Language of document : ECLI:EU:T:2020:93

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

12 mars 2020 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne verbale SUM011 – Marques de l’Union européenne figurative antérieure Sumol et nationale verbale antérieure SUMOL – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Absence de similitude des produits et des services – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »

Dans l’affaire T‑296/19,

Sumol + Compal Marcas, SA, établie à Carnaxide (Portugal), représentée par Mes J. M. Pimenta et A. M. Sebastião, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme L. Lapinskaite, MM. J. Crespo Carrillo et H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été

Heretat Mont-Rubi, SA, établie à Font-Rubi (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 12 février 2019 (affaire R 1662/2018-5), relative à une procédure d’opposition entre Sumol + Compal Marcas et Heretat Mont-Rubi,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, Z. Csehi (rapporteur) et Mme G. Steinfatt, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 mai 2019,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 7 août 2019,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 23 février 2015, Heretat Mont-Rubi, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal SUM011.

3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 33, 35 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; vin ; extraits de fruits à l’alcool ; vin champagnisé ; alcool de riz ; anis (liqueur) ; eaux-de-vie ; vins effervescents ; liqueurs » ;

–        classe 35 : « Gestion des affaires commerciales dans le secteur de l’alimentation et boissons ; services de vente au détail de vins, boissons alcooliques et aliments ; services d’approvisionnement de tiers en vins, boissons alcooliques et aliments ; services de commerce électronique, à savoir, mise à disposition d’informations sur des produits alimentaires et les boissons par des réseaux de télécommunication à des fins de publicité et de vente ; promotion des ventes » ;

–        classe 39 : « Organisation et direction de tournées, circuits, excursions et visites touristiques, en particulier en rapport avec le tourisme écologique, la culture du vin, la gastronomie et les biens culturels et architecturaux ; réalisation de visites guidées dans des celliers ; services de guides touristiques ; accompagnement de voyageurs et visites touristiques ; services de réservation d’excursions ; conditionnement et emballage de boissons ; stockage, expédition, transport, livraison et fourniture de boissons ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne du 2 mars 2015.

5        Le 2 juin 2015, la requérante, Sumol + Compal Marcas, SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée, d’une part, sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure suivante :

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7        La marque de l’Union européenne antérieure, enregistrée le 2 juin 2012 sous le numéro 10527042, désigne les produits relevant des classes 30, 32 et 33 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 30 : « Boissons à base de chocolat, cacao, café, thé, succédanés du café et autres céréales » ;

–        classe 32 : « Boissons, notamment, boissons à base de jus de fruits d’origine biologique, eaux potables, eaux aromatisées, eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; bières ; boissons énergétiques et boissons sportives ; boissons rafraîchissantes, granités de fruits, boissons de fruits et boissons gazeuses à base de jus de fruits ; jus de légumes et de plantes et jus de plantes ; sirops pour boissons, concentrés, poudres et autres préparations pour faire des boissons » ;

–        classe 33 : « Boissons alcooliques (à l’exception des bières) ; boissons alcooliques contenant des jus de fruits ».

8        L’opposition était fondée, d’autre part, sur la marque portugaise verbale antérieure SUMOL, enregistrée le 2 septembre 1957, désignant les produits relevant de la classe 32 et correspondant à la description suivante : « Boissons sans alcool et jus de fruits ».

9        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001).

10      Le 26 juin 2018, la division d’opposition a partiellement accueilli l’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion en ce qui concerne les produits et les services suivants :

–        classe 33 : « Boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; vin ; extraits de fruits à l’alcool ; vin champagnisé ; alcool de riz ; anis (liqueur) ; eaux-de-vie ; vins effervescents ; liqueurs » ;

–        classe 35 : « Services de vente au détail de vins, boissons alcooliques ».

11      Le 23 août 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 12 février 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a partiellement accueilli le recours et a rejeté la demande d’enregistrement également en ce qui concerne les services suivants :

–        classe 35 : « Services d’approvisionnement de tiers en vins, boissons alcooliques» ;

–        classe 39 : « Organisation et direction de tournées, circuits, excursions et visites touristiques, en particulier en rapport avec le tourisme écologique, la culture du vin ; réalisation de visites guidées dans des celliers ; stockage, expédition, transport, livraison et fourniture de boissons ».

13      En particulier, la chambre de recours a considéré qu’il existait également un risque de confusion pour les services visés au point 12. Contrairement à la division d’opposition, elle a considéré que ces services étaient faiblement similaires aux produits désignés par la marque de l’Union européenne antérieure.

14      Par ailleurs, la chambre de recours a rejeté le recours devant elle pour les services suivants, jugés différents des produits désignés par les marques antérieures :

–        classe 35 : « Gestion des affaires commerciales dans le secteur de l’alimentation et boissons ; services de vente au détail [d’]aliments ; services d’approvisionnement de tiers en aliments ; services de commerce électronique, à savoir, mise à disposition d’informations sur des produits alimentaires et les boissons par des réseaux de télécommunication à des fins de publicité et de vente ; promotion des ventes » ;

–        classe 39 : « Organisation et direction de tournées, circuits, excursions et visites touristiques, en particulier en rapport avec la gastronomie et les biens culturels et architecturaux ; services de guides touristiques ; accompagnement de voyageurs et visites touristiques ; services de réservation d’excursions ; conditionnement et emballage de boissons ».

 Conclusions des parties

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réformer la décision attaquée et ordonner le rejet de la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les services « restants relevant des classes 35 et 39 » ;

–        condamner les autres parties aux dépens de la présente procédure, ainsi qu’à ceux exposés au cours de la procédure de l’opposition et de la procédure de recours devant l’EUIPO.

16      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du premier chef de conclusion

17      L’EUIPO fait valoir que le premier chef de conclusion est irrecevable, pour autant qu’il vise l’accueil de l’opposition et le rejet de la marque demandée pour les services relevant des classes 35 et 39 pour lesquels la chambre de recours a rejeté le recours devant elle.

18      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le Tribunal est compétent, en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, soit pour annuler la décision attaquée, soit pour la réformer, en adoptant la décision que la chambre de recours aurait dû prendre.

19      En outre, il y a lieu de relever que, lorsque la partie requérante conclut à la réformation de la décision de la chambre de recours, sans demander l’annulation de cette décision, cette conclusion en réformation comprend nécessairement une conclusion en annulation [voir, en ce sens, arrêt du 7 novembre 2013, Budziewska/OHMI – Puma (Félin bondissant), T‑666/11, non publié, EU:T:2013:584, point 18 et jurisprudence citée].

20      En l’espèce, il ressort du contenu de la requête que, par le présent recours, la requérante tend, en substance, à obtenir, d’une part, l’annulation partielle de la décision attaquée, au motif que la chambre de recours aurait conclu à tort à l’absence de similitude entre les produits et les services en cause et, d’autre part, la réformation de la décision attaquée dans cette mesure.

21      Pour autant que la requérante demande au Tribunal d’ordonner le rejet de la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les services relevant des classes 35 et 39 pour lesquels son recours a été rejeté par la chambre de recours, il convient de considérer que la requérante demande, en substance, au Tribunal d’adopter la décision que, selon elle, l’EUIPO aurait dû prendre, à savoir une décision constatant que les conditions d’opposition sont remplies, de sorte que l’EUIPO l’exécuterait en refusant l’enregistrement de la marque demandée en ce qui concerne lesdits services. Partant, la requérante demande la réformation de la décision attaquée, telle qu’elle est prévue à l’article de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001. En effet, cette demande ne consiste pas à solliciter du Tribunal qu’il condamne l’EUIPO à une quelconque obligation de faire ou de ne pas faire, ce qui constituerait une injonction adressée à ce dernier. Elle vise, au contraire, à ce que le Tribunal décide, au même titre que la chambre de recours, si la marque demandée peut être enregistrée au regard de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Or, une telle décision figure parmi les mesures qui, en principe, peuvent être prises par le Tribunal au titre de son pouvoir de réformation [voir arrêt du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, EU:T:2007:264, point 30 et jurisprudence citée].

22      Il s’ensuit, contrairement à ce que soutient l’EUIPO, que la demande en cause est recevable. Toutefois, cette conclusion est sans préjudice de la question de savoir si, en l’espèce, les conditions pour l’exercice du pouvoir de réformation du Tribunal sont réunies [voir, par analogie, arrêt du 28 janvier 2016, Gugler France/OHMI – Gugler (GUGLER), T‑674/13, non publié, EU:T:2016:44, points 99 à 104]. Cette question sera tranchée, le cas échéant, après l’examen des arguments de la requérante quant au fond.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001

23      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001. Elle fait valoir, en substance, que la chambre de recours a conclu à tort que les services visés au point 14 ci-dessus et les produits désignés par les marques antérieures étaient différents.

24      L’EUIPO conteste les arguments de la requérante.

25      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), dudit règlement, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

26      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

27      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

28      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

29      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si les arguments de la requérante démontrent qu’il existe, en l’espèce, une similitude entre les services et les produits en cause.

30      À titre liminaire, en ce qui concerne le public pertinent, il convient de relever que la chambre de recours a constaté que les services visés par la marque demandée relevant des classes 35 et 39 étaient destinés, en partie, au grand public et, en partie, tant au grand public qu’à des professionnels possédant une expertise ou des connaissances professionnelles spécifiques. Elle a également considéré, en substance, que les produits visés par les marques antérieures ciblaient à la fois le grand public et les professionnels. Il y a lieu de confirmer ces appréciations qui, d’ailleurs, ne sont pas contestées par la requérante.

31      En outre, il importe de relever que la chambre de recours a procédé à un examen détaillé de la similitude des services désignés par la marque demandée, faisant l’objet du litige devant elle, et des produits visés par la marque de l’Union européenne antérieure, repris au point 7 ci-dessus. Elle a considéré que les services visés au point 14 ci-dessus étaient différents des produits désignés par ladite marque antérieure. Elle a, par ailleurs, retenu que lesdits services étaient également différents des produits visés par la marque nationale antérieure, repris au point 8 ci-dessus, étant donné que cette dernière couvrait la même gamme de produits ou une gamme de produits plus limitée que la marque de l’Union européenne antérieure. Elle a conclu, dès lors, au rejet du recours devant elle en ce qui concerne ces services.

32      En ce qui concerne les services visés au point 14 ci-dessus et les produits désignés par la marque de l’Union européenne antérieure, premièrement, la chambre de recours a considéré que les « services de vente au détail [d’]aliments ; services d’approvisionnement de tiers en aliments » relevant de la classe 35 portaient sur des aliments qui n’étaient pas similaires aux boissons qu’à un faible degré. Elle a également estimé que la similitude entre les services de vente au détail de produits spécifiques et des produits spécifiques ne pouvait être constatée que lorsque les produits en cause étaient identiques, et a conclu que cette condition n’était pas remplie en l’espèce.

33      Deuxièmement, en ce qui concerne les services « gestion des affaires commerciales dans le secteur de l’alimentation et boissons ; services de commerce électronique, à savoir, mise à disposition d’informations sur des produits alimentaires et les boissons par des réseaux de télécommunication à des fins de publicité et de vente ; promotion des ventes » relevant de la classe 35, la chambre de recours a considéré, en substance, que ces services et les produits désignés par la marque de l’Union européenne antérieure différaient par leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leurs canaux de commercialisation et n’étaient pas concurrents. Elle a également relevé qu’elle n’était pas en mesure de prouver l’existence d’une complémentarité entre ces produits et services et que les entreprises qui fournissaient des services de gestion des affaires, de commerce électronique ou de publicité n’étaient généralement pas des producteurs de boissons.

34      Troisièmement, s’agissant des services « organisation et direction de tournées, circuits, excursions et visites touristiques, en particulier en rapport avec la gastronomie et les biens culturels et architecturaux ; services de guides touristiques ; accompagnement de voyageurs et visites touristiques ; services de réservation d’excursions » relevant de la classe 39, la chambre de recours a considéré, en substance, que ces services et les produits désignés par la marque de l’Union européenne antérieure différaient par leur nature, qu’ils répondaient à des besoins distincts et que lesdits services contestés étaient fournis par des sociétés spécialisées dans le tourisme et l’organisation de voyages. Elle a exclu tout caractère complémentaire de ces services avec les boissons désignées par ladite marque antérieure, en ajoutant, en substance, qu’il n’y avait aucune raison de présumer que le public pertinent considérerait que de tels services sont offerts par des producteurs de vin.

35      Quatrièmement, s’agissant des services « conditionnement et emballage de boissons » relevant de la classe 39, la chambre de recours a considéré que ces services différaient des produits visés par la marque de l’Union européenne antérieure par leur nature, leur objet et leur destination et n’étaient pas fournis par les mêmes entreprises. En outre, elle a estimé que les services d’emballage pouvaient être utilisés pour n’importe quel autre produit et que, dès lors, la nécessité de recourir à ces services en vue de transporter les produits en cause ne les rendait pas similaires.

36      La requérante considère, en substance, que les services visés au point 14 ci-dessus et les produits désignés par les marques antérieures sont similaires, dans la mesure où lesdits services concernent des boissons non alcoolisées ou alcoolisées, qui sont précisément les produits pour lesquels ces marques ont été enregistrées. Elle estime que tous les services en cause sont dépendants des boissons protégées par lesdites marques, car c’est sur la base de ces produits et seulement en lien avec ces derniers que les services sont commercialisés et fournis. En outre, elle conteste, en substance, l’appréciation de la chambre de recours portant sur les services relevant de la classe 39, selon laquelle les produits et les services en cause ont une nature, une finalité et une utilisation différentes. Elle fait valoir qu’il est essentiel de tenir compte des circonstances particulières de la situation analysée. À cet égard, elle relève que l’autre partie devant la chambre de recours n’exerce que des activités dans le secteur vitivinicole et qu’il est, dès lors, évident que tous les services en cause sont intrinsèquement liés au vin et que ladite partie a l’intention d’utiliser la marque demandée dans ce secteur d’activité.

37      Ces arguments ne sauraient remettre en cause les appréciations de la chambre de recours.

38      À cet égard, en premier lieu, il convient de relever que, contrairement à ce que soutient la requérante, tous les services en cause ne concernent pas spécifiquement des boissons.

39      En effet, les « services de vente au détail [d’]aliments ; services d’approvisionnement de tiers en aliments » relevant de la classe 35 et les services « organisation et direction de tournées, circuits, excursions et visites touristiques, en particulier en rapport avec la gastronomie et les biens culturels et architecturaux ; services de guides touristiques ; accompagnement de voyageurs et visites touristiques ; services de réservation d’excursions », relevant de la classe 39, sont soit limités à des produits différents, soit ne sont pas limités à des produits spécifiques et peuvent donc être rendus pour tous les types de produits. La requérante soutient donc à tort que ces services ne peuvent être fournis qu’en lien avec les boissons visées par les marques antérieures.

40      En ce qui concerne les services qui font référence à des boissons ou au secteur des boissons, à savoir « gestion des affaires commerciales dans le secteur de l’alimentation et boissons ; services de commerce électronique, à savoir, mise à disposition d’informations sur des produits alimentaires et les boissons par des réseaux de télécommunication à des fins de publicité et de vente », compris dans la classe 35, et « conditionnement et emballage de boissons », compris dans la classe 39, force est de constater que cette circonstance en soi n’est pas suffisante pour conclure que ces services sont similaires aux boissons visées par les marques antérieures.

41      En effet, dans la mesure où la requérante allègue, en substance, que les services qui font référence à des boissons ou au secteur des boissons sont complémentaires aux produits couverts par les marques antérieures, il convient de relever que, selon la jurisprudence, les produits ou les services complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits ou de la fourniture de ces services incombe à la même entreprise [voir arrêt du 17 février 2017, Hernández Zamora/EUIPO – Rosen Tantau (Paloma), T‑369/15, non publié, EU:T:2017:106, point 27 et jurisprudence citée].

42      Or, il y a lieu de constater, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante n’a fourni aucun élément de nature à démontrer que les services et les produits en cause présentent un caractère complémentaire tel que défini par la jurisprudence citée au point 41 ci-dessus. Plus précisément, la requérante n’a pas présenté d’arguments concrets permettant de conclure que les produits visés par les marques antérieures sont indispensables ou importants pour l’usage des services désignés par la marque demandée qui se réfèrent à des boissons ou que la fourniture desdits services est indispensable ou importante pour l’utilisation des produits désignés par les marques antérieures. Ce constat vaut également en ce qui concerne les services qui ne concernent pas spécifiquement des boissons.

43      En second lieu, la requérante conteste, en substance, l’appréciation de la chambre de recours relative aux services relevant de la classe 39 selon laquelle ces services et les produits désignés par la marque de l’Union européenne antérieure ont une nature, une finalité et une utilisation différentes (voir point 42 de la décision attaquée). Plus concrètement, elle soutient que l’autre partie devant la chambre de recours n’exerce que des activités dans le secteur vitivinicole et qu’il est, dès lors, évident que tous les services en cause sont intrinsèquement liés au vin et que ladite partie a l’intention d’utiliser la marque demandée dans ce secteur d’activité.

44      À cet égard, il convient de souligner que, afin d’apprécier la similitude des produits et des services en cause, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, il y a lieu de prendre en compte le libellé des produits et services visés par les marques en conflit et non les produits et services effectivement commercialisés ou à commercialiser sous ces marques [voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2016, Industrias Tomás Morcillo/EUIPO – Aucar Trailer (Polycart A Whole Cart Full of Benefits), T‑613/14, non publié, EU:T:2016:198, point 27 et jurisprudence citée]. Il s’ensuit que la comparaison des services et des produits en cause doit être fondée sur la liste des services visés dans la demande d’enregistrement de la marque demandée. Par conséquent, l’argument de la requérante tiré de l’intention d’utilisation de la marque demandée ne saurait prospérer.

45      En l’absence d’autres arguments concrets, il convient de considérer que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé que les services relevant de la classe 39 et les produits en cause ont une nature, une finalité et une utilisation différentes.

46      Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les services et les produits en cause étaient différents et qu’il n’existait donc pas de risque de confusion en ce qui concerne les services visés au point 14 ci-dessus, dans la mesure où une des conditions nécessaires à la constatation de l’existence d’un risque de confusion en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, à savoir la similitude des produits et des services en cause, n’était pas remplie. Il s’ensuit que le moyen unique de la requérante doit être écarté, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si les conditions pour l’exercice du pouvoir de réformation du Tribunal sont réunies en l’espèce.

 Sur les dépens

47      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

48      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Sumol + Compal Marcas, SA, est condamnée aux dépens.

Collins

Csehi

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mars 2020.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.