Language of document : ECLI:EU:T:2011:496

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 septembre 2011 (*)

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres communautaire – Prestation de services externes pour des programmes éducatifs – Attribution du marché à plusieurs soumissionnaires – Classement d’un soumissionnaire – Recours en annulation – Obligation de motivation – Causes d’exclusion de la procédure de passation de marché – Article 93, paragraphe 1, sous f), du règlement financier – Période de validité des offres – Responsabilité non contractuelle »

Dans l’affaire T‑298/09,

Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE, établie à Athènes (Grèce), représentée par Mes N. Korogiannakis et M. Dermitzakis, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. N. Bambara et E. Manhaeve, en qualité d’agents, assistés de MP. Wytinck, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande en annulation de deux décisions de la Commission, communiquées par deux lettres distinctes du 12 mai 2009, portant classement de la requérante, pour ses offres présentées en réponse à l’appel d’offres ouvert EAC/01/2008 pour la fourniture de services externes pour des programmes éducatifs (ESP-ISEP) (JO 2008/S 158-212752), pour le lot n° 1 (Développement et maintenance de systèmes d’information) ainsi que pour le lot n° 2 (Étude et mise à l’essai de systèmes d’information et services de formation et d’assistance connexes), en tant que deuxième contractant pour chacun de ces lots et, d’autre part, une demande en indemnité,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 janvier 2011,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE, est une société de droit grec, active dans le domaine de la technologie de l’information et des communications.

2        Par un avis de marché du 16 août 2008 publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO S 158), sous la référence 2008/S 158-212752, la Commission a lancé l’appel d’offres EAC/01/2008 pour la fourniture de services externes pour des programmes éducatifs (ESP-ISEP) comportant deux lots, à savoir le lot n° 1 (Développement et maintenance de systèmes d’information) et le lot n° 2 (Étude et mise à l’essai de systèmes d’information et services de formation et d’assistance connexes).

3        Dans le cahier des charges, la Commission a précisé que, pour chaque lot, des contrats-cadres multiples seraient signés avec les soumissionnaires ayant présenté les trois meilleures offres. Le cahier des charges spécifiait, en effet, que de tels contrats pouvaient être attribués au maximum à trois soumissionnaires par lot. Ledit document énonçait, en outre, les critères utilisés pour réaliser une évaluation technique des différentes offres, leur poids respectif dans l’évaluation ainsi que le nombre minimal et maximal de points pour chaque critère d’attribution. Pour les lots nos 1 et 2, la pondération relative des critères techniques était de 70 % et celle du critère financier était de 30 %.

4        Le 6 octobre 2008, la requérante a soumissionné pour les lots nos 1 et 2. Par lettre du 10 mars 2009, la Commission a demandé certaines précisions à la requérante, qui lui a répondu par lettre du 17 mars 2009.

5        Le 12 mai 2009, la Commission a communiqué à la requérante, par deux lettres distinctes, ses décisions portant classement de celle-ci en qualité de deuxième contractant respectivement pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 (ci-après, prises ensemble, les « décisions attaquées »). Elle a notamment indiqué que la requérante pouvait demander des informations supplémentaires.

6        Par lettre du 12 mai 2009, la requérante a demandé à la Commission de lui communiquer certaines informations, et en particulier les noms des « attributaires » et de leurs associés ou des sous-traitants éventuels, les notes octroyées pour chaque critère d’attribution à ses offres et aux offres des « attributaires », une analyse comparative des points forts et des points faibles de ses offres et de celles des « attributaires », une copie détaillée du rapport d’évaluation, les noms des membres du comité d’évaluation afin de vérifier l’existence d’un éventuel conflit d’intérêts, ainsi que les modalités de la comparaison sur le plan financier entre les offres des « attributaires » et les siennes.

7        En l’absence de réponse de la Commission à sa lettre du 12 mai 2009, la requérante a réitéré sa demande par télécopies des 26 mai et 8 juin 2009.

8        Par lettre du 5 juin 2009, la Commission a communiqué à la requérante, pour chaque lot, le nom du soumissionnaire le mieux classé, les fiches de notation de celle-ci ainsi que celles dudit soumissionnaire et les commentaires formulés par le comité d’évaluation pour chaque critère d’attribution. Elle a également indiqué qu’aucun contrat n’avait encore été signé et que la requérante avait trois jours ouvrables pour présenter des observations justifiant, le cas échéant, la suspension de la signature des contrats.

9        Par lettre du 9 juin 2009, la requérante a souligné le retard avec lequel la Commission avait répondu à sa demande du 12 mai 2009 et le caractère irrégulier de l’envoi des contrats-cadres aux « soumissionnaires gagnants » avant l’écoulement de la « période de blocage » et avant même la communication des résultats de la procédure d’appel d’offres en cause à tous les soumissionnaires. Elle a également évoqué le fait que lesdits soumissionnaires avaient manqué à leurs obligations découlant d’autres contrats avec la Commission et a exprimé ses doutes, en particulier au regard de l’application des critères d’exclusion concernant leur participation à de nouvelles procédures de passation des marchés. La requérante a, en outre, relevé que le taux moyen journalier par personne du soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 1 était équivalant au sien et que celui du soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 2 était bien plus élevé que le sien. Enfin, elle s’est réservé le droit de prouver que l’évaluation était fondée sur de graves erreurs d’appréciation et a soutenu que son offre aurait dû être classée au premier rang pour chacun des lots, dès que la direction générale « Éducation et culture » de la Commission lui aurait communiqué les éléments d’évaluation précis.

10      Par lettre du 12 juin 2009, la Commission a garanti à la requérante le respect des règles de procédure, a constaté qu’il n’existait aucun motif justifiant un complément d’examen des offres et a indiqué qu’elle allait donc procéder à la signature des contrats. Par lettre du même jour, la requérante a répondu à la Commission qu’elle déplorait le rejet de ses arguments et a pris acte de son refus de lui fournir les informations demandées.

11      Par lettres du 16 juillet 2009, la Commission a informé les trois soumissionnaires les mieux classés pour chacun des lots nos 1 et 2, parmi lesquels figurait la requérante, que, en raison de retards, elle n’avait pas signé les contrats dans le délai des neuf mois prévus dans l’appel d’offres et leur a demandé la prolongation de trois mois de la période de validité de leurs offres. Par lettre du 28 juillet 2009, la requérante a accepté de prolonger la validité de ses offres pour lesdits lots. Elle a cependant exprimé des réserves en indiquant qu’elle se sentait obligée d’accepter, tout en réservant ses droits, dans la mesure où un refus de sa part conduirait la Commission à l’écarter de la procédure d’attribution. Les autres soumissionnaires concernés ont accepté la prolongation.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 juillet 2009, la requérante a introduit le présent recours.

13      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 26 janvier 2011.

14      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions attaquées ;

–        condamner la Commission à l’indemniser du préjudice subi ;

–        condamner la Commission aux dépens.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande en annulation ;

–        rejeter la demande en indemnité ou, à titre subsidiaire, limiter le montant de la somme demandée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la demande en annulation

16      Il y a lieu de relever, à titre liminaire, que la requérante invoque une violation des règles de procédure du Tribunal, au motif que la Commission a omis certains éléments de son argumentation du mémoire en défense pour ne les exposer que dans la duplique. Interrogée à cet égard par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a précisé qu’elle invoquait une violation de l’article 48 du règlement de procédure du Tribunal, interdisant la production de moyens nouveaux en cours d’instance, et que, en l’espèce, les arguments concernés figuraient aux points 29 à 31 de la duplique, ainsi qu’il en a été pris acte lors de l’audience.

17      À cet égard, il convient d’observer que, aux points 29 à 31 de la duplique, la Commission ne fait que répondre expressément à certains arguments développés dans la réplique par la requérante. En effet, les arguments développés par la Commission au point 29 de la duplique répondent à ceux développés par la requérante au point 33 de la réplique, par lesquels cette dernière allègue le caractère prétendument erroné de l’évaluation d’un des critères d’attribution. De même, au point 30 de la duplique, la Commission résume certains arguments de la requérante allégués dans la réplique, auxquels elle répond ensuite aux points 31 à 33 de la duplique.

18      En tout état de cause, même à supposer que l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure soit applicable en l’espèce, il y a lieu de constater que, aux points 29 à 31 de la duplique, la Commission ne soulève aucun moyen nouveau au sens de cette disposition.

19      Par ailleurs, la requérante invoque trois moyens à l’appui de sa demande en annulation. Le premier moyen est tiré de la violation du principe de non-discrimination, de la violation de l’article 93, paragraphe 1, et de l’article 94 du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, ci-après le « règlement financier »), concernant les conditions d’exclusion et de la violation du principe de bonne administration. Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier concernant l’obligation de motivation. Le troisième moyen est tiré de la durée excessive de la période de validité des offres ainsi que de l’illégalité de sa prolongation.

20      Il convient d’examiner, en premier lieu, le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier concernant l’obligation de motivation.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier concernant l’obligation de motivation

–       Arguments des parties

21      La requérante soutient que la Commission a enfreint son obligation de motivation. Elle fait valoir que celle-ci a refusé de lui fournir la moindre justification ou explication fondée. Le comité d’évaluation aurait utilisé des termes trop vagues pour évaluer son offre et n’en aurait pas suffisamment précisé les points faibles. Elle soutient également que l’information fournie par la Commission au sujet de l’évaluation des offres des « soumissionnaires gagnants » est insuffisante au regard des dispositions de l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier et de l’article 149 du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement financier (JO L 357, p. 1, ci-après les « modalités d’exécution »). Elle ne disposerait pas des éléments lui permettant de comparer les avantages relatifs de ses offres avec celles desdits soumissionnaires et permettant au Tribunal d’exercer son contrôle. Elle ajoute, dans la réplique, que ces soumissionnaires recrutent massivement parmi les membres de son personnel et que, dans de nombreux États membres, tels que la République hellénique, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ou la République de Chypre, les offres de tous les soumissionnaires sont communiquées sur demande.

22      La requérante demande, par ailleurs, à ce que la Commission communique l’intégralité du rapport d’évaluation, y compris les observations pertinentes concernant les « soumissionnaires gagnants » et la copie des deux offres retenues ou tout au moins la motivation concernant les mérites relatifs desdits soumissionnaires.

23      En réponse aux arguments de la Commission tenant à la protection des droits de propriété intellectuelle et des intérêts commerciaux des soumissionnaires les mieux classés, la requérante soutient qu’ils sont dépourvus de fondement en l’espèce, sauf à ce que la Commission les explicite. Elle soutient également dans la réplique que, si la Commission avait respecté les dispositions applicables, celle-ci l’aurait classée première dans le cadre du mécanisme de cascade prévu pour chacun des lots n° 1 et 2 et que, à défaut d’avoir étudié son offre de façon approfondie, celle-ci a commis des erreurs manifestes d’appréciation.

24      La Commission conteste l’argumentation de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

25      L’article 100, paragraphe 2, du règlement financier et l’article 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution prévoient que le pouvoir adjudicateur communique à tout soumissionnaire écarté les motifs du rejet de son offre et, à tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable et qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire, ce dans un délai maximal de quinze jours de calendrier à compter de la réception d’une demande écrite. Au terme du deuxième alinéa de l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier, la communication de certains éléments peut cependant être omise notamment dans le cas où elle porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d’entreprises publiques ou privées.

26      L’article 149, paragraphe 3, des modalités d’exécution prévoit que le pouvoir adjudicateur notifie simultanément et individuellement à chaque soumissionnaire évincé que leur offre n’a pas été retenue. Ceux-ci peuvent obtenir des informations complémentaires sur les motifs du rejet, sur demande écrite, par lettre, par télécopie ou par courrier électronique et pour tout soumissionnaire ayant fait une offre recevable, sur les caractéristiques et avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire, sans préjudice des dispositions de l’article 100, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement financier. Les pouvoirs adjudicateurs répondent dans un délai maximal de quinze jours de calendrier à compter de la réception de la demande.

27      Il convient de rappeler que l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux (arrêts de la Cour du 22 mars 2001, France/Commission, C‑17/99, Rec. p. I‑2481, point 35, et du Tribunal du 20 mai 2009, VIP Car Solutions/Parlement, T‑89/07, Rec. p. II‑1403, point 63).

28      En outre, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, Rec. p. I‑1719, point 63, et du 22 mars 2001, France/Commission, point 26 supra, point 36).

29      Par ailleurs, il y a lieu de considérer que le pouvoir adjudicateur satisfait à son obligation de motivation si, en cas d’attribution du marché à plusieurs soumissionnaires en cascade, il se contente, tout d’abord, de communiquer immédiatement à tout soumissionnaire n’étant pas le mieux classé, les motifs de ce classement et s’il fournit, ensuite, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre du soumissionnaire le mieux classé ainsi que le nom de celui-ci dans un délai de quinze jours de calendrier à compter de la réception d’une demande écrite (voir, par analogie, arrêts du Tribunal du 10 septembre 2008, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑465/04, non publié au Recueil, point 47, et du 9 septembre 2009, Brink’s Security Luxembourg/Commission, T‑437/05, Rec. p. II‑3233, point 160).

30      Cette façon de procéder est conforme à la finalité de l’obligation de motivation inscrite à l’article 296 TFUE, selon laquelle il convient de faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, de façon, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de faire valoir leurs droits et, d’autre part, à permettre au juge d’exercer son contrôle (voir, par analogie, arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, point 29 supra, point 48).

31      Enfin, il résulte de la jurisprudence que, lorsque l’institution ou l’agence concernée envoie une lettre, à la suite d’une demande d’explications supplémentaires de la part de la requérante au sujet d’une décision, avant l’introduction d’un recours, mais après la date fixée par l’article 149, paragraphe 3, des modalités d’exécution, cette lettre peut aussi être prise en considération pour examiner si la motivation était suffisante en l’espèce (voir, par analogie, arrêt VIP Car Solutions/Parlement, point 27 supra, point 73).

32      En l’espèce, dans les décisions attaquées, la Commission a classé la requérante en qualité de deuxième contractant pour chacun des lots nos 1 et 2. Elle a également indiqué à la requérante que celle-ci pouvait demander des informations supplémentaires.

33      À la suite d’une demande de précisions de la part de la requérante (voir point 6 ci-dessus), réitérée par télécopies des 26 mai et 8 juin 2009, la Commission a communiqué à la requérante, par lettre du 5 juin 2009, pour chaque lot, le nom du soumissionnaire le mieux classé, les fiches de notation de celle-ci ainsi que celles dudit soumissionnaire et les commentaires formulés par le comité d’évaluation pour chaque critère d’attribution. Elle a également indiqué que le rapport d’évaluation dans son ensemble, l’identité des membres du comité d’évaluation et l’offre des « soumissionnaires gagnants » sur le plan financier ne faisaient pas partie de l’information à communiquer, conformément à l’article 100, paragraphe 2, du règlement financier.

34      Par conséquent, pour déterminer si la Commission a satisfait à son obligation de motivation, il convient d’examiner, outre les décisions attaquées, la lettre du 5 juin 2009.

35      Le fait que la lettre du 5 juin 2009 a été envoyée avec huit jours de retard par rapport au délai maximal établi à l’article 149, paragraphe 2, des modalités d’exécution, de quinze jours de calendrier à compter de la réception de sa demande, bien qu’il soit regrettable, n’a cependant pas restreint la possibilité de la requérante de faire valoir ses droits devant le Tribunal et ne peut pas, à lui seul, entraîner l’annulation des décisions attaquées (voir, en ce sens, arrêt Evropaïki Dynamiki/Commission, point 29 supra, point 52). En effet, il ressort du dossier que la requérante a utilisé les informations contenues dans cette lettre pour former le présent recours.

36      La requérante soutient que la Commission a refusé de lui fournir la moindre justification ou explication fondée et invoque ainsi, tout d’abord, un défaut de motivation.

37      Toutefois, force est de constater que, au vu du contenu de la lettre du 5 juin 2009 (voir point 8 ci-dessus), cet argument n’est pas fondé. En effet, la Commission a communiqué à la requérante, pour chaque lot, le nom du soumissionnaire le mieux classé, les fiches de notation de celle-ci ainsi que celles dudit soumissionnaire et les commentaires formulés par le comité d’évaluation pour chaque critère d’attribution. Cet argument doit donc être rejeté.

38      La requérante invoque, ensuite, l’insuffisance de la motivation. Elle soutient, en substance, que le comité d’évaluation a utilisé des termes trop vagues et que l’information fournie au sujet de l’évaluation de ses offres et des offres des soumissionnaires les mieux classés serait insuffisante. Elle ne disposerait donc pas des éléments lui permettant de comparer les avantages relatifs de ses offres avec celles desdits soumissionnaires et permettant au Tribunal d’exercer son contrôle.

39      En l’espèce, la lettre de la Commission du 5 juin 2009 est accompagnée de deux annexes contenant chacune un extrait du rapport d’évaluation concernant respectivement le lot n° 1 et le lot n° 2.

40      Ces extraits du rapport d’évaluation incluent, tout d’abord, pour chaque lot, un premier chapitre sur l’évaluation technique, qui contient un rappel des critères spécifiés dans l’appel d’offres avec leur poids respectif et le nombre minimal et maximal de points, un tableau contenant, pour chaque critère, les points obtenus par l’offre de la requérante et ceux obtenus par l’offre du soumissionnaire le mieux classé, ainsi que les commentaires du comité d’évaluation. Un tableau plus détaillé concernant l’évaluation technique des offres avec une comparaison entre celle de la requérante et celle dudit soumissionnaire figure également à la fin des deux annexes.

41      Les extraits du rapport d’évaluation contiennent ensuite, pour chaque lot, un chapitre sur l’évaluation financière des offres avec notamment la formule de calcul utilisée et un tableau où figurent les prix proposés par la requérante et par le soumissionnaire le mieux classé.

42      Les extraits dudit rapport contiennent enfin un tableau récapitulatif des résultats de l’évaluation s’agissant de l’offre de la requérante et de celle du soumissionnaire le mieux classé.

43      S’agissant des commentaires du comité d’évaluation pour chaque critère d’attribution en ce qui concerne le lot n° 1, ils exposent, s’agissant des trois premiers et du cinquième critères, la ou les raisons pour lesquelles l’offre du soumissionnaire le mieux classé a été considérée comme étant la meilleure pour chaque critère et, s’agissant du quatrième critère relatif à la « qualité de l’offre technologique » pour le lot n° 1, la ou les raisons pour lesquelles ladite offre et celle de la requérante ont été considérées comme d’égale qualité.

44      Ainsi, pour le premier critère du lot n° 1 relatif à la gestion d’ensemble du service, l’offre du soumissionnaire le mieux classé a été considérée comme étant la meilleure concernant la gestion du processus de commande, la gestion des contrats en cours, le suivi des paramètres de qualité de la gestion et des performances des services, ainsi que les rapports de service proposés. Pour le deuxième critère du lot n° 1 relatif à la commande des services, ladite offre a été considérée comme étant la meilleure pour la mesure et le suivi des indicateurs de qualité de service du processus de commande et des valeurs de performance des services. Pour le troisième critère du lot n° 1 relatif à l’exécution des services, cette offre a été considérée comme étant la meilleure en raison de la méthodologie de suivi de l’exécution d’un marché spécifique et de la proposition de mesure et de suivi des indicateurs de l’exécution et des performances des services. Pour le cinquième critère du lot n° 1 relatif au développement de l’infrastructure du lot n° 1, bien que l’offre de la requérante ait été considérée comme adéquate, l’offre en cause a été considérée comme étant la meilleure, car elle était la seule à prendre en compte non seulement les aspects organisationnels ou physiques de la sécurité, mais également des mesures de sécurité pour un développement logiciel sûr.

45      En outre, les commentaires du comité d’évaluation sont complétés par le tableau de l’évaluation technique des offres pour le lot n° 1, qui donne les résultats obtenus par la requérante et par le soumissionnaire le mieux classé en ventilant ces résultats pour chacun des sous-critères.

46      Dès lors, pour le lot n° 1, bien que les prix proposés par la requérante et par le soumissionnaire le mieux classé soient presque équivalents, les raisons pour lesquelles l’offre de ce dernier a été considérée comme étant la meilleure ressortent clairement de la lettre de la Commission du 5 juin 2009 et de ses annexes.

47      De même, s’agissant des commentaires du comité d’évaluation pour chaque critère d’attribution en ce qui concerne le lot n° 2, ils exposent également la ou les raisons pour lesquelles l’offre d’un autre soumissionnaire a été considérée comme étant la meilleure, malgré le caractère inférieur du prix proposé par la requérante par rapport à celui dudit soumissionnaire.

48      Ainsi, pour trois critères d’attribution sur quatre, l’offre du soumissionnaire le mieux classé a obtenu un score plus élevé que celle de la requérante. Pour le premier critère relatif à la gestion d’ensemble du service, ladite offre a été jugée de meilleure qualité en ce qui concerne la proposition de gestion du processus de commande, la gestion des contrats en cours, le suivi des paramètres de qualité de gestion et des performances des services. Pour le deuxième critère relatif à la commande des services, cette offre a été jugée meilleure concernant la mesure et le suivi des indicateurs de qualité de service du processus de commande et des valeurs de performance des services ; la qualité de l’analyse de risque a également été jugée meilleure que celle de la requérante. Pour le troisième critère relatif à l’exécution des services, cette offre a été considérée comme de meilleure qualité pour ce qui est du suivi, des indicateurs de qualité et des valeurs de performance des services. En revanche, pour le quatrième critère relatif à la qualité du service et à la méthodologie dans le domaine du lot n° 2, l’offre de la requérante a été considérée comme de meilleure qualité.

49      Ces commentaires du comité d’évaluation reflètent ainsi les résultats plus détaillés du tableau de l’évaluation technique des offres pour le lot n° 2, lequel ventile les résultats obtenus par la requérante et par le soumissionnaire le mieux classé.

50      Au vu de l’ensemble des informations communiquées à la requérante, ainsi que des spécifications contenues dans l’appel d’offres, en ce compris la pondération relative des critères d’attribution pour chacun des lots, la requérante disposait des éléments suffisants lui permettant, pour chaque lot, de connaître et de comprendre les résultats obtenus par l’offre du soumissionnaire le mieux classé pour chaque critère d’attribution ainsi que d’identifier les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre du soumissionnaire le mieux classé.

51      Dès lors, l’argument tiré de l’insuffisance de la motivation doit être rejeté, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les arguments de la Commission concernant la protection des droits de propriété intellectuelle et des intérêts commerciaux des soumissionnaires les mieux classés.

52      Par ailleurs, s’agissant des arguments de la requérante tirés, d’une part, de ce que les « soumissionnaires gagnants » recrutent massivement parmi les membres de son personnel et, d’autre part, de ce que, dans de nombreux États membres, les offres de tous les soumissionnaires sont communiquées sur demande, il y a lieu de considérer qu’ils doivent être rejetés comme étant dénués de pertinence pour examiner si la Commission a commis une violation de l’obligation de motivation.

53      Enfin, le grief de la requérante selon lequel la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation et aurait dû classer la requérante en première place doit également être rejeté. En effet, ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, la requérante ne soulève pas, dans la requête, de moyen tiré d’une erreur manifeste d’appréciation. Dès lors, ce grief, soulevé au stade de la réplique, constitue un moyen nouveau au sens de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure et doit être rejeté, comme étant irrecevable.

54      Au vu de ce qui précède, il y a donc lieu de rejeter le deuxième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner la communication de la copie intégrale du rapport d’évaluation ou de la meilleure offre pour chacun des deux lots.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du principe de non-discrimination, de la violation de l’article 93, paragraphe 1, et de l’article 94 du règlement financier concernant les conditions d’exclusion ainsi que de la violation du principe de bonne administration

–       Observation liminaire

55      La Commission excipe de l’irrecevabilité du premier moyen. Selon elle, la requérante, qui conteste l’absence d’adoption, par la Commission, d’une décision imposant une sanction administrative d’exclusion aux soumissionnaires les mieux classés, aurait dû introduire un recours en carence. De plus, le délai d’un tel recours aurait expiré, puisque plus de quatre mois se seraient écoulés depuis la lettre de la requérante du 9 juin 2009.

56      La requérante conteste l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.

57      Il appartient au Tribunal d’apprécier si une bonne administration de la justice justifie, dans les circonstances de l’espèce, de rejeter au fond le moyen sans statuer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, Rec. p. I‑1873, point 52).

58      En l’espèce, dans un souci d’économie de procédure, il y a lieu d’examiner d’emblée le moyen invoqué par la requérante, sans statuer préalablement sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission, le moyen étant, en tout état de cause et pour les motifs exposés ci-après, dépourvu de fondement.

–       Arguments des parties

59      En premier lieu, la requérante soutient que le soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 1 et le soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 2 ont enfreint leurs obligations contractuelles dans le cadre d’autres marchés passés avec les institutions européennes. Elle expose divers manquements contractuels et fait valoir que la Commission aurait donc dû exclure lesdits soumissionnaires de la procédure d’appel d’offres en cause. Elle ajoute que la Commission aurait dû leur infliger les sanctions prévues aux articles 93, 94 et 96 du règlement financier et aux articles 133 bis et 134 ter des modalités d’exécution et que ces soumissionnaires auraient dû être exclus de la participation aux procédures d’appels d’offres pendant une période de deux ans.

60      Dans la réplique, la requérante conteste l’approche de la Commission concernant l’application de la procédure d’exclusion, selon laquelle il faudrait une violation grave du contrat, une procédure contradictoire et une sanction administrative. Elle fait observer qu’il n’existe aucune définition claire de la notion de « violation grave du contrat ». En l’espèce, le soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 1 et le soumissionnaire le mieux classé pour le lot n° 2 auraient auparavant gravement manqué à leurs obligations contractuelles.

61      En deuxième lieu, la requérante soutient que le contexte de la procédure d’appel d’offres en cause lui est défavorable. Elle se réfère à cet égard à différents éléments, tels que des arrêts rendus par le Tribunal, des affaires pendantes devant le Tribunal ainsi que des plaintes qu’elle a adressées au Médiateur européen et formule des accusations concernant des déclarations de fonctionnaires de la Commission dont elle aurait été l’objet. Elle ajoute que la Commission fait un usage sélectif et donc discriminatoire des dispositions relatives à l’exclusion et que l’attributaire qui viole ses obligations contractuelles doit être exclu de toute procédure d’appel d’offres. En outre, elle fait valoir que la Commission a notifié les contrats aux « soumissionnaires gagnants » avant même l’expiration de la « période de blocage » prévue et a précisé, lors de l’audience, qu’elle invoquait, à cet égard, l’existence d’une discrimination.

62      En troisième lieu, la requérante fait valoir que la Commission utilise son système d’alerte précoce de façon irrégulière et abusive et que les noms des « soumissionnaires gagnants » auraient dû y figurer. Elle s’interroge également sur la base juridique du système d’alerte précoce de la Commission et souligne l’incertitude au sujet des données entrées dans ce système.

63      La Commission conteste l’argumentation de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

64      En premier lieu, la requérante soutient que les soumissionnaires les mieux classés respectivement pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 ont enfreint leurs obligations contractuelles dans le cadre d’autres marchés passés avec les institutions européennes, ce qui aurait justifié qu’ils soient exclus de la procédure d’appel d’offres en cause et qu’ils fassent l’objet de sanctions. La requérante estime donc, en substance, que la Commission avait l’obligation d’exclure lesdits soumissionnaires en raison des manquements contractuels antérieurs qu’elle allègue.

65      Il convient de rappeler que l’article 96 du règlement financier prévoit :

« 1. Le pouvoir adjudicateur peut infliger des sanctions administratives ou financières :

[…]

b)      aux contractants qui ont été déclarés en défaut grave d’exécution de leurs obligations en vertu de marchés financés par le budget.

Toutefois, dans tous les cas, le pouvoir adjudicateur doit d’abord mettre la personne concernée en mesure de présenter ses observations. »

66      En outre, aux termes de l’article 93, paragraphe 1, sous f), du règlement financier, sont exclus de la participation aux procédures de passation de marchés les soumissionnaires qui font actuellement l’objet d’une sanction administrative visée à l’article 96, paragraphe 1, dudit règlement.

67      Aux termes de l’article 94, sous c), du règlement précité, sont exclus de l’attribution d’un marché les soumissionnaires qui, à l’occasion de la procédure de passation de ce marché, se trouvent dans une des situations d’exclusion prévue à l’article 93, paragraphe 1, dudit règlement.

68      Par conséquent, il résulte de la combinaison de ces dispositions que ce n’est que si un soumissionnaire a été déclaré en défaut grave d’exécution de ses obligations contractuelles et s’il subit à ce titre une sanction administrative, en application de l’article 93, paragraphe 1, sous f), et de l’article 96, paragraphe 1, du règlement financier, que le pouvoir adjudicateur doit l’exclure de l’attribution du marché en cause, en application de l’article 94, sous c), dudit règlement.

69      Même si un défaut grave d’exécution des obligations contractuelles commis dans le cadre de marchés antérieurs était démontré, l’exclusion ne serait pas automatique. En la matière, le pouvoir adjudicateur dispose, aux termes de l’article 96, paragraphe 1, sous b), du règlement financier, d’une double marge d’appréciation tant en ce qui concerne l’appréciation du manquement pouvant aboutir à une déclaration de défaut grave d’exécution qu’en ce qui concerne la sanction infligée. Ainsi, même si un contractant a été déclaré en défaut grave d’exécution du contrat, le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu de lui infliger une sanction administrative ou financière, dès lors que l’article 96 du règlement financier prévoit que le pouvoir adjudicateur « peut », au terme d’une procédure contradictoire, infliger de telles sanctions.

70      Dès lors, les arguments de la requérante visant à démontrer l’existence de manquements contractuels commis dans le cadre de marchés antérieurs par les soumissionnaires les mieux classés respectivement pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 doivent être écartés comme étant dénués de pertinence dans le cadre du présent recours.

71      Partant, le grief de la requérante, tiré de la violation des dispositions du règlement financier concernant les conditions d’exclusion, repose sur une lecture erronée desdites dispositions applicables et doit être rejeté.

72      En second lieu, la requérante allègue la violation du principe de non-discrimination.

73      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt de la Cour du 3 mars 2005, Fabricom, C‑21/03 et C‑34/03, Rec. p. I‑1559, point 27, et arrêt du Tribunal du 18 avril 2007, Deloitte Business Advisory/Commission, T‑195/05, Rec. p. II‑871, point 110). En matière de passation de marchés publics, ce principe, qui a pour objectif de favoriser le développement d’une concurrence saine et effective entre les entreprises participant à un marché public, impose que tous les soumissionnaires disposent des mêmes chances dans la formulation des termes de leurs offres et implique donc que celles-ci soient soumises aux mêmes conditions pour tous les compétiteurs (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 18 octobre 2001, SIAC Construction, C‑19/00, Rec. p. I‑7725, point 34, et du 12 décembre 2002, Universale-Bau e.a., C‑470/99, Rec. p. I‑11617, point 93).

74      En l’espèce, s’agissant, tout d’abord, des arguments avancés par la requérante concernant l’existence d’un « contexte discriminatoire », il y a lieu de relever que les allégations de menaces de la part de fonctionnaires ne sont aucunement étayées. En outre, les éléments avancés n’établissent aucune discrimination ou inégalité de traitement dans le cadre de la procédure d’appel d’offres en cause. En particulier, il ne peut être tiré aucune conséquence sur la validité des décisions attaquées de l’existence de plaintes devant le Médiateur, de recours pendants devant le Tribunal ou des arrêts évoqués, rendus par le Tribunal à propos d’autres procédures de passation de marchés, et qui n’étayent aucunement les allégations de la requérante.

75      L’argument de la requérante pris de l’existence d’un « contexte discriminatoire » doit donc être rejeté.

76      Ensuite, la requérante soutient que la Commission fait un usage discriminatoire des dispositions en matière d’exclusion et que le soumissionnaire qui viole ses obligations contractuelles doit être exclu de toute procédure d’appel d’offres.

77      Toutefois, ainsi qu’il a été constaté précédemment (voir points 64 à 71 ci-dessus), les arguments en vertu desquels les soumissionnaires les mieux classés respectivement pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 auraient dû être exclus de la procédure d’appel d’offres en cause en l’espèce ne peuvent pas prospérer. L’argument tiré d’une violation du principe de non-discrimination à cet égard, qui n’est pas autrement étayé, doit donc également être rejeté.

78      Enfin, la requérante fait valoir que la Commission a notifié les contrats aux « soumissionnaires gagnants » avant l’expiration de la « période de blocage » prévue et allègue l’existence d’une discrimination.

79      Il convient de rappeler que l’article 158 bis des modalités d’exécution, relatif au délai d’attente avant la signature du contrat, prévoit, dans son paragraphe 1, sous a), que le contrat ne peut être signé par le pouvoir adjudicateur qu’au terme d’une période de quatorze jours de calendrier, qui court à compter du lendemain de la date de notification simultanée des décisions d’attribution et de rejet.

80      En l’espèce, la Commission a notifié les décisions attaquées par lettres du 12 mai 2009 et, ainsi qu’il a été indiqué lors de l’audience, les contrats n’ont pas été signés par la Commission avant les mois de septembre et d’octobre 2009. Dès lors, le délai de quatorze jours de calendrier a été respecté. C’est, par ailleurs, cette notification des contrats aux attributaires qui fait courir le point de départ du délai de quatorze jours. En outre, le fait que la Commission a procédé à cette notification des contrats ne signifie aucunement qu’elle n’ait pas examiné de manière objective les observations de la requérante formulées le 9 juin 2009. À cet égard, l’article 158 bis, paragraphe 1, troisième alinéa, des modalités d’exécution prévoit que la suspension de la signature du contrat pour examen complémentaire est une possibilité dont le pouvoir adjudicateur dispose, si les demandes ou commentaires formulés par des soumissionnaires écartés ou lésés, ou toute autre information pertinente reçue, le justifient. Le fait que la Commission a considéré que tel n’était pas le cas en l’espèce n’enfreint donc pas cette disposition et la requérante n’établit aucunement l’existence d’une discrimination à cet égard.

81      Dès lors, cet argument doit être rejeté et, partant, le grief tiré de la violation du principe de non-discrimination dans son ensemble.

82      En troisième lieu, la requérante fait valoir des arguments mettant en cause le système d’alerte précoce de la Commission.

83      Il convient de constater que l’argument de la requérante selon lequel les noms des « soumissionnaires gagnants » auraient dû figurer dans le système d’alerte précoce rejoint, en substance, celui selon lequel ces soumissionnaires auraient dû être exclus de la procédure d’appel d’offres en cause. Dès lors, cet argument doit être rejeté, ainsi qu’il a été jugé précédemment (voir points 64 à 71 ci-dessus).

84      Par ailleurs, les arguments par lesquels la requérante met en cause la légalité du système d’alerte précoce doivent être rejetés comme inopérants. En effet, à supposer même qu’ils soient fondés, il s’ensuivrait que les signalements figurant dans ce système devraient être écartés. Or, cela ne pourrait pas entraîner l’annulation des décisions attaquées, dès lors que, ainsi qu’il est constant entre les parties, les soumissionnaires les mieux classés respectivement pour le lot n° 1 et pour le lot n° 2 ne faisaient pas l’objet d’une mesure d’exclusion en l’espèce.

85      Il s’ensuit que les arguments de la requérante concernant le système d’alerte précoce doivent être rejetés.

86      Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 130 du règlement financier ainsi que de la violation des principes de bonne administration, de transparence et d’égalité de traitement

–       Arguments des parties

87      La requérante fait valoir que la période de validité des offres de neuf mois, prévu dans l’appel d’offres, dépasse la période de validité des offres généralement prévue dans le domaine des technologies de l’information. Elle soutient ainsi que, au bout de six mois, les curriculum vitae sont remplacés et que le matériel, les logiciels et les technologies proposés doivent être repensés. Elle cite en exemple un appel d’offres de la Commission.

88      En outre, elle conteste en substance la prolongation de la période de validité des offres. Selon elle, le pouvoir adjudicateur ne peut pas signer un contrat alors que la période de validité des offres a expiré. Elle soutient que, sans le libre consentement des soumissionnaires à la prolongation de la période de validité de leurs offres, celles-ci sont caduques. Elle invoque, à cet égard, l’article 130, sous c), des modalités d’exécution et les principes de bonne administration, de transparence et d’égalité de traitement. Elle ajoute qu’une période de validité des offres de neuf mois constitue la norme à ne pas dépasser. Elle fait également valoir que la prolongation a empêché la Commission d’examiner objectivement ses observations du 9 juin 2009 et que, la procédure d’appel d’offres ayant été irrégulière, son annulation est justifiée.

89      La Commission conteste l’argumentation de la requérante.

–       Appréciation du Tribunal

90      Premièrement, s’agissant du grief tiré du caractère excessif de la période de validité des offres de neuf mois prévue par l’appel d’offres, il convient de relever que la requérante n’a pas émis de réserve quant à cette durée lorsqu’elle a soumis ses offres. Ce faisant, elle s’est elle-même engagée à maintenir les conditions de ses offres pendant cette période, conformément à l’article 130, paragraphe 2, sous c), des modalités d’exécution. Elle n’est donc pas fondée à invoquer l’argument selon lequel, au bout de six mois, les curriculum vitae seraient remplacés et le matériel, les logiciels ainsi que les technologies proposés devraient être repensés. En outre, elle ne démontre pas en quoi une telle durée serait excessive pour le marché en cause. À cet égard, le fait de citer un exemple d’appel d’offres dans lequel la période de validité des offres était inférieure à neuf mois ne saurait être considéré comme suffisant. Au surplus, la requérante indique, dans la réplique, qu’une période de validité des offres de neuf mois constitue la norme à ne pas dépasser, ce qui contredit l’argument selon lequel elle serait excessive.

91      Il s’ensuit que le grief tiré de la durée prétendument excessive de la période de validité des offres doit être rejeté.

92      Deuxièmement, s’agissant du grief de la requérante tiré de l’irrégularité de la prolongation de la période de validité des offres, il convient de rappeler, tout d’abord, que l’article 130, paragraphe 2, sous c), des modalités d’exécution prévoit que l’invitation à soumissionner précise la période de validité des offres durant laquelle le soumissionnaire est tenu de maintenir toutes les conditions de son offre. Toutefois, cette disposition ne concerne pas la prolongation de la période de validité des offres et n’a pas été enfreinte en l’espèce, dès lors que la durée de cette période a bien été fixée dans l’appel d’offres.

93      Ensuite, il convient de relever que tous les soumissionnaires concernés ont accepté de considérer que leurs offres étaient valides pendant une période de douze mois à compter du 6 octobre 2008, y compris la requérante, malgré les réserves exprimées dans sa lettre du 28 juillet 2009. Dès lors, contrairement à ce que soutient la requérante, la prolongation de la période de validité des offres a eu lieu avec l’accord exprès de tous les soumissionnaires et les offres ne peuvent donc pas être considérées comme caduques.

94      De plus, les courriers de la Commission du 16 juillet 2009 concernant la prolongation de la période de validité des offres ont été envoyés à tous les soumissionnaires concernés, dont la requérante, qui a été placée, comme les autres soumissionnaires, dans la situation d’accepter ou de refuser la prolongation de ses offres. La requérante n’établit donc aucunement la violation des principes de bonne administration, de transparence et de non-discrimination en l’espèce.

95      Enfin, il n’est aucunement démontré que la prolongation de la validité des offres a empêché la Commission d’examiner objectivement les observations de la requérante du 9 juin 2009, auxquelles la Commission a répondu le 12 juin 2009 (voir point 10 ci-dessus).

96      Le troisième moyen doit donc être rejeté dans son ensemble.

97      Il résulte de tout ce qui précède que la demande en annulation doit être rejetée comme étant non fondée.

 Sur la demande en indemnité

 Arguments des parties

98      La requérante soutient que les décisions attaquées sont illégales, que les violations des dispositions concernant l’exclusion des « attributaires » et l’absence de motivation constituent une violation des règles et principes fondamentaux. Elle évalue son préjudice à un montant de 9 544 480 euros correspondant au bénéfice brut estimé (50 % de la valeur du marché) qui aurait été le sien si elle avait été désignée comme « attributaire ». Elle ajoute, dans ses observations en réplique, que la preuve d’une perte de chance d’être « attributaire », exigée par la Commission, est difficile à apporter dès lors que tous les soumissionnaires ont une chance raisonnable d’être retenu et que le respect du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective exige la réparation complète du manque à gagner d’un soumissionnaire lésé.

99      La Commission conteste l’argumentation de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

100    Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, l’existence d’un préjudice réel et certain et l’existence d’un lien direct de causalité entre le comportement de l’institution concernée et le préjudice allégué (arrêt de la Cour du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec. p. 3057, point 16, et arrêt du Tribunal du 9 juillet 1999, New Europe Consulting et Brown/Commission, T‑231/97, Rec. p. II‑2403, point 29).

101    En outre, il convient de rappeler que, dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions de ladite responsabilité (arrêts de la Cour du 15 septembre 1994, KYDEP/Conseil et Commission, C‑146/91, Rec. p. I‑4199, point 81, et du 14 octobre 1999, Atlanta/Communauté européenne, C‑104/97 P, Rec. p. I‑6983, point 65 ; arrêt du Tribunal du 10 décembre 2009, Antwerpse Bouwwerken/Commission, T‑195/08, Rec. p. II‑4439, point 91).

102    En l’espèce, il ressort des conclusions du Tribunal sur la demande en annulation que la requérante n’a pas rapporté la preuve d’un comportement illégal de la part de la Commission.

103    Il s’ensuit que la demande en indemnité doit être rejetée comme étant non fondée.

104    Partant, le recours doit être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

105    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

106    La requérante ayant succombé en toutes ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Evropaïki Dynamiki – Proigmena Systimata Tilepikoinonion Pliroforikis kai Tilematikis AE est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Forwood

Dehousse

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 septembre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.