Language of document : ECLI:EU:F:2008:142

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

13 novembre 2008 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Avis de vacance – Rejet de la candidature du requérant – Réaffectation – Intérêt du service »

Dans l’affaire F‑90/07,

ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,

Amadou Traore, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Rhode-Saint-Genèse (Belgique), représenté par Me É. Boigelot, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme B. Eggers, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme I. Boruta et M. H. Kanninen, juges,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 17 avril 2008,

rend le présent

Arrêt

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 septembre 2007, M. Traore demande l’annulation, premièrement, de la décision du directeur du service extérieur de la direction générale (DG) « Relations extérieures » de la Commission des Communautés européennes, du 19 janvier 2007, portant rejet de sa candidature au poste de chargé d’affaires ad interim de la délégation de la Commission au Togo, deuxièmement, de la décision du directeur de la direction des ressources de l’Office de coopération EuropeAid, du 12 décembre 2006, portant rejet de sa candidature au poste de chef des opérations de la délégation de la Commission en Tanzanie et, troisièmement, des décisions de nomination de MM. M. et S. auxdits postes respectifs, ainsi que la condamnation de la Commission au paiement de dommages et intérêts, évalués à 3 500 euros, pour les préjudices moral et matériel prétendument subis.

 Cadre juridique

2        L’article 4 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») prévoit :

« Toute nomination ou promotion ne peut avoir pour objet que de pourvoir à la vacance d’un emploi dans les conditions prévues au présent statut.

Toute vacance d’emploi dans une institution est portée à la connaissance du personnel de cette institution dès que l’autorité investie du pouvoir de nomination a décidé qu’il y a lieu de pourvoir à cet emploi.

S’il n’est pas possible de pourvoir à cette vacance d’emploi par voie de mutation, de nomination en application de l’article 45 bis ou de promotion, celle-ci est portée à la connaissance du personnel des autres institutions et/ou un concours interne est organisé. »

3        Aux termes de l’article 5 du statut :

« 1. Les emplois relevant du présent statut sont classés, suivant la nature et le niveau des fonctions auxquelles ils correspondent, en un groupe de fonctions des administrateurs (ci-après dénommés ‘AD’) et un groupe de fonctions des assistants (ci-après dénommés ‘AST’).

2. Le groupe de fonctions AD comporte douze grades [de AD 5 à AD 16] correspondant à des fonctions de direction, de conception et d’étude ainsi qu’à des fonctions linguistiques ou scientifiques. […]

3. […]

4. Un tableau descriptif des différents emplois types figure à l’annexe I, section A […] »

4        L’article 7, paragraphe 1, du statut dispose :

« L’autorité investie du pouvoir de nomination affecte, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de son groupe de fonctions correspondant à son grade.

Le fonctionnaire peut demander à être muté à l’intérieur de son institution. »

5        L’article 29, paragraphe 1, du statut est ainsi libellé :

« En vue de pourvoir aux vacances d’emploi dans une institution, l’autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné :

a)      les possibilités de pourvoir l’emploi par voie de :

i)      mutation ou

ii)      nomination conformément à l’article 45 bis ou

iii)      promotion

au sein de l’institution ;

b)      les demandes de transfert de fonctionnaires du même grade d’autres institutions et/ou les possibilités d’organiser un concours interne à l’institution ouvert uniquement aux fonctionnaires et aux agents temporaires visés à l’article 2 du régime applicable aux autres agents des Communautés européennes ;

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. La procédure de concours est déterminée à l’annexe III.

Cette procédure peut être ouverte également en vue de constituer une réserve de recrutement. »

6        Le 23 juin 2000 a été signé à Cotonou (Bénin) l’accord de partenariat entre les membres du groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ci-après les « États ACP »), d’une part, et la Communauté européenne et ses États membres, d’autre part (JO L 317, p. 3, ci-après l’« accord de Cotonou »), dont l’objectif est, selon les termes de son article 1er, premier alinéa, « de promouvoir et d’accélérer le développement économique, culturel et social des États ACP, de contribuer à la paix et à la sécurité et de promouvoir un environnement politique stable et démocratique ». L’article 96 dudit accord régit les consultations entre les parties en cas d’atteinte alléguée aux droits de l’homme et aux principes démocratiques par l’une des parties.

7        La décision 2006/863/CE du Conseil, du 13 novembre 2006, modifiant la décision 2004/793/CE portant conclusion de la procédure de consultation avec la République togolaise, au titre de l’article 96 de l’accord de Cotonou (JO L 335, p. 42), stipule notamment dans son annexe :

« Afin d’appuyer le processus de réformes en cours, l’Union européenne souhaite adapter les mesures appropriées.

Dans ce cadre, les reliquats des 6e et 7e [Fonds européen de développement] seront mis en œuvre selon les objectifs fixés dans les mesures appropriées pour appuyer la réalisation des élections législatives, pour financer une facilité de coopération technique destinée entre autres à soutenir la mise en œuvre des vingt-deux engagements, pour soutenir un programme de réforme de la justice et de sensibilisation aux droits de l’homme, ainsi que pour financer un programme social de travaux à haute intensité de main d’œuvre.

Le cadre électoral ayant été établi et la date des élections étant fixée, il est possible de procéder dès maintenant à la notification du 9e [Fonds européen de développement] et à la mise en œuvre du 9e [Fonds européen de développement] ainsi que du cadre d’obligations mutuelles pour les Fonds Stabex 1995-1999. »

8        La décision de la Commission sur la réforme administrative du service extérieur du 17 décembre 2002 [C (2002) 5370, ci-après la « décision réformant le service extérieur »)] régit notamment les exercices de rotation. Elle prévoit, à son article 4, paragraphe 1, que le comité de direction du service extérieur (ci-après le « CDSE »), composé des directeurs généraux des directions générales ayant en charge les relations extérieures, du directeur général de la DG « Personnel et administration » et d’un représentant du secrétaire général de la Commission, « assure l’unité de gestion du [s]ervice extérieur[ ;] en fixe les grandes orientations et arrête les décisions essentielles à son fonctionnement[ ;] est le garant du respect des principes établis par la présente décision ».

9        La Commission a adopté, le 28 avril 2004, la décision C (2004) 1597, relative au personnel d’encadrement intermédiaire, publiée aux Informations administratives n° 73/2004, du 23 juin 2004 (ci-après la « décision PEI »). Ainsi qu’il ressort de son article 1er, cette décision vise à fixer un cadre juridique précisant les règles internes à la Commission en ce qui concerne, notamment, les procédures décentralisées de sélection et de nomination du personnel d’encadrement intermédiaire ainsi que le rôle et la position des chefs d’unité dans l’organigramme en tant que cadres intermédiaires.

10      L’article 2, paragraphe 1, de la décision PEI définit comme suit les fonctions et le personnel d’encadrement intermédiaire :

« Une fonction d’encadrement intermédiaire se définit suivant deux critères cumulatifs :

–        elle consiste en la direction permanente et continue d’une unité administrative,

–        elle figure dans l’organigramme officiel de la Commission.

Appartient au personnel d’encadrement intermédiaire une personne qui remplit en même temps ces deux critères.

Par conséquent, les fonctions de chef d’unité, chef de délégation […], chef de bureau ou de représentation dans les États membres ainsi que celles de chef adjoint de délégation de niveau AD 13/AD 14 […] sont des fonctions d’encadrement intermédiaire […] et sont couvertes par la présente décision.

Ces fonctions sont pourvues soit aux grades AD 9/AD 12, soit aux grades AD 13/AD 14. »

11      L’article 2, paragraphe 2, de la décision PEI précise :

« Les chefs d’unité adjoints et les chefs de secteur assurent dans certains cas des tâches de gestion (management tasks) déléguées par le chef d’unité. Ils n’apparaissent pas dans l’organigramme officiel de la Commission. Ils ne font pas partie du personnel d’encadrement intermédiaire. »

 Antécédents du litige

12      Le requérant est fonctionnaire de la Commission, de grade AD 12, à la DG « Développement ».

13      Le 13 juin 2006, la Commission a publié l’avis de vacance d’emploi COM/2006/2384 pour le poste de chargé d’affaires ad interim à la délégation de la Commission au Togo (ci-après le « poste de CAF au Togo »), en fixant le niveau de pourvoi de ce poste aux grades AD 9/AD 14. Le requérant a posé sa candidature à ce poste.

14      À la suite des entretiens qui ont eu lieu le 10 octobre 2006 avec cinq des onze candidats qui s’étaient présentés, le panel de sélection, chargé de départager les candidatures au poste de CAF au Togo, a retenu deux candidats autres que le requérant sur une liste restreinte. Dans une note du 10 novembre 2006, le président du panel de sélection a précisé ce qui suit :

« Though not shortlisted, the panel considered that Messrs Traore and [X.] could be considered for the post in the absence of better qualified candidates. » (Bien que ne faisant pas partie de la liste restreinte, le panel a estimé que [les candidatures de] MM. Traore et [X.] pourraient être prises en considération pour le poste en l’absence d’autres candidats mieux qualifiés .) (Traduction libre.)

15      Par note du 22 novembre 2006, l’un des deux candidats retenus par le panel de sélection a été proposé au CDSE pour le poste de CAF au Togo par le directeur général de la DG « Relations extérieures ».

16      Le 19 janvier 2007, le requérant a été informé par le directeur du service extérieur de la DG « Relations extérieures » que sa candidature n’avait pas été retenue à l’issue de la procédure de sélection (ci-après la « décision du 19 janvier 2007 »).

17      À la demande du directeur général de la DG « Développement », qui est membre du CDSE et qui souhaitait un « profil plus opérationnel », compte tenu de la relance de la coopération financière avec le Togo après plusieurs années d’interruption partielle en raison des événements politiques survenus dans ce pays, le choix s’est finalement porté sur M. M., lequel n’avait pas posé sa candidature dans le cadre de la procédure initiée par l’avis de vacance COM/2006/2384. Par décision du 2 mai 2007, ce dernier a été réaffecté, dans l’intérêt du service, au poste de CAF au Togo dans le cadre de l’exercice de rotation de 2007.

18      À la suite d’une question posée par le président de la deuxième chambre du Tribunal, au cours de l’audience du 17 avril 2008 et ainsi qu’il ressort de la décision du 2 mai 2007, il est constant que M. M. a fait l’objet d’une mesure de réaffectation, avec son emploi, au Togo, dans l’intérêt du service, dans le cadre de l’exercice de rotation de 2007, et non pas d’une mutation, au sens propre du terme, comme indiqué dans la réponse à la réclamation en date du 6 juin 2007.

19      Par ailleurs, le 31 août 2006, la Commission avait publié l’avis de vacance d’emploi COM/2006/3207 pour le poste de chef des opérations de la délégation de la Commission en Tanzanie (ci-après le « poste de COP en Tanzanie »), en fixant le niveau de pourvoi de l’emploi au grade AD 9/AD 14. Le requérant a également posé sa candidature à ce poste.

20      Les 18 et 20 octobre 2006, des entretiens ont eu lieu avec treize candidats, dont trois ont été retenus sur une liste restreinte, MM. S., B. et P. Le nom du requérant a également été retenu en vue d’une éventuelle prise en considération de la candidature de l’intéressé pour le cas où aucun des candidats présélectionnés ne pourrait être nommé sur le poste en cause. M. S. a finalement été nommé en novembre 2006, en conservant son grade AD 11.

21      Par courriel du 12 décembre 2006, le directeur de la direction des ressources d’EuropeAid a informé le requérant que sa candidature n’avait pas été retenue.

22      Le 7 février 2007, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre les décisions de rejet de ses candidatures aux postes de CAF au Togo et de COP en Tanzanie ainsi que contre les décisions de nomination de MM. M. et S. à ces postes respectifs.

23      Cette réclamation a été rejetée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), du 6 juin 2007, notifiée le lendemain au requérant.

 Conclusions des parties et procédure

24      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer son recours recevable et fondé ;

–        par conséquent :

–        ordonner avant dire droit à la Commission qu’elle produise :

–        les grilles d’évaluation des candidats retenus ;

–        les comptes-rendus des panels de présélection et de sélection ;

–        les listes restreintes établies ;

–        ainsi que les documents relatifs à la procédure de mutation de M. M., en ce compris son curriculum vitae ;

–        ordonner avant dire droit l’audition de M. C‑S., chef de la délégation de la Commission au Ghana, concernant le fait que, de toutes les candidatures au poste de CAF au Togo, celle du requérant avait sa préférence et que M. C.‑S. l’avait fait savoir à sa hiérarchie ;

–        ensuite de quoi,

–        annuler la décision portant rejet de sa candidature au poste de CAF au Togo ;

–        annuler la nomination de M. M. audit poste ;

–        annuler la décision portant rejet de sa candidature au poste de COP en Tanzanie ;

–        annuler la nomination de M. S. audit poste ;

–        condamner la Commission au paiement, à titre d’indemnité pour préjudice moral et atteinte à la carrière du requérant, d’une somme de 3 500 euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        statuer comme de droit sur les dépens.

26      À l’issue de l’audience du 17 avril 2008, le président de la deuxième chambre du Tribunal a décidé de ne pas clôturer la procédure orale et de ne pas mettre l’affaire en délibéré et, par ordonnance du 20 mai 2008, a ordonné la suspension de la procédure jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal de première instance des Communautés européennes mettant fin à l’instance dans l’affaire T‑56/07 P, Commission/Economidis, conformément à l’article 71, paragraphe 1, sous a) et d), et paragraphe 2, du règlement de procédure.

27      Après le prononcé de l’arrêt du Tribunal de première instance du 8 juillet 2008, Commission/Economidis (T‑56/07 P, non encore publié au Recueil), les parties ont été invitées à la demande du Tribunal, par lettre du greffe du Tribunal du 16 juillet 2008, à se prononcer au sujet des conséquences éventuelles dudit arrêt sur le bien-fondé de leurs positions respectives. La Commission et le requérant ont déféré à cette demande, respectivement par lettres des 28 et 31 juillet 2008.

 Sur le recours en annulation

28      À l’appui de son recours, le requérant invoque en substance trois moyens, tirés respectivement :

–        de l’irrégularité de la procédure de recrutement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 29, paragraphe 1, du statut ainsi que des principes d’égalité de traitement et de vocation à la carrière, en ce que le niveau des postes litigieux a été fixé aux grades AD 9 à AD 14 ;

–        de l’irrégularité de la procédure de recrutement, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 29 paragraphe 1, du statut, de la violation de l’avis de vacance, de l’erreur manifeste d’appréciation, du détournement de pouvoir, ainsi que de la violation des principes de bonne administration, d’égalité de traitement et de vocation à la carrière ;

–        de la violation de l’article 1er quinquies du statut et du détournement de pouvoir.

29      Il convient d’examiner en premier lieu le deuxième moyen.

 Sur le deuxième moyen

 Arguments des parties

30      Le requérant constate, en ce qui concerne le poste de CAF au Togo, que la Commission a nommé un fonctionnaire, M. M., alors même que ce dernier n’avait pas présenté sa candidature audit poste. L’avis de vacance relatif à ce poste ayant été publié en dehors de la rotation, il n’aurait pu être attribué qu’aux seuls candidats.

31      Selon le requérant, il n’est pas admissible que l’administration décide de publier l’avis de vacance d’un poste, fixe dans cet avis de vacance les conditions et qualités requises pour occuper le poste à pourvoir, reçoive les actes de candidature et procède à la présélection et à la sélection des candidats pour ensuite décider de procéder à la réaffectation d’un fonctionnaire sur ledit poste, dans l’intérêt du service, sans prendre en considération les candidats qui se sont manifestés à la suite de la publication de l’avis de vacance.

32      Le requérant estime que la Commission, en décidant de recourir au mécanisme de la « mutation », conformément à l’article 7, paragraphe 1, du statut, a cherché à « court-circuiter » une procédure de recrutement valablement ouverte, au titre de l’intérêt du service, en présence de candidatures recevables et pertinentes.

33      De plus, pareille décision, loin d’avoir été effectuée dans l’intérêt du service, révèle l’existence d’un détournement de procédure, consistant à contourner le fait que M. M. n’avait pas fait acte de candidature au poste de CAF au Togo. Si la Commission avait voulu élargir ses possibilités de choix pour ledit poste, elle aurait dû recommencer la procédure en retirant l’avis de vacance originel et en le remplaçant par un nouvel avis de vacance, respectant ainsi le principe d’égalité de traitement, en vue de l’examen comparatif des candidatures au regard des exigences du poste.

34      L’avis de vacance constituant le cadre légal qu’elle s’était elle-même imposé, notamment s’agissant des conditions relatives à l’accès à l’emploi vacant, la Commission aurait été tenue de respecter cet avis.

35      Le requérant fait également grief à la Commission de ne pas avoir exposé les raisons l’ayant amenée à procéder à la réaffectation, dans l’intérêt du service, d’un fonctionnaire qui n’avait même pas fait acte de candidature pour le poste de CAF au Togo et ce, sans avoir préalablement clôturé la procédure entamée ni ouvert une nouvelle procédure. En cela, elle aurait violé son obligation de motivation.

36      De plus, le recours à la réaffectation d’un fonctionnaire dans l’intérêt du service n’aurait pas été indispensable, compte tenu du nombre de candidatures recevables au regard de l’avis de vacance publié. Pour ce motif, l’article 29 du statut aurait également été méconnu.

37      Le requérant s’étonne de lire que, selon une note du 10 novembre 2006, il n’aurait pas fait partie de la liste restreinte des candidats, mais que sa candidature aurait néanmoins pu être prise en considération en l’absence d’autres candidats mieux qualifiés, alors même qu’il ressort de la décision du 19 janvier 2007 qu’il aurait bien fait partie de la liste restreinte. Aussi, le requérant demande-t-il que soit produit l’ensemble des documents concernant la procédure de recrutement, tels que les grilles d’évaluation, les comptes rendus des panels de présélection et de sélection, les listes restreintes établies. Il demande également l’audition de M. C.‑S., chef de la délégation de la Commission au Ghana, dont aurait relevé la délégation régionalisée de la Commission au Togo, afin que soit confirmé le fait que, de toutes les candidatures au poste de CAF au Togo, celle du requérant avait la préférence de ce dernier qui l’aurait fait savoir à sa hiérarchie.

38      Enfin, le requérant relève qu’aucune publicité n’a été réservée à la décision de procéder à la réaffectation d’un fonctionnaire dans l’intérêt du service en raison du caractère prétendument infructueux de la procédure de recrutement, ce qui aurait, cependant, été indispensable afin, d’une part, de répondre au devoir de transparence et, d’autre part, de ne pas violer l’article 29 du statut ainsi que la procédure de sélection.

39      La Commission fait valoir, en ce qui concerne le poste de CAF au Togo, qu’il est de jurisprudence constante que l’AIPN n’est pas tenue de donner suite à une procédure de recrutement, engagée en application de l’article 29 du statut, même en cas d’annulation de la procédure par le juge communautaire (arrêt du Tribunal de première instance du 14 février 1990, Hochbaum/Commission, T‑38/89, Rec. p. II‑43, point 15, et la jurisprudence citée). Il en serait d’autant plus ainsi en cas de changement de circonstances majeures (en l’espèce, la reprise de la coopération avec le Togo).

40      Selon la jurisprudence (arrêt de la Cour du 6 juillet 1983, Geist/Commission, 117/81, Rec. p. 2191, point 19), le service extérieur de la Commission pourrait exercer son pouvoir d’organisation du service en instaurant un système de rotation du personnel (ce qui inclurait la possibilité d’organiser une rotation entre les différentes délégations).

41      Une procédure tendant à assurer au sein d’une institution la rotation du personnel et en vertu de laquelle les fonctionnaires sont réaffectés avec leur emploi ne constituerait pas, selon le Tribunal de première instance, une procédure de pourvoi à un emploi vacant, de telle sorte que les dispositions des articles 4, 29 et 45 du statut ne seraient pas applicables à une telle procédure (arrêt du Tribunal de première instance du 6 juillet 1993, Rasmussen/Commission, T‑32/92, Rec. p. II‑765, points 34 à 37).

42      Quant aux exigences de l’article 7, paragraphe 1, du statut, la Commission observe que l’AIPN a décidé, sans commettre d’erreur manifeste, qu’il y avait un intérêt du service à réaffecter M. M. au poste de CAF au Togo, le profil de ce dernier correspondant mieux que celui de tous les candidats au poste vacant aux nouvelles exigences découlant du changement de circonstances intervenu dans ce pays.

43      La reprise de la coopération avec la République togolaise, dans le cadre de l’accord de Cotonou, aurait exigé, selon la Commission, la présence d’un chargé d’affaires possédant une expérience dans la gestion d’un volume important de coopération financière. Or, M. M. aurait, dans le passé, traité, comme chargé d’affaires au Guatemala, un volume de coopération financière de plus de 100 millions d’euros. Le requérant, quant à lui, aurait, comme chargé d’affaires à Djibouti, une des plus petites délégations de la Commission, traité un volume de coopération financière beaucoup moins important, et ce avant l’entrée en vigueur des nouvelles règles de l’accord de Cotonou, en 2001, et avant la déconcentration de la coopération prévue par ledit accord, qui aurait profondément changé le travail des chargés d’affaires. Le requérant n’aurait fourni aucun argument ni aucune donnée factuelle dont il pourrait résulter que la réaffectation de M. M. au poste de CAF au Togo ne répondrait pas à l’intérêt du service.

44      En tout état de cause, même au cas où la Commission aurait décidé de lancer une nouvelle procédure de vacance, le requérant n’allèguerait pas, ni ne démontrerait, que la candidature de M. M. n’aurait pas répondu aux conditions de l’avis.

45      Enfin, la Commission estime qu’il n’existe aucune base permettant de faire droit à la demande du requérant tendant à la production de documents et à l’audition de M. C.‑S. Elle rappelle que, selon la jurisprudence, en l’absence de tout indice de nature à mettre en cause sa validité, une décision de la Commission doit bénéficier de la présomption de validité qui s’attache aux actes communautaires. Faute pour le requérant de produire le moindre indice de nature à mettre en cause cette présomption, il n’appartiendrait pas au Tribunal d’ordonner les mesures d’instruction sollicitées (arrêt du Tribunal de première instance du 27 octobre 1994, Fiatagri et New Holland Ford/Commission, T‑34/92, Rec. p. II‑905, point 27).

46      Quant à l’audition du chef de la délégation de la Commission au Ghana, en particulier, elle serait en tout état de cause sans objet dès lors que la procédure de sélection aurait été abandonnée pour les raisons d’intérêt du service.

47      En ce qui concerne le poste de COP en Tanzanie, la Commission observe que le requérant se borne à contester de manière abstraite la régularité de la nomination intervenue et le rejet de sa candidature. Elle s’interroge, dans ces conditions, sur le respect par le requérant de l’article 44 du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable au moment du dépôt de la requête. Or, la finalité de cet article serait d’assurer entre autres que l’objet du litige et les moyens et arguments de la partie requérante soient utilement indiqués et exposés dans l’acte introductif d’instance.

 Appréciation du Tribunal

–       En ce qui concerne le poste de CAF au Togo

48      S’agissant du poste de CAF au Togo, il convient de rappeler, en premier lieu, que, selon une jurisprudence constante, l’AIPN n’est pas tenue de donner suite à une procédure de recrutement engagée en application de l’article 29 du statut (arrêt de la Cour du 24 juin 1969, Fux/Commission, 26/68, Rec. p. 145, point 11 ; arrêts Hochbaum/Commission, précité, point 15, et du Tribunal de première instance du 13 février 2001, Hirschfeldt/AEE, T‑166/00, RecFP p. I‑A‑41 et II‑157, point 25 ; ordonnance du Tribunal de première instance du 29 juin 2005, Pappas/Comité des régions, T‑254/04, RecFP p. I‑A‑177 et II‑787, point 45). Elle a aussi, en principe, le droit, nonobstant l’engagement d’une procédure de pourvoi par mutation, de ne pas y donner suite et de prendre une mesure de réaffectation d’un fonctionnaire avec son emploi, laquelle, ainsi qu’il découle également de la jurisprudence, n’est pas soumise aux formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut, en raison du fait qu’un tel transfert ne donne pas lieu à une vacance d’emploi (arrêt de la Cour du 24 février 1981, Carbognani et Coda Zabetta/Commission, 161/80 et 162/80, Rec. p. 543, point 19 ; arrêts du Tribunal de première instance du 8 juin 1993, Fiorani/Parlement, T‑50/92, Rec. p. II‑555, point 27, et du 6 mars 2001, Campoli/Commission, T‑100/00, RecFP p. I‑A‑71 et II‑347, point 29).

49      Or, une procédure tendant à assurer au sein d’une institution la rotation du personnel, telle que mise en œuvre par la décision réformant le service extérieur et en vertu de laquelle les fonctionnaires sont réaffectés avec leur emploi ne constitue précisément pas une procédure de pourvoi à un emploi vacant, de telle sorte que les dispositions des articles 4 et 29 ne sont pas applicables à une telle procédure (voir, en ce sens, arrêt Rasmussen/Commission, précité, point 37).

50      Néanmoins, même si elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation à cet égard, l’AIPN ne pourrait renoncer à une procédure de pourvoi à un emploi déclaré vacant et prendre une mesure de réaffectation d’un fonctionnaire avec son emploi que pour des raisons objectives tirées de l’intérêt du service. Elle a également, en principe, l’obligation d’expliquer pour quelle raison elle entend ne pas donner suite à cette procédure (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 9 février 1984, Kohler/Cour des comptes, 316/82 et 40/83, Rec. p. 641, point 22 ; arrêt du Tribunal de première instance du 27 novembre 2003, Bories e.a./Commission, T‑331/00 et T‑115/01, RecFP p. I‑A‑309 et II‑1479, points 150 à 153).

51      En l’espèce, la nécessité d’une justification au regard de l’intérêt du service s’imposait tout particulièrement dès lors que la procédure litigieuse avait été menée jusqu’à un stade fort avancé et qu’une liste restreinte de candidats, dont ne faisait pas partie le fonctionnaire finalement désigné pour être réaffecté avec son emploi sur le poste litigieux, avait été établie.

52      À cet égard, il ressort du dossier que ce n’est pas sans raison objective que l’AIPN a décidé de renoncer à la procédure ouverte par l’avis de vacance COM/2006/2384 et de réaffecter M. M. au poste de CAF au Togo. Cette décision découlait, en effet, de la nécessité, selon la Commission, de désigner, pour le pourvoi de l’emploi en question, un fonctionnaire possédant une expérience significative dans la gestion d’un volume important de coopération financière avec un pays tiers, eu égard à la relance, suite à l’adoption de la décision 2006/863, de la coopération avec le Togo au titre de l’accord de Cotonou. C’est précisément quelques jours après l’adoption de ladite décision, le 28 novembre 2006, que le directeur général de la DG « Développement » a fait parvenir une note au directeur général de la DG « Relations extérieures » attirant son attention sur la relance de la coopération avec le Togo et la nécessité de désigner un fonctionnaire ayant un « profil plus opérationnel » que celui des candidats retenus par le panel de sélection pour occuper le poste de CAF au Togo.

53      La circonstance que la levée des derniers obstacles à la reprise de cette coopération ait été prévisible au moment de la publication de l’avis de vacance du poste de CAF au Togo et lors des entretiens que les candidats ont eu avec le panel de sélection n’était pas de nature à empêcher l’AIPN de prendre spécialement en compte le déroulement des événements politiques au Togo pour renoncer à la procédure de vacance d’emploi, après avoir estimé qu’aucun des candidats retenus par le panel de sélection n’avait le profil adéquat, et, en conséquence, de prendre une mesure de réaffectation du fonctionnaire jugé comme présentant ce profil dans le cadre de l’exercice de rotation concernant le service extérieur.

54      Le requérant ne conteste d’ailleurs pas les qualités professionnelles de M. M. et son aptitude à occuper le poste de CAF au Togo.

55      En conséquence, il y a lieu de considérer que la Commission, eu égard aux changements de circonstances quant au poste à pourvoir, a pu valablement, au regard de l’intérêt du service, renoncer à la procédure de pourvoi par mutation et prendre une mesure de réaffectation d’un fonctionnaire avec son emploi s’inscrivant dans le cadre de l’exercice de rotation. Dès lors que, ainsi qu’il ressort des points 48 et 49 du présent arrêt, les dispositions de l’article 29 du statut ne s’appliquent pas à la procédure de réaffectation telle que celle poursuivie en l’espèce, les arguments du requérant, pour autant qu’ils sont basés sur lesdites dispositions, doivent être rejetés.

56      En deuxième lieu, la décision de réaffectation de M. M. ne pouvant ainsi être jugée contraire à l’intérêt du service, il ne saurait être question de détournement de procédure (arrêt de la Cour du 14 juillet 1983, Nebe/Commission, 176/82, Rec. p. 2475, point 25 ; arrêts du Tribunal de première instance du 10 juillet 1992, Eppe/Commission, T‑59/91 et T‑79/91, Rec. p. II‑2061, point 57 ; du 17 novembre 1998, Gómez de Enterría y Sanchez/Parlement, T‑131/97, RecFP p. I‑A‑613 et II‑1855, point 62, et Campoli/Commission, précité, point 63).

57      Il convient d’ajouter que, selon une jurisprudence constante, la notion de détournement de pouvoir, dont le détournement de procédure constitue une expression particulière, a une portée bien précise qui se réfère à l’usage de ses pouvoirs par une autorité administrative dans un but autre que celui en vue duquel ils lui ont été conférés. Une décision n’est entachée de détournement de pouvoir que si elle apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été prise pour atteindre des fins autres que celles excipées (arrêt de la Cour du 5 juin 2003, O’Hannrachain/Parlement, C‑121/01 P, Rec. p. I‑5539, point 46 ; arrêts du Tribunal de première instance du 11 juin 1996, Anacoreta Correia/Commission, T‑118/95, RecFP p. I‑A‑283 et II‑835, point 25 ; du 6 juillet 1999, Séché/Commission, T‑112/96 et T‑115/96, RecFP p. I‑A‑115 et II‑623, point 139 ; Campoli/Commission, précité, point 62, et du 14 octobre 2004, Sandini/Cour de justice, T‑389/02, RecFP p. I‑A‑295 et II‑1339, point 123). Or, le requérant n’a pas apporté de tels indices à l’appui de son grief tiré du détournement de pouvoir.

58      En troisième et dernier lieu, quant au grief tiré de la violation de l’obligation de motivation et d’un « principe de transparence », il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’étendue de l’obligation de motivation doit, dans chaque cas, être appréciée en fonction des circonstances concrètes (arrêts de la Cour du 14 juillet 1977, Geist/Commission, 61/76, Rec. p. 1419, points 23 à 25, et du 13 décembre 1989, Prelle/Commission, C‑169/88, Rec. p. 4335, point 9 ; arrêt du Tribunal de première instance du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T‑36/93, RecFP p. I‑A‑161 et II‑497, point 60). En particulier, une décision est suffisamment motivée dès lors qu’elle est intervenue dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêts de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec. p. 2539, point 13, et du 12 novembre 1996, Ojha/Commission, C‑294/95 P, Rec. p. I‑5863, point 35 ; arrêts du Tribunal de première instance Ojha/Commission, précité, point 60, et du 1er avril 2004, N/Commission, T‑198/02, RecFP p. I‑A‑115 et II‑507, point 70).

59      En l’espèce, compte tenu des fonctions exercées par le requérant au sein de la DG « Développement » et de l’étendue de ses connaissances des politiques extérieures de l’Union européenne, ainsi qu’il ressort de l’appréciation du panel de sélection après l’entretien du 10 octobre 2006, le requérant ne pouvait ignorer l’existence de la décision 2006/863 et le contexte politique dans lequel cette décision avait été prise, ainsi que la relance de la coopération entre l’Union européenne et le Togo, qui allait faire suite, en particulier, à la notification du 9e Fonds européen de développement au Togo et à sa mise en œuvre. Un tel contexte devait lui permettre de comprendre les raisons pour lesquelles le CDSE avait décidé de reconsidérer les suites à réserver à la procédure de pourvoi du poste de CAF au Togo, déclaré vacant, compte tenu du profil des candidats retenus par le panel de sélection.

60      Il convient d’ajouter que, même si elles sont succinctes, des précisions complémentaires ont été apportées à cet égard dans la décision du 6 juin 2007 portant rejet de la réclamation du requérant, ainsi que le permet, en tout état de cause, la jurisprudence, en cas d’insuffisance de motivation de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 2 avril 1998, Apostolidis/Cour de justice, T‑86/97, RecFP p. I‑A‑167 et II‑521, point 76). Dans la décision de rejet de la réclamation, l’AIPN fait, en effet, état d’une « nouvelle orientation » ayant conduit le CDSE à ne pas donner suite à la procédure de sélection en cours et à procéder à une « mutation » dans l’intérêt du service en ce qui concerne le poste de CAF au Togo.

61      Quant au grief tiré de la violation du principe de transparence, il suffit de constater que le requérant ne développe pas d’arguments distincts de ceux examinés à l’appui du grief tiré de la violation de l’obligation de motivation. Il doit, par conséquent, par identité de motifs, être rejeté.

62      Le Tribunal étant ainsi suffisamment éclairé pour statuer sur le recours sur la base des conclusions, moyens et arguments développés en cours d’instance et au vu des pièces déposées par les parties, il n’y pas lieu de faire droit à la demande du requérant tendant à ce qu’il soit ordonné à la Commission de fournir l’ensemble des documents de la procédure de sélection (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal de première instance du 19 septembre 2001, E/Commission, T‑152/00, RecFP p. I‑A‑179 et II‑813, points 86 et 87, ainsi que du 6 juillet 2004, Huygens/Commission, T‑281/01, RecFP p. I‑A‑203 et II‑903, points 145 et 146), et de rejeter le deuxième moyen en tant qu’il concerne le rejet de la candidature du requérant au poste de CAF au Togo et la décision de nomination de M. M. audit poste.

–       En ce qui concerne le poste de COP en Tanzanie

63      S’agissant du poste de COP en Tanzanie, force est de constater que la requête ne comporte aucune argumentation au soutien du deuxième moyen, mais se limite à l’énonciation de considérations générales et abstraites sur les limites du pouvoir d’appréciation de l’AIPN lorsqu’elle procède à l’examen comparatif des candidatures à un poste vacant.

64      Or, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal de première instance, applicable mutatis mutandis au Tribunal, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la décision 2004/752/CE, Euratom du Conseil, du 2 novembre 2004, instituant le Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (JO L 333, p. 7), jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement de procédure de ce dernier, et donc d’application au jour de l’introduction du présent recours, toute requête doit contenir l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (arrêt de la Cour du 13 décembre 1990, Commission/Grèce, C‑347/88, Rec. p. I‑4747, point 28 ; ordonnances du Tribunal de première instance du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et du 29 novembre 1993, Koelman/Commission, T‑56/92, Rec. p. II‑1267, point 21).

65      En conséquence, en l’absence d’élément dans la requête permettant d’apprécier le bien-fondé du deuxième moyen en tant qu’il concerne le rejet de la candidature du requérant au poste de COP en Tanzanie et de la décision de nomination de M. S. audit poste, il y a lieu de rejeter cette partie du moyen comme irrecevable.

 Sur le premier moyen

 Arguments des parties

66      Le requérant estime que la Commission a violé l’article 29 du statut dans la mesure où elle a publié deux avis de vacance permettant que les postes en cause soient pourvus aux grades AD 9 à AD 14.

67      La Commission aurait ainsi méconnu son obligation d’informer les fonctionnaires intéressés, d’une manière aussi exacte que possible, des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir et, notamment, du grade précis auquel l’emploi serait pourvu (arrêts du Tribunal de première instance du 19 février 1998, Campograndre/Commission, T‑3/97, RecFP p. I‑A‑89 et II‑215, points 100 à 102 ; du 4 mai 2005, Sena/AESA, T‑30/04, RecFP p. I‑A‑113 et II‑519, points 52 à 54, et du 4 juillet 2006, Tzirani/Commission, T‑45/04, RecFP p. II‑A‑2‑681, point 47).

68      La Commission aurait également méconnu l’exigence selon laquelle le niveau de l’emploi est fixé objectivement au regard du seul intérêt de service. Il découlerait, en effet, de l’arrêt du Tribunal de première instance du 17 mai 1995, Kratz/Commission (T‑10/94, Rec. p. II‑1455, points 56 à 60), et de l’arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Economidis/Commission (F‑122/05, RecFP p. II‑A‑1‑725, points 94, 96 et 97), que l’intérêt du service et le principe d’objectivité exigent que la décision concernant le niveau du poste à pourvoir soit prise antérieurement à l’examen des candidatures, c’est-à-dire avant que le panel de sélection et l’AIPN aient pris connaissance des actes de candidature et des dossiers personnels des différents candidats.

69      Il importerait peu que l’article 8, paragraphe 2.4, de la décision PEI ait ou non été applicable en l’espèce et que le requérant ne se soit pas trouvé dans le même cas de figure que M. Economidis. En effet, d’une part, ce sont les mêmes principes d’objectivité dans la fixation du niveau du poste et de respect de l’intérêt du service qui sont en cause et, d’autre part, les situations respectives des requérants dans les deux affaires sont, bien que non identiques, à tout le moins similaires.

70      La publication des postes litigieux aux grades AD 9 à AD 14 et la procédure suivie en l’espèce impliqueraient que le niveau auquel les postes ont été pourvus ait été déterminé après que les candidatures ont été déposées, ce qui, au regard de la jurisprudence citée au point 68, entraînerait aussitôt l’illégalité de la procédure de sélection et, par voie de conséquence, celle des nominations intervenues et celle du rejet des candidatures du requérant.

71      Dans ses observations en date du 31 juillet 2008 concernant l’incidence de l’arrêt Commission/Economidis, précité, le requérant fait valoir que la fixation des grades des postes à pourvoir en l’espèce, lesquels ne relèveraient pas de fonctions d’encadrement intermédiaire, n’a fait l’objet d’aucune règle spécifique, à la différence de ce qui est prévu à l’annexe I, section A, du statut et à l’article 5, paragraphe 1, de la décision PEI, s’agissant du pourvoi du poste de « chef d’unité » en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Economidis, précité. De plus, il ne saurait être exclu que le grade des candidats en l’espèce ait été un critère pour le choix du candidat finalement retenu, ce qui remettrait en question le caractère objectif de la procédure suivie.

72      La Commission estime que l’arrêt Economidis/Commission, précité, n’est pas pertinent pour la solution du litige, les procédures mises en œuvre en l’espèce n’étant pas affectées par l’irrégularité censurée par cet arrêt.

73      En effet, s’agissant du poste de CAF au Togo, la Commission observe que la procédure de recrutement litigieuse était devenue sans objet suite au changement de circonstances intervenues dans cet État et à la réaffectation de M. M. dans le cadre de l’exercice de rotation de 2007. S’agissant d’une « réaffectation dans l’intérêt du service », telle que l’indiquerait la décision du 2 mai 2007 de réaffectation de M. M., les considérations à la base de l’arrêt Economidis/Commission, précité, ne seraient pas pertinentes. Il ressortirait du point 94 de cet arrêt que c’était le « risque de manquer de l’objectivité nécessaire » dans le choix entre plusieurs candidats à la procédure de sélection qui aurait amené le Tribunal à déclarer illégale la procédure suivie dans cette affaire et, partant, la décision de nommer un candidat et de rejeter la candidature de M. Economidis. En présence de la « réaffectation individuelle » de M. M. dans le cadre de l’exercice de rotation de 2007, il n’y aurait pas eu de « choix comparatif entre plusieurs candidats », la procédure de vacance au titre des articles 4 et 29 du statut n’ayant pas été poursuivie jusqu’à son terme.

74      Quant au poste de COP en Tanzanie, la Commission relève que, selon le point 97 de l’arrêt Economidis/Commission, précité, le niveau du poste doit obligatoirement être fixé selon des groupes de grades, notamment le groupe AD 11/AD 12. Or, en l’espèce, il s’avérerait que M. S. était, au moment de sa nomination au poste de COP en Tanzanie, de grade A*11 (AD 11), alors que le requérant était de grade A*12 (AD 12). Ils se seraient donc trouvés dans le même groupe de grades pertinent.

75      Dans ces conditions, le requérant ne justifierait pas d’un intérêt personnel à se prévaloir de l’arrêt Economidis/Commission, précité.

76      Dans ses observations du 28 juillet 2008 sur les conséquences éventuelles de l’arrêt Commission/Economidis, précité, sur la présente affaire, la Commission réitère que cette jurisprudence n’est pas pertinente en l’espèce et estime que, en tout état de cause, le premier moyen ne peut être que rejeté à la lumière dudit arrêt.

 Appréciation du Tribunal

77      En premier lieu, s’agissant du poste de CAF au Togo, il convient de rappeler, tout d’abord, que l’AIPN a décidé, en l’espèce, de ne pas donner suite à la procédure de pourvoi au poste en question, déclaré vacant, en prenant une mesure de réaffectation de M. M., avec son emploi, dans le cadre de l’exercice de rotation du service extérieur, laquelle mesure, ainsi qu’il ressort des points 48 et 49 du présent arrêt, n’est pas soumise aux formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut.

78      Dans ces conditions, les arrêts Economidis/Commission, précité, et Commission/Economidis, précité, qui se rapportent aux conditions de déroulement d’une procédure de recrutement, en présence d’un poste déclaré vacant, au titre des articles 4 et 29 du statut, ne sont pas pertinents en l’espèce.

79      Il y a lieu, en conséquence, de rejeter le premier moyen en tant qu’il concerne le rejet de la candidature du requérant au poste de CAF au Togo et la décision de nomination de M. M. audit poste.

80      En second lieu, s’agissant du poste de COP en Tanzanie, il convient de rappeler que l’article 7, paragraphe 1, du statut énonce l’obligation pour l’AIPN d’affecter, par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi du groupe de fonctions correspondant à son grade.

81      Les emplois types dans chaque groupe de fonctions AD ou AST sont, conformément à l’article 5, paragraphe 4, du statut, désignés à l’annexe I, section A, de celui-ci. Ainsi, la fonction de « chef d’unité » figure parmi les différents emplois types correspondant aux grades AD 9 à AD 14.

82      En l’espèce, toutefois, la fonction de chef des opérations, telle qu’elle est présentée dans le dossier devant le Tribunal, ne correspond pas à celle de chef d’unité ou même, de façon plus générale, à une fonction d’encadrement intermédiaire au sens de la décision PEI. En effet, ainsi que la Commission elle-même l’a souligné dans sa réponse à la réclamation du requérant et comme ce dernier l’a également constaté dans ses observations déposées le 31 juillet 2008, la fonction de chef des opérations ne correspond pas à la définition de l’article 2, paragraphe 1, de la décision PEI, lequel requiert la réunion de deux conditions, à savoir, d’une part, « la direction permanente et continue d’une unité administrative » et, d’autre part, une mention dans « l’organigramme officiel de la Commission ». À tout le moins, cette dernière condition n’est pas remplie s’agissant du poste de chef des opérations, lequel ne figure pas non plus sur la liste des fonctions énoncées à l’article 2, paragraphe 1, troisième alinéa, de la décision PEI.

83      Hormis la fonction de chef d’unité, pour laquelle le statut comporte des règles spécifiques en matière de détermination du niveau de l’emploi à pourvoir, ainsi que l’a souligné le Tribunal de première instance dans son arrêt Commission/Economidis, précité, il découle des principes généraux de droit qui régissent l’organisation de la fonction publique communautaire que le niveau d’un poste à pourvoir doit être décidé en considération de l’importance des tâches conférées à la fonction en cause et au regard du seul intérêt du service (voir, en ce sens, arrêts Kratz/Commission, précité, points 56 à 60 ; du Tribunal de première instance du 16 octobre 1996, Capitanio/Commission, T‑36/94, RecFP p. I‑A‑449 et II‑1279, point 57 ; Benecos/Commission, T‑37/94, RecFP p. I‑A‑461 et II‑1301, point 56, et Campogrande/Commission, précité, point 30). L’article 7, paragraphe 1, du statut énonce expressément cette dernière exigence.

84      Or, en fixant dans l’avis de vacance le niveau de l’emploi correspondant au poste de COP en Tanzanie aux grades AD 9 à AD 14 et en permettant ainsi que le niveau de l’emploi à pourvoir soit finalement déterminé après que le panel de sélection et l’AIPN ont pris connaissance de l’identité et du dossier personnel du candidat retenu, et donc à l’issue de l’examen comparatif des candidatures, la Commission a méconnu les exigences rappelées au point précédent. En effet, l’administration risque de la sorte de manquer de l’objectivité nécessaire pour prendre une décision sur le niveau de l’emploi à pourvoir au regard de l’intérêt du service ainsi que de l’importance et de la nature des tâches conférées à la fonction en cause, indépendamment des qualifications des candidats. Ce seul risque d’atteinte à une règle d’objectivité devant déterminer le choix du niveau d’emploi suffit à entacher la procédure suivie en l’espèce d’une irrégularité au regard de l’intérêt du service ainsi que de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 29 du statut.

85      La circonstance que l’avis de vacance COM/2006/3207 faisait apparaître que le poste de COP en Tanzanie serait pourvu aux grades AD 9 à AD 14 n’est pas de nature à remettre en cause les considérations qui précèdent et, donc, à purger la procédure de sélection de son vice, dès lors que c’est précisément l’ouverture du poste vacant aux grades AD 9 à AD 14, inscrite dans l’avis de vacance, qui est de nature à générer un risque d’atteinte à la règle d’objectivité susvisée.

86      Enfin, contrairement à ce que soutient la Commission, même s’il était possible d’affirmer que le requérant détient un grade correspondant, eu égard au descriptif des emplois types contenus à l’annexe I, section A, du statut, au niveau d’emploi finalement retenu pour l’emploi litigieux, après que M. S., de grade AD 11, a été désigné pour occuper celui-ci, la procédure de recrutement n’en a pas moins été viciée et le requérant conserve un intérêt à agir afin que l’illégalité en cause ne se reproduise pas dans le cadre d’une procédure analogue de sélection (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, point 50 ; arrêt du Tribunal de première instance du 5 juillet 2005, Wunenburger/Commission, T‑370/03, RecFP p. I‑A‑189 et II‑853, point 20).

87      Il s’ensuit que la décision portant rejet de la candidature du requérant au poste de COP en Tanzanie et celle portant nomination de M. S. audit poste doivent être considérées comme illégales, ayant été adoptées sur la base d’une procédure elle-même illégale.

88      Dans ces conditions, il y a lieu d’accueillir le premier moyen en tant qu’il concerne lesdites décisions et d’annuler celles-ci.

 Sur le troisième moyen

 Arguments des parties

89      Le requérant observe, tout d’abord, que le grief tiré de la violation de l’article 1er quinquies, paragraphe 1, du statut et des principes de non-discrimination et d’égalité des chances ressort clairement de sa réclamation. Il invoque également l’esprit d’ouverture avec lequel l’administration doit examiner toute réclamation. En conséquence, l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission à l’encontre du troisième moyen devrait être rejetée.

90      Sur le fond, le requérant soutient que son origine africaine serait la justification du rejet de sa candidature pour le poste de CAF au Togo et qu’il existe une politique générale de la Commission de ne pas nommer ou affecter des fonctionnaires d’origine africaine à des postes de responsabilité en Afrique.

91      À titre de preuve, il évoque le refus de la DG « Développement », de 1990 à 1993, de l’affecter dans une délégation africaine, malgré l’existence de nombreux postes vacants à l’époque, eu égard à la désaffection des fonctionnaires, de façon générale, envers de tels postes. Il aura fallu la pression politique exercée par un député européen pour briser ce tabou, l’administration ayant alors créé un poste supplémentaire dans une des plus petites délégations de l’époque, à Djibouti, auquel le requérant a été affecté.

92      Le requérant évoque également le rejet de sa candidature au poste de chargé d’affaires en Gambie lors de l’exercice de rotation de 2006, auquel aurait été affecté un fonctionnaire, pourtant non éligible pour être resté plus de quatre ans dans la délégation régionalisée du Sénégal, qui « aurait juridiction » sur la Gambie.

93      En revanche, l’assistant du directeur général de la DG « Développement » lui aurait proposé, en décembre 2006, un poste de chargé d’affaires aux Îles Salomon, soumis à la rotation, ce que le requérant aurait refusé. Ce poste aurait finalement été occupé par le fonctionnaire, également d’origine africaine, qui avait initialement été retenu par la DG « Relations extérieures » pour occuper le poste de CAF au Togo.

94      Cette politique de l’administration de ne pas mettre des fonctionnaires d’origine africaine en situation d’occuper des postes de responsabilité se serait traduite par un ralentissement important dans la carrière du requérant. Ce dernier serait resté bloqué pendant treize ans dans le grade A 5 (devenu AD 11), en dépit de rapports de notation élogieux.

95      La Commission doute de la recevabilité du troisième moyen, en l’absence de concordance, à cet égard, avec la réclamation du requérant.

96      Sur le fond, s’agissant de la décision concernant le poste de CAF au Togo, la Commission observe que le requérant ne fournit, en dehors de son propre cas et de celui du fonctionnaire ayant été initialement pressenti pour le poste en question, aucun élément factuel qui puisse donner de la consistance à l’idée qu’il pourrait exister une politique de discrimination à l’encontre de fonctionnaires d’origine africaine.

97      En tout état de cause, les faits signalés par le requérant s’expliqueraient tous par des considérations légitimes, étrangères à toute idée de discrimination en raison de la race ou de l’origine ethnique.

98      L’argumentation du requérant selon laquelle seule son origine africaine peut justifier le rejet de sa candidature pour le poste du CAF au Togo ne serait nullement étayée.

99      En effet, la situation factuelle du requérant et celle de M. M. seraient différentes en ce que ce dernier disposerait d’un profil beaucoup plus opérationnel, concernant la gestion de la coopération financière dans le cadre de l’accord de Cotonou. La Commission aurait donc pu décider, dans le seul intérêt du service, de ne plus poursuivre la procédure de vacance à laquelle le requérant avait participé et de réaffecter M. M. avec son emploi, pour exercer les fonctions litigieuses, sans pour autant violer l’article 1er quinquies du statut.

100    Quant au cas du fonctionnaire initialement retenu dans la procédure de vacance pour occuper le poste de CAF au Togo, tout porterait à croire que c’est bien ce dernier qui aurait été nommé, en l’absence du changement de la situation au Togo, changement qui aurait amené l’AIPN à opter plutôt pour la réaffectation de M. M.

101    La Commission ajoute que l’appréciation moins favorable portée sur la personne du requérant s’est expliquée exclusivement par ses performances moins bien appréciées que celles de ses concurrents, le lauréat de la procédure ayant été précisément un collègue qui, selon le requérant, est lui-même d’origine africaine.

 Appréciation du Tribunal

102    Il convient de constater, à titre liminaire, que le troisième moyen n’est invoqué par le requérant qu’au soutien de son recours en tant qu’il concerne le rejet de sa candidature au poste de CAF au Togo.

103    Compte tenu des développements qui précèdent et qui permettent de conclure que la réaffectation de M. M., pour exercer les fonctions litigieuses, a été décidée dans l’intérêt du service, il convient de constater que le requérant n’a apporté aucun indice pertinent, suffisamment précis et concordant qui permette de laisser accroire que le rejet de sa candidature a été guidé par une quelconque politique de discrimination suivie par la Commission, à l’encontre de fonctionnaires d’origine africaine, s’agissant du pourvoi aux postes de responsabilité sur le continent africain. Au demeurant, selon une information fournie par la Commission et non contestée par le requérant, le candidat initialement proposé par le directeur général de la DG « Relations extérieures » pour occuper le poste de CAF au Togo est précisément d’origine africaine.

104    Il convient, en conséquence, de rejeter le troisième moyen sans qu’il soit besoin d’examiner l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

105    Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu d’annuler la décision portant rejet de la candidature du requérant au poste de COP en Tanzanie et celle portant nomination de M. S. audit poste et de rejeter le recours en annulation pour le surplus.

 Sur la demande indemnitaire

 Arguments des parties

106    Le requérant estime que la Commission, en refusant d’exécuter loyalement l’arrêt Economidis/Commission, précité, et d’en tirer les conséquences qui s’imposent, a commis une faute de service justifiant sa condamnation au versement de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi et l’atteinte à sa carrière en raison de l’état d’incertitude dans lequel il se trouve.

107    Par ailleurs, du fait de la violation du principe de non-discrimination en raison de la race, de la couleur, de l’origine ethnique et de la violation des principes d’égalité des chances et d’équité ainsi que du détournement de procédure, la carrière du requérant aurait été considérablement ralentie. Ce dernier aurait subi des préjudices matériel et moral importants pour lesquels il demande également réparation.

108    Le requérant évalue le montant des indemnités dues à 3 500 euros.

109    La Commission rétorque que, l’AIPN n’ayant commis aucune illégalité, il est exclu, au moins pour cette raison, qu’elle puisse avoir commis une faute de service justifiant sa condamnation au paiement d’indemnités.

 Appréciation du Tribunal

110    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose la réunion d’un ensemble de conditions concernant l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage allégué et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement et le préjudice invoqué (arrêt du Tribunal de première instance du 9 février 1994, Latham/Commission, T‑82/91, RecFP p. I‑A‑15 et II‑61, point 72, et ordonnance du Tribunal de première instance du 24 avril 2001, Pierard/Commission, T‑172/00, RecFP p. I‑A‑91 et II‑429, point 34).

111    Le Tribunal n’ayant pas constaté d’irrégularité dans la procédure de pourvoi du poste de CAF au Togo, ni de violation des dispositions statutaires applicables à cette procédure, la première condition posée par la jurisprudence mentionnée au point précédent n’est pas remplie. Par conséquent, les conclusions en indemnité, en tant qu’elles sont dirigées contre les conséquences du rejet de la candidature du requérant au poste de CAF au Togo et de nomination de M. M. audit poste, doivent être rejetées.

112    En revanche, il ressort de ce qui précède que le recours en annulation doit être accueilli en tant qu’il concerne le rejet de la candidature du requérant au poste de COP en Tanzanie, ainsi que la nomination de M. S. audit poste, et ce en raison de l’irrégularité de la procédure sur la base de laquelle ces décisions ont été adoptées.

113    Or, même dans l’hypothèse où une faute d’une institution est établie, la responsabilité de la Communauté n’est engagée que si le requérant est parvenu à démontrer la réalité de son préjudice (arrêt du Tribunal de première instance du 14 mai 1998, Lucaccioni/Commission, T‑165/95, RecFP p. I‑A‑203 et II‑627, point 57, et ordonnance Pierard/Commission, précitée, point 35).

114    S’agissant du préjudice moral invoqué par le requérant, à supposer qu’il soit démontré, il ressort d’une jurisprudence constante que, sauf dans des circonstances particulières, lesquelles n’ont pas été établies en l’espèce, l’annulation de la décision attaquée par un fonctionnaire constitue, en elle-même, une réparation adéquate et, en principe, suffisante du préjudice que ce fonctionnaire peut avoir subi (arrêts du Tribunal de première instance du 27 février 1992, Plug/Commission, T‑165/89, Rec. p. II‑367, point 118 ; du 28 septembre 1999, Hautem/BEI, T‑140/97, RecFP p. I‑A‑171 et II‑897, point 82, et du 11 septembre 2002, Willeme/Commission, T‑89/01, RecFP p. I‑A‑153 et II‑803, point 97).

115    S’agissant du préjudice matériel qui aurait pu découler d’une atteinte à la carrière du requérant, il suffit de constater que la preuve de l’existence d’un préjudice réel et certain n’est pas rapportée. En effet, il n’est pas établi à suffisance de droit que le requérant aurait eu une chance sérieuse d’être nommé au poste de COP en Tanzanie si la procédure de recrutement n’avait pas été viciée.

116    Il résulte de ce qui précède que la demande de dommages et intérêts doit être rejetée.

 Sur les dépens

117    En vertu de l’article 122 du règlement de procédure, les dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, relatives aux dépens et frais de justice, ne s’appliquent qu’aux affaires introduites devant le Tribunal à compter de l’entrée en vigueur de ce règlement de procédure, à savoir le 1er novembre 2007. Les dispositions du règlement de procédure du Tribunal de première instance pertinentes en la matière continuent à s’appliquer mutatis mutandis aux affaires pendantes devant le Tribunal avant cette date.

118    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Selon l’article 87, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal de première instance, le Tribunal peut répartir les dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs ou pour des motifs exceptionnels, étant entendu que, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci, conformément à l’article 88 dudit règlement de procédure.

119    En l’espèce, le recours ayant été partiellement accueilli, il sera fait une juste appréciation des circonstances de la cause en décidant que la Commission supporte ses propres dépens ainsi que la moitié des dépens exposés par le requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du directeur des ressources de l’Office de coopération EuropeAid de la Commission des Communautés européennes, du 12 décembre 2006, portant rejet de la candidature de M. Traore au poste de chef des opérations de la délégation de la Commission en Tanzanie et la décision de nomination de M. S. audit poste sont annulées.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      M. Traore supporte la moitié de ses propres dépens.

4)      La Commission des Communautés européennes supporte ses propres dépens et la moitié des dépens exposés par M. Traore.

Van Raepenbusch

Boruta

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 novembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

W. Hakenberg

 

       H. Kanninen

Les textes de la présente décision ainsi que des décisions des juridictions communautaires citées dans celle-ci et non encore publiées au Recueil sont disponibles sur le site internet de la Cour de justice : www.curia.europa.eu


* Langue de procédure : le français.