Language of document : ECLI:EU:T:2001:192

ARRÊT DU TRIBUNAL (juge unique)

20 juillet 2001 (1)

«Fonctionnaires - Avis de vacance - Nomination - Obligation de motivation - Examen comparatif des mérites des candidats - Pouvoir d'appréciation de l'AIPN - Rapport de notation - Demande de mutation»

Dans l'affaire T-351/99,

Christian Brumter, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes J.-N. Louis, G.-F. Parmentier et V. Peere, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mmes C. Berardis-Kayser et F. Clotuche-Duvieusart, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d'annulation, d'une part, de la décision de la Commission du 29 janvier 1999 de rejeter la candidature du requérant au poste visé par l'avis de vacance COM/173/98 et, d'autre part, de la décision du 27 janvier 1999 de nommer M. Gérard Zahlen à ce poste,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

juge: M. J. Azizi,

greffier: Mme B. Pastor, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 23 mars 2001,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1.
    L'article 25, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le «statut») énonce:

«Toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé. Toute décision faisant grief doit être motivée.»

2.
    L'article 29, paragraphe 1, du statut prévoit:

«En vue de pourvoir aux vacances d'emploi dans une institution, l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avoir examiné:

a) les possibilités de promotion et de mutation au sein de l'institution;

b) les possibilités d'organisation de concours internes à l'institution;

c) les demandes de transfert de fonctionnaires d'autres institutions des trois Communautés européennes

ouvre la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves. [...]»

3.
    Enfin, l'article 45, paragraphe 1, du statut dispose:

«La promotion est attribuée par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination. Elle entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur de la catégorie ou du cadre auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d'un minimum d'ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion ainsi que des rapports dont ils ont fait l'objet.

Ce minimum d'ancienneté est, pour les fonctionnaires nommés au grade de base de leur cadre ou de leur catégorie, de six mois à compter de leur titularisation; il est de deux ans pour les autres fonctionnaires.»

Faits à l'origine du litige

4.
    Le 15 octobre 1998, la défenderesse a publié, au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut, l'avis de vacance COM/173/98 en vue de pourvoir au poste de chef de l'unité «Ressources, contrôle interne et relations avec la Cour des comptes» de la direction générale «Politique d'entreprise, commerce, tourisme et économie sociale» (DG XXIII).

5.
    Dans la rubrique «Qualifications minimales requises pour postuler en vue d'une mutation/promotion», l'avis de vacance prévoyait les conditions suivantes:

«-     appartenir à la même catégorie/cadre/carrière(s) du COM (mutation);

-     appartenir à la carrière inférieure à celle du COM (promotion, selon l'article 45 du statut);

-    connaissances et expérience/aptitudes en relation avec les tâches à exercer;

-    pour les emplois nécessitant des qualifications particulières: connaissances et expérience approfondies dans/en relation avec le secteur d'activité».

6.
    En ce qui concerne le poste à pourvoir et les qualifications plus spécifiques requises pour celui-ci, ils sont décrits comme suit dans l'avis de vacance:

«Chef d'unité 'Ressources, contrôle interne et relations avec la Cour des comptes‘. La mission de l'unité est d'assurer une gestion efficace et effective des ressources au sein de la DG XXII et, en particulier, de promouvoir l'usage optimal des ressources humaines, financières, informatiques et matérielles conformément aux principes arrêtés dans les programmes SEM 2000 et MAP 2000. Le candidat retenuaura une expérience approfondie en matière budgétaire, de passation de marchés ou d'appels à la concurrence et de gestion du personnel ainsi que de solides compétences en matière de gestion.»

7.
    À la suite de cette publication, sept fonctionnaires, dont le requérant, ont présenté leur candidature. Toutefois, après examen de ces candidatures, l'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l'«AIPN») a souhaité élargir ses possibilités de choix. Elle a, dès lors, décidé de publier une seconde fois l'avis de vacance au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut. Le délai d'introduction des candidatures venait à échéance le 8 décembre 1998.

8.
    À la suite de cette seconde publication, treize candidatures, dont celles du requérant et du candidat retenu, ont été enregistrées.

9.
    Afin d'évaluer ces candidatures, le comité consultatif des nominations (ci-après le «CCN») s'est réuni le 15 décembre 1998. À cette occasion, il a entendu M. Crauser, directeur général de la DG XXIII, qui, sur la base de l'avis de vacance, a précisé les qualifications requises pour le titulaire du poste.

10.
    Le CCN a ensuite rendu son avis n° 200/98 qui se lit comme suit:

«Compte tenu de l'acte de candidature de chaque candidat au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut et de leur dossier personnel, le comité est parvenu à la conclusion que les candidatures de MM. Lester, Lopez et Zahlen, citées par ordre alphabétique, réunissent les qualifications requises pour l'emploi en cause. Il considère néanmoins que la candidature de M. Zahlen pourrait plus particulièrement être prise en considération. Le comité a également noté les bonnes qualifications de MM. Brumter et Vervaet.»

11.
    Le requérant a été informé de cet avis par note du 21 décembre 1998.

12.
    Par décision du 27 janvier 1999, l'AIPN a nommé M. Zahlen au poste visé par l'avis de vacance. Quant au requérant, il a été informé du rejet de sa candidature par note du 29 janvier 1999.

13.
    Le 29 avril 1999, le requérant a introduit une réclamation au titre de l'article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision de rejet de sa candidature et celle portant nomination du candidat retenu au poste en question.

14.
    Par note du 28 juin 1999, le requérant a été informé que sa réclamation serait examinée au cours de la réunion du groupe interservices du 7 juillet 1999. Par une lettre de son conseil du 6 juillet suivant, le requérant a toutefois informé les services compétents de la défenderesse qu'il ne participerait pas à cette réunion en raison de l'absence de représentants du service juridique et du contrôle financier à celle-ci.

15.
    La réclamation introduite par le requérant a fait l'objet d'une décision implicite de rejet intervenue le 29 août 1999.

Procédure et conclusions des parties

16.
    Le requérant, dont la résidence habituelle est établie à Pristina (République fédérale de Yougoslavie), a introduit le présent recours par requête du 8 décembre 1999, enregistrée au greffe du Tribunal le 9 décembre 1999.

17.
    Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d'organisation de la procédure, a invité les parties à répondre par écrit à certaines questions. Il a été satisfait à cette demande dans le délai imparti.

18.
    Conformément aux dispositions des articles 14, paragraphe 2, et 51 du règlement de procédure du Tribunal, la troisième chambre a attribué l'affaire à M. Azizi, siégeant en qualité de juge unique.

19.
    Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l'audience du 23 mars 2001.

20.
    Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    annuler la décision rejetant sa candidature au poste visé par l'avis de vacance;

-    annuler la décision de nommer à ce poste le candidat retenu;

-    condamner la défenderesse aux dépens.

21.
    La défenderesse conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

-    rejeter le recours comme non fondé;

-    statuer sur les dépens comme de droit.

En droit

22.
    À l'appui de son recours en annulation, le requérant invoque, en premier lieu, la violation de l'obligation de motivation prévue à l'article 25, deuxième alinéa, du statut. En deuxième lieu, il fait valoir que les décisions attaquées violent les articles 29 et 45 du statut ainsi que les principes d'égalité de traitement et de vocation à la carrière. Enfin, en troisième lieu, il soutient que la nomination du candidat retenu est intervenue en violation des principes régissant la mutation des fonctionnaires.

23.
    Le Tribunal estime utile d'analyser d'abord le moyen tiré de la violation de l'obligation de motivation.

Sur le moyen tiré du défaut de motivation

Arguments des parties

24.
    Le requérant relève que la décision rejetant sa candidature au poste visé par l'avis de vacance n'est pas motivée et qu'aucune motivation ne lui a été fournie durant la procédure précontentieuse, puisque sa réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet implicite de la part de la défenderesse. Il estime que cette absence totale de motivation constitue une violation de l'article 25, deuxième alinéa, du statut.

25.
    Il expose que, selon la jurisprudence, l'absence de motivation ne saurait être couverte durant la phase contentieuse (arrêt du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 9 décembre 1993, Parlement/Volger, C-115/92 P, Rec. p. I-6549, points 22 à 24).

26.
    La défenderesse reconnaît avoir été en défaut de communiquer au requérant une réponse explicite à sa réclamation et que celui-ci a été obligé d'introduire le présent recours afin de connaître les raisons qui ont amené l'AIPN à rejeter sa candidature au poste litigieux.

27.
    La défenderesse considère toutefois que, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence du Tribunal (voir, notamment, arrêt du 26 janvier 2000, Gouloussis/Commission, T-86/98, RecFP p. I-A-5 et II-23), le caractère tardif de la motivation ne peut pas, à lui seul, affecter la légalité intrinsèque de la décision portant rejet de la candidature du requérant. De plus, l'annulation de cette décision ne pourrait bénéficier au requérant, puisque la défenderesse devrait, à la suite d'une telle annulation, adopter une nouvelle décision reprenant les motifs évoqués dans son mémoire en défense.

Appréciation du Tribunal

28.
    Il convient de rappeler que l'obligation de motiver toute décision faisant grief, édictée à l'article 25, deuxième alinéa, du statut, constitue un principe essentiel du droit communautaire auquel il ne saurait être dérogé qu'en raison de considérations impérieuses (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 18 mars 1997, Picciolo et Caló/Comité des régions, T-178/95 et T-179/95, RecFP p. I-A-51 et II-155, point 33). Elle a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l'acte lui faisant grief et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre à celui-ci d'exercer son contrôle (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 17 février 1998, Maccaferri/Commission, T-56/96, RecFP p. I-A-57 et II-133, point 36).

29.
    Selon une jurisprudence constante, l'AIPN n'est cependant pas tenue de motiver les décisions de promotion à l'égard des candidats non promus. Elle est, en revanche, tenue de motiver sa décision portant rejet d'une réclamation déposée en vertu de l'article 90, paragraphe 2, du statut par un candidat non promu, la motivation de cette décision étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation est dirigée (arrêts de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. p. I-225, point 13, Parlement/Volger, cité au point 25 ci-dessus, points 22 et 23, et Picciolo et Caló/Comité des régions, cité au point 28 ci-dessus, point 34). Les promotions se faisant, aux termes de l'article 45 du statut, «au choix», il suffit que la motivation du rejet de la réclamation concerne la réunion des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la promotion (arrêts du Tribunal Picciolo et Caló/Comité des régions, cité au point 28 ci-dessus, point 34, du 29 mai 1997, Contargyris/Conseil, T-6/96, RecFP p. I-A-119 et II-357, point 148, du 18 décembre 1997, Delvaux/Commission, T-142/95, RecFP p. I-A-477 et II-1247, point 84, et du 21 septembre 1999, Oliveira/Parlement, T-157/98, RecFP p. I-A-163 et II-851, point 50).

30.
    Il ressort de cette jurisprudence que la défenderesse avait l'obligation de fournir au requérant, au plus tard dans la décision portant rejet de la réclamation, une motivation en ce qui concerne le rejet de la candidature de celui-ci. Or, si la défenderesse a rejeté la candidature du requérant sans lui donner de motivation, elle n'a même pas, à la suite de la réclamation, fourni de motivation dans le cadre de la procédure précontentieuse. Par conséquent, elle a violé l'article 25, deuxième alinéa, du statut.

31.
    Contrairement à ce qu'affirme la défenderesse, cette conclusion n'est pas infirmée par l'arrêt Gouloussis/Commission, cité au point 27 ci-dessus (points 73 à 78).

32.
    Il est vrai que, dans cet arrêt, le Tribunal a rejeté le moyen tiré d'une violation de l'obligation de motivation dans un cas où l'AIPN avait adressé au requérant une décision de rejet de la réclamation postérieurement à l'expiration du délai prévu à l'article 90, paragraphe 2, du statut et à l'introduction d'un recours en annulation par celui-ci.

33.
    Il convient toutefois de rappeler que, selon une jurisprudence constante, «l'absence totale de motivation d'une décision ne peut pas être couverte par des explications fournies par l'AIPN après l'introduction d'un recours. À ce stade, de telles explications ne rempliraient plus leur fonction. En effet, l'obligation de motivation, qui résulte des dispositions combinées des articles 25, deuxième alinéa, et 90, paragraphe 2, du statut, a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé du rejet de sa candidature et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre à celui-ci d'exercer son contrôle. L'introduction d'un recours met donc un terme à la possibilité de l'AIPN de régulariser sa décision par une réponsemotivée portant rejet de la réclamation» (voir, notamment, arrêt Volger/Parlement, cité au point 25 ci-dessus, point 40).

34.
    Au surplus, il y a lieu de relever que, contrairement au requérant dans l'affaire ayant donné lieu à l'arrêt Gouloussis/Commission, cité au point 27 ci-dessus, le requérant en l'espèce conteste non seulement le caractère tardif de la motivation, mais également son caractère incomplet. De plus, la motivation ne lui a pas été fournie dans le cadre d'une réponse, même tardive, à la réclamation, mais dans le cadre du mémoire en défense. Enfin, il convient de souligner que le requérant a un intérêt manifeste à être informé des motifs du rejet de sa candidature avant l'introduction du recours, dès lors que ces motifs doivent lui permettre de savoir si la décision est bien fondée ou si elle est éventuellement entachée d'un vice permettant d'en contester la validité.

35.
    Il ressort de ce qui précède que le moyen tiré de la violation de l'obligation de motivation est fondé et que les décisions attaquées doivent donc être annulées.

36.
    Toutefois, dans le cadre de son pouvoir de contrôle, le Tribunal estime opportun d'examiner, à titre surérogatoire, eu égard au fait qu'il vient de constater une violation de l'obligation de motivation incombant à la défenderesse justifiant l'annulation des décisions attaquées, les deuxième et troisième moyens invoqués par le requérant.

Sur le moyen tiré d'une violation des articles 29 et 45 du statut ainsi que des principes d'égalité de traitement et de vocation à la carrière

Arguments des parties

- Observations liminaires

37.
    Le requérant rappelle qu'il ressort de la jurisprudence que, si l'AIPN dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la comparaison des mérites respectifs des candidats, elle est tenue d'exercer ce pouvoir dans le cadre qu'elle s'est imposé à elle-même par l'avis de vacance afférent au poste en cause, lequel a pour but d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s'agit, afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (arrêt de la Cour du 18 mars 1993, Parlement/Frederiksen, C-35/92 P, Rec. p. I-991, points 13 à 25).

38.
    Le requérant relève également que l'exercice du pouvoir dont dispose l'AIPN suppose un examen scrupuleux et impartial de tous les éléments pertinents de chaque candidature dans le strict respect des exigences énoncées dans l'avis de vacance en cause et, en conséquence, l'élimination de tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. Il soutient que, dans le cadre de l'article 29 du statut, l'AIPN est tenue d'examiner dans chaque cas si la promotion, la mutation ou l'organisationd'un concours interne sont susceptibles d'aboutir à la nomination d'une personne possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d'intégrité (arrêt du Tribunal du 9 mars 1999, Richard/Parlement, T-273/97, RecFP p. I-A-45 et II-235, points 27 et suivants).

39.
    Enfin, le requérant fait observer que, dans son arrêt du 12 mai 1998, Wenk/Commission (T-159/96, RecFP p. I-A-193 et II-593, points 54 et 55), le Tribunal a considéré, notamment:

«En présence d'un faisceau d'indices suffisamment concordants venant étayer l'argumentation du requérant relative à l'absence d'un véritable examen comparatif des candidatures, c'est à l'institution défenderesse qu'il incombe de rapporter la preuve, par des éléments objectifs susceptibles de faire l'objet d'un contrôle juridictionnel, qu'elle a respecté les garanties accordées par l'article 45 du statut au fonctionnaire ayant vocation à la promotion et procédé à un tel comparatif [...]»

40.
    Le requérant considère que c'est en violation de ces principes et garanties que la défenderesse a rejeté sa candidature au poste visé par l'avis de vacance et a nommé le candidat retenu à ce poste.

41.
    Le requérant relève, en particulier, que, dans le cadre de son examen comparatif des mérites des candidats, la défenderesse a commis une erreur manifeste d'appréciation et qu'elle s'est basée sur des éléments incomplets ou incorrects.

42.
    La défenderesse considère que ce moyen est non fondé.

- Sur le grief tiré d'une erreur d'appréciation en ce qui concerne l'examen comparatif des mérites des candidats

43.
    Le requérant rappelle que, selon l'avis de vacance, le poste litigieux vise à promouvoir l'utilisation optimale des ressources humaines, financières, informatiques et matérielles, conformément aux principes arrêtés dans les programmes SEM 2000 (visant à l'amélioration de la gestion des finances et des ressources) et MAP 2000 (visant à la modernisation de la gestion du personnel et des pratiques administratives). Dans cette optique, il aurait été exigé dans l'avis de vacance des compétences solides en matière budgétaire, de passation de marchés ou d'appels à la concurrence ainsi que de gestion du personnel.

44.
    Or, selon le requérant, il ressortait de l'examen comparatif des mérites des candidats que, au vu de ces exigences, non seulement il disposait de toutes les qualifications requises, mais, de plus, ses qualifications étaient supérieures à celles du candidat retenu.

45.
    Le requérant fait observer, en effet, qu'il est entré au service des Communautés le 1er avril 1981 en tant que fonctionnaire de grade A 7. Il aurait d'abord été affectéau secrétariat général du Conseil, où il aurait exercé des fonctions dans les domaines du budget, du statut, de la coopération interinstitutionnelle et des relations avec le Parlement européen et la Cour des comptes.

46.
    Du 1er mars 1985 au 31 décembre 1988, il aurait été chargé, en tant que membre du cabinet de M. Nic Mosar, membre de la Commission, des questions institutionnelles et des dossiers relatifs aux infractions, aux affaires sociales, au marché intérieur, à la fiscalité, à l'union douanière, aux fonds structurels, au budget et au contrôle financier.

47.
    Du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1992, il aurait été chargé au cabinet de M. Cardoso e Cunha, membre de la Commission, des dossiers concernant l'énergie, l'agence Euratom et la sécurité nucléaire. Il aurait également été chargé des questions relatives aux fonds structurels et aux politiques régionales, à l'agriculture et au développement rural, au marché intérieur, aux affaires industrielles et de transports, aux crédits et investissements, aux ressources humaines ainsi qu'à l'éducation et à la formation. Il aurait également assumé la responsabilité des questions de budget, des relations avec la Cour des comptes et le Parlement européen et du suivi de la Conférence intergouvernementale (CIG). Il aurait aussi assuré l'accompagnement de deux contrôles de la Cour des comptes et organisé deux audits financiers. Enfin, durant cette période, il aurait préparé les négociations sur la Charte européenne de l'énergie.

48.
    Du 1er janvier au 31 mars 1993, il aurait été affecté au secrétariat international de la Charte européenne de l'énergie.

49.
    Enfin, d'avril 1993 à décembre 1996, le requérant aurait exercé la fonction d'assistant du directeur général de la DG XXIII, avec une période d'interruption de quatre mois et demi, du 1er août au 30 novembre 1996, au cours de laquelle il aurait été mis à la disposition du ministère de la Défense français pour une mission d'assistance technique en Bosnie-Herzégovine. Le requérant fait observer que cette mise à disposition présentait un lien direct avec ses activités menées au sein de la DG XXIII, dans la mesure où il était chargé d'une mission de nature économique visant à définir et à mettre en oeuvre les moyens adéquats pour le redémarrage des entreprises locales dans une période de consolidation des accords de Dayton.

50.
    Le requérant relève que, ainsi qu'il ressort également de ses rapports de notation, il a, dans le cadre de ses fonctions en tant qu'assistant du directeur général de la DG XXIII, acquis une expérience et une connaissance confirmée de la gestion et de l'administration du personnel, du fonctionnement du secteur informatique, des procédures de passation de marchés et d'appels à la concurrence ainsi que des procédures budgétaires en vigueur à la Commission et des principes arrêtés dans le cadre des programmes SEM 2000 et MAP 2000. Au dire du requérant, c'était d'autant plus le cas que, en l'absence d'une unité chargée des ressources budgétaires, financières et humaines au sein de la DG XXIII, unité dont la création avait pourtant été recommandée à la suite d'un audit de la direction générale«Contrôle financier» de la Commission en juin 1994, toutes les fonctions normalement dévolues à une telle unité relevaient de sa responsabilité, en qualité d'assistant du directeur général.

51.
    Selon le requérant, il était, dès lors, indéniable qu'il possédait les qualifications requises par l'avis de vacance.

52.
    Il fait valoir, à cet égard, que les arguments avancés par la défenderesse afin de minimiser ses qualifications professionnelles, d'une part, ne sont pas étayés et, d'autre part, sont en contradiction avec les appréciations du CCN, lequel, dans son avis n° 200/98, avait «noté les bonnes qualifications de MM. Brumter et Vervaet».

53.
    De même, l'affirmation de la défenderesse, selon laquelle les fonctions que le requérant a exercées ne seraient, dans leur majeure partie, pas pertinentes du fait qu'elles se situent à une époque où l'essentiel du processus de gestion des ressources n'était pas décentralisé, serait également non fondée. Le requérant relève en effet que le processus de réforme du fonctionnement administratif et financier des services de la défenderesse a été entamé longtemps avant l'adoption de la première communication de la Commission du 24 septembre 1997 et qu'il a activement participé et contribué à la genèse des décisions prises dans le cadre de cette réforme.

54.
    Le requérant expose ensuite que les éléments invoqués par la défenderesse dans son mémoire en défense et sa duplique ne démontrent pas que le candidat retenu disposait de toutes les qualifications requises et que les qualifications de ce dernier étaient supérieures aux siennes.

55.
    Le requérant considère, en effet, que les qualifications du candidat retenu équivalaient aux siennes en ce qui concerne la gestion du personnel, mais étaient inférieures en matière budgétaire, financière et informatique.

56.
    À cet égard, l'expérience du candidat retenu en matière budgétaire se serait limitée à la gestion d'une ligne budgétaire au niveau de l'unité alors que le requérant aurait eu la responsabilité de la préparation, de la mise en oeuvre, de l'exécution et du contrôle du budget d'une direction générale. La différence entre les fonctions exercées par chacun d'eux en cette matière serait non seulement quantitative, mais également qualitative. Le requérant fait observer, de plus, qu'il possédait également une expérience de huit ans en tant que responsable des questions budgétaires auprès de deux cabinets successifs de membres de la Commission et qu'il avait déjà eu à connaître de ces questions au secrétariat général du Conseil.

57.
    En ce qui concerne le contrôle interne et les relations avec la Cour des comptes, le requérant soutient que l'expérience du candidat retenu était inférieure à la sienne dans la mesure où, durant ses fonctions d'assistant, il a dû assurer l'accompagnement de deux contrôles de ladite Cour, organiser deux auditsfinanciers et participer à de multiples contrôles de l'unité de coordination de la lutte antifraude (UCLAF).

58.
    Quant aux compétences requises en matière informatique, tout en reconnaissant au candidat retenu une certaine expérience en ce qui concerne la conception et la mise en oeuvre d'un système électronique d'information pour une direction générale, le requérant estime que ses qualifications étaient supérieures dans la mesure où, dans le cadre de ses fonctions, il a eu pour tâche de surveiller la mise en place d'une nouvelle génération d'outils informatiques ainsi que du réseau LAN.

59.
    Le requérant relève également qu'il a exercé des fonctions se rapportant directement au poste à pourvoir plus longtemps que le candidat retenu. En effet, ce ne serait que durant 32 mois (du 15 janvier 1996 au 15 août 1998) que ce dernier aurait acquis, en tant que responsable des ressources humaines de la direction générale «Industrie» (DG III) de la Commission, une expérience professionnelle en rapport avec le poste à pourvoir. Le requérant aurait, quant à lui, assumé la totalité des tâches en question, dans des circonstances particulièrement difficiles, pendant une période de 46 mois (de mars 1993 à juillet 1996 et du 15 novembre 1996 au 1er février 1997).

60.
    La défenderesse conteste qu'elle a commis une erreur d'appréciation en ce qui concerne la comparaison des mérites des candidats au poste à pourvoir.

- Sur le grief tiré du caractère incorrect et incomplet des éléments pris en considération aux fins de l'examen comparatif des mérites des candidats

61.
    Le requérant relève, en premier lieu, que la défenderesse a fondé l'appréciation de ses mérites sur des éléments incorrects.

62.
    Le requérant fait observer, en effet, qu'il ressort du mémoire en défense que, aux fins de l'adoption de la décision portant rejet de sa candidature, la défenderesse s'est fondée sur le rapport de notation pour la période 1995-1997 établi par M. Vanden Abeele, alors que ce rapport faisait l'objet d'un appel et qu'il a été substantiellement amélioré dans le cadre de celui-ci. Il considère, dès lors, que l'examen comparatif des mérites des candidats s'est déroulé en violation des principes d'égalité de traitement et de vocation à la carrière, puisque, contrairement au candidat retenu, il n'a pu bénéficier d'un rapport de notation finalisé au moment où la décision de nomination a été prise (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 17 mars 1993, Moat/Commission, T-13/92, Rec. p. II-287, points 33 et 48).

63.
    De plus, selon le requérant, il ressort du mémoire en défense que ni le CCN ni l'AIPN ne pouvaient avoir connaissance des griefs qu'il avait formulés à l'encontre du projet de notation tel qu'établi par le premier notateur, ce qui constitue une violation des droits de la défense et des principes énoncés par la jurisprudence duTribunal (arrêt du 24 février 2000, Jacobs/Commission, T-82/98, RecFP p. I-A-39 et II-169).

64.
    Le requérant souligne également que le rapport de notation établi par M. Vanden Abeele ne comportait aucune justification alors qu'il contenait des appréciations analytiques différentes de celles figurant dans le rapport de notation précédent, ce qui est contraire à la jurisprudence (arrêt de la Cour du 6 février 1986, Castille/Commission, 173/82, 157/83 et 186/84, Rec. p. 497, points 27 à 28).

65.
    Le requérant estime, en deuxième lieu, que la défenderesse n'a pas pris en compte ses rapports de notation pour les périodes antérieures (notamment celui pour la période 1993-1995) lesquels faisaient apparaître l'excellence de ses mérites.

66.
    Le requérant considère, en troisième lieu, que la défenderesse a fondé son appréciation des mérites du candidat retenu sur des éléments non étayés.

67.
    Il relève, en effet, que, à l'exception d'un curriculum vitae dont la valeur probante est limitée, la défenderesse n'apporte aucune pièce valable, et en particulier aucun rapport de notation, afin de démontrer que le candidat retenu disposait des meilleures qualifications. Or, selon une jurisprudence constante, les rapports de notation constitueraient des documents essentiels à prendre en considération chaque fois que la carrière d'un fonctionnaire est en cause. De plus, à défaut de production de ces rapports, le Tribunal ne serait pas en mesure d'exercer son contrôle juridictionnel quant à l'examen comparatif des mérites effectué par la défenderesse.

68.
    La défenderesse conteste qu'elle a fondé son examen comparatif sur des éléments incomplets ou incorrects.

Appréciation du Tribunal

- Sur la prétendue erreur d'appréciation en ce qui concerne l'examen comparatif des mérites des candidats

69.
    À titre liminaire, il convient de rappeler que l'examen des candidatures à la mutation ou à la promotion au titre de l'article 29, paragraphe 1, sous a), du statut doit s'effectuer conformément aux dispositions de l'article 45 du statut, qui prévoit expressément un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion (arrêt du Tribunal du 26 octobre 1993, Weissenfels/Parlement, T-22/92, Rec. p. II-1095, point 66). L'obligation de procéder à cet examen comparatif est l'expression à la fois du principe d'égalité de traitement des fonctionnaires et du principe de leur vocation à la carrière (voir arrêt Volger/Parlement, cité au point 25 ci-dessus, point 24).

70.
    Selon une jurisprudence constante, aux fins de l'examen comparatif des mérites des candidats à une promotion prévue par l'article 45 du statut, l'AIPN dispose d'un large pouvoir d'appréciation (voir, notamment, arrêt du Tribunal du 27 avril 1999, Thinus/Commission, T-283/97, RecFP p. I-A-69 et II-353, point 42).

71.
    Toutefois, ainsi que le Tribunal l'a rappelé dans son arrêt Wenk/Commission, cité au point 39 ci-dessus (point 63), l'exercice de ce large pouvoir d'appréciation suppose un examen scrupuleux des dossiers de candidature et une observation consciencieuse des exigences énoncées dans l'avis de vacance afférent au poste en cause, de sorte que celle-ci est tenue d'écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences. L'avis de vacance constitue, en effet, un cadre légal que l'AIPN s'impose à elle-même et qu'elle doit respecter scrupuleusement (voir, également, arrêt Parlement/Frederiksen, cité au point 37 ci-dessus, points 15 et 16, et arrêt du Tribunal du 19 mars 1997, Giannini/Commission, T-21/96, RecFP p. I-A-69 et II-211, point 19).

72.
    En vue de contrôler si l'AIPN n'a pas dépassé les limites de ce cadre légal il appartient au Tribunal d'examiner, tout d'abord, quelles étaient, en l'occurrence, les conditions requises par l'avis de vacance et de vérifier ensuite si le candidat choisi par l'AIPN pour occuper le poste vacant satisfaisait effectivement à ces conditions (arrêts Parlement/Frederiksen, cité au point 37 ci-dessus, point 17, et Giannini/Commission, cité au point 71 ci-dessus, point 20). Un tel examen doit se limiter à la question de savoir si, eu égard aux considérations qui ont pu conduire l'administration à son appréciation, celle-ci s'est tenue dans des limites raisonnables et n'a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée (voir arrêt de la Cour du 12 février 1987, Bonino/Commission, 233/85, Rec. p. 739, point 5; arrêts du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p. II-1403, point 69, du 9 février 1994, Latham/Commission, T-82/91, RecFP p. I-A-15 et II-61, point 62, et Giannini/Commission, cité au point 71 ci-dessus, point 20). Le Tribunal ne saurait donc substituer son appréciation des qualifications des candidats à celle de l'AIPN (arrêt de la Cour du 21 avril 1983, Ragusa/Commission, 282/81, Rec. p. 1245, point 9; arrêts du Tribunal du 30 janvier 1992, Schönherr/CES, T-25/90, Rec. p. II-63, point 20, du 25 février 1992, Schloh/Conseil, T-11/91, Rec. p. II-203, point 51, du 6 juin 1996, Baiwir/Commission, T-262/94, RecFP p. I-A-257 et II-739, point 66, et Delvaux/Commission, cité au point 29 ci-dessus, point 38).

73.
    Conformément à ces principes, il y a donc lieu de vérifier si le candidat choisi par l'AIPN pour occuper l'emploi à pourvoir satisfaisait effectivement aux conditions requises par l'avis de vacance.

74.
    Pour rappel, l'objectif de l'avis de vacance était de recruter un candidat disposant de connaissances et d'une expérience confirmées en matière financière, budgétaire et informatique ainsi qu'en matière de gestion du personnel, conformément aux principes des programmes MAP 2000 et SEM 2000. À cette fin, le candidat retenu devait avoir une expérience approfondie des procédures budgétaires, de passationdes marchés et de gestion du personnel et disposer d'une capacité de gestion établie. En revanche, contrairement à ce que fait valoir le requérant, l'avis de vacance n'exigeait pas une connaissance ou une expérience particulière en ce qui concerne les relations avec la Cour des comptes.

75.
    Or, il y a lieu de constater que, au moins durant la période où le candidat retenu était chef de l'unité «Personnel; information; relations avec le Parlement européen» de la DG III, c'est-à-dire de mars 1996 à octobre 1998, il a pu acquérir des connaissances et une expérience approfondie de la gestion du personnel, conformément aux principes du programme MAP 2000, ce que le requérant ne conteste pas.

76.
    Ensuite, en ce qui concerne ses connaissances et son expérience en matière informatique, il y a lieu de noter que, ainsi qu'il ressort de son curriculum vitae, le candidat retenu a, durant la période où il était chef de l'unité précitée au sein de la DG III, été chargé de la conception et de la mise en place d'un système électronique d'information (intranet) pour sa direction générale. De plus, il ressort de son rapport de notation pour la période 1993-1995 qu'il a été chargé de la mise en place d'un réseau télématique (programme IDA).

77.
    En ce qui concerne ses connaissances et son expérience en matière budgétaire et financière, il convient de constater que, ainsi qu'il ressort de son curriculum vitae, le candidat retenu a, dans le cadre de ses fonctions en tant que chef de secteur au sein de l'unité «Normalisation; certification; nouvelle approche; procédures de notification» de la direction «Instruments horizontaux du marché intérieur» de la DG III, de 1989 à 1992, puis de chef de l'unité «Sécurité générale des produits et services» de la direction générale «Politique des consommateurs» de la Commission, de 1992 à 1996, été amené à gérer des crédits correspondant à, respectivement, 5,5 millions d'écus et 4,2 millions d'écus et à assurer la passation des contrats relatifs à ces crédits. Il ressort également de son curriculum vitae que le candidat retenu a, dans le cadre de ses fonctions de chef de l'unité «Personnel; information; relations avec le Parlement européen» de la DG III, géré le budget au titre A 7 et que, en tant que chef de l'unité «Produits alimentaires - Législation; aspects scientifiques et techniques» de la direction «Affaires industrielles III: industries des biens de consommation» de la DG III, il était responsable de la gestion budgétaire de l'unité et de la passation de contrats. L'importance de cette fonction s'est encore accrue avec la mise en oeuvre du programme SEM 2000.

78.
    Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que l'AIPN n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que les qualifications du candidat retenu correspondaient aux exigences imposées par l'avis de vacance. Elle a, en effet, consciencieusement observé ces exigences et, de ce fait, respecté scrupuleusement le cadre légal qu'elle s'était imposé.

79.
    Il convient, par ailleurs, de relever qu'il ressort de l'avis n° 200/98 du CCN que, si ce comité a effectivement noté que le requérant avait de bonnes qualifications, il ne l'a pas retenu parmi les trois personnes disposant de toutes les qualifications requises par l'avis de vacance. Cette nuance indique vraisemblablement que, selon le CCN, les qualifications du requérant et celles du candidat retenu n'étaient pas équivalentes.

80.
    En outre, il y a lieu de souligner que, même si les qualifications du requérant étaient sans aucun doute très bonnes, elles ne pouvaient néanmoins être considérées comme équivalant à celles du candidat retenu dès lors que, contrairement à ce dernier, le requérant n'exerçait plus des fonctions susceptibles de lui donner une expérience réellement pertinente pour le poste à pourvoir depuis le 1er février 1997, c'est-à-dire depuis plus d'an et demi avant la publication de l'avis de vacance.

81.
    Il importe peu, à cet égard, que, ainsi que le fait valoir le requérant, cet état de fait soit la conséquence de difficultés relationnelles avec un de ses supérieurs hiérarchiques. En effet, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, l'avis de vacance constitue un cadre légal que l'AIPN s'impose à elle-même et qu'elle doit respecter scrupuleusement. Il en découle que l'AIPN ne saurait, en aucun cas, s'écarter de cet avis en tenant compte d'éléments factuels tendant à justifier la non-satisfaction par un candidat de l'une des conditions fixées par ledit avis (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 3 avril 2001, Zaur-Gora et Dubigh/Commission, T-95/00 et T-96/00, non encore publiée au Recueil, points 55 et 56).

82.
    Ce premier grief doit, en conséquence, être rejeté.

- Sur le grief tiré du caractère incorrect et incomplet des éléments pris en considération aux fins de l'examen comparatif des mérites des candidats

83.
    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le rapport de notation constitue un élément d'appréciation indispensable chaque fois que la carrière du fonctionnaire est prise en considération par le pouvoir hiérarchique (voir, notamment, arrêt de la Cour du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, Rec. p. I-1743, point 8) et une procédure de promotion est entachée d'irrégularités lorsque l'AIPN n'a pas pu procéder à un examen comparatif des mérites des candidats parce que les rapports de notation d'un ou de plusieurs d'entre eux ont été établis, du fait de l'administration, avec un retard substantiel (voir, notamment, arrêts de la Cour du 10 juin 1987, Vincent/Parlement, 7/86, Rec. p. 2473, point 16, et du Tribunal du 19 septembre 1996, Allo/Commission, T-386/94, RecFP p. I-A-393 et II-1161, point 38).

84.
    À cet égard, il convient de relever, à titre liminaire, qu'il ressort des pièces produites par le requérant, que, contrairement à ce qu'affirme ce dernier, son rapport de notation pour la période 1995-1997 ne faisait pas l'objet d'un recours devant le notateur d'appel au moment où l'AIPN a adopté les décisions attaquées.En effet, en annexe 1 à la réplique, le requérant a produit une copie de sa lettre du 9 février 1999 adressée au directeur général de la DG XXIII par laquelle il demande l'intervention du notateur d'appel. Cette lettre étant postérieure aux décisions attaquées (prises les 27 et 29 janvier 1999), l'AIPN ne pouvait pas en tenir compte au moment de l'adoption de celles-ci.

85.
    Ensuite, à supposer, comme le fait valoir le requérant, que l'établissement de son rapport de notation pour la période 1995-1997 ait effectivement été entaché de diverses irrégularités, celui-ci n'a pas démontré en quoi ces prétendues irrégularités ont pu avoir une incidence décisive sur la procédure de nomination litigieuse (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 18 décembre 1980, Gratreau/Commission, 156/79 et 51/80, Rec. p. 3943, point 24, et du Tribunal du 5 octobre 2000, Rappe/Commission, T-202/99, non encore publié au Recueil, point 40). Une conclusion similaire s'impose en ce qui concerne les affirmations du requérant, d'ailleurs contestées par la défenderesse, selon lesquelles, d'une part, cette dernière ne disposait pas de ses rapports de notation pour les années précédentes et, d'autre part, elle aurait fondé ses appréciations en ce qui concerne les mérites du candidat retenu sur des éléments non étayés.

86.
    Il convient, par ailleurs, de relever que, à les supposer établies, ces irrégularités n'auraient, de toute manière, pas pu avoir une telle incidence. La comparaison du rapport de notation du requérant pour la période 1995-1997, même après les modifications apportées par le notateur d'appel, avec celui du candidat retenu pour la même période, révèle en effet un net avantage en faveur de ce dernier. Ainsi, alors que le requérant avait fait l'objet de cinq appréciations «normal» et de cinq appréciations «supérieur», le candidat retenu bénéficiait quant à lui d'une appréciation «normal», de huit appréciations «supérieur» et d'une appréciation «exceptionnel».

87.
    En outre, le fait que le supérieur hiérarchique du requérant, M. Vanden Abeele, n'ait pas précisé les raisons pour lesquelles il estimait ne pas devoir reprendre dans le rapport de notation pour la période 1995-1997 les appréciations portées dans le rapport de notation précédent et les observations de M. von Moltke n'a pas pu avoir une incidence décisive sur les décisions attaquées. En effet, à supposer établie l'existence d'une telle obligation à la charge de M. Vanden Abeele en tant que notateur, il n'a pas été démontré que ces précisions auraient pu amener l'AIPN à une autre appréciation lors de l'examen comparatif des mérites des candidats au poste visé par l'avis de vacance.

88.
    Ce deuxième grief doit, en conséquence, être rejeté.

89.
    Dès lors, le présent moyen est non fondé.

Sur le moyen tiré de la violation des principes régissant la mutation des fonctionnaires

90.
    Le requérant fait observer que la mutation du candidat retenu est intervenue en méconnaissance des principes régissant la mutation des fonctionnaires ayant moins de deux ans d'ancienneté dans leur direction générale d'affectation. En effet, selon ces principes, qui sont exposés dans les notes du 21 janvier 1993 et du 21 juin 2000 émanant de la direction générale «Personnel et administration» de la Commission, les propositions de mutation ne sont normalement pas prises en compte par l'AIPN, à moins que l'intérêt du service ou celui de l'intéressé ne soit clairement justifié.

91.
    Or, le requérant expose que, au moment de présenter sa candidature, le candidat retenu avait accompli seulement un mois dans sa nouvelle fonction à la DG III. De plus, la nomination/mutation du candidat retenu ne serait pas intervenue dans l'intérêt du service dans la mesure où celle-ci aurait eu pour effet de rendre vacante cette fonction importante au sein de la DG III.

92.
    La défenderesse estime que ce moyen est non fondé dans la mesure où la note du 21 janvier 1993 invoquée par le requérant n'est qu'une note d'orientation visant surtout à régler des conflits entre les directions générales, essentiellement dans le cas de fonctionnaires nouvellement recrutés. De plus, selon la défenderesse, il n'appartient pas au requérant d'apprécier l'intérêt du service.

Appréciation du Tribunal

93.
    À titre liminaire, il convient de noter que, la note du 21 juin 2000 étant postérieure aux décisions attaquées, elle est sans pertinence pour la présente affaire.

94.
    Ensuite, il y a lieu d'observer que, ainsi qu'il ressort des termes clairs de la note du 21 janvier 1993 de MM. De Koster et Williamson à laquelle se réfère le requérant, celle-ci n'a pas pour objet d'interdire, en tant que telle, la mutation de fonctionnaires ayant moins de deux ans d'ancienneté dans leur direction générale d'affectation. En effet, elle dispose que les propositions de mutation «ne seront normalement pas prises en considération par l'AIPN, à moins que l'intérêt du service ou celui de l'intéressé ne soit clairement justifié» (c'est le Tribunal qui met en exergue). Il appartient donc à l'AIPN, dans le cadre de son pouvoir d'appréciation, d'estimer si une telle demande de mutation peut être prise en compte.

95.
    Enfin, ainsi que le fait valoir la défenderesse, rien n'indique que la mutation du candidat retenu, à laquelle le directeur général de la DG III ne s'est d'ailleurs pas opposé, n'est pas intervenue dans l'intérêt du service.

96.
    Dès lors, ce troisième moyen n'est pas fondé.

Conclusion

97.
    Il ressort de ce qui précède que seul le premier moyen, tiré d'une violation de l'obligation de motivation, est fondé. En raison de cette violation d'une forme substantielle, le recours doit être accueilli en ce qu'il vise à l'annulation de la décision nommant M. Zahlen au poste visé par l'avis de vacance et de la décision rejetant la candidature du requérant à ce poste. Il doit être rejeté pour le surplus.

Sur les dépens

98.
    Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

99.
    En l'espèce, le requérant ayant été contraint d'introduire le recours en raison du défaut de motivation de la décision portant rejet de sa réclamation, il convient de la condamner à supporter l'ensemble des dépens du requérant.

100.
    Contrairement à ce que fait valoir la défenderesse, il n'y a pas lieu de limiter cette condamnation aux seuls dépens encourus par le requérant jusqu'au dépôt du mémoire en défense. Il convient en effet d'observer que la défenderesse a donné dans sa duplique des précisions supplémentaires permettant au requérant de comprendre les motifs du rejet de sa candidature. Ces précisions venaient en complément de celles déjà fournies dans le mémoire en défense.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (juge unique)

déclare et arrête:

1)    La décision de la Commission de nommer M. Zahlen au poste visé par l'avis de vacance COM/173/98 et la décision de rejeter la candidature de M. Brumter à ce poste sont annulées.

2)    La défenderesse est condamnée aux dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juillet 2001.

Le greffier

Le juge

H. Jung

J. Azizi


1: Langue de procédure: le français.