Language of document : ECLI:EU:C:2024:268

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCATE GÉNÉRALE

MME TAMARA ĆAPETA

présentées le 21 mars 2024 (1)

Affaire C494/22 P

Commission européenne

contre

République tchèque

« Pourvoi – Ressources propres de l’Union européenne – Droits de douane – Obligations des États membres – Versement à la Commission européenne des montants correspondant à des ressources propres non recouvrées – Enquête sur le contournement des droits antidumping sur des briquets de poche en provenance du Laos – Rapport de mission de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) – Recours fondé sur l’enrichissement sans cause – Articles 268 et 340 du TFUE »






I.      Introduction

1.        La troisième fois sera la bonne, dit-on.

2.        C’est la troisième fois dans la présente affaire que la République tchèque cherche à soumettre aux juridictions de l’Union un litige avec la Commission européenne portant sur son obligation d’abonder les ressources propres de l’Union. Elle fait suite aux tentatives de cet État membre d’exercer, premièrement, un recours en annulation en vertu de l’article 263 TFUE (pour contester la lettre de la Commission demandant le paiement) (2) et, deuxièmement, un recours en carence en vertu de l’article 265 TFUE (en raison de l’absence d’introduction par la Commission d’un recours en manquement à son encontre) (3).

3.        En effet, dans son arrêt de principe dans l’affaire République tchèque/Commission (4), la Cour a estimé que, lorsqu’un État membre est en désaccord avec la Commission quant à ses obligations relatives aux ressources propres, un recours en annulation n’est pas possible, pas plus que la Commission ne peut être tenue d’introduire un recours en manquement. Toutefois, il est loisible à l’État membre de demander réparation en raison de l’enrichissement sans cause de l’Union et d’introduire un recours devant le Tribunal à cet effet.

4.        C’est pourquoi, en pratique, un État membre doit porter le montant de ressources propres de l’Union litigieux au crédit du compte de la Commission afin d’éviter d’avoir à payer des intérêts de retard dans le cas où il succomberait dans le cadre de ce litige. L’État membre peut ensuite, en demandant le remboursement de ce montant dans le cadre d’un recours fondé sur un enrichissement sans cause de l’Union européenne, apporter la preuve que la Commission a demandé à tort le paiement de ce montant.

5.        C’est précisément ce que la République tchèque a fait. Maintenant que l’obstacle procédural a été surmonté, la question de fond soumise à la Cour sur pourvoi est de savoir qui de cet État membre ou de la Commission a correctement interprété les règles budgétaires de l’Union.

6.        Par l’arrêt du Tribunal du 11 mai 2022, République tchèque/Commission (T‑151/20, ci-après l’« arrêt attaqué » EU:T:2022:281 ), le Tribunal a partiellement accueilli le recours de la République tchèque fondé sur l’enrichissement sans cause. Le Tribunal a en substance jugé que la République tchèque pouvait être dispensée de son obligation de verser certains montants de ressources propres qui s’étaient révélés impossibles à recouvrer et qu’elle était en droit d’attendre un rapport de mission transmis par l’Office de lutte antifraude de l’Union européenne (OLAF) (5) avant de prendre les mesures nécessaires pour inscrire ces montants dans les comptes correspondants.

7.        Sur pourvoi, la Commission fait valoir que la République tchèque était tenue, en vertu du droit de l’Union, de payer la totalité des montants litigieux et qu’il n’y a pas eu d’enrichissement sans cause de l’Union.

8.        La présente affaire soulève donc, tant en principe qu’en pratique, d’importantes questions portant sur les obligations des États membres en vertu en vertu du droit de l’Union en matière de ressources propres de l’Union. Il se pose essentiellement deux questions principales. La première exige d’interpréter le droit de l’Union pertinent afin de déterminer si une inscription tardive sur les comptes par un État membre s’oppose à ce que cet État membre soit dispensé de son obligation de mise à disposition des ressources propres. La seconde porte sur le point de savoir si, dans les circonstances particulières de la présente affaire, la République tchèque a tardivement constaté et inscrit les droits revenant à l’Union au motif qu’elle a attendu le rapport de mission de l’OLAF.

II.    Le contexte général

A.      Le système des ressources propres de l’Union et la législation de l’Union applicable

9.        L’Union européenne repose sur un budget équilibré qui est principalement financé par ses propres ressources. Les ressources propres de l’Union sont essentiellement des recettes qui alimentent automatiquement le budget de l’Union, sans qu’aucune décision ultérieure des autorités des États membres ne soit nécessaire (6).

10.      Il existe plusieurs types de ressources propres de l’Union, y compris des ressources propres traditionnelles (ci-après les « RPT ») qui sont principalement des droits de douane sur les produits importés de pays tiers (7). Les RPT constituent une source directe de recettes pour l’Union européenne qui ne dépend pas des contributions des États membres (8). Elles sont entièrement définies par le législateur de l’Union (9) et les États membres agissent comme de purs exécutants dans le cadre de leurs obligations de perception et de transfert de ces ressources (10).

11.      Toutefois, étant donné que l’Union européenne n’a pas ses propres collecteurs de taxes, les États membres doivent percevoir les droits de douane et les verser (les « mettre à disposition » selon la terminologie de la législation de l’Union) au budget de l’Union en les déposant sur un compte au nom de la Commission (tout en étant autorisés à conserver un certain pourcentage de frais de perception).

12.      Ainsi, en résumé, les RPT sont des fonds de l’Union, mais l’Union européenne doit s’appuyer sur les États membres pour les obtenir.

13.      Par conséquent, le système des ressources propres de l’Union est régi par un cadre juridique spécifique de l’Union (11), qui est au cœur de la présente affaire. Dans ce système, les États membres ne disposent d’aucune marge d’appréciation et doivent mettre à disposition des ressources propres conformément aux règles (y compris les délais) prévues par les dispositions de la législation de l’Union en matière de ressources propres (12).

14.      Les dispositions applicables à la présente affaire sont les décisions 2000/597/CE (13) et 2007/436/CE (14) ainsi que le règlement no 1150/2000 (15).

15.      Le règlement no 1150/2000 prévoit des dispositions relatives à la mise à la disposition de la Commission des ressources propres. Cette mise à disposition s’effectue en trois étapes. Premièrement, un État membre doit constater les droits revenant à l’Union ce qui est régi par l’article 2 de ce règlement. Deuxièmement, cet État membre doit reprendre dans la comptabilité ces droits conformément à l’article 6 dudit règlement. Troisièmement, en vertu des articles 9 et 10 de ce même règlement, l’État membre doit mettre à la disposition de la Commission le montant constaté en inscrivant au crédit du compte de cette dernière le montant correspondant à ces droits.

16.      S’agissant de la constatation des droits revenant à l’Union, l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 établit un lien avec la législation douanière de l’Union. Il prévoit que les droits revenant à l’Union au titre des RPT doivent être constatés « dès que sont remplies les conditions prévues par la réglementation douanière en ce qui concerne la prise en compte du montant du droit et sa communication au redevable » (16). En vertu de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, la date à retenir pour la constatation est « la date de la prise en compte prévue par la réglementation douanière ».

17.      S’agissant de la comptabilisation des droits, l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 oblige les États membres à tenir une comptabilité spécifique aux ressources propres (17). En vertu de l’article 6, paragraphe 3, du règlement no 1150/2000, dans le délai prévu (18), les États membres doivent comptabiliser les RPT dans un de deux comptes. Dans une situation normale, à savoir celle dans laquelle ils ont perçu les montants dus ou ils ont reçu une garantie du débiteur, ils comptabilisent les droits dans la comptabilité normale dite « comptabilité A ». Toutefois, si les montants n’ont pas été recouvrés auprès du débiteur ou n’ont pas été garantis par celui-ci ou encore lorsque des montants garantis ont été contestés et sont susceptibles d’être modifiés, les États membres comptabilisent les droits revenant à l’Union dans une comptabilité séparée dite « comptabilité B ».

18.      S’agissant de la mise à disposition de la Commission des ressources propres, l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 prévoit que les États membres doivent inscrire les ressources propres au crédit d’un compte ouvert à cet effet au nom de la Commission selon les modalités définies à l’article 10. En vertu de l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, après déduction des frais de perception, les ressources propres inscrites dans la comptabilité A doivent être inscrites au crédit du compte de la Commission dans un délai reposant sur la date à laquelle les droits ont été constatés, tandis que celles inscrites dans la comptabilité B doivent être inscrites au crédit du compte de la Commission dans un délai reposant sur la date à laquelle les droits ont été recouvrés. En vertu de l’article 11 du règlement no 1150/2000, tout retard dans la mise à la disposition de la Commission des ressources propres donne lieu au paiement d’intérêts de retard.

19.      L’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 impose aux États membres « de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés conformément à l’article 2 soient mis à la disposition de la Commission dans les conditions prévues par le présent règlement ».

20.      Toutefois, en ce qui concerne les droits inscrits dans la comptabilité B, dans sa version applicable à la période en cause, l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, prévoit que les États membres « sont dispensés de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés qui s’avèrent irrécouvrables : a) soit pour des raisons de force majeure ; b) soit pour d’autres raisons qui ne leur sont pas imputables ».

21.      Aux termes de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, les montants de droits constatés sont réputés irrécouvrables « au plus tard après une période de cinq ans à compter de la date à laquelle le montant a été constaté conformément à l’article 2 » ou, en cas de recours, à compter de la date de la notification ou de la publication de la décision définitive. Ces montants irrécouvrables sont définitivement retirés de la comptabilité B (19).

22.      Selon les modalités définies à l’article 17, paragraphes 3 et 4, du règlement no 1150/2000, les États membres sont tenus de rapporter à la Commission les cas dans lesquels les montants irrécouvrables dépassent 50 000 euros (rapports de mise en non‑valeur). La Commission doit ensuite transmettre ses observations en vue d’apprécier la justification par l’État membre de cette communication au titre de l’article 17, paragraphe 2, ainsi que cela s’est produit dans la présente affaire.

B.      Les événements à l’origine de la procédure devant le Tribunal

23.      La présente affaire s’inscrit dans le cadre d’un litige opposant la République tchèque à la Commission quant au point de savoir si cet État membre a constaté tardivement certains montants correspondant aux ressources propres de l’Union parce qu’il avait attendu des informations de l’OLAF. La chronologie des événements qui ont donné lieu à la présente affaire est la suivante.

24.      En 2001, l’Union européenne a institué des droits antidumping sur les briquets de poche originaires de Chine (20). Par conséquent, des efforts ont été déployés pour contourner ces droits antidumping et tenter d’importer ces briquets dans l’Union depuis un certain nombre de pays d’Asie du Sud-Est, dont le Laos, avec de fausses déclarations quant à leur origine en violation du droit de l’Union.

25.      Baide Lighter Industry (LAO) Co., Ltd. est une société au Laos qui a importé des briquets de poche dans l’Union européenne par l’intermédiaire de sa société européenne, Baide International (Europe) s.r.o., à Prague (République tchèque). Ces deux sociétés sont désignées ci-après ensemble par « Baide ».

26.      Le 22 mars 2006, les autorités tchèques ont établi un profil de risque qui indiquait qu’il existait un soupçon raisonnable de contournement de la législation douanière en ce qui concerne les importations de briquets et elles ont imposé des contrôles internes.

27.      Le 13 avril 2006, les autorités tchèques ont envoyé une lettre à l’OLAF, fournissant des informations sur les cas d’importation de briquets et faisant état de soupçons de fraude commis par des entreprises, dont Baide.

28.      Le 28 août 2006, les autorités tchèques ont ouvert une enquête concernant Baide.

29.      Le 2 novembre 2006, les autorités tchèques ont mis à jour le profil de risque.

30.      Le 20 décembre 2006, l’OLAF a ouvert une enquête sur les importations de briquets en provenance du Laos pour la période allant de 2004 à 2006.

31.      Le 30 avril 2007, l’OLAF a adopté une communication d’assistance mutuelle qui a été envoyée aux États membres pour les avertir de la fraude présumée et demander des informations complémentaires.

32.      Du 2 au 26 novembre 2007, une mission de l’Union s’est rendue au Laos et en Thaïlande afin d’enquêter sur le contournement allégué des droits antidumping sur les briquets importés du Laos dans l’Union pour la période allant de 2004 à 2007 (ci-après la « mission »). L’équipe de mission de l’Union européenne était composée de fonctionnaires de l’OLAF et des autorités douanières de la République tchèque, de l’Allemagne et du Royaume-Uni, ces trois États membres étant considérés comme principalement concernés par ce trafic.

33.      Au cours de la mission, le 15 novembre 2007, les membres de l’équipe de mission de l’Union et les autorités du Laos ont établi et signé un document intitulé « Agreed Joint Minutes » (ci-après le « procès-verbal conjoint ») (21). Ce procès-verbal décrivait le contexte et les conclusions de la mission et comportait une série de documents annexés.

34.      Le procès-verbal conjoint se référait notamment à une enquête préliminaire effectuée antérieurement à la mission par les autorités laotiennes qui était parvenue à la conclusion que 96 des 110 envois figurant sur la liste des importations dans l’Union étaient des réexportations de briquets chinois importés, tandis que les 14 envois restants consistaient en des briquets originaires du Laos. Ce procès‑verbal faisait aussi état d’informations et de documents supplémentaires obtenus des autorités laotiennes et à la suite de la visite effectuée dans les locaux de Baide au Laos. Il mentionnait en outre qu’il avait été convenu que les autorités laotiennes effectueraient une nouvelle enquête concernant certains envois supplémentaires identifiés au cours de la mission et que l’équipe de mission de l’Union soumettrait une nouvelle demande à certaines autorités du Laos afin de rechercher des déclarations en douane relatives à tous les envois concernés.

35.      À la suite du retour de la mission, l’OLAF a accepté, au début de l’année 2008, de communiquer à la République tchèque les éléments de preuve recueillis au cours de la mission. Toutefois, l’OLAF a tardé à communiquer son rapport auquel les éléments de preuve étaient joints.

36.      Le 6 mai 2008, Baide a cessé ses activités en République tchèque.

37.      Le 30 mai 2008, l’OLAF a adopté un rapport sur la mission (ci‑après le « rapport de mission de l’OLAF »). Ce rapport contenait un résumé de la mission, les résultats et les recommandations de l’OLAF et était accompagné d’éléments de preuve recueillis au cours de la mission.

38.      Le rapport de mission de l’OLAF a notamment fait un résumé des informations reçues lors de la mission et a fait état de ce que les informations disponibles au Laos, ensemble avec celles fournies par les États membres, permettaient à l’OLAF de préparer un rapport complet d’audit sur 67 envois importés dans l’Union européenne. Ce rapport a conclu que Baide avait importé au Laos depuis la Chine des briquets puis les a réexportés via la Thaïlande vers l’Union européenne, éludant ainsi les droits antidumping.

39.      Les recommandations de l’OLAF figurant dans ce rapport précisaient dans leur partie pertinente : « Il y a lieu de considérer les éléments de preuve de l’origine chinoise établis au cours de la mission d’inspection suffisent pour que les États membres ouvrent une procédure administrative de redressement fiscal ».

40.      Le 9 juillet 2008, le rapport de mission de l’OLAF a été notifié à la République tchèque.

41.      Le 4 août 2008, la République tchèque a reçu une version en langue tchèque du rapport de mission de l’OLAF en réponse à sa demande.

42.      Le 11 août 2008, une réunion a eu lieu entre les autorités tchèques au sujet des suites à donner. Le même jour, les autorités tchèques ont procédé à une inspection des locaux de Baide à Prague et ont découvert que cette société avait été radiée et avait déménagé à compter du 6 mai 2008.

43.      À partir de septembre 2008, les autorités tchèques ont pris des mesures pour ajuster et recouvrer, avec peu de succès, les droits dans 28 cas de briquets importés par Baide en République tchèque et mis en libre pratique entre le 26 septembre 2005 et le 1 mars 2007.

44.      Entre le 22 septembre 2008 et le 18 février 2009, la République tchèque a constaté les droits dus par Baide et a comptabilisé les montants correspondant aux droits constatés, mais non encore recouvrés, en ce qui concerne ces cas dans la comptabilité B conformément à l’article 6, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1150/200.

45.      Le 10 décembre 2008, l’OLAF a adopté un rapport final sur l’enquête sur les importations de briquets en provenance du Laos pour la période allant de 2004 à 2006 (ci-après le « rapport final de l’OLAF »). Il a résumé le contexte et les résultats de la mission et a poursuivi l’évaluation juridique et les conclusions de l’OLAF.

46.      Entre novembre 2013 et novembre 2014, la République tchèque a présenté des rapports à la Commission pour les 28 cas dans lesquels cet État membre estimait devoir être dispensé de l’obligation de mettre ces montants à la disposition de la Commission en vertu de l’article 17, paragraphe 2, du règlement n° 1150/2000 parce qu’un recouvrement était impossible.

47.      Après quelques échanges d’informations, le 20 janvier 2015, la Commission a adressé à la République tchèque une lettre exposant sa position selon laquelle les conditions prévues à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 n’étaient pas satisfaites dans les 28 cas. La Commission a demandé à cet État membre de créditer son compte pour un montant de 53 976 340 couronnes tchèques (CZK) (environ 2 112 708 euros).

48.      Le 17 mars 2015, la République tchèque, après avoir émis des réserves, a versé 75 % de ce montant (40 482 255 CZK, soit environ 1 584 531 euros) sur le compte de la Commission, après déduction des frais de perception de 25 % (22).

C.      La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

49.      Le 16 mars 2020, la République tchèque a introduit devant le Tribunal un recours fondé sur l’enrichissement sans cause de l’Union, en vue d’obtenir le remboursement de ce montant.

50.      Le Royaume de Belgique et la République de Pologne sont intervenus au soutien des conclusions de la République tchèque.

51.      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a accueilli le recours de la République tchèque en ce qui concerne une partie de ce montant.

52.      Premièrement, le Tribunal a jugé que la République tchèque pouvait invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 afin d’être dispensée de son obligation de mettre à la disposition de la Commission les montants en cause, indépendamment du point de savoir si cet État membre n’a pas inscrit dans les délais prévus à l’article 6, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1150/2000 dans la comptabilité B les montants en cause. Le Tribunal a également jugé que la République tchèque avait procédé à une telle inscription en temps utile, dès lors que ces délais devaient être calculés à partir de la date à laquelle les droits ont été effectivement constatés, et non à partir de la date à laquelle ils auraient dû être constatés (points 85 à 93 de l’arrêt attaqué).

53.      Deuxièmement, le Tribunal a constaté que la République tchèque ne pouvait établir les droits de douane dus par Baide qu’à la suite de la réception du rapport de mission de l’OLAF, et que cet État membre n’était pas tenu de le faire au retour de la mission. Le Tribunal a estimé que la République tchèque était en droit d’attendre ce rapport, et non de demander les éléments recueillis au cours de la mission préalable, dès lors que l’OLAF avait accepté de les communiquer au début de l’année 2008, mais a été retardé, et que l’OLAF était le mieux placé pour analyser et vérifier de tels éléments (points 94 à 126 de l’arrêt attaqué).

54.      Troisièmement, le Tribunal a jugé que la cessation des activités de Baide en République tchèque constituait une raison non imputable à cet État membre en vertu de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 qui le dispenser de mettre à disposition les sommes litigieuses, aucun patrimoine ne pouvant plus alors être saisi sur son territoire (points 127 à 137 de l’arrêt attaqué).

55.      Quatrièmement, le Tribunal a toutefois considéré que la République tchèque était tenue, en vertu du droit de l’Union, de constituer une garantie pour les droits antidumping dus par Baide à compter de l’adoption du profil de risque le 22 mars 2006. Sur cette base, le Tribunal a conclu à l’existence d’un enrichissement sans cause de l’Union en ce qui concerne 12 des 28 cas d’importations effectuées avant cette date, mais pas pour les 16 cas effectués par la suite (points 145 à 196 de l’arrêt attaqué).

D.      La procédure devant la Cour

56.      Par son pourvoi introduit le 22 juillet 2022, la Commission demande qu’il plaise à la Cour annuler le point 1) du dispositif de l’arrêt attaqué, rejeter le recours et condamner la République tchèque aux dépens ou, à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue sur les parties des moyens qui n’ont pas été encore examinées et réserver les dépens.

57.      Dans son mémoire en réponse déposé le 8 novembre 2022, la République tchèque demande qu’il plaise à la Cour rejeter le pourvoi comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme mal fondé et condamner la Commission aux dépens.

58.      La Commission et la République tchèque ont également déposé une réplique et une duplique respectivement le 13 mars 2023 et le 21 avril 2023.

59.      Le Royaume de Belgique et la République de Pologne demandent qu’il plaise à la Cour rejeter le pourvoi et condamner la Commission aux dépens.

60.      Par décision du 13 février 2023, le Président de la Cour a admis le Royaume des Pays-Bas à intervenir au soutien de la République tchèque.

61.      Une audience s’est tenue le 10 janvier 2024, au cours de laquelle la Commission, la République tchèque ainsi que les gouvernements belge, néerlandais et polonais ont présenté des observations orales.

III. Analyse

62.      Le recours fondé sur l’enrichissement sans cause de l’Union a été développée par la Cour dans le cadre de la responsabilité non contractuelle de l’Union (23).

63.      Pour qu’un tel recours puisse prospérer, il faut que la République tchèque, en tant que partie requérante, apporte la preuve d’un enrichissement de l’Union pour lequel il n’existe pas de base légale valable ainsi que celle d’un appauvrissement de sa part lié à cet enrichissement (24).

64.      Il n’est pas contesté dans la présente procédure que l’Union européenne a été enrichie par l’appauvrissement corrélatif de la République tchèque puisque cet État membre a payé le montant litigieux de ressources propres de l’Union quand bien même il était en désaccord avec la Commission quant à son obligation de le faire. Dans la présente affaire, le cœur du litige réside plutôt dans le point de savoir s’il existait une base légale valable pour un tel paiement.

65.      Si la République tchèque peut invoquer avec succès l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, il n’existerait alors pas de base légale valable pour demander ce paiement. Dans ce cas, l’Union européenne se serait enrichie sans cause et devrait restituer le montant en question.

66.      Le Tribunal a jugé que la République tchèque pouvait se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 pour demander le remboursement d’une partie du montant porté au crédit du budget de l’Union.

67.      Par son pourvoi, la Commission fait valoir que la République tchèque a constaté et enregistré tardivement les montants, de sorte qu’elle ne pouvait pas invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000. Par conséquent, cet État membre n’était pas dispensé de de son obligation de mettre à la disposition de la Commission la totalité des montants litigieux et aucun montant ne devrait être remboursé.

68.      À l’appui de son pourvoi, la Commission soulève deux moyens. Le premier moyen est tiré de l’interprétation erronée par le Tribunal de l’article 6, paragraphe 3, et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000. Le second moyen est tiré d’une interprétation erronée par le Tribunal de l’article 2, paragraphe 1, et de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, lus en combinaison avec l’article 217, paragraphe 1, du code des douanes et avec l’article 325 TFUE.

69.      En substance, le premier moyen conteste la conclusion du Tribunal selon laquelle un État membre peut se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 même si l’inscription dans la comptabilité B en vertu de l’article 6, paragraphe 3, sous b), dudit règlement a été tardive. Le deuxième moyen conteste la conclusion du Tribunal selon laquelle la République tchèque a procédé à cette inscription en temps utile parce qu’elle était fondée à attendre le rapport de mission de l’OLAF.

70.      La République tchèque, soutenue par les gouvernements belge, néerlandais et polonais, conclut au rejet du pourvoi introduit par la Commission comme irrecevable et, en tout état de cause, mal fondé.

71.      Je commencerai par exposer les raisons pour lesquelles je considère que les arguments avancés par la République tchèque quant à la recevabilité du pourvoi doivent être rejetés (A). Ensuite, je démontrerai les raisons pour lesquelles je considère que le premier moyen (B) et le second moyen du pourvoi (C) sont bien fondés.

A.      La recevabilité

72.      La République tchèque soutient que les deux moyens du pourvoi sont irrecevables, au motif qu’ils ne respectent pas les exigences procédurales, telles qu’interprétées par la jurisprudence de la Cour, quant à la clarté et à la précision du pourvoi et des points contestés de l’arrêt attaqué (25). Cet État membre fait également valoir que certains arguments de la Commission sont nouveaux et n’ont pas été examinés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal (26). Ainsi que la République tchèque l’a souligné lors de l’audience, la Commission a notamment modifié sa position et a avancé de nouveaux arguments fondés sur le procès-verbal conjoint qui n’avaient pas été soulevés devant le Tribunal.

73.      Selon moi, il y a lieu de rejeter les arguments de la République tchèque.

74.      Premièrement, contrairement à ce que soutient cet État membre, les deux moyens du pourvoi indiquent de façon précise les points critiqués de l’arrêt attaqué et exposent les raisons pour lesquelles ces points sont, selon la Commission, entachés d’une erreur de droit, permettant ainsi à la Cour d’exercer son pouvoir d’en contrôler la légalité.

75.      Deuxièmement, contrairement à ce que soutient la République tchèque, la Commission n’a pas soulevé de moyens nouveaux au stade du pourvoi. À cet égard, il ressort des points 94, 95 et 104 de l’arrêt attaqué, de même que des observations écrites de la Commission et de la République tchèque dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, que la Commission s’est fondée sur le procès-verbal conjoint pour faire valoir devant le Tribunal (27) que la République tchèque disposait d’informations suffisantes pour établir la dette douanière au plus tard au retour de la mission. Dans la mesure où, par son argumentation au stade du pourvoi, la Commission vise à démontrer que le Tribunal a jugé à tort que la République tchèque pouvait attendre jusqu’à la remise du rapport de mission de l’OLAF pour établir les montants, il s’agit de l’ampliation d’un moyen soulevé devant le Tribunal, et non d’un moyen nouveau soulevé pour la première fois au stade du pourvoi.

76.      Par conséquent, j’estime que le pourvoi est recevable.

B.      Sur le premier moyen du pourvoi

77.      Par ce premier moyen, la Commission fait grief au Tribunal d’avoir, aux points 85 à 93 de l’arrêt attaqué, interprété de manière erronée l’article 6, paragraphe 3, et l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000.

78.      Le cœur de l’argumentation de la Commission est que la Tribunal a jugé à tort qu’un État membre pouvait invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 quand bien même il a inscrit tardivement les droits dans la comptabilité B en vertu de l’article 6, paragraphe 3, de ce règlement.

79.      La République tchèque, soutenue par les gouvernements belge, néerlandais et polonais, fait valoir que l’interprétation par la Commission du rapport entre l’article 6, paragraphe 3, sous b), et l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 n’est pas étayée par le libellé et les objectifs de ces dispositions. Selon ces États membres, une inscription tardive dans la comptabilité B ne saurait automatiquement avoir pour effet d’exclure qu’un État membre puisse se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2. Selon eux, cela irait à l’encontre de l’intention du législateur de l’Union qui sous-tend cette disposition.

80.      À mon sens, l’interprétation du rapport entre l’article 6, paragraphe 3, sous b), et l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 dépend de la détermination du moment à partir duquel l’inscription des droits est considérée comme tardive. Dès lors que l’inscription est tardive lorsqu’un État membre n’y a pas procédé plus tôt par sa propre faute, il n’y a aucune raison de permettre à cet État membre de se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2. En vertu de cette dernière disposition, un État membre peut être dispensé de l’obligation de créditer le budget de l’Union seulement si la dette s’avère irrécouvrable pour des raisons qui ne sont pas imputables à cet État membre (28).

81.      Je commencerai par analyser la question de savoir à quel moment un État membre doit être considéré comme ayant tardivement procédé à l’inscription des droits et comme ayant violé l’article 6, paragraphe 3. Ensuite, je me pencherai sur le rapport entre l’article 6, paragraphe 3, sous b), et l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 et j’examinerai si une inscription tardive fait obstacle à ce qu’un État membre puisse se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2 pour être dispensé de ses obligations.

1.      À quel moment un État membre a-t-il tardé à inscrire les droits ?

82.      Selon la Commission, l’inscription est tardive si elle a été effectuée après l’expiration du délai calculé à compter de la date à laquelle l’État membre aurait dû constater les droits. En revanche, selon la République tchèque et les États membres intervenants, le délai pour inscrire les droits ne peut commencer à courir qu’à partir de la date à laquelle l’État membre a effectivement constaté les droits.

83.      Tout d’abord, il ressort clairement du libellé du règlement no 1150/2000 et de la jurisprudence de la Cour que la constatation et l’inscription des droits sont étroitement liées (29).

84.      Il découle du libellé de l’article 6, paragraphe 3, sous a), du règlement no 1150/2000 que les droits doivent être inscrits dans la comptabilité ad hoc au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté. Par conséquent, le délai pour inscrire le droit commence à courir à compter de la date à laquelle le droit est constaté.

85.      Si, au cours de ce délai, l’État membre perçoit les droits de douane ou obtient une garantie à leur égard, ces droits à ressources propres sont inscrits dans la comptabilité A. Si, au contraire, l’État membre ne parvient pas à recouvrer la créance ou si la créance fait l’objet d’une contestation, de tels droits sont inscrits dans la comptabilité B. À compter de la date à laquelle le droit est inscrit dans la comptabilité B, l’État membre a l’obligation, en vertu de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, de prendre toutes les mesures nécessaires pour tenter de recouvrer la créance douanière et de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission.

86.      Le délai pour inscrire les droits soit dans la comptabilité A soit dans la comptabilité B est le même et il commence à courir à compter du mois où le droit a été constaté. Ce délai dépend donc de l’article 2 du règlement no 1150/2000 qui fixe la date à laquelle les droits doivent être constatés.

87.      Pour rappel, l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 prévoit que les droits à ressources propres doivent être constatés « dès que sont remplies les conditions prévues par la réglementation douanière en ce qui concerne la prise en compte du montant du droit et sa communication au redevable ». De son côté, l’article 217, paragraphe 1, du code des douanes, dans sa version applicable à la période en cause, prévoit que les droits de douane doivent être « calculé[s] par les autorités douanières dès qu’elles disposent des éléments nécessaires » (30).

88.      En vertu de la jurisprudence, le droit est par conséquent constaté dès que les autorités douanières de l’État membre sont en mesure, d’une part, de calculer le montant des droits résultant d’une dette douanière et, d’autre part, de déterminer le débiteur (31).

89.      Il découle de ce qui précède qu’un État membre a tardé à inscrire les droits dans la comptabilité pertinente (A ou B), et qu’il viole donc l’article 6, paragraphe 3, du règlement no 1150/2000, s’il a tardé à constater le droit. Le retard dans la constatation du droit existe quant à lui dès lors que l’État membre disposait d’informations suffisantes (pour calculer le montant et identifier le débiteur), mais n’a pas constaté le droit.

90.      Par conséquent, le libellé et la structure du règlement no 1150/2000 semblent indiquer l’interprétation correcte est celle proposée par la Commission, à savoir qu’un État membre a tardé à inscrire les droits s’il n’a pas respecté le délai calculé à compter de la date à laquelle les autorités nationales auraient dû constater ces droits, et non à compter de la date à laquelle elles les ont effectivement constatés.

91.      Le gouvernement polonais fait valoir qu’une telle approche autorise des décisions arbitraires. Selon cet État membre, il serait en pratique impossible de respecter la date hypothétique à laquelle les autorités nationales auraient dû constater la dette douanière.

92.      Je ne partage pas l’avis du gouvernement polonais selon lequel la décision sur le point de savoir à quel moment l’État membre aurait dû constater la dette douanière est arbitraire. Cette décision repose sur le point de savoir si les autorités de l’État membre disposaient d’informations suffisantes (sur le montant et sur le débiteur) à la date à laquelle il est considéré que l’État membre aurait dû établir le droit. Dès lors que l’État membre ne disposait pas, ou n’aurait pas pu disposer, d’informations suffisantes, il n’est pas tenu de constater le droit, puisque l’obligation ne naît qu’une fois que l’État membre dispose d’informations suffisantes.

93.      Toutefois, dès lors qu’il peut être démontré qu’un État membre avait, ou aurait pu avoir s’il avait agi de manière proactive, toutes les informations nécessaires, mais n’a pas agi, il y a un retard dans la constatation, et donc également dans l’inscription du droit. Dès lors que l’État membre est resté passif dans l’obtention des informations nécessaires, il ne saurait prétendre qu’il ne pouvait pas établir le droit plus tôt.

94.      Une telle interprétation est conforme à la nécessité d’interpréter strictement les obligations des États membres quant à la constatation et l’inscription des droits de l’Union sur les ressources propres du fait de de la vulnérabilité du système de ressources propres de l’Union qui est totalement tributaire d’une coopération proactive des États membres (32).

95.      L’interprétation selon laquelle le délai dans lequel un État membre doit inscrire dans la comptabilité les droits aux ressources propres doit être appréciée à compter de la date à laquelle les droits auraient dû être constatés, et non à compter de celle à laquelle ils l’ont effectivement été, est également étayée de longue date par la jurisprudence (33). À cet égard, la Cour a jugé que, si une erreur commise par les autorités douanières d’un État membre a pour effet que le redevable ne doit pas acquitter le montant des droits concernés, elle ne saurait remettre en cause l’obligation de l’État membre en question de payer des intérêts de retard ainsi que les droits qui auraient dû être constatés dans le cadre de la mise à disposition des ressources propres (34). En outre, la Cour a récemment jugé dans l’arrêt Commission/Royaume-Uni (35) que le Royaume-Uni n’a pas pris en compte l’intégralité des droits de douane dus et n’a, par voie de conséquence, pas non plus constaté, ni mis à la disposition de la Commission, l’intégralité des ressources propres relatives auxdites importations au moment où celles-ci auraient dû l’être (36).

96.      Par conséquent, en ce qui concerne la question de savoir quand un État membre a tardivement inscrit des droits, je propose à la Cour d’accepter l’interprétation avancée par la Commission selon laquelle le délai pour inscrire le droit commence à courir à partir du moment où l’État membre aurait dû constater le droit, et non à partir du moment où il l’a effectivement constaté.

2.      Un État membre peut-il se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 s’il a tardivement inscrit les droits dans la comptabilité ? 

97.      Pour étayer son argument selon lequel un État membre ne peut pas se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement n° 1150/2000 s’il a tardé à constater et à inscrire le droit, la Commission s’appuie sur l’arrêt Commission/Italie (37). La Commission estime qu’il découle de cet arrêt que l’article 17, paragraphe 2, ne s’applique que si l’intégralité de la procédure douanière a été menée dans le respect du droit de l’Union et donc que les délais pour constater les droits de douane et pour les inscrire dans la comptabilité B ont été respectés.

98.      La République tchèque, soutenue par les gouvernements belge, néerlandais et polonais, fait valoir que l’arrêt Commission/Italie, précité, n’est pas applicable en l’espèce, car il résultait de circonstances différentes.

99.      Je suis encline à partager l’avis de ces États membres selon lequel la conclusion pour laquelle plaide la Commission ne découle pas directement de l’arrêt Commission/Italie, précité.

100.  Cet arrêt est intervenu dans une situation dans laquelle les autorités douanières italiennes avaient accordé des autorisations en violation de la législation douanière de l’Union qui ont eu pour conséquence un détournement de ressources propres d’un montant supérieur à 22 millions d’euros. L’Italie avait inscrit ce montant dans la comptabilité B en vertu de l’article 6, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1150/2000 et a ensuite tenté de se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, dudit règlement au motif que la violation ne lui été pas imputable (38).

101. La Cour a jugé que l’Italie avait manqué à ses obligations en ne mettant pas les montants litigieux à la disposition de la Commission. La Cour a notamment jugé, au point 65 de l’arrêt Commission/Italie que, pour qu’un État membre puisse être dispensé de son obligation de mettre à disposition des droits constatés, il fallait non seulement que les conditions énoncées à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 soient respectées, mais aussi que ces droits aient été régulièrement inscrits dans la comptabilité B. Ainsi que la Cour l’a expliqué au point 68 de cet arrêt, l’inscription dans la comptabilité B traduit une situation exceptionnelle. Par conséquent, la Cour a jugé, au point 69 de ce même arrêt, que, « afin de bénéficier d’une telle situation exceptionnelle, il est nécessaire que l’inscription des droits dans la comptabilité B ait été effectuée par les États membres dans le respect du droit de l’Union » (39).

102. Sur cette base, la Cour a jugé que, si le comportement des autorités nationales avait été conforme aux obligations imposées par le droit de l’Union, les droits sur les ressources propres auraient été constatés et inscrits dans la comptabilité A. L’Italie ne saurait faire valoir que les conditions d’une inscription dans la comptabilité B sont remplies puisque, en n’ayant pas constaté les droits, l’Italie a elle-même provoqué l’émergence des conditions d’application de l’article 6, paragraphe 3, sous b), du règlement no 1150/2000. Les autorités italiennes ayant irrégulièrement inscrit les droits sur les ressources propres dans la comptabilité B, les dispositions de l’article 17, paragraphe 2, du règlement nº 1150/2000 ne lui sont pas applicables (40).

103. Par conséquent, à mon sens, l’arrêt Commission/Italie portait sur une situation dans laquelle l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 a été jugé non applicable parce que les droits avaient été irrégulièrement inscrits dans la comptabilité B alors qu’ils auraient dû l’être dans la comptabilité A et non parce que les droits avaient été tardivement inscrits dans la comptabilité B (41).

104. En l’espèce, il n’est pas certain que, si la République tchèque avait constaté les droits plus tôt, elle aurait pu les inscrire dans la comptabilité A. Il est fort vraisemblable qu’elle aurait malgré tout dû les inscrire dans la comptabilité B. Toutefois, ce qui rend tardive leur inscription dans la comptabilité B est que cet État membre soit resté passif à un moment où il était possible de se procurer les informations nécessaires à la constatation des droits.

105. Au point 69 de l’arrêt Commission/Italie, la Cour n’a pas spécifiquement examiné si l’expression « dans le respect du droit de l’Union » visait la situation dans laquelle le droit a été régulièrement inscrit dans la comptabilité B, mais dans laquelle cette inscription elle-même aurait pu être effectuée plus tôt. Par conséquent, cet arrêt ne peut donc pas en lui-même conduire à en conclure qu’une inscription tardive fait automatiquement obstacle à ce qu’un État membre puisse invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000.

106. Néanmoins, le sens de l’arrêt Commission/Italie semble indiquer que l’interprétation correcte du rapport entre l’article 6, paragraphe 3, et l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 est qu’un État membre ne saurait se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, s’il a tardé à constater et à inscrire le droit.

107. La République tchèque soutient qu’une telle interprétation de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 irait à l’encontre de l’intention du législateur de l’Union de dispenser un État membre lorsqu’il n’est pas à l’origine de l’impossibilité de recouvrer les droits et n’a pas été en mesure de l’empêcher.

108. Selon mon interprétation, l’intention sous-tendant l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 repose sur le fait que les droits de douane sont une source directe du budget de l’Union, payable par les importateurs, et non par les États membres. Ces derniers ne sont que des intermédiaires dans la perception de ces recettes. Par conséquent, si l’impossibilité de recouvrer la dette est imputable à l’importateur, et non à l’État membre d’importation, le budget de l’Union doit accepter la perte.

109. En revanche, l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 n’a pas de lien avec une situation dans laquelle l’impossibilité de recouvrer la dette est imputable à l’État membre, y compris en raison de son absence d’engagement proactif pour constater et recouvrer en temps utile la dette.

110. Comme cela a déjà été expliqué, le caractère tardif de la constatation et de l’inscription dans la comptabilité est imputable à l’État membre. La constatation tardive signifie précisément qu’un État membre n’a pas constaté le droit, même s’il avait pu le faire. L’État membre ne saurait soutenir qu’il n’a pas pu constater plus tôt le droit s’il est resté passif dans l’obtention des informations nécessaires.

111. Par conséquent, une interprétation en vertu de laquelle un État membre ne saurait se prévaloir de l’article Article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 s’il a tardé à constater et inscrire le droit ne va pas à l’encontre de l’intention du législateur de l’Union ainsi que l’entend la République tchèque.

112. Ainsi que l’a jugé la Cour, la dispense des obligations telle qu’elle est prévue à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 est, par nature, exceptionnelle et un État membre ne peut s’en prévaloir que pour une raison qui ne peut pas lui être imputable (42). L’interprétation stricte du règlement no 1150/2000 est justifié par la nécessité d’inciter les États membres à établir et à percevoir de manière proactive les ressources propres de l’Union, étant donné que ces recettes sont totalement tributaires d’un comportement coopératif des États membres (voir, également, point 94 des présentes conclusions).

113. La Commission fait en outre valoir que si un État membre était en droit de se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, même si le défaut de constatation du droit lui est imputable, cela aurait des conséquences néfastes pour les intérêts financiers de l’Union européenne.

114. La République tchèque et les États membres intervenants soutiennent qu’aucune conséquence néfaste de ce type n’est susceptible de se produire ; dès lors que le non‑recouvrement de dettes douanières résulte d’une constatation tardive des droits de douane imputable aux autorités nationales, les conditions de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 ne seront pas satisfaites. Ainsi, le budget de l’Union ne subirait pas de préjudice.

115. Cet argument avancé par ces États membres amène à en conclure qu’il importe peu de savoir si un État membre peut ou non invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 lorsqu’il a tardé à constater et à inscrire les droits puisque, dans une telle situation, un État membre ne pourra pas être dispensé de son obligation de mettre le montant en cause à la disposition de la Commission. Cela suscite donc la question de savoir pourquoi un État membre, qui a constaté le droit plus tardivement qu’il n’aurait dû, serait autorisé à même invoquer l’article 17, paragraphe 2, s’il est déjà su à l’avance que les conditions exigées par cette disposition ne sont pas satisfaites.

116. À mon sens, dès lors qu’une interprétation selon laquelle un État membre pourrait, même s’il a tardé, invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement n° 1150/2000 serait acceptée, cela pourrait nuire à l’efficacité du système des ressources propres de l’Union car cela autoriserait des exceptions à l’obligation des États membres de constater et d’inscrire les droits en temps utile.

117. En tant qu’argument supplémentaire à l’encontre de l’interprétation proposée par la Commission, les gouvernements belge et néerlandais soulignent que des modifications ultérieures de la législation de l’Union, par l’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 qui succède à l’article 17, paragraphe 2, du règlement n° 1150/2000 (43), conforte la position selon laquelle une inscription tardive ne saurait automatiquement faire obstacle à ce qu’un État membre se prévale de cette dispense.

118. Cet argument ne me convainc pas davantage.

119. L’article 13, paragraphe 2, du règlement no 609/2014 a introduit une situation supplémentaire dans laquelle un État membre peut être dispensé de ses obligations en matière de ressources propres. Cet article dispose dans sa partie pertinente :

« Les États membres sont également dispensés de l’obligation de mettre à la disposition de la Commission les montants correspondant aux droits constatés en vertu de l’article 2 lorsqu’ils prouvent qu’une erreur commise par l’État membre après la constatation de ces droits, telle que celles conduisant à une inscription tardive dans la comptabilité séparée, n’a eu aucune incidence sur l’irrécouvrabilité du montant correspondant aux droits relevant de l’article 2 » (44).

120. Ainsi qu’il ressort de son libellé, cette disposition vise des erreurs administratives commises après la constatation régulière des droits. Il semble donc que cette disposition vise une situation différente de celle qui s’est produite dans la présente affaire dans laquelle ce qui est en cause est la constatation en temps utile.

121. Par conséquent, cet argument n’infirme pas la conclusion selon laquelle un État membre qui a tardé à constater et à inscrire des droits ne saurait se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000.

122. Au vu des considérations qui précèdent, j’estime donc que le premier moyen est bien fondé.

C.      Sur le second moyen du pourvoi

123. Par ce second moyen, la Commission reproche au Tribunal d’avoir, aux points 94 à 126 de l’arrêt attaqué, interprété de manière erronée l’article 2, paragraphe 1, et l’article 17, paragraphe 1, du règlement nº 1150/2000, lus conjointement avec l’article 217, paragraphe 1, du code des douanes et l’article 325 TFUE, en concluant que la République tchèque était en droit d’attendre le rapport de mission de l’OLAF avant de prendre des mesures pour constater et inscrire les droits en cause.

124. Selon la Commission, les éléments de preuve annexés au procès‑verbal conjoint suffisaient à mettre la République tchèque en mesure de constater la dette douanière au plus tard au retour de la mission. Les éléments de preuve n’ayant pas été sollicités auprès de l’OLAF au retour de la mission, la dette douanière a été constatée tardivement et les montants correspondant à cette dette ont été inscrits tardivement dans la comptabilité B.

125. La République tchèque, soutenue par les gouvernements belge, néerlandais et polonais, fait valoir qu’elle pouvait légitimement s’attendre à ce que l’OLAF respecte ses engagements, conformément au principe de coopération loyale prévu à l’article 4, paragraphe 3, TUE et ne saurait se voir reprocher le retard pris par l’OLAF. Selon la République tchèque, l’OLAF savait que celle-ci était dans l’attente de son évaluation et de la transmission des éléments de preuve recueillis au cours de la mission. Par conséquent, il ne saurait être reproché à la République tchèque de ne pas avoir demandé ces preuves plus tôt.

126. À mon avis, le Tribunal a commis une erreur d’interprétation du droit applicable en jugeant que la République tchèque pouvait attendre le rapport de mission de l’OLAF pour constater les droits de l’Union sur les ressources propres dans les circonstances de l’espèce.

127. Ainsi que l’a indiqué la Commission, l’article 2, paragraphe 1, et l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, lus conjointement avec l’article 217, paragraphe 1, du code des douanes, exigent que l’État membre prenne dès que possible les mesures nécessaires pour constater les droits sur les ressources propres de l’Union européenne.

128. En vertu de l’article 325, paragraphe 1, TFUE également invoqué par la Commission, il incombe aux États membres de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir le prélèvement effectif et intégral des droits de douane et, partant, des montants correspondants de ces ressources (45).

129.  Il résulte de ces dispositions que l’obligation de constater les droits sur les ressources propres pèse sur les États membres.

130. La jurisprudence de la Cour confirme une telle position. La Cour a ainsi jugé que « en l’état actuel du droit de l’Union, la gestion du système des ressources propres de l’Union est confiée aux États membres et relève de la seule responsabilité de ces derniers » (46).

131. Il est exact que le principe de coopération loyale oblige les États membres et l’OLAF à coopérer entre eux (47).

132. Toutefois, le fait que, conformément à la législation pertinente de l’Union (48), l’OLAF doit informer les États membres (et le Parlement européen) et établir des rapports et que ces rapports constituent des éléments de preuve admissibles dans les États membres ne modifie pas les responsabilités qui incombent aux États membres dans le système des ressources propres de l’Union.

133. Par conséquent, l’absence de transmission par l’OLAF à la République tchèque des informations nécessaires comme promis ne saurait excuser que cet État membre n’ait pas adopté une position proactive et n’ait pas sollicité ces informations auprès de l’OLAF.

134. La législation de l’Union relative à l’OLAF conforte cette position.

135. Le règlement no 1073/1999 vise à conserver « la répartition et l’équilibre actuels des responsabilités entre le niveau national et le niveau [de l’Union] » et « ne diminue en rien les compétences et responsabilités des États membres pour prendre les mesures pour combattre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers [de l’Union] » (49).

136. En outre, l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 1073/1999 prévoit que selon le règlement 1073/1999, l’OLAF « peut transmettre à tout moment aux autorités compétentes des États membres concernés des informations obtenues au cours d’enquêtes externes » (50).

137. De même, l’article 21, paragraphe 3, du règlement no 515/97 indique que les informations obtenues dans le cadre de missions doivent être transmises par l’OLAF aux autorités compétentes des États membres « sur demande de ces derniers ».

138. L’ensemble des considérations qui précèdent plaident en faveur d’une interprétation selon laquelle un État membre ne saurait être excusé d’avoir tardé parce qu’il a attendu passivement que l’OLAF lui transmette des informations.

139. Cette position est corroborée par la jurisprudence. Dans l’arrêt Commission/Royaume-Uni (51) qui concernait une fraude douanière sur les produits textiles et les chaussures en provenance de Chine, la Cour a jugé que cet État avait violé, notamment, ses obligations au titre de la législation de l’Union en matière de ressources propres de mettre les RPT à la disposition de la Commission. Selon la Cour, l’application du droit douanier de l’Union incombant aux États membres qui en sont exclusivement responsables, le Royaume-Uni était tenu d’appliquer les mesures appropriées afin de constater correctement ces droits et ne pouvait par conséquent pas tirer profit de sa propre inaction pour justifier le défaut de mise à disposition des ressources propres. Les informations fournies par l’OLAF pouvaient tout au plus constituer un outil complémentaire, mais ne pouvaient pas se substituer aux informations qu’il incombe aux États membres d’obtenir (52).

140. Cela m’amène à conclure que, dans les circonstances particulières de la présente affaire, la République tchèque ne saurait être excusée d’avoir tardivement constaté et inscrit des droits sur les ressources propres pour avoir attendu le rapport de mission de l’OLAF avant de prendre les mesures nécessaires pour constater les droits de douanes dus par Baide.

141. Il convient de rappeler que, selon la chronologie des événements exposée aux points 26 à 44 des présentes conclusions :

– la République tchèque a adopté le profil de risque en 2006, de sorte qu’elle avait connaissance de la suspicion de fraude aux droits antidumping de l’Union ;

– la mission du mois de novembre 2007 a confirmé l’existence d’une fraude douanière et, ainsi qu’il ressort du compte rendu conjoint, au cours de cette mission, les autorités tchèques ont été informées de documents prouvant que Baide avait éludé des droits antidumping de l’Union pour de nombreuses importations de briquets de poche ;

– la République tchèque a attendu la réception du rapport de mission de l’OLAF du mois de juillet 2008 et de la version en langue tchèque au mois d’août 2008. Ainsi que la République tchèque l’a confirmé lors de l’audience, elle n’a pas communiqué avec l’OLAF pour tenter d’obtenir plus tôt les documents. La République tchèque n’a rien fait, l’OLAF ayant promis que les informations seraient transmises ;

– la République tchèque n’a commencé à agir qu’au moins d’août 2008, soit environ neuf mois après la mission de novembre 2007, et

– la République tchèque n’a constaté et inscrit les droits de l’Union sur les ressources propres qu’à partir du mois de septembre 2008, soit près de dix mois après la mission de novembre 2007.

142. Dans ces conditions, je considère qu’il n’est pas objectivement raisonnable pour un État membre d’attendre au moins neuf mois après avoir eu confirmation de ce qu’une fraude a été commise.

143. Par conséquent, la République tchèque a tardé à effectivement constater et inscrire les droits sur les ressources propres de l’Union du simple fait qu’elle a attendu passivement que les informations soient fournies par l’OLAF.

144. Cela n’excuse pas l’OLAF de ne pas avoir transmis les informations promises. Je peux souscrire aux arguments du gouvernement belge selon lesquels les services de la Commission, tels que l’OLAF, ne devraient pas être autorisés à être négligents dans l’exercice de leurs fonctions.

145. Néanmoins, la violation par l’OLAF de ses obligations ne dispense pas un État membre de sa propre obligation de tout mettre en œuvre afin que des droits sur les ressources propres de l’Union puissent être constatés et inscrits en temps utile.

146. Contrairement à ce que soutient la République tchèque, les engagements pris par l’OLAF sont dénués de pertinence, car ils ne se substituent pas aux responsabilités incombant aux États membres de faire tout ce qui est en leur pouvoir.

147. Au vu des considérations qui précèdent, j’estime donc que le second moyen est bien fondé.

IV.    Les conséquences

148. Les premier et second moyens du pourvoi sont, à mon avis, bien fondés. En conséquence, il y a lieu d’annuler le point 1 du dispositif de l’arrêt attaqué.

149. Conformément à l’article 61, premier alinéa, deuxième phrase, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, la Cour peut, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé. J’estime que tel est le cas en l’espèce.

150. Il résulte de mon analyse du premier moyen du pourvoi qu’un État membre ne saurait invoquer l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 dès lors qu’il a tardé à constater et à inscrire les droits sur les ressources propres. Il résulte également de mon analyse du second moyen que, dans les circonstances particulières de la présente affaire, la République tchèque a constaté et inscrit tardivement les droits en cause. En conséquence, la République tchèque ne saurait se prévaloir de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 pour être dispensée de son obligation de mettre les montants litigieux à la disposition de la Commission et elle était tenue de créditer le compte de la Commission. Partant, il existait une base juridique valable pour le paiement et il n’y a pas d’enrichissement sans cause de l’Union en l’espèce. Je propose donc à la Cour de rejeter le recours fondé sur l’enrichissement sans cause de l’Union introduit par la République tchèque devant le Tribunal.

V.      Les dépens

151. En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

152. Conformément à l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République tchèque aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission en première instance et dans la procédure de pourvoi.

153. En outre, en vertu de l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, il y a lieu de condamner le Royaume de Belgique et la République de Pologne à supporter leurs propres dépens afférents tant à la procédure de première instance qu’à celle de pourvoi et de condamner le Royaume des Pays-Bas à supporter ses propres dépens afférents à la procédure de pourvoi.

VI.    Conclusion

154. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je propose à la Cour :

–      de juger les premier et second moyens du pourvoi bien fondés ;

–      d’annuler le point 1 du dispositif de l’arrêt du Tribunal du 11 mai 2022, République tchèque/Commission (T‑151/20, EU:T:2022:281) ;

–      de rejeter le recours fondé sur l’enrichissement sans cause de l’Union introduit par la République tchèque devant le Tribunal ;

–      de condamner la République tchèque aux dépens exposés par la Commission européenne en première instance et dans la procédure de pourvoi, et

–      de condamner le Royaume de Belgique et la République de Pologne à supporter leurs propres dépens afférents à la procédure de première instance et à la procédure de pourvoi et condamner le Royaume des Pays-Bas à supporter ses propres dépens afférents à la procédure de pourvoi.


1      Langue originale : l’anglais.


2      Voir ordonnance du 28 juin 2018, République tchèque/Commission (T‑147/15, non publiée, EU:T:2018:395) par laquelle le Tribunal a jugé le recours irrecevable ; cette ordonnance a été confirmée sur pourvoi par arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530).


3      Voir ordonnance du 30 septembre 2020, République tchèque/Commission (T‑13/19, non publiée, EU:T:2020:455) rendue à la suite du désistement de la République tchèque.


4      Voir arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, points 52 à 84).


5      L’OLAF est un service ou office au sein de la Commission. Il a été institué en 1999 afin de renforcer la lutte contre la fraude ou toute autre activité illégale portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne. Voir, notamment, articles 1er et 2 ainsi que considérants 1 à 4 de la décision 1999/352/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 28 avril 1999, instituant l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 1999, L 136, p. 20).


6      Commission européenne, Les finances publiques de l’Union européenne, quatrième édition, Office des publications officielles des Communautés européennes, Luxembourg, 2008, p. 135.


7      Les autres catégories de ressources propres de l’Union sont celles reposant sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), sur le revenu national brut (RNB) et sur les déchets d’emballages en plastique non recyclés (introduite en 2021).


8      En 2022, les RPT représentaient environ 16 % des recettes provenant des ressources propres pour une valeur de 23,5 milliards d’euros. Voir communication de la Commission au parlement européen, au Conseil et à la Cour des comptes, comptes annuels consolidés de l’Union européenne pour l’exercice 2022, COM(2023) 391 final, 28 juin 2023, point 5.1, p. 25 et point 3.6.1, p. 159.


9      Depuis la décision 70/243/CECA, CEE, Euratom, du 21 avril 1970, relative au remplacement des contributions financières des États membres par des ressources propres aux Communautés (JO 1970, L 94, p. 19).


10      Voir conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Commission/Danemark, (C‑392/02, EU:C:2005:142, point 11). Voir, également, conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans les affaires Commission/Finlande (C‑284/05, C‑294/05, C‑372/05, C‑387/05, C‑409/05, C‑461/05 et C‑239/06, EU:C:2009:67, point 72, note en bas de page 39), qui relève que les droits de douane « sont dénommés ressources propres “traditionnelles” ou “par nature”, puisque leur perception dépend exclusivement des politiques [de l’Union] et non de la volonté des États [membres] ».


11      Au fil des ans, le Conseil a adopté des décisions établissant le système des ressources propres qui, sur le fondement de l’actuel article 331, troisième alinéa, TFUE, doivent être approuvées par les États membres, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. Ces décisions sont mises en œuvre par des règlements que le Conseil adopte après approbation du Parlement sur le fondement de l’article 311, quatrième alinéa, TFUE ou après consultation du Parlement européen et de la Cour des comptes sur le fondement de l’article 322, paragraphe 2, TFUE.


12      Dans ses arrêts du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, point 62) et du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 345), la Cour a souligné que la gestion du système des ressources propres de l’Union est confiée aux États membres et que les obligations de perception, de constatation et de mise à disposition de ces ressources propres s’imposent directement aux États membres en vertu de la législation de l’Union en matière de ressources propres.


13      Décision Euratom du Conseil du 29 septembre 2000 relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2000, L 253, p. 42).


14      Décision Euratom du Conseil du 7 juin 2007 relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2007, L 163, p. 17).


15      Règlement (CE, Euratom) nº 1150/2000 du Conseil du 22 mai 2000 portant application de la décision 94/728/CE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés (JO 2000, L 130, p. 1) tel que modifié par le règlement (CE, Euratom) no 2028/2004 du Conseil du 16 novembre 2004 (JO 2004, L 352, p. 1) et par le règlement (CE, Euratom) no 105/2009 du Conseil du 26 janvier 2009 (JO 2009, L 36, p. 1). Par la suite, le règlement no 1150/2000 a été abrogé par le règlement (UE, Euratom) no 609/2014 du Conseil du 26 mai 2014 relatif aux modalités et à la procédure de mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB et aux mesures visant à faire face aux besoins de trésorerie (JO 2014, L 168, p. 39), tel que modifié en dernier lieu par le règlement (UE, EURATOM) 2022/615 du Conseil, du 5 avril 2022, modifiant le règlement (UE, Euratom) no 609/2014 afin de renforcer la prévisibilité pour les États membres et de clarifier les procédures de résolution des contentieux lors de la mise à disposition des ressources propres traditionnelles, de la ressource propre fondée sur la TVA et de la ressource propre fondée sur le RNB (JO 2022, L 115, p. 51).


16      L’article 217, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1, ci-après le « code des douanes ») disposait, dans sa version applicable à la période en cause : « Tout montant de droits à l’importation ou de droits à l’exportation qui résulte d’une dette douanière, ci-après dénommé “montant de droits”, doit être calculé par les autorités douanières dès qu’elles disposent des éléments nécessaires et faire l’objet d’une inscription par lesdites autorités dans les registres comptables ou sur tout autre support qui en tient lieu (prise en compte) ». Ce règlement a été abrogé le 30 octobre 2013 par le règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union (JO 2013, L 269, p. 1), qui, à cet égard, prévoit des dispositions similaires (voir articles 101, paragraphe 1, et 104, paragraphe 1, de ce règlement).


17      Aux termes du considérant 11 du règlement no 1150/2000, « [i]l y a lieu de prévoir une comptabilité séparée notamment pour les droits non recouvrés. Cette comptabilité, ainsi que la transmission d’un relevé trimestriel de celle-ci doivent permettre à la Commission de mieux suivre l’action des États membres en matière de recouvrement de ces ressources propres, et notamment de celles mises en cause par des fraudes et irrégularités ».


18      À savoir, « au plus tard le premier jour ouvrable après le 19 du deuxième mois suivant celui au cours duquel le droit a été constaté ».


19      Voir article 17, paragraphe 2, cinquième alinéa, du règlement no 1150/2000.


20      Il s’agissait de briquets de poche avec pierre, à gaz, non rechargeables et rechargeables. Voir règlement (CE) no 1824/2001 du Conseil du 12 septembre 2001 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de briquets de poche avec pierre, à gaz, non rechargeables, originaires de la République populaire de Chine et expédiés ou originaires de Taïwan, et sur les importations de certains briquets de poche avec pierre, rechargeables, originaires de la République populaire de Chine et expédiés ou originaires de Taïwan (JO 2001, L 248, p. 1).


21      Agreed Joint Minutes, Ventiane, 15 novembre 2007, Community Mission of administrative co-operation for the Verification of origin of flint operated lighters exported from Lao P.D.R. to the European Community, République démocratique populaire lao, 6 au 16 novembre 2007.


22      Par la suite, le 22 décembre 2016, la République tchèque a payé en sus à la Commission 5 % de ce montant, correspondant à la réduction de 25 % à 20 % du taux de frais de perception à la suite d’une modification rétroactive de la législation de l’Union applicable. Plus tard, la République tchèque s’est désistée de sa demande de remboursement de ce montant supplémentaire qui ne fait donc pas l’objet de la présente affaire. Voir points 15 et 29 de l’arrêt attaqué.


23      Dans l’arrêt du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission (C‑47/07 P, EU:C:2008:726, points 44 à 50), la Cour a admis pour la première fois qu’un recours fondé sur l’enrichissement sans cause de l’Union européenne était ouvert afin de garantir une protection juridictionnelle effective. Dans l’arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, notamment points 81 à 84), la Cour a jugé qu’un tel recours pouvait être utilisé dans une situation telle que celle en cause dans la présente affaire. Voir Bačić Selanec, N., « A (more) complete system of remedies : Effective judicial protection of EU Member States in Czech Republic v. Commission », Common Market Law Review, vol. 49, n° 1, 2022, p. 171. Voir aussi, plus généralement, Nowak, J., « On the incompleteness of the system of remedies established by the EU Treaties and how to proceed », EU Law Live Weekend Edition, n° 21, 2020.


24      Arrêt du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, points 82 et 83).


25      Voir, à cet égard, par exemple, arrêts du 20 septembre 2016, Ledra Advertising e.a./Commission et BCE (C‑8/15 P à C‑10/15 P, EU:C:2016:701, point 35), et du 8 novembre 2022, Fiat Chrysler Finance Europe/Commission (C‑885/19 P et C‑898/19 P, EU:C:2022:859, point 52).


26      Sur la jurisprudence confirmant que la Cour ne peut pas examiner des moyens nouveaux au stade du pourvoi, voir par exemple, arrêts du 30 janvier 2019, Belgique/Commission (C‑587/17 P, EU:C:2019:75, points 39 et 40) et du 9 décembre 2020, Groupe Canal+/Commission (C‑132/19P, EU:C:2020:1007, point 28).


27      À cet égard, je me réfère au mémoire en défense de la Commission (points 70 à 72), au mémoire en réplique de la République tchèque (points 50 et 52), au mémoire en duplique de la Commission (points 36, 37, 40 et 44), aux observations de la Commission sur le mémoire en intervention de la Pologne (points 7, 10 et 16) et aux observations de la République tchèque sur le mémoire en intervention de la Belgique.


28      Une telle position est étayée par la jurisprudence en vertu de laquelle un État membre, qui s’abstient de constater le droit de l’Union sur les ressources propres et de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans qu’aucune des conditions prévues à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union. Voir par exemple arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, point 68) et du 9 juillet 2020, République tchèque/Commission (C‑575/18 P, EU:C:2020:530, point 67)


29      En vertu de la jurisprudence, il existe un « lien indissociable » entre l’obligation de constater les ressources propres de l’Union, celle de les inscrire au compte ouvert à cet effet au nom de la Commission dans les délais impartis et celle de verser des intérêts de retard. Voir par exemple, arrêts du 21 septembre 1989, Commission/Grèce (68/88, EU:C:1989:339, point 17), et du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 399).


30      Italique ajouté par mes soins. Voir point 16 des présentes conclusions ainsi que la note en bas de page y afférente.


31      Voir par exemple, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, points 58 à 61 et 68), et du 1er juillet 2010, Commission/Allemagne (C‑442/08, EU:C:2010:390, point 76).


32      Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:142, point 58). Voir, également, arrêt du 14 juillet 1988, Syndicat des libraires de Normandie (254/87, EU:C:1988:413, point 4) et conclusions de l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer dans les affaires Commission/Finlande (C‑284/05, C‑294/05, C‑372/05, C‑387/05, C‑409/05, C‑461/05 et C‑239/06, EU:C:2009:67, point 94).


33      Voir, par exemple, arrêt du 10 janvier 1980, Commission/Italie (267/78, EU:C:1980:6, point 15). Pour une vue d’ensemble de la jurisprudence sur cette question, voir conclusions de l’avocat général Geelhoed dans l’affaire Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:142, notamment points 53 à 59).


34      Voir, par exemple, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:683, point 63) ; du 19 mars 2009, Commission/Italie (C‑275/07, EU:C:2009:169, point 100) ; du 17 mars 2011, Commission/Portugal (C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point 60) et du 3 avril 2014, Commission/Royaume‑Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 45).


35      Arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous‑évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 347).


36      L’avocat général Geelhoed a lui aussi relevé dans ses conclusions dans l’affaire Commission/Danemark (C‑392/02, EU:C:2005:142, point 56) qu’il serait incompatible avec le système des ressources propres de l’Union de déterminer la date à compter du moment où les droits ont effectivement été constatés, plutôt qu’à compter du moment où ils auraient dû l’être.


37      Arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:414 ; ci-après l’« arrêt Commission/Italie »)


38      Voir arrêt Commission/Italie, points 13 à 19.


39      Italique ajouté par mes soins.


40      Voir arrêt Commission/Italie, points 70 à 73. Voir également conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Commission/Italie (C‑334/08, EU:C:2010:187, points 68 à 78, en particulier point 76) (« L’inscription dans la comptabilité B ne saurait donc être envisagée lorsque c’est l’État membre lui-même qui en crée les conditions. Cette règle traduit l’idée selon laquelle nul ne peut tirer avantage d’un comportement contraire à la bonne foi »).


41      Voir aussi, à cet égard, arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni (C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, spécialement points 51 à 54) dans lequel la Cour s’est référée aux points 61 et 65 de l’arrêt Commission/Italie en concluant que le Royaume Uni ne pouvait pas se prévaloir de l’exemption au titre de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 dans une situation dans laquelle il n’avait pas même inscrit les droits dans la comptabilité B.


42      Voir arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 381).


43      Voir note en bas de page 15 des présentes conclusions.


44      Italique ajouté par mes soins.


45      Voir par exemple, arrêts du 5 juin 2018, Kolev e.a. (C‑612/15, EU:C:2018:392, points 51 et 52) ainsi que du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, points 346 et 359).


46      Arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 345). Soulignement par mes soins.


47      En vertu de la jurisprudence, l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 constitue une expression spécifique du principe de coopération loyale consacré par l’article 4, paragraphe 3, TUE. Voir arrêts du 5 octobre 2006, Commission/Allemagne (C‑105/02, EU:C:2006:63, point 877) et du 5 octobre 2006, Commission/Belgique (C‑377/03, EU:C:2006:638, point 93). Il en va de même de l’article 325, paragraphe 3, TFUE qui invite les États membres à « coordonn[er] leur action visant à protéger les intérêts financiers de l’Union contre la fraude » et à « organis[er], avec la Commission, une collaboration étroite et régulière entre les autorités compétentes ». Voir arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, point 261).


48      Voir, à cet égard, articles 20 et 21 du règlement (CE) nº 515/97 du Conseil du 13 mars 1997, relatif à l’assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d’assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole (JO 1997, L 82, p. 1) ; article 9 ainsi que considérants 13 et 16 du règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 1999, L 136, p. 1). Ce dernier règlement a, par la suite, été abrogé par le règlement (UE, Euratom) n ° 883/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 septembre 2013 relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO 2013, L 248, p. 1).


49      Considérants 3 et 21 du règlement no 1073/1999. Des termes similaires figurent dans les considérants 2 et 49 du règlement no 883/2013. Voir également considérant 2 de la décision 1999/352 qui réitère qu’il convient de conserver « la répartition et l’équilibre actuels des responsabilités entre le niveau national et le niveau [de l’Union] ».


50      Italique ajouté par mes soins ; voir également considérant 15 du règlement no 1073/1999. Des termes similaires figurent à l’article 12, paragraphe 1, et au considérant 35 du règlement no 883/2013.


51      Voir arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, en particulier points 404 et 533).


52      Voir arrêt du 8 mars 2022, Commission/Royaume-Uni (Lutte contre la fraude à la sous-évaluation) (C‑213/19, EU:C:2022:167, spécialement points 374, 377, 378 ainsi que points 392 à 394). Voir également point 322 de cet arrêt par lequel la Cour a jugé que les « actions de contrôles douaniers entreprises au niveau de l’Union visent certes à soutenir les États membres, mais ne sauraient remplacer l’action de contrôle et de protection effective des intérêts financiers de l’Union qui leur incombe ».