Language of document : ECLI:EU:T:2015:84

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

10 février 2015 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale NANO – Droit d’être entendu – Obligation de motivation – Examen d’office des faits – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑379/13,

Innovation First, Inc., établie à Greenville, Caroline du Sud (États-Unis), représentée par Me J. Zecher, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme A. Poch, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 19 avril 2013 (affaire R 1271/2012‑1), relative à une demande d’enregistrement du signe verbal NANO comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. H. Kanninen, président, Mme I. Pelikánová (rapporteur) et M. E. Buttigieg, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 juillet 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 novembre 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

      Arrêt      

 Antécédents du litige

1        Le 7 juin 2010, la requérante, Innovation First, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1) .

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NANO.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 9 et 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Robots à usage éducatif, à savoir robots d’apprentissage, et leurs pièces structurelles ; kits de construction de robots éducatifs ; batteries pour les produits précités ; étuis pour tous les produits précités ; programmes informatiques de conception et de commande à distance de jouets motorisés ; tous les produits précités à l’exception des robots androïdes, kits de construction de robots androïdes et produits spécialement conçus pour des robots androïdes » ;

–        classe 28 : « Robots (jouets) ; kits pour la construction de robots (jouets) ; robots (jouets) à usage éducatif et leurs pièces structurelles ; robots de loisirs, à savoir robots à usage récréatif, et leurs pièces structurelles ; kits pour la construction de robots à usage récréatif ; ponts (jouets), structures de construction (jouets) et pistes de véhicules (jouets) ; étuis pour tous les produits précités ; tous les produits précités à l’exception des robots androïdes, kits de construction de robots androïdes et produits spécialement conçus pour des robots androïdes ».

4        Par décision du 22 juin 2012, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement pour autant qu’elle visait les produits énumérés au point 3 ci‑dessus. Selon l’examinateur, pour ces produits, la marque allait être perçue par le public pertinent comme indiquant soit leur petite taille, soit qu’ils étaient issus des nanotechnologies. Par conséquent, de l’avis de l’examinateur, pour autant que les produits énumérés au point 3 ci‑dessus sont concernés, la marque demandée est descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

5        Le 10 juillet 2012, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 19 avril 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En premier lieu, elle a considéré que le public pertinent était composé tant de consommateurs moyens que de professionnels manipulant des technologies de l’information parlant l’espagnol, le danois, l’allemand, l’anglais, le français, l’italien, le portugais et le finnois. En deuxième lieu, elle a constaté que la marque demandée signifiait « extrêmement petit » ou « impliquant l’utilisation des nanotechnologies », nonobstant le fait que le terme « nano » était parfois utilisé en tant que préfixe. En troisième lieu, la chambre de recours a relevé que le terme « nano » n’était pas inhabituel par rapport aux produits énumérés au point 3 ci‑dessus, dès lors qu’il allait être interprété par le public pertinent en ce sens que ces derniers étaient de petite taille ou étaient basés sur la nanotechnologie. D’une part, elle a précisé, à cet égard, que la petite taille était une caractéristique souhaitée  des produits concernés. D’autre part, en réponse à un argument de la requérante tiré de ce que la taille extrêmement petite des produits rendrait leurs manipulation et observation très difficiles, voire dangereuses, la chambre de recours a précisé que, si le public pertinent pouvait ne pas être au courant de la signification mathématique exacte du terme « nano », il l’associerait, néanmoins, immédiatement à la petite taille du produit en question, ledit terme étant ainsi devenu une référence directe à cette caractéristique. En quatrième lieu, la chambre de recours a conclu, au vu de ces constats, que la marque demandée était descriptive des caractéristiques des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. En cinquième lieu, la chambre de recours a relevé que, dans la mesure où le terme « nano » n’était ni vague ni inhabituel par rapport aux produits énumérés au point 3 ci‑dessus, la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif à leur égard, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, en ce compris les dépens afférents à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        Au soutien de son recours, la requérante invoque cinq moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de son droit d’être entendue. Le deuxième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’article 76 du règlement n° 207/2009, dans la mesure où la chambre de recours se serait fondée sur des conjectures. Le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. Le cinquième moyen est tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

10      L’OHMI conteste le bien-fondé des moyens de la requérante.

11      Au vu de l’articulation de l’argumentation de la requérante, il y a lieu d’examiner les moyens dans l’ordre dans lequel ils ont été présentés, à l’exception des troisième et quatrième moyens, qui sont étroitement liés et doivent, par conséquent, être examinés ensemble.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation du droit d’être entendu de la requérante

12      La requérante soutient que la décision attaquée repose sur une prémisse factuelle sur laquelle elle n’a pas été mise en mesure de présenter ses observations. En effet, alors que l’examinateur se serait appuyé sur le constat selon lequel le terme « nano » renvoyait à la taille extrêmement petite du produit ou à l’usage de la nanotechnologie, la décision attaquée est fondée non pas sur la notion d’une taille « extrêmement petite », mais seulement sur celle d’une taille « petite », ainsi que le démontre son point 21. Dans ces circonstances, la requérante estime que son droit d’être entendue a été violé.

13      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

14      Selon l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques, le principe général de protection des droits de la défense. En vertu de ce principe général du droit de l’Union européenne, les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit à être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, mais non à la position finale que l’administration entend adopter [voir arrêt du 7 février 2007, Kustom Musical Amplification/OHMI (Forme d’une guitare), T‑317/05, Rec, EU:T:2007:39, points 24, 26 et 27 et jurisprudence citée].

15      L’article 37, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 précise, dans ce contexte, qu’une demande de marque communautaire ne peut être rejetée qu’après que le demandeur a été mis en mesure de retirer ou de modifier sa demande ou de présenter ses observations.

16      En l’espèce, il y a lieu de relever, d’abord, que, dans ses objections du 8 mars 2012 à l’enregistrement de la marque demandé, l’examinateur a relevé ce qui suit :

« Le mot demandé NANO signifie ‘extrêmement petit’ […] et ‘impliquant l’utilisation de la nanotechnologie : utilisé avec certains substantifs’ […]

Ainsi, le consommateur pertinent ne le percevra pas comme étant inhabituel, mais plutôt comme un concept pourvu de sens : l’utilisation de très petits appareils, matériaux ou autres structures.

[…]

L’expression NANO, prise dans sa globalité, informe immédiatement les consommateurs, sans réflexion supplémentaire, que les produits visés sont soit petits soit issus de la nanotechnologie.

Dès lors, cette expression contient une information évidente et directe sur les […] caractéristiques des produits concernés. »

17      Ce passage a été repris intégralement dans la décision de l’examinateur du 22 juin 2012.

18      Ainsi, contrairement à ce que prétend la requérante, l’OHMI a explicitement indiqué, déjà pendant la procédure devant l’examinateur, que, en raison de la signification « extrêmement petit » du terme « nano », la marque demandée allait être perçue comme se référant à la petite taille des produits concernés.

19      Ensuite, il y a lieu de remarquer que cette position a été comprise par la requérante, qui y a réagi dans le mémoire exposant les motifs de son recours contre la décision de l’examinateur. En effet, au point II.2.b de ce mémoire, la requérante a invoqué ce qui suit :

« Même à supposer que l’interprétation de ‘nano’ comme ‘extrêmement petit’ soit correcte, l’[e]xaminateur a fondé son raisonnement sur une autre interprétation. L’examinateur […] a considéré que le terme « nano » informe les consommateurs que les produits visés sont petits […] Ceci est remarquable dans la mesure où […] une différence considérable existe entre ‘petit’ et ‘extrêmement petit’ pour autant que les produits visés sont concernés. »

20      Enfin, il y a lieu de relever que, au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé, en réponse à l’argumentation de la requérante présentée devant elle, les raisons pour lesquelles, à son avis, l’expression « nano » allait être perçue comme se référant à la petite taille des produits concernés, nonobstant sa signification « extrêmement petit ».

21      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que l’OHMI a exposé, dès le stade de la procédure devant l’examinateur, sa position selon laquelle la marque demandée allait être perçue comme se référant à la petite taille des produits concernés. Cette position a été comprise par la requérante, qui y a répondu dans le mémoire exposant les motifs de son recours contre la décision de l’examinateur. La chambre de recours, pour sa part, a répondu aux observations de la requérante dans la décision attaquée.

22      Dès lors, c’est à tort que la requérante invoque que la décision attaquée est fondée sur une prémisse factuelle sur laquelle elle n’a pas été mise en mesure de présenter ses observations.

23      Partant, c’est également à tort que la requérante invoque une violation de son droit d’être entendue, ce qui implique qu’il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

24      La requérante soutient que l’OHMI a violé l’obligation de motivation en ce que la motivation de la décision attaquée est contradictoire. En effet, les conclusions de la chambre de recours relatives à la signification du terme « nano » ne seraient pas cohérentes, en ce que celle‑ci prétendrait à la fois, au point 17 de la décision attaquée, que ce terme signifie « extrêmement petit » et, au point 21, qu’il signifie « petit ».

25      Selon la requérante, d’une part, cette contradiction démontre que, de l’avis de la chambre de recours, la marque demandée n’est pas descriptive des produits visés au point 3 ci‑dessus dans sa signification « extrêmement petit », contrairement à la conclusion de l’examinateur. D’autre part, ladite contradiction porte sur la question centrale débattue dans la décision attaquée, ce qui implique que cette dernière est illégale.

26      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

27      En vertu de l’article 75 du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (voir, en ce sens, arrêt du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec, EU:C:2004:649, points 63 à 65).

28      En l’espèce, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que prétend la requérante, les constats selon lesquels, d’une part, le terme « nano » signifie « extrêmement petit » et, d’autre part, la marque demandée sera perçue par le public pertinent, pour les produits énumérés au point 3 ci‑dessus, comme se référant à leur petite taille ne sont pas contradictoires.

29      En effet, au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a explicitement relevé que, si le public pertinent pouvait ne pas être au courant de la signification mathématique exacte du terme « nano », il l’associerait, néanmoins, immédiatement à la petite taille du produit en question, ledit terme étant ainsi devenu une référence directe à cette caractéristique.

30      Ainsi, il ressort, de manière compréhensible, de la motivation de la décision attaquée que la chambre de recours s’est fondée sur la circonstance selon laquelle, dans la perception du public pertinent, le terme « nano » a acquis une signification qui s’écarte de sa définition exacte mathématique et, partant, de la référence à une dimension « extrêmement petite » et dénote, de façon plus générale, une dimension « petite ».

31      Dans ces circonstances, il y a lieu de rejeter le grief tiré de ce que la chambre de recours aurait violé l’obligation de motivation en adoptant la décision attaquée.

32      Ce constat implique, par ailleurs, que l’argument de la requérante reproduit au point 25 ci‑dessus, selon lequel la chambre de recours s’est effectivement distancée de la conclusion de l’examinateur en ce qui concerne le caractère descriptif de la marque demandée dans sa signification « extrêmement petit », repose sur une prémisse factuelle erronée. Tel est d’autant plus le cas que, ainsi qu’il ressort de l’examen du premier moyen aux points 14 à 23 ci‑dessus, la position de l’OHMI était fondée, dès le stade de la procédure devant l’examinateur, sur la considération selon laquelle la marque demandée allait être perçue comme se référant à la petite taille des produits concernés. En outre, en tout état de cause, l’allégation de la requérante est inopérante en ce qu’elle ne tend pas à identifier une absence ou une insuffisance de la motivation de la décision attaquée.

33      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur les troisième et quatrième moyens, tiré d’une violation de l’article 76 et de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

34      La requérante rappelle que, lorsqu’il examine le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire, l’OHMI est tenu de procéder à l’examen d’office des faits et doit se fonder sur des faits concrets, et non pas sur des suppositions ou de simples doutes.

35      Or, selon la requérante, d’une part, dans la décision attaquée la chambre de recours s’est appuyée sur de pures conjectures, selon lesquelles le terme « nano » serait associé à l’« idée d’un élément de petite dimension » et désignerait, en fin de compte, de manière directe, un « type de produit de petite dimension ». D’autre part, la décision attaquée écarterait des indices clairs et non ambigus mettant en question la position de la chambre de recours, figurant parmi les preuves rassemblées par l’examinateur.

36      La requérante estime que ces violations de l’obligation de procéder à un examen d’office des faits ont eu pour conséquence que la chambre de recours a conclu à tort, dans la décision attaquée, que la marque demandée était descriptive des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, alors même qu’elle ne présentait pas de lien suffisamment direct avec ces derniers.

37      L’OHMI conteste le bien-fondé des arguments de la requérante.

38      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci. Ces signes descriptifs sont réputés incapables de remplir la fonction essentielle des marques d’indication de l’origine (arrêt du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec, EU:C:2003:579, points 29 et 30).

39      L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que ces signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque (voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec, EU:C:2006:20, point 62 et jurisprudence citée).

40      Dans cette perspective, les signes et les indications visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du consommateur, à désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, un produit ou un service tel que celui pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêts du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec, EU:C:2001:461, point 39, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec, EU:T:2005:247, point 24].

41      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un lien suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou de ces services ou de l’une de leurs caractéristiques (arrêt PAPERLAB, point 40 supra, EU:T:2005:247, point 25).

42      Ainsi, le caractère descriptif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement du signe est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par les consommateurs de ces produits ou de ces services [arrêt du 14 juin 2007, Europig/OHMI (EUROPIG), T‑207/06, Rec, EU:T:2007:179, point 30].

43      En outre, il ressort de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 que, lors de l’examen du caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire, l’OHMI procède à l’examen d’office des faits. Afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue et d’assurer, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, que les marques dont l’usage pourrait être contesté avec succès devant les juridictions ne soient pas enregistrées, cet examen doit être concret. En particulier, l’OHMI ne saurait se prévaloir, sans justification pertinente, de suppositions ou de simples doutes (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2010, OHMI/Borco-Marken-Import Matthiesen, C‑265/09 P, Rec, EU:C:2010:508, points 44 à 46).

44      En l’espèce, il convient de relever, à titre liminaire, que la requérante ne conteste pas la définition du public pertinent retenue par la chambre de recours. Dans la mesure où cette définition n’est, par ailleurs, pas entachée d’erreur, il y lieu de se fonder sur elle lors de l’examen de la perception de la marque demandée par ledit public.

45      Dans ce contexte, en premier lieu, la requérante conteste que le terme « nano » signifie, en tant que tel, « extrêmement petit » et « impliquant l’utilisation des nanotechnologies », contrairement à ce qu’a retenu la chambre de recours. En effet, ces significations ne seraient pas étayées par les éléments de preuve invoqués par les instances de l’OHMI.

46      Ainsi, d’abord, la requérante fait valoir que les extraits des dictionnaires cités par l’examinateur et par la chambre de recours ne visent pas le terme « nano » en tant que tel, mais le préfixe « nano- », utilisé dans des mots composés. Or, il n’y aurait pas d’éléments établissant que la signification du préfixe « nano- », en tant que renvoi à la taille extrêmement petite des produits ou à l’utilisation des nanotechnologies, est transposable au terme « nano » utilisé seul.

47      À cet égard, la chambre de recours a relevé, au point 17 de la décision attaquée, que le fait que le terme « nano » est utilisé en tant que préfixe n’a pas pour conséquence que le public pertinent ne sera pas en mesure de lui attribuer un sens lorsqu’il est utilisé seul. Dans la mesure où cette considération est fondée sur des faits résultant de l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits, la requérante soutient à tort que la chambre de recours n’a pas présenté d’éléments de preuve pour l’étayer [voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2013, Airbus/OHMI (NEO), T‑236/12, Rec, EU:T:2013:343, point 37 et jurisprudence citée].

48      Au demeurant, la requérante n’invoque pas d’éléments tendant à démontrer que, dans le cas d’espèce, le public pertinent ne comprendra pas le terme « nano », utilisé seul, comme ayant la même signification que le préfixe « nano- » et, partant, comme renvoyant soit à la taille des produits soit à l’utilisation des nanotechnologies, conformément à ce qu’a constaté la chambre de recours.

49      Ensuite, la requérante relève que la recherche menée par l’examinateur sur Internet afin d’établir l’usage du terme « nano » dans le contexte de la robotique n’inclut que des exemples du domaine médical et pharmaceutique. Or, les produits énumérés au point 3 ci‑dessus relèveraient des domaines des jeux, de l’éducation et de l’apprentissage, qui sont très différents. Par conséquent, la recherche en question ne serait pas susceptible d’appuyer le constat selon lequel la marque demandée est descriptive des produits énumérés au point 3 ci‑dessus.

50      À cet égard, d’une part, il y a lieu de relever que la requérante se méprend quant à la pertinence de la recherche effectuée par l’examinateur. En effet, la chambre de recours ne s’est pas référée explicitement à cette recherche dans les motifs de la décision attaquée et ne s’est pas non plus fondée sur l’usage effectif du terme « nano » dans le contexte de la robotique. En outre, l’examinateur a évoqué les résultats de sa recherche, à la page 3 de sa décision, non pas pour étayer le constat du caractère descriptif de la marque demandée, mais pour établir qu’elle était dépourvue de caractère distinctif. Ainsi, la recherche effectuée par l’examinateur est a priori sans pertinence dans le cadre du présent recours, qui concerne la légalité de la décision de la chambre de recours, et non pas de celle de l’examinateur, et, a fortiori, dans le cadre du quatrième moyen, qui ne concerne pas le manque de caractère distinctif de la marque demandée, mais son caractère descriptif.

51      D’autre part, en tout état de cause, les exemples mentionnés par l’examinateur permettent de constater que le terme « nano » est utilisé, dans le domaine médical, pharmaceutique et biotechnologique, pour identifier des robots ou d’autres appareils qui sont conçus ou fabriqués à l’aide des nanotechnologies. Or, dans la mesure où l’usage de la nanotechnologie dans la conception ou la fabrication des produits n’est pas une caractéristique exclusive des domaines susmentionnés, la recherche menée par l’examinateur, à la supposer pertinente, constitue un indice suggérant que le terme « nano » est susceptible d’être utilisé pour décrire les mêmes caractéristiques des robots et produits connexes destinés à d’autres domaines, tels que les domaines des jeux, de l’éducation et de l’apprentissage, en cause en l’espèce.

52      Enfin, la requérante soutient que rien dans la directive 80/181/CEE du Conseil, du 20 décembre 1979, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux unités de mesure et abrogeant la directive 71/354/CEE (JO L 39, p. 40), citée au point 15 de la décision attaquée, ne permet de conclure que la marque demandée est descriptive.

53      À cet égard, il suffit d’observer que la directive 80/181 a été citée dans la décision attaquée non pas pour démontrer le caractère descriptif de la marque demandée, mais pour illustrer le constat selon lequel le terme « nano » était connu dans plusieurs langues officielles de l’Union. Par conséquent, l’argument de la requérante doit être rejeté comme étant inopérant.

54      Au vu des points 46 à 53 ci‑dessus, il y a lieu de conclure que les arguments de la requérante n’établissent pas que la chambre de recours a commis une erreur en considérant que, utilisé pour les produits énumérés au point 3 ci‑dessus, le terme « nano » signifie « extrêmement petit » ou « impliquant l’utilisation des nanotechnologies ».

55      En deuxième lieu, selon la requérante, à supposer que la marque demandée se réfère à la taille « extrêmement petite » des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, cette référence ne constitue pas une indication descriptive au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. En effet, compte tenu de leur destination, les produits en question sont conçus pour être manipulés à la main et observés à l’œil nu. Or, la taille « extrêmement petite » rendrait une telle manipulation et une telle observation très difficiles, voire dangereuses.

56      Or, ainsi qu’il a été rappelé dans le cadre de l’examen du deuxième moyen, énoncé ci‑dessus, il ressort du point 21 de la décision attaquée que la chambre de recours s’est fondée sur la considération selon laquelle, pour autant que le terme « nano » est compris par le public pertinent comme se référant à la taille des produits, il a acquis une signification qui s’écarte de sa définition exacte mathématique et, partant, de la référence à une dimension « extrêmement petite », et dénote, de façon plus générale, une dimension « petite ».

57      Pour autant que la requérante soutient que cette considération n’est pas étayée par des preuves, il y a lieu de constater que la chambre de recours s’est fondée sur des faits résultant de l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits, ainsi qu’elle était en droit de le faire (voir arrêt NEO, point 47 supra, EU:T:2013:343, point 37 et jurisprudence citée).

58      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure que le constat de la chambre de recours selon lequel le public pertinent percevra la marque demandée comme se référant à la petite taille des produits énumérés au point 3 ci‑dessus n’est pas entaché d’erreur.

59      Or, interprétée ainsi, la marque demandée est susceptible de désigner une caractéristique des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, ce qui implique qu’elle est descriptive de ces mêmes produits, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/209, ainsi que l’a retenu la chambre de recours dans la décision attaquée.

60      En troisième lieu, les arguments de la requérante ne tendent pas spécifiquement à mettre en cause le bien‑fondé de la considération de la chambre de recours, exprimée au point 18 de la décision attaquée, selon laquelle la marque demandée peut être perçue par le public pertinent comme se référant au fait que les produits énumérés au point 3 ci‑dessus sont issus de la nanotechnologie.

61      Or, cette considération n’est pas entachée d’erreur, les nanotechnologies pouvant être appliquées dans divers domaines de l’électronique, de l’informatique et de l’ingénierie, pertinents pour la conception et la fabrication des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, ainsi que le soutient l’OHMI dans ses écrits devant le Tribunal.

62      Par conséquent, il y a lieu de considérer que la marque demandée est descriptive des produits énumérés au point 3 ci‑dessus, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/209, également à ce titre.

63      Au vu de tout ce qui précède, c’est à juste titre et sans violer l’obligation d’examiner d’office les faits que la chambre de recours a conclu, dans la décision attaquée, que la marque demandée était descriptive, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, des produits énumérés au point 3 ci‑dessus.

64      Par conséquent, il y a lieu de rejeter les troisième et quatrième moyens.

65      En outre, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré en tant que marque communautaire [voir, en ce sens, arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec, EU:C:2002:506, point 29, et du 14 septembre 2004, Applied Molecular Evolution/OHMI (APPLIED MOLECULAR EVOLUTION), T‑183/03, Rec, EU:T:2004:263, point 29]. Dans ces circonstances, compte tenu du constat opéré au point 63 ci‑dessus, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité sans qu’il soit nécessaire d’examiner le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Innovation First, Inc. est condamnée aux dépens.

Kanninen

Pelikánová

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 février 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.