Language of document : ECLI:EU:T:2013:344

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

3 juillet 2013(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative ALOHA 100 % NATURAL – Marque nationale verbale antérieure ALOA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑243/12,

Warsteiner Brauerei Haus Cramer KG, anciennement International Brands Germany GmbH & Co. KG, établie à Warstein (Allemagne), représentée par Mes B. Hein et M.-H. Hoffmann, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par M. G. Schneider, puis par M. A. Schifko, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Stuffer SpA, établie à Bolzano (Italie), représentée par Me F. Jacobacci, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 14 mars 2012 (affaire R 1058/2011 1), relative à une procédure d’opposition entre Stuffer SpA et Warsteiner Brauerei Haus Cramer KG, anciennement International Brands Germany GmbH & Co. KG,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse (rapporteur) et J. Schwarcz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 mai 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 23 octobre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 19 octobre 2012,

vu la décision du 4 décembre 2012 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 juin 2008, la requérante, Warsteiner Brauerei Haus Cramer KG, anciennement International Brands Germany GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 32 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Bières ; boissons mélangées à base de bière ; boissons non alcooliques, en particulier boissons à base de céréales ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 35/2008, du 1er septembre 2008.

5        Le 24 novembre 2008, l’intervenante, Stuffer SpA, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque verbale antérieure ALOA, déposée le 23 septembre 2003 et enregistrée le 23 juillet 2007 en Italie, sous le numéro 1057171, désignant les produits relevant de la classe 32 correspondant à la description suivante : « Bières ; eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Par décision du 5 avril 2011, la division d’opposition a fait droit à l’opposition fondée sur la marque italienne verbale antérieure et a rejeté la demande d’enregistrement de marque communautaire pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

9        Le 18 mai 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 14 mars 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, que, compte tenu de l’identité des produits et de la similitude des signes en cause, il existait un risque de confusion.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée et rejeter l’opposition ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux exposés au cours de la procédure devant la chambre de recours.

12      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité de certaines pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal

13      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Il s’ensuit que, s’agissant d’un motif relatif de refus d’enregistrement, des éléments de droit et de fait qui sont invoqués devant le Tribunal sans avoir été portés auparavant devant la chambre de recours ne sauraient affecter la légalité d’une décision de ladite chambre [arrêt de la Cour du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 54 ; arrêts du Tribunal du 15 février 2005, Cervecería Modelo/OHMI – Modelo Continente Hipermercados (NEGRA MODELO), T‑169/02, Rec. p. II‑505, point 22, et du 17 mars 2010, Mäurer + Wirtz/OHMI – Exportaciones Aceiteras Fedeoliva (tosca de FEDEOLIVA), T‑63/07, Rec. p. II‑957, point 22].

14      Il en découle que, dans le cadre du contrôle de légalité des décisions des chambres de recours, confié au Tribunal en vertu de l’article 65 du règlement n° 207/2009, des éléments de droit et de fait qui sont invoqués devant le Tribunal sans avoir été portés auparavant devant les instances de l’OHMI ne peuvent être examinés pour apprécier la légalité de la décision de la chambre de recours et doivent, par conséquent, être déclarés irrecevables (arrêts NEGRA MODELO, point 13 supra, points 22 et 23, et tosca de FEDEOLIVA, point 13 supra, point 23).

15      Or, il ne ressort pas du dossier de l’OHMI que la requérante a invoqué, dans le cadre de la procédure administrative, les annexes K 6 à K 10 de la requête constituées d’extraits de sites Internet visant à démontrer la connaissance, par le public italien, des termes « aloha » ou « aloa ». En outre, rien ne permet de considérer que les documents en cause viseraient à démontrer l’existence d’un fait notoire qui n’aurait pas été établi dans la décision attaquée.

16      Il en résulte que, conformément à la jurisprudence mentionnée aux points 13 et 14 ci-dessus, les annexes K 6 à K 10 de la requête doivent être déclarées irrecevables.

 Sur le fond

17      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Elle fait valoir, en substance, que la chambre de recours a conclu à tort qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

18      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée]. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48, et arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 25].

21      Par ailleurs, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails [voir arrêt du Tribunal du 8 décembre 2011, Aktieselskabet af 21. november 2001/OHMI – Parfums Givenchy (only givenchy), T‑586/10, non publié au Recueil, point 20, et la jurisprudence citée].

22      Aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, le consommateur moyen des produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Par ailleurs, il convient de tenir compte du fait que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire. Il y a lieu également de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services concernés [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, point 28, et du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI – Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, point 38].

23      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner l’appréciation par la chambre de recours du risque de confusion entre les signes en conflit.

24      En l’espèce, la marque antérieure est une marque italienne. Dès lors, ainsi que l’a constaté la chambre de recours au point 17 de la décision attaquée sans que cela soit contesté par la requérante, le territoire pertinent est celui de l’Italie.

25      Il est, par ailleurs, constant que le public visé est, ainsi que l’a à juste titre relevé la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, constitué du consommateur moyen des produits concernés, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

26      En premier lieu, en ce qui concerne la similitude des produits concernés, force est de constater que, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 26 de la décision attaquée, sans être contredite sur ce point par la requérante, les produits relevant de la classe 32 visés par la demande de marque et par la marque antérieure sont identiques.

27      En deuxième lieu, s’agissant de la similitude des signes en conflit, il convient de rappeler que l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 41, et la jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, précité, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

28      Il convient d’emblée de rejeter les arguments de la requérante tendant à soutenir, en substance, que la chambre de recours aurait dénaturé la marque demandée, telle qu’elle ressort de la demande d’enregistrement. En effet, il résulte clairement du point 1 de la décision attaquée que la chambre de recours a correctement pris en compte la marque demandée. Le fait que la marque demandée apparaisse dans un autre format au point 29 de la décision attaquée résulte à l’évidence du mode de présentation choisi par la chambre de recours pour placer les marques en cause l’une à côté de l’autre. Cela ne signifie pas pour autant que la chambre de recours aurait décrit la marque demandée de façon incorrecte. Ainsi, le fait que la chambre de recours a considéré que le terme « aloha » occupait une position « centrale » ne signifie pas pour autant que la chambre de recours a considéré que ce terme se trouvait « au milieu » de la marque demandée, contrairement à ce que soutient la requérante. Par ailleurs, l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle le terme « aloha » est placé au-dessus des éléments verbaux « 100 % » et « natural » est tout à fait correcte, même s’il existe un écart entre ces différents termes. Les arguments de la requérante à cet égard ne sauraient donc être retenus.

29      Premièrement, sur le plan visuel, il y a lieu de relever que le terme « aloha » est écrit en caractères majuscules de grande taille et occupe l’intégralité de la largeur de la marque demandée sur la partie supérieure de celle-ci. Il occupe donc une position centrale, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 30 de la décision attaquée, en ce sens qu’il ne se situe pas exclusivement sur la partie droite ou sur la partie gauche de la marque demandée, à la différence des termes « 100 % » et « natural ». Il y a également lieu de souligner que le terme « aloha » est écrit en caractères de couleur blanche sur fond noir, ce qui fait ressortir davantage cet élément par rapport aux autres éléments qui sont principalement positionnés sur un fond plus clair.

30      Par ailleurs, ainsi que l’a relevé la chambre de recours aux points 30 et 31 de la décision attaquée, les éléments verbaux « 100 % » et « natural » sont écrits en caractères majuscules de plus petite taille que le terme « aloha » et ont une fonction descriptive des produits en cause. Ils ne seront dès lors pas perçus comme étant les éléments dominants de la marque demandée.

31      Enfin, il est exact, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, que les divers éléments figuratifs qui composent la marque demandée, combinant différentes couleurs et incluant deux fleurs d’hibiscus, seront plutôt perçus comme exerçant une fonction ornementale. Le fait que les fleurs d’hibiscus soient positionnées au milieu de la marque demandée ne saurait modifier cette conclusion, contrairement à ce que suggère la requérante dans ses écritures. Par ailleurs, il y a lieu de souligner que lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du Tribunal du 2 février 2011, Oyster Cosmetics/OHMI – Kadabell (Oyster cosmetics), T‑437/09, non publié au Recueil, point 36, et la jurisprudence citée]. Au surplus, il y a lieu de relever que l’élément figuratif représentant des fleurs d’hibiscus peut, le cas échéant, être rapproché des éléments verbaux « 100 % » et « natural » et avoir, dans ce contexte, une fonction descriptive des produits en cause. Il y a également lieu de rappeler que l’élément figuratif représentant des fleurs d’hibiscus est positionné en majeure partie sur un fond plus clair que le terme « aloha », de sorte que sa perception visuelle en est atténuée. Le fait qu’une partie de cet élément figuratif apparaisse également sur le fond noir supérieur de la marque demandée ne saurait modifier cette appréciation globale, même s’il est exact que ce positionnement peut donner une certaine impression de relief. Pour ce qui est de l’argument de la requérante selon lequel l’élément figuratif représentant des fleurs d’hibiscus serait complexe, outre que cette assertion n’est supportée par aucun élément, il suffit de relever que ledit élément correspond à une représentation assez classique de l’image desdites fleurs.

32      Dans ces conditions, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pu considérer, en substance, au point 33 de la décision attaquée que le terme « aloha » était l’élément dominant de la marque demandée. La chambre de recours n’a toutefois pas considéré que ledit élément était susceptible de dominer à lui seul la marque demandée, comme le relève d’ailleurs la requérante devant le Tribunal.

33      Compte tenu du fait que l’élément dominant de la marque demandée reproduit la marque antérieure, en conservant l’ordre des lettres de cette dernière et en intercalant simplement la lettre « h » entre les lettres « o » et « a », il y a lieu de considérer que les signes en cause présentent un certain degré de similitude sur le plan visuel, qui peut être qualifié à tout le moins de moyen. L’ajout de la lettre « h », comme l’a relevé la chambre de recours au point 33 de la décision attaquée, n’altère pas l’impression de similitude visuelle qui se dégage de la comparaison des signes en cause. Par ailleurs, pour les raisons mentionnées aux points 30 et 31 ci-dessus, les autres éléments verbaux et figuratifs de la marque demandée, même s’il convient d’en tenir compte dans le cadre d’une appréciation globale, ne sont pas susceptibles de rendre dissemblables les signes en cause sur le plan visuel.

34      Deuxièmement, sur le plan phonétique, il y a lieu de considérer que le public pertinent aura tendance à ne pas prononcer les éléments verbaux de la marque demandée « 100 % » et « natural », pour les raisons mentionnées au point 30 ci-dessus. Par ailleurs, ledit public aura également tendance à ne pas prononcer ces derniers éléments par simple économie de langage, ces derniers étant assez longs à prononcer et aisément séparables de l’élément dominant de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Zero Industry/OHMI – zero Germany (zerorh+), T‑400/06, non publié au Recueil, point 58]. Le public pertinent aura donc tendance à prononcer seulement le terme « aloha », comme l’a relevé la chambre de recours au point 35 de la décision attaquée. Dès lors, il existe un degré élevé de similitude phonétique entre les signes en cause dans la mesure où le terme « aloha » de la marque demandée est phonétiquement identique au terme « aloa » qui constitue la marque antérieure.

35      Troisièmement, sur le plan conceptuel, aucun élément n’a été apporté devant l’OHMI qui permettrait de considérer que le terme « aloha », qui est l’élément dominant de la marque demandée, sera perçu par le public pertinent comme se référant à un signe de salutation dans la langue hawaïenne, comme le soutient la requérante devant le Tribunal. Les extraits de dictionnaire de langue italienne produits par l’intervenante devant l’OHMI tendent à démontrer, au contraire, que ce terme ne fait pas partie du langage courant du public pertinent. Il en va de même du terme « aloa », qui constitue la marque antérieure. Il y a lieu, par ailleurs, de rappeler que la connaissance d’une langue étrangère ne peut en général être présumée [voir arrêt du Tribunal du 24 mai 2011, Space Beach Club/OHMI – Flores Gómez (SpS space of sound), T‑144/10, non publié au Recueil, point 63, et la jurisprudence citée]. Dès lors, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant qu’aucune comparaison conceptuelle ne pouvait être effectuée en l’espèce. En tout état de cause, la chambre de recours a correctement considéré que, si le public pertinent pouvait associer les termes « aloha » ou « aloa » à une île du Pacifique, y compris Hawaï, les signes en cause partageraient une certaine similitude conceptuelle. En effet, dès lors qu’aucun élément ne permet de considérer que le public pertinent pourrait avoir une connaissance suffisamment précise du terme « aloha » et, donc, de son orthographe, il est hautement probable que ledit public confondra les deux termes en cause, puisque l’ajout ou le retrait de la lettre « h » ne sera pas significative dans ce contexte. À cet égard, il y a lieu de rejeter les arguments de la requérante visant à considérer qu’une partie du public pertinent pourrait percevoir la marque antérieure comme une abréviation en lisant chaque lettre séparément. En effet, il y a lieu de rappeler que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails et qu’il n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire. Enfin, concernant les autres éléments verbaux de la marque demandée, la chambre de recours a correctement considéré, en substance, au point 38 de la décision attaquée, que ces éléments descriptifs n’influeront pas sur la comparaison conceptuelle des signes en conflit fondée, notamment, sur l’élément dominant de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 novembre 2007, Gateway/OHMI – Fujitsu Siemens Computers (ACTIVY Media Gateway), T‑434/05, non publié au Recueil, points 47 et 48, et du 18 septembre 2012, Scandic Distilleries/OHMI – Bürgerbräu, Röhm & Söhne (BÜRGER), T‑460/11, non publié au Recueil, point 50]. Il en va de même des éléments figuratifs qui seront perçus, par le public pertinent, comme exerçant une fonction ornementale, voire, le cas échéant, s’agissant de la représentation des fleurs d’hibiscus, une fonction descriptive en lien avec les termes « 100 % » et « natural ».

36      Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant, au point 39 de la décision attaquée, que les signes en cause étaient globalement similaires.

37      En troisième lieu, s’agissant du risque de confusion, il convient de rappeler qu’il existe un risque de confusion lorsque, cumulativement, le degré de similitude des marques en cause et le degré de similitude des produits ou des services désignés par ces marques sont suffisamment élevés (arrêt MATRATZEN, point 20 supra, point 45).

38      En l’espèce, il y a lieu de relever, d’une part, que les produits en cause sont identiques et, d’autre part, que les signes en conflit sont globalement similaires. En particulier, il y a lieu de rappeler que lesdits signes présentent un certain degré de similitude sur le plan visuel, qui peut être qualifié à tout le moins de moyen, et un degré élevé de similitude sur le plan phonétique. Par ailleurs, il convient de rappeler que le terme « aloha », qui constitue l’élément dominant de la marque demandée, reproduit intégralement la marque antérieure en y ajoutant simplement une lettre « h » qui n’est pas susceptible d’influer suffisamment sur le public pertinent.

39      Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit.

40      Cette conclusion ne saurait être infirmée par les arguments de la requérante.

41      En particulier, s’agissant du fait que le public pertinent prêterait plus d’attention à l’élément figuratif représentant deux fleurs d’hibiscus, il y a lieu de rejeter cette assertion pour les mêmes raisons que celles mentionnées au point 31 ci-dessus.

42      S’agissant du fait qu’une éventuelle similitude phonétique des signes en conflit serait secondaire par rapport à la similitude visuelle, il suffit de relever que cet argument de la requérante n’est pas susceptible de remettre en cause le fait que les signes en conflit présentent un certain degré de similitude sur le plan visuel, qui peut être qualifié à tout le moins de moyen (point 33 ci-dessus), ni que lesdits signes sont globalement similaires (point 36 ci-dessus). En outre, s’agissant de signes portant sur des produits semblables à ceux de la présente affaire, la jurisprudence a admis que la similitude phonétique revêtait une certaine importance – même si elle n’est pas nécessairement prépondérante – dans la mesure où lesdits produits sont aussi consommés sur commande orale [arrêt du Tribunal du 15 janvier 2003, Mystery Drinks/OHMI – Karlsberg Brauerei (MYSTERY), T‑99/01, Rec. p. II‑43, point 48 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 janvier 2012, Hell Energy Magyarország/OHMI – Hansa Mineralbrunnen (HELL), T‑522/10, non publié au Recueil, point 69].

43      Pour ce qui est, enfin, des décisions nationales invoquées par la requérante, faisant référence à d’autres formules de salutation qui auraient été considérées comme non susceptibles de protection, la chambre de recours a correctement rappelé, en substance, que le régime communautaire des marques est autonome et que, dès lors, l’OHMI n’est pas lié par les enregistrements nationaux [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 30 juin 2004, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI (Mehr für Ihr Geld), T‑281/02, Rec. p. II‑1915, point 35, et du 12 décembre 2007, DeTeMedien/OHMI (suchen.de), T‑117/06, non publié au Recueil, point 45, et la jurisprudence citée]. S’agissant de la pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI, également invoquée par la requérante, il convient de rappeler que les décisions que les chambres de recours sont conduites à prendre en vertu du règlement n° 207/2009 concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, comme l’a indiqué à juste titre la chambre de recours, la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base de ce règlement, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure à celles‑ci [arrêts de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 65, et du Tribunal du 2 mai 2012, Universal Display/OHMI (UniversalPHOLED), T‑435/11, non publié au Recueil, point 37]. Par ailleurs, à supposer que, par ses arguments, la requérante invoque, en fait, une violation du principe d’égalité de traitement, il y a lieu de rappeler que le respect de ce principe doit se concilier avec le respect du principe de légalité (arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, Rec. p. I‑1541, point 75). Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet, et avoir lieu dans chaque cas concret (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 77). Or, pour les motifs qui précèdent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les conditions prévues par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 étaient, en l’espèce, réunies. Il s’ensuit que la requérante ne saurait utilement invoquer, aux fins d’infirmer la conclusion à laquelle a abouti la chambre de recours dans la décision attaquée, des décisions antérieures de l’OHMI (voir, en ce sens, arrêts Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, points 78 et 79, et UniversalPHOLED, précité, point 39). En outre, il convient de souligner que les décisions de l’OHMI invoquées par la requérante renvoyaient à des signes différents de ceux de la présente affaire.

44      Pour l’ensemble de ces motifs, il y a lieu de rejeter le moyen unique soulevé par la requérante et, partant, le recours dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité du chef de conclusions de la requérante visant à demander au Tribunal de rejeter l’opposition de l’intervenante [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 janvier 2010, Nokia/OHMI – Medion (LIFE BLOG), T‑460/07, Rec. p. II‑89, point 74].

 Sur les dépens

45      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Warsteiner Brauerei Haus Cramer KG est condamnée aux dépens.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 juillet 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.