Language of document : ECLI:EU:T:2011:6

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

13 janvier 2011 (*)

« Accès aux documents – Règlement (CE) n° 1049/2001 – Documents relatifs à la réalisation d’un projet industriel dans une zone protégée au titre de la directive 92/43/CEE – Documents émanant d’un État membre – Opposition manifestée par l’État membre – Refus partiel d’accès – Exception relative à la politique économique d’un État membre – Article 4, paragraphes 5 à 7, du règlement n° 1049/2001 »

Dans l’affaire T‑362/08,

IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds gGmbH, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par M. S. Crosby, solicitor, et MS. Santoro, avocat,

partie requérante,

soutenue par

Royaume de Danemark, représenté par M. J. Bering Liisberg et Mme B. Weis Fogh, en qualité d’agents,

par

République de Finlande, représentée initialement par M. J. Heliskoski, Mmes M. Pere et H. Leppo, puis par M. Heliskoski, en qualité d’agents,

et par

Royaume de Suède, représenté par Mmes K. Petkovska, A. Falk et S. Johannesson, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes C. O’Reilly et P. Costa de Oliveira, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission, du 19 juin 2008, refusant d’accorder à la requérante l’accès à un document transmis à la Commission par les autorités allemandes dans le cadre d’une procédure relative au déclassement d’un site protégé au titre de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. N. Wahl et A. Dittrich (rapporteur), juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 avril 2010,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Le règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), définit les principes, les conditions et les limites du droit d’accès aux documents de ces institutions prévu à l’article 255 CE. Ce règlement est applicable depuis le 3 décembre 2001.

2        L’article 2 du règlement n° 1049/2001 dispose :

« 1.      Tout citoyen de l’Union et toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un État membre [ont] un droit d’accès aux documents des institutions, sous réserve des principes, conditions et limites définis par le présent règlement.

[…]

3.      Le présent règlement s’applique à tous les documents détenus par une institution, c’est-à-dire établis ou reçus par elle et en sa possession, dans tous les domaines d’activité de l’Union européenne.

[…] »

3        L’article 3 du règlement n° 1049/2001 énonce :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a)      ‘document’ : tout contenu quel que soit son support (écrit sur support papier ou stocké sous forme électronique, enregistrement sonore, visuel ou audiovisuel) concernant une matière relative aux politiques, activités et décisions relevant de la compétence de l’institution ;

b)      ‘tiers’ : toute personne physique ou morale ou entité extérieure à l’institution concernée, y inclus les États membres, les autres institutions et organes communautaires ou non communautaires, et les pays tiers. »

4        L’article 4 du règlement n° 1049/2001, qui définit les exceptions au droit d’accès susvisé, mentionne ce qui suit :

« 1. Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où la divulgation porterait atteinte à la protection :

a)      de l’intérêt public, en ce qui concerne :

–        la sécurité publique,

–        la défense et les affaires militaires,

–        les relations internationales,

–        la politique financière, monétaire ou économique de la Communauté ou d’un État membre ;

[…]

3. […]

L’accès à un document contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée est refusé même après que la décision a été prise, dans le cas où la divulgation du document porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

4.      Dans le cas de documents de tiers, l’institution consulte le tiers afin de déterminer si une exception prévue au paragraphe 1 ou 2 est d’application, à moins qu’il ne soit clair que le document doit ou ne doit pas être divulgué.

5.      Un État membre peut demander à une institution de ne pas divulguer un document émanant de cet État sans l’accord préalable de celui-ci.

6.      Si une partie seulement du document demandé est concernée par une ou plusieurs des exceptions susvisées, les autres parties du document sont divulguées.

7.      Les exceptions visées aux paragraphes 1, 2 et 3 s’appliquent uniquement au cours de la période durant laquelle la protection se justifie eu égard au contenu du document. Les exceptions peuvent s’appliquer pendant une période maximale de trente ans. Dans le cas de documents relevant des exceptions concernant la vie privée ou les intérêts commerciaux et de documents sensibles, les exceptions peuvent, si nécessaire, continuer de s’appliquer au-delà de cette période. »

5        L’article 9 du règlement n° 1049/2001, relatif au traitement des documents sensibles, dispose :

« 1.      Les documents sensibles sont des documents émanant des institutions ou des agences créées par elles, des États membres, de pays tiers ou d’organisations internationales, classifiés ‘TRÈS SECRET/TOP SECRET’, ‘SECRET’ ou ‘CONFIDENTIEL’ en vertu des règles en vigueur au sein de l’institution concernée protégeant les intérêts fondamentaux de l’Union européenne ou d’un ou plusieurs de ses États membres dans les domaines définis à l’article 4, paragraphe 1, [sous] a), en particulier la sécurité publique, la défense et les questions militaires.

2.      Dans le cadre des procédures prévues aux articles 7 et 8, les demandes d’accès à des documents sensibles sont traitées exclusivement par les personnes autorisées à prendre connaissance du contenu de ces documents. Sans préjudice de l’article 11, paragraphe 2, il appartient à ces personnes de préciser les références pouvant figurer dans le registre public concernant ces documents sensibles.

3.      Les documents sensibles ne sont inscrits au registre ou délivrés que moyennant l’accord de l’autorité d’origine.

[…] »

6        L’article 6, paragraphe 4, de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7), est libellé comme suit :

« Si, en dépit de conclusions négatives de l’évaluation des incidences sur le site et en l’absence de solutions alternatives, un plan ou projet doit néanmoins être réalisé pour des raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, l’État membre prend toute mesure compensatoire nécessaire pour assurer que la cohérence globale de Nature 2000 est protégée. L’État membre informe la Commission des mesures compensatoires adoptées.

Lorsque le site concerné est un site abritant un type d’habitat naturel et/ou une espèce prioritaires, seules peuvent être évoquées des considérations liées à la santé de l’homme et à la sécurité publique ou à des conséquences bénéfiques primordiales pour l’environnement ou, après avis de la Commission, à d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur. »

 Antécédents du litige

7        La requérante, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds gGmbH, est une organisation non gouvernementale agissant dans le domaine de la préservation du bien-être des animaux et de la protection de la nature.

8        Saisie d’une demande de la République fédérale d’Allemagne fondée sur l’article 6, paragraphe 4, deuxième alinéa, de la directive 92/43, la Commission des Communautés européennes a émis, le 19 avril 2000, un avis favorable à la réalisation d’un projet industriel sur le site de Mühlenberger Loch, une zone protégée au titre de cette directive. Ce projet consistait en l’agrandissement de l’usine de la société D. aux fins de l’assemblage final de l’airbus A3XX.

9        Par lettre du 20 décembre 2001 adressée à la Commission, la requérante a demandé à avoir accès à divers documents reçus par ladite institution dans le cadre de l’examen du projet industriel susmentionné, à savoir la correspondance émanant de la République fédérale d’Allemagne, de la ville de Hambourg ainsi que du chancelier allemand.

10      Considérant que l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 lui interdisait de divulguer les documents en cause, la Commission a adopté, le 26 mars 2002, sa décision refusant à la requérante l’accès à certains documents qu’elle avait reçus dans le cadre de la procédure au terme de laquelle elle a rendu son avis du 19 avril 2000.

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juin 2002, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission du 26 mars 2002.

12      Par son arrêt du 30 novembre 2004, IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission (T‑168/02, Rec. p. II‑4135), le Tribunal a rejeté ce recours comme non fondé.

13      Le 10 février 2005, le Royaume de Suède, partie intervenante dans l’affaire T‑168/02, précitée, a introduit un pourvoi auprès de la Cour contre l’arrêt rendu par le Tribunal dans cette affaire.

14      Par son arrêt du 18 décembre 2007, Suède/Commission, C‑64/05 P, Rec. p. I‑11389, la Cour a annulé l’arrêt IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds/Commission, point 12 supra, ainsi que la décision de la Commission du 26 mars 2002.

15      À la suite de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, la requérante a, par lettre du 13 février 2008 adressée à la Commission, réitéré sa demande d’accès aux documents reçus par ladite institution dans le cadre de l’examen du projet Mühlenberger Loch et émanant des autorités allemandes.

16      Par lettre du 20 février 2008, la Commission a accusé réception de la lettre de la requérante du 13 février 2008.

17      Le 26 mars 2008, la requérante a invité la Commission à répondre à sa demande du 13 février 2008.

18      Par lettre du 7 avril 2008, la Commission a informé la requérante qu’une consultation était en cours avec les autorités allemandes à propos de la divulgation des documents demandés.

19      Le 9 avril 2008, la requérante a une nouvelle fois invité la Commission à répondre à sa demande du 13 février 2008, et ce avant le 22 avril 2008.

20      En l’absence de réponse de la Commission à cette date, la requérante a déposé, par lettre du 29 avril 2008, une demande confirmative.

21      Le 19 mai 2008, la Commission a écrit à la requérante en accusant réception de la demande confirmative et en déclarant qu’une réponse lui serait donnée dans le délai prévu par le règlement n° 1049/2001.

22      Le 19 juin 2008, la Commission a adopté une décision concernant la demande confirmative de la requérante (ci-après la « décision attaquée »), communiquée à cette dernière le même jour. Par cette décision, la Commission a divulgué tous les documents demandés par la requérante, à savoir huit documents émanant de la ville de Hambourg et de la République fédérale d’Allemagne, à l’exception d’une lettre du 15 mars 2000 adressée par le chancelier allemand au président de la Commission (ci-après la « lettre du chancelier allemand »), les autorités allemandes s’étant opposées à la divulgation de ce document.

23      Selon la décision attaquée, d’une part, les autorités allemandes ont déclaré que la divulgation de la lettre du chancelier allemand porterait atteinte à la protection de l’intérêt public, en ce qui concerne les relations internationales et la politique économique de la République fédérale d’Allemagne, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001.

24      En effet, cette lettre concernerait une déclaration confidentielle établie exclusivement pour un usage interne. Ce document concernerait une affaire confidentielle relative à la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et d’autres États membres. La divulgation de ce document ne porterait pas seulement atteinte à la confidentialité, au détriment des relations internationales entre la République fédérale d’Allemagne, les institutions de l’Union européenne et d’autres États membres, mais compromettrait également la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et celle d’autres États membres. Par conséquent, l’accès à la lettre du chancelier allemand devrait être refusé en vertu de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001.

25      D’autre part, les autorités allemandes auraient indiqué que la divulgation de la lettre du chancelier allemand porterait gravement atteinte à la protection du processus décisionnel de la Commission, au sens de l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 1049/2001.

26      En effet, cette lettre concernerait une déclaration confidentielle adressée à la Commission établie exclusivement pour un usage interne dans le cadre des délibérations relatives à l’avis de la Commission du 19 avril 2000. Ce document concernerait la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et celle d’autres États membres. La divulgation de ce document porterait atteinte à la confidentialité et porterait dès lors préjudice aux relations entre la République fédérale d’Allemagne, les institutions de l’Union et d’autres États membres. Cela porterait gravement atteinte au processus décisionnel de la Commission. Par conséquent, l’exception visée à l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 1049/2001 serait applicable en ce qui concerne la lettre du chancelier allemand.

27      La Commission a en outre indiqué, dans la décision attaquée, que, en vertu de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, l’exception au droit d’accès n’est pas applicable s’il existe un intérêt public supérieur justifiant la divulgation du document en cause. En dépit du fait que le document concerné tombait également sous le coup des deux exceptions visées à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 1049/2001, qui ne seraient pas soumises à un test d’intérêt public, la Commission aurait examiné si, en l’espèce, un tel intérêt public supérieur existait.

28      Selon la Commission, pour qu’un intérêt public supérieur justifiant la divulgation existe, cet intérêt doit, premièrement, être public et, deuxièmement, être supérieur, à savoir prévaloir sur les intérêts protégés par l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001. Dans le cas d’espèce, elle ne disposerait d’aucun élément susceptible d’indiquer l’existence d’un éventuel intérêt public supérieur au sens dudit règlement prévalant sur l’exigence de protéger le processus décisionnel de la Commission.

29      S’agissant de la question d’un accès partiel au document en cause, la Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que, en vertu de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, elle était contrainte de tirer les conséquences du résultat du processus de consultation et de refuser l’accès à la lettre du chancelier allemand sur la base des exceptions invoquées par les autorités allemandes et des raisons énoncées par celles-ci. Dès lors que ces autorités s’opposeraient à la divulgation de la totalité de la lettre du chancelier allemand, aucun accès partiel à ce document ne pourrait être accordé sur la base de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001.

 Procédure et conclusions des parties

30      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 28 août 2008, la requérante a introduit le présent recours.

31      Par lettre enregistrée au greffe du Tribunal le 9 janvier 2009, la République de Finlande a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la requérante. Il a été fait droit à cette demande, les parties principales ayant été entendues, par ordonnance du président de la huitième chambre du Tribunal du 5 mars 2009.

32      La République de Finlande a déposé son mémoire en intervention le 17 avril 2009. Par actes déposés au greffe du Tribunal le 26 juin 2009, les parties principales ont présenté leurs observations sur ce mémoire.

33      Par lettres enregistrées au greffe du Tribunal respectivement les 18 et 29 juin 2009, le Royaume de Suède et le Royaume de Danemark ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la requérante. Il a été fait droit à ces demandes, les parties principales ayant été entendues, par ordonnances du président de la huitième chambre du Tribunal du 12 août 2009.

34      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

35      Les parties principales, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède ont été entendus en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal à l’audience du 16 avril 2010. Eu égard au fait que la République de Finlande n’a pas pu être représentée à l’audience, il a été décidé, avant de clore la procédure orale, de poser à la République de Finlande une question écrite relative à la recevabilité de son argumentation concernant l’accès partiel à la lettre du chancelier allemand et l’application ratione temporis des exceptions au droit d’accès en cause en vertu de l’article 4, paragraphes 6 et 7, du règlement n° 1049/2001. La République de Finlande a répondu dans le délai imparti et les parties principales, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède ont déposé leurs observations.

36      S’agissant des observations de la requérante, celles-ci ne se limitaient pas au contenu de la réponse de la République de Finlande. Les parties n’étant pas autorisées à compléter le dossier au-delà des observations sur ladite réponse après l’audience, le président de la huitième chambre du Tribunal a décidé le 15 juin 2010 de ne verser ces observations au dossier que dans la mesure où celles-ci concernaient le contenu de la réponse de la République de Finlande.

37      La procédure orale a été close le 15 juin 2010.

38      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        ordonner à la Commission de communiquer au Tribunal la lettre du chancelier allemand ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

39      Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède concluent à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.

40      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

41      Au soutien de ses conclusions, la requérante soulève deux moyens. Le premier est tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001. Selon cet article, l’accès à un document est refusé lorsque sa divulgation porterait atteinte à la protection de l’intérêt public, en ce qui concerne notamment les relations internationales et la politique économique d’un État membre. Le deuxième est tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement n° 1049/2001, selon lequel l’accès à un document contenant des avis destinés à l’utilisation interne dans le cadre de délibérations et de consultations préliminaires au sein de l’institution concernée est refusé même après que la décision a été prise, dans le cas où la divulgation du document porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé.

42      Les intervenants soutiennent l’argumentation de la requérante à cet égard. La République de Finlande fait également valoir une violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 concernant la possibilité d’accès partiel à un document. En outre, selon la République de Finlande, les exigences de l’article 4, paragraphe 7, dudit règlement concernant l’application ratione temporis de l’exception au droit d’accès prévue au deuxième alinéa du paragraphe 3 de cet article n’ont pas été respectées. Dans ses observations sur le mémoire en intervention de la République de Finlande, la requérante « accueille favorablement » l’argumentation de cet État membre concernant l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 en l’étendant à toutes les exceptions en cause dans la présente affaire.

43      En présentant leurs interprétations respectives de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, aux fins de déterminer les conséquences de l’application de cette disposition dans le cas d’espèce, à la lumière de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, qui est, selon elles, au centre du présent litige, les parties énoncent une argumentation qui est valable pour tous les moyens. Avant d’aborder spécifiquement les différents moyens, il convient donc d’examiner cette question.

 Sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001

 Arguments des parties

44      La requérante fait valoir qu’il importe de connaître toutes les raisons pour lesquelles la Commission a approuvé, par son avis du 19 avril 2000, le déclassement d’une réserve naturelle protégée au titre du programme Natura 2000 tel qu’il a été établi par la directive 92/43. Elle souligne que la République fédérale d’Allemagne a dénoncé à plusieurs reprises la réticence de la Commission à déclasser la réserve naturelle et à permettre l’agrandissement de l’usine de la société D. située sur l’Elbe à Hambourg, aux fins de l’assemblage final de l’airbus A3XX. La Commission n’aurait approuvé le déclassement que peu de temps après avoir reçu la lettre du chancelier allemand.

45      Selon la requérante, il ressort de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra (point 94), qu’il relève de la compétence du juge de l’Union de contrôler si le refus d’accès par l’institution sollicitée a pu être valablement fondé sur les exceptions énoncées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001, et ce que ce refus procède de l’appréciation de celles-ci par l’institution elle-même ou par l’État membre concerné.

46      La thèse de la Commission consistant à faire valoir que son rôle se borne à examiner sommairement les raisons de l’État membre conduirait à réintroduire de facto la règle de l’auteur. La Commission devrait apprécier dans chaque cas individuel le point de savoir si un document qui a fait l’objet d’une demande d’accès relève du champ d’application des exceptions en cause.

47      Le Royaume de Danemark fait valoir que, selon le règlement n° 1049/2001, les institutions de l’Union disposent d’une autonomie de décision. Elles auraient la responsabilité finale de vérifier si un refus d’accès est justifié et devraient procéder à une appréciation concrète de la demande d’accès aux documents.

48      Si, dans certains cas, les institutions de l’Union pourraient exceptionnellement se limiter à une appréciation prima facie, le fait que la procédure visée à l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 s’applique au cas d’espèce ne serait pas une circonstance qui justifierait qu’une appréciation prima facie suffise.

49      La République de Finlande souligne que, selon l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, dans la mesure où l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 s’applique, l’institution concernée doit toujours, en examinant le document en cause, vérifier si les exceptions à l’accès audit document, avancées par l’État membre concerné, sont applicables. Si, selon l’appréciation de la Commission, les raisons invoquées par l’État membre ne sont pas appropriées, cette institution devrait rendre le document concerné accessible au demandeur. Dès lors que, en l’espèce, la Commission n’aurait pas satisfait à cette obligation, la décision attaquée devrait être annulée.

50      Au soutien de son interprétation, premièrement, la République de Finlande fait valoir que les exceptions visées à l’article 4 du règlement n° 1049/2001 doivent être interprétées et appliquées strictement.

51      Deuxièmement, l’obligation de motivation au titre de l’article 253 CE serait également applicable en ce qui concerne une décision de refus adoptée en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001. L’État membre concerné se verrait simplement reconnaître un pouvoir de participation dans le processus d’adoption de la décision de l’Union (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, points 76 et 81). Étant donné qu’il s’agirait d’une décision d’une institution de l’Union, cette dernière serait responsable de l’appréciation exacte de l’applicabilité des exceptions en cause.

52      Troisièmement, l’abolition de la règle de l’auteur par le règlement n° 1049/2001 serait insignifiante si, comme le soutient la Commission, cette institution devait seulement examiner si l’exception avancée par un État membre est manifestement inappropriée. La République de Finlande ajoute qu’une institution de l’Union doit examiner, dans chaque cas d’espèce, si un document relève des exceptions visées à l’article 4 dudit règlement.

53      Le Royaume de Suède fait valoir qu’il ressort de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, que l’État membre concerné n’a pas de droit de veto général et inconditionnel permettant de s’opposer de façon arbitraire à la divulgation d’un document par une institution et qu’il est obligé de dûment motiver son opposition en invoquant les exceptions au droit d’accès visées au règlement n° 1049/2001. Cependant, le type d’examen que l’institution doit mener lorsqu’un État membre s’oppose à la divulgation n’aurait pas été clarifié par cet arrêt.

54      À cet égard, le Royaume de Suède précise que la Commission doit s’assurer que les motivations de l’État membre sont formellement et matériellement correctes sur le plan juridique et qu’elle doit procéder à un examen individuel de chaque document ainsi qu’effectuer une analyse visant à déterminer s’il existe un risque concret et réel que la divulgation d’un document puisse nuire à un intérêt protégé. L’importance de maintenir une interprétation uniforme du règlement n° 1049/2001 militerait également en faveur d’un droit d’examen de l’institution.

55      Selon le Royaume de Suède, la décision de l’institution doit être précédée d’un dialogue empreint de coopération loyale avec les États membres. Dans certains cas, par exemple lorsque la politique financière ou économique d’un État membre pourrait être affectée négativement, le point de vue de cet État membre devrait être prépondérant. Dans d’autres cas, lorsque la divulgation d’un document pourrait nuire sérieusement au processus décisionnel d’une institution, ce serait l’institution en cause qui devrait avoir plus de marge de manœuvre pour déterminer si l’argumentation de l’État membre est défaillante.

56      La Commission souligne que, le document auquel l’accès a été refusé émanant d’un État membre, elle a appliqué l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, tel qu’il a été interprété par la Cour dans son arrêt Suède/Commission, point 14 supra. Elle fait valoir que les autorités allemandes ont manifesté leur opposition à la divulgation de la lettre du chancelier allemand.

57      Selon la Commission, la question centrale est celle de savoir dans quelle mesure elle est tenue de respecter l’opposition manifestée par un État membre à la divulgation d’un document lorsque cette opposition est dûment fondée sur des motifs énoncés au regard des exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001. En d’autres termes, il y aurait lieu de déterminer dans quelle mesure la Commission est tenue de substituer sa propre appréciation à celle de l’État membre.

58      La Commission soutient que deux dispositions du règlement n° 1049/2001 ont trait à la situation dans laquelle un document auquel l’accès est demandé émane, non de l’institution concernée, mais de tiers, à savoir l’article 4, paragraphe 4, qui vise le régime général d’accès à des documents émanant de tiers, et l’article 4, paragraphe 5, qui a trait aux documents émanant d’un État membre. Par l’insertion de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, le législateur aurait donné une position particulière aux États membres, conformément à la déclaration n° 35 relative à l’article 255, paragraphe 1, CE annexée à l’acte final du traité d’Amsterdam.

59      Selon la Commission, la Cour a affirmé, dans son arrêt Suède/Commission, point 14 supra (point 44), que l’exigence d’un accord préalable de l’État membre que comporte l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 risquerait de rester lettre morte si, nonobstant l’opposition manifestée par un État membre à la divulgation d’un document émanant de lui et alors même que l’institution ne dispose d’aucun accord dudit État membre, l’institution demeurait néanmoins libre de divulguer le document concerné. Une telle exigence serait dépourvue de tout effet utile si la nécessité d’obtenir un tel accord préalable pour la divulgation dudit document dépendait en dernière analyse de la volonté discrétionnaire de l’institution détentrice de celui-ci. Selon les points 45 et 46 de cet arrêt, un accord serait juridiquement distinct d’un simple avis et le droit d’être consulté se trouverait déjà très largement acquis aux États membres en vertu de l’article 4, paragraphe 4, du règlement n° 1049/2001.

60      Au point 47 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, la Cour aurait souligné que, à la différence de l’article 9, paragraphe 3, du règlement n° 1049/2001, l’article 4, paragraphe 5, dudit règlement ouvrirait une faculté au profit de l’État membre dont seul l’exercice effectif dans un cas déterminé aurait pour conséquence d’ériger l’accord préalable de l’État membre en condition nécessaire à une divulgation future du document concerné.

61      Du point de vue procédural, selon le point 87 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, l’État membre qui manifeste son opposition à la divulgation d’un document serait tenu de motiver cette opposition au regard des exceptions prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001. Il résulterait des points 45 à 47 et 76 de cet arrêt que l’existence d’une opposition correctement motivée empêche la Commission de divulguer le document concerné.

62      La Commission ne saurait donner suite à l’opposition manifestée par un État membre, et serait donc tenue à une appréciation propre, si cette opposition est dénuée de toute motivation ou si la motivation avancée n’est pas articulée par référence aux exceptions énumérées dans le règlement n° 1049/2001 (point 88 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra).

63      Selon le point 89 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, la Commission serait tenue de faire état, dans sa décision de refus, des raisons invoquées par l’État membre aux fins de conclure à l’application de l’une des exceptions au droit d’accès prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001.

64      La Commission fait valoir qu’elle a respecté ses obligations en vertu du règlement n° 1049/2001, tel qu’il a été interprété par la Cour dans son arrêt Suède/Commission, point 14 supra. En effet, les autorités allemandes auraient été consultées, elles se seraient opposées à la divulgation de la lettre du chancelier allemand et auraient motivé leur position en faisant référence aux exceptions énoncées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, et paragraphe 3, deuxième alinéa, dudit règlement. La Commission aurait ensuite examiné si les exceptions étaient à première vue invoquées à bon droit et, ayant répondu par l’affirmative, elle aurait présenté les raisons motivant sa décision de refus.

65      Selon la Commission, lorsqu’un État membre manifeste son opposition, le contrôle qu’elle doit exercer est limité à la vérification que cette opposition se fonde à première vue sur les exceptions prévues par le règlement n° 1049/2001 et qu’il n’est pas manifestement inapproprié d’invoquer ces exceptions. Une exception manifestement inappropriée serait celle invoquée par un État membre en vue de refuser l’accès à un document échappant clairement à la portée de l’exception telle qu’elle est interprétée par le juge de l’Union.

66      Le contrôle juridictionnel de la légalité de la décision attaquée devrait lui aussi consister à se limiter à vérifier si la Commission s’est dûment assurée que les exceptions applicables n’avaient pas été invoquées de manière manifestement inappropriée.

 Appréciation du Tribunal

67      Il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de son considérant 4 et de son article 1er, le règlement n° 1049/2001 vise à conférer le plus large effet possible au droit d’accès du public aux documents détenus par une institution. En vertu de l’article 2, paragraphe 3, dudit règlement, ce droit couvre non seulement les documents établis par une institution, mais également ceux reçus de tiers, au nombre desquels figurent les États membres, ainsi que le précise expressément l’article 3, sous b), du même règlement.

68      Le règlement n° 1049/2001 prévoit, à son article 4, des exceptions au droit d’accès à un document. Le paragraphe 5 de cet article énonce qu’un État membre peut demander à une institution de ne pas divulguer un document émanant de cet État sans l’accord préalable de celui-ci.

69      En l’espèce, la République fédérale d’Allemagne a exercé la faculté qui lui était ouverte par l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 et a demandé à la Commission de ne pas divulguer la lettre du chancelier allemand. Elle a fondé son opposition sur les exceptions relatives à la protection de l’intérêt public concernant les relations internationales et la politique économique d’un État membre, prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, dudit règlement, ainsi que sur l’exception relative à la protection du processus décisionnel de la Commission, prévue à l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, du même règlement. La Commission a, ensuite, dans la décision attaquée, fondé le refus d’accès à la lettre du chancelier allemand sur l’opposition manifestée par les autorités allemandes en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001.

70      Il convient donc d’examiner la portée de l’opposition formée par les autorités allemandes en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001.

71      À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra (point 81), cette disposition a un caractère procédural dès lors qu’elle est consacrée au processus d’adoption d’une décision de l’Union.

72      À la différence de l’article 4, paragraphe 4, du règlement n° 1049/2001, qui concède aux tiers, dans le cas de documents émanant de ceux-ci, seulement un droit de consultation, le paragraphe 5 de cet article érige l’accord préalable de l’État membre en condition nécessaire à la divulgation d’un document émanant de celui-ci au cas où ce dernier le demande. Dans un tel cas, l’institution qui ne dispose pas de l’accord de l’État membre concerné n’est pas libre de divulguer le document en cause (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 44). En l’espèce, la décision de la Commission relative à la demande d’accès au document en cause dépendait donc de la décision prise par l’État membre dans le cadre du processus d’adoption de la décision attaquée.

73      Toutefois, selon l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra (point 58), l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 n’accorde pas à l’État membre concerné un droit de veto général et inconditionnel permettant de s’opposer, de manière purement discrétionnaire et sans avoir à motiver sa décision, à la divulgation de tout document détenu par une institution du seul fait que ledit document émane de cet État membre.

74      Selon l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra (point 76), l’exercice du pouvoir dont l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 investit l’État membre concerné se trouve encadré par les exceptions matérielles qu’énumèrent les paragraphes 1 à 3 de ce même article, l’État membre concerné se voyant à cet égard simplement reconnaître un pouvoir de participation à la décision de l’institution de l’Union. L’accord préalable de l’État membre concerné auquel se réfère l’article 4, paragraphe 5, dudit règlement s’apparente ainsi, non à un droit de veto discrétionnaire, mais à une forme d’avis conforme quant à l’absence de motifs d’exception tirés de l’article 4, paragraphes 1 à 3, du même règlement. Le processus décisionnel ainsi institué par l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 exige donc que l’institution et l’État membre concernés s’en tiennent aux exceptions matérielles prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, dudit règlement (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 83).

75      Il convient en outre de relever que la mise en œuvre de telles règles de droit communautaire est confiée conjointement à l’institution et à l’État membre qui a exercé la faculté ouverte par l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001. Dans le cadre du processus décisionnel en cause auquel participent l’institution et l’État membre concernés, ayant pour objet de déterminer si l’accès à un document doit être refusé en vertu de l’une des exceptions matérielles énoncées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, dudit règlement, ceux-ci sont tenus de respecter l’obligation de coopération loyale énoncée à l’article 10 CE et rappelée au considérant 15 du règlement n° 1049/2001 (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 85).

76      L’État membre qui, au terme de ce dialogue, est opposé à la divulgation du document en cause est tenu de motiver cette opposition au regard desdites exceptions (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 87).

77      Il s’ensuit que l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 n’autorise l’État membre concerné à s’opposer à la divulgation de documents qui émanent de lui que sur le fondement des exceptions matérielles prévues aux paragraphes 1 à 3 de cet article et en motivant dûment sa position à cet égard (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, points 87 et 99).

78      S’agissant, en l’occurrence, de la portée de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 vis-à-vis de la Commission, il y a lieu de rappeler, ainsi que la Cour l’a jugé au point 94 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, qu’à l’égard du demandeur l’intervention de l’État membre concerné n’affecte pas le caractère d’acte de l’Union de la décision que lui adresse ultérieurement l’institution en réponse à la demande d’accès dont il l’a saisie concernant un document qu’elle détenait. Cet aspect est d’autant plus important si une telle décision repose exclusivement sur l’examen, par l’État membre, de l’applicabilité desdites exceptions matérielles.

79      La Commission, en tant qu’auteur d’une décision de refus d’accès à des documents, est responsable de la légalité de celle-ci. Avant de refuser l’accès à un document émanant d’un État membre, elle doit donc examiner si ce dernier a fondé son opposition sur les exceptions matérielles prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001 et s’il a dûment motivé sa position à cet égard.

80      Il convient de relever, en l’occurrence, que l’examen de l’applicabilité des exceptions matérielles doit ressortir des motifs de la décision de l’institution de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 19 juillet 1999, Hautala/Conseil, T‑14/98, Rec. p. II‑2489, point 67 ; du 6 avril 2000, Kuijer/Conseil, T‑188/98, Rec. p. II‑1959, point 38, et du 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation/Commission, T‑2/03, Rec. p. II‑1121, point 69). Si la décision de refus repose exclusivement sur l’examen, par l’État membre concerné, de l’applicabilité desdites exceptions, l’application de celles-ci est finalement fondée sur le raisonnement de cet État membre. Il s’ensuit que le raisonnement de ce dernier doit ressortir des motifs de la décision de l’institution de l’Union.

81      Dans la mesure où la Commission ne s’oppose pas à la divulgation du document en cause et fait état dans sa décision des raisons invoquées par l’État membre, ce sont les raisons avancées par cet État membre, reprises dans ladite décision, qui sont à examiner par le juge de l’Union.

82      Dès lors qu’il ressort d’une jurisprudence constante que la motivation d’une décision d’une institution de l’Union doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte (voir arrêt de la Cour du 1er février 2007, Sison/Conseil, C‑266/05 P, Rec. p. I‑1233, point 80, et la jurisprudence citée), il y a lieu de relever que les raisons avancées par l’État membre concerné dans le cadre de sa demande formée en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 doivent être d’une qualité qui satisfait aux exigences de l’article 253 CE tel qu’il est interprété par la jurisprudence dans le domaine du droit d’accès aux documents en vertu du même règlement. La motivation avancée par l’État membre concerné doit être de nature à permettre au demandeur de comprendre l’origine et les raisons du refus qui lui est opposé et à la juridiction compétente d’exercer, le cas échéant, le contrôle qui lui est dévolu (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 89).

83      La Cour a déjà jugé que la Commission ne saurait donner suite à l’opposition manifestée par un État membre à la divulgation d’un document qui émane de lui si cette opposition est dénuée de toute motivation ou si la motivation avancée n’est pas articulée par référence aux exceptions énumérées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001 (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 88). Dans le processus d’adoption d’une décision de refus d’accès, la Commission doit s’assurer de l’existence d’une telle motivation et en faire état dans la décision finalement adoptée (arrêt Suède/Commission, point 14 supra, point 99).

84      Dans le cadre de l’examen du cas d’espèce, il convient de relever qu’il n’est pas nécessaire de trancher la question de savoir si la Commission était obligée, en plus d’un contrôle purement formel de l’existence d’une motivation du refus d’accès par l’État membre et d’une référence aux exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001, de procéder à un contrôle prima facie ou à un contrôle complet des motifs d’opposition invoqués par l’État membre.

85      En effet, s’agissant de la divulgation ou du refus d’accès concernant un document émanant d’un État membre sans l’accord préalable de celui-ci, deux niveaux de contrôle relatif à la légalité d’une telle divulgation ou d’un tel refus d’accès peuvent être distingués, à savoir celui que la Commission est habilitée à effectuer concernant l’opposition manifestée par l’État membre en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 et celui que le juge de l’Union est habilité à effectuer concernant la décision finale de la Commission de donner ou de refuser l’accès.

86      Le cas d’espèce porte sur une décision de refus de la Commission qui n’est pas en contradiction avec les motifs d’opposition invoqués par l’État membre concerné, mais qui est fondée sur ces motifs et qui a donc eu pour conséquence que le document en cause n’a pas été communiqué. La question à examiner en l’espèce ne concerne donc pas le type de contrôle que la Commission était habilité à effectuer concernant l’opposition manifestée par l’État membre en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001. Dès lors que la décision attaquée correspond à la demande de l’État membre concerné, la question de savoir si la Commission était habilitée à effectuer un contrôle prima facie ou un contrôle complet des motifs d’opposition invoqués par cet État membre n’est pas pertinente. Il aurait été nécessaire d’examiner cette question si la décision de la Commission n’avait pas correspondu à la demande de l’État membre. En cas de correspondance entre la décision de la Commission relative à la divulgation d’un document émanant d’un État membre, d’une part, et la demande de ce dernier en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, d’autre part, le type de contrôle à identifier est celui que le juge de l’Union est habilité à effectuer concernant la décision de la Commission de refuser l’accès au document en cause.

87      S’agissant du contrôle juridictionnel de la légalité d’une telle décision de refus, il ressort du point 94 de l’arrêt Suède/Commission, point 14 supra, qu’il relève de la compétence du juge de l’Union de contrôler, à la demande du demandeur auquel a été opposé un refus d’accès par l’institution sollicitée, si ce refus a pu être valablement fondé sur les exceptions énoncées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001, et ce que ce refus procède de l’appréciation de celles-ci par l’institution elle-même ou par l’État membre concerné. Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’allègue la Commission, du fait de l’application de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, le contrôle du juge de l’Union n’est pas limité à un contrôle prima facie. L’application de cette disposition ne l’empêche donc pas de procéder à un contrôle complet de la décision de refus de la Commission, qui doit respecter, notamment, l’obligation de motivation et qui repose sur l’appréciation matérielle, par l’État membre concerné, de l’applicabilité des exceptions prévues à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001.

88      L’exercice d’un contrôle complet par le juge de l’Union de l’applicabilité des exceptions matérielles en cause n’implique pas nécessairement que la Commission est ou n’est pas habilitée à effectuer un contrôle complet concernant l’opposition manifestée par l’État membre en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001. Même si la Commission a refusé l’accès à un document émanant d’un État membre après avoir constaté, sur la base d’un contrôle prima facie, que, selon elle, les motifs d’opposition présentés par cet État membre n’étaient pas invoqués de manière manifestement inappropriée, le contrôle du juge de l’Union n’est pas limité, du fait de l’application de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, à un contrôle prima facie de l’applicabilité des exceptions matérielles visées aux paragraphes 1 à 3 de cet article, dès lors qu’il contrôle l’applicabilité de ces exceptions sur la base de l’appréciation matérielle effectuée par l’État membre concerné.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, du règlement n° 1049/2001

89      Ce moyen comporte deux branches qu’il y a lieu d’examiner ensemble. Il vise les exceptions au droit d’accès relatives à la protection de l’intérêt public concernant les relations internationales et la politique économique d’un État membre.

 Arguments des parties

90      S’agissant, premièrement, de l’exception au droit d’accès relative à la protection de l’intérêt public concernant les relations internationales, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001, la requérante fait valoir que cette disposition ne s’applique pas aux relations internes à l’Union. Les relations internationales ne comprendraient que les relations entre les institutions de l’Union et les pays tiers ou les organisations internationales.

91      Dans la décision attaquée, la Commission aurait évoqué exclusivement les relations entre la République fédérale d’Allemagne, les institutions de l’Union et d’autres États membres. Par conséquent, la Commission aurait commis une erreur de droit en appliquant la disposition en cause.

92      S’agissant, deuxièmement, de l’exception au droit d’accès relative à la protection de l’intérêt public concernant la politique économique d’un État membre, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement n° 1049/2001, la Commission se serait contentée d’énoncer, dans la décision attaquée, que le document en cause concernait une déclaration confidentielle établie exclusivement pour un usage interne et que sa divulgation compromettrait par conséquent le caractère confidentiel de la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et celle d’autres États membres. Elle n’aurait donné aucune raison supplémentaire.

93      Selon la requérante, la brièveté de la motivation de la décision attaquée pourrait se justifier si la lettre du chancelier allemand était effectivement confidentielle. La requérante souligne que la question est donc de savoir si la lettre du chancelier allemand est ou non confidentielle. Elle aurait peine à concevoir que cette lettre puisse contenir des informations tellement sensibles, mais elle rappelle qu’elle n’a pas pu la consulter. La charge de démontrer que la lettre du chancelier allemand est de nature confidentielle incomberait à la Commission.

94      La requérante ajoute, dans ses observations sur le mémoire en intervention de la République de Finlande, que cela vaut d’autant plus qu’un grand laps de temps se serait écoulé depuis la réception par la Commission des informations contenues dans ce document. La Commission aurait dû reconsidérer, au sens de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001, les véritables raisons pour lesquelles la lettre du chancelier allemand n’avait pas été divulguée.

95      Contrairement à ce que la Commission prétendrait, seule une partie à la procédure pourrait se voir accorder une large marge d’appréciation. L’exercice d’un tel pouvoir d’appréciation serait par conséquent susceptible d’être contrôlé par le juge de l’Union. Dans le présent cas, la décision aurait été prise par un tiers à la procédure, à savoir l’État membre, dont l’exercice d’un tel pouvoir ne serait pas susceptible de contrôle juridictionnel. Cet État membre ne disposerait donc pas d’une large marge d’appréciation, mais l’exercice de son pouvoir serait encadré par les exceptions énoncées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001.

96      Le Royaume de Danemark fait valoir que la Commission n’a pas respecté l’obligation de motivation qui lui incombait concernant la décision attaquée.

97      La République de Finlande ajoute que, contrairement à ce qu’allègue la Commission, la requérante ne doit pas démontrer que l’exception en cause ne peut s’appliquer au document concerné, dès lors qu’elle n’a pas suffisamment connaissance du contenu de ce document.

98      S’agissant de l’application ratione temporis des exceptions au droit d’accès, en vertu de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001, la République de Finlande, soutenue par la requérante, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède, souligne que cette disposition est liée de manière indissociable à celles des paragraphes 1 à 3 du même article.

99      Le Royaume de Suède souligne que l’exception au droit d’accès visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 ne trouve pas application en raison de l’absence de caractère international des relations en cause.

100    La Commission conteste l’argumentation de la requérante et des intervenants.

 Appréciation du Tribunal

101    Dans le cadre de ce moyen, la requérante fait valoir que la Commission ne pouvait valablement fonder son refus de donner accès à la lettre du chancelier allemand sur l’opposition manifestée par les autorités allemandes, en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, en s’appuyant sur les exceptions relatives à la protection de l’intérêt public concernant les relations internationales et la politique économique d’un État membre, prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, dudit règlement.

102    Il y a lieu d’examiner, tout d’abord, à la lumière des considérations relatives à l’interprétation de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 (voir points 67 à 88 ci-dessus), le grief tiré de l’exception relative à la protection de l’intérêt public concernant la politique économique d’un État membre, prévue à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, dudit règlement.

103    À cet égard, il convient de rappeler que, dans le présent cas de refus de la Commission de donner accès à un document émanant d’un État membre en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, l’application des exceptions relatives à l’intérêt public visées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), dudit règlement reposait sur l’appréciation matérielle de l’État membre et non sur celle de la Commission.

104    Or, en ce qui concerne l’étendue du contrôle de la légalité d’une telle décision par le juge de l’Union, il convient de relever que la Cour a déjà jugé, dans le cadre de l’application de l’une des exceptions matérielles visées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1049/2001 par une institution en dehors du champ d’application de l’article 4, paragraphe 5, dudit règlement, qu’il convenait de reconnaître à cette institution une large marge d’appréciation aux fins de déterminer si la divulgation de documents relevant des domaines couverts par lesdites exceptions est susceptible de porter atteinte à l’intérêt public. La Cour a fondé une telle marge d’appréciation, notamment, sur le fait qu’une telle décision de refus a un caractère complexe et délicat nécessitant un degré de prudence tout particulier et que les critères énoncés à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 1049/2001 sont très généraux (arrêt Sison/Conseil, point 82 supra, points 34 à 36).

105    Ce raisonnement est également valable si, dans le cas d’un refus de la Commission de donner accès à un document émanant d’un État membre en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, l’application d’une exception matérielle visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), dudit règlement repose sur l’appréciation de l’État membre. À cet égard, il convient d’ajouter que l’appréciation de la question de savoir si la divulgation d’un document porte atteinte aux intérêts protégés par de telles exceptions matérielles peut relever des responsabilités politiques de cet État membre (voir, par analogie, arrêts du Tribunal Hautala/Conseil, point 80 supra, point 71, et du 7 février 2002, Kuijer/Conseil, T‑211/00, Rec. p. II‑485, point 53). Dans un tel cas, cet État membre doit disposer, de la même manière que l’institution, d’une large marge d’appréciation.

106    Il s’ensuit que, en l’espèce, il convient de reconnaître à la République fédérale d’Allemagne une large marge d’appréciation aux fins de déterminer si la divulgation de documents relevant des domaines couverts par l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement n° 1049/2001 est susceptible de porter atteinte à l’intérêt public.

107    Le contrôle du juge de l’Union doit, partant, se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt Sison/Conseil, point 82 supra, points 34 et 64).

108    S’agissant de l’exception relative à la protection de l’intérêt public concernant la politique économique d’un État membre, visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement n° 1049/2001, la requérante conteste, en premier lieu, le caractère suffisant de la motivation de la décision attaquée en ce qui concerne cette exception, en faisant valoir que la Commission s’est contentée d’énoncer brièvement le caractère confidentiel d’une déclaration contenue dans la lettre du chancelier allemand sans donner aucune raison supplémentaire, et, en second lieu, l’applicabilité de cette exception au cas d’espèce. Le Royaume de Danemark fait également valoir que la Commission n’a pas respecté l’obligation de motivation qui lui incombait.

109    En ce qui concerne, en premier lieu, la motivation de la décision attaquée, il est de jurisprudence constante que, en vertu de l’article 253 CE, celle-ci doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences dudit article 253 doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt Sison/Conseil, point 82 supra, point 80, et la jurisprudence citée).

110    Dans le cas d’une décision de refus d’accès à un document au titre d’une exception visée à l’article 4 du règlement n° 1049/2001, la motivation doit fournir des explications quant à la question de savoir comment l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par cette exception (arrêt de la Cour du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, Rec. p. I‑4723, point 49, et arrêt du Tribunal du 11 mars 2009, Borax Europe/Commission, T‑121/05, non publié au Recueil, point 37).

111    Toutefois, il peut être impossible d’indiquer les raisons justifiant la confidentialité à l’égard d’un document sans divulguer le contenu de ce dernier et, partant, priver l’exception de sa finalité essentielle (voir arrêt du Tribunal du 26 avril 2005, Sison/Conseil, T‑110/03, T‑150/03 et T‑405/03, Rec. p. II‑1429, point 60, et la jurisprudence citée). L’application de cette jurisprudence n’exige pas, contrairement à ce qu’allègue la requérante, qu’il s’agisse d’un document sensible dans le sens de l’article 9 du règlement n° 1049/2001 (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 5 mars 1997, WWF UK/Commission, T‑105/95, Rec. p. II‑313, point 65 ; du 25 avril 2007, WWF European Policy Programme/Conseil, T‑264/04, Rec. p. II‑911, point 37, et du 30 janvier 2008, Terezakis/Commission, T‑380/04, non publié au Recueil, point 71).

112    En effet, ainsi que la Cour l’a jugé, la nécessité de s’abstenir de faire état d’éléments qui porteraient ainsi indirectement atteinte aux intérêts que les exceptions en cause ont spécifiquement pour objet de protéger est notamment soulignée par l’article 11, paragraphe 2, du règlement n° 1049/2001 (arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, point 82 supra, point 83). Cette disposition prévoit notamment que, lorsqu’un document, qu’il ait ou non un caractère sensible au sens de l’article 9 dudit règlement, fait l’objet d’une référence dans le registre d’une institution, une telle référence doit être conçue de manière à ne pas porter atteinte à la protection des intérêts visés à l’article 4 du même règlement.

113    En l’espèce, la Commission s’est fondée, pour arrêter son refus de donner accès à la lettre du chancelier allemand, en ce qui concerne l’exception visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du règlement n° 1049/2001, sur le fait que la divulgation de cette lettre était susceptible de porter atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne la politique économique de la République fédérale d’Allemagne. Selon la motivation des autorités allemandes, telle qu’elle a été énoncée dans la décision attaquée, la lettre du chancelier allemand concernait une déclaration confidentielle établie exclusivement pour un usage interne. Cette lettre concernerait une affaire confidentielle relative à la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et d’autres États membres. La divulgation de cette lettre porterait atteinte à la confidentialité et compromettrait la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et celle d’autres États membres (voir point 24 ci-dessus).

114    Cette motivation de la décision attaquée, pour brève qu’elle soit, n’en demeure pas moins adéquate au regard du contexte de l’affaire et suffisante pour permettre à la requérante d’apprécier les raisons du refus d’accès au document en cause et au juge de l’Union d’exercer le contrôle de légalité qui lui incombe.

115    En effet, il convient de relever que le contexte de l’affaire est bien connu de la requérante.

116    D’une part, cette dernière a eu connaissance de l’avis favorable de la Commission, du 19 avril 2000, en ce qui concerne la réalisation du projet industriel en cause sur le site de Mühlenberger Loch, une zone protégée au titre de la directive 92/43. Ce projet consistait en l’agrandissement de l’usine de la société D. aux fins de l’assemblage final de l’airbus A3XX. Dans l’avis du 19 avril 2000, la Commission a évalué, en particulier, les raisons impératives d’intérêt public majeur en vertu de l’article 6, paragraphe 4, de la directive 92/43, invoquées par les autorités allemandes pour la réalisation dudit projet, à savoir des raisons économiques et sociales, telles que la très grande importance économique dudit projet pour la ville de Hambourg, l’Allemagne du Nord et l’industrie aéronautique européenne, en dépit des conclusions négatives tirées au terme de l’évaluation des incidences du projet sur le site et en l’absence de solutions autres. Pour ces raisons impératives d’intérêt public majeur, la Commission a considéré, dans son avis, que les effets négatifs du projet étaient justifiés.

117    D’autre part, la Commission a communiqué à la requérante, en annexe à la décision attaquée, tous les documents émanant des autorités allemandes et que celle-ci lui avait demandés, à l’exception de la lettre du chancelier allemand.

118    Dans ce contexte, en indiquant que la lettre du chancelier allemand au président de la Commission concernait une déclaration confidentielle dont la divulgation compromettrait la politique économique de la République fédérale d’Allemagne et celle d’autres États membres, la motivation de la décision attaquée fait clairement apparaître en quoi, selon la Commission, l’accès à ce document était susceptible de porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par l’exception en cause. L’évocation d’informations supplémentaires, faisant notamment référence à la déclaration précise contenue dans le document visé, aurait pu priver l’exception invoquée de sa finalité (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2005, Sison/Conseil, point 111 supra, point 62).

119    Il s’ensuit que la Commission n’a pas violé l’obligation de motivation.

120    En ce qui concerne, en second lieu, l’applicabilité de l’exception en cause au cas d’espèce, il convient d’examiner si l’appréciation selon laquelle la divulgation de la lettre du chancelier allemand était susceptible de porter atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne la politique économique de la République fédérale d’Allemagne repose sur une erreur manifeste des autorités allemandes.

121    Dès lors que les exceptions à l’accès aux documents dérogent au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (voir arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil, point 82 supra, point 63, et la jurisprudence citée).

122    Avant de s’opposer à la divulgation des documents demandés par la requérante, les autorités allemandes étaient tenues d’examiner si, au regard des informations dont elles disposaient, une telle divulgation était effectivement susceptible de porter atteinte à l’un des aspects de l’intérêt public protégé par les exceptions permettant un refus d’accès. Pour que ces exceptions soient applicables, le risque d’atteinte à l’intérêt public doit donc être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêts Kuijer/Conseil, point 105 supra, points 55 et 56, et WWF European Policy Programme/Conseil, point 111 supra, point 39). Il est de jurisprudence constante que l’examen requis pour le traitement d’une demande d’accès à des documents doit revêtir un caractère concret (voir arrêt Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 80 supra, point 69, et la jurisprudence citée). Cet examen concret doit, par ailleurs, être réalisé pour chaque document visé dans la demande. En effet, il résulte du règlement n° 1049/2001 que toutes les exceptions mentionnées à son article 4, paragraphes 1 à 3, sont énoncées comme devant s’appliquer « à un document » (arrêts du Tribunal Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 80 supra, point 70, et du 6 juillet 2006, Franchet et Byk/Commission, T‑391/03 et T‑70/04, Rec. p. II‑2023, point 116).

123    En l’espèce, premièrement, il ressort de la décision attaquée que l’examen de la demande de la requérante d’accès à des documents a été effectué pour chaque document visé dans cette demande. En effet, les autorités allemandes ne s’étant pas opposées à la divulgation de huit documents émanant de la ville de Hambourg et de la République fédérale d’Allemagne, indiqués individuellement dans la décision attaquée, mais s’étant seulement opposées à celle de la lettre du chancelier allemand en fournissant des raisons spécifiques à cet égard, la Commission a donné accès à ces huit documents et refusé uniquement de divulguer la lettre du chancelier allemand (voir point 22 ci-dessus).

124    Deuxièmement, les autorités allemandes n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en concluant, dans le cadre d’un examen concret du document en cause, à un risque d’atteinte à la politique économique de la République fédérale d’Allemagne en cas de divulgation de la lettre du chancelier allemand. Eu égard à l’importance économique du projet en cause, l’appréciation selon laquelle un tel risque était raisonnablement prévisible et non purement hypothétique n’est pas manifestement erronée.

125    En effet, d’une part, il ressort de la motivation fournie par les autorités allemandes, telle qu’énoncée dans la décision attaquée, que, pour parvenir à leur conclusion, celles-ci ont effectué un examen concret de la lettre du chancelier allemand. Les autorités allemandes se sont fondées, dans leur opposition, sur la déclaration spécifique du chancelier allemand contenue dans ce document et pas seulement sur des faits abstraits, tels que notamment la circonstance que cette lettre provenait du chancelier allemand de l’époque.

126    D’autre part, ainsi que la Commission l’a indiqué sans être contredite sur ce point par la requérante, il ressort de l’examen de l’avis du 19 avril 2000 que des considérations de politique économique étaient au cœur des enjeux liés au déclassement du site en question. L’avis de la Commission du 19 avril 2000 portait essentiellement sur la question de savoir s’il existait, aux termes de l’article 6, paragraphe 4, de la directive 92/43, d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, telles que la très grande importance économique de l’agrandissement de l’usine de la société D. aux fins de l’assemblage final de l’airbus A3XX pour la ville de Hambourg, l’Allemagne du Nord et l’industrie aéronautique européenne, justifiant de réaliser ce projet en dépit des conclusions négatives tirées au terme de l’évaluation des incidences du projet sur le site en cause et en l’absence de solutions autres. L’existence de ces considérations de politique économique n’a pas été contestée par la requérante.

127    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que l’appréciation selon laquelle la divulgation de la lettre du chancelier allemand était susceptible de porter atteinte à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne la politique économique de la République fédérale d’Allemagne ne repose pas sur une erreur manifeste des autorités allemandes.

128    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argumentation de la requérante selon laquelle, vu le laps de temps écoulé depuis l’envoi de la lettre du chancelier allemand, le refus d’accès n’est plus justifié eu égard au contenu de cette lettre, en vertu de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001, et selon laquelle la Commission aurait dû reconsidérer les raisons pour lesquelles cette lettre n’avait pas été divulguée.

129    À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001, les exceptions en cause s’appliquent uniquement au cours de la période durant laquelle la protection se justifie eu égard au contenu du document. Elles peuvent s’appliquer pendant une période maximale de 30 ans.

130    En l’espèce, ce n’est que dans ses observations sur le mémoire en intervention de la République de Finlande que la requérante mentionne l’application ratione temporis des exceptions au droit d’accès en vertu de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001. En effet, la requête ne contient pas d’argumentation relative à l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001. La République de Finlande fait valoir, dans son mémoire en intervention, une prétendue violation de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 uniquement dans le cadre de l’exception au droit d’accès visée à l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, de ce règlement concernant le processus décisionnel de la Commission. Dans ses observations sur ce mémoire, la requérante a accueilli favorablement l’idée énoncée par la République de Finlande en l’étendant aux exceptions visées par le présent moyen.

131    Il y a lieu de relever que les conditions de recevabilité d’un recours et des griefs qui y sont énoncés étant d’ordre public, le Tribunal peut les examiner d’office, conformément à l’article 113 de son règlement de procédure (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 15 avril 2010, Makhteshim-Agan Holding e.a./Commission, C‑517/08 P, non encore publiée au Recueil, point 54, et arrêt du Tribunal du 9 septembre 2009, Brink’s Security Luxembourg/Commission, T‑437/05, non encore publié au Recueil, point 54, et la jurisprudence citée).

132    Il ressort des dispositions combinées de l’article 44, paragraphe 1, sous c), et de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure que la requête introductive d’instance doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens indiqués et que la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

133    Or, le fait pour un requérant d’avoir pris connaissance d’un élément de droit pendant la procédure devant le Tribunal ne signifie pas que cet élément constitue un élément de droit qui s’est révélé pendant la procédure. Il faut encore que ce requérant n’ait pas été en mesure d’en avoir connaissance antérieurement (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 mars 2007, France Télécom/Commission, T‑340/04, Rec. p. II‑573, point 164, et la jurisprudence citée). À cet égard, il convient de relever qu’il ne ressort pas du dossier que la requérante n’a pas été en mesure d’avoir connaissance d’une éventuelle violation de l’application ratione temporis des exceptions au droit d’accès en cause.

134    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que l’argumentation de la requérante concernant l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 est irrecevable, étant donné qu’elle constitue un moyen nouveau qui n’a pas été soulevé dans la requête. Par ailleurs, il convient de relever que cette argumentation ne constitue pas une ampliation des moyens énoncés par la requérante dans la requête.

135    En effet, contrairement à ce qu’allèguent la requérante et les intervenants, l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 n’est pas lié de manière indissociable aux dispositions des paragraphes 1 à 3 de cet article. Il est vrai que l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 doit être appliqué conjointement avec les exceptions au droit d’accès prévues aux paragraphes 1 à 3 de cet article. Cependant, il ne saurait en être conclu que le fait de faire valoir la violation d’une partie de ces dispositions revient à invoquer la violation de l’ensemble de celles-ci. Le grief tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 ne présente pas de lien étroit avec les moyens soulevés par la requérante, tirés d’une violation des paragraphes 1 et 3 de cet article. En effet, si l’examen concret des exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001 est certes une condition indispensable pour décider de l’application ratione temporis des exceptions en cause, l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001 ne concerne pas les conditions d’application de celles-ci, prévues aux paragraphes 1 à 3 de cet article, mais leur applicabilité limitée dans le temps.

136    En tout état de cause, il convient de relever qu’il ne ressort pas du dossier qu’une protection de l’intérêt public en cause n’était plus justifiée au moment de l’adoption de la décision attaquée, eu égard au contenu de la lettre du chancelier allemand. À cet égard, il y a lieu de constater que, pour étayer leur argumentation relative à une prétendue violation de l’article 4, paragraphe 7, du règlement n° 1049/2001, ni la requérante ni les intervenants n’invoquent de circonstances autres que le seul laps de temps écoulé, telles que, par exemple, des éléments susceptibles de remettre en cause l’importance des considérations de politique économique présentées.

137    La lettre en cause contient une déclaration du chancelier allemand relative à la réalisation du projet d’agrandissement de l’usine de la société D. aux fins de l’assemblage final de l’airbus A3XX sur le site de Mühlenberger Loch, une zone protégée au titre de la directive 92/43. Ainsi qu’il a été constaté, des considérations d’ordre économique pour la ville de Hambourg, l’Allemagne du Nord et l’industrie aéronautique européenne étaient au cœur des enjeux liés au déclassement du site de Mühlenberger Loch. Eu égard à la déclaration contenue dans la lettre du chancelier allemand, qui concernait donc une affaire d’une très grande importance pour la politique économique de la République fédérale d’Allemagne, la période d’environ huit ans qui s’est écoulée entre l’envoi de la lettre du chancelier allemand (15 mars 2000) et l’adoption de la décision attaquée (19 juin 2008) doit être considérée comme une période au cours de laquelle la protection de l’intérêt public en cause, à savoir la politique économique de la République fédérale d’Allemagne, était justifiée.

138    Au vu de tout ce qui précède, il convient de conclure que la Commission a, à bon droit, refusé la divulgation de la lettre du chancelier allemand à la suite de l’opposition de la République fédérale d’Allemagne, en vertu de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001, sur la base de l’exception concernant la protection de l’intérêt public en ce qui concerne la politique économique d’un État membre, visée à l’article 4, paragraphe 1, sous a), quatrième tiret, du même règlement.

139    Il n’y a donc plus lieu d’examiner ni le grief tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième tiret, du règlement n° 1049/2001 concernant l’exception au droit d’accès relative à la protection de l’intérêt public en ce qui concerne les relations internationales, ni le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, dudit règlement, relatif à l’exception concernant la protection du processus décisionnel.

 Sur une prétendue violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001

 Arguments des parties

140    La République de Finlande fait valoir que la Commission a manqué à son obligation, en vertu de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, d’apprécier la possibilité d’accès partiel au document en cause. Cette dernière n’aurait pas dû se contenter de renvoyer à la déclaration de l’État membre concerné selon laquelle ce dernier refusait de donner accès au document en cause dans son intégralité.

141    En réponse à une question posée par le Tribunal relative à la recevabilité de son argumentation, la République de Finlande, soutenue par la requérante, le Royaume de Danemark et le Royaume de Suède, souligne que celle-ci est recevable dès lors que l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 est lié de manière indissociable aux paragraphes 1 à 3 de cet article.

142    La Commission conteste l’argumentation de la République de Finlande.

 Appréciation du Tribunal

143    Le Tribunal peut, à tout moment, soulever d’office toute fin de non-recevoir d’ordre public, au rang desquelles figure la recevabilité d’une argumentation soulevée par une partie intervenante (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 février 1961, De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, 30/59, Rec. p. 1, 37).

144    Il convient de constater que l’argumentation relative à une prétendue violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 concernant la question d’un accès partiel au document en cause a été invoquée uniquement par la République de Finlande. Une telle argumentation n’a pas été soulevée par la requérante.

145    À cet égard, il y a lieu de relever que, selon l’article 40, quatrième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal en vertu de l’article 53 dudit statut, les conclusions de la requête en intervention ne peuvent avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties principales. En outre, selon l’article 116, paragraphe 3, du règlement de procédure, l’intervenant accepte le litige dans l’état où il se trouve lors de son intervention. Or, si ces dispositions ne s’opposent pas à ce que l’intervenant fasse état d’arguments différents de ceux de la partie qu’il soutient, c’est néanmoins à la condition qu’ils ne modifient pas le cadre du litige et que l’intervention vise toujours au soutien des conclusions présentées par cette dernière (voir, en ce sens, arrêts De Gezamenlijke Steenkolenmijnen in Limburg/Haute Autorité, point 143 supra, p. 37, et Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 80 supra, point 52).

146    En l’espèce, le litige tel qu’il a été constitué entre la requérante et la Commission a pour objet l’annulation de la décision attaquée. Il concerne, d’une part, les conséquences de l’application de l’article 4, paragraphe 5, du règlement n° 1049/2001 et, d’autre part, une prétendue violation des exceptions au droit d’accès visées à l’article 4, paragraphe 1, sous a), troisième et quatrième tirets, et paragraphe 3, deuxième alinéa, du même règlement. Ni la requête ni le mémoire en défense ne contiennent de développements concernant une éventuelle violation de l’article 4, paragraphe 6, dudit règlement. En outre, la requérante a expressément indiqué dans la requête qu’elle ne contestait pas la décision attaquée en ce qui concerne l’accès partiel. La prétendue violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 a été soulevée, pour la première fois, dans le mémoire en intervention de la République de Finlande.

147    Contrairement à ce qu’allègue la République de Finlande, l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 n’est pas lié de manière indissociable aux paragraphes 1 à 3 de cet article. En effet, si l’examen concret des exceptions visées à l’article 4, paragraphes 1 à 3, du règlement n° 1049/2001 est certes une condition indispensable pour décider de la possibilité d’accorder un accès partiel au document en cause (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal Verein für Konsumenteninformation/Commission, point 80 supra, point 73 ; Franchet et Byk/Commission, point 122 supra, point 117, et du 19 janvier 2010, Co-Frutta/Commission, T‑355/04 et T‑446/04, non encore publié au Recueil, point 124), l’examen d’une telle possibilité ne concerne pas les conditions d’application des exceptions en cause prévues aux paragraphes 1 à 3 de cet article. L’exigence d’un tel examen découle du principe de proportionnalité. En effet, dans le cadre de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, il doit être examiné si le but poursuivi en refusant de donner accès au document en cause peut être atteint même dans l’hypothèse où uniquement les passages qui peuvent porter atteinte à l’intérêt protégé sont censurés (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 décembre 2001, Conseil/Hautala, C‑353/99 P, Rec. p. I‑9565, points 27 à 29, et arrêt WWF European Policy Programme/Conseil, point 111 supra, point 50).

148    Les conditions d’application de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 sont dès lors examinées séparément et à un stade de l’analyse différent de celui des exceptions au droit d’accès visées aux paragraphes 1 à 3 de cet article (voir, en ce sens, arrêts du 26 avril 2005, Sison/Conseil, point 111 supra, points 86 à 89, et WWF European Policy Programme/Conseil, point 111 supra, points 47 à 55). Seule une éventuelle violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001 est susceptible d’entraîner l’annulation d’une décision de refus partiel d’accès.

149    Il s’ensuit que l’argumentation invoquée par la République de Finlande, relative à une violation de l’article 4, paragraphe 6, du règlement n° 1049/2001, ne se rattache pas à l’objet du litige tel qu’il a été défini par les parties principales et modifie donc le cadre du présent litige. Cette argumentation doit donc être rejetée comme étant irrecevable.

 Sur la demande de production du document en cause

 Arguments des parties

150    La requérante invite le Tribunal à ordonner à la Commission par voie de mesures d’instruction, conformément à l’article 66, paragraphe 1, du règlement de procédure, de produire la lettre du chancelier allemand afin qu’il puisse examiner son contenu et ainsi déterminer si, et dans quelle mesure, cette lettre est couverte par les exceptions invoquées par la Commission.

151    La Commission et les intervenants n’ont pas pris position sur la demande de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

152    Ainsi qu’il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent, le Tribunal peut utilement statuer sur le recours sur la base des conclusions, moyens et arguments développés en cours d’instance.

153    Il y a donc lieu de rejeter la demande de la requérante tendant à ce qu’il soit ordonné à la Commission de fournir la lettre du chancelier allemand (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 septembre 2008, Williams/Commission, T‑42/05, non publié au Recueil, points 130 et 131).

154    Au vu de tout ce qui précède, il y a donc lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

155    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes du paragraphe 4 de cet article, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

156    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière. Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      IFAW Internationaler Tierschutz-Fonds gGmbH est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Le Royaume de Danemark, la République de Finlande et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.

Martins Ribeiro

Wahl

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 janvier 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.