Language of document : ECLI:EU:T:2010:314

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (troisième chambre)

20 juillet 2010 (1)

« Recours en annulation – Refus de la Commission d’engager une procédure en manquement – Acte attaquable – Défaut d’affectation directe – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T-186/10,

Jean-Charles Perret, demeurant à Saint-Martin-d’Écublei (France), représenté par Me J.-P. Ekeu, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de l’acte du directeur général en charge de la direction générale de l’agriculture et du développement rural de la Commission, du 8 mars 2010, par lequel celui-ci annonce qu’il proposera prochainement à la Commission de refuser l’engagement d’une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République française,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. J. Azizi (rapporteur), président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions de la partie requérante

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 avril 2010, la partie requérante a introduit le présent recours.

2        Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’acte du directeur général de la Commission en charge de la direction générale de l’agriculture et du développement rural, du 8 mars 2010, portant proposition à la Commission de refuser d’engager une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République française.

 En droit

3        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

4        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

5        Le présent recours, introduit au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, tend à l’annulation de l’acte du directeur général en charge de la direction générale de l’agriculture et du développement rural de la Commission par lequel celui-ci informe le requérant que, à la suite de sa demande d’ouvrir une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République française, il proposera à la Commission de ne pas engager une telle procédure.

6        Or, il ressort de la jurisprudence que, en principe, ne constituent des actes attaquables que les mesures qui fixent définitivement la position de l’institution au terme d’une procédure, à l’exclusion des actes préparatoires à la décision finale. Ce n’est qu’à l’occasion d’un recours dirigé contre la décision finale qu’une partie requérante peut faire valoir, à titre incident, l’irrégularité de tels actes préparatoires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 14 février 1989, Bossi/Commission, 346/87, Rec. p. 303, point 23 et ordonnance de la Cour du 7 avril 2005, Van Dyck/Commission, C-160/04 P, non publiée au Recueil, point 32).

7        En l’espèce, force est de constater que par le biais de l’acte du 8 mars 2010 en la forme d’une lettre, le directeur général en charge de la direction générale de l’agriculture et du développement rural de la Commission se limite à informer le requérant que la direction générale en question n’a pas l’intention de proposer à la Commission d’ouvrir la procédure d’infraction prévue à l’article 258 TFUE. Par conséquent, l’acte attaqué ne constitue pas un acte arrêtant la décision finale de l’institution, mais, tout au plus, un acte préparatoire qui s’inscrit dans l’élaboration d’une décision finale.

8        En tout état de cause, à supposer même que l’acte attaqué eût été un acte définitif ayant le contenu avancé par le requérant, selon une jurisprudence constante, les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission d’engager une procédure en constatation de manquement à l’encontre d’un État membre (ordonnance de la Cour du 12 juin 1992, Asia Motor France/Commission, C‑29/92, Rec. p. I‑3935, point 21 ; ordonnance du Tribunal du 13 novembre 1995, Dumez/Commission, T‑126/95, Rec. p. II‑2863, point 33, et arrêt du Tribunal du 22 mai 1996, AITEC/Commission, T‑277/94, Rec. p. II‑351, point 55).

9        La jurisprudence citée au point 8 ci‑dessus est fondée sur le pouvoir discrétionnaire conféré à la Commission par l’article 258 TFUE lui‑même qui exclut le droit pour les particuliers d’exiger de la Commission qu’elle prenne position dans un sens déterminé et d’introduire un recours en annulation contre son refus d’agir (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 mai 1990, Sonito e.a./Commission, C‑87/89, Rec. p. I‑1981, point 6).

10      Cette jurisprudence est également fondée sur la circonstance qu’un recours en annulation formé par une personne physique contre une décision dont elle n’est pas le destinataire n’est, en application de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, recevable que si cette décision la concerne directement et individuellement.

11      Or, il a été jugé que les actes pris par la Commission en application de l’article 258 TFUE sont adressés aux États membres et ne concernent pas directement et individuellement des personnes physiques ou morales (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, point 13).

12      Il s’ensuit que la demande de la partie requérante visant l’annulation de l’acte du directeur général en charge de la direction générale de l’agriculture et du développement rural de la Commission, du 8 mars 2010, portant proposition à la Commission de refuser d’engager une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République française, doit être rejetée comme manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de signifier le recours à la Commission.

 Sur les dépens

13      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la Commission et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La partie requérante supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 20 juillet 2010.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Azizi


1 Langue de procédure : le français.