Language of document : ECLI:EU:T:2019:767

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

24 octobre 2019 (*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure de nullité – Dessin ou modèle communautaire enregistré représentant un patch médical – Divulgation des dessins ou modèles antérieurs – Motif de nullité – Caractère individuel – Utilisateur averti – Degré de liberté du créateur – Impression globale différente – Article 6 et article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 6/2002 »

Dans l’affaire T‑560/18,

Atos Medical GmbH, établie à Troisdorf (Allemagne), représentée par Mes K. Middelhoff, G. Schoenen et S. Biermann, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Andreas Fahl Medizintechnik-Vertrieb GmbH, établie à Cologne (Allemagne), représentée par Me F. Kramer, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l’EUIPO du 29 juin 2018 (affaire R 2216/2016-3), relative à une procédure de nullité entre Atos Medical et Andreas Fahl Medizintechnik-Vertrieb,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni (rapporteur), président, L. Madise et R. da Silva Passos, juges,

greffier : M me R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 septembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 7 décembre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 29 novembre 2018,

vu la décision du 6 juin 2019 portant jonction des affaires T‑559/18 et T‑560/18 aux fins de la phase orale de la procédure,

à la suite de l’audience du 11 juillet 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 13 août 2012, l’intervenante, Andreas Fahl Medizintechnik-Vertrieb GmbH, a présenté une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle communautaire à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1).

2        Le dessin ou modèle dont l’enregistrement a été demandé (ci-après le « dessin ou modèle contesté ») est reproduit ci-après :

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3        Le dessin ou modèle contesté a été enregistré sous le numéro 1339246-0004. Son enregistrement a été publié au Bulletin des dessins ou modèles communautaires no 2012/173, du 10 septembre 2012. Le 31 juillet 2017, cet enregistrement a été renouvelé.

4        Le dessin ou modèle contesté est destiné à être appliqué à des patchs médicaux, relevant de la classe 24-04 au sens de l’arrangement de Locarno instituant une classification internationale pour les dessins et modèles industriels, du 8 octobre 1968, tel que modifié.

5        Le 11 avril 2016, la requérante, Atos Medical GmbH, a introduit auprès de l’EUIPO une demande en nullité du dessin ou modèle contesté au titre de l’article 52 du règlement no 6/2002. Le motif invoqué au soutien de la demande en nullité était celui visé à l’article 25, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

6        Dans sa demande en nullité, la requérante a fait valoir que le dessin ou modèle contesté ne remplissait pas les conditions de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002, étant donné qu’il serait dépourvu de nouveauté et de caractère individuel au sens des articles 5 et 6 dudit règlement.

7        À l’appui de sa demande en nullité, la requérante a produit les documents suivants :

–        un dessin technique pour « adesive disc, flexiderm, oval » comportant l’indication « approved by – date 950407 » (approuvé par – date 950407) (ci-après le « dessin AS 1 »), représenté ci-après :

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–        un dessin technique pour « adhesive disc, flexiderm, oval » comportant l’indication « approved by – date 980414 » (approuvé par – date 980414) (ci-après le « dessin AS 2 »),  représenté ci-après :

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–        un dessin technique pour « adhesive disc, flexiderm, oval » comportant l’indication « approved by – date 000510 » (approuvé par – date 000510) (ci-après le « dessin AS 4 »),  représenté ci-après :

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–        un dessin technique pour « adhesive disc, flexiderm, oval » comportant l’indication « released by – date 2008-06-23 » (divulgué par – date 2008-06-23) (ci-après le « dessin AS 5 »), représenté ci-après :

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–        un dessin technique pour « adhesive disc, OptiDerm, oval » comportant l’indication « released by – date 2008-06-23 » (divulgué par – date 2008-06-23) (ci-après le « dessin AS 6 »), représenté ci-après :

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–        une déclaration sous serment du « Vice President Development & Operations » (vice-président développement et opérations) de la société Atos Medical AB, établie en Suède (ci-après la « déclaration sous serment »), selon laquelle cette dernière a notamment fabriqué et mis sur le marché depuis 2000 le patch de trachéotomie représenté ci-après :

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–        un rapport relatif à la demande de brevet allemand n° DE 10 2010 048 316 A 1 du 19 avril 2012, comportant, notamment, les représentations suivantes (ci-après le « dessin AS 7 ») :

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8        Par décision du 14 novembre 2016, la division d’annulation a déclaré nul le dessin ou modèle contesté, au motif que ce dernier, bien qu’il remplissait le critère de nouveauté, était dépourvu de caractère individuel au regard du dessin AS 7.

9        Le 30 novembre 2016, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 55 à 60 du règlement no 6/2002, contre la décision de la division d’annulation.

10      Devant la chambre de recours, la requérante a produit, en indiquant en tant que références « affaire R 2215/2016-3 » et « dessin ou modèle contesté : 001339246-0004 », des copies de deux catalogues de produits des années 2002/2003 et 2005, contenant, notamment, sous les dénominations « OptiDerm » et « FlexiDerm », les reproductions suivantes :

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11      Par décision du 29 juin 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation et rejeté la demande en nullité.

12      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que seuls les dessins AS 4 et AS 7 devaient être considérés comme ayant été divulgués et pouvaient, par suite, être pris en compte pour l’examen du caractère individuel du dessin ou modèle contesté (point 33 de la décision attaquée). Elle a estimé que la liberté du créateur était limitée pour les produits concernés, à savoir des patchs de trachéotomie (point 36 de la décision attaquée). Elle a considéré que, compte tenu des différences entre le dessin ou modèle contesté et chacun des dessins ou modèles antérieurs ayant été divulgués, l’impression globale produite par les dessins ou modèles en conflit était différente pour un utilisateur averti (points 44 à 49 de la décision attaquée). Elle a conclu que, contrairement à ce qu’avait estimé la division d’annulation, les dessins ou modèles antérieurs ne s’opposaient pas au caractère individuel du dessin ou modèle contesté (point 50 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler le dessin ou modèle contesté ;

–        condamner, d’une part, l’EUIPO à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux de la requérante et, d’autre part, l’intervenante à supporter ses propres dépens.

14      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      La requérante soulève un moyen unique tiré de ce que le dessin ou modèle contesté est dépourvu de nouveauté et de caractère individuel au sens des articles 5 et 6 du règlement no 6/2002. Au soutien de ce moyen, elle développe une argumentation unique relative, d’une part, à la divulgation des dessins ou modèles antérieurs et, d’autre part, à la comparaison des impressions globales créées par les dessins ou modèles en conflit.

 Sur la recevabilité des éléments de preuve produits lors de l’audience

16      Lors de l’audience, la requérante a produit des éléments de preuve, à savoir, premièrement, un document en couleurs intitulé « images tirées de la déclaration sous serment […] » comportant un dessin au trait et une photographie et, deuxièmement, un document en couleurs intitulé « rapport relatif à la demande de brevet allemand […] avec des lignes de repère dessinées ».

17      L’EUIPO et l’intervenante contestent la recevabilité de ces éléments de preuve.

18      Le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 61 du règlement no 6/2002, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière de documents présentés pour la première fois devant lui [arrêts du 13 novembre 2012, Antrax It/OHMI – THC (Radiateurs de chauffage), T‑83/11 et T‑84/11, EU:T:2012:592, point 28, et du 27 février 2018, Gramberg/EUIPO – Mahdavi Sabet (Étui pour téléphone portable), T‑166/15, EU:T:2018:100, point 17].

19      En outre, aux termes de l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, les preuves et les offres de preuve sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires. Aux termes de l’article 85, paragraphe 3, dudit règlement, « à titre exceptionnel, les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure […], à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié ».

20      Il convient de relever que, lorsqu’elle a adopté la décision attaquée, la chambre de recours ne disposait pas des éléments de preuve mentionnés au point 16 ci-dessus. En particulier, les documents produits lors de l’audience ne correspondent pas, compte tenu notamment de leur lisibilité et des couleurs utilisées, à la déclaration sous serment et au dessin AS 7 inclus dans le dossier de l’EUIPO. En outre, les éléments de preuve en cause ne figuraient pas dans la requête ou ses annexes et ont été présentés pour la première fois lors de l’audience devant le Tribunal, sans que la requérante n’avance d’argument tendant à justifier le retard de présentation de ceux-ci.

21      Par conséquent, les éléments de preuve produits lors de l’audience doivent être écartés comme irrecevables, au regard tant de la jurisprudence rappelée au point 18 ci-dessus que des dispositions de l’article 85 du règlement de procédure.

 Sur la divulgation des dessins ou modèles antérieurs

22      La requérante fait valoir qu’elle a fabriqué depuis 1996 un patch de trachéotomie et l’a commercialisé dans l’Union européenne. Elle se prévaut à cet égard des pièces visées au point 7 ci-dessus, ainsi que des catalogues de produits visés au point 10 ci-dessus. Elle expose que les dessins AS 1 et AS 2 satisfont aux exigences de l’article 7 du règlement no 6/2002, mais que cela est sans importance, puisque la seule finalité de ces dessins est de montrer le type de produits qu’elle a fabriqués, conformément auxdits dessins techniques, avant de les commercialiser. Elle indique que le fait que la déclaration sous serment émane d’une personne de son entourage ne peut limiter la valeur probante de ladite déclaration, laquelle contient un dessin d’un patch de forme ovale muni d’une partie permettant son retrait, ainsi qu’une photographie d’un produit commercialisé depuis 2000 présentant ces mêmes caractéristiques. Elle ajoute que lesdits catalogues prouvent à eux seuls la commercialisation, depuis 1996, d’un patch présentant les caractéristiques du dessin ou modèle contesté. Elle conclut que le patch qu’elle commercialise à tout le moins depuis 2002 fait partie du patrimoine des dessins ou modèles déjà connus.

23      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante. Ils font valoir en substance que la chambre de recours a estimé à juste titre que la divulgation des dessins AS 1, AS 2, AS 5 et AS 6 n’était pas démontrée.

24      L’intervenante estime en outre que, contrairement à ce qu’a relevé la chambre de recours, seule la divulgation du dessin AS 7 est établie. Elle fait valoir également que les catalogues de produits n’ont été transmis par la requérante que dans le cadre de la procédure de nullité parallèle no 2215/2016-3, mais pas dans le cadre de la procédure de nullité antérieure no 2216/2016-3 et qu’elle n’a pas eu l’occasion de présenter des observations sur ces catalogues devant ladite chambre. Au surplus, cette chambre aurait dû rejeter comme tardifs lesdits catalogues, dans la mesure où ces derniers ont été produits par la requérante uniquement au cours de la procédure devant elle.

25      L’article 6 du règlement no 6/2002, intitulé « Caractère individuel », dispose :

« 1. Un dessin ou modèle est considéré comme présentant un caractère individuel si l’impression globale qu’il produit sur l’utilisateur averti diffère de celle que produit sur un tel utilisateur tout dessin ou modèle qui a été divulgué au public :

a) dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire non enregistré, avant la date à laquelle le dessin ou modèle pour lequel la protection est revendiquée a été divulgué au public pour la première fois ;

b) dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité.

2. Pour apprécier le caractère individuel, il est tenu compte du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle. »

26      Selon l’article 7 du règlement no 6/2002, aux fins de l’application des articles 5 et 6 dudit règlement, un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s’il a été publié à la suite de l’enregistrement ou autrement, ou exposé, utilisé dans le commerce ou rendu public de toute autre manière, avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement, sauf si ces faits, dans la pratique normale des affaires, ne pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur concerné opérant dans l’Union. Toutefois, toujours selon l’article 7 de ce règlement, le dessin ou modèle n’est pas réputé avoir été divulgué au public s’il a seulement été divulgué à un tiers sous des conditions explicites ou implicites de secret.

27      Le règlement (CE) no 2245/2002 de la Commission, du 21 octobre 2002, portant modalités d’application du règlement no 6/2002 (JO 2002, L 341, p. 28), ne contient aucune précision s’agissant des preuves qui doivent être fournies en matière de divulgation du dessin ou modèle antérieur par le demandeur en nullité. Plus particulièrement, l’article 28, paragraphe 1, sous b), v), du règlement no 2245/2002 se borne à prévoir que, lorsque la demande en nullité est fondée, notamment, sur l’absence de caractère individuel du dessin ou modèle communautaire pour lequel la protection est demandée, elle doit comporter l’indication et la reproduction du dessin ou modèle du demandeur en nullité susceptible de faire obstacle au caractère individuel du dessin ou modèle communautaire pour lequel la protection est demandée ainsi que des documents prouvant la précédente divulgation du dessin ou modèle antérieur. Par ailleurs, ni le règlement no 6/2002 ni le règlement no 2245/2002 ne spécifient une forme obligatoire pour les éléments de preuve qui doivent être apportés par le demandeur en nullité pour justifier de la divulgation de son dessin ou modèle avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement du dessin ou modèle pour lequel la protection est demandée. Ainsi, l’article 28, paragraphe 1, sous b), v) et vi), du règlement no 2245/2002 se limite à exiger que la demande en nullité contienne « les documents prouvant l’existence [du dessin ou modèle antérieur] » ainsi que « les faits, preuves et observations présentés à [son] appui ». De même, l’article 65, paragraphe 1, du règlement no 6/2002 ne prévoit qu’une liste non exhaustive de mesures d’instruction possibles dans les procédures devant l’EUIPO. Il s’ensuit que le demandeur en nullité est libre du choix de la preuve qu’il juge utile de présenter à l’EUIPO pour appuyer sa demande en nullité [voir arrêt du 17 mai 2018, Basil/EUIPO – Artex (Paniers spéciaux pour cycles), T‑760/16, EU:T:2018:277, point 41 et jurisprudence citée].

28      Par ailleurs, la divulgation d’un dessin ou modèle antérieur ne peut pas être démontrée par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une divulgation effective du dessin ou modèle antérieur sur le marché. En outre, les éléments de preuve fournis par le demandeur en nullité doivent être appréciés les uns par rapport aux autres. En effet, si certains de ces éléments peuvent être insuffisants à eux seuls pour démontrer la divulgation d’un dessin ou modèle antérieur, il n’en demeure pas moins que, lorsqu’ils sont associés ou lus conjointement avec d’autres documents ou informations, ils peuvent contribuer à former la preuve de la divulgation. Enfin, pour apprécier la valeur probante d’un document, il convient de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui y est contenue. Il faut tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration et de son destinataire, ainsi que se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable (voir arrêt du 17 mai 2018, Paniers spéciaux pour cycles, T‑760/16, EU:T:2018:277, point 42 et jurisprudence citée).

29      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que seule la divulgation des dessins AS 4 et AS 7 était établie.

30      En ce qui concerne le dessin AS 7, la chambre de recours a estimé que le rapport relatif à la demande de brevet allemand, publié par le Deutsches Patent- und Markenamt (Office allemand des brevets et des marques) le 19 avril 2012, établissait à lui seul la divulgation de ce dessin qui y est reproduit (point 22 de la décision attaquée). Cette conclusion, qui n’est d’ailleurs pas contestée par les parties, doit être entérinée.

31      En ce qui concerne le dessin AS 4, la chambre de recours a considéré à juste titre, contrairement à ce que soutient l’intervenante, que la divulgation de ce dessin était démontrée par une analyse globale des pièces produites par la requérante, à savoir le dessin technique en cause, la déclaration sous serment et les catalogues de produits. En effet, ainsi que ladite chambre l’a relevé de façon pertinente, d’une part, la déclaration sous serment mentionnait la fabrication et la commercialisation, « depuis l’année 2000 », d’un patch de trachéotomie et comportait un dessin au trait correspondant au dessin AS 4, daté de cette même année, et, d’autre part, les reproductions incluses dans les catalogues de produits postérieurs à l’année 2000 correspondaient au dessin AS 4 (points 25 à 30 de la décision attaquée).

32      À cet égard, il convient d’ajouter que la chambre de recours a pu, en exerçant son large pouvoir d’appréciation, tenir compte des catalogues de produits, alors qu’ils avaient été présentés après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation [voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2017, Gamet/EUIPO – « Metal-Bud II » Robert Gubała (Poignée de porte), T‑306/16, non publié, EU:T:2017:466, point 15 et jurisprudence citée]. En outre, la circonstance que l’intervenante n’a pas pu, devant la chambre de recours, présenter ses observations sur ces catalogues, lesquels avaient pourtant bien été produits dans l’affaire R 2216/2016-3, ne remet pas en cause l’appréciation de ladite chambre sur la divulgation du dessin AS 4. D’ailleurs, même à supposer que l’intervenante ait pu prendre position sur ces catalogues, ainsi qu’elle l’a fait dans l’autre affaire de procédure en nullité R 2215/2016-3, cette chambre aurait également conclu à la divulgation du dessin AS 4, comme cela a été le cas dans cette dernière affaire.

33      En ce qui concerne les dessins AS 1, AS 2, AS 5 et AS 6, la chambre de recours a estimé, en revanche, que les documents produits par la requérante n’étaient pas suffisants pour établir leur divulgation. Elle a considéré que, en l’absence de documents complémentaires, les dessins techniques seuls n’étaient pas suffisants pour prouver une divulgation au sens de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 6/2002. Elle a estimé que la déclaration sous serment avait une valeur limitée si elle n’était pas corroborée par d’autres documents, et qu’elle n’était, en outre, pas claire. Elle a souligné également que les catalogues de produits ne pouvaient pas prouver la divulgation des dessins AS 1, AS 2, AS 5 et AS 6 (points 24 à 32 de la décision attaquée).

34      L’argumentation de la requérante ne permet pas de remettre en cause les conclusions de la chambre de recours rappelées au point 33 ci-dessus.

35      En effet, en premier lieu, l’article 6 du règlement no 6/2002 doit être interprété en ce sens que, pour qu’un dessin ou modèle puisse être considéré comme présentant un caractère individuel, l’impression globale que ce dessin ou modèle produit sur l’utilisateur averti doit être différente de celle produite sur un tel utilisateur non pas par une combinaison d’éléments isolés, tirés de plusieurs dessins ou modèles antérieurs, mais par un ou plusieurs dessins ou modèles antérieurs, pris individuellement (arrêt du 19 juin 2014, Karen Millen Fashions, C‑345/13, EU:C:2014:2013, point 35).

36      Partant, pour autant que la requérante fait référence, en ce qui concerne la divulgation des dessins ou modèles antérieurs, à un patch de trachéotomie qu’elle aurait commercialisé depuis 1996 ou, à tout le moins, depuis 2002, à un patch présentant les caractéristiques du dessin ou modèle contesté ou à un patch de forme ovale, sans identifier précisément et individuellement le dessin ou modèle antérieur dont elle entendrait démontrer la divulgation, cette argumentation doit être écartée comme insuffisamment étayée.

37      En deuxième lieu, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les dessins techniques étaient généralement destinés à l’usage interne et n’étaient pas publiés et que, étant donné qu’un dessin technique servait uniquement à préparer la production, la simple existence dudit dessin ne permettait pas de savoir si et à quel moment un produit correspondant au dessin en cause avait réellement été fabriqué et commercialisé. C’est donc à bon droit qu’elle a considéré que, en l’absence de documents complémentaires, la seule production de dessins techniques par la requérante, en particulier des dessins AS 1 et AS 2, n’était pas suffisante pour prouver une divulgation desdits dessins au sens de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 6/2002.

38      En troisième lieu, la chambre de recours a pu relever, sans commettre l’erreur que lui reproche la requérante, que la déclaration sous serment provenait d’une personne de l’entourage de cette dernière et en déduire que la valeur probante de cette pièce était limitée, si elle n’était pas corroborée par d’autres éléments de preuve.

39      Il convient en effet de rappeler que les énonciations d’une déclaration écrite faite sous serment par une personne liée, de quelque manière que ce soit, à la société qui l’invoque doivent, en tout état de cause, être corroborées par d’autres éléments de preuve [arrêts du 18 novembre 2015, Liu/OHMI – DSN Marketing (Étui d’ordinateur portable), T‑813/14, non publié, EU:T:2015:868, point 29, et du 13 décembre 2017, Delfin Wellness/EUIPO – Laher (Cabines à infrarouge et de sauna), T‑114/16, non publié, EU:T:2017:899, point 91].

40      Par ailleurs, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la déclaration sous serment manque, à certains égards, de clarté. En particulier, la qualité de la photo insérée dans ladite déclaration au sujet du patch qui aurait été produit à partir de 2000 ne permet pas de distinguer nettement les détails dudit produit ni d’éventuelles indications d’ordre temporel. De plus, le dessin au trait figurant dans la déclaration en cause au sujet de ce patch correspond aussi bien au dessin AS 4 daté de 2000 qu’aux dessins AS 5 et AS 6, datés de 2008, mais ne correspond pas aux dessins AS 1 et AS 2 datés respectivement de 1995 et de 1998.

41      En quatrième lieu, la chambre de recours a considéré que  les reproductions incluses dans les catalogues de produits ne pouvaient prouver ni la divulgation des dessins AS 1 et AS 2, car ces reproductions ne correspondaient pas auxdits dessins, ni la divulgation des dessins AS 5 et AS 6, car des catalogues de produits des années 2002/2003 et 2005 ne pouvaient pas prouver l’existence de produits qui n’auraient été conçus qu’en 2008 (point 32 de la décision attaquée). En particulier, elle a précisé que, contrairement à ce que la requérante affirmait, les reproductions de produits incluses dans ces catalogues ne correspondaient pas au dessin AS 1, dans la mesure où ces reproductions montraient une aide pour décoller le patch sous la forme d’une saillie (ou languette) rectangulaire, qui était absente du dessin AS 1 (point 29 de la décision attaquée).

42      La requérante fait valoir que les catalogues de produits prouvent, à eux seuls, la commercialisation, dès 1996, ou, à tout le moins, dès 2002, d’un patch de trachéotomie présentant toutes les caractéristiques du dessin ou modèle contesté. À cet égard, elle indique que le catalogue de produits des années 2002/2003 comporte, à la page 11, une illustration correspondant au dessin AS 1 et que « la forme ovale » est visible dès les pages 13 et 14 du catalogue de l’année 2005.

43      Toutefois, l’argumentation de la requérante doit être écartée. En effet, le catalogue de produits des années 2002/2003 ne comporte pas, à la page 11, une illustration suffisamment précise et complète permettant d’identifier le dessin AS 1. Par ailleurs, pour autant que la requérante fait référence à un patch de trachéotomie présentant toutes les caractéristiques du dessin ou modèle contesté, commercialisé dès 1996 ou, à tout le moins, dès 2002, ou à une « forme ovale », sans identifier précisément et individuellement le dessin ou modèle antérieur dont elle entendrait démontrer la divulgation, cette argumentation doit être écartée comme insuffisamment étayée, ainsi qu’il a été dit au point 36 ci-dessus.

44      Il résulte de ce qui précède que, compte tenu des pièces, considérées dans leur ensemble, produites par la requérante, la chambre de recours a considéré à bon droit que seule la divulgation des dessins AS 4 et AS 7 était établie.

 Sur le caractère individuel

45      Il ressort du libellé de l’article 6, paragraphe 1, sous b), du règlement no 6/2002 que le caractère individuel doit être apprécié, dans le cas d’un dessin ou modèle communautaire enregistré, au regard de l’impression globale produite sur l’utilisateur averti. Cette dernière doit être différente de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué au public avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement. L’article 6, paragraphe 2, dudit règlement précise qu’il convient de tenir compte, dans l’appréciation du caractère individuel, du degré de liberté du créateur dans l’élaboration de ce dessin ou modèle.

 Sur le degré de liberté du créateur

46      Le degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle est défini à partir, notamment, des contraintes liées aux caractéristiques imposées par la fonction technique du produit ou d’un élément du produit, ou encore des prescriptions légales applicables au produit. Ces contraintes conduisent à une normalisation de certaines caractéristiques, devenant alors communes aux dessins ou modèles appliqués au produit concerné [arrêt du 18 mars 2010, Grupo Promer Mon Graphic/OHMI – PepsiCo (Représentation d’un support promotionnel circulaire), T‑9/07, EU:T:2010:96, point 67].

47      Partant, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est grande, moins des différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. À l’inverse, plus la liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle est restreinte, plus les différences mineures entre les dessins ou modèles en conflit suffisent à produire une impression globale différente sur l’utilisateur averti. Ainsi, un degré élevé de liberté du créateur dans l’élaboration d’un dessin ou modèle renforce la conclusion selon laquelle les dessins ou modèles ne présentant pas de différences significatives produisent une même impression globale sur l’utilisateur averti [voir arrêt du 18 juillet 2017, Chanel/EUIPO – Jing Zhou et Golden Rose 999 (Ornement), T‑57/16, EU:T:2017:517, point 30 et jurisprudence citée].

48      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 36 de la décision attaquée, que la liberté du créateur était limitée en ce qui concerne un patch de trachéotomie. Elle a indiqué qu’un tel patch servait, après une trachéotomie, à couvrir le passage d’air artificiellement créé par incision de la trachée et à fixer un accessoire, à savoir un échangeur de chaleur et d’humidité ou une valve de phonation. Elle a souligné que la forme ronde de l’ouverture et du support était conditionnée par la taille et la forme de l’échangeur de chaleur et d’humidité ou de la valve de phonation. Elle a ajouté que la taille et la forme du patch devaient garantir la couverture de l’incision de trachéotomie, la fixation sûre de l’accessoire ainsi qu’un certain confort et que, par suite, une forme ronde à ovale était pertinente afin d’éviter des zones de collage inutiles. Elle a conclu que la liberté du créateur était limitée à l’emplacement de l’ouverture ronde à l’intérieur du patch et à la forme concrète de ce dernier.

49      Ces considérations, qui ne sont d’ailleurs pas contestées par la requérante, doivent être entérinées.

 Sur l’utilisateur averti

50      En ce qui concerne l’interprétation de la notion d’utilisateur averti, il y a lieu de considérer que la qualité d’« utilisateur » implique que la personne concernée utilise le produit dans lequel est incorporé le dessin ou modèle en conformité avec la finalité de l’usage de ce même produit [arrêt du 22 juin 2010, Shenzhen Taiden/OHMI – Bosch Security Systems (Équipement de communication), T‑153/08, EU:T:2010:248, point 46]. Le qualificatif « averti » suggère en outre que, sans être un concepteur ou un expert technique, l’utilisateur connaît les différents dessins ou modèles existant dans le secteur concerné, dispose d’un certain degré de connaissances quant aux éléments que ces dessins ou modèles comportent normalement et, du fait de son intérêt pour les produits concernés, fait preuve d’un degré d’attention relativement élevé lorsqu’il les utilise (arrêt du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, EU:C:2011:679, point 59).

51      La notion d’utilisateur averti doit être comprise comme une notion intermédiaire entre celle de consommateur moyen, applicable en matière de marques, auquel il n’est demandé aucune connaissance spécifique et qui en général n’effectue pas de rapprochement direct entre les marques en conflit, et celle d’homme de l’art, expert doté de compétences techniques approfondies. Ainsi, la notion d’utilisateur averti peut s’entendre comme désignant un utilisateur doté non d’une attention moyenne, mais d’une vigilance particulière, que ce soit en raison de son expérience personnelle ou de sa connaissance étendue du secteur considéré (arrêt du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, EU:C:2011:679, point 53).

52      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 38 de la décision attaquée, que l’utilisateur averti était familiarisé avec les caractéristiques des patchs de trachéotomie et les différents dessins ou modèles existant dans ce domaine. Elle a précisé que l’utilisateur averti savait que ces patchs servaient à la couverture de l’incision de trachéotomie et à la fixation d’un accessoire et que la liberté du créateur était à cet égard limitée.

53      Ces considérations, qui ne sont d’ailleurs pas contestées par la requérante, doivent être approuvées.

 Sur la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit

54      La requérante fait valoir que l’impression globale produite par les dessins ou modèles comparés n’est pas différente. Elle expose que, s’agissant d’un patch de trachéotomie, la forme est indifférente à l’utilisateur averti puisqu’elle n’est liée à aucune fonction. L’attention de l’utilisateur averti irait en priorité à la fonctionnalité du patch et, en particulier, à sa durabilité, son pouvoir adhésif et sa facilité de décollement. Lors de l’examen visuel, les détails discrets de la conception du patch n’auraient, pour l’utilisateur averti, qu’une importance secondaire.

55      La requérante indique par ailleurs que le dessin ou modèle contesté ne se distingue pas des dessins ou modèles antérieurs, notamment des patchs qu’elle a elle-même fabriqués. Elle soutient qu’elle produit depuis 1996 des patchs ayant les caractéristiques du dessin ou modèle contesté, en particulier s’agissant des dessins AS 4 et AS 7. Selon elle, le dessin ou modèle contesté ne se distingue des dessins ou modèles antérieurs que par la forme légèrement plus étirée du segment comportant l’excroissance ainsi que par le fait que ledit segment a un rayon légèrement plus grand que celui de l’autre segment. Elle estime que de telles différences constituent des éléments négligeables ne pouvant pas justifier la nouveauté ou le caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

56      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

57      Conformément à la jurisprudence, le caractère individuel d’un dessin ou modèle résulte d’une impression globale de différence, ou d’absence de « déjà vu », du point de vue de l’utilisateur averti, par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, sans tenir compte des différences demeurant insuffisamment marquées pour affecter ladite impression globale, bien qu’excédant des détails insignifiants, mais en ayant égard à des différences suffisamment marquées pour créer des impressions d’ensemble dissemblables (voir arrêt du 17 mai 2018, Paniers spéciaux pour cycles, T‑760/16, EU:T:2018:277, point 77 et jurisprudence citée).

58      Lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle par rapport à toute antériorité au sein du patrimoine des dessins ou modèles, il convient de tenir compte de la nature du produit auquel le dessin ou modèle s’applique ou dans lequel celui-ci est incorporé et, notamment, du secteur industriel dont il relève (voir considérant 14 du règlement no 6/2002), du degré de liberté du créateur dans l’élaboration du dessin ou modèle, d’une éventuelle saturation de l’état de l’art, laquelle peut être de nature à rendre l’utilisateur averti plus sensible aux différences entre les dessins ou modèles comparés, ainsi que de la manière dont le produit en cause est utilisé, en particulier en fonction des manipulations qu’il subit normalement à cette occasion (voir arrêt du 17 mai 2018, Paniers spéciaux pour cycles, T‑760/16, EU:T:2018:277, point 78 et jurisprudence citée).

59      Enfin, lors de l’appréciation du caractère individuel d’un dessin ou modèle, il convient également de tenir compte du point de vue de l’utilisateur averti. Selon une jurisprudence constante, l’utilisateur averti est une personne dotée d’une vigilance particulière et qui dispose d’une certaine connaissance de l’état de l’art antérieur, c’est-à-dire du patrimoine des dessins ou modèles relatifs au produit en cause qui ont été divulgués à la date du dépôt du dessin ou modèle contesté, ou le cas échéant, à la date de priorité revendiquée (voir arrêt du 17 mai 2018, Paniers spéciaux pour cycles, T‑760/16, EU:T:2018:277, point 79 et jurisprudence citée).

60      En premier lieu, conformément à la jurisprudence rappelée au point 35 ci-dessus, pour autant que la requérante fait référence à des dessins ou modèles antérieurs, notamment aux patchs qu’elle a elle-même fabriqués, sans identifier précisément et individuellement le dessin ou modèle qui serait susceptible de créer une impression globale ne différant pas de celle produite par le dessin ou modèle contesté, cette argumentation doit être écartée comme insuffisamment étayée.

61      En deuxième lieu, il convient de constater que le dessin ou modèle contesté présente les caractéristiques suivantes : premièrement, une forme de base ovale, légèrement asymétrique, dont le côté droit est plus large et plus bombé que le côté gauche, deuxièmement, un support circulaire, sur l’axe longitudinal, décalé vers la gauche et surélevé, troisièmement, deux renflements semi-circulaires légèrement asymétriques, placés au centre sur les bords supérieur et inférieur de la forme de base, et dont les bords extérieurs forment un angle approximativement perpendiculaire avec le bord extérieur de ladite forme et, quatrièmement, une saillie rectangulaire à l’extrémité droite de l’axe longitudinal.

62      Le dessin AS 4 présente quant à lui les caractéristiques suivantes : premièrement, une forme de base quasiment circulaire, légèrement asymétrique, dont le côté droit est plus bombé que le côté gauche, deuxièmement, une ouverture circulaire située quasiment au centre de la forme de base, troisièmement, deux renflements semi-circulaires au-dessus et au-dessous de l’ouverture et, quatrièmement, une saillie rectangulaire à l’extrémité droite de l’axe longitudinal.

63      Enfin, le dessin AS 7 présente les caractéristiques suivantes : premièrement, une forme de base quasiment circulaire avec deux renflements semi-circulaires sur les bords latéraux de la forme de base, deuxièmement, un support circulaire surélevé, occupant une position presque centrale et, troisièmement, une petite saillie semi-circulaire sur le bord inférieur de la forme de base.

64      En troisième lieu, il y a lieu de relever que le dessin ou modèle contesté et le dessin AS 4 partagent les caractéristiques suivantes : une forme de base légèrement asymétrique, des renflements latéraux semi-circulaires, une ouverture circulaire et une saillie rectangulaire à l’extrémité droite. Toutefois, ainsi que l’a constaté à juste titre la chambre de recours, il existe des différences en ce qui concerne la forme des dessins ou modèles en conflit, celle du dessin ou modèle contesté étant ovale et clairement plus bombée que celle du dessin AS 4. La disposition de l’ouverture circulaire est également différente, puisque celle du dessin ou modèle contesté est clairement décalée vers la gauche par rapport au centre de l’axe longitudinal et aux renflements alors que celle du dessin AS 4 occupe une position quasiment centrale. De plus, la forme des renflements est également différente, dans la mesure où, dans le cas du dessin ou modèle contesté, ces renflements forment un angle approximativement perpendiculaire avec le bord extérieur de la forme de base et donnent l’impression de se détacher de ladite forme, tandis que, dans le cas du dessin AS 4, la transition entre le bord extérieur et chacun des renflements est fluide, de sorte qu’ils semblent faire partie de la forme de base.

65      Dans ce contexte, l’impression globale suscitée par le dessin ou modèle contesté est différente de celle produite par le dessin AS 4, ainsi que l’a constaté à bon droit la chambre de recours. Compte tenu du degré restreint de liberté du créateur, l’utilisateur averti percevra facilement les différences, suffisamment marquées, mentionnées au point 64 ci-dessus, quand bien même il constaterait l’existence de caractéristiques communes à ces dessins ou modèles. Ainsi, la circonstance que les dessins ou modèles en conflit présentent une forme de base ronde ou ovale au sens large ne permet pas de conclure qu’ils produisent une même impression globale, s’agissant d’un produit pour lequel une telle forme est pertinente pour éviter des zones de collage inutiles, ainsi qu’il a été dit au point 48 ci-dessus. De la même façon, l’utilisateur averti ne se focalisera pas sur la concordance entre les modèles en conflit s’agissant de la forme ronde de l’ouverture, laquelle résulte de contraintes imposées par la fonction technique du produit, ou s’agissant de la saillie rectangulaire, laquelle constitue une aide au décollement et remplit donc également une fonction technique.

66      À cet égard, l’argument de la requérante selon lequel les différences de forme des dessins ou modèles en conflit sont indifférentes pour l’utilisateur averti, étant donné que la forme n’est pas pertinente au regard de la fonction du produit en cause, doit être écarté. En effet, la chambre de recours a relevé que les incisions de trachéotomie pouvaient avoir des formes et des tailles différentes. Elle en a déduit que l’emplacement de l’ouverture et la forme du patch pouvaient avoir des conséquences sur l’utilisation et le confort du patient, c’est-à-dire sur la question de savoir si le patch couvre correctement l’incision de trachéotomie et permet la fixation sûre de l’accessoire (point 46 de la décision attaquée). Or, aucun élément du dossier ne permet de contredire la décision attaquée à cet égard.

67      En quatrième lieu, l’impression globale suscitée par le dessin ou modèle contesté est également différente de celle produite par le dessin AS 7.

68      En effet, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, le dessin ou modèle contesté se distingue, à tout le moins, du dessin AS 7 par les mêmes différences, suffisamment marquées, que celles décrites au point 64 ci-dessus s’agissant de la comparaison du dessin ou modèle contesté avec le dessin AS 4, à savoir une forme de base ovale et plus bombée, une ouverture circulaire clairement décalée vers la gauche et la forme particulière des renflements. Au surplus, les différences entre le dessin ou modèle contesté et le dessin AS 7, sont plus prononcées encore que celles existant entre le dessin ou modèle contesté et le dessin AS 4, dans la mesure où la forme de base du dessin AS 7 n’est pas clairement asymétrique et ne présente pas de côté droit bombé, contrairement à celle du dessin ou modèle contesté. De plus, le support circulaire figurant dans le dessin AS 7 est clairement plus élevé que dans le cas du dessin ou modèle contesté, ce qui contribue également à une impression globale différente.

69      En cinquième lieu, à titre surabondant, le Tribunal constate que, même à supposer que les dessins AS 1, AS 2, AS 5 et AS 6 puissent être regardés comme ayant été divulgués, ce qui n’est pas le cas ainsi qu’il a été dit au point 44 ci-dessus, la requérante ne se prévaut d’aucun de ces dessins, pris individuellement, dans le cadre de son argumentation relative à la comparaison des impressions globales produites par les dessins ou modèles en conflit. En tout état de cause, l’impression globale suscitée par le dessin ou modèle contesté et celle produite par chacun desdits dessins, pris individuellement, est différente. En effet, le dessin ou modèle contesté se distingue également, à tout le moins, de chacun des dessins en cause par les mêmes différences, suffisamment marquées, décrites au point 64 ci-dessus, lesquelles seront, compte tenu notamment du degré restreint de liberté du créateur, facilement perçues par l’utilisateur averti.

70      Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que les dessins ou modèles antérieurs ne s’opposaient pas au caractère individuel du dessin ou modèle contesté.

71      Il résulte de ce qui précède que le moyen unique doit être écarté, la requérante n’ayant par ailleurs soulevé aucune argumentation spécifique relative à l’article 5 du règlement no 6/2002.

72      Il s’ensuit que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Atos Medical GmbH est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Madise

da Silva Passos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 octobre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.