Language of document : ECLI:EU:T:2014:1043

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

9 décembre 2014 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises à l’encontre de la Biélorussie – Gel des fonds – Obligation de motivation – Droits de la défense – Droit d’être entendu – Erreur d’appréciation »

Dans l’affaire T‑439/11,

Sport-pari ZAO, établie à Minsk (Biélorussie), représentée par Mes V. Vaitkutė Pavan, A. Smaliukas, E. Matulionyte et T. Milašauskas, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. F. Naert et M. Bishop, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. T. Scharf et E. Paasivirta, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2011/357/PESC du Conseil, du 20 juin 2011, modifiant la décision 2010/639/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 161, p. 25), du règlement (UE) n° 588/2011 du Conseil, du 20 juin 2011, modifiant le règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre du président Lukashenko et de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 161, p. 1), de la décision 2011/666/PESC du Conseil, du 10 octobre 2011, modifiant la décision 2010/639/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 265, p. 17), du règlement d’exécution (UE) n° 1000/2011 du Conseil, du 10 octobre 2011, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 265, p. 8), de la décision 2012/642/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 285, p. 1), et du règlement d’exécution (UE) n° 1017/2012 du Conseil, du 6 novembre 2012, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 307, p. 7), en ce que ces actes concernent la requérante,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen (rapporteur), président, Mme I. Pelikánová et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 janvier 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 24 septembre 2004, après avoir constaté une détérioration de la situation en Biélorussie en ce qui concerne la démocratie, l’État de droit et les droits de l’homme, liée en particulier à l’absence d’enquête indépendante, exhaustive et crédible sur les infractions examinées par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe dans son rapport adopté le 28 avril 2004, le Conseil de l’Union européenne a arrêté la position commune 2004/661/PESC du Conseil, concernant des mesures restrictives à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 301, p. 67), consistant à empêcher leur entrée ou leur passage en transit sur le territoire des États membres.

2        Le 13 décembre 2004, le Conseil a arrêté la position commune 2004/848/PESC, modifiant la position commune 2004/661 (JO L 367, p. 35), afin d’étendre le champ d’application des mesures restrictives prévues par cette dernière position commune aux personnes directement responsables des élections et du référendum frauduleux ayant eu lieu en Biélorussie le 17 octobre 2004 et des graves violations des droits de l’homme commises à l’occasion de la répression exercée à l’égard de manifestants pacifiques à la suite de ces élections et de ce référendum.

3        Le 24 mars 2006, le Conseil européen a déploré que les autorités biélorusses n’aient pas honoré les engagements contractés dans le cadre de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en matière d’élections démocratiques, a estimé que l’élection présidentielle du 19 mars 2006 avait été fondamentalement entachée d’irrégularités et a condamné l’arrestation, ce même jour, par les autorités biélorusses, de personnes manifestant pacifiquement contre le déroulement de l’élection présidentielle.

4        Estimant que l’Union européenne devait adopter des mesures restrictives à l’encontre du président Lukashenko, des dirigeants biélorusses et des fonctionnaires responsables des atteintes aux normes électorales internationales ainsi que de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, le Conseil a, le 10 avril 2006, arrêté la position commune 2006/276/PESC, concernant des mesures restrictives à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie et abrogeant la position commune 2004/661 (JO L 101, p. 5), consistant à empêcher l’entrée ou le passage en transit sur le territoire des États membres du président Lukashenko, des dirigeants et de certains fonctionnaires de Biélorussie.

5        Par la position commune 2006/362/PESC, du 18 mai 2006, modifiant la position commune 2006/276 (JO L 134, p. 45), le Conseil a également prévu qu’il y avait lieu de geler les fonds et les ressources économiques du président Lukashenko et de certains fonctionnaires de Biélorussie.

6        Le même jour, considérant qu’un règlement était nécessaire afin de mettre en œuvre au niveau communautaire les mesures décrites dans la position commune 2006/362, le Conseil a adopté, sur la base notamment des articles 60 CE et 301 CE, le règlement (CE) n° 765/2006, concernant des mesures restrictives à l’encontre du président Lukashenko et de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 134, p. 1).

7        Le 25 octobre 2010, par sa décision 2010/639/PESC, concernant des mesures restrictives à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie (JO L 280, p. 18), le Conseil a renouvelé certaines mesures restrictives jusqu’au 31 octobre 2011 et abrogé la position commune 2006/276.

8        Le 31 janvier 2011, le Conseil a adopté la décision 2011/69/PESC, modifiant la décision 2010/639 (JO L 28, p. 40). Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/639, tel que modifiée par la décision 2011/69, « [s]ont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant […] aux personnes responsables des atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle organisée en Biélorussie le 19 décembre 2010, ainsi que de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, ainsi qu’aux personnes physiques ou morales, les entités et les organismes qui leur sont associés, dont la liste figure à l’annexe IIIA ».

9        Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 84/2011, modifiant le règlement n° 765/2006 (JO L 28, p. 17). Aux termes de l’article 2, paragraphes 1 et 5, du règlement n° 765/2006, tel que modifié par le règlement d’exécution n° 84/2011, tous les fonds et ressources économiques des personnes et entités dont les noms se trouvent sur la liste de l’annexe IA sont gelés, ladite annexe comportant les noms des personnes responsables des atteintes aux normes électorales internationales qui avaient marqué l’élection présidentielle organisée en Biélorussie le 19 décembre 2010 ainsi que de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, ainsi que ceux des personnes physiques ou morales, des entités et des organismes qui leur étaient associés.

10      Par la décision 2011/357/PESC du Conseil, du 20 juin 2011, modifiant la décision 2010/639 (JO L 161, p. 25), le Conseil a décidé, compte tenu de la gravité de la situation en Biélorussie, d’ajouter des noms à la liste des personnes et entités faisant l’objet de mesures restrictives établie à l’annexe IIIA de la décision 2010/639 (ci-après l’« annexe IIIA »), dont celui de la requérante, Sport-pari ZAO, avec la mention « Opérateur de la Republican Lottery company » et le motif « Entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir ».

11      Afin de mettre en œuvre au niveau de l’Union les mesures décrites dans la décision 2011/357, le Conseil a adopté, sur la base notamment de l’article 215 TFUE, le règlement (UE) n° 588/2011, du 20 juin 2011, modifiant le règlement n° 765/2006 (JO L 161, p. 1), qui inclut le nom de la requérante dans la liste figurant à l’annexe IA du règlement n° 765/2006 (ci-après l’« annexe IA ») avec la mention « Opérateur de la Republican Lottery company » et le motif « Entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir ».

12      Le 21 juin 2011, le Conseil a publié au Journal officiel de l’Union européenne l’avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2010/639, modifiée par la décision 2011/357, et par le règlement n° 765/2006, modifié par le règlement n° 588/2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO C 180, p. 9).

13      Par courrier du 8 juillet 2011, la requérante a demandé au Conseil de lui communiquer les motifs de l’inscription de son nom sur les listes de l’annexe IA et de l’annexe IIIA.

14      Le 2 août 2011, le Conseil a indiqué à la requérante qu’il examinait sa demande et qu’elle serait informée de sa réponse.

15      Le 8 août 2011, la requérante a demandé au Conseil de réexaminer l’inscription de son nom sur les listes de l’annexe IIIA et de l’annexe IA.

16      Par sa décision 2011/666/PESC, du 10 octobre 2011, modifiant la décision 2010/639 (JO L 265, p. 17), le Conseil a, premièrement, prorogé les mesures restrictives prévues dans la décision 2010/639 jusqu’au 31 octobre 2012, deuxièmement, ajouté des noms à la liste figurant à l’annexe IIIA et, troisièmement, modifié les mentions relatives à certaines personnes et entités figurant à l’annexe IIIA. S’agissant de la requérante, la mention « Opérateur de la Republican Lottery company » a été supprimée et, sous la rubrique « Fonction », apparaît la mention suivante : « Entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir en liaison avec Lukachenko, Dzmitry Aliaksandravich, par l’intermédiaire du contrôle exercé par ce dernier sur le club sportif du président, qui détient une participation majoritaire obligatoire de l’État dans Sport-Pari. »

17      Par son règlement d’exécution (UE) n° 1000/2011, du 10 octobre 2011, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement n° 765/2006 (JO L 265, p. 8), le Conseil a ajouté certaines personnes à l’annexe IA et a modifié les mentions concernant certaines personnes et entités figurant à l’annexe IA. S’agissant de la requérante, la mention « Opérateur de la Republican Lottery company » a été supprimée et, sous la rubrique « Fonction », apparaît une mention identique à celle figurant à l’annexe IIIA, modifiée par la décision 2011/666, telle que citée au point 16 ci-dessus.

18      Le 11 octobre 2011, le Conseil a publié au Journal officiel l’avis à l’attention des personnes auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues dans la décision 2010/639, modifiée par la décision 2011/666, et dans le règlement n° 765/2006, mis en œuvre par le règlement d’exécution n° 1000/2011 (JO C 299, p. 4).

19      Le 7 novembre 2011, la requérante a réitéré auprès du Conseil sa demande de communication des motifs de l’inscription de son nom sur la liste de l’annexe IIIA et sur celle de l’annexe IA ainsi que sa demande de réexamen de cette inscription.

20      Le 14 novembre 2011, le Conseil a répondu à la demande de la requérante du 8 août 2011, en indiquant, notamment, que l’inscription de son nom sur les listes de l’annexe IIIA et de l’annexe IA était motivée par le fait qu’elle était une entité contrôlée par M. Peftiev, lequel était désigné dans ces listes comme une personne associée au président Lukashenko et à sa famille, et non par le fait qu’elle était responsable des violations des normes électorales internationales à l’occasion des élections présidentielles de Biélorussie de 2010 ou de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique. Le Conseil a en outre précisé que M. Peftiev contrôlait la requérante, par l’intermédiaire de la société BT Telecommunications, à hauteur de 27 % des parts, en liaison avec l’un des fils du président Lukashenko du fait d’une participation majoritaire obligatoire de l’État dans la requérante à hauteur de 69 %.

21      Le 10 janvier 2012, la requérante a demandé l’accès au dossier la concernant afin d’être informée des motifs de l’inscription de son nom sur les listes de l’annexe IIIA et de l’annexe IA.

22      Par lettre du 17 février 2012, le Conseil a répondu aux courriers de la requérante des 7 novembre 2011 et 10 janvier 2012 et lui a donné accès à certains documents.

23      Par la décision 2012/642/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie (JO L 285, p. 1), le Conseil a prorogé les mesures restrictives prévues dans la décision 2010/639 jusqu’au 31 octobre 2013 et a actualisé les informations concernant les personnes et les entités dont les noms y étaient énumérés. Par ailleurs, les mesures imposées par la décision 2010/639 ont été intégrées dans la décision 2012/642, laquelle a regroupé en une seule annexe les noms des personnes et entités faisant l’objet de mesures restrictives.

24      L’article 4, paragraphe 1, de la décision 2012/642 est rédigé comme suit :

« Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes et entités ci-après, de même que tous les fonds et ressources économiques possédés, détenus ou contrôlés par les personnes ou entités ci-après :

a)       les personnes, entités ou organismes responsables de violations graves des droits de l’homme ou de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, ou dont les activités nuisent gravement, d’une autre manière, à la démocratie ou à l’État de droit en Biélorussie, ou toute personne physique ou morale, toute entité ou tout organisme qui leur est associé, ainsi que les personnes morales, les entités ou les organismes qu’ils détiennent ou contrôlent ;

b)       les personnes physiques ou morales, les entités ou les organismes qui profitent du régime de Loukachenka ou le soutiennent, ainsi que les personnes morales, les entités ou les organismes qu’ils détiennent ou contrôlent,

dont la liste figure à l’annexe. »

25      L’annexe de la décision 2012/642 comporte le nom de la requérante avec la mention suivante :

« Entité contrôlée par Vladimir Peftiev, par l’intermédiaire de ses entités Business Network et BT Telecommunications. Sport-Pari est contrôlée par M. Peftiev en liaison avec Dzmitry Aliaksandravich Loukachenka, par l’intermédiaire du contrôle exercé par ce dernier sur le club sportif du président, qui détient une participation majoritaire obligatoire de l’État dans Sport-Pari. »

26      L’article 2 du règlement n° 765/2006 a été modifié par le règlement (UE) n° 1014/2012, du 6 novembre 2012, modifiant le règlement n° 765/2006 (JO L 307, p. 1) comme suit :

« 1. Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes physiques ou morales, aux entités ou aux organismes dont la liste figure à l’annexe I, de même que tous les fonds et ressources économiques qui sont en leur possession, qu’ils détiennent ou qu’ils contrôlent.

[…]

4. L’annexe I est composée d’une liste des personnes physiques ou morales, des entités et des organismes qui, conformément à l’article 4, paragraphe 1, point a), de la décision 2012/642 […], ont été reconnus par le Conseil comme étant responsables de graves violations des droits de l’homme ou d’actes de répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique ou dont les activités nuisent gravement, d’une autre manière, à la démocratie ou à l’État de droit en Biélorussie, ainsi que des personnes physiques ou morales, des entités et des organismes qui leur sont associés et des personnes morales, des entités ou des organismes qu’ils détiennent ou contrôlent.

5. L’annexe I est également composée d’une liste des personnes physiques ou morales, des entités et des organismes qui, conformément à l’article 4, paragraphe 1, point b), de la décision 2012/642 […], ont été reconnus par le Conseil comme profitant du régime Lukashenko ou le soutenant, ainsi que des personnes morales, des entités et des organismes qu’ils détiennent ou contrôlent. »

27      Par son règlement d’exécution (UE) n° 1017/2012 du Conseil, du 6 novembre 2012, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement n° 765/2006 (JO L 307, p. 7), le Conseil a réuni en une annexe unique, en l’occurrence l’annexe I, les textes des annexes I, IA et IB du règlement n° 765/2006.

28      En vertu du règlement d’exécution n° 1017/2012, le nom de la requérante a été inscrit sur la liste figurant à l’annexe I du règlement n° 765/2006 avec une mention identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2012/642, mentionnée au point 25 ci-dessus.

29      Par lettre du 7 novembre 2012, le Conseil a informé la requérante du maintien de son nom sur les listes des personnes et entités faisant l’objet des mesures restrictives (ci-après les « listes ») et du fait que les motifs de ce maintien étaient indiqués dans l’annexe de la décision 2012/642 et dans l’annexe I du règlement n° 765/2006.

30      Par la décision d’exécution 2013/248/PESC du Conseil, du 29 mai 2013, mettant en œuvre la décision 2012/642 (JO L 143, p. 24), et par le règlement d’exécution (UE) n° 494/2013 du Conseil, du 29 mai 2013, mettant en œuvre le règlement n° 765/2006 (JO L 143, p. 1), le nom de la requérante a été retiré des listes.

 Procédure et conclusions des parties

31      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 août 2011, la requérante a introduit le présent recours visant à l’annulation de la décision 2011/357 et du règlement n° 588/2011, dans la mesure où ces actes la concernaient.

32      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 12 août 2011, la requérante a introduit une demande visant à ce qu’il soit statué selon une procédure accélérée, conformément à l’article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal. Le Tribunal (huitième chambre) n’a pas fait droit à cette demande.

33      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 28 octobre 2011, la Commission européenne a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil.

34      Le 25 novembre 2011, la présente affaire a été réattribuée à la sixième chambre du Tribunal.

35      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 novembre 2011, la requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de la Commission, de certaines informations et a produit, à cet effet, une version non confidentielle de la requête et de ses annexes ainsi que de la demande de procédure accélérée.

36      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 12 décembre 2011, la requérante a adapté ses conclusions de sorte que le recours vise également la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011. Dans la duplique, le Conseil a déclaré que, dans la mesure où ces actes concernaient la requérante, il n’émettait pas d’objections à l’adaptation des conclusions du recours.

37      Par ordonnance du 10 janvier 2012, le président de la sixième chambre du Tribunal a admis la Commission à intervenir au soutien des conclusions du Conseil et a décidé que les documents de la procédure seraient communiqués à la partie intervenante dans leur version non confidentielle. La Commission n’a pas formulé d’objections sur la demande de traitement confidentiel de la requérante.

38      Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 24 février 2012, la Commission a renoncé à déposer un mémoire en intervention.

39      Le 13 novembre 2012, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues par l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a posé par écrit une question à la requérante relative à la notification individuelle de l’inscription de son nom sur les listes. La requérante y a déféré par courrier déposé au greffe du Tribunal le 16 novembre 2012.

40      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 14 décembre 2012, la requérante a adapté ses conclusions de sorte que le recours vise également la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012. Par courriers déposés au greffe du Tribunal respectivement les 24 et 28 janvier 2013, la Commission et le Conseil ont déclaré n’avoir pas d’objections à cette adaptation des conclusions du recours.

41      Le 23 septembre 2013, la présente affaire a été réattribuée à la première chambre du Tribunal.

42      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (première chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

43      Le 31 octobre 2013, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a invité le Conseil à lui communiquer la copie de l’avis cité au point 12 ci-dessus, ce que le Conseil a fait.

44      Par courrier du 14 janvier 2014, la Commission a informé le Tribunal qu’elle ne serait pas présente à l’audience.

45      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 28 janvier 2014.

46      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision 2011/357, le règlement n° 588/2011, la décision 2011/666, le règlement d’exécution n° 1000/2011, la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012, pour autant qu’ils la concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

47      Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité de l’adaptation des conclusions

48      Ainsi qu’il ressort des points 36 et 40 ci-dessus, depuis l’introduction de la requête, la requérante a adapté les conclusions du recours afin que celui-ci vise non seulement la décision 2011/357 et le règlement n° 588/2011, mais également la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011 ainsi que la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012, en ce que ces actes la concernent.

49      À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’une décision ou un règlement concernant directement et individuellement un particulier sont, en cours de procédure, remplacés par un acte ayant le même objet, celui‑ci doit être considéré comme un élément nouveau permettant au requérant d’adapter ses conclusions et moyens. Il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d’économie de la procédure d’obliger le requérant à introduire un nouveau recours. Il serait, en outre, injuste que l’institution en cause puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée au juge de l’Union contre un acte, adapter l’acte attaqué ou lui en substituer un autre et se prévaloir, en cours d’instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l’autre partie de la possibilité d’étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à l’acte ultérieur ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celui-ci (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2008, People’s Mojahedin Organization of Iran/Conseil, T‑256/07, Rec. p. II‑3019, point 46, et du 6 septembre 2013, Iranian Offshore Engineering & Construction/Conseil, T‑110/12, non encore publié au Recueil, point 16).

50      En l’espèce, les décisions 2011/666 et 2012/642 ont prolongé, respectivement jusqu’aux 31 octobre 2012 et 31 octobre 2013, les mesures restrictives dont faisait l’objet la requérante. En outre, tant la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011 que la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 ont modifié les motifs de maintien de la requérante sur les listes.

51      Par ailleurs, les conclusions dirigées contre, d’une part, la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011 et, d’autre part, la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 ont été présentées au greffe du Tribunal dans le délai de recours prévu par l’article 263, sixième alinéa, TFUE, conformément à la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 6 septembre 2013, Bank Melli Iran/Conseil, T‑35/10 et T‑7/11, non encore publié au Recueil, point 55, et du 16 septembre 2013, Bank Kargoshaei e.a./Conseil, T‑8/11, non encore publié au Recueil, point 40), augmenté du délai de distance forfaitaire de dix jours prévu par l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure.

52      Il y a donc lieu d’accueillir l’adaptation des conclusions du recours visant à étendre l’objet de celui-ci à la décision 2011/666, au règlement d’exécution n° 1000/2011, à la décision 2012/642 et au règlement d’exécution n° 1017/2012 (ci-après, pris ensemble avec la décision 2011/357 et le règlement n° 588/2011, les « actes attaqués »). Il y a d’ailleurs lieu de constater à cet égard que ni le Conseil ni la Commission n’a soulevé d’objections à l’adaptation des conclusions du recours.

 Sur le fond

53      À l’appui du recours, la requérante invoque cinq moyens, tirés, le premier, d’erreurs manifestes d’appréciation, le deuxième, d’une violation de l’obligation de motivation, le troisième, d’une violation des droits de la défense et du droit d’être entendu, le quatrième, d’une violation du droit de propriété et, le cinquième, d’une violation du principe de proportionnalité.

 Sur le moyen tiré d’une violation de l’obligation de motivation

54      La requérante soutient, en substance, qu’elle n’est pas en mesure de savoir pour quelles raisons précises et concrètes son nom figure sur les listes. Elle prétend également que le Tribunal n’est pas davantage en mesure d’exercer son contrôle de la légalité des actes attaqués. À cet égard, elle fait valoir, d’abord, que le motif de l’inscription de son nom sur les listes par la décision 2011/357 et le règlement n° 588/2011, à savoir « Entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir », est vague et général. La requérante soutient ensuite qu’un tel motif est encore plus général et ambigu que celui discuté dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 8 juin 2011, Bamba/Conseil (T‑86/11, Rec. p. II‑2749), par lequel le Tribunal a jugé que le motif en cause n’était pas de nature à motiver de manière suffisante l’inscription sur une liste du nom de personnes faisant l’objet de mesures restrictives. La requérante cite également les arrêts du Tribunal du 16 septembre 2011, Kadio Morokro/Conseil (T‑316/11, non publié au Recueil), et du 7 décembre 2011, HTTS/Conseil (T‑562/10, Rec. p. II‑8087), qui exigeraient du Conseil qu’il communique à l’intéressé des motifs suffisants et précis de l’inscription de son nom. Selon la requérante, ces arrêts marqueraient une tendance claire du Tribunal de s’écarter de l’approche défendue dans l’arrêt du Tribunal du 19 mai 2010, Tay Za/Conseil (T‑181/08, Rec. p. II‑1965). En outre, la requérante prétend que le motif « Entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir » ne permet pas de montrer le lien entre elle et le régime et, en particulier, de quelle manière elle est responsable des atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle du 19 décembre 2010 en Biélorussie ou a participé à la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique.

55      Le Conseil répond, en substance, que la motivation des actes attaqués indique de manière suffisamment claire et précise, premièrement, les raisons pour lesquelles il a adopté les mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie, deuxièmement, les critères utilisés pour l’inscription de personnes et d’entités faisant l’objet de mesures restrictives et, troisièmement, les raisons pour lesquelles il estime que la requérante répond à ces critères. À cet égard, le Conseil indique qu’il n’a jamais été reproché à la requérante d’être associée au régime ou d’être responsable des atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle du 19 décembre 2010 en Biélorussie ou de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, ni d’avoir participé à de tels actes. Selon le Conseil, la requérante est inscrite sur les listes au motif qu’elle est contrôlée par M. Peftiev, lequel est considéré comme étant associé au président Lukashenko et à sa famille. Le Conseil estime également qu’il ressort de la requête que la requérante a compris le motif pour lequel elle était inscrite sur les listes. Le Conseil soutient enfin que la situation de la requérante est très différente de celle de la partie requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra et fait observer que cet arrêt a été annulé par la Cour, le 15 novembre 2012, par l’arrêt Conseil/Bamba (C‑417/11 P, non encore publié au Recueil).

56      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, telle que prévue à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 2 octobre 2003, Corus UK/Commission, C‑199/99 P, Rec. p. I‑11177, point 145 ; du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, Rec. p. I‑8947, point 148, et Conseil/Bamba, point 55 supra, point 49).

57      La motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre à l’intéressé de connaître les justifications des mesures prises et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 novembre 2012, Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, C‑539/10 P et C‑550/10 P, non encore publié au Recueil, point 138, et Conseil/Bamba, point 55 supra, point 50).

58      Dans la mesure où la personne concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’adoption d’une décision initiale de gel des fonds, le respect de l’obligation de motivation est d’autant plus important, puisqu’il constitue l’unique garantie permettant à l’intéressé, à tout le moins après l’adoption de cette décision, de se prévaloir utilement des voies de recours à sa disposition pour contester la légalité de ladite décision (arrêt Conseil/Bamba, point 55 supra, point 51).

59      Partant, la motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure restrictive ne doit pas seulement identifier la base juridique de cette mesure, mais également les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir, en ce sens, arrêt Conseil/Bamba, point 55 supra, point 52, et arrêt du Tribunal du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, Rec. p. II‑3967, point 83).

60      Cependant, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et au contexte dans lequel il a été adopté. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où le caractère suffisant d’une motivation doit être apprécié au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêts Al-Aqsa/Conseil et Pays-Bas/Al-Aqsa, point 57 supra, points 139 et 140, et Conseil/Bamba, point 55 supra, point 53).

61      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt Conseil/Bamba, point 55 supra, point 54).

62      Il s’ensuit que, afin de déterminer si les actes attaqués satisfont à l’obligation de motivation, il y a lieu de vérifier si le Conseil a exposé de manière compréhensible et suffisamment précise, dans les motifs énoncés dans ces actes, les raisons l’ayant conduit à considérer que l’inscription du nom de la requérante était justifiée au regard des critères juridiques applicables.

63      Premièrement, il y a lieu de considérer que le contexte dans lequel se sont inscrites les mesures restrictives prises à l’encontre de la requérante était connu de celle-ci, ce que, d’ailleurs, elle ne conteste pas. Il suffit de relever, à cet égard, que les actes en cause font tous mention, dans leurs considérants, de la « gravité de la situation » en Biélorussie et font référence à la décision 2010/639 et au règlement n° 725/2006, qui eux-mêmes font mention de la position commune 2006/276, citée au point 4 ci-dessus, et de la position commune 2006/362, citée au point 5 ci-dessus, qui décrivent le contexte politique de la Biélorussie.

64      Deuxièmement, quant aux raisons pour lesquelles des mesures restrictives frappent concrètement la requérante, il y a lieu de rappeler que, par la décision 2011/357 et le règlement n° 588/2011, le Conseil a inscrit le nom de la requérante sur les listes au motif qu’elle était une « [e]ntité contrôlée par M. Peftiev Vladimir » et que, par la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011, le nom de la requérante a été maintenu sur les listes au motif, en substance, qu’elle était une entité contrôlée par M. Peftiev Vladimir en liaison avec M. Dzmitry Aliaksandravich Lukashenko.

65      Il ressort de la jurisprudence que lorsque les fonds d’une personne ou d’une entité déjà visée par des mesures restrictives sont gelés, il existe un risque non négligeable que celle-ci exerce une pression sur les entités qu’elle détient ou contrôle ou qui lui appartiennent pour contourner l’effet des mesures qui la visent. Par conséquent, le gel des fonds de ces entités est nécessaire et approprié pour assurer l’efficacité des mesures adoptées et garantir que ces mesures ne seront pas contournées (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil, T‑492/10, non encore publié au Recueil, point 55).

66      Toutefois, cette jurisprudence n’est applicable qu’à condition que les actes par lesquels les mesures restrictives en cause ont été adoptées prévoient l’application de celles-ci aux personnes morales ou entités détenues ou contrôlées par celles déjà visées (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil, C‑380/09 P, non encore publié au Recueil, points 39 et 75 à 79, et arrêt du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil, point 65 supra, points 55 et 56).

67      Or, à la date d’adoption de la décision 2011/357, du règlement n° 588/2011, de la décision 2011/666 et du règlement d’exécution n° 1000/2011, il ressortait de l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la décision 2010/639 et de l’article 2, paragraphes 1 et 5, du règlement n° 765/2006 que seuls étaient visés par l’annexe IIIA et l’annexe IA, d’une part, les personnes responsables des atteintes aux normes électorales internationales qui avaient marqué l’élection présidentielle organisée en Biélorussie le 19 décembre 2010 ainsi que de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique et, d’autre part, les personnes physiques ou morales, les entités et les organismes qui leur étaient associés.

68      En effet, à la date d’adoption de la décision 2011/357, du règlement n° 588/2011, de la décision 2011/666 et du règlement d’exécution n° 1000/2011, ni la décision 2010/639 ni le règlement n° 765/2006, dans leur version applicable à l’espèce, ne prévoyaient la possibilité, pour le Conseil, d’inscrire sur les listes les personnes morales, les entités ou les organismes détenus ou contrôlés par d’autres personnes ou entités inscrites sur ces listes. Le Conseil a prévu cette faculté à l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2012/642 et à l’article 2 du règlement n° 765/2006, tel que modifié par le règlement n° 1014/2012, soit postérieurement à l’adoption de la décision 2011/357, du règlement n° 588/2011, de la décision 2011/666 et du règlement d’exécution n° 1000/2011.

69      En l’espèce, il y a lieu de constater que, par les motivations issues de la décision 2011/357, du règlement n° 588/2011, de la décision 2011/666 et du règlement d’exécution n° 1000/2011, la requérante ne peut être rattachée à aucune des deux catégories définies au point 67 ci-dessus. Ces motivations ne visent ni une personne physique responsable des atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle organisée en Biélorussie le 19 décembre 2010 ou de la répression à l’égard de la société civile et de l’opposition démocratique, ni une entité associée aux responsables visés par les dispositions citées au point 67 ci-dessus.

70      Il s’ensuit que la motivation de l’inscription et du maintien du nom de la requérante sur les listes de l’annexe IIIA et de l’annexe IA, par la décision 2011/357, le règlement n° 588/2011, la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011, n’a pas permis à cette dernière, au regard des dispositions citées au point 67 ci-dessus, de comprendre pour quelle raison son nom était inscrit sur ces listes, dès lors qu’elle ne permettait pas de déterminer sur quel critère justifiant l’adoption des mesures restrictives le Conseil s’était fondé.

71      En revanche, en ce qui concerne la motivation de l’inscription du nom de la requérante sur les listes par la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la décision 2012/642 et l’article 2, paragraphe 5, du règlement n° 765/2006, tel que modifié par le règlement n° 1014/2012, les personnes et entités inscrites sur les listes sont, notamment, « les personnes physiques ou morales, les entités ou les organismes qui profitent du régime de Loukashenko ou le soutiennent, ainsi que les personnes morales, les entités ou les organismes qu’ils détiennent ou contrôlent ».

72      Ainsi qu’il ressort des points 25 et 28 ci-dessus, la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 ont maintenu le nom de la requérante sur les listes au motif, en substance, qu’elle était une entité contrôlée par M. Peftiev en liaison avec M. Dzmitry Aliaksandravich Lukashenko.

73      Au regard des dispositions citées au point 71 ci-dessus, la requérante était donc en mesure de comprendre les raisons pour lesquelles son nom avait été maintenu sur les listes par la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012. La requérante a d’ailleurs été en mesure de contester utilement le bien-fondé du maintien de son nom sur les listes par les actes susmentionnés, ce que démontre son argumentation exposée dans ses écritures ainsi qu’à l’audience.

74      Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 sont suffisamment motivés en ce qui concerne la requérante.

75      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’invocation, par la requérante, de l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra. Il convient de rappeler, en effet, que le caractère suffisant de la motivation doit être apprécié individuellement dans chaque affaire, en fonction des circonstances de l’espèce. Or, la motivation de l’inscription du nom de la partie requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra, est différente de celle à l’origine de l’inscription du nom de la requérante dans la présente affaire. La solution de l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra, ne saurait donc être transposée en l’espèce. En tout état de cause, il y a lieu de constater que l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra, a été annulé par la Cour au motif que le Tribunal avait erronément estimé que la décision attaquée était insuffisamment motivée. Au surplus, il y a lieu d’ajouter que les arrêts Kadio Morokro/Conseil et HTTS/Conseil, point 54 supra, sont certes postérieurs à l’arrêt Tay Za/Conseil, point 54 supra, mais antérieurs à l’arrêt Bamba/Conseil, point 54 supra.

76      Il s’ensuit que le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation doit être accueilli en ce qui concerne la décision 2011/357, le règlement n° 588/2011, la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011, pour autant que ces actes visent la requérante, et être rejeté en ce qui concerne la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012.

77      En conséquence, les autres moyens du recours seront examinés uniquement en ce qui concerne la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012.

 Sur le moyen tiré d’une violation des droits de la défense et du droit d’être entendu

78      La requérante soutient que les actes attaqués portent atteinte à ses droits de la défense et à son droit d’être entendue équitablement, au sens de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et des articles 6 et 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »).

79      Elle fait valoir à cet égard, premièrement, que, contrairement à ce que prétend le Conseil, les droits de la défense s’appliquent à elle, deuxièmement, que les actes attaqués ne prévoient à aucun moment la communication des motifs de l’inscription de son nom sur les listes, ce qui ne lui permettrait d’exercer ni ses droits de la défense ni son droit de demander le retrait de son nom de ces listes, troisièmement, que les mesures restrictives prévues par les actes attaqués constituent des sanctions pénales qui justifieraient, en tant que telles, l’application des garanties prévues en matière pénale par l’article 6 de la CEDH, quatrièmement, que, compte tenu du caractère insuffisamment motivé des actes attaqués, ses droits de la défense n’ont pu être exercés utilement, cinquièmement, que les motifs de l’inscription de son nom sur les listes ne lui ont, à aucun moment, été personnellement notifiés et qu’elle n’a été entendue ni avant ni après l’adoption des actes attaqués. À cet égard, la requérante prétend que le droit d’être entendu équitablement requiert qu’elle soit entendue avant l’adoption des actes attaqués. Sixièmement, la requérante soutient que ses droits de la défense ont été substantiellement compromis par le fait que l’autorité nationale compétente saisie, à savoir le ministère des Affaires étrangères de la République de Lituanie, lui aurait refusé le déblocage de fonds aux fins de payer la prestation de services juridiques nécessaires en vue d’assurer sa défense. Septièmement, la requérante prétend que la procédure consistant à demander le réexamen de l’inscription de son nom sur les listes aurait été, en ce qui la concerne, inefficace. La requérante indique à cet égard que les mesures subséquentes de gel de fonds auraient été adoptées avant même qu’une réponse à sa demande de réexamen du 8 août 2011 ait été rendue puisque celle-ci n’est intervenue que le 14 novembre 2011.

80      Le Conseil conteste l’argumentation de la requérante. Il prétend notamment que, dans une procédure législative aboutissant à l’adoption de sanctions à l’encontre d’un pays tiers frappant certaines catégories de ses ressortissants, les droits de la défense ne s’appliquent pas à ces catégories. Il ajoute que, en tout état de cause, il a respecté les droits de la défense de la requérante.

–       Sur l’applicabilité des droits de la défense à la requérante

81      Il y a lieu de relever, d’abord, que l’arrêt Tay Za/Conseil, point 54 supra, ayant été annulé sur pourvoi dans son intégralité par l’arrêt de la Cour du 13 mars 2012, Tay Za/Conseil (C‑376/10 P, non encore publié au Recueil), les constats opérés dans ledit arrêt ne font plus partie de l’ordre juridique de l’Union et ne peuvent donc être valablement invoqués par le Conseil (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil, point 65 supra, point 78, et du 20 mars 2013, Bank Saderat/Conseil, T‑495/10, non publié au Recueil, point 73).

82      Il convient de rappeler, ensuite, que l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la décision 2012/642 et l’article 8 bis, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 765/2006, dans leur version applicable à l’espèce, prévoient des dispositions garantissant les droits de la défense des personnes et entités visées par des mesures restrictives adoptées en vertu de ces textes.

83      En tout état de cause, selon la jurisprudence, le respect des droits de la défense, et notamment du droit d’être entendu, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une entité et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union et doit être assuré, même en l’absence de toute règlementation concernant la procédure en cause (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, point 59 supra, point 91).

84      En conséquence, il y a lieu de considérer que les droits de la défense s’appliquent à la requérante et que le respect de ces droits fait l’objet du contrôle du juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 20 février 2013, Melli Bank/Conseil, point 65 supra, point 79, et arrêt Bank Saderat/Conseil, point 81 supra, point 74).

85      L’argument du Conseil doit donc être rejeté.

–       Sur le grief selon lequel les actes en cause ne prévoient pas la communication des motifs de l’inscription du nom de la requérante sur les listes

86      L’article 6, paragraphes 2 et 3, de la décision 2012/642 et l’article 8 bis, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 765/2006, dans leur version applicable à l’espèce, prévoient, d’une part, que le Conseil communique à la personne concernée sa décision, y compris les motifs de l’inscription de son nom sur la liste, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter ses observations et, d’autre part, que, si des observations sont formulées ou si de nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, le Conseil revoit sa décision et en informe la personne concernée en conséquence.

87      Il s’ensuit que la requérante ne saurait soutenir que les actes en cause ne prévoient à aucun moment la communication des motifs détaillés de l’inscription de son nom sur les listes, ne lui permettant pas d’exercer ses droits de la défense et son droit d’être entendu ni son droit d’accès à une procédure lui permettant de demander le retrait de son nom de ces listes.

88      Le présent grief doit donc être rejeté.

–       Sur l’argument selon lequel les mesures restrictives constituent des sanctions pénales

89      Il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les mesures restrictives de gel de fonds ne sont pas de nature pénale (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 11 juillet 2007, Sison/Conseil, T‑47/03, non publié au Recueil, point 101, et du 7 décembre 2010, Fahas/Conseil, T‑49/07, Rec. p. II‑5555, point 67). En effet, les avoirs des intéressés n’étant pas confisqués en tant que produits d’un crime, mais gelés à titre conservatoire, ces mesures ne constituent pas une sanction pénale et elles n’impliquent, par ailleurs, aucune accusation de cette nature (voir, en ce sens, arrêt Sison/Conseil, précité, point 101).

90      La requérante ne saurait donc soutenir que les mesures restrictives dont elle fait l’objet constituent des sanctions pénales qui, en tant que telles, justifient le respect des garanties prévues en matière pénale par l’article 6 de la CEDH.

91      Le présent argument doit donc être rejeté.

–       Sur le grief selon lequel la requérante n’a jamais été personnellement informée des motifs retenus contre elle et n’a été entendue ni avant ni après l’adoption des actes contestés

92      Comme il a été mentionné au point 86 ci-dessus, l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2012/642 et l’article 8 bis, paragraphe 2, du règlement n° 765/2006, dans leur version applicable à l’espèce, prévoient que le Conseil communique sa décision à la personne physique ou morale, l’entité ou l’organisme concerné, y compris les motifs de l’inscription sur la liste, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter des observations.

93      En l’espèce, par courrier du 7 novembre 2012, cité au point 29 ci-dessus, le Conseil a informé la requérante du maintien de son nom sur les listes par la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012.

94      En outre, selon la jurisprudence, le respect des droits de la défense, et, en particulier, du droit d’être entendu, s’agissant de mesures restrictives, ne requiert pas que les autorités de l’Union, préalablement à l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur la liste imposant des mesures restrictives, communiquent les motifs de cette inscription à la personne ou à l’entité concernée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, Rec. p. I‑6351, point 338).

95      En effet, une telle communication préalable serait de nature à compromettre l’efficacité des mesures de gel de fonds et de ressources économiques imposées par lesdites autorités (voir, en ce sens, arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, point 55 supra, point 339). Afin d’atteindre leur objectif, de telles mesures doivent, par leur nature même, bénéficier d’un effet de surprise et s’appliquer avec effet immédiat (voir, en ce sens, arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, point 94 supra, point 340, et arrêt du Tribunal du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, non encore publié au Recueil, points 37 à 40).

96      Il convient toutefois de relever que, dans le cadre de l’adoption de la décision 2012/642 et du règlement d’exécution n° 1017/2012, qui sont des actes subséquents ayant maintenu le nom de la requérante sur les listes, l’argument de l’effet de surprise desdites mesures ne peut en principe être valablement invoqué (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 21 décembre 2011, France/People’s Mojahedin Organization of Iran, C‑27/09 P, Rec. p. I‑13427, point 62, et arrêt Makhlouf/Conseil, point 95 supra, point 42).

97      Il ressort cependant de la jurisprudence que le droit d’être entendu préalablement à l’adoption d’actes maintenant des mesures restrictives à l’égard de personnes déjà visées par celles-ci présuppose que le Conseil ait retenu de nouveaux éléments à l’encontre de ces personnes (voir, en ce sens et par analogie, arrêt France/People’s Mojahedin Organization of Iran, point 96 supra, point 63, et arrêt Makhlouf/Conseil, point 95 supra, point 43).

98      En l’espèce, d’une part, il y a lieu de relever que, par la décision 2011/666 et le règlement d’exécution n° 1000/2011, le Conseil avait déjà maintenu la requérante sur les listes au motif qu’elle était considérée comme une « [e]ntité contrôlée par M. Peftiev Vladimir en liaison avec Lukachenko, Dzmitry Aliaksandravich, par l’intermédiaire du contrôle exercé par ce dernier sur le club sportif du président, qui détient une participation majoritaire obligatoire de l’État dans Sport-Pari ».

99      D’autre part, il importe de constater que, dans son courrier du 14 novembre 2011, cité au point 20 ci-dessus, le Conseil avait précisé que M. Peftiev contrôlait la requérante, par l’intermédiaire de BT Telecommunications, à hauteur de 27 % des parts, en liaison avec l’un des fils du président Lukashenko du fait d’une participation majoritaire obligatoire de l’État dans Sport-Pari à hauteur de 69 %.

100    Dans ces conditions, ainsi qu’il ressort des points 25 et 28 ci-dessus, il y a lieu de considérer que, par la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012, le Conseil n’a retenu aucun élément n’ayant pas déjà été communiqué à la requérante à la suite de l’inscription de son nom initiale, lors du maintien de son nom sur les listes.

101    Il s’ensuit que le Conseil n’était pas tenu de communiquer à la requérante les motifs de son maintien sur les listes, préalablement à l’adoption de la décision 2012/642 et du règlement d’exécution n° 1017/2012.

102    Le présent grief doit donc être rejeté.

–       Sur le grief selon lequel les actes attaqués seraient insuffisamment motivés

103    Ainsi qu’il ressort des points 71 à 75 ci‑dessus, la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 étaient assortis d’informations suffisamment précises quant aux motifs du maintien du nom de la requérante sur les listes.

104    La requérante ne saurait donc soutenir que ces actes, en ce qu’ils n’auraient pas indiqué de façon détaillée les raisons de l’inscription de son nom sur les listes, ne lui permettaient pas d’exercer ses droits de la défense et son droit d’être entendu.

105    Le présent grief doit donc être rejeté.

–       Sur le grief selon lequel les droits de la défense de la requérante seraient substantiellement compromis du fait du refus de déblocage de ses fonds par la République de Lituanie

106    Le présent grief est inopérant en ce qu’il ne vise ni la légalité substantielle des actes attaqués ni la procédure suivie par le Conseil lors de leur adoption.

107    En tout état de cause, il convient de relever que la requérante se contente de soutenir que ses droits de la défense ont été « substantiellement compromis » du fait du refus, par la République de Lituanie, de débloquer ses fonds gelés, sans établir que les difficultés, notamment de nature financière, prétendument liées au refus de déblocage des fonds gelés l’ont empêchée d’exercer ses droits de la défense.

108    Le présent grief doit donc être rejeté.

–       Sur le grief selon lequel la procédure de réexamen aurait été, concernant la requérante, inefficace

109    Aux termes de l’article 6, paragraphe 2, de la décision 2012/642 et de l’article 8 bis, paragraphe 2, du règlement n° 765/2006, dans leur version applicable à l’espèce, le Conseil communique à la personne concernée sa décision, y compris les motifs de l’inscription de son nom sur la liste, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter ses observations. En leur paragraphe 3, ces articles prévoient que, si des observations sont formulées ou si de nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, le Conseil revoit sa décision et en informe la personne concernée en conséquence.

110    Les avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives, cités aux points 12 et 18 ci-dessus, indiquent que les personnes et entités peuvent adresser au Conseil une demande de réexamen de la décision par laquelle leurs noms ont été inscrits sur les listes.

111    En l’espèce, la requérante a demandé le réexamen de l’inscription de son nom sur les listes par courriers des 8 août et 7 novembre 2011, cités respectivement aux points 15 et 19 ci-dessus.

112    Le Conseil y a répondu le 14 novembre 2011, soit dans un délai qui ne saurait être considéré comme déraisonnable.

113    Dans la réponse du Conseil du 14 novembre 2011, celui-ci indique que le maintien du nom de la requérante sur les listes est justifié, compte tenu des motifs retenus contre elle, lesquels sont explicités par le Conseil, ainsi qu’il ressort du point 20 ci-dessus.

114    Dans ces conditions, la requérante ne saurait soutenir que la réponse du Conseil du 14 novembre 2011 ne constitue pas une réponse à sa demande de réexamen.

115    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument selon lequel le courrier du 14 novembre 2011 est intervenu après l’adoption de la décision 2011/666 et du règlement d’exécution n° 1000/2011 qui ont maintenu le nom de la requérante sur les listes. En effet, la règlementation en cause n’impose pas au Conseil de répondre à la demande de réexamen avant l’adoption de la décision de maintien du nom de l’intéressé sur les listes. Le Conseil peut concomitamment examiner une demande de réexamen et le maintien du nom d’une personne sur une liste.

116    Par ailleurs, la requérante se contente d’alléguer que le fait que les décisions de maintien de son nom sur les listes aient été adoptées avant que le Conseil ne réponde à ses demandes de réexamen démontre que la procédure de réexamen est inefficace. Toutefois, elle n’invoque aucun élément concret tendant à démontrer que le Conseil n’a pas correctement examiné ses demandes de réexamen.

117    Il y a lieu de relever, au surplus, ainsi que l’indique le Conseil, que les précisions apportées à la motivation des actes en cause, justifiant le maintien du nom de la requérante sur les listes, font suite à la demande de réexamen de la requérante du 8 août 2011, ce qui implique nécessairement qu’un réexamen a eu lieu.

118    Dans ces conditions, la requérante ne saurait donc soutenir qu’elle n’a pas eu la possibilité de demander effectivement le réexamen de l’inscription de son nom sur les listes ou que ce réexamen était inefficace.

119    Il s’ensuit que le présent grief doit être rejeté ainsi que, partant, le présent moyen dans son ensemble.

 Sur le moyen tiré d’erreurs manifestes d’appréciation

120    La requérante soutient, en substance, que le Conseil a commis plusieurs erreurs manifestes d’appréciation. Elle fait valoir à cet égard, premièrement, qu’elle n’est pas contrôlée par M. Peftiev, qui ne détiendrait, par l’intermédiaire de la société BT Telecommunications, que 27 % de son capital. La requérante soutient, deuxièmement, qu’elle n’a pas le statut de « loterie nationale » qui lui est prêté par le Conseil. Elle indique, à cet égard, que l’État (par l’intermédiaire de l’association républicaine d’État « President’s Sport Club ») aurait une participation dans son capital de l’ordre de 69 %, ce pour répondre à une obligation légale. Troisièmement, la requérante prétend qu’elle n’a pas participé aux atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle du 19 décembre 2010 en Biélorussie, ni aux atteintes aux droits de l’homme, ni au commerce d’équipements susceptibles d’être utilisés à des fins de répression en Biélorussie. La requérante ne ferait que s’occuper de l’organisation de loteries en ligne et n’utiliserait ni ses activités ni ses finances pour soutenir le régime biélorusse. Or, il serait nécessaire pour légitimer l’inscription de son nom sur les listes litigieuses que le Conseil démontre qu’il existe un lien raisonnable entre la requérante et les actes susmentionnés, et non seulement qu’il se contente de relever qu’elle est associée à une personne qui est elle-même associée aux responsables de ces actes.

121    Le Conseil rétorque, premièrement, que la requérante admet que 27 % de ses parts sont détenues par M. Peftiev, par l’intermédiaire de la société BT Telecommunications. Il soutient, deuxièmement, que les 27 % de parts de la requérante détenues par M. Peftiev, par l’intermédiaire de la société BT Telecommunications, doivent être ajoutés aux 69 % des parts de la requérante détenues par l’association President’s Sport Club, laquelle est contrôlée par M. Dzmitry Lukashenko, qui est l’un des fils du président Lukashenko. Selon le Conseil, compte tenu du motif d’inscription de M. Peftiev, à savoir son association au président Lukashenko et à sa famille, il y a lieu de conclure que la requérante est contrôlée par M. Peftiev. Le Conseil indique, troisièmement, que la requérante n’est pas inscrite sur les listes au motif qu’elle aurait participé aux atteintes aux normes électorales internationales et aux droits de l’homme ou au commerce d’équipements susceptibles d’être utilisés à des fins de répression en Biélorussie, mais au motif qu’elle est contrôlée par M. Peftiev.

122    Comme il est mentionné au point 71 ci-dessus, à la date d’adoption de la décision 2012/642 et du règlement d’exécution n° 1017/2012, l’article 4, paragraphe 1, sous b), de la décision 2012/642 et l’article 2, paragraphe 5, du règlement n° 765/2006, tel que modifié par le règlement n° 1014/2012, prévoyaient que les personnes et les entités inscrits sur les listes étaient, notamment, « les personnes physiques ou morales, les entités ou les organismes qui profitent du régime de Loukashenko ou le soutiennent, ainsi que les personnes morales, les entités ou les organismes qu’ils détiennent ou contrôlent ».

123    Selon la jurisprudence, lorsqu’une personne est inscrite sur la liste en tant qu’elle est associée au régime ou le soutient, tel que M. Peftiev, il existe un risque non négligeable que celle-ci exerce une pression sur les entités qu’elle détient ou contrôle ou qui lui appartiennent, pour contourner l’effet des mesures qui la visent. Par conséquent, le gel des fonds de ces entités est nécessaire et approprié pour assurer l’efficacité des mesures adoptées et garantir que ces mesures ne seront pas contournées [voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 13 mars 2012, Melli Bank/Conseil, point 66 supra, point 58 ; du Tribunal du 6 septembre 2013, Persia International Bank/Conseil, T‑493/10, non encore publié au Recueil (Extraits), et Bank Kargoshaei e.a./Conseil, point 51 supra, point 147].

124    En l’espèce, il ressort de la décision 2012/642 et du règlement d’exécution n° 1017/2012 que la requérante est inscrite sur les listes au motif suivant :

« Entité contrôlée par Vladimir Peftiev, par l’intermédiaire de ses entités Business Network et BT Telecommunications. Sport-Pari est contrôlée par M. Peftiev en liaison avec Dzmitry Aliaksandravich Loukachenka, par l’intermédiaire du contrôle exercé par ce dernier sur le club sportif du président, qui détient une participation majoritaire obligatoire de l’État dans Sport-Pari. »

125    Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, il y a d’abord lieu de constater que celle-ci ne figure pas sur les listes au motif qu’elle aurait participé aux atteintes aux normes électorales internationales qui ont marqué l’élection présidentielle du 19 décembre 2010 en Biélorussie et aux atteintes aux droits de l’homme ou au commerce d’équipements susceptibles d’être utilisés à des fins de répression en Biélorussie. L’argument de la requérante est donc inopérant.

126    Il est constant entre les parties que, à la date d’adoption de la décision 2012/642 et du règlement d’exécution n° 1017/2012, M. Peftiev détenait 27 % du capital de la requérante, par l’intermédiaire de la société BT Telecommunications. Toutefois, il ne saurait être inféré de cette seule participation au capital de la requérante que M. Peftiev contrôlait cette dernière.

127    Le Conseil soutient, à cet égard, que la participation de M. Peftiev au capital de la requérante doit être couplée aux 69 % des parts détenues par l’association President’s Sport Club. Selon le Conseil, en effet, cette association est dirigée par l’un des fils du président Lukashenko, M. Dzmitry Lukashenko. Or, M. Peftiev serait inscrit sur les listes au motif de ses liens avec la famille du président Lukashenko, de sorte qu’il serait possible de « raisonnablement conclure » que M. Peftiev contrôle la requérante en liaison avec M. Dzmitry Lukashenko.

128    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux exige que, au titre du contrôle de la légalité des motifs sur lesquels est fondée la décision d’inscrire ou de maintenir le nom d’une personne ou d’une entité sur la liste, le juge de l’Union s’assure que cette décision, qui revêt une portée individuelle pour cette personne ou entité, repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui sous-tend ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur le point de savoir si ces motifs ou, à tout le moins, l’un d’eux considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, non encore publié au Recueil, point 119).

129    À cette fin, il incombe au juge de l’Union de procéder à cet examen en demandant, le cas échéant, à l’autorité compétente de l’Union de produire des informations ou des éléments de preuve, confidentiels ou non, pertinents aux fins d’un tel examen (arrêt Commission e.a./Kadi, point 128 supra, point 120). C’est en effet à l’autorité compétente de l’Union qu’il appartient, en cas de contestation, d’établir le bien-fondé des motifs retenus à l’encontre de la personne concernée, et non à cette dernière d’apporter la preuve négative de l’absence de bien-fondé desdits motifs (voir, en ce sens, arrêt Commission e.a./Kadi, point 128 supra, point 121). À cette fin, il n’est pas requis que ladite autorité produise devant le juge de l’Union l’ensemble des informations et des éléments de preuve inhérents aux motifs allégués. Il importe toutefois que les informations ou les éléments produits étayent les motifs retenus à l’encontre de la personne concernée (voir, en ce sens, arrêt Commission e.a./Kadi, point 128 supra, point 122).

130    En l’espèce, le Conseil n’apporte aucun élément concret permettant d’établir que M. Peftiev et M. Dzmitry Lukashenko contrôlent ensemble la requérante. Le Conseil se contente de relever que, dans la mesure où M. Peftiev est inscrit sur les listes au motif, notamment, qu’il entretient des liens avec la famille Lukashenko, il était possible de « raisonnablement conclure que M. Peftiev contrôle la requérante en liaison avec Dzmitry Lukashenko ».

131    Il y a donc lieu de considérer que le Conseil n’a pas établi le bien-fondé du motif allégué à l’encontre de la requérante pour justifier le maintien de son nom sur les listes par la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012.

132    Il s’ensuit que la décision 2012/642 et le règlement d’exécution n° 1017/2012 doivent, en ce qu’ils visent la requérante, être annulés, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du recours.

133    Il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être accueilli dans son intégralité et que les actes attaqués doivent être annulés.

 Sur les dépens

134    L’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure dispose que toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

135    Le Conseil ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la requérante.

136    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues au litige supportent leurs dépens. En conséquence, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision 2011/357/PESC du Conseil, du 20 juin 2011, modifiant la décision 2010/639/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de certains fonctionnaires de Biélorussie, le règlement (UE) n° 588/2011 du Conseil, du 20 juin 2011, modifiant le règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre du président Lukashenko et de certains fonctionnaires de Biélorussie, la décision 2011/666/PESC du Conseil, du 10 octobre 2011, modifiant la décision 2010/639/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie, le règlement d’exécution (UE) n° 1000/2011 du Conseil, du 10 octobre 2011, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie, la décision 2012/642/PESC du Conseil, du 15 octobre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie, et le règlement d’exécution (UE) n° 1017/2012 du Conseil, du 6 novembre 2012, mettant en œuvre l’article 8 bis, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 765/2006 concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Biélorussie, sont annulés, en tant qu’ils visent Sport-pari ZAO.

2)      Le Conseil de l’Union européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Sport-pari.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 décembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.