 26 factures concernant des clients établis en Allemagne et en Autriche permettant d’identifier 31 ventes du dispositif au total entre le 16 septembre 2019 et le 4 mai 2020. La requérante a également produit des tableaux représentant ses ventes et des déclarations de son dirigeant et de son agent commercial qui reprennent les données qui sont sur ces factures.

49      À cet égard, tout d’abord, dans son argumentation, la requérante part de ses propres ventes au cours des derniers quatre mois de l’année 2019 et les étend à une année civile, afin de calculer les ventes annuelles hypothétiques de 2019, soit la vente de 39 unités du dispositif. En appliquant la même méthode à partir des trois premiers mois de l’année 2020, la requérante obtient la vente de 68 unités du dispositif pour l’année 2020.

50      Or, selon la jurisprudence citée au point 29 ci-dessus, la preuve de l’utilisation d’un signe antérieur ne peut être apportée par des probabilités et des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui démontrent une utilisation effective et suffisante du signe. Les calculs de la requérante correspondent à des probabilités et ne sauraient être considérés comme probants. Cela est d’autant plus le cas qu’aucune information ne permet de mesurer ou d’apprécier ce que représentent ces estimations par rapport au marché concerné en Allemagne et en Autriche en 2019.

51      Par ailleurs, en ce qui concerne les ventes réelles de la requérante, dès lors qu’il n’est pas possible de s’appuyer sur des éléments de preuve prouvant que ces ventes sont suffisantes en raison des caractéristiques propres au marché en cause, les 31 ventes du dispositif au cours des derniers quatre mois de 2019 et des trois premiers mois de 2020 ne peuvent être considérées comme quantitativement suffisantes pour démontrer que le signe antérieur a été utilisé dans la vie des affaires et que sa portée n’était pas seulement locale.

52      Par conséquent, en l’absence d’éléments de preuve permettant d’attester une utilisation suffisamment intense du signe antérieur dans la vie des affaires en Allemagne et en Autriche avant la date pertinente, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen relatif au signe Hofmag en tant que dénomination commerciale

53      La requérante fait valoir que son opposition était aussi fondée sur la dénomination commerciale Hofmag et non uniquement sur le signe verbal HOFMAG. En effet, premièrement, dans le formulaire d’opposition, elle avait indiqué, sous la rubrique « motifs de l’opposition » qu’elle invoquait une « marque ou autre signe antérieur », ce qui viserait à la fois les marques non enregistrées et les dénominations commerciales. Deuxièmement, en ce qui concerne l’annexe accompagnant le formulaire d’opposition faisant référence à la dénomination commerciale Hofmag, l’EUIPO aurait dû en déduire que son opposition était également fondée sur ladite dénomination commerciale. Troisièmement, dans ses observations soumises à l’appui de l’opposition en date du 8 juillet 2020, elle renvoyait au droit autrichien relatif à la protection d’un signe commercial.

54      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

55      L’article 46, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, dispose qu’une opposition à l’enregistrement de la marque peut être formée dans un délai de trois mois à compter de la publication de la demande de marque de l’Union, au motif que la marque devrait être refusée à l’enregistrement en vertu de l’article 8 de ce même règlement. En outre, conformément à l’article 46, paragraphe 3, dudit règlement, l’opposition doit indiquer les motifs sur lesquels elle est fondée.

56      Il ressort de la jurisprudence que, une fois le délai pour former opposition visé à l’article 46 du règlement 2017/1001 expiré, le requérant ne peut plus invoquer de nouveaux droits antérieurs ou de nouveaux motifs d’opposition [ordonnance du 8 juin 2018, Lupu/EUIPO – Dzhihangir (Djili soy original DS), T‑456/17, non publiée, EU:T:2018:342, point 43].

57      Par ailleurs, l’article 2, paragraphe 2, sous b), du règlement délégué (UE) 2018/625, de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1) prévoit que l’acte d’opposition doit comporter une identification claire de la marque ou du droit antérieur sur lequel l’opposition se fonde. Cette disposition précise, en son point iv), que lorsque l’opposition se fonde sur l’existence d’une marque antérieure ou d’un autre signe au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, l’acte d’opposition doit comprendre une indication de son type ou de sa nature, une représentation de la marque ou du signe antérieur et une indication quant à l’existence éventuelle du droit à la marque ou au signe antérieur dans l’ensemble de l’Union ou dans un ou plusieurs États membres et, dans ce cas, le nom de ces États membres.

58      En l’espèce, dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que le formulaire d’opposition ne contenait aucune indication relative à la dénomination commerciale Hofmag. En effet, dans cet acte, la requérante se serait seulement prévalue de la marque non enregistrée HOFMAG comme base de l’opposition. La dénomination commerciale n’aurait été invoquée que le 8 juillet 2020 devant la division d’opposition, soit après le délai d’opposition, expiré le 9 décembre 2019, et ne saurait constituer un motif d’opposition.

59      En premier lieu, force est de constater que dans le formulaire d’opposition, sous la rubrique « base de l’opposition », l’opposant a le choix de sélectionner « marque non enregistrée » et/ou « autre signe utilisé dans la vie des affaires », parmi lesquels il est possible de choisir « nom commercial ». L’opposant peut donc ajouter à la fois, une marque non enregistrée, comme l’a fait la requérante en l’espèce, et un autre signe utilisé dans la vie des affaires.

60      Toutefois, en l’espèce, la requérante n’a pas sélectionné un « autre signe utilisé dans la vie des affaires ». En effet, le formulaire d’opposition fait uniquement référence à la marque verbale HOFMAG. Or, comme indiqué au point 57 ci-dessus, l’acte d’opposition doit comporter une identification claire de la marque ou du droit antérieur sur lequel l’opposition se fonde. Par conséquent, la requérante ne saurait tirer de la seule indication faite dans le formulaire d’opposition qu’elle se fonde sur l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, que la dénomination commerciale Hofmag constitue également une base de l’opposition alors qu’il lui appartenait d’ajouter cette base d’opposition si elle entendait s’en prévaloir.

61      Par ailleurs, il convient de préciser, comme l’EUIPO l’a relevé à juste titre, que l’indication du choix du fondement, dans le formulaire d’opposition, permet ensuite à l’opposant d’indiquer plus précisément en quoi consiste ce fondement et, ainsi, à l’EUIPO et au demandeur de la marque d’en prendre connaissance. L’opposant doit donc indiquer le type de marque, sa description, ainsi que les territoires qui sont couverts. En l’espèce, en omettant d’indiquer qu’elle entendait se fonder sur la dénomination commerciale Hofmag, la requérante a privé l’intervenante des informations nécessaires pour faire valoir ses arguments.

62      Par conséquent, la requérante ne peut valablement soutenir qu’elle entendait se fonder également sur un « autre signe utilisé dans la vie des affaires » alors qu’elle ne l’a pas indiqué dans le formulaire d’opposition, sous la rubrique « base de l’opposition ».

63      En deuxième lieu, sur l’annexe jointe par la requérante au formulaire d’opposition, la dénomination commerciale Hofmag n’est apposée que dans les coordonnées de la requérante et ne possède qu’une place très limitée par rapport à la marque non enregistrée HOFMAG qui apparaît clairement. Dans la mesure où cette brochure constitue l’annexe du formulaire d’opposition, lequel invoque comme fondement uniquement une marque non enregistrée, il ne peut en ressortir de façon claire que la requérante entendait également se fonder sur la dénomination commerciale. Cette simple mention ne saurait donc constituer une base d’opposition distincte.

64      En troisième lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir ignoré une partie de ses observations soumises à l’appui de l’opposition en date du 8 juillet 2020 dans lesquelles elle renvoyait au droit autrichien relatif à la protection d’un signe commercial.

65      Force est de constater que ces observations ont été présentées après l’expiration du délai d’opposition. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le motif d’opposition fondé sur la dénomination commerciale Hofmag en Allemagne et en Autriche était irrecevable.

66      Quant aux références de la requérante aux directives relatives à l’examen des marques de l’Union européenne, adoptées par l’EUIPO, il convient de rappeler qu’elles ne constituent pas des actes juridiques contraignants pour l’interprétation des dispositions du droit de l’Union (arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, EU:C:2012:816, point 48).

67      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours a, à juste titre, considéré que l’opposition n’était fondée que sur l’utilisation du signe verbal HOFMAG dans la vie des affaires, et non sur la dénomination commerciale Hofmag. Le deuxième moyen doit donc être rejeté comme non fondé.

68      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, aucun des moyens invoqués par la requérante au soutien de ses conclusions ne devant être accueilli, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

69      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

70      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière. En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens que dans le cas où une audience serait prévue, il convient, en l’absence de l’organisation d’une audience, de décider que l’EUIPO supportera ses propres dépens.

71      En ce qui concerne la demande de l’intervenante au regard des dépens de la procédure devant la chambre de recours, il suffit de relever que, étant donné que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée, c’est le dispositif de celle-ci qui continue à régler les dépens en cause [voir, en ce sens, arrêt du 4 octobre 2017, Intesa Sanpaolo/EUIPO – Intesia Group Holding (INTESA), T‑143/16, non publié, EU:T:2017:687, point 74].

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Hofmeir Magnetics Ltd supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Healthfactories GmbH.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Frimodt Nielsen

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 juin 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.