Language of document : ECLI:EU:T:2005:4

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)
12 janvier 2005 (1)

« Marque communautaire – Signe verbal EUROPREMIUM – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l'affaire T-334/03,

Deutsche Post EURO EXPRESS GmbH, représentée initialement par Me G. Lindhofer, puis par Me K.-U. Jonas, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par MM. U. Pfleghar et G. Schneider, puis par MM. A. von Mühlendahl et Schneider, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l'OHMI du 20 juin 2003 (affaire R 348/2002-4), concernant l'enregistrement du signe verbal EUROPREMIUM comme marque communautaire,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),



composé de MM. J. Azizi, président, M. Jaeger et O. Czúcz, juges,

greffier : Mme B. Pastor, greffier adjoint,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 septembre 2003,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 23 janvier 2004,

à la suite de l'audience du 29 septembre 2004,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 24 mars 2000, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal EUROPREMIUM.

3
Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 16, 20, 35 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières [...] , en particulier papier d’emballage, sacs en papier, enveloppes en papier ; carton et produits en carton, à savoir cartons, carton pour l’emballage et enveloppes en carton pour le transport de marchandises en tout genre ; produits de l’imprimerie, journaux, brochures, périodiques et livres ; étiquettes (non en tissu) ; matériel d’instruction et d’enseignement (à l’exception des appareils) sur le transport de paquets et l’envoi de lettres ; matières plastiques pour l’emballage, en particulier emballages en matières plastiques à matelas d’air isolant, sacs, films, enveloppes et sachets d’emballage en matières plastiques ; matériel pour l’emballage en matières plastiques, conteneurs en matières plastiques [...] » ;

classe 20 : « Produits en bois, liège, roseau, jonc, osier, corne, os, ivoire, fanon de baleine, écaille, ambre, nacre, écume de mer et en succédanés de ces matières ou en matières plastiques [...] ; en particulier conteneurs ou emballages en bois ou en matières plastiques (non métalliques) pour le transport de marchandises en tout genre, matériel pour l’emballage en matières plastiques, films pour l’emballage en matières plastiques, sacs en matières plastiques, huches, caisses et palettes en bois ou en matières plastiques, boîtes, huches et caisses avec ou sans fermetures, tablettes de rangement, tréteaux, fermetures de conteneurs, articles de décoration à usage alimentaire (en matières plastiques), coffrets à couverts, conteneurs, récipients de transport, fûts, tonneaux, cuves, corbeilles, porte-bouteilles » ;

classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ; administration commerciale ; travaux de bureau ; en particulier organisation de foires et d’expositions [...] ; suivi assisté par ordinateur de marchandises et de paquets pendant leur transport ; aide à la gestion, à savoir aide à la direction des affaires ; conseils de gestion ; mise à disposition temporaire de personnel ; établissement de statistiques ; tenue des livres comptables ; services de vente aux enchères ; investigations pour affaires ; marketing ; études de marché et analyses de marché ; sondages d’opinion ; décoration de vitrines ; conseil en matière commerciale ; conseils en organisation ; services de conseils en affaires ; conseils en matière de personnel ; location de machines et d’équipement de bureau ; médiation et conclusion d’affaires commerciales pour le compte de tiers ; médiation de contrats d’achat et de vente de marchandises ; distribution de marchandises à des fins publicitaires ; reproduction de documents ; publicité ; publicité radiophonique et télévisée ; publicité cinématographique » ;

classe 39 : « Transport et entreposage ; tous les services compris dans la[dite] classe [...], en particulier transport, stockage, enlèvement, emballage, dépôt, livraison et suivi électronique de l’expédition de lettres, documents, communications, nouvelles, imprimés, paquets et autres marchandises, services de courrier international, à savoir acheminement transfrontalier et individuel de lettres, documents et autres écrits par des courriers livrant au porte-à-porte à l’aide de véhicules automobiles, de trains, de navires et d’avions ; services liés au transport des produits précités, à savoir dépôt et entreposage, emballage et livraison, transport de marchandises à l’aide de véhicules automobiles, de trains, de navires et d’avions, chargement et déchargement de navires, sauvetage de navires et de chargements de navires, portage, stockage de marchandises, meubles, transport d’argent et de valeurs, services d’intermédiaire en matière de transports ».

4
Par décision du 21 février 2002, l’examinateur a rejeté la demande en vertu de l’article 38 du règlement n° 40/94, au motif que le signe verbal demandé était descriptif des produits et services concernés et dépourvu de tout caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement.

5
Le 22 avril 2002, la requérante a formé un recours auprès l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de l’examinateur.

6
Par décision du 20 juin 2003 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours au motif que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 faisait obstacle à l’enregistrement de la marque EUROPREMIUM, cette dernière étant susceptible d’être perçue par les consommateurs comme une indication de la qualité remarquable et de l’origine européenne des produits et services faisant l’objet de la demande de marque.


Conclusions des parties

7
Dans sa requête, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée dans la mesure où, selon elle, l’OHMI y estime que la marque communautaire EUROPREMIUM ne satisfait pas aux conditions de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94 ;

faire publier la marque communautaire EUROPREMIUM conformément à l’article 40 du règlement n° 40/94 ;

subsidiairement, renvoyer l’affaire devant la chambre de recours ;

condamner l’OHMI aux dépens.

8
L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

déclarer irrecevables les demandes visant, respectivement, à l’annulation de la décision attaquée en ce qu’il y aurait refusé l’enregistrement de la marque au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, à ce qu’il soit enjoint à l’OHMI de publier ladite marque et au renvoi de l’affaire devant la chambre de recours ;

rejeter le recours pour le surplus ;

condamner la requérante aux dépens.

9
Par lettre du 20 septembre 2004, la requérante s’est désistée de ses deuxième et troisième chefs de conclusions.

10
Lors de l’audience, la requérante a précisé que son recours visait à faire annuler la décision attaquée dans la mesure où l’OHMI y avait estimé que la marque communautaire EUROPREMIUM ne satisfaisait pas aux conditions de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.


En droit

11
À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

Arguments des parties

12
La requérante souligne que l’élément déterminant d’une marque consiste en son aptitude à distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’une autre entreprise et rappelle que l’appréciation du caractère distinctif d’un signe doit se faire dans la relation entre le signe et un produit ou un service déterminé et non de façon abstraite.

13
Elle fait valoir qu’une marque devrait être enregistrée dès lors qu’elle n’est pas, si on l’examine dans sa globalité, exclusivement descriptive. Elle affirme qu’un signe distinctif qui pourrait être compris autrement que comme la description du produit ou d’une de ses qualités ne serait pas exclusivement descriptif et, dès lors, serait apte à constituer une marque.

14
Elle ajoute que le terme « europremium » a plusieurs significations et qu’il devrait, dès lors, être considéré comme distinctif.

15
Lors de l’audience, la requérante a invoqué l’arrêt du Tribunal du 9 octobre 2002, Dart Industries/OHMI (UltraPlus) (T‑360/00, Rec. p. II‑3867). Elle rappelle que le Tribunal a jugé dans cet arrêt que le fait qu’une entreprise vante, indirectement et de façon abstraite, l’excellence de ses produits à travers le signe UltraPlus sans pour autant informer directement et immédiatement le consommateur de l’une des caractéristiques déterminées des produits en cause relève de l’évocation et non de la désignation au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 (point 27 de l’arrêt). La requérante rappelle que, dans cet arrêt, le Tribunal avait annulé la décision attaquée en indiquant que, en ne rattachant pas son analyse aux produits en cause et en ne démontrant pas que le signe verbal en cause pouvait servir à désigner directement les produits concernés, la chambre de recours avait violé l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 (point 29 de l’arrêt).

16
La requérante estime que, dans la présente affaire, l’OHMI a commis la même erreur que celle que le Tribunal avait constatée dans cet arrêt en estimant qu’EUROPREMIUM est descriptif des produits et services visés dans la demande d’enregistrement alors qu’il n’existerait pas de rapport direct et concret entre ceux-ci et le signe verbal en cause.

17
L’OHMI estime que la chambre de recours a établi à juste titre que le signe verbal EUROPREMIUM est une indication descriptive dont l’enregistrement en tant que marque doit être refusé. Il rappelle que, conformément à l’arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD) (T‑356/00, Rec. p. II‑1963, point 30), pour être refusé à l’enregistrement en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, le signe verbal doit, dans l’une au moins des significations potentielles, désigner une caractéristique des produits ou services concernés.

18
L’OHMI fait valoir qu’une combinaison de mots commençant par le terme « euro » doit être comprise comme faisant référence à l’Europe et non à l’euro en tant que monnaie unique. Concernant le mot « premium », il fait valoir qu’il s’agit d’un mot anglais, d’origine latine, qui serait utilisé dans d’autres langues de l’Union européenne et qui signifierait « de qualité particulière » ou « de grande qualité ». Il estime que ces deux significations sont évidentes pour les consommateurs concernés. Il en résulterait que les consommateurs percevraient le signe verbal en cause comme désignant des biens d’origine européenne et de grande qualité.

19
L’OHMI fait valoir, en outre, que les indications descriptives sont non seulement des indications dont l’exactitude du contenu peut être vérifié, mais également des indications qui se limitent à des éloges généraux quant à la qualité ou à d’autres caractéristiques du produit. Il considère que le signe dont l’enregistrement a été demandé décrit les produits et services en cause, ou au moins l’une de leurs caractéristiques, de manière suffisamment précise pour que l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 puisse trouver à s’appliquer.

20
Lors de l’audience, l’OHMI a invoqué deux arrêts de la Cour du 12 février 2004, Campina Melkunie (C‑265/00, non encore publié au Recueil), et Koninklijke KPN Nederland (C‑363/99, non encore publié au Recueil), concernant l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), qui est libellé dans des termes presque identiques à ceux de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. Dans ces arrêts, la Cour aurait indiqué que l’article 3, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/104 doit être interprété en ce sens qu’une marque constituée d’un mot ou d’un néologisme composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot ou le néologisme et la simple somme des éléments qui le composent (respectivement points 43 et 104 des arrêts).

21
L’OHMI estime que, dès lors que le signe verbal EUROPREMIUM est formé de deux éléments descriptifs et qu’il n’y a pas d’écart perceptible entre celui-ci et la simple somme des éléments qui le composent, la chambre de recours a, à bon droit, refusé l’enregistrement.

Appréciation du Tribunal

22
Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

23
L’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 empêche que les signes ou indications y visés soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 4 mai 1999, Windsurfing Chiemsee, C‑108/97 et C‑109/97, Rec. p. I‑2779, point 25 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 36, et CARCARD, point 17 supra, point 24).

24
Or, les signes et les indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 sont seulement ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public ciblé, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé (arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39).

25
Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de la catégorie de produits et services en cause ou d’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 juin 2001, DKV/OHMI (EuroHealth), T‑359/99, Rec. p. II-1645, point 36 ; UltraPlus, point 15 supra, point 26, et du 20 juillet 2004, Lissotschenko et Hentze/OHMI (LIMO), T‑311/02, non encore publié au Recueil, point 30].

26
Partant, l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être portée que, d’une part, par rapport aux produits ou services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public ciblé (arrêts CARCARD, point 17 supra, point 25, et UltraPlus, point 15 supra, point 22).

27
Dans la présente affaire, les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé sont, notamment, des produits en divers matériaux destinés à l’emballage, au rangement ou au transport, des services de publicité, gestion ou assistance en matière commerciale et des services de transport et entreposage.

28
Concernant le public ciblé, la chambre de recours a constaté que le public pertinent était le grand public (point 9 de la décision attaquée). Le Tribunal considère à cet égard que, les produits et services concernés étant destinés à l’ensemble des consommateurs, cette analyse de la chambre de recours est exacte. Par ailleurs, l’existence du motif absolu de refus visé en l’espèce n’a été soulevée, comme l’a confirmé l’OHMI en réponse aux questions du Tribunal, que pour l’une des langues parlées dans la Communauté, à savoir la langue anglaise (point 10 de la décision attaquée). Ainsi, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94, le public pertinent par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus est le consommateur moyen anglophone (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 31].

29
En ce qui concerne la signification du terme « europremium », il ressort des points 10 et 11 de la décision attaquée que, pour l’OHMI, le préfixe « euro » sera compris comme une référence à l’adjectif « européen » et que « premium » signifie, en anglais, « de grande qualité » et que, dès lors, le mot composé ainsi créé suscite dans l’esprit du consommateur l’impression de se trouver en présence de produits ou de services de qualité et originaires d’Europe.

30
À cet égard, le fait que, comme le prétend la requérante, le terme « europremium » n’a pas de signification claire et déterminée ne saurait affecter l’appréciation de son caractère descriptif. En effet, il convient de rappeler que, pour tomber sous le coup de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il suffit qu’un signe verbal, dans l’une au moins de ses significations potentielles, désigne une caractéristique des produits ou services concernés (arrêt CARCARD, point 17 supra, point 30). Ainsi, même s’il est vrai que le terme « premium » a d’autres significations et que l’introduction de la monnaie unique est susceptible d’avoir modifié, même dans des pays ne faisant pas partie de l’Union économique et monétaire, la compréhension que le public ciblé peut avoir du préfixe « euro », le Tribunal ne peut que constater que la signification retenue par la chambre de recours est l’une des significations potentielles du terme « europremium ».

31
Quant à la nature du rapport existant entre le mot « europremium » et les produits et services concernés, la chambre de recours a considéré, au point 12 de la décision attaquée, que ce terme désigne la qualité et la provenance géographique de ces derniers.

32
Il convient donc d’examiner si le signe verbal EUROPREMIUM, compris en tant qu’allusion à des produits et des services d’origine européenne et de grande qualité, présente, du point de vue du public anglophone, un rapport direct et concret avec les produits et services concernés de nature à le faire tomber sous le coup de l’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

33
L’OHMI a fait valoir, lors de l’audience, que la Cour avait jugé, concernant l’interprétation de la directive 89/104, qu’une marque constituée d’un mot ou d’un néologisme composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot ou le néologisme et la simple somme des éléments qui le composent (arrêts Campina Melkunie, point 20 supra, point 43, et Koninklijke KPN Nederland, point 20 supra, point 104).

34
À cet égard, il convient de noter que, dans ces affaires, le caractère descriptif des éléments composant la marque dont l’enregistrement avait été demandé ne faisait aucun doute. Or, contrairement à ce que prétend l’OHMI, le signe verbal en cause dans la présente affaire n’est pas composé d’éléments descriptifs des produits et services revendiqués par la requérante.

35
Concernant d’abord le préfixe « euro », il est important de rappeler que seuls les signes descriptifs des caractéristiques essentielles des produits ou services concernés, pouvant, en tant que tels, servir à désigner ces derniers dans le langage commun, tombent sous l’interdiction de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 (arrêt Procter & Gamble/OHMI, point 24 supra, point 39). Or, la chambre de recours, après avoir affirmé dans la décision attaquée que le préfixe « euro » devait être compris comme une référence à l’origine des produits et services en cause, n’y a fait figurer aucune motivation visant à démontrer que l’origine est une caractéristique essentielle des produits et services faisant l’objet de la demande de marque qui entrerait en ligne de compte lors du choix opéré par le public ciblé [voir, en ce sens, arrêt ELLOS, point 28 supra, point 42, et arrêt du Tribunal du 26 novembre 2003, HERON Robotunits/OHMI (ROBOTUNITS), T‑222/02, non encore publié au Recueil, point 44] et qui permettrait à celui-ci d’établir immédiatement et sans autre réflexion un rapport concret et direct avec ces produits et services. La chambre de recours n’a donc pas prouvé, dans la décision attaquée, que le préfixe « euro » soit descriptif des produits et services en cause.

36
En tout état de cause, le Tribunal observe que l’origine n’est pas une caractéristique essentielle des produits et services relatifs au transport postal. En effet, l’origine géographique des produits relevant des classes 16 et 20, qui sont, en substance, des produits destinés à l’emballage des biens de toute sorte, n’est pas à l’évidence une caractéristique déterminant le choix du consommateur, lequel arrêtera sa décision en fonction des éléments tels que les dimensions de l’emballage ou sa résistance. Concernant les services relevant des classes 35 et 39, il n’y a pas non plus de raison de considérer que l’origine est une caractéristique entrant en ligne de compte lors du choix du consommateur moyen. Il en résulte que le préfixe « euro » ne désigne pas les produits et services en cause ni directement ni par la mention d’une de leurs caractéristiques essentielles et n’est donc pas descriptif à leur égard.

37
Concernant ensuite le terme « premium », il est important de rappeler que le fait qu’une entreprise vante, indirectement et de façon abstraite, l’excellence de ses produits sans pour autant informer directement et immédiatement le consommateur de l’une des qualités ou des caractéristiques déterminées des produits et services concernés relève de l’évocation et non de la désignation au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [arrêt UltraPlus, point 15 supra, point 27, et, en ce sens, arrêt du Tribunal du 31 janvier 2001, Sunrider/OHMI (VITALITE), T‑24/00, Rec. p. II‑449, points 22 à 24].

38
Le Tribunal a ainsi jugé que l’enregistrement d’une marque composée de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou services visés par cette marque n’est pas exclu, en tant que tel, en raison d’une telle utilisation à la seule condition que la marque en cause puisse être perçue d’emblée comme une indication de l’origine commerciale des produits ou services visés, afin de permettre au public pertinent de distinguer sans confusion possible les produits ou services du titulaire de la marque de ceux qui ont une autre provenance commerciale [arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, Rec. p. II‑2235, point 21].

39
Or, cette aptitude d’un signe à être perçu comme une indication de l’origine commerciale des produits et services doit être examinée dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, SAT.1 SatellitenFernsehen/OHMI, C‑329/02 P, non encore publié au Recueil, points 23 et 25 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Rewe-Zentral/OHMI (LITE), T‑79/00, Rec. p. II‑705, point 26, et du 30 juin 2004, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI (Mehr Für Ihr Geld), T‑281/02, non encore publié au Recueil, point 24].

40
Il en résulte que les signes ayant un caractère laudatif évoquant des qualités abstraites qu’une entreprise entend conférer à ses propres produits ou services à des fins publicitaires sont à examiner au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

41
En revanche, pour tomber sous le coup de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, seule disposition en cause dans la présente affaire, un signe verbal doit servir à désigner de manière spécifique, non vague et objective les caractéristiques essentielles des produits et services en cause [voir, en ce sens, arrêt VITALITE, point 37 supra, point 23 ; arrêts du Tribunal du 5 avril 2001, Bank für Arbeit und Wirtschaft/OHMI (EASYBANK), T‑87/00, Rec. p. II‑1259, points 29 et 31, et UltraPlus, point 15 supra, point 28].

42
D’ailleurs, comme le rappelle à juste titre la requérante, le Tribunal a déjà jugé qu’un terme à caractère flatteur, tel qu’UltraPlus, n’était pourtant pas descriptif des produits en cause, en l’occurrence des plats en plastique pour le four, dès lors qu’il ne permettait pas au consommateur d’établir immédiatement et sans autre réflexion un rapport concret et direct avec les produits concernés (arrêt UltraPlus, point 15 supra, point 26, et, en ce sens, arrêt VITALITE, point 37 supra, points 22 à 24).

43
Or, le mot « premium », dans la signification retenue par la chambre de recours, n’est qu’un terme laudatif tendant à évoquer une caractéristique que la requérante entend attribuer à ses propres produits, sans pour autant informer les consommateurs des caractéristiques spécifiques et objectives des produits ou services offerts. Ce terme ne peut donc pas servir à désigner le type de produits et services concernés, ni directement ni par référence à leurs caractéristiques essentielles.

44
Le signe verbal EUROPREMIUM n’étant donc pas composé d’éléments descriptifs des produits et services concernés, les arrêts de la Cour Campina Melkunie, point 20 supra, et Koninklijke KPN Nederland, point 20 supra, invoqués par l’OHMI, ne sont pas pertinents en l’espèce. Il ne reste désormais qu’à examiner si, malgré cette absence de caractère descriptif des éléments qui le composent, le signe verbal en cause, pris dans son ensemble, permet au public ciblé d’établir un rapport immédiat et concret avec les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé.

45
À cet égard, il convient de relever que la chambre de recours n’a pas établi, dans la décision attaquée, que le terme « EUROPREMIUM », pris dans son ensemble, était, ou pourrait être, une dénomination générique ou habituelle pour identifier ou caractériser des produits destinés à l’emballage, au rangement ou au transport, des services de publicité, gestion ou assistance en matière commerciale ou des services de transport et d'entreposage [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 50]. La décision attaquée se borne à indiquer que ce signe verbal évoque dans l’esprit du consommateur l’impression de produits et services européens de grande qualité sans démontrer que cette caractéristique serait de nature à permettre à ce dernier d’établir immédiatement, et sans autre réflexion, un rapport direct et concret avec les produits et services susvisés.

46
Ainsi, en ne rattachant pas son analyse aux produits et services en cause et en ne démontrant pas que le signe verbal EUROPREMIUM, compris en tant que référence à des produits et services d’origine européenne et de grande qualité, pouvait servir à désigner directement lesdits produits et services, la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

47
La décision attaquée doit donc être annulée.


Sur les dépens

48
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens exposés par la requérante, conformément aux conclusions de celle-ci.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)
La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché antérieur (marques, dessins et modèles) du 20 juin 2003 (affaire R 348/2002-4) est annulée.

2)
La partie défenderesse est condamnée aux dépens.

Azizi

Jaeger

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 janvier 2005.

Le greffier

Le président

H. Jung

M. Jaeger


1
Langue de procédure : l'allemand.