Language of document : ECLI:EU:T:2022:320

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

1er juin 2022 (*) 

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative Pokój TRADYCJA JAKOŚĆ KRÓWKA SŁODKIE CHWILE Z DZIECIŃSTWA TRADYCYJNA RECEPTURA – Marque internationale figurative antérieure KOPOBKA KOROVKA – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), et article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) no 207/2009 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑355/20,

PAO Moscow Confectionery Factory « Krasnyj Octyabr », établie à Moscou (Russie), représentée par Mes M. Geitz et J. Stock, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme A. Söder et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Spółdzielnia « Pokój », établie à Bielsko-Biała (Pologne), représentée par Mes E. Pijewska et M. Mazurek, avocats,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de Mmes M. J. Costeira, présidente, M. Kancheva et M. P. Zilgalvis (rapporteur), juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 9 décembre 2021,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, PAO Moscow Confectionery Factory “Krasnyj Octyabr”, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 2 avril 2020 (affaire R 1974/2019‑1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 25 avril 2016, l’intervenante, Spółdzielnia « Pokój », a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

3        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, pour lequel les couleurs rouge, blanc, jaune, nuances de gris, brun et bleu ont été revendiquées :

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4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié et correspondent à la description suivante : « Sucreries ; sucre candi ; caramels ».

5        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2016/115 du 22 juin 2016. Cette marque a été enregistrée le 29 septembre 2016 sous le numéro 15371305.

6        Le 26 mars 2018, la requérante a présenté auprès de l’EUIPO une demande en nullité de la marque en cause pour l’ensemble des produits visés au point 4 ci-dessus.

7        La demande en nullité était fondée sur l’enregistrement international antérieur no 844698 de la marque figurative reproduite ci-après, ayant effet, notamment, en Allemagne, en Grèce et en Espagne, déposée et enregistrée le 26 novembre 2004, et dûment renouvelée, désignant les produits relevant, notamment, de la classe 30 et correspondant, notamment, à la description suivante : « Confiserie ; sucreries ; chocolat ; pralines ; gaufres ; pâtisseries ; gâteaux » :

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8        Les motifs invoqués à l’appui de la demande en nullité étaient ceux visés à l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 60, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

9        Par décision du 5 juillet 2019, la division d’annulation a fait droit à la demande en nullité.

10      Le 5 septembre 2019, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

11      Par la décision attaquée, la chambre de recours a annulé la décision de la division d’annulation et a rejeté la demande en nullité. En substance, elle a conclu à l’absence de risque de confusion ou d’association dans l’esprit du public pertinent.

12      En particulier, la chambre de recours a estimé que les produits couverts par les marques en conflit s’adressaient au grand public de l’Allemagne, de la Grèce et de l’Espagne manifestant un niveau d’attention moyen. De même, elle a validé l’appréciation de la division d’annulation selon laquelle les produits en cause étaient identiques.

13      S’agissant de l’appréciation des signes en cause, la chambre de recours a considéré, premièrement, que la marque antérieure ne comportait pas d’éléments dominants et que, dans la marque contestée, les éléments dominants étaient l’élément verbal « krówka », le « dispositif » comprenant l’élément « pokój » et un oiseau placé au-dessus sur un fond rouge, la représentation du bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre, ainsi que l’image rectangulaire représentant des enfants, positionnée à droite du signe.

14      Deuxièmement, elle a estimé que les éléments « kopobka », « korovka » et « krówka » étaient dépourvus de toute signification pour le public pertinent et que, par conséquent, ils présentaient un degré normal de caractère distinctif pour les produits en cause. L’élément « pokój », en raison de sa représentation, serait perçu comme une marque de maison. Les expressions « słodkie chwile z dzieciństwa » et « tradycyjna receptura » tout en présentant un caractère distinctif normal pour les produits en cause, apparaissaient, selon la chambre de recours, comme des indications explicatives des éléments « pokój » et « krówka ». Quant aux éléments figuratifs présents dans la marque contestée, la représentation d’oiseau présenterait un caractère distinctif normal, tandis que les autres éléments figuratifs présenteraient un caractère distinctif faible dans la mesure où ils feraient allusion aux ingrédients des produits, indiqueraient le public cible de ceux-ci ou auraient une simple valeur ornementale.

15      Troisièmement, la chambre de recours a considéré que les signes en cause dans leur ensemble n’étaient pas visuellement similaires, car les différences manifestes contrebalançaient le seul point de similitude résultant de la coïncidence de certaines lettres dans les éléments verbaux « kopobka », « korovka » et « krówka ». Quatrièmement, selon la chambre de recours, le degré de similitude des marques en conflit, prononcées respectivement, « kopobka korovka » et « krówka » ou « pokój krówka », sur le plan phonétique était tout au plus faible. Cinquièmement, ladite chambre a considéré que les signes en cause n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel dans la mesure où le public pertinent percevra uniquement le contenu sémantique véhiculé par les éléments figuratifs de la marque contestée.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

17      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 25 avril 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis  par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

19      Par conséquent, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ainsi que par les parties dans leurs écritures aux dispositions du règlement 2017/1001, notamment l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 60, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, comme visant les dispositions du règlement no 207/2009 d’une teneur identique, notamment l’article 8, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, et l’article 53, paragraphe 1, sous a), de ce règlement.

20      La requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement. Par ce moyen unique, la requérante reproche, en substance, à la chambre de recours, premièrement, d’avoir commis des erreurs dans l’appréciation du niveau d’attention du public pertinent ainsi que dans la comparaison des marques en conflit, deuxièmement, d’avoir commis des erreurs dans l’appréciation globale du risque de confusion, et, troisièmement, ne pas avoir pris en considération l’existence d’un risque de confusion « indirect ».

21      Aux termes d’une lecture combinée de l’article 53, paragraphe 1, sous a), et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, la marque de l’Union européenne enregistrée est déclarée nulle lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), iii), dudit règlement, il convient d’entendre par marques antérieures, notamment, les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque de l’Union européenne.

22      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

23      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [arrêts du 20 septembre 2017, The Tea Board/EUIPO, C‑673/15 P à C‑676/15 P, EU:C:2017:702, point 47, et du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42].

24      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si la chambre de recours a, à juste titre, estimé qu’il n’existait pas, en l’espèce, de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

 Sur le public pertinent et son niveau d’attention

25      Selon l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, l’existence d’un risque de confusion résultant de la similitude, d’une part, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et une marque antérieure et, d’autre part, entre les produits ou les services que ces marques désignent doit être appréciée dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée (arrêts du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, EU:C:2007:252, point 51, et du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, EU:C:2007:514, point 59).

26      En outre, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

27      En l’espèce, la chambre de recours a constaté, d’une part, au point 19 de la décision attaquée, que, la marque antérieure étant un enregistrement international ayant effet, notamment, en Allemagne, en Grèce et en Espagne, le territoire pertinent était celui de ces États membres et, d’autre part, au point 18 de ladite décision, que les produits en cause s’adressaient au grand public manifestant un niveau d’attention moyen.

28      La requérante remet en cause l’appréciation du niveau d’attention du public pertinent et affirme qu’il varie de faible à moyen.

29      À cet égard, l’EUIPO souligne que la jurisprudence est équivoque sur ce point dans la mesure où, s’agissant des produits en cause, certains arrêts confirment un niveau d’attention moyen, tandis que d’autres ont retenu un niveau d’attention « assez » faible.

30      Premièrement, il y a lieu de constater que, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 25 et 26 ci-dessus, l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le public pertinent des produits en cause était le grand public allemand, grec et espagnol, au demeurant non contestée par les parties, doit être approuvée.

31      Deuxièmement, s’agissant du niveau d’attention du public pertinent, il a déjà été jugé, pour des produits relevant de la classe 30, semblables ou identiques à ceux désignés par les marques en conflit, que le niveau d’attention du public concerné est tout au plus moyen, voire relativement faible, ces produits étant des produits alimentaires pour la plupart peu onéreux et destinés à la grande consommation [voir ordonnance du 10 juillet 2020, Katjes Fassin/EUIPO – Haribo The Netherlands & Belgium (WONDERLAND), T‑616/19, non publiée, EU:T:2020:334, point 29 et jurisprudence citée].

32      À cet égard, force est de relever que les appréciations de la chambre de recours selon lesquelles le niveau d’attention du public pertinent est moyen ne sont pas en contradiction avec la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus qui admet que le niveau d’attention du public pour les produits relevant de la classe 30, semblables aux produits en cause, peut varier de faible à moyen, comme le prétend également la requérante. Il n’en demeure pas moins qu’une éventuelle incidence d’un niveau d’attention du public pertinent plus faible que celui retenu par la chambre de recours sur l’existence du risque de confusion sera examinée ci-après (voir point 101 ci-après).

 Sur la comparaison des produits

33      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 47 de la décision attaquée, que les produits en cause étaient identiques.

34      Il y a lieu de considérer, à la lumière de la description des produits couverts par les marques en conflit, aux points 4 et 7 ci-dessus, que cette appréciation de la chambre de recours, au demeurant non contestée par les parties, doit être approuvée.

 Sur la comparaison des signes

35      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

36      En l’espèce, la marque antérieure correspond à un signe figuratif, comportant deux éléments verbaux, « kopobka » étant placé au-dessus de « korovka ». Ces éléments sont écrits en lettres majuscules noires en caractères gras relativement standards.

37      S’agissant de l’élément « kopobka », certes écrit en caractères cyrilliques et correspondant à la translittération latine de l’élément « korovka », la chambre de recours a, à juste titre et sans que les parties le remettent en cause, estimé que les lettres utilisées dans cet élément correspondaient à l’alphabet latin. Ainsi, dans la mesure où les alphabets espagnols, allemands et grecs ne comportent pas de caractères cyrilliques, ladite chambre était fondée à supposer que ces deux éléments seront perçus comme deux termes différents en caractères latins, à tout le moins par une grande majorité du public pertinent, qui n’est pas habituée aux caractères cyrilliques.

38      La marque contestée, quant à elle, est un signe figuratif, composé de l’élément verbal « krówka », écrit en lettres majuscules rouges et en gras et placé au milieu sur un fond rectangulaire beige et blanc. En dessous de cet élément figure l’élément verbal « słodkie chwile z dzieciństwa » écrit en rouge dans une taille beaucoup plus petite. Dans la partie supérieure du fond rectangulaire est présent un « dispositif » contenant les éléments verbaux « pokój » et, en dessous en plus petit, « tradycja jakość », écrits en blanc sur fond rouge avec des bordures bleues et blanches et un oiseau représenté au-dessus. Dans la partie inférieure sont positionnés un bidon de lait, deux caramels et une noix de beurre, en dessous desquels figure l’élément verbal « tradycyjna receptura » écrit en rouge. La partie droite du signe correspond à un rectangle composé de quatre photographies en noir et blanc d’enfants qui jouent.

 Sur les éléments dominants et distinctifs des marques en conflit

39      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [voir arrêt du 19 septembre 2018, Eddy’s Snack Company/EUIPO – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Eddy’s Snackcompany), T‑652/17, non publié, EU:T:2018:564, point 39 et jurisprudence citée].

40      Aux fins d’apprécier le caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ses composants en les comparant à celles des autres composants. De manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35, et du 8 février 2007, Quelle/OHMI – Nars Cosmetics (NARS), T‑88/05, non publié, EU:T:2007:45, point 58].

41      Aux fins d’apprécier le caractère distinctif d’un élément composant une marque, il y a lieu d’examiner l’aptitude plus ou moins grande de cet élément à contribuer à identifier les produits ou les services pour lesquels la marque a été enregistrée comme provenant d’une entreprise déterminée et donc à distinguer ces produits ou ces services de ceux d’autres entreprises. Lors de cette appréciation, il convient de prendre en considération notamment les qualités intrinsèques de l’élément en cause au regard de la question de savoir si celui-ci est ou non dénué de tout caractère descriptif des produits ou des services pour lesquels la marque a été enregistrée [arrêts du 13 juin 2006, Inex/OHMI – Wiseman (Représentation d’une peau de vache), T‑153/03, EU:T:2006:157, point 35, et du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 51].

42      S’agissant, dans un premier temps, des éléments dominants des signes en cause, la chambre de recours a considéré que, dans la marque antérieure, les deux éléments verbaux étaient de taille identique et, partant, a conclu que ladite marque ne contenait aucun élément susceptible d’être considéré comme étant plus dominant que l’autre (point 26 de la décision attaquée).

43      Quant à la marque contestée, elle a constaté que les éléments qui étaient visuellement les plus dominants dans cette marque complexe étaient l’élément verbal « krówka » ainsi que le « dispositif » contenant notamment l’élément verbal « pokój », la représentation d’un bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre, et l’image rectangulaire contenant des photographies d’enfants qui jouent, positionnée à droite du signe (point 29 de la décision attaquée).

44      Dans un second temps, la chambre de recours a apprécié le caractère distinctif des éléments composant les marques en conflit. À cet égard, tout d’abord, elle a estimé que les éléments « kopobka », « korovka » et « krówka » seront considérés par le public germanophone, hellénophone et hispanophone comme étant des mots, probablement d’origine slave, sans signification immédiatement perceptible en ce qui concerne les produits en cause et, partant, qu’ils présentaient un degré normal de caractère distinctif (point 31 de la décision attaquée).

45      Ensuite, s’agissant des autres éléments verbaux de la marque contestée, elle a constaté que l’élément « pokój », qui sera perçu comme étant une « marque de maison »  par la grande majorité du public pertinent, et les expressions polonaises « słodkie chwile z dzieciństwa » (doux moments de l’enfance) et « tradycyjna receptura » (recette traditionnelle), ne véhiculaient pas de contenu sémantique clair pour le public du territoire pertinent et avaient donc un caractère distinctif normal par rapport aux produits en cause. En tout état de cause, en raison de leur position accessoire et de leur police de caractères nettement plus petite, ces éléments apparaîtraient comme étant des indications explicatives et seraient clairement secondaires par rapport au « dispositif » contenant notamment l’élément « pokój » ainsi qu’à l’élément « krówka » (point 32 de la décision attaquée).

46      Enfin, quant aux éléments figuratifs de la marque contestée, elle a estimé que, eu égard aux produits en cause, la représentation de l’oiseau possédait un degré normal de caractère distinctif, tandis que celle d’un bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre possédait un caractère distinctif faible dans la mesure où elle faisait allusion aux ingrédients de ces produits. Elle a considéré que les photographies d’enfants qui jouent avaient un caractère distinctif réduit étant donné qu’elles pouvaient indiquer le public cible des caramels et autres confiseries ou faire allusion à une « enfance d’antan » (point 33 de la décision attaquée).

47      S’agissant du « dispositif », dans son ensemble, il rappellerait clairement une « marque de maison » distinctive, en raison de sa composition, de sa position ainsi que des couleurs et de la police de caractères utilisées (point 34 de la décision attaquée). Le fond rectangulaire beige et blanc n’aurait, quant à lui, qu’une simple valeur ornementale, « sans incidence particulière sur le caractère distinctif » de la marque contestée (point 35 de la décision attaquée).

48      En substance, la requérante affirme que l’élément « krówka » est le seul élément dominant de la marque contestée et de nature à indiquer l’origine commerciale des produits en cause que le public percevra. La chambre de recours aurait commis une erreur en tenant également compte, dans l’impression d’ensemble produite par la marque contestée, des éléments verbaux supplémentaires de cette dernière ainsi que de ses éléments figuratifs. En effet, ces éléments verbaux ne seraient pas compris par le public pertinent, seraient de petite taille et seraient perçus comme étant simplement illustratifs, tandis que ces éléments figuratifs seraient purement décoratifs et ne seraient pas positionnés de manière visible dans la marque contestée. S’agissant, plus particulièrement, de l’élément « pokój », la requérante estime que le public pertinent ne le percevra pas comme étant une « marque de maison » et n’y attachera aucune importance étant donné qu’il ne le comprendra pas, qu’il est de taille moindre que l’élément « krówka » et qu’il est moins bien positionné que ce dernier au sein de la marque contestée.

49      En premier lieu, s’agissant des éléments dominants des marques en conflit, il convient de valider l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle aucun des deux éléments verbaux de la marque antérieure de taille identique n’est plus dominant que l’autre.

50      S’agissant de la marque contestée, il doit être rappelé que, selon une jurisprudence constante, lorsqu’un signe consiste à la fois en des éléments figuratifs et en des éléments verbaux, il ne s’ensuit pas automatiquement que c’est l’élément verbal qui doit toujours être considéré comme dominant. En effet, dans le cas d’une marque complexe, l’élément figuratif peut détenir une place équivalente à celle de l’élément verbal [voir arrêt du 6 octobre 2015, Monster Energy/OHMI – Balaguer (icexpresso + energy coffee), T‑61/14, non publié, EU:T:2015:750, point 37 et jurisprudence citée]. En outre, ainsi que cela a déjà été indiqué au point 39 ci-dessus, ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant.

51      De même, il y a lieu de rappeler, à l’instar de l’intervenante, que, conformément à la jurisprudence, le caractère distinctif faible d’un élément d’une marque complexe n’implique pas nécessairement que celui-ci ne puisse constituer un élément dominant, dès lors que, en raison, notamment, de sa position dans le signe, de sa dimension, du caractère secondaire des autres éléments composant ce signe, il est susceptible de s’imposer à la perception du consommateur et d’être gardé en mémoire par celui-ci [voir arrêt du 8 juillet 2020, Pablosky/EUIPO – docPrice (mediFLEX easySTEP), T‑21/19, EU:T:2020:310, point 66 (non publié) et jurisprudence citée].

52      En l’espèce, force est de constater que la chambre de recours a correctement estimé que, outre l’élément « krówka », le « dispositif » et les éléments figuratifs identifiés au point 43 ci-dessus étaient visuellement dominants dans celle-ci. Ces éléments figuratifs non seulement occupent ensemble plus de la moitié de la composition de cette marque, mais aussi y sont clairement visibles.

53      Ainsi, le « dispositif », qui sera perçu comme étant une « marque de maison » (voir point 58 ci-après), ne peut échapper à l’attention du public pertinent, eu égard à sa position dans la partie supérieure de la marque contestée, au fait que l’élément « pokój » qui y figure est écrit en caractères de couleur blanche sur un fond rouge doté de bordures blanches et bleues et tranchant sur le fond rectangulaire beige et blanc, ainsi qu’à la représentation d’un oiseau qui surmonte cet élément et confère à l’ensemble une certaine originalité. De même, l’image d’un bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre est également de nature à s’imposer à la perception du public pertinent et à être gardée en mémoire par celui-ci, du fait de sa taille relativement importante et des sujets qu’elle représente. Quant au rectangle contenant quatre photographies d’enfants qui jouent, il est frappant sur le plan visuel compte tenu de la place importante qu’il occupe dans la marque contestée, à savoir un peu plus du tiers de celle-ci, des sujets représentés et du fait que ces photos sont en noir et blanc, ce qui introduit un contraste avec les autres composants de cette marque.

54      En revanche, les éléments verbaux, constitués des expressions polonaises « tradycja jakość », « słodkie chwile z dzieciństwa » et « tradycyjna receptura », contenus dans la marque contestée jouent un rôle secondaire en raison de leur taille réduite, ainsi que l’a, en substance, considéré la chambre de recours.

55      Il s’ensuit que l’argument de la requérante selon lequel l’élément « krówka », à lui seul, dominerait l’image globale de la marque contestée ne saurait être retenu.

56      En second lieu, s’agissant du caractère distinctif des éléments composant les marques en conflit, il convient de relever que la requérante ne remet pas en cause l’appréciation de la chambre de recours, exempte d’erreur, selon laquelle les éléments « kopobka », « korovka » et « krówka », n’ayant pas de signification pour le public pertinent, présentent un degré normal de caractère distinctif. En revanche, elle dénie tout caractère distinctif aux éléments verbaux supplémentaires de la marque contestée ainsi qu’à ses éléments figuratifs.

57      À cet égard, il y a lieu de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’élément « pokój » ainsi que les expressions de langue polonaise « słodkie chwile z dzieciństwa » et « tradycyjna receptura » figurant dans la marque contestée ne véhiculaient aucun contenu sémantique clair pour le public pertinent en Allemagne, en Grèce et en Espagne et que, partant ils avaient un caractère distinctif normal pour les produits en cause. Contrairement à ce que prétend la requérante dans ce contexte, le seul fait que le public pertinent ne comprenne pas lesdits éléments verbaux n’implique pas nécessairement qu’il les ignorera.

58      S’agissant du « dispositif », c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il sera perçu comme constituant une « marque de maison ». Cela ressort, plus particulièrement, de sa position au-dessus de l’élément « krówka » dans la partie supérieure de la marque contestée, laquelle représente de toute évidence la face avant de l’emballage des produits qu’elle vise. Partant, il y a lieu de reconnaître au « dispositif », ainsi qu’à l’élément « pokój » qu’il contient, un caractère distinctif normal.

59      En ce qui concerne les autres éléments figuratifs de la marque contestée, tout d’abord, eu égard à l’absence de lien direct et clair entre la représentation de l’oiseau et les produits en cause, il y a lieu de valider l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle cette représentation est dotée d’un caractère distinctif normal. Ensuite, c’est également à juste titre que la chambre de recours a retenu que la représentation d’un bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre était dotée d’un caractère distinctif faible dans la mesure où elle pourrait être perçue comme étant une allusion aux ingrédients des produits en cause. Dans le même sens, la chambre de recours était fondée à considérer que les photos d’enfants qui jouent avaient un caractère distinctif seulement faible, étant donné qu’elles pouvaient indiquer le public cible des produits en cause ou, pour une partie du public pertinent susceptible de comprendre la référence à une recette traditionnelle, faire allusion, en raison de l’utilisation du noir et du blanc, à une « enfance d’antan ». Enfin, il n’est pas contesté par la requérante que le fond rectangulaire beige et blanc n’a qu’un caractère purement ornemental et, par conséquent, présente un caractère distinctif faible.

60      Au vu de ce qui précède, il convient de conclure que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant, d’une part, que, dans la marque antérieure, aucun des éléments n’était dominant et que tant « kopobka » que « korovka » étaient distinctifs et, d’autre part, que, s’agissant de la marque contestée, l’élément verbal « krówka », le « dispositif » contenant l’élément « pokój » ainsi que les éléments figuratifs identifiés au point 43 ci-dessus étaient dominants, mais que ces derniers éléments figuratifs étaient faiblement distinctifs à la différence de l’élément verbal « krówka » et du « dispositif » contenant l’élément « pokój » qui présentent un caractère distinctif normal.

 Sur la similitude visuelle

61      La chambre de recours a considéré, aux points 37 à 42 de la décision attaquée, que, dans leur ensemble, les marques en conflit n’étaient pas similaires sur le plan visuel dans la mesure où les différences manifestes qu’elles présentaient contrebalançaient leur seul point de similitude résultant de la coïncidence entre certaines lettres de la marque antérieure et l’un des éléments verbaux de la marque contestée.

62      La requérante considère qu’il existe un degré élevé de similitude visuelle entre les marques en conflit. Tout d’abord, elle fait valoir que, s’agissant de la marque contestée, le public pertinent ne tiendra compte que de l’élément « krówka ». Ensuite, elle invoque le fait que cette marque, dans laquelle l’élément « krówka » est placé sous l’élément « pokój », est structurée de la même manière que la marque antérieure, dans laquelle l’élément « korovka » est placé sous l’élément « kopobka ». Par ailleurs, elle relève que les éléments « krówka », « korovka » et « kopobka » commencent par la lettre « k », comportent la lettre « o » en position intermédiaire et finissent par le groupe de lettres « ka ». L’élément « krówka » ne ferait qu’omettre la première lettre « o » des éléments « korovka » et « kopobka » et remplacer, respectivement, la lettre « v » et la lettre « b » de ces derniers par la lettre « w ». Enfin, elle prétend que le public pertinent se concentrera sur les éléments « krówka » et « korovka » des marques en conflit dès lors qu’il peut facilement les prononcer.

63      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

64      En l’espèce, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours (point 37 de la décision attaquée), que le seul point de similitude sur le plan visuel entre les marques en cause est la coïncidence de certaines lettres dans les éléments verbaux « krówka », « kopobka » et « korovka ». En effet, ces éléments ont en commun les lettres « k », « o » et « a », ainsi que la lettre « r » pour deux d’entre eux chacun d’eux débutant par la lettre « k » et se terminant par les lettres « k » et « a ». Les lettres « r » et « o », en revanche, sont placées dans un ordre différent.

65      Toutefois, la seule présence de lettres communes ne permet pas en soi de conclure à la similitude visuelle des marques en conflit. Ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, dès lors que l’alphabet est composé d’un nombre limité de lettres, lesquelles, au demeurant, ne sont pas toutes utilisées avec la même fréquence, il est inévitable que plusieurs mots se composent du même nombre de lettres et en partagent même certaines, sans qu’ils puissent, de ce seul fait, être qualifiés de similaires sur le plan visuel [voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2019, Pet King Brands/EUIPO – Virbac (SUIMOX), T‑366/18, non publié, EU:T:2019:410, point 96 et jurisprudence citée, et du 26 mars 2020, Conlance/EUIPO – LG Electronics (SONANCE), T‑343/19, non publié, EU:T:2020:124, point 41].

66      De même, il importe de rappeler que, contrairement à la position défendue, en substance, par la requérante en l’espèce, la comparaison visuelle entre les marques en conflit ne saurait se limiter, s’agissant de la marque contestée, au seul élément verbal « krówka ». En effet, ladite marque, qui est une marque complexe représentant la face avant complète d’un emballage, comporte plusieurs autres éléments visuellement frappants qui atténuent sensiblement, dans le cadre d’une impression d’ensemble, l’effet produit par l’unique point de similitude entre ces marques constaté au point 64 ci-dessus. Les éléments supplémentaires non négligeables de la marque contestée, qui ne trouvent aucun équivalent dans la marque antérieure, sont le « dispositif », l’image d’un bidon de lait, de deux caramels et d’une noix de beurre, ainsi que l’image rectangulaire représentant quatre photographies en noir et blanc d’enfants qui jouent.

67      À cet égard, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la circonstance que les deux marques en conflit comprennent des éléments verbaux similaires ne suffit pas, à elle seule, à conclure à l’existence d’une similitude visuelle entre celles-ci, étant donné que la présence d’éléments figuratifs ayant une configuration particulière est susceptible d’aboutir à ce que l’impression globale de chacun des signes soit différente (voir arrêt du 13 décembre 2007, el charcutero artesano, T‑242/06, non publié, EU:T:2007:391, point 58 et jurisprudence citée).

68      L’argument que la requérante tire de ce que la marque contestée est prétendument structurée de la même manière que la marque antérieure ne saurait être accepté, dès lors qu’il repose sur une fragmentation artificielle de la marque contestée et ignore la plupart des éléments visuellement marquants de celle-ci (voir point 52 ci-dessus). Pour les mêmes motifs, il y a lieu de rejeter son argument selon lequel le public pertinent se concentrera sur les éléments « krówka » et « korovka » des marques en conflit, qu’il pourrait aisément prononcer. De surcroît, cet argument ne tient pas compte du fait que la marque antérieure se compose également de l’élément « kopobka », lequel, en raison de son positionnement au-dessus de l’élément « korovka », sera perçu et prononcé avant ce dernier.

69      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de considérer que la chambre de recours était fondée à conclure que, dans l’ensemble, les marques en conflit n’étaient pas similaires sur le plan visuel.

 Sur la similitude phonétique

70      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, aux points 43 et 44 de la décision attaquée, que les marques en conflit présentaient un degré de similitude tout au plus faible sur le plan phonétique.

71      La requérante soutient qu’il existe un degré élevé de similitude sur le plan phonétique entre les marques en conflit. À cet égard, elle avance que les parties finales des éléments « krówka » et « korovka », à savoir « ówka » et « ovka », seront prononcées de manière identique ou quasi identique par le public pertinent. Elle ajoute que les parties initiales desdits éléments, à savoir « kró » et « koro » seront prononcées de manière similaire par ce public dès lors que, d’une part, dans la marque contestée, le son de la lettre « r » est atone, étant dominé par celui de la lettre suivante, à savoir « o », et, d’autre part, dans la marque antérieure, la première lettre « o » ne sera pas « articulée », celle-ci étant placée dans la première syllabe des éléments verbaux qui composent cette marque. Par ailleurs, elle conteste que le rythme et l’intonation des marques en conflit soient différents. La requérante ajoute que, à supposer que les marques en conflit soient prononcées comme « pokój krówka » et « kopobka korovka », il existerait une similitude phonétique en l’espèce, en particulier en ce qui concerne la partie russophone du public pertinent.

72      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

73      Il convient de considérer, à l’instar de la chambre de recours (voir point 43 de la décision attaquée), que, indépendamment des règles de prononciation différentes sur les territoires pertinents, la marque antérieure sera prononcée « kopobka korovka », tandis que la marque contestée sera prononcée « krówka », voire « pokój krówka ».

74      De surcroît, la chambre de recours, au point 44 de la décision attaquée, a déduit, à juste titre, de ce constat que la prononciation des marques en conflit ne coïncidait que par la sonorité de leur première lettre « k » et de leurs deux dernières lettres « k » et « a », leurs autres lettres communes, à savoir « o » et « r » étant placées dans un ordre différent, ce à quoi s’ajoute le fait qu’une partie du public pertinent prononcera également l’élément « pokój » de la marquée contestée, qui différencie davantage la prononciation des marques en conflit. En outre, le rythme et l’intonation de ces marques sont également différents.

75      Partant, la chambre de recours était fondée à conclure que le degré de similitude phonétique des marques en conflit était tout au plus faible.

76      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.

77      D’une part, ainsi que cela a déjà été relevé au point 68 ci-dessus, la requérante omet de tenir compte du fait que la marque antérieure comporte également l’élément « kopobka » et que celui-ci, étant placé au-dessus de l’élément « korovka », sera perçu et prononcé en premier dans cette marque. De surcroît, ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, il ne saurait être exclu que le public pertinent se limite à prononcer l’élément « kopobka » lorsqu’il sera confronté à la marque antérieure. Or, sur le plan phonétique, ce dernier se distingue davantage de l’élément « krówka » en raison de la présence des lettres « p » et « b », du fait qu’il compte une syllabe et une voyelle supplémentaires, et de sa longueur plus importante.

78      D’autre part, même s’il y avait lieu de limiter la comparaison phonétique aux seuls éléments « korovka » et « krówka », comme le fait erronément la requérante, il ne pourrait qu’être constaté que ces éléments diffèrent par leur intonation, le premier comportant une syllabe et une voyelle de plus que le second et étant plus long que ce dernier. De plus, les allégations de la requérante, selon lesquelles le son de la lettre « r » figurant dans la marque contestée est atone et la première lettre « o » des deux éléments de la marque antérieure ne sera pas « articulée », n’étant aucunement étayées, il convient de les écarter.

 Sur la similitude conceptuelle

79      La chambre de recours a conclu, au point 45 de la décision attaquée, à l’absence de similitude conceptuelle entre les marques en conflit.

80      La requérante prétend que, en raison des similitudes que les marques en conflit présenteraient sur les plans visuel et phonétique, le public pertinent, même s’il ne comprend pas la signification de ces marques, supposera qu’il existe également une similitude sur le plan conceptuel entre celles-ci. Au soutien de cette allégation, d’une part, elle avance que la chambre de recours a erronément tenu compte des éléments figuratifs de la marque contestée lors de la comparaison conceptuelle des marques en conflit. Selon elle, en effet, le public pertinent n’attribuera aucune fonction d’indication d’origine à ces éléments figuratifs et ne considérera pas qu’ils ont une signification particulière au sein de la marque contestée. D’autre part, elle affirme que le public pertinent ne comprendra pas la signification des éléments verbaux de cette marque qui lui permettraient de les associer avec ses éléments figuratifs.

81      La requérante ajoute que la décision attaquée est « incohérente » dans la mesure où la chambre de recours n’a pas tenu compte du fait qu’il existe un groupe assez important de russophones en Allemagne, en Espagne et en Grèce. Ces derniers percevraient clairement les éléments « krówka », « kopobka » et « korovka » au sein des marques en conflit. En réponse à une question du Tribunal posée lors de l’audience, la requérante a indiqué qu’il s’agissait d’un argument additionnel relatif à l’existence d’une similitude conceptuelle. De même, elle a affirmé que les milieux professionnels comprendront les trois termes précités en raison de leur similitude.

82      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

83      Force est de constater que, en l’espèce, la chambre de recours a correctement procédé à la comparaison des marques en conflit sur le plan conceptuel en concluant qu’elles n’étaient pas similaires.

84      En effet, ainsi qu’il ressort des considérations énoncées au point 56 ci-dessus, les éléments verbaux composant la marque antérieure sont dépourvus de toute signification pour le public pertinent. De même, les éléments verbaux de la marque contestée ne seront pas compris par ce public. En revanche, les éléments figuratifs de la marque contestée ceux-ci véhiculent certaines notions, en l’occurrence celles des ingrédients des produits en cause et de la tradition (voir point 59 ci-dessus).

85      Quant à l’argumentation avancée par la requérante, reprise au point 80 ci-dessus, force est de constater qu’elle est, comme le fait valoir à juste titre l’intervenante, intrinsèquement contradictoire. En effet, si, comme elle l’affirme, les marques en conflit ne devaient véhiculer aucune signification pour le public pertinent, elles ne sauraient, par définition, présenter la moindre similitude sur le plan conceptuel. Dans une telle hypothèse, la comparaison des marques en conflit devrait, tout au plus, être considérée comme étant neutre sur le plan conceptuel et sans incidence sur l’appréciation de la similitude entre ces marques. De plus, cette argumentation se fonde sur des prémisses relatives à la similitude de ces marques sur les plans visuel et phonétique, qui, au vu des considérations exposées aux points 69 et 75 ci-dessus doivent être écartées comme étant erronées.

86      S’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la circonstance selon laquelle un nombre assez important de personnes parlent le russe en Allemagne, en Espagne et en Grèce, il doit être relevé ce qui suit.

87      Tout d’abord, force est de constater que la requérante n’a pas établi l’exactitude de cette allégation. À cet égard, il y a lieu de relever, à l’instar de l’EUIPO, que les arrêts cités par la requérante au soutien de son allégation ne confirment pas qu’une partie importante des ressortissants allemands, espagnols ou grecs comprend le russe. Ainsi, dans l’arrêt du 19 juillet 2017, Lackmann Fleisch- und Feinkostfabrik/EUIPO (медведь) (T‑432/16, non publié, EU:T:2017:527, points 23, 29 et 31), le Tribunal n’a pas reconnu que les ressortissants allemands, espagnols ou grecs connaissent cette langue. De même, dans son arrêt du 18 juin 2020, Dovgan/EUIPO (C‑142/19 P, non publié, EU:C:2020:487, points 38 à 43), rendu sur pourvoi contre l’arrêt du 13 décembre 2018, Monolith Frost/EUIPO – Dovgan (PLOMBIR) (T‑830/16, EU:T:2018:941), invoqué par la requérante, la Cour a considéré qu’il n’y avait pas lieu pour elle de se prononcer sur une éventuelle erreur commise par le Tribunal dans son arrêt quant à la connaissance de la langue russe par les ressortissants allemands, dès lors que le constat de ce dernier selon lequel il était notoire qu’une partie importante des ressortissants des États baltes comprenait cette langue était suffisant pour justifier la conclusion à laquelle il avait abouti.

88      Quant à l’arrêt du 28 octobre 2015, Rot Front/OHMI – Rakhat (Маска) (T‑96/13, EU:T:2015:813), il est dépourvu de pertinence dans la mesure où, d’une part, il porte sur la question de la définition du public pertinent au regard des critères fixés par le droit national applicable, en l’occurrence le droit allemand, y compris la jurisprudence et la doctrine nationales, et non au regard de la jurisprudence du Tribunal rendue en ce qui concerne l’application du règlement no 207/2009, et, d’autre part, il constate tout au plus l’existence de consommateurs russophones en Allemagne, mais sans donner la moindre indication sur la proportion qu’ils représentent par rapport à l’ensemble des consommateurs pertinents de ce pays.

89      Ensuite, il y a lieu de constater que le terme « krówka », à la différence de « kopobka » et « korovka », est un mot polonais. Dès lors, sa compréhension par le public russophone ne saurait être présumée. À cet égard, il doit être relevé que les allégations de la requérante selon lesquelles les éléments « krówka », « kopobka » et « korovka » seront tous compris par les milieux professionnels ne sont aucunement étayées. De surcroît, il convient de rappeler que le public pertinent en l’espèce est le grand public et non pas le public professionnel (voir point 30 ci-dessus), de sorte que la perception des marques en question par un public professionnel est dénuée de toute pertinence.

90      Enfin, quand bien même une partie du public pertinent comprendrait, de manière égale, les éléments « krówka », « kopobka » et « korovka » comme étant équivalents et signifiant « petite vache », il conviendrait alors de tenir compte du caractère distinctif limité de ces éléments, dans la mesure où, à tout le moins, le terme polonais « krówka » est descriptif des produits en cause, ainsi que l’a établi l’intervenante lors de la procédure administrative (voir point 7 de la décision attaquée). Dans de telles conditions, son impact sur la comparaison conceptuelle serait, en tout état de cause, limité. En effet, il ressort de la jurisprudence que, lorsque les signes ne partagent qu’un terme descriptif, la similitude conceptuelle doit être considérée comme faible [arrêts du 5 octobre 2020, Eugène Perma France/EUIPO – SPI Investments Group (NATURANOVE), T‑602/19, non publié, EU:T:2020:463, point 51, et du 15 octobre 2020, Laboratorios Ern/EUIPO – Bio-tec Biologische Naturverpackungen (BIOPLAST BIOPLASTICS FOR A BETTER LIFE), T‑2/20, non publié, EU:T:2020:493, point 67].

91      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la chambre de recours a conclu à juste titre que, dans l’ensemble, les marques en conflit ne présentaient qu’un faible degré de similitude sur le plan phonétique et qu’elles n’étaient pas similaires sur les plans visuel et conceptuel.

 Sur le risque de confusion

92      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

93      En l’espèce, la chambre de recours a conclu à l’absence de risque de confusion ou d’association dans l’esprit du public pertinent, en dépit de l’identité des produits en cause, en tenant compte, en substance, du fait que les marques en conflit, prises dans leur ensemble, étaient différentes sur le plan visuel, présentaient un degré de similitude tout au plus faible sur le plan phonétique, n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel, que la marque antérieure possédait un caractère distinctif intrinsèque normal et que le degré d’attention du public pertinent était moyen (points 51 à 56 de la décision attaquée).

94      La requérante conteste cette conclusion. Elle fait valoir qu’un risque de confusion « direct » existe eu égard à l’identité des produits en cause, au degré de similitude au moins moyen que présentent ces marques, au caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure, au niveau d’attention faible à moyen du public pertinent et au fait que les produits en cause sont généralement achetés à vue par ce public.

95      La requérante fait également valoir que, dans la décision attaquée, il n’a pas été tenu compte de l’existence d’un risque de confusion « indirect ». Or, selon elle, compte tenu de l’identité des produits en cause, du caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure et du degré de similitude au moins moyen que présentent ces marques, le public pertinent supposera automatiquement qu’il existe des liens juridiques ou économiques entre elle-même et l’intervenante. Elle ajoute que ce public, même s’il devait voir les différences entre les marques en conflit relevées dans la décision attaquée, présumera que la marque contestée est une version fantaisiste de la marque antérieure. Lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a confirmé que, par le risque de confusion, « indirect » elle faisait allusion au risque d’association.

96      L’EUIPO et l’intervenante contestent les allégations de la requérante.

97      En l’espèce, ainsi qu’il a été confirmé, au point 34 ci-dessus, les produits en cause sont identiques. Les marques en conflit, quant à elles, ne sont pas similaires sur les plans visuel et conceptuel et présentent tout au plus un faible degré de similitude phonétique (voir points 69, 75 et 83 ci-dessus).

98      De même, à l’instar de la chambre de recours (voir point 51 de la décision attaquée) et sans que cette constatation soit contestée par la requérante, il convient de considérer que le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure est normal.

99      Il convient d’ajouter que, au vu de la nature des produits en cause, c’est à juste titre que la chambre de recours a souligné, au point 53 de la décision attaquée, que, en l’espèce, l’aspect visuel jouait un rôle plus important dans l’appréciation globale du risque de confusion. En effet, lesdits produits sont des produits de consommation courante qui sont commercialisés d’une telle manière que, habituellement, le public pertinent, lors de leur achat, perçoit la marque qui les désigne de façon visuelle. La faible similitude phonétique constatée entre les marques en conflit ne saurait donc compenser les différences entre ces marques sur les plans visuel et conceptuel.

100    À cet égard, il convient de rappeler que le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une manière telle que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque qui les désigne sous une forme visuelle [arrêt du 11 décembre 2014, Coca-Cola/OHMI – Mitico (Master), T‑480/12, EU:T:2014:1062, point 68].

101    Eu égard aux considérations exposées aux points 97 à 100 ci-dessus et compte tenu du principe d’interdépendance rappelé au point 92 ci-dessus, il y a lieu de constater que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en concluant à l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Le fait, invoqué par la requérante, que le niveau d’attention de ce public puisse varier de faible à moyen (voir point 28 ci-dessus), plutôt qu’être moyen, comme cela a été constaté par la chambre de recours, ne saurait affecter cette conclusion.

102    De surcroît, il y a lieu de rejeter l’affirmation de la requérante selon laquelle le public pertinent, confronté à la marque contestée, supposera qu’il existe des liens juridiques ou économiques entre elle-même et l’intervenante. En effet, les marques en conflit, différant sur les plans visuel et conceptuel et n’étant, tout au plus, que faiblement similaires sur le plan phonétique, un tel risque d’association est à écarter. Par ailleurs, eu égard à ces différences, il est exclu que le public pertinent puisse percevoir la marque contestée comme étant une version fantaisiste de la marque antérieure.

103    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’écarter le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, et, partant, de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

105    La requérante ayant succombé, il convient de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      PAO Moscow Confectionery Factory « Krasnyj Octyabr » est condamnée aux dépens.

Costeira

Kancheva

Zilgalvis

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er juin 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.