Language of document : ECLI:EU:T:2019:157

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

12 mars 2019 (*)

« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Dépenses effectuées par la France – Régime d’aides à la surface – Garanties procédurales – Règlement (CE) no 885/2006 – Notion de “pâturages permanents” – Règlement (CE) no 1120/2009 – Système de contrôle national établi sur une définition non conforme des surfaces fourragères – Exclusion de la totalité des dépenses – Proportionnalité – Programme de développement rural hexagonal – Mesures de soutien au développement rural – Zones de handicaps naturels – Règlement (CE) no 1975/2006 – Règlement (UE) no 65/2011 – Correction financière forfaitaire – Contrôles sur place – Critère de chargement – Comptage des animaux – Régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière – Règlement (CE) no 320/2006 – Règlement (CE) no 968/2006 – Conditions pour l’octroi de l’aide à la restructuration – Notion d’“installation de production” – Appréciation de l’usage des silos à la date d’introduction de la demande d’octroi de l’aide – Notion de “démantèlement total” – Proportionnalité – Égalité de traitement – Annexe 2 du document VI/5330/97 »

Dans l’affaire T‑156/15,

République française, représentée initialement par MM. F. Alabrune, G. de Bergues, D. Colas et Mme C. Candat, puis par MM. de Bergues, Colas, F. Fize et Mme A. Daly et enfin par MM. Colas, S. Horrenberger, R. Coesme, Mmes E. de Moustier et A.-L. Desjonquères, en qualité d’agents,

partie requérante,

soutenue par

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de Mme C. Colelli, avvocato dello Stato,

et par

Hongrie, représentée par MM. M. Fehér et G. Koós, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet et D. Triantafyllou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation partielle de la décision d’exécution (UE) 2015/103 de la Commission, du 16 janvier 2015, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2015, L 16, p. 33),

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. H. Kanninen, président, J. Schwarcz et C. Iliopoulos (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Marescaux, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 16 mars 2018,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique 

 Règlement (CE) no 1975/2006

1        La Commission européenne a adopté le règlement (CE) no 1975/2006, du 7 décembre 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil en ce qui concerne l’application de procédures de contrôle et de conditionnalité pour les mesures de soutien au développement rural (JO 2006, L 368, p. 74). Ce règlement est applicable aux demandes de paiement des indemnités compensatrices des handicaps naturels (ci-après les « ICHN ») introduites avant le 1er janvier 2011.

2        Selon l’article 5 du règlement no 1975/2006, intitulé « Principes de contrôle généraux » :

« 1.      Sans préjudice des dispositions particulières du présent règlement, les États membres s’assurent que tous les critères d’admissibilité fixés par la législation [de l’Union] ou nationale ou par les programmes de développement rural peuvent être contrôlés au moyen d’un ensemble d’indicateurs vérifiables qu’il leur appartient d’instituer.

2.      Dans la mesure du possible, les contrôles sur place, prévus aux articles 12, 20 et 27 et d’autres contrôles prévus dans la réglementation [de l’Union] sur les subventions agricoles seront effectués en même temps.

[…] »

3        L’article 10 du règlement no 1975/2006 dispose :

« 1.      Les demandes d’aide et les demandes de paiement sont contrôlées de façon à garantir la vérification efficace du respect des conditions d’octroi de l’aide.

2.      Les États membres définissent les méthodes et les moyens adéquats pour vérifier les conditions d’octroi de l’aide pour chaque mesure d’aide.

3.      Les États membres utilisent le système intégré de gestion et de contrôle [...]

4.      Les critères d’admissibilité sont vérifiés au moyen de contrôles administratifs et de contrôles sur place. »

4        Aux termes de l’article 12 du règlement no 1975/2006, intitulé « Contrôles sur place » :

« 1.      Le nombre total de contrôles sur place effectués chaque année couvre au moins 5 % de l’ensemble des bénéficiaires assujettis à un engagement pour une ou plusieurs des mesures tombant dans le champ d’application de ce titre.

Les demandeurs jugés non admissibles au bénéfice d’aides à l’issue des contrôles administratifs ne sont pas pris en compte pour le calcul du nombre total de bénéficiaires mentionnés dans le premier alinéa.

2.      L’article 26, paragraphe 3, et l’article 4 du règlement (CE) no 796/2004 s’appliquent aux contrôles sur place prévus au présent article.

[…] »

5        L’article 14 de ce même règlement, intitulé « Principes généraux concernant les contrôles sur place », établit :

« 1.      Les contrôles sur place sont répartis sur l’année en fonction d’une analyse des risques présentés par les différents engagements pris au titre de chaque mesure de développement rural.

2.      Les contrôles portent sur la totalité des engagements et des obligations d’un bénéficiaire qu’il est possible de contrôler au moment de la visite. »

 Règlement (UE) no 65/2011

6        La Commission a adopté le règlement (UE) no 65/2011, du 27 janvier 2011, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil en ce qui concerne l’application de procédures de contrôle et de conditionnalité pour les mesures de soutien au développement rural (JO 2011, L 25, p. 8), lequel a abrogé et remplacé le règlement no 1975/2006 et est applicable aux demandes de paiement des ICHN introduites à partir du 1er janvier 2011.

7        Selon l’article 4 du règlement no 65/2011, intitulé « Principes de contrôle généraux » :

« 1.      Les États membres établissent un système de contrôle garantissant que tous les contrôles nécessaires sont effectués aux fins d’une vérification efficace du respect des conditions d’octroi des aides.

[…]

4.      Dans la mesure du possible, les contrôles sur place prévus aux articles 12, 20 et 25 du présent règlement et les autres contrôles prévus par la réglementation de l’Union […] relative aux subventions agricoles sont effectués en même temps.

[…] »

8        L’article 10 de ce règlement, intitulé « Principes généraux », dispose :

« 1.      Les États membres utilisent le système intégré de gestion et de contrôle […] prévu au titre II, chapitre 4, du règlement […] no 73/2009.

2.      La vérification du respect des critères d’admissibilité est effectuée au moyen de contrôles administratifs et de contrôles sur place.

3.      Le respect des exigences de conditionnalité est vérifié au moyen de contrôles sur place et, le cas échéant, de contrôles administratifs.

4.      Pendant la période d’exécution d’un engagement, les parcelles auxquelles l’aide se réfère ne peuvent être échangées, à l’exception de cas spécifiquement prévus dans le programme de développement rural. »

9        L’article 14 du règlement no 65/2011, intitulé « Principes généraux concernant les contrôles sur place », prévoit que :

« 1.      Les contrôles sur place sont répartis sur l’année en fonction d’une analyse des risques présentés par les différents engagements pris au titre de chaque mesure de développement rural.

2.      Les contrôles sur place relatifs à des mesures sélectionnées pour le contrôle visé à l’article 12, paragraphe 3, du présent règlement portent sur la totalité des engagements et des obligations d’un bénéficiaire qu’il est possible de contrôler au moment de la visite. »

10      Enfin, aux termes de l’article 15 du règlement no 65/2011, intitulé « Éléments des contrôles sur place et détermination des superficies » :

« 1.      Les États membres déterminent des critères et des méthodes permettant de contrôler les différents engagements et obligations du bénéficiaire afin de satisfaire aux exigences prévues à l’article 48, paragraphe 1, du règlement (CE) no 1974/2006 de la Commission.

[…]

3.      En ce qui concerne le contrôle des mesures “surfaces”, les contrôles sur place portent sur l’ensemble des parcelles agricoles et terres non agricoles faisant l’objet d’une demande d’aide.

[…]

6.      En ce qui concerne le contrôle des mesures “animaux”, les contrôles sur place sont effectués conformément à l’article 42 du règlement (CE) no 1122/2009. »

 Programme de développement rural hexagonal pour la période 2007-2013

11      En vertu de l’article 36, sous a), i) et ii), du règlement (CE) no 1698/2005 du Conseil, du 20 septembre 2005, concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2005, L 277, p. 1), les autorités françaises ont adopté un programme de développement rural hexagonal pour la période 2007-2013 (ci-après le « PDRH ») qui prévoyait, notamment, l’octroi d’ICHN aux agriculteurs situés dans des zones de handicaps naturels.

12      Par la décision C(2007) 3446, du 19 juillet 2007, la Commission a approuvé le PDRH, lequel contient, notamment, des mesures au sens de l’article 36, sous a), i) et ii), du règlement no 1698/2005, à savoir les mesures 211 et 212. Les mesures 211 et 212 du PDRH permettent d’assurer que les agriculteurs situés dans des zones de handicaps naturels respectent des pratiques favorables à la bonne utilisation des terres en subordonnant le versement d’indemnités pour des surfaces fourragères au respect d’un critère de chargement. Ce critère de chargement, exprimé en unité de gros bétail (UGB) par hectare, permet d’encadrer la densité du bétail présent sur des surfaces fourragères afin d’éviter les phénomènes de sous-pâturage ou de surpâturage. Conformément à l’article 71, paragraphe 3, du règlement no 1698/2005, le PDRH définit une série de conditions d’éligibilité pour les mesures 211 et 212, parmi lesquelles figure notamment le respect du critère de chargement défini au niveau départemental et compris entre des seuils définis par zone ou par sous-zone.

 Circulaire ICHN

13      La circulaire DGPAAT/SDEA/C2008-3016, du 5 septembre 2008, adoptée par la direction générale des politiques agricoles du ministère de l’Agriculture et de la Pêche français, expose les conditions réglementaires des ICHN au titre de l’année 2008 (ci-après la « circulaire ICHN »).

14      Le point 7.2 de la circulaire ICHN, intitulé « Les contrôles sur place », prévoit que ces contrôles comportent trois volets. Le premier est lié à la surface et vise le contrôle de la réalité de la surface ayant fait l’objet d’une demande d’aide ICHN. Le deuxième volet concerne le contrôle des engagements autres que ceux liés à la surface. Le troisième volet concerne la télédéclaration. Dans le cadre du contrôle sur place des engagements autres que la surface, le point 7.2 précise qu’il convient de procéder notamment au comptage des animaux. S’agissant des bovins, il y est précisé que, « [e]n application du système intégré de gestion et de contrôle des aides, les bovins sont contrôlés au titre des aides animales et ne sont pas contrôlés spécifiquement pour l’ICHN ». S’agissant des ovins, il est précisé que « les ovins utilisés pour le calcul du chargement sont ceux déclarés à la [prime à la brebis] par une demande [ayant cet objet] déposée l’année du dépôt du dossier ICHN ». En outre, il est indiqué que « [l]es animaux déclarés sur le formulaire ICHN, c’est-à-dire les ovins des nouveaux demandeurs, les caprins, les équins, les camélidés et les cervidés présents pendant une période de 30 jours consécutifs […] sont contrôlés par comptage des animaux présents le jour du contrôle ».

 Règlement (CE) no 320/2006

15      Le Conseil de l’Union européenne a adopté le règlement (CE) no 320/2006, du 20 février 2006, instituant un régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière dans la Communauté européenne et modifiant le règlement (CE) no 1290/2005 relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2006, L 58, p. 42). Le règlement no 320/2006 a été modifié à plusieurs reprises et, en dernier lieu, par le règlement (CE) n o 72/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009 (JO 2009, L 30, p. 1). Le règlement no 320/2006, dans sa version modifiée par le règlement n o 72/2009, est applicable aux faits concernés par la présente affaire.

16      Les considérants 1 et 5 du règlement no 320/2006 énoncent ce qui suit :

« (1)      […] Afin d’aligner le régime communautaire de production et de commerce du sucre sur les exigences internationales et de garantir sa compétitivité à l’avenir, il est nécessaire de lancer un processus approfondi de restructuration du secteur en vue d’une réduction importante de la capacité de production non rentable dans la Communauté. À cette fin, pour garantir la mise en œuvre d’une nouvelle organisation commune des marchés du sucre au fonctionnement harmonieux, il convient d’abord d’instituer un régime temporaire, distinct et autonome, de restructuration de l’industrie sucrière dans la Communauté […]

(5)      Il y a lieu d’instaurer une incitation économique importante, sous la forme d’une aide à la restructuration adéquate, destinée aux entreprises dont la productivité est la plus faible, afin qu’elles abandonnent leur production sous quota. À cet effet, il convient de mettre en place une aide à la restructuration qui incite à abandonner la production de sucre sous quota et à renoncer aux quotas considérés, et qui permette en même temps de tenir compte du respect des engagements sociaux et environnementaux liés à l’abandon de la production. Cette aide devrait être disponible pendant quatre campagnes de commercialisation, afin de réduire la production dans la mesure nécessaire pour parvenir à une situation de marché équilibrée dans la Communauté. »

17      L’article 1er du règlement no 320/2006, intitulé « Fonds de restructuration temporaire », dispose :

« 1. Le présent règlement institue un fonds temporaire pour la restructuration de l’industrie du sucre dans la Communauté […] (ci-après dénommé “fonds de restructuration”). Le présent règlement ne s’applique pas aux régions ultrapériphériques mentionnées à l’article 299, paragraphe 2, du traité.

Le fonds de restructuration fait partie du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole, section “Garantie”. À compter du 1er janvier 2007, il fait partie du Fonds européen agricole de garantie (ci-après dénommé “FEAGA”).

2. Le fonds de restructuration finance les dépenses liées aux mesures prévues aux articles 3, 6, 7, 8 et 9 du présent règlement.

[…] »

18      L’article 3 du règlement no 320/2006, intitulé « Aide à la restructuration », prévoit :

« 1.      Toute entreprise produisant du sucre, de l’isoglucose ou du sirop d’inuline à laquelle un quota a été attribué avant le 1er juillet 2006 […] peut bénéficier d’une aide à la restructuration par tonne de quota libéré, à condition que, pendant l’une des campagnes de commercialisation suivantes : 2006[/]2007, 2007[/]2008, 2008[/]2009 [et] 2009[/]2010, elle :

a)      renonce au quota qu’elle a assigné à une ou plusieurs de ses usines et démantèle totalement les installations de production des usines concernées ;

ou

b)      renonce au quota qu’elle a assigné à une ou plusieurs de ses usines et démantèle partiellement les installations de production des usines concernées, et n’utilise pas les installations de production restantes des usines concernées pour la fabrication de produits relevant de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre ;

[…]

3.      Le démantèlement total des installations de production nécessite :

a)      l’arrêt définitif et total de la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline par les installations de production concernées ;

b)      la fermeture de l’usine ou des usines et le démantèlement de leurs installations de production au cours de la période visée à l’article 4, paragraphe 2, [sous] d),

et

c)      la réhabilitation environnementale du site de l’usine et des mesures visant à faciliter le reclassement de la main-d’œuvre au cours de la période visée à l’article 4, paragraphe 2, [sous] f) […]

4.      Le démantèlement partiel des installations de production nécessite :

a)      l’arrêt définitif et total de la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline par les installations de production concernées ;

b)      le démantèlement des installations de production qui ne seront pas utilisées pour de nouvelles productions et qui étaient destinées à la fabrication des produits visés [sous] a) […] ;

c)      la réhabilitation environnementale du site de l’usine et des mesures visant à faciliter le [re]classement de la main-d’œuvre au cours de la période visée à l’article 4, paragraphe 2, [sous] f), […].

5.      Le montant de l’aide à la restructuration par tonne de quota libéré est le suivant :

a)      dans le cas visé au paragraphe 1, [sous] a) :

–        730 [euros] pour la campagne de commercialisation 2006[/]2007,

–        730 [euros] pour la campagne de commercialisation 2007[/]2008,

–        625 [euros] pour la campagne de commercialisation 2008[/]2009,

–        520 [euros] pour la campagne de commercialisation 2009[/]2010 ;

b)      dans le cas visé au paragraphe 1, [sous] b) :

–        547,50 [euros] pour la campagne de commercialisation 2006[/]2007,

–        547,50 [euros] pour la campagne de commercialisation 2007[/]2008,

–        468,75 [euros] pour la campagne de commercialisation 2008[/]2009,

–        390 [euros] pour la campagne de commercialisation 2009[/]2010 ;

[…] »

19      Par ailleurs, aux termes de l’article 4 du règlement no 320/2006, intitulé « Demandes d’octroi de l’aide à la restructuration » :

« 1. Les demandes d’octroi de l’aide à la restructuration sont présentées à l’État membre concerné au plus tard le 31 janvier précédant la campagne de commercialisation au cours de laquelle le quota doit être libéré.

[…]

2. Les demandes d’octroi de l’aide à la restructuration comprennent :

a)      un plan de restructuration ;

[…]

c)      l’engagement de renoncer au quota en question pendant la campagne de commercialisation considérée ;

d)      dans le cas visé à l’article 3, paragraphe 1, [sous] a), l’engagement de démanteler totalement les installations de production dans un délai à fixer par l’État membre concerné ;

e)      dans le cas visé à l’article 3, paragraphe 1, [sous] b), l’engagement de démanteler partiellement les installations de production dans un délai à fixer par l’État membre concerné et de ne pas utiliser le site de production et les autres installations de production pour la fabrication de produits relevant de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre ;

[…]

3.      Le plan de restructuration visé au paragraphe 2, [sous] a), comprend au moins les éléments suivants :

[…]

c)      une description technique complète des installations de production concernées ;

d)      un plan de développement détaillant les modalités, le calendrier et les coûts de la fermeture de l’usine ou des usines ainsi que du démantèlement total ou partiel des installations de production ;

[…]

h)      un plan financier détaillant l’ensemble des coûts afférents au plan de restructuration. »

20      L’article 5 du règlement no 320/2006, intitulé « Décision relative à l’aide à la restructuration et aux contrôles y afférents », prévoit :

« 1.      Les États membres décident de l’octroi de l’aide à la restructuration au plus tard pour la fin du mois de février précédant la campagne de commercialisation visée à l’article 3, paragraphe 2. Toutefois, la décision relative à la campagne 2006[/]2007 est adoptée pour le 30 septembre 2006 au plus tard.

[…]

2.      L’aide à la restructuration est octroyée si l’État membre, après une vérification minutieuse, a établi que :

–        la demande contient les éléments visés à l’article 4, paragraphe 2 ;

–        le plan de restructuration contient les éléments visés à l’article 4, paragraphe 3 ;

–        les mesures et les actions décrites dans le plan de restructuration sont conformes aux législations communautaire et nationale pertinentes ;

[…]

3.      Si une ou plusieurs des conditions énoncées aux trois premiers tirets du paragraphe 2 ne sont pas remplies, la demande d’aide à la restructuration est renvoyée au demandeur. Le demandeur est informé des conditions qui ne sont pas remplies. Le demandeur peut alors soit retirer sa demande soit la compléter.

[…] »

 Règlement (CE) no 968/2006

21      La Commission a adopté le règlement (CE) no 968/2006, du 27 juin 2006, portant modalités d’exécution du règlement no 320/2006 (JO 2006, L 176, p. 32). Le règlement no 968/2006 a été modifié à plusieurs reprises et, en dernier lieu, par le règlement d’exécution (UE) no 672/2011 de la Commission, du 13 juillet 2011 (JO 2011, L 184, p. 1). Le règlement no 968/2006, dans sa version modifiée par le règlement n o 672/2011, est applicable aux faits concernés par la présente affaire.

22      Le considérant 4 du règlement no 968/2006 dispose :

« En ce qui concerne la libération des quotas, l’article 3 du règlement […] no 320/2006 offre le choix entre un démantèlement total ou un démantèlement partiel des installations de production, qui donne lieu au versement de montants différents au titre de l’aide à la restructuration. Les conditions applicables à ces deux options devraient tenir compte du fait qu’un montant plus élevé de l’aide à la restructuration est octroyé dans le cas d’un démantèlement total en raison des coûts élevés qu’il entraîne. Il est toutefois jugé adéquat d’autoriser la conservation des parties de l’usine qui ne font pas partie de la ligne de production si elles peuvent servir à un autre usage prévu dans le plan de restructuration, en particulier lorsque cet usage crée des emplois. En revanche, il devrait être obligatoire de démanteler les installations qui ne sont pas directement liées à la production de sucre s’il n’existe aucune autre utilisation possible de ces dernières dans un délai raisonnable et que leur conservation porterait préjudice à l’environnement. »

23      L’article 4 du règlement no 968/2006, intitulé « Démantèlement des installations de production », prévoit :

« 1.      Dans le cas d’un démantèlement total visé à l’article 3, paragraphe 1, [sous] a), du règlement […] no 320/2006, les obligations de démanteler les installations de production couvrent :

a)      l’ensemble des installations nécessaires à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline, notamment les installations destinées à stocker, à analyser, à laver et à couper les betteraves sucrières, la canne à sucre, les céréales ou la chicorée ; l’ensemble des installations nécessaires pour extraire et transformer ou concentrer le sucre provenant de betteraves sucrières ou de cannes à sucre, l’amidon d’origine céréalière, le glucose provenant de l’amidon ou l’inuline provenant de la chicorée ;

b)      la partie des installations, autres que celles mentionnées [sous] a), directement liée à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline et nécessaire dans le cadre de la production sous le quota libéré, même si ladite partie peut servir à la production d’autres produits, notamment les installations servant à chauffer ou à traiter l’eau, ou à produire de l’énergie, les installations servant à traiter la pulpe ou la mélasse de betterave sucrière, les installations destinées au transport interne ;

c)      toute autre installation, notamment des installations de conditionnement, qui est inutilisée et destinée à être démantelée et enlevée pour des raisons de protection de l’environnement.

2.      Dans le cas d’un démantèlement partiel visé à l’article 3, paragraphe 1, [sous] b), du règlement […] no 320/2006, l’obligation de démanteler les installations de production couvre les installations visées au paragraphe 1 du présent article qui ne sont destinées ni à d’autres productions ni à un autre usage du site de l’usine conformément au plan de restructuration. »

24      Aux termes de l’article 6 du règlement no 968/2006, intitulé « Obligations des États membres » :

« 1.      Au plus tard vingt jours après avoir reçu la copie de l’invitation à la consultation visée à l’article 2, paragraphe 3, l’État membre informe les parties concernées par le plan de restructuration de sa décision concernant :

[…]

b)      la période, prenant fin au plus tard le 30 septembre 2010, fixée pour le démantèlement des installations de production et la mise en conformité avec les exigences sociales et environnementales visées à l’article 3, paragraphe 3, [sous] c), et à l’article 3, paragraphe 4, [sous] c), du règlement […] no 320/2006 ;

[…]

Par dérogation au [paragraphe 1, sous b], sur demande motivée de l’entreprise concernée, les États membres peuvent accorder une prolongation du délai visé [au paragraphe 1, sous b)], jusqu’au 31 mars 2012 au plus tard. Dans ce cas, l’entreprise présente un plan de restructuration modifié conformément à l’article 11.

[…] »

25      L’article 9 du règlement no 968/2006, intitulé « Admissibilité à l’aide à la restructuration », dispose :

« […]

2.      La demande est réputée recevable pour autant que le plan de restructuration :

a)      contienne un résumé des principaux objectifs, des mesures et des actions ainsi que l’évaluation des coûts de ces mesures et actions, le plan financier et les calendriers ;

b)      indique, pour chaque usine concernée, la quantité de quotas à libérer, qui doit être inférieure ou équivalente à la capacité de production devant faire l’objet d’un démantèlement total ou partiel ;

c)      contienne une attestation stipulant que les installations de production seront totalement ou partiellement démantelées et retirées du site de production ;

[…]

e)      détermine clairement l’ensemble des actions et des coûts financés par le fonds de restructuration et, le cas échéant, les autres éléments destinés à être financés par d’autres fonds communautaires.

3.      Si les conditions fixées au paragraphe 2 ne sont pas remplies, l’État membre informe le demandeur des motifs de son objection et fixe, dans les délais visés à l’article 4, paragraphe 1, du règlement […] no 320/2006, une date avant laquelle le plan de restructuration peut être adapté en conséquence.

L’État membre se prononce sur la recevabilité de la demande adaptée dans un délai de quinze jours ouvrables après la date visée au premier alinéa, mais au plus tard dix jours ouvrables avant le délai fixé à l’article 5, paragraphe 1, du règlement […] no 320/2006.

Si la demande adaptée n’est pas présentée dans les délais ou si elle est jugée irrecevable, la demande d’octroi de l’aide à la restructuration est rejetée, et l’État membre en informe le demandeur et la Commission dans un délai de cinq jours ouvrables. L’introduction d’une nouvelle demande par le même demandeur sera tributaire de l’ordre chronologique visé à l’article 8.

[…] » 

26      L’article 11 du règlement no 968/2006, intitulé « Modification du plan de restructuration », prévoit :

« 1.      Dès que l’aide à la restructuration lui est octroyée, le bénéficiaire est tenu d’exécuter l’ensemble des mesures présentées de manière détaillée dans le plan de restructuration approuvé et de respecter les engagements inclus dans sa demande d’octroi de l’aide à la restructuration.

2.      Toute modification d’un plan de restructuration approuvé est soumise à l’approbation de l’État membre sur la base d’une demande introduite par l’entreprise concernée :

a)      expliquant les raisons de cette modification et les problèmes de mise en œuvre rencontrés ;

b)      présentant les adaptations ou les nouvelles mesures proposées ainsi que leurs effets escomptés ;

c)      précisant les conséquences en matière de coûts et de délais.

Ces modifications ne peuvent modifier le montant total de l’aide à la restructuration qui sera octroyé ni les montants temporaires au titre de la restructuration qui doivent être payés en application de l’article 11 du règlement […] no 320/2006.

L’État membre informe la Commission du plan de restructuration modifié. »

27      L’article 16 du règlement no 968/2006, intitulé « Paiement de l’aide à la restructuration », dispose :

« 1. Le versement de chaque tranche de l’aide à la restructuration visée à l’article 10, paragraphe 4, du règlement […] no 320/2006, est subordonné à la constitution d’une garantie d’un montant équivalent à 120 % du montant du versement concerné.

[…] »

28      Aux termes de l’article 22 du règlement no 968/2006, intitulé « Libération des garanties » :

« 1. Les garanties visées à l’article 16, paragraphe 1, […] et à l’article 18, paragraphe 2, sont libérées pour autant que :

a)      l’ensemble des mesures et des actions prévues dans le plan de restructuration, dans les programmes de restructuration nationaux et dans le plan d’entreprise ait été mis en œuvre ;

b)      le rapport final visé à l’article 23, paragraphe 2, ait été présenté ;

c)      les États membres aient effectué les contrôles visés à l’article 25 ;

[…]

3.      Sauf en cas de force majeure, la garantie reste acquise si les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont pas remplies, au plus tard le 30 septembre 2012. »

29      L’article 25 du règlement no 968/2006, intitulé « Contrôles », établit ce qui suit :

« 1.      Chaque entreprise et site de production qui bénéficie d’une aide au titre du fonds de restructuration est inspecté par l’autorité compétente de l’État membre dans les trois mois qui suivent le délai visé à l’article 23, paragraphe 2.

Au cours de cette inspection, on vérifie que le plan de restructuration ou d’entreprise est respecté et que les informations communiquées par l’entreprise dans le rapport de suivi sont exactes et complètes. Au cours de la première inspection effectuée dans le cadre d’un plan de restructuration, toute information additionnelle communiquée par l’entreprise dans sa demande d’octroi de l’aide à la restructuration est également vérifiée, en particulier la confirmation visée à l’article 4, paragraphe 2, [sous] b), du règlement […] no 320/2006.

2.      Dans tous les cas, l’inspection couvre les éléments du plan de restructuration visés à l’article 4, paragraphe 3, du règlement [...] no 320/2006 […] »

30      Par ailleurs, l’article 26 du règlement no 968/2006, intitulé « Recouvrements », dispose :

« 1.      Sans préjudice du paragraphe 3, si un bénéficiaire ne respecte pas une ou plusieurs des obligations qui lui incombent conformément au plan de restructuration, au plan d’entreprise ou au programme de restructuration national, la partie de l’aide accordée conformément à l’obligation ou aux obligations concernées est récupérée, sauf en cas de force majeure.

[…] »

31      Enfin, aux termes de l’article 27 du règlement no 968/2006, intitulé « Sanctions » :

« 1.      Si le bénéficiaire ne respecte pas une ou plusieurs de ses obligations conformément au plan de restructuration, au plan d’entreprise ou au programme de restructuration national, il doit s’acquitter d’une sanction financière correspondant à 10 % du montant à récupérer en application de l’article 26.

[…] »

 Antécédents du litige

 Décision attaquée

32      Par la décision d’exécution (UE) 2015/103, du 16 janvier 2015, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2015, L 16, p. 33, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a notamment imposé les corrections suivantes à la République française :

–        une correction forfaitaire de 2 % (285 976 502,84 euros) concernant les dépenses relatives aux aides directes à la surface du premier pilier afférentes à la France (années de demande 2011 et 2012) ;

–        une correction forfaitaire de 100 % (24 352 508,26 euros) concernant les dépenses relatives aux aides directes à la surface du premier pilier afférentes à la Haute-Corse (années de demande 2011 et 2012) ;

–        une correction forfaitaire de 5 % (18 090 967,17 euros) concernant les ICHN octroyées par la République française (exercices budgétaires 2010 à 2013) ;

–        une correction ponctuelle de 25 % (69 980 526,56 euros) concernant les dépenses effectuées par la République française dans le cadre du régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière (exercices budgétaires 2007, 2008 et 2009).

33      Les quatre groupes de corrections financières mentionnés au point 32 ci-dessus sont contestés par la République française dans le cadre du présent recours.

 Sur les premier et deuxième groupes de corrections concernant les aides directes à la surface relevant du premier pilier

34      Du 23 au 27 mai 2011, les services de la Commission ont réalisé, en France, une enquête portant sur le secteur des aides à la surface du premier pilier afférentes à l’année de demande 2010 (ci-après l’« enquête AA/2011/10 »).

35      Par lettre du 12 août 2011, la Commission, d’une part, a communiqué à la République française les résultats de l’enquête AA/2011/10 en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) no 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO 2006, L 171, p. 90) (ci-après la « première communication du 12 août 2011 »), et, d’autre part, a demandé à la République française de lui communiquer des informations complémentaires.

36      Le 27 février 2012, la République française a transmis à la Commission ses observations ainsi que les informations complémentaires sollicitées.

37      Du 5 au 9 novembre 2012, les services de la Commission ont réalisé, en France, une nouvelle enquête portant sur le secteur des aides à la surface du premier pilier afférentes aux années 2011 et suivantes (ci-après l’« enquête AA/2012/06 »).

38      Par lettre du 14 mars 2013, la Commission a communiqué à la République française les résultats de l’enquête AA/2012/06 en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 (ci-après la « première communication du 14 mars 2013 ») et lui a demandé des informations complémentaires.

39      Le 4 novembre 2013, la République française a transmis à la Commission ses observations ainsi que les informations complémentaires sollicitées concernant l’enquête AA/2012/06.

40      La procédure d’apurement de conformité s’est ensuite déroulée conjointement pour les enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06.

41      Le 12 décembre 2013, la Commission a invité les autorités françaises à une réunion bilatérale, laquelle a eu lieu à Bruxelles (Belgique), le 15 janvier 2014.

42      Le procès-verbal de cette réunion a été communiqué aux autorités françaises par lettre de la Commission du 3 mars 2014.

43      Par lettre du 3 juin 2014, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 885/2006, la République française a communiqué à la Commission des informations complémentaires.

44      Par lettre du 25 septembre 2014, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 885/2006 (ci-après la « communication formelle du 25 septembre 2014 »), la Commission a formellement communiqué à la République française le montant estimé de la correction proposée, à savoir un montant net de 335 236 381,95 euros. La Commission a précisé que cette correction était notamment fondée sur des lacunes du système d’identification des parcelles agricoles – système d’information géographique (ci-après le « SIPA-SIG ») mis en place par les autorités françaises, dénommé « Registre parcellaire géographique » (ci-après le « RPG »), parmi lesquelles : premièrement, une absence de photo-interprétation systématique ; deuxièmement, des déficiences relatives aux contrôles portant sur les critères d’admissibilité des parcelles agricoles ; troisièmement, une interprétation incorrecte par les autorités françaises de l’article 34 du règlement (CE) no 1122/2009 de la Commission, du 30 novembre 2009, fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité, la modulation et le système intégré de gestion et de contrôle dans le cadre des régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs prévus par ce règlement ainsi que les modalités d’application du règlement (CE) no 1234/2007 du Conseil en ce qui concerne la conditionnalité dans le cadre du régime d’aide prévu pour le secteur vitivinicole (JO 2009, L 316, p. 65), ayant conduit à ne pas toujours écarter des surfaces inéligibles au regard de la réglementation de l’Union européenne sur les « bonnes conditions agricoles et environnementales » (ci-après les « BCAE »). En outre, s’agissant des aides à la surface du premier pilier octroyées en Haute-Corse, la Commission a considéré que la définition très large et imprécise des superficies fourragères peu productives, retenue par les autorités françaises, n’était pas conforme à la notion de « pâturages permanents » figurant à l’article 2, sous c), du règlement (CE) no 1120/2009 de la Commission, du 29 octobre 2009, portant modalités d’application du régime de paiement unique prévu par le titre III du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs (JO 2009, L 316, p. 1), et avait engendré un risque d’irrégularité systémique pour les fonds agricoles européens.

45      Le 12 décembre 2014, la Commission a établi le rapport de synthèse qui a notamment retenu, d’une part, une correction de 2 % au titre des défaillances relatives aux contrôles sur place effectués par les autorités françaises, en particulier en ce que leur interprétation de l’article 34 du règlement no 1120/2009 avait conduit à ne pas toujours écarter des surfaces inéligibles, et, d’autre part, une correction de 100 % au titre du risque d’irrégularité systémique pour les fonds agricoles européens causé par la définition imprécise des surfaces fourragères peu productives applicable en Haute-Corse.

 Sur le troisième groupe de corrections concernant les dépenses effectuées au titre des ICHN (mesures 211 et 212)

46      Les 21 et 25 mars 2011, les services de la Commission ont réalisé, en France, l’enquête RD 2/2011/03, portant sur l’axe 2 du PDRH pour les exercices budgétaires 2009 et 2010.

47      Par lettre du 3 juin 2011, adoptée en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, la Commission a communiqué à la République française les résultats de l’enquête RD 2/2011/03.

48      Le 21 septembre 2011, la République française a transmis à la Commission ses observations.

49      Le 18 juillet 2012, la Commission a invité les autorités françaises à une réunion bilatérale, laquelle a eu lieu à Bruxelles, le 27 septembre 2012. Lors de la réunion bilatérale susvisée, la Commission a demandé des informations complémentaires aux autorités françaises.

50      Le procès-verbal de cette réunion a été communiqué aux autorités françaises par lettre de la Commission du 13 novembre 2012.

51      Par lettre du 5 avril 2013, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 885/2006, la République française a communiqué à la Commission des informations complémentaires.

52      Par lettre du 2 décembre 2013, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 885/2006, la Commission a formellement communiqué à la République française le montant estimé de la correction proposée, dont un montant de 18 090 967,17 euros en raison des carences des contrôles portant sur le respect des conditions d’éligibilité aux ICHN effectués par les autorités françaises.

53      Le 22 janvier 2014, les autorités françaises ont demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation sur le fondement de l’article 16 du règlement no 885/2006. L’organe de conciliation a rendu son avis le 10 juin 2014.

54      Par lettre du 12 août 2014, la Commission a communiqué aux autorités françaises sa position finale suivant le rapport de l’organe de conciliation.

55      Le 12 décembre 2014, la Commission a établi le rapport de synthèse faisant notamment état d’une correction forfaitaire de 5 % en raison de l’insuffisance des contrôles sur place effectués par les autorités françaises au titre des ICHN, ces autorités n’ayant pas procédé, lors de ces contrôles, au comptage des bovins, des ovins et des caprins, pour lesquels une prime spécifique avait été demandée.

56      Par ailleurs, les services de la Commission ont réalisé l’enquête RD 2/2012/09, portant sur l’axe 2 du programme de développement rural de la Corse pour la période 2007-2013, laquelle concernait les exercices budgétaires 2010 et 2011. Les résultats de l’enquête RD 2/2012/09 ont été adressés aux autorités françaises par une communication du 17 août 2012, adoptée en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006.

57      Par lettre du 21 mai 2014, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, et de l’article 16, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, la Commission a formellement communiqué à la République française le montant estimé de la correction proposée en raison des carences des contrôles effectués par les autorités françaises portant sur le respect des conditions d’éligibilité aux ICHN octroyées en Corse au titre des exercices budgétaires 2010 et 2011. Une correction forfaitaire de 5 % a été retenue, à ce titre, dans le rapport de synthèse de la Commission du 12 décembre 2014.

 Sur le quatrième groupe de corrections concernant les aides à la restructuration de l’industrie sucrière

58      Entre les 22 et 26 novembre 2010, les services de la Commission ont effectué, en France, l’enquête EX/2010/12 portant sur deux questions relatives au régime de restructuration de l’industrie sucrière.

59      Par lettre du 28 février 2011, envoyée en application de l’article 11 du règlement no 885/2006, la Commission a communiqué le résultat de l’enquête susvisée aux autorités françaises (ci-après la « première communication du 28 février 2011 »).

60      Il ressort de la première communication du 28 février 2011 que la Commission a estimé que la République française n’avait pas totalement respecté les exigences de la réglementation de l’Union concernant les conditions d’octroi de l’aide à la restructuration allouée en cas de démantèlement total des sites de production de sucre.

61      En effet, elle a constaté que quatre silos avaient été conservés (ci-après les « silos litigieux ») sur les sites industriels des entreprises productrices de sucre ayant bénéficié d’une aide à la restructuration pour démantèlement total et, partant, que lesdites entreprises ne pouvaient pas bénéficier de cette aide. En outre, la Commission a demandé aux autorités françaises, d’une part, d’indiquer les raisons qui justifiaient le maintien des silos litigieux, notamment à la lumière de l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006 et, d’autre part, de fournir des renseignements sur les bâtiments encore présents sur les sites de production de sucre où ses agents ne s’étaient pas rendus.

62      Par lettre du 10 mai 2011, la République française a confirmé que les silos litigieux n’avaient pas été démolis et qu’ils avaient été vendus. En outre, elle a contesté l’obligation de faire figurer lesdits silos dans les plans de restructuration au motif qu’ils ne constituaient pas des installations participant au processus de production du sucre.

63      Le 6 février 2012, la Commission a invité les autorités françaises à une réunion bilatérale, laquelle a eu lieu à Bruxelles, le 27 février 2012.

64      Il ressort du procès-verbal de la réunion bilatérale, transmis par la Commission aux autorités françaises par lettre du 14 juin 2012, que les divergences d’interprétation concernant la question du démantèlement des silos en cas de démantèlement total des sites de production de sucre n’avaient pas pu être levées.

65      Le 16 août 2012, les autorités françaises ont présenté leurs observations sur le procès-verbal de la réunion bilatérale dans lesquelles elles ont notamment maintenu que, à la lumière des dispositions du règlement no 968/2006, les silos de stockage du sucre ne faisaient pas partie des installations de production visées par l’obligation de démantèlement.

66      Par lettre du 9 août 2013, envoyée sur le fondement de l’article 11, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 885/2006, la Commission a informé les autorités françaises qu’elle envisageait d’appliquer une correction financière d’un montant de 69 980 526,56 euros, celui-ci ayant été calculé sur la base de la différence entre le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement total et celui de l’aide à la restructuration pour démantèlement partiel, ce dernier étant de 25 % inférieur au premier.

67      Par arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a jugé, en substance, que la notion d’« installations de production » couvrait les silos destinés au stockage du sucre du bénéficiaire de l’aide à la restructuration. Toutefois, la Cour a considéré que tel n’était pas le cas dans deux hypothèses : d’une part, lorsqu’il était démontré que les silos étaient employés uniquement aux fins du stockage de sucre, produit sous quota, entreposé par d’autres producteurs ou acheté à ces derniers et, d’autre part, lorsqu’ils étaient uniquement utilisés pour le conditionnement ou l’emballage de sucre produit ailleurs aux fins de sa commercialisation (ci-après les « exceptions posées par la Cour »).

68      Le 28 mars 2014, la Commission a adressé à la République française sa position finale à la suite de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), à la lumière duquel elle a considéré que la qualification des silos litigieux d’installations de production devait être déterminée par leur utilisation au moment de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration. Elle a donc accordé un délai d’un mois aux autorités françaises pour produire des preuves du fait que, à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total, les silos litigieux servaient exclusivement au stockage ou à l’emballage du sucre produit sous quota par d’autres producteurs.

69      Par lettre du 28 avril 2014, la République française a rappelé à la Commission sa position selon laquelle les silos litigieux ne relevaient pas de l’obligation de démantèlement et qu’il existait des difficultés d’interprétation de la réglementation de l’Union pertinente justifiant que la Commission revoie à la baisse ou annule sa correction financière sur le fondement du document VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci-après le « document VI/5330/97 »). Elle a en outre précisé que les silos litigieux avaient été cédés à des tiers par les opérateurs bénéficiaires de l’aide à la restructuration pour démantèlement total et, partant, étaient exclus de l’obligation de démantèlement.

70      Par lettre du 3 octobre 2014, la Commission a fait savoir aux autorités françaises que leur réponse ne contenait aucun élément factuel établissant que les conditions pour bénéficier des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), étaient réunies en l’espèce.

71      Le 12 décembre 2014, la Commission a établi le rapport de synthèse reprenant les résultats des contrôles effectués, les griefs contre les autorités françaises ainsi que les réponses apportées, et dans lequel elle a indiqué que sa position, au regard des manquements constatés, demeurait inchangée.

 Procédure et conclusions des parties

72      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 mars 2015, la République française a introduit le présent recours.

73      Par actes déposés au greffe du Tribunal respectivement les 25 juin et 3 juillet 2015, la Hongrie et la République italienne ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la République française. Par ordonnances du 10 septembre 2015, le président de la deuxième chambre du Tribunal a admis ces interventions. La République italienne et la Hongrie ont déposé leurs mémoires en intervention respectifs le 27 octobre 2015.

74      La Commission a déposé ses observations sur les mémoires en intervention de la République italienne et de la Hongrie le 12 janvier 2016.

75      La République française conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée en ce que, dans le cadre des aides directes, elle se fonde sur des constatations qui n’ont pas été mentionnées dans le cadre des communications de la Commission et en ce que le système de contrôle ne permet pas d’assurer la bonne application de la réglementation de l’Union relative aux BCAE au titre des années de demande 2011 et 2012 ;

–        annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle écarte du financement de l’Union l’intégralité des dépenses effectuées dans le secteur des aides à la surface en Haute-Corse pour les années de demande 2010 et suivantes ;

–        annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle écarte du financement de l’Union les dépenses effectuées par la République française dans le cadre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du PDRH au titre des exercices financiers 2010, 2011, 2012 et 2013 ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle écarte du financement de l’Union la partie des dépenses effectuées par la République française dans le cadre de l’aide ICHN pour des ovins non éligibles à la prime à la brebis ;

–        annuler partiellement la décision attaquée en tant qu’elle exclut du financement de l’Union les dépenses effectuées par la République française dans le secteur de la restructuration de l’industrie sucrière à hauteur de 25 % des dépenses d’aides versées aux producteurs de sucre qui ont bénéficié d’une aide pour démantèlement total et maintenu des silos de stockage ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement cette décision en tant que la correction financière imposée à hauteur de 25 % des dépenses d’aides versées aux producteurs de sucre qui ont bénéficié d’une aide pour démantèlement total et maintenu des silos de stockage est disproportionnée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

76      Dans la réplique, la République française a également demandé au Tribunal, en substance, d’annuler la correction financière appliquée au titre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du programme de développement rural de la Corse.

77      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République française aux dépens.

78      La République italienne et la Hongrie concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler partiellement la décision attaquée.

79      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée. 

80      Par décision du président de la quatrième chambre du Tribunal du 23 décembre 2016, adoptée conformément à l’article 69, sous d), du règlement de procédure, la procédure a été suspendue jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑373/15 P.

81      Par arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission (C‑373/15 P, EU:C:2017:55), la Cour a mis fin à l’instance dans l’affaire C‑373/15 P.

82      Le 3 février 2017, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure prévue à l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a invité les parties à lui indiquer les conséquences qu’il y avait lieu de tirer, selon elles, de l’arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission (C‑373/15 P, EU:C:2017:55), au regard du présent recours. À l’exception de la Hongrie, les parties ont déféré à la mesure d’organisation de la procédure dans les délais.

83      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, a posé des questions écrites aux parties et les a invitées à déposer certains documents. Les parties ont déféré aux mesures d’organisation de la procédure dans les délais.

84      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 16 mars 2018.

 En droit

85      À titre liminaire il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les fonds agricoles européens ne financent que les interventions effectuées conformément aux dispositions de l’Union dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (voir arrêt du 27 février 2013, Pologne/Commission, T‑241/10, non publié, EU:T:2013:96, point 20 et jurisprudence citée).

86      Lorsque la Commission refuse de mettre à la charge des fonds certaines dépenses pour cause de violations des dispositions du droit de l’Union imputables à un État membre, il lui appartient non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes des fonds agricoles européens et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêts du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, EU:C:2001:4, points 7 à 9, et du 17 mai 2013, Grèce/Commission, T‑294/11, non publié, EU:T:2013:261, point 21).

87      Ainsi, il y a lieu, pour le Tribunal, de vérifier si l’État membre concerné a démontré l’inexactitude des appréciations de la Commission ou l’absence de risque de perte ou d’irrégularité pour le fonds sur la base de l’application d’un système de contrôle fiable et efficace (arrêt du 17 mai 2013, Grèce/Commission, T‑294/11, non publié, EU:T:2013:261, point 22 ; voir également, en ce sens, arrêt du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, EU:C:2005:103, point 95).

88      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner les moyens avancés par la République française au soutien du recours en ce qu’il vise les quatre groupes de corrections financières appliquées par la Commission dans la décision attaquée (voir point 32 ci-dessus).

 Sur la correction forfaitaire de 2 % appliquée aux aides directes à la surface du premier pilier octroyées en France au titre des années de demande 2011 et 2012 (enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06)

89      Au soutien du recours dirigé contre la correction forfaitaire de 2 %, la République française invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 et des droits de la défense et, le second, invoqué à titre subsidiaire, de la violation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’annexe III du règlement (CE) no 73/2009 du Conseil, du 19 janvier 2009, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct en faveur des agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs, modifiant les règlements (CE) no 1290/2005, (CE) no 247/2006 et (CE) no 378/2007, et abrogeant le règlement (CE) no 1782/2003 (JO 2009, L 30, p. 16).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 et des droits de la défense de la République française

90      La République française fait valoir, en substance, que la Commission, d’une part, n’a soulevé le grief tiré de l’interprétation incorrecte de la réglementation de l’Union relative aux BCAE en ce qui concerne les éléments du paysage admissibles aux fins de la détermination des superficies agricoles et, d’autre part, n’a indiqué les mesures correctives requises ni dans la première communication du 12 août 2011 ni dans celle du 14 mars 2013. Or, cette irrégularité aurait donné lieu à l’application d’une correction financière dans la décision attaquée. En substance, la République française soutient que, en se limitant à mentionner les règles d’entretien dans le cadre des BCAE et les éléments du paysage dans la première communication du 12 août 2011 et dans celle du 14 mars 2013, la Commission n’a pas formulé de grief à l’encontre de la réglementation française relative aux BCAE.

91      La Commission conteste les arguments de la République française. En effet, elle prétend avoir fait explicitement état des règles minimales d’entretien dans le cadre des BCAE aussi bien dans la première communication du 12 août 2011 que dans celle du 14 mars 2013. Ainsi, elle considère que le problème de fond de la méconnaissance par la République française des règles sur les BCAE avait bien été identifié à suffisance de droit dans les lettres portant communication des résultats des vérifications et avait été discuté lors de la réunion bilatérale. Elle estime donc que la République française a pu se défendre en ce qui concerne le grief contesté.

92      Selon une jurisprudence constante, la décision finale et définitive relative à l’apurement des comptes est prise à l’issue d’une procédure contradictoire spécifique au cours de laquelle les États membres concernés disposent de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue (voir arrêt du 14 décembre 2000, Allemagne/Commission, C‑245/97, EU:C:2000:687, point 47 et jurisprudence citée).

93      L’article 11 du règlement no 885/2006 définit les différentes étapes à respecter lors de la procédure d’apurement des comptes. En particulier, l’article 11, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement précise le contenu de la première communication écrite par laquelle la Commission communique le résultat de ses vérifications aux États membres, avant l’organisation de la discussion bilatérale. Aux termes de cette disposition, la première communication doit préciser le résultat des vérifications de la Commission à l’État membre concerné et indiquer les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles de l’Union en cause (arrêt du 24 mars 2011, Grèce/Commission, T‑184/09, non publié, EU:T:2011:120, point 40).

94      Il convient de rappeler, par ailleurs, qu’il a d’ores et déjà été jugé que la communication écrite visée à l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 devait être de nature à donner à l’État membre une parfaite connaissance des réserves de la Commission, de sorte qu’elle puisse alors remplir la fonction d’avertissement qui lui était impartie (voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, EU:C:2004:589, point 93 ; voir également, par analogie, arrêt du 17 juin 2009, Portugal/Commission, T‑50/07, non publié, EU:T:2009:206, point 39).

95      Il s’ensuit que, dans la première communication visée par l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, la Commission doit indiquer, de manière suffisamment précise, l’objet de l’enquête menée par ses services et les carences constatées lors de cette enquête, celles-ci étant susceptibles d’être invoquées ultérieurement comme élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard des contrôles effectués par les administrations nationales ou des chiffres transmis par ces dernières et, ainsi, de justifier les corrections financières retenues dans la décision finale écartant du financement de l’Union certaines dépenses effectuées par l’État membre concerné au titre du fonds (voir, par analogie, arrêt du 17 juin 2009, Portugal/Commission, T‑50/07, non publié, EU:T:2009:206, point 40).

96      En conséquence, afin de remplir sa fonction d’avertissement, notamment à la lumière de l’article 31 du règlement (CE) no 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1), la communication visée à l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 doit d’emblée identifier de manière suffisamment précise toutes les irrégularités reprochées à l’État membre concerné qui ont, en définitive, fondé la correction financière effectuée. Seule une telle communication est en mesure de garantir une parfaite connaissance des réserves de la Commission et peut constituer l’élément de référence pour le décompte du délai de 24 mois prévu à l’article 31 du règlement no 1290/2005 (voir, par analogie, arrêt du 3 mai 2012, Espagne/Commission, C‑24/11 P, EU:C:2012:266, point 31).

97      En l’espèce, la décision attaquée a retenu une correction financière de 2 % au titre de plusieurs défaillances constatées dans le RPG, parmi lesquelles une interprétation incorrecte de la réglementation de l’Union en ce qui concerne les éléments du paysage admissibles aux fins de la détermination des superficies agricoles et, plus particulièrement, des éléments du paysage relevant des « normes usuelles » et des BCAE, visés respectivement à l’article 34, paragraphe 2, et à l’article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009.

98      À cet égard, il ressort de l’annexe de la communication formelle du 25 septembre 2014 que, pour les années de demande 2011 et 2012, la Commission a constaté que le SIPA-SIG en vigueur en France présentait plusieurs lacunes. Au point 1.1.3 de ladite annexe, elle a notamment estimé, en substance, que la République française n’avait pas interprété correctement la réglementation de l’Union sur la détermination des superficies éligibles et, partant, avait méconnu l’article 34 du règlement no 1122/2009. En effet, pour la Commission, d’une part, les éléments caractéristiques du paysage, visés à l’article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009, n’avaient pas été maintenus dans des BCAE ainsi que l’exige l’article 6 du règlement no 73/2009, étant donné que lesdits éléments avaient été appréciés de façon globale, à travers des ratios prédéfinis, et n’avaient pas pu faire l’objet d’un contrôle individualisé. D’autre part, elle a estimé, en substance, que la République française n’avait pas correctement appliqué l’article 34, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009 en ce que les éléments du paysage tels que, notamment, les affleurements rocheux, les mares, les bosquets pâturables ou les blockhaus ne faisaient traditionnellement pas partie des bonnes pratiques agricoles en matière de cultures ou d’utilisation des sols et n’étaient donc pas admissibles pour la détermination des parcelles agricoles. Dès lors, la Commission a conclu qu’il existait un problème systémique d’interprétation des règles applicables en matière d’éligibilité qui a donné lieu à des contrôles sur place inexacts et qui, partant, a causé un risque pour les fonds agricoles européens. Compte tenu notamment de cette irrégularité, la Commission a appliqué une correction forfaitaire de 2 % au titre des années de demande 2011 et 2012.

99      Or, force est de constater que, dans la première communication du 12 août 2011 et dans la première communication du 14 mars 2013, la Commission n’a aucunement affirmé, d’une part, que les éléments du paysage en France n’avaient pas été maintenus dans des BCAE au motif qu’ils avaient été considérés de façon globale à travers des ratios préalablement définis et pas de manière individuelle et, d’autre part, que les affleurements de rochers, les mares, les bosquets pâturables ou les blockhaus, notamment, ne pouvaient pas être considérés comme éléments faisant traditionnellement partie des BCAE en matière de cultures ou d’utilisation des sols ni, par conséquent, comme éléments du paysage admissibles pour la détermination des superficies des parcelles agricoles.

100    En effet, si les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013 identifient des problèmes concernant l’inclusion dans les surfaces admissibles d’éléments du paysage inadmissibles et opèrent, à ce titre, un renvoi assez vague aux règles d’entretien définies dans le cadre des BCAE, la Commission n’y a émis aucune réserve spécifique concernant la réglementation française relative aux BCAE et n’a pas non plus indiqué les mesures correctives que la République française aurait dû adopter pour se mettre en conformité avec la réglementation de l’Union.

101    En particulier, il convient de relever que, au point 1.1.2 de l’annexe de la première communication du 14 mars 2013, intitulé « Mise à jour incorrecte du SIPA – surfaces inéligibles F04 [c’est-à-dire les superficies constatées inférieures aux superficies déclarées ou non utilisables en totalité] », la Commission a indiqué que le SIPA n’était pas mis à jour pour prendre en compte correctement les éléments inéligibles déclarés comme tels par l’agriculteur ou établis comme tels à la suite d’un contrôle administratif ou sur place. Dans ce cadre, elle a notamment relevé ce qui suit :

« S’ils se conforment aux prescriptions définies dans les règles nationales, les éléments du type fossé, étang ou bosquet peuvent être considérés comme éligibles en vertu de l’[article 34, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009] qui dispose que “La superficie totale d’une parcelle agricole peut être prise en compte à condition qu’elle soit entièrement utilisée selon les normes usuelles de l’État membre ou de la région concernée. Dans les autres cas, c’est la superficie réellement utilisée qui est prise en compte.” Par conséquent, lorsque ces éléments excèdent les normes usuelles, ils doivent être exclus en totalité de la surface éligible, comme cela est rappelé dans l’arrêté préfectoral concernant les terres de Gironde.

De la même façon, si ces éléments de paysage peuvent relever de[s BCAE], en vertu de l’[article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009], ils sont intégrés dans la superficie totale de la parcelle agricole. Toutefois, s’ils ne respectent pas ces conditions définies au niveau national, ils devront également être exclus de la totalité de la surface éligible.

Or, les autorités françaises ont accepté dans la surface éligible des éléments excédant les limites définies dans les règles nationales conformément à l’[article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009]. »

102    Dans la première communication du 14 mars 2013, la Commission a donc estimé que certains éléments du paysage avaient été inclus à tort dans la superficie de certaines parcelles agricoles au motif qu’ils ne respectaient pas les limites définies par la réglementation française. En revanche, elle n’a pas considéré que la réglementation française elle-même n’était pas conforme à la réglementation de l’Union relative aux BCAE.

103    Au demeurant, il convient de relever que c’est lors de la réunion bilatérale du 15 janvier 2014 que la Commission a fait clairement état, pour la première fois, des irrégularités rappelées au point 98 ci-dessus et contestées par la République française. À cet égard, au point 1.1.2 de l’annexe du courrier de la Commission du 3 mars 2014 (voir point 42 ci-dessus), intitulé « Éléments de paysage admissibles/non admissibles », il est indiqué que, « [a]u cours de la réunion bilatérale[,] l’analyse de plusieurs cas d’éléments de paysage, identifiés pendant les audits de 2011 et 2012, a révélé des divergences d’interprétation entre les autorités françaises et la [direction générale de l’agriculture et du développement rural] concernant leur admissibilité[, n]otamment par rapport aux notions de BCAE et de “normes usuelles” en référence à l’[article 34 du règlement no 1122/2009] ». Il est en outre indiqué dans la partie du point 1.1.2 de l’annexe du courrier de la Commission du 3 mars 2014 susvisé, faisant état de la position de la Commission, que « [l]es développements ci-après reflètent les discussions ayant eu lieu pendant la réunion bilatérale » et que ceux-ci « ont d’autre part été complétés par une analyse juridique plus exhaustive, que la DG A[griculture] avait annoncée en réunion ».

104    Compte tenu de ce qui précède, l’absence de mention des irrégularités contestées (voir point 98 ci-dessus) dans les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013 est contraire à la jurisprudence citée aux points 92 à 96 ci-dessus.

105    Contrairement à ce que prétend la Commission, le fait que la première communication du 12 août 2011 mentionnait les règles minimales d’entretien dans le cadre des BCAE en ce qui concerne, d’une part, la question des superficies fourragères peu productives et, d’autre part, celle des contrôles et de la non-admissibilité temporaire des surfaces ne permettait pas à la République française de comprendre que la Commission lui reprochait également, d’une part, de ne pas avoir protégé de manière individuelle les éléments du paysage et, d’autre part, de ne pas avoir correctement appliqué l’article 34, paragraphe 2, du règlement no 1122/2009 au motif que les éléments du paysage tels que, notamment, les affleurements rocheux, les mares, les bosquets pâturables ou les blockhaus ne faisaient traditionnellement pas partie des bonnes pratiques agricoles en matière de cultures ou d’utilisation des sols et n’étaient donc pas admissibles pour la détermination de la surface des parcelles agricoles.

106    En outre, l’argument de la Commission selon lequel le renvoi à l’article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009, opéré dans les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013, permet de considérer que les autorités françaises ont été averties à suffisance des préoccupations de la Commission et des moyens d’y remédier ne saurait être accueilli. En effet, quand bien même la disposition susmentionnée fixe les obligations en matière de maintien des surfaces dans des BCAE, l’interprétation de l’article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009 retenue par la Commission, selon laquelle il y aurait lieu de protéger les éléments du paysage de manière individuelle, ne ressort pas expressément des termes de ladite disposition. Ainsi, le simple renvoi à l’article 34, paragraphe 3, du règlement no 1122/2009 ne permet pas de satisfaire aux exigences de clarté et de précision imposées par l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006.

107    Par ailleurs, dans le mémoire en défense, la Commission a notamment précisé que la correction financière n’était pas fondée sur une exclusion a priori des rochers, des mares ou des affleurements rocheux des éléments du paysage éligibles, mais sur le fait que les conditions en matière de contrôle du maintien de ces éléments sous les BCAE n’étaient pas remplies. Toutefois, l’explication fournie a posteriori par la Commission dans le mémoire en défense n’établit pas qu’il ressortait, explicitement ou implicitement, des premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013 que la correction financière contestée était notamment fondée sur le fait que, en n’instituant pas une protection individuelle des mares, des bosquets ou des affleurements rocheux, la réglementation française n’assurait pas le maintien desdits éléments du paysage dans des BCAE.

108    Enfin, la Commission ne saurait exciper du caractère bilatéral de la procédure d’apurement des comptes pour faire échec à la garantie procédurale consacrée à l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006. En effet, d’une part, si la Commission peut réagir à certains arguments invoqués par les États membres au cours de la procédure d’apurement et, d’autre part, si les discussions entre la Commission et les États membres peuvent progressivement se focaliser sur certains aspects des griefs invoqués au début de la procédure, encore faut-il que lesdits griefs et les mesures correctives qui y sont afférentes soient identifiés de manière suffisamment précise dans la première communication, ainsi que l’exige l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce pour les motifs rappelés aux points 98 à 104 ci-dessus.

109    Eu égard à ce qui précède, c’est à bon droit que la République française a excipé, dans le cadre du premier moyen, d’une violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006. Partant, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur le second moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’annexe III du règlement no 73/2009.

 Sur les conséquences découlant de l’examen du premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006

110    La Commission prétend, en substance, que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, tout comme le second moyen, tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’annexe III du règlement no 73/2009, visent à contester uniquement une partie des motifs qui ont fondé la correction financière de 2 %, c’est-à-dire la partie afférente à la prétendue interprétation incorrecte de la réglementation de l’Union relative aux critères d’éligibilité des éléments du paysage au regard des règles sur les BCAE. Or la correction financière de 2 % susvisée serait également fondée sur d’autres motifs, qui ne sont pas contestés par la République française, à savoir l’absence de photo-interprétation systématique et les contrôles déficients relatifs aux critères d’admissibilité, l’absence d’intégration systématique des résultats des contrôles sur place dans le RPG et la méthode de calcul des paiements et des sanctions, lesquels justifieraient également l’application d’une correction financière de 2 % sur la même assiette de paiements. Dès lors, elle estime que, même à supposer fondé le premier moyen invoqué par la République française, ce moyen ainsi que le second moyen devraient en tout état de cause être rejetés comme inopérants, car ils ne seraient pas susceptibles d’entraîner l’annulation partielle de la décision attaquée.

111    La République française reconnaît qu’elle ne conteste qu’une partie des motifs de la correction financière de 2 % appliquée dans le secteur des aides directes à la surface du premier pilier, mais estime que les premier et second moyens qu’elle invoque ne sont pas pour autant inopérants. À cet égard, elle fait valoir, en substance, que, si elle ne peut pas contester les motifs de la décision attaquée dans le cadre du présent recours, elle ne pourra plus remettre en cause la légalité d’une éventuelle décision future de la Commission lui imposant une correction financière majorée au titre de la récurrence sur le fondement de ces mêmes motifs, ce qui, selon elle, est contraire au principe de protection juridictionnelle effective.

112    Dans la duplique, la Commission conteste l’intérêt à agir de la République française aux fins d’éviter une éventuelle récurrence future et purement hypothétique. Au demeurant, elle observe que la République française n’a pas contesté les corrections retenues pour les années 2009 et 2010 dans le cadre de procédures d’apurement précédentes, lesquelles étaient fondées essentiellement sur les mêmes griefs, et, partant, qu’une éventuelle correction future majorée au titre de la récurrence pourrait en tout état de cause être d’ores et déjà retenue sur la base des années 2009 et 2010, sans qu’il soit nécessaire de se fonder sur les années de demande 2011 et 2012.

113    À titre liminaire, il y a lieu de rejeter l’argument de la République française selon lequel, en substance, l’absence d’examen, par le Tribunal, des moyens qu’elle a invoquées à l’encontre d’une partie des motifs ayant fondé la correction financière litigieuse de 2 % porterait atteinte au principe de protection juridictionnelle effective. En effet, il ressort des points 90 à 109 ci-dessus que le Tribunal a examiné le premier moyen invoqué par la République française. Dans ces circonstances, aucune violation du principe de protection juridictionnelle effective n’est caractérisée en l’espèce.

114    Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, même si l’un des motifs sur lesquels un acte litigieux est fondé est entaché d’erreur, ce vice peut cependant ne pas conduire à l’annulation de cet acte si les autres motifs de la décision attaquée sont suffisants pour en établir le bien-fondé (voir arrêt du 29 mars 2017, Pays-Bas/Commission, T‑501/15, non publié, EU:T:2017:230, point 70 et jurisprudence citée).

115    En l’espèce, la République française ne conteste pas, d’une part, que, dans le cadre du présent recours, elle remet uniquement en cause une partie des motifs de la correction financière afférente aux aides directes à la surface du premier pilier en France et, d’autre part, que la Commission était en droit d’appliquer une correction financière de 2 % au titre de chacune des carences mentionnées au point 12.8.1 de l’annexe du rapport de synthèse du 12 décembre 2014, à l’exception de celles relatives à la Haute-Corse, à savoir les faiblesses du RPG affectant les contrôles administratifs, les déficiences des contrôles sur place, l’incompatibilité de la méthode de calcul des paiements et des sanctions avec l’article 56 du règlement no 1122/2009 et l’absence de recouvrement rétroactif des paiements indus.

116    Dès lors, nonobstant l’irrégularité procédurale qui affecte le motif de la correction financière relatif à l’interprétation incorrecte de la réglementation de l’Union sur les BCAE (voir points 92 à 109 ci-dessus), le premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, tout comme le second moyen, invoqué à titre subsidiaire et à supposer qu’il soit fondé, ne sauraient entraîner l’annulation partielle de la décision attaquée à défaut, pour la République française, d’avoir démontré que tous les motifs sur lesquels était fondée la correction forfaitaire de 2 % litigieuse étaient entachés d’illégalité (voir, en ce sens, arrêt du 29 mars 2017, Pays-Bas/Commission, T‑501/15, non publié, EU:T:2017:230, point 74).

117    À l’audience, la République française a fait valoir que les premier et second moyens étaient opérants dès lors qu’ils portaient sur un motif de la décision attaquée qui était étroitement lié aux autres motifs de cette décision. À cet égard, elle a soutenu que les constats et griefs formulés par la Commission étaient, pour une large partie, liés au différend relatif aux éléments du paysage tels que les bosquets pâturables ou les mares. À titre d’exemple, la République française a allégué que les défaillances liées à l’absence de photo-interprétation systématique des images, ou encore à l’absence de mise à jour du système d’identification des parcelles agricoles, avaient été, pour une large partie, retenues à la suite de constats portant sur des buissons denses, des arbres, des bois, des zones forestières ou encore des étangs. Elle a ajouté qu’il ressortait de la communication formelle du 25 septembre 2014 que l’interprétation française des particularités topographiques causait un risque aussi bien dans le cadre de la mise à jour du RPG que lors des contrôles sur place. Le différend sur l’interprétation des particularités topographique aurait donc eu une influence décisive sur la motivation de la décision attaquée dans tout son volet relatif aux aides à la surface.

118    À cet égard, il suffit de constater qu’une partie des motifs qui fondent la correction financière de 2 % litigieuse n’entretient aucun lien avec les irrégularités contestées par la République française dans le cadre du présent recours. Il en est ainsi des motifs relatifs au calcul des paiements et sanctions et à l’absence de recouvrement rétroactif des paiements indus (voir point 115 ci-dessus). Or, les deux motifs susmentionnés, qui ne sont pas contestés par la République française, suffisent à fonder la correction forfaitaire de 2 % retenue à son égard.

119    Eu égard à ce qui précède, nonobstant la violation de la garantie procédurale dont bénéficiait la République française en application de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, constatée aux points 97 à 104 ci-dessus, la correction financière de 2 % contestée par la République française ne saurait être annulée sur cette base.

 Sur la correction forfaitaire de 100 % appliquée aux aides directes à la surface du premier pilier octroyées en Haute-Corse au titre des années de demande 2011 et 2012

120    À l’appui de son recours portant sur la correction financière de 100 %, appliquée aux aides directes à la surface du premier pilier octroyées en Haute-Corse au titre des années de demande 2011 et 2012, la République française invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 et des droits de la défense. Le second moyen, invoqué à titre subsidiaire, est tiré, en substance, de la violation de l’obligation de motivation, d’un défaut d’examen, de la violation du principe de proportionnalité ainsi que de la violation du document VI/5330/97.

121    Dans le cadre du premier moyen, la République française fait valoir, en substance, que la correction de 100 % appliquée aux aides directes à la surface octroyées en Haute-Corse au titre des années de demande 2011 et 2012 viole l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006 et ses droits de la défense. À cet égard, elle prétend que la première communication du 14 mars 2013, qui fait état des résultats de l’enquête AA/2012/06 relative aux années de demande 2011 et suivantes, ne mentionne pas d’irrégularité en ce qui concerne les aides directes à la surface octroyées en Haute-Corse. Pour la République française, en substance, le fait que l’enquête AA/2012/06 ait été fusionnée avec la précédente enquête AA/2011/10, dans laquelle était évoquée l’irrégularité afférente aux aides directes à la surface octroyées en Haute-Corse, ne saurait justifier l’absence de mention de ladite irrégularité dans la première communication du 14 mars 2013. Selon elle, toute solution contraire permettrait à la Commission de fonder une correction financière non sur ses propres constatations, mais sur une présomption fondée sur des constatations afférentes à une enquête différente de celle pertinente pour les années concernées par la correction financière. Enfin, à l’audience, la République française a soutenu que la première communication du 12 août 2011 ne faisait pas non plus état de carences en Haute-Corse et n’indiquait pas en quoi le cas de ce département était plus spécifique ou plus grave que celui des autres départements français au point de justifier une correction de 100 %. À cet égard, elle a renvoyé à la réponse de la Commission à une question écrite du Tribunal, où celle-ci a admis que c’était uniquement lors des échanges bilatéraux avec les autorités françaises que la situation en Haute-Corse avait été débattue.

122    Premièrement, la Commission souligne que, dans le cadre de la phase écrite de la procédure, la République française n’a pas émis de contestation concernant la première communication du 12 août 2011 relative à l’enquête AA/2011/10. Or, dans cette communication, la Commission aurait contesté de manière suffisamment précise le caractère imprécis de la définition des surfaces fourragères, notamment, en Haute-Corse. Elle ajoute que la République française a pu se défendre sur cette question, notamment dans sa lettre du 27 février 2012. Deuxièmement, elle soutient que, dans la mesure où les enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06 ont été fusionnées, la première communication du 12 août 2011, qui précède celle du 14 mars 2013, vaut pour la procédure administrative dans son ensemble et, partant, couvre également l’enquête AA/2012/06. Troisièmement, elle précise que la première communication du 14 mars 2013 indiquait que les irrégularités constatées précédemment continueraient de servir de base à une correction financière jusqu’à ce que les mesures correctives nécessaires aient été mises en œuvre. Par conséquent, la Commission prétend que la République française pouvait se reporter à la première communication du 12 août 2011 pour identifier et connaître précisément les irrégularités et les mesures correctives nécessaires pour y remédier. Enfin, dans sa réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a admis que c’était lors des échanges bilatéraux avec la République française que le cas de la Haute-Corse avait été débattu.

123    Il convient de rappeler que la décision finale et définitive relative à l’apurement des comptes doit être prise à l’issue d’une procédure contradictoire spécifique au cours de laquelle les États membres concernés doivent disposer de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue (voir point 92 ci-dessus).

124    Par ailleurs, il découle d’une jurisprudence constante que, lorsque des irrégularités justifiant l’application d’une correction financière persistent après la date de la communication écrite des résultats des vérifications, la Commission est en droit et a même l’obligation de tenir compte de cette situation lorsqu’elle détermine la période sur laquelle doit porter la correction financière en cause (arrêts du 9 janvier 2003, Grèce/Commission, C‑157/00, EU:C:2003:5, point 45, et du 7 juin 2013, Portugal/Commission, T‑2/11, EU:T:2013:307, point 63).

125    En l’espèce, en premier lieu, la Commission ne conteste pas que, dans la première communication du 14 mars 2013, adoptée à l’issue de l’enquête AA/2012/06 afférente aux années de demande 2011 et 2012, le problème concernant la définition des surfaces fourragères peu productives en Haute-Corse n’était pas évoqué.

126    En second lieu, dans la première communication du 12 août 2011, adoptée à l’issue de l’enquête AA/2011/10 afférente à l’année de demande 2010, la Commission a constaté, notamment, l’existence, dans certains départements français, d’une définition imprécise des superficies fourragères peu productives et des landes et parcours. À titre d’exemple, la Commission a visé la définition des superficies fourragères peu productives et des landes et parcours consacrée par trois arrêtés préfectoraux adoptés respectivement dans les départements français du Gers, du Finistère et de Corse-du-Sud. En outre, la Commission a invité une nouvelle fois les autorités françaises à fournir un calendrier mentionnant les mesures qu’elles envisageaient de prendre pour remédier aux différentes carences du RPG indiquées dans la première communication du 12 août 2011.

127    Si la première communication du 12 août 2011 se réfère certes à une liste non exhaustive de départements français concernés par l’imprécision de la définition des surfaces fourragères peu productives, elle ne vise pas expressément un problème de définition des surfaces fourragères peu productives en Haute-Corse.

128    Dans sa réponse à une question écrite du Tribunal, la Commission a d’ailleurs admis que c’est lors des échanges bilatéraux avec la République française que le cas de la Haute-Corse a été débattu (voir point 122 ci-dessus).

129    Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la première communication du 12 août 2011 n’a pas identifié de manière suffisamment claire l’irrégularité reprochée à la République française ayant donné lieu à la correction de 100 % contestée afférente aux aides à la surface octroyées en Haute-Corse.

130    Dès lors, l’argument de la Commission selon lequel, les enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06 ayant été fusionnées, la première communication du 12 août 2011, qui précède celle du 14 mars 2013, vaut pour la procédure administrative dans son ensemble et, partant, couvre également l’enquête AA/2012/06, doit être rejeté.

131    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que, en retenant dans le rapport de synthèse du 12 décembre 2014 que la définition des superficies fourragères peu productives en vigueur en Haute-Corse n’était pas conforme à la définition des « pâturages permanents » visée à l’article 2, sous c), du règlement no 1120/2009 et que cette irrégularité justifiait, pour les années de demande 2011 et 2012, l’application d’une correction financière de 100 %, alors même qu’une telle irrégularité n’avait pas été clairement mentionnée dans les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013, la Commission a violé la garantie procédurale consacrée à l’article 11 du règlement no 885/2006.

132    L’argument de la Commission selon lequel, en substance, elle pouvait conclure que l’irrégularité constatée en Haute-Corse pour l’année de demande 2010 persistait pour les années de demande 2011 et 2012, dès lors que la République française n’avait pas démontré avoir adopté les mesures appropriées pour faire cesser cette irrégularité, doit être rejeté.

133    D’une part, à défaut d’avoir identifié à suffisance de droit l’irrégularité litigieuse dans la première communication du 12 août 2011, il ne saurait être fait grief à la République française de ne pas avoir apporté des preuves de l’adoption de mesures correctives pour mettre fin à ladite irrégularité.

134    D’autre part, force est de constater que c’est dans la communication formelle du 25 septembre 2014 que la Commission a, pour la première fois, indiqué clairement que l’irrégularité relative à la définition des surfaces fourragères peu productives en Haute-Corse avait été constatée lors d’une précédente enquête AA/2009/11 afférente aux années de demande 2008, 2009 et 2010 et qu’il était reproché aux autorités françaises de ne pas avoir communiqué d’informations additionnelles permettant à la Commission de revoir son appréciation sur la situation en Haute-Corse. En conséquence, la correction de 100 % contestée n’est pas fondée sur une irrégularité constatée dans le cadre des enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06, mais sur une irrégularité constatée dans le cadre d’une autre procédure d’apurement des comptes (enquête AA/2009/011), dont il n’est pas fait mention dans les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013, en violation de la jurisprudence constante rappelée aux points 92 à 96 ci-dessus.

135    Compte tenu de ce qui précède, il ne peut pas être fait application de la jurisprudence citée au point 124 ci-dessus. En effet, afin de pouvoir prononcer une correction au motif que l’irrégularité litigieuse, constatée dans le cadre de la précédente enquête AA/2009/011, avait persisté pour les années de demande 2011 et 2012, il aurait fallu, à tout le moins, que les premières communications du 12 août 2011 et du 14 mars 2013 afférentes aux enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06 eussent relevé l’absence ou l’insuffisance des mesures prises par les autorités françaises aux fins de mettre un terme à cette irrégularité, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.

136    Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la Commission selon lequel, en substance, la République française a exercé ses droits de la défense tout au long de la procédure et, en particulier dans sa lettre de réponse à la première communication du 12 août 2011, ainsi que dans un courriel du 5 septembre 2014, premièrement, il y a lieu de constater que, dans la réponse des autorités françaises à la première communication du 12 août 2011, adressée à la Commission par lettre du 27 février 2012, il est seulement indiqué que le problème relatif à l’imprécision de la définition des surfaces fourragères peu productives renvoyait à une précédente procédure d’apurement au cours de laquelle les autorités françaises avaient apporté à la Commission des éléments complémentaires lors d’une réunion bilatérale tenue au mois d’octobre 2011. Deuxièmement, en annexe à la défense, la Commission a produit le procès-verbal de la réunion bilatérale susmentionnée, qui a eu lieu dans le cadre d’une autre procédure d’apurement des comptes (enquête AA/2010/08), dont il ressort que la définition des surfaces fourragères peu productives avait été modifiée en Haute-Corse à compter de l’année de demande 2011. Or, il ne ressort pas du dossier de l’affaire que, dans le cadre de la procédure d’apurement des comptes afférente aux enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06, la Commission ait communiqué aux autorités françaises les motifs pour lesquels elle estimait que cette nouvelle définition n’était pas conforme à la notion de « pâturages permanents », privant ainsi la République française de la possibilité de se défendre.

137    En outre, il ressort des termes du courriel du 5 septembre 2014 adressé à la Commission par les autorités françaises (voir point 136 ci-dessus) que celui-ci contient « les informations relatives à l’impact de la révision du référentiel des parcelles admissibles en Corse, réalisée suite à la mission d’enquête AA/2009/11 ». Il est également indiqué dans le courriel que, selon les autorités françaises, la question des parcelles admissibles en Corse n’avait pas donné lieu à des échanges dans le cadre de l’enquête AA/2011/10 et de l’enquête AA/2012/06. Ainsi, contrairement à ce que prétend la Commission, il ne saurait être considéré que les autorités françaises ont exercé leurs droits de la défense dans le courriel du 5 septembre 2014 susvisé.

138    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’accueillir le premier moyen. À la différence de la correction de 2 % appliquée dans le secteur des aides à la surface du premier pilier (voir point 115 ci-dessus), la correction de 100 % contestée est fondée sur un seul motif, tiré de la non-conformité de la définition des surfaces fourragères peu productives en vigueur en Haute-Corse avec la définition de « pâturages permanents », visée à l’article 2, sous c), du règlement no 1120/2009. Dès lors, il y a lieu d’annuler partiellement la décision attaquée, sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen invoqué à titre subsidiaire.

 Sur la correction forfaitaire de 5 % appliquée aux ICHN octroyées au titre des exercices financiers 2010 à 2013 sur le fondement du PDRH (enquête RD 2/2011/03)

139    À l’appui du recours portant sur le troisième groupe de corrections de 5 % appliqué aux ICHN (mesures 211 et 212) octroyées au titre des exercices financiers 2010 à 2013, la République française invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 10, paragraphes 2 et 4, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006 et de l’article 4, paragraphe 1, de l’article 10, paragraphe 2, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 65/2011. Le deuxième moyen, invoqué à titre subsidiaire, est tiré, en substance, d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que la Commission aurait étendu la correction financière aux dépenses afférentes aux ovins n’ayant pas fait l’objet d’une demande de prime à la brebis et pour lesquels un comptage avait eu lieu lors des contrôles sur place effectués par les autorités françaises. Le troisième moyen est tiré, en substance, de la violation de la garantie procédurale visée à l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006.

140    Avant l’examen au fond des moyens invoqués par la République française, il y a lieu de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées par la Commission.

 Sur les fins de non-recevoir concernant la contestation de la correction financière afférente aux ICHN octroyées en Corse et la mesure 214

141    La Commission soulève l’irrecevabilité partielle de la requête en ce qu’elle manque de clarté au regard de l’étendue de l’objet du litige. À cet égard, elle fait valoir, en substance, que, par le premier moyen, la République française a contesté uniquement la correction financière relative aux dépenses afférentes aux mesures 211 et 212 octroyées en France continentale sur le fondement du PDRH (enquête RD 2/2011/03) et n’a pas contesté la correction analogue appliquée aux dépenses engagées en Corse sur le fondement du programme de développement rural de la Corse pour la période 2007-2013 (enquête RD 2/2012/09). À cet égard, premièrement, elle fait notamment valoir que le troisième tiret des conclusions de la requête vise exclusivement l’annulation de la correction financière en ce qui concerne les mesures d’aide ICHN de l’axe 2 du PDRH et que cet intitulé est repris à plusieurs endroits de la requête. Deuxièmement, elle relève que la requête ne comporte que de vagues mentions de l’enquête RD 2/2012/09. Troisièmement, elle estime qu’il ne ressort aucunement des moyens qui sont développés aux points 159 à 213 de la requête que le recours s’étendrait également au programme de développement rural de la Corse. Par ailleurs, elle soutient qu’il ne ressort pas des conclusions de la requête que la République française ait contesté les corrections portant sur la mesure 214.

142    D’une part, la République française confirme que le recours ne concerne que la correction financière afférente aux mesures 211 et 212 et, partant, qu’elle ne conteste pas la correction financière appliquée à la mesure 214. D’autre part, elle prétend que le recours concerne également la correction financière appliquée aux dépenses qu’elle a engagées en Corse au titre du programme de développement rural de la Corse. À cet égard, tout d’abord, elle fait valoir que, dans la requête, elle a exposé les résultats de l’enquête RD 2/2011/03 et de l’enquête RD 2/2012/09 ainsi que les corrections appliquées dans le cadre de chacune desdites enquêtes. Ensuite, elle rappelle qu’elle a produit les documents relatifs à chacune des deux enquêtes susmentionnées qui viennent au soutien de son argumentation. En outre, elle estime que le fait qu’elle n’ait pas mentionné le programme de développement rural de la Corse dans les conclusions de la requête n’est pas suffisant pour établir l’absence de contestation de la correction appliquée aux dépenses relatives à la Corse. Enfin, elle relève que l’absence de mention expresse de la Corse dans la requête n’a pas empêché la Commission de se défendre sur ce point.

143    Dans la duplique et à l’audience la Commission a soutenu, en substance, que la République française ne pouvait pas, au stade de la réplique, compléter la saisine du Tribunal en présentant une nouvelle demande visant à obtenir l’annulation de la correction appliquée au titre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du programme de développement rural de la Corse. Pour la Commission, la République française est donc forclose à contester cette correction.

144    Il résulte de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable au Tribunal aux termes de l’article 53 dudit statut, ainsi que de l’article 76 du règlement de procédure du Tribunal, que toute requête introductive d’instance doit indiquer de manière claire et précise l’objet du litige et que les conclusions de la partie requérante doivent être exposées de manière précise et non équivoque, puisque, à défaut, le Tribunal risquerait de statuer infra ou ultra petita et les droits de la partie défenderesse risqueraient de se trouver méconnus (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2014, Electrabel/Commission, C‑84/13 P, non publié, EU:C:2014:2040, point 49 ; ordonnance du 13 avril 2011, Planet/Commission, T‑320/09, EU:T:2011:172, point 22, et arrêt du 26 janvier 2017, GGP Italy/Commission, T‑474/15, EU:T:2017:36, points 31 et 32 et jurisprudence citée).

145    Dès lors, en application de l’article 76 du règlement de procédure, seules les conclusions exposées dans la requête introductive d’instance peuvent être prises en considération par le Tribunal et le bien-fondé du recours doit être examiné uniquement au regard des conclusions contenues dans la requête introductive d’instance (voir arrêt du 26 octobre 2010, Allemagne/Commission, T‑236/07, EU:T:2010:451, point 27 jurisprudence citée).

146    Enfin, si l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige [voir, par analogie, arrêt du 13 juillet 2018, PS/BEI, T‑612/16, non publié, EU:T:2018:483, point 38 et jurisprudence citée].

147    En l’espèce, d’une part, la République française ayant confirmé que son recours ne portait pas sur la correction financière appliquée à la mesure 214 (voir point 142 ci-dessus), il n’y a plus lieu d’examiner la fin de non-recevoir de la Commission qui se rapporte à ladite mesure.

148    D’autre part, en ce qui concerne l’irrecevabilité de la contestation de la correction financière appliquée dans le cadre de l’enquête RD 2/2012/09 afférente à la Corse, premièrement, il convient de relever que le troisième tiret des conclusions de la requête vise uniquement l’annulation partielle de la décision attaquée en ce que cette dernière a écarté du financement de l’Union les dépenses effectuées dans le cadre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du PDRH.

149    Deuxièmement, aucune conclusion claire et précise n’est formulée dans la requête en ce qui concerne l’annulation de la correction afférente à la Corse.

150    Troisièmement, à l’exception de la partie de la requête portant rappel du déroulement de la procédure d’apurement des comptes (points 149 à 158 de la requête), l’acte introductif d’instance ne contient aucune référence à la correction appliquée au titre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du programme de développement rural de la Corse.

151    Eu égard à ce qui précède, et contrairement à ce que prétend la République française, il ne ressort pas de la requête qu’elle avait demandé l’annulation de la correction financière appliquée aux dépenses effectuées au titre des ICHN versées en Corse ayant fait l’objet de l’enquête RD 2/2012/09.

152    La conclusion qui précède ne saurait être remise en cause par l’argument de la République française selon lequel des documents relatifs à l’enquête RD 2/2012/09 ont été produits en annexe de la requête.

153    En effet, il découle de la jurisprudence que, afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête même. Si ce texte peut être étayé et complété sur des points spécifiques par des renvois à des passages déterminés de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits, même annexés à la requête, ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels dans la requête et, en particulier, l’absence de conclusions. Il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, les moyens et arguments qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours, les annexes ayant une fonction purement probatoire et instrumentale (voir, en ce sens, ordonnance du 19 mai 2008, TF1/Commission, T‑144/04, EU:T:2008:155, points 28 à 31 et jurisprudence citée).

154    Dès lors, le fait que des documents relatifs à l’enquête RD 2/2012/09 ont été produits en annexe de la requête ne saurait pallier l’absence de conclusions claires et précises, dans les motifs de la requête, visant à l’annulation de la correction appliquée dans le cadre de ladite enquête.

155    Enfin et en tout état de cause, dans l’hypothèse où la République française aurait tenté, dans le cadre de la réplique, d’invoquer un nouveau chef de conclusions ou de procéder à la modification de son chef de conclusions visant à l’annulation de la correction financière appliquée aux mesures de développement rural adoptées sur le fondement du PDRH, en l’étendant aux mesures analogues adoptées sur le fondement du programme de développement rural de la Corse, il convient de rappeler la jurisprudence citée au point 145 ci-dessus selon laquelle seules les conclusions de la requête peuvent être prises en considération.

156    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d’accueillir la fin de non-recevoir soulevée par la Commission et, partant, de déclarer irrecevable le chef de conclusions de la République française visant l’annulation de la correction financière appliquée au titre de l’aide ICHN relative à l’axe 2 du programme de développement rural de la Corse. En conséquence, il n’y a pas lieu de se prononcer sur le troisième moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 885/2006, invoqué par la requérante dans la réplique au soutien de ce chef de conclusions (voir, par analogie, arrêt du 19 juillet 2017, DD/FRA, T‑742/15 P, non publié, EU:T:2017:528, point 36).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 10, paragraphes 2 et 4, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006 ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, de l’article 10, paragraphe 2, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 65/2011

157    La République française fait grief à la Commission d’avoir violé l’article 10, paragraphes 2 et 4, et l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006 ainsi que l’article 4, paragraphe 1, l’article 10, paragraphe 2, et l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 65/2011 en ce qu’elle a reproché aux autorités françaises d’avoir manqué à leurs obligations en matière de contrôle du critère de chargement, en raison de l’absence de comptage des animaux lors de contrôles sur place spécifiques aux ICHN. Le moyen de la République française se divise, en substance, en deux branches. Dans le cadre de la première branche, la République française soutient qu’elle n’était pas obligée de procéder au comptage des animaux lors de contrôles sur place aux fins de vérifier le critère de chargement, une telle obligation ne découlant pas des dispositions susmentionnées. Dans le cadre de la seconde branche, elle fait valoir que, en tout état de cause, les comptages effectués par les autorités françaises lors des contrôles sur place dans le cadre de l’identification bovine et des primes bovines permettaient de tenir compte des spécificités du régime des ICHN et de déterminer le critère de chargement dans le cadre de ce régime. Selon elle, les autorités françaises n’étaient donc pas tenues de procéder à de nouveaux contrôles sur place spécifiques aux ICHN.

158    La Commission, conteste les arguments de la République française.

159    En premier lieu, il ressort de la jurisprudence que, même si la réglementation de l’Union relative à l’octroi des aides et des primes n’impose pas expressément aux États membres d’instaurer des mesures de surveillance et des modalités de contrôle spécifiques, il n’en demeure pas moins que, en vertu de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006 ainsi que de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 65/2011, il incombe aux États membres d’effectuer des contrôles sur place qui portent sur la totalité des engagements et des obligations d’un bénéficiaire, y compris donc celles découlant du droit national, qu’il est possible de contrôler au moment de la visite (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission, C‑373/15 P, EU:C:2017:55, point 71, et du 1er février 2018, France/Commission, T‑518/15, EU:T:2018:54, point 52).

160    En l’occurrence, le PDRH afférent à la période 2007-2013, tel qu’il a été approuvé par la Commission, prévoyait, aux fins de l’admissibilité aux ICHN, un critère de chargement exprimé en UGB visant à encadrer la densité du bétail présent sur des surfaces fourragères aux fins d’éviter des phénomènes de sous-pâturage et de surpâturage.

161    Les autorités françaises étaient ainsi tenues, lors des contrôles sur place, de déterminer le critère de chargement au moyen d’un comptage des animaux présents sur l’exploitation au moment de la visite d’inspection, comptage d’ailleurs prévu au point 7.2 de la circulaire ICHN, afin de vérifier si, ponctuellement, ce critère était respecté et, ainsi, de corroborer les données ressortant des contrôles administratifs (arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission, C‑373/15 P, EU:C:2017:55, point 72).

162    Dès lors, il y a lieu de rejeter les allégations de la République française tirées, d’une part, de l’absence d’obligation de procéder au comptage des animaux lors des contrôles sur place et, d’autre part, du caractère inadéquat du comptage des animaux aux fins de contrôler le critère de chargement.

163    De surcroît, il convient de rejeter l’argument de la République française selon lequel le comptage des animaux le jour du contrôle ne permet pas de vérifier le respect du critère de chargement, ce critère étant fondé sur un taux de chargement annuel moyen.

164    En effet, la République française ne précise pas, dans ses écritures, la base légale, conformément au droit de l’Union, sur laquelle le critère de chargement devrait être considéré comme un taux moyen annuel. Au demeurant, le PDRH, qui a été élaboré par la République française, n’établit pas que le critère de chargement repose sur un taux moyen annuel, mais se limite à imposer que le chargement soit compris entre un seuil minimal et un plafond maximal définis par le préfet pour chaque zone ou chaque sous-zone du département, en fonction de ses caractéristiques agroclimatiques, sans préciser qu’il s’agit d’une valeur annuelle. Par ailleurs, à supposer même que la période concernée soit une année, les bénéficiaires des ICHN doivent respecter les valeurs de la fourchette fixée. Des variations entre les valeurs maximales et les valeurs minimales peuvent se produire tout au long de la période concernée et, en raison de l’impossibilité de contrôler quotidiennement ces valeurs, une moyenne pour l’année peut être acceptée. Cependant, afin d’assurer le respect de la condition relative au chargement en bétail des exploitations, cette moyenne doit être calculée sur la base des valeurs qui se trouvent entre les valeurs maximales et les valeurs minimales de la fourchette (voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2015, Espagne/Commission, T‑561/13, non publié, EU:T:2015:496, point 55).

165    Accepter l’interprétation de la République française selon laquelle le respect du critère de chargement doit se baser sur le calcul d’une moyenne sur l’année permettrait aux bénéficiaires de dépasser, pendant certains moments de l’année, les valeurs maximales et minimales de la fourchette prévues dans le PDRH, dans la mesure où de tels dépassements n’auraient pas d’incidence sur la valeur moyenne finale pour l’ensemble de l’année. Cette façon de procéder favoriserait ainsi des comportements stratégiques de la part des bénéficiaires, qui pourraient être peu compatibles avec les objectifs visés par les aides en question, notamment la sauvegarde et la promotion des modes d’exploitation durables. En effet, le dépassement des valeurs maximales à certains moments de l’année pourrait donner lieu à des situations de surexploitation des surfaces concernées et le dépassement des valeurs minimales à des situations de sous-exploitation desdites surfaces (voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2015, Espagne/Commission, T‑561/13, non publié, EU:T:2015:496, point 56).

166    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen.

167    En second lieu, il convient de vérifier si, ainsi que l’affirme la République française, les autorités françaises n’étaient pas tenues de procéder à de nouveaux contrôles sur place spécifiques aux ICHN dès lors qu’elles avaient déjà procédé au comptage des animaux dans le cadre de contrôles sur place au titre de la gestion de l’identification bovine.

168    Il découle de la jurisprudence, que, en principe, il est permis aux États membres de conduire les contrôles sur place, au titre des articles 12 et suivants du règlement no 1975/2006 et des articles 12 et suivants du règlement no 65/2011, tels que les contrôles sur place au titre des ICHN, en même temps que les contrôles sur place effectués au titre de l’identification animale ou des primes bovines et ovines, dans la mesure où deux conditions sont démontrées, à savoir, premièrement, que ces derniers constituent des contrôles prévus dans la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles, au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006, dont le libellé correspond à celui de l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 65/2011, et, deuxièmement, qu’ils puissent être effectués en même temps que les contrôles prévus aux articles 12 et suivants de ces règlements (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 26 janvier 2017, France/Commission, C‑373/15 P, EU:C:2017:55, points 95 et 96, et du 1er février 2018, France/Commission, T‑518/15, EU:T:2018:54, point 60).

169    S’agissant de la première condition mentionnée au point 168 ci-dessus, les parties conviennent que les contrôles sur la gestion des primes bovines constituent des contrôles prévus par la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles. En revanche, elles s’opposent, dans leurs écritures, sur la question de savoir si les contrôles effectués dans le cadre de la gestion de l’identification bovine constituent des contrôles prévus dans la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles.

170    À cet égard, il suffit de constater que la Commission a reconnu que, dans l’arrêt du 1er février 2018, France/Commission (T‑518/15, EU:T:2018:54, points 62 et 63), le Tribunal avait jugé que les contrôles sur place effectués au titre de l’identification bovine étaient des contrôles prévus par la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles, au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006.

171    Partant, il y a lieu de considérer que la première des deux conditions mentionnées au point 168 ci-dessus est remplie.

172    S’agissant de la seconde condition mentionnée au point 168 ci-dessus, la République française, soutient que les comptages effectués par les autorités françaises lors des contrôles sur place au titre de la gestion de l’identification bovine et des primes bovines permettent de tenir compte des spécificités du régime des ICHN et de déterminer le critère de chargement dans le cadre de ce régime. Selon elle, un seul et même comptage des animaux pouvait donc valoir au titre de chacun de ces contrôles.

173    La Commission conteste, en substance, que les contrôles au titre de l’identification bovine ou des primes bovines, invoqués par la République française dans la présente affaire, puissent servir au contrôle du respect du critère de chargement en bétail prévu au titre des ICHN.

174    À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que, dans l’arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission (C‑373/15 P, EU:C:2017:55), la Cour a jugé qu’aucune disposition du règlement no 1975/2006 ne saurait être interprétée en ce sens que, dans l’hypothèse où des contrôles administratifs seraient effectués en utilisant des informations issues d’une base de données fiable, les contrôles sur place au titre de ce même règlement ne seraient plus nécessaires. En effet, pour la Cour, une telle interprétation méconnaît l’objectif des contrôles sur place, consistant notamment à vérifier la conformité des informations contenues dans les bases de données établies par les États membres, conformément à l’article 15, paragraphe 3, du règlement no 1975/2006 et à l’article 35 du règlement (CE) no 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du système intégré de gestion et de contrôle prévus par le règlement (CE) no 1782/2003 du Conseil établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs (JO 2004, L 141, p. 18) (voir, en ce sens, arrêt du 26 janvier 2017, France/Commission, C‑373/15 P, EU:C:2017:55, points 27, 60 et 74).

175    Dès lors, la circonstance alléguée par la République française, selon laquelle la base de données nationale d’identification et de traçage des bovins et de leurs produits prend en compte les deux paramètres permettant de vérifier le critère du taux de chargement, à savoir le paramètre relatif à l’âge des bovins et celui relatif à leur temps de présence moyen annuel sur l’exploitation, ne saurait exempter les autorités françaises de l’obligation du comptage des animaux lors du contrôle sur place pour effectuer les vérifications exigées au titre des règlements nos 1975/2006 et 65/2011 et pour s’assurer de la conformité des bases de données utilisées pour calculer le taux de chargement (voir, par analogie, arrêt du 1er février 2018, France/Commission, T‑518/15, EU:T:2018:54, point 70).

176    Deuxièmement, il convient de souligner qu’il ressort de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 1975/2006, dont le libellé correspond à celui de l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 65/2011, que les contrôles sur places au titre des ICHN seront effectués en même temps que d’autres contrôles prévus par la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles « dans la mesure du possible ». Il s’ensuit que, en principe, il peut exister des cas dans lesquels il n’est pas possible d’effectuer les contrôles sur place au titre des ICHN en même temps que d’autres contrôles prévus par la réglementation de l’Union sur les subventions agricoles, les contrôles conjoints n’étant pas une règle absolue, mais une simple possibilité susceptible de connaître des exceptions (voir, par analogie, arrêt du 1er février 2018, France/Commission, T‑518/15, EU:T:2018:54, point 71).

177    Troisièmement, il convient de relever, à l’instar de la Commission que la République française ne prouve pas comment, dans le système de contrôle mis en place, les comptages effectués par les autorités françaises lors des contrôles sur place dans le cadre de la gestion de l’identification bovine ou des primes bovines tiennent pleinement compte des spécificités du régime des ICHN.

178    En effet, il ressort de la jurisprudence que les contrôles au titre de l’identification animale ou des primes bovines répondent à des critères différents de ceux au titre des ICHN, en ce qui concerne notamment les installations qui font l’objet d’un contrôle, les animaux comptés ou identifiés et la périodicité des contrôles (arrêt du 1er février 2018, France/Commission, T‑518/15, EU:T:2018:54, point 73).

179    Au demeurant, la République française ne conteste pas que le comptage des animaux effectué au titre de la gestion de l’identification animale ou des primes animales n’a pas été effectué en même temps que le comptage des espèces animales ayant fait l’objet d’un comptage spécifique aux ICHN. De même, elle ne conteste pas que les animaux faisant l’objet du comptage dans le cadre des ICHN ne correspondent pas forcément à ceux faisant l’objet du comptage dans le cadre de l’identification animale et des primes animales. En effet, si ce dernier comptage porte sur tous les bovins, ovins, caprins et porcins aux fins de leur enregistrement dans les bases des données animales et de la constitution d’un échantillon représentatif pour les marques auriculaires, les contrôles sur place au titre des mesures ICHN ont pour objet toutes les espèces d’herbivores et portent, par conséquent, sur un échantillon différent.

180    Il en découle que, bien qu’il soit en théorie possible qu’un contrôle effectué au titre de la gestion de l’identification bovine ou des primes bovines puisse servir au contrôle du respect de la condition de chargement en bétail prévue au titre des ICHN, encore faut-il que toutes les spécificités des deux types de contrôles soient prises en compte lors de ce contrôle.

181    Or, force est de constater que, par ses arguments, la République française est restée en défaut de démontrer que tel était le cas en pratique. Elle n’a notamment pas prouvé que les animaux faisant l’objet de vérifications au titres de mesures ICHN ont été contrôlés lors des contrôles sur place au titre de l’identification animale ou des primes animales. De même, elle n’a pas prouvé que, lors des contrôles au titre de l’identification animale ou des primes animales, tout était mis en œuvre pour que les inspecteurs chargés d’effectuer ces contrôles tiennent compte à la fois des critères applicables aux contrôles au titre de l’identification animale ou des primes animales et de ceux applicables aux contrôles au titre des ICHN afin que les données recueillies puissent être exploitées au titre des deux types de mesures en cause, à savoir les mesures « animales » et les mesures « surfaces ».

182    Ce constat ne saurait être remis en cause par les notes adressées par les autorités françaises à la Commission, produites en annexe à la requête et ayant pour objet le rapport sur les contrôles relatifs à l’identification des bovins et des petits ruminants réalisés en France en 2009 et en 2010, ainsi que par les deux courriers adressés par deux éleveurs français au ministre de l’Agriculture français, produits en annexe à la réplique, ces documents n’établissant pas que les animaux ayant fait l’objet de vérifications au titre de mesures ICHN avaient été contrôlés lors des contrôles sur place au titre de l’identification animale ou des primes animales. En outre, force est de constater que, s’ils contiennent des indices que des croisements sont parfois effectués, les documents susmentionnés ne permettent pas de démontrer que ces croisements sont systématiques. Par ailleurs, et en tout état de cause, quand bien même ces croisements seraient systématiques, ces documents ne prouvent nullement que les données recueillies lors du contrôle l’ont été en tenant compte de toutes les spécificités liées aux deux types de contrôles en cause.

183    Dans ces circonstances, l’argument de la République française selon lequel un seul et même comptage des animaux peut valoir au titre des contrôles sur place dans le cadre de l’identification bovine ou des primes bovines ainsi qu’au titre des ICHN ne saurait prospérer.

184    La seconde condition mentionnée au point 168 ci-dessus n’étant pas remplie, il y a lieu de rejeter la seconde branche et, partant, le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré de l’extension illégale de la correction forfaitaire aux ovins non éligibles à la prime à la brebis

185    La République française fait grief à Commission, en substance, d’avoir inclus, dans l’assiette de la correction financière appliquée au titre de l’axe 2 du PDRH (enquête RD 2/2011/03), la partie des dépenses afférente aux ovins qui n’avaient pas fait l’objet d’une demande de prime à la brebis, alors même que ces animaux avaient fait l’objet d’un comptage lors des contrôles sur place conformément à la circulaire ICHN applicable.

186    La Commission conclut au rejet des arguments de la République française.

187    À titre liminaire, la République française ne conteste pas que l’irrégularité ayant donné lieu à la correction forfaitaire de 5 % litigieuse constitue une défaillance d’un contrôle clé et que l’application du taux forfaitaire de correction de 5 % était appropriée.

188    Par ailleurs, il ressort des points 159 à 161 ci-dessus, d’une part, que les contrôles sur place devaient permettre de vérifier le respect, au jour du contrôle, de la condition relative au chargement en bétail, laquelle conditionne l’éligibilité de la totalité des ICHN (mesures 211 et 212), et, d’autre part, que le critère de chargement se réfère à l’ensemble des animaux présents sur les exploitations bénéficiaires des ICHN (mesures 211 et 212). Ainsi, la circonstance évoquée par la République française, selon laquelle les ovins n’ayant pas fait l’objet de demande de prime ovine ont été comptés lors de contrôles sur place spécifiques aux ICHN, n’est pas de nature à pallier l’absence de comptage sur place des bovins, ovins et caprins pour lesquels une demande de prime spécifique avait été présentée, car, dans un tel cas de figure, il n’était pas possible de vérifier, lors du contrôle sur place, que le critère de chargement était respecté pour la totalité du cheptel présent sur l’exploitation au jour dudit contrôle et, partant, que les conditions d’éligibilité aux ICHN (mesures 211 et 212) étaient réunies.

189    Dès lors, la Commission n’a pas commis d’erreur en incluant dans l’assiette de la correction financière toutes les dépenses afférentes aux ICHN (mesures 211 et 212) pour lesquelles la défaillance du système de contrôle a été retenue, y compris les dépenses afférentes aux ovins qui n’ont pas fait l’objet d’une demande de prime à la brebis.

190    Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rejeter l’allégation de la République française selon laquelle le fait que la défaillance constatée concerne un point clé du système de contrôle n’a pas d’incidence sur l’assiette de la correction financière, mais uniquement sur le taux de correction appliqué. En effet, l’absence de vérification du critère de chargement global d’une exploitation lors des contrôles sur place a engendré un risque d’inéligibilité de toutes les dépenses engagées par la République française au titre des ICHN (mesures 211 et 212).

191    Au demeurant, il ressort de la communication formelle du 2 décembre 2013 que la Commission a réduit la correction forfaitaire de 10 % à 5 % précisément au motif que, pour les animaux autres que les bovins, les ovins et les caprins ayant fait l’objet d’une demande d’aide, un comptage avait été effectué sur place.

192    Les autres arguments invoqués par la République française ne sauraient infirmer la conclusion visée au point 189 ci-dessus.

193    Premièrement, la République française prétend, en substance, que son grief selon lequel la Commission aurait étendu illégalement l’assiette de la correction forfaitaire aux ovins qui n’ont pas fait l’objet d’une demande de prime a été accueilli par le Tribunal aux points 83 à 110 de l’arrêt du 30 avril 2015, France/Commission (T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250).

194    Or, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 30 avril 2015, France/Commission (T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250), le Tribunal n’a pas tranché au fond la question de la prétendue illégalité de l’inclusion, dans l’assiette de la correction financière, des dépenses afférentes aux ovins pour lesquels une prime à la brebis n’avait pas été sollicitée, car il s’est limité à constater l’existence d’une violation de la garantie procédurale dont bénéficiaient les autorités françaises en vertu de l’article 7, paragraphe 4, du règlement (CE) no 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 1999, L 160, p. 103), de l’article 31 du règlement no 1290/2005 et de l’article 11 du règlement no 885/2006 (arrêt du 30 avril 2015, France/Commission, T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250, points 108, 109 et 110).

195    Deuxièmement, la République française considère que la Commission mentionne à tort le point 113 de l’arrêt du 30 avril 2015, France/Commission (T‑259/13, non publié, EU:T:2015:250). À cet égard, force est de constater que, dans la duplique, la Commission a admis que le point 113 dudit arrêt n’était pas pertinent en l’espèce. Cette circonstance n’est toutefois pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de la correction litigieuse, laquelle se justifie au regard des motifs rappelés aux points 188 et 190 ci-dessus.

196    Dès lors, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur la correction ponctuelle de 25 % appliquée aux aides octroyées dans le cadre du régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière (enquête EX/2010/12)

197    À l’appui du recours portant sur la correction de 25 % appliquée aux aides octroyées dans le cadre du régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière, la République française invoque, en substance, trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation des articles 3 et 4 du règlement no 320/2006 et de l’article 4 du règlement no 968/2006. Le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, est tiré de la violation des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement. Le troisième moyen est tiré, en substance, de la violation du document VI/5330/97.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 3 et 4 du règlement no 320/2006 ainsi que de l’article 4 du règlement no 968/2006

198    La République française, soutenue par la République italienne et par la Hongrie, prétend, en substance, que la Commission a violé les articles 3 et 4 du règlement no 320/2006 ainsi que l’article 4 du règlement no 968/2006 en considérant que le maintien des silos litigieux sur les sites de production de sucre démantelés faisait obstacle à l’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total. En particulier, elle fait grief à la Commission d’avoir estimé que la qualification des silos litigieux d’installations de production devait être déterminée au moment de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration (ci-après le « critère posé par la Commission »). En effet, ce critère ne ressortirait pas de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), et priverait d’effet utile les deux exceptions posées par la Cour dans ledit arrêt. Par ailleurs, elle prétend, en substance, qu’il pourrait être satisfait à l’obligation de démantèlement total des installations de production même si les silos destinés au conditionnement ou à l’emballage n’étaient pas détruits, dès lors qu’il y a renonciation au quota de production et, partant, cessation définitive de la production de sucre.

199    La Commission conteste les arguments de la République française, de la République italienne et de la Hongrie.

200    À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), après avoir constaté que la notion d’« installations de production » n’était pas définie par les règlements nos 320/2006 et 968/2006, premièrement, la Cour a relevé que la notion de « production » pouvait englober également d’autres étapes de la fabrication d’un produit situées en amont ou en aval du processus chimique ou physique de transformation et, partant, qu’elle pouvait inclure le stockage du sucre qui n’était pas conditionné immédiatement après son extraction de la matière première. Ainsi, elle a conclu que le stockage pouvait être « directement lié à la production de sucre » au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 968/2006 (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 26). Deuxièmement, la Cour a considéré que les silos étaient susceptibles d’avoir une incidence directe sur les quantités de sucre pouvant être produites et sur les processus de production, qui étaient fonction de la proximité d’une installation de stockage, dans la mesure où ils permettaient notamment de différer, totalement ou partiellement, la vente du produit d’une campagne sucrière donnée et, partant, d’influer sur la situation de marché au sens du considérant 5 du règlement no 320/2006 (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, points 27 à 29). Troisièmement, elle a jugé, en substance, qu’il découlait de l’article 3, paragraphe 3, sous a) et b), du règlement no 320/2006 que, en principe, aux fins de bénéficier d’une aide à la restructuration pour démantèlement total, le complexe industriel concerné devait être mis hors service dans son intégralité et que la faculté de ne pas démanteler ou de continuer à utiliser dans l’avenir les installations autres que celles de production, tout en gardant le droit à l’aide intégrale, constituait une exception devant être interprétée étroitement (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 30).

201    À la lumière de ce qui précède, au point 31 de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a dit pour droit que les silos destinés au stockage du sucre du bénéficiaire de l’aide devaient être qualifiés d’installations de production, et ce indépendamment du fait qu’ils étaient employés également pour d’autres usages. Toutefois, la Cour a admis deux exceptions à ce principe. En effet, elle a considéré, en substance, que les silos échappaient à la qualification d’« installations de production » et, partant, à l’obligation de démantèlement, d’une part, lorsqu’il était démontré qu’ils étaient employés uniquement pour le stockage de sucre, produit sous quota, entreposé par d’autres producteurs ou acheté à ces derniers (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, points 32 et 35) et, d’autre part, lorsqu’ils étaient uniquement utilisés pour le conditionnement ou l’emballage de sucre produit ailleurs aux fins de sa commercialisation (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, points 33 et 35).

202    En l’espèce, il n’est pas contesté par la République française que, à l’issue du processus de restructuration, des silos avaient été maintenus sur plusieurs sites de production de sucre appartenant aux entreprises françaises ayant bénéficié d’une aide à la restructuration pour démantèlement total. Il n’est pas non plus contesté que, au moment de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total, les silos litigieux ne relevaient pas de l’une des deux exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737).

203    La République française, soutenue par la République italienne et par la Hongrie, considère toutefois que les circonstances susmentionnées ne sauraient justifier la correction financière dont elle a fait l’objet.

204    Il ressort des considérants 1 et 5 du règlement no 320/2006 que l’objectif de la réglementation en cause est de réduire la capacité de production de sucre non rentable dans l’Union en incitant les entreprises dont la productivité est la plus faible à abandonner leur production de sucre sous quota et à renoncer aux quotas considérés.

205    Il découle en outre du considérant 5 du règlement no 320/2006 que le régime de restructuration repose sur une participation volontaire de l’entreprise sucrière en ce qu’il vise à instaurer une incitation économique importante, sous la forme d’une aide à la restructuration adéquate (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 44).

206    Afin d’atteindre l’objectif de réduction de la capacité de production de sucre non rentable dans l’Union, poursuivi par la réglementation en cause, le législateur de l’Union a prévu deux régimes de restructuration différents en fonction du type de démantèlement opéré, à savoir le démantèlement total ou le démantèlement partiel, lesquels donnent lieu à un montant d’aide à la restructuration différent, ainsi que cela ressort de l’article 3, paragraphe 5, sous a) et b), du règlement no 320/2006, lu en combinaison avec le considérant 4 du règlement no 968/2006.

207    Premièrement, s’agissant des conditions devant être satisfaites aux fins de l’octroi d’une aide à la restructuration pour démantèlement total, l’article 3, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 3, sous b), du règlement no 320/2006 exige que l’entreprise sucrière demanderesse renonce au quota qu’elle a assigné à une ou à plusieurs de ses usines et qu’elle procède à la fermeture de l’usine et au démantèlement total des installations de production. En revanche, aux fins de l’octroi d’une aide à la restructuration pour démantèlement partiel, l’article 3, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 4, sous b), du règlement no 320/2006 exige de l’entreprise sucrière demanderesse qu’elle renonce au quota qu’elle a assigné à une ou plusieurs de ses usines et qu’elle démantèle partiellement les installations de production des usines concernées et n’utilise plus les installations de production restantes pour la fabrication de produits relevant de l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (ci-après l’« OCM sucre »).

208    Deuxièmement, le périmètre de l’obligation de démantèlement des installations de production a été précisé par l’article 4 du règlement no 968/2006.

209    Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 968/2006, l’obligation de démantèlement total, visée à l’article 3, paragraphe 1, sous a), du règlement no 320/2006, concerne les installations nécessaires à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline [article 4, paragraphe 1, sous a), du règlement no 968/2006], celles qui sont directement liées à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline et qui sont nécessaires pour la production sous le quota libéré, même si elles peuvent servir à la production d’autres produits [article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 968/2006], ainsi que toute autre installation, notamment les installations de conditionnement, qui est inutilisée et destinée à être démantelée et enlevée pour des raisons de protection de l’environnement [article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006].

210    Conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, sous a), du règlement no 320/2006 et avec le considérant 4 du règlement no 968/2006, peuvent donc être exceptionnellement conservées, en cas de démantèlement total, toutes les installations autres que celles nécessaires à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline ou qui sont directement liées à la production desdits produits, telles que les installations de conditionnement, à condition qu’elles soient utilisées et ne soient pas destinées à être démantelées et enlevées pour des raisons de protection de l’environnement.

211    Par ailleurs, l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 prévoit que, en cas de démantèlement partiel, l’obligation de démantèlement couvre les installations visées au paragraphe 1 du même article (voir point 209 ci-dessus) qui ne sont destinées ni à d’autres productions ni à un autre usage du site de l’usine conformément au plan de restructuration. En outre, il ressort de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 320/2006 que les installations de production pouvant être conservées ne doivent plus être utilisées pour la fabrication de produits relevant de l’OCM sucre. Ainsi, conformément à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 320/2006, peuvent être conservées les installations qui étaient nécessaires à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline ou qui étaient directement liées à la production desdits produits, à condition qu’elles ne soient plus utilisées pour la fabrication de produits relevant de l’OCM sucre et qu’elles soient destinées à d’autres productions ou à un autre usage du site de l’usine conformément au plan de restructuration.

212    Troisièmement, le choix entre le démantèlement total et le démantèlement partiel doit être opéré par les entreprises sucrières lors de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration.

213    En effet, il découle d’une lecture combinée de l’article 4, paragraphe 2, sous a), c), d) et e), et de l’article 4, paragraphe 3, sous c) et h), du règlement no 320/2006, ainsi que de l’article 9, paragraphe 2, sous a) et c), du règlement no 968/2006 qu’une demande d’aide à la restructuration doit inclure, notamment, l’engagement du demandeur de l’aide, d’une part, de renoncer au quota en question et, d’autre part, de démanteler totalement ou partiellement les installations de production dans un délai à fixer par l’État membre concerné, ainsi qu’un plan de restructuration qui contient, notamment, une description technique complète des installations de production concernées, un résumé des mesures et actions ainsi que l’évaluation des coûts de ces mesures et actions, le plan financier et le calendrier de réalisation des différentes mesures envisagées.

214    Conformément aux dispositions mentionnées au point 213 ci-dessus, c’est donc au plus tard à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration, pour démantèlement total ou partiel, que le bénéficiaire de l’aide doit avoir identifié l’ensemble des installations de production qu’il s’engage à démanteler conformément au plan de restructuration. Cela suppose donc, s’agissant des silos, de déterminer dès la demande d’octroi de l’aide s’ils constituent des installations de production dont le démantèlement doit être obligatoirement prévu par le plan de restructuration lorsqu’est sollicité l’octroi d’une aide à la restructuration pour démantèlement total, ou s’ils relèvent des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737).

215    Toute interprétation contraire priverait de leur substance les exigences posées à l’article 4 du règlement no 320/2006 et à l’article 9 du règlement no 968/2006 et, de surcroît, méconnaîtrait la distinction entre démantèlement partiel et démantèlement total opérée par la réglementation en cause.

216    À cet égard, d’une part, dans l’hypothèse où, à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration, les entreprises sucrières ne sauraient pas si les silos présents sur leurs sites de production constituent ou non des installations de production, ceux-ci ne seraient pas mentionnés dans le plan de restructuration en tant qu’installations de production devant être démantelées, en violation de l’article 4, paragraphe 3, sous c), du règlement no 320/2006 (voir point 213 ci-dessus).

217    En outre, l’engagement de démanteler l’ensemble des installations de production, qui doit être joint à la demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total (voir point 213 ci-dessus), serait vicié, puisque, par hypothèse, il ne porterait pas sur la totalité des installations de production existantes au jour où ledit engagement a été pris.

218    D’autre part, si la qualification des silos était appréciée à la fin du processus de restructuration, cela permettrait, dans le cas d’un démantèlement total tout comme dans le cas d’un démantèlement partiel, de conserver des silos qui, à la date de la demande d’octroi de l’aide, constituaient des installations de production au motif que, après la restructuration, ils ne seraient plus utilisés en tant qu’installations de production de sucre. Dès lors, la faculté de conservation d’une partie des installations de production ne serait plus caractéristique du démantèlement partiel, mais s’étendrait également au démantèlement total, alors même que, en raison des coûts élevés liés au démantèlement total, les opérateurs obtiendront un montant d’aide à la restructuration de 25 % supérieur à celui octroyé en cas de démantèlement partiel, ainsi que cela ressort de l’article 3, paragraphe 5, sous a) et b), du règlement no 320/2006 et du considérant 4 du règlement no 968/2006.

219    Dès lors, contrairement à ce que prétendent la République française, la République italienne et la Hongrie, la Commission n’a pas commis d’erreur en estimant que c’était à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration qu’il y avait lieu d’apprécier la qualification des silos.

220    La conclusion qui précède ne saurait être infirmée par les arguments invoqués par la République française, par la République italienne et par la Hongrie.

221    En premier lieu, la République française estime que la Commission ne saurait déduire de l’obligation d’inclure, dans les demandes d’octroi de l’aide, l’engagement de démanteler les installations de production dans un délai fixé par l’État membre, prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 320/2006, que la date à laquelle il y a lieu d’apprécier l’usage des silos serait celle de la demande d’octroi de l’aide. En effet, selon elle, la disposition susmentionnée ne porte pas sur les conditions d’octroi de l’aide à la restructuration, mais uniquement sur le contenu des demandes d’octroi des aides à la restructuration et la date à laquelle celles-ci doivent être déposées. De plus, la République française considère que l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 ne porte pas sur les conditions d’octroi de l’aide, mais concerne le contenu des demandes d’octroi de l’aide en cas de démantèlement partiel. Partant, elle conclut au rejet de l’argument de la Commission selon lequel une lecture à contrario de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 impliquerait que, en cas de démantèlement total, aucune installation n’échapperait, en principe, au démantèlement.

222    Premièrement, il découle d’une lecture combinée de l’article 4, paragraphe 2, sous a), c), d) et e), et de l’article 4, paragraphe 3, sous c), du règlement no 320/2006, ainsi que de l’article 9, paragraphe 2, sous a) et c), du règlement no 968/2006 qu’une demande d’octroi de l’aide à la restructuration doit inclure, notamment, l’engagement de démanteler totalement ou partiellement les installations de production dans un délai à fixer par l’État membre concerné, ainsi qu’un plan de restructuration qui contient, notamment, une description technique complète des installations de production concernées, ce qui présuppose que la totalité des installations de production visées par l’obligation de démantèlement soit identifiée dès la demande d’octroi de l’aide.

223    En outre, il ressort expressément des termes de l’article 9 du règlement no 968/2006 que les conditions posées à l’article 4 du règlement no 320/2006 concernent la recevabilité des demandes d’aide à la restructuration. Or, force est de constater que les conditions de recevabilité susmentionnées diffèrent des conditions de fond pour l’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total fixées à l’article 3, paragraphe 1, sous a), du règlement no 320/2006, à savoir, premièrement, la renonciation au quota assigné à une ou à plusieurs usines du bénéficiaire de l’aide et, deuxièmement, le démantèlement total des installations de production et la fermeture des usines concernées (voir point 207 ci-dessus).

224    Toutefois, si la demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total n’identifie pas toutes les installations de production qui doivent être démantelées conformément au plan de restructuration, ce n’est pas uniquement la recevabilité de ladite demande qui pourrait être contestée, mais également le droit pour l’entreprise demanderesse de percevoir une telle aide. En effet, si une installation ou un bâtiment n’est pas mentionné dans le plan de restructuration en tant qu’installation de production, son démantèlement ne sera pas prévu par le plan de restructuration et, partant, la condition de démantèlement total visée à l’article 3, paragraphe 1, sous a), du règlement no 320/2006 ne sera pas remplie.

225    En tout état de cause, si l’argumentation de la République française était acceptée, cela signifierait que le contrôle des demandes d’octroi des aides à la restructuration exercé par l’État membre ne porterait que sur le respect des conditions de recevabilité desdites demandes, ce qui ne saurait être admis étant donné que, en application de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 320/2006, l’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total est décidé par l’État membre à l’issue de ce premier contrôle. À cet égard, l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 320/2006 précise que, avant d’octroyer l’aide à la restructuration, l’État membre doit effectuer « une vérification minutieuse » du contenu de la demande d’aide et du plan de restructuration ainsi que de la conformité des mesures et actions décrites dans le plan de restructuration avec le droit de l’Union et les législations nationales pertinentes. Ainsi, lorsqu’il étudie une demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total, l’État membre ne saurait se borner à un simple contrôle formel limité au constat de la réunion des différents éléments devant figurer, d’une part, dans la demande d’octroi de l’aide et, d’autre part, dans le plan de restructuration, mais doit également vérifier si lesdits éléments permettent de conclure, à tout le moins à première vue, que les conditions pour l’octroi d’une aide à la restructuration pour démantèlement total sont remplies et, partant, qu’à l’issue de la restructuration il ne restera plus d’installations de production sur le site démantelé.

226    Au demeurant, il ressort d’une lecture combinée des articles 25 et 26 du règlement no 968/2006 que les contrôles effectués à l’issue du processus de restructuration, en application de l’article 25 du même règlement , visent à vérifier la mise en œuvre correcte du plan de restructuration et non le respect des conditions de fond, ces dernières étant vérifiées ex ante, c’est-à-dire avant l’octroi de l’aide.

227    Deuxièmement, il convient de rappeler que l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 explicite le périmètre de l’obligation de démantèlement dans le cas d’une aide au démantèlement partiel, laquelle est une condition de fond de l’octroi de ladite aide (voir point 207 ci-dessus). À cet égard, force est de constater que cet article opère un renvoi explicite à l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 320/2006 qui, précisément, fixe les conditions de fond pour l’octroi de ladite aide.

228    En tout état de cause, c’est à bon droit que la Commission soutient qu’une lecture a contrario de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 confirme que, en principe, toutes les installations d’un site de production doivent être démantelées en cas d’octroi d’une aide à la restructuration pour démantèlement total. En effet, si le maintien de certaines installations destinées à la production de produits autres que ceux relevant de l’OCM sucre est admis en cas de restructuration partielle d’un ancien site de production de sucre, le maintien de certaines installations en cas de démantèlement total est une hypothèse exceptionnelle (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 30).

229    Compte tenu de ce qui précède, et contrairement à ce que prétendent la République française, la République italienne et la Hongrie, la simple renonciation au quota de production et la cessation définitive de la production de sucre ne suffisent pas à satisfaire l’obligation de démantèlement total des installations de production.

230    En deuxième lieu, la République française fait valoir qu’il ressort de l’utilisation du présent de l’indicatif dans l’expression « l’usage réel qui en est fait », figurant aux points 34 et 35 de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), que la Cour n’a nullement voulu circonscrire les exceptions qu’elle a posées dans ledit arrêt à l’hypothèse où les silos auraient été exclusivement utilisés pour le conditionnement ou le stockage de sucre produit ailleurs sous quota à la date de la demande d’octroi de l’aide.

231    Dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour n’a pas pris position sur la question de savoir à quel moment il y avait lieu d’apprécier si les silos constituaient des installations de production.

232    Cela étant, la réponse à la question susmentionnée découle de la logique inhérente à la réglementation en cause et, en particulier, de la distinction entre démantèlement partiel et démantèlement total, lesquels donnent lieu à des montants d’aide à la restructuration différents.

233    L’argument de la République française doit donc être rejeté.

234    En troisième lieu, la République française prétend, en substance, que, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a implicitement mais nécessairement estimé que l’usage réel des silos devait être apprécié après la fermeture des sites de production de sucre dès lors qu’elle a considéré qu’il revenait à la juridiction de renvoi d’apprécier l’usage réel des silos en cause dans le litige pendant devant elle, alors même qu’il était constant que lesdits silos ne relevaient pas des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737).

235    Or, ainsi que le relève à juste titre la Commission, il ne revenait pas à la Cour, saisie d’un renvoi préjudiciel, d’examiner et d’apprécier les faits en cause dans les affaires au principal. En effet, conformément à l’article 267 TFUE, la Cour était seulement habilitée à fournir à la juridiction de renvoi tous les éléments d’interprétation du droit de l’Union aux fins de permettre à celle-ci de statuer sur les litiges dont elle était saisie (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 30 juin 1966, LTM, 56/65, EU:C:1966:38, et du 5 juillet 1967, de Moor, 2/67, EU:C:1967:28).

236    Dès lors, le fait que la Cour ait considéré qu’il revenait à la juridiction de renvoi d’apprécier si les silos litigieux relevaient de l’obligation de démantèlement n’a aucune incidence sur la question du moment auquel il y a lieu d’apprécier l’usage des silos.

237    Dès lors, l’argument de la République française doit être rejeté.

238    En quatrième lieu, la République française prétend, en substance, qu’il découle de l’emploi du futur de l’indicatif dans la version française de l’expression « des installations de production qui ne seront pas utilisées », figurant à l’article 3, paragraphe 4, sous b), du règlement no 320/2006, que la condition tenant à l’usage des installations maintenues sur un site de production ne peut être appréciée au moment de l’octroi de l’aide à la restructuration.

239    Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 3, paragraphe 4, sous b), du règlement no 320/2006, en cas de démantèlement partiel, il est permis de maintenir une partie des installations de production et de démanteler celles qui, par hypothèse, ne seront plus utilisées par le bénéficiaire de l’aide à l’issue de la restructuration. En outre, l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006 précise, à cet égard, que doivent être démantelées toutes les installations « qui ne sont destinées ni à d’autres productions ni à un autre usage du site de l’usine conformément au plan de restructuration ».

240    Ainsi, il ressort d’une lecture combinée des articles susvisés que le bénéficiaire d’une aide à la restructuration pour démantèlement partiel doit connaître, dès la demande d’octroi de l’aide à la restructuration, les installations de production qu’il n’entend plus utiliser et les mentionner dans le plan de restructuration.

241    Dans ce contexte, l’emploi du futur de l’indicatif dans la version française de l’article 3, paragraphe 4, sous b), du règlement no 320/2006 ne saurait remettre en cause le critère posé par la Commission.

242    Dès lors, l’argument de la République française doit être rejeté.

243    En cinquième lieu, la République française prétend que, s’il devait être considéré que l’usage d’un silo doit être apprécié au moment de la demande d’octroi de l’aide, les exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), seraient pratiquement vidées de toute substance, puisqu’il est très rare qu’un opérateur dispose, à un même endroit, d’une installation de production de sucre produit sous son quota et des silos qui servent uniquement au stockage et à l’emballage de sucre produit sous quota par un autre opérateur. Par ailleurs, la Hongrie ajoute que le critère posé par la Commission ne tient pas compte du caractère saisonnier de la production de sucre et remet en question l’applicabilité pratique des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737). À cet égard, elle rappelle que les demandes d’octroi d’une aide à la restructuration devaient être présentées à l’État membre au plus tard le 31 janvier précédant la campagne de commercialisation au cours de laquelle le quota aurait dû être libéré (article 4, paragraphe 1, du règlement no 320/2006). Or, puisque cette date se situait dans le cycle saisonnier de production du sucre, il aurait été très probable que les silos fussent encore engagés dans la production de sucre sous quota du demandeur de l’aide à la restructuration compte tenu de leurs caractéristiques de fonctionnement et d’utilisation. Ainsi, selon la Hongrie, il n’est pas réaliste que, à cette date, les entreprises aient entreposé, dans les silos, exclusivement du sucre produit par d’autres.

244    D’une part, le fait que les conditions pour bénéficier de l’une des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), soient difficilement réunies à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration ne signifie pas que lesdites exceptions soient irréalisables. La Commission a d’ailleurs produit l’arrêt no 2966, du 15 juin 2015, du Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie), dont il ressort que, sur trois silos présents au jour de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total, un silo était utilisé pour le stockage du sucre produit sur le site de production de l’entreprise bénéficiaire de l’aide, tandis que les deux autres silos servaient au stockage et à l’emballage du sucre produit par d’autres producteurs.

245    D’autre part, le maintien des silos qui ne constituent pas des installations de production est une exception au principe, rappelé par la Cour au point 30 de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), selon lequel le complexe industriel concerné doit, aux fins de l’octroi de l’aide à la restructuration pour démantèlement total, être mis hors service dans son intégralité. Dès lors, le fait que l’appréciation de l’usage des silos au jour de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration conduise rarement à exclure leur qualification d’installations de production n’est que la conséquence du fait que la faculté de ne pas démanteler ou même de continuer à utiliser dans l’avenir des installations autres que celles de production, tout en gardant le droit à l’aide à la restructuration pour démantèlement total, constitue une exception au principe susmentionné devant être interprétée étroitement (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 30).

246    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de considérer, contrairement à la Hongrie, que le critère posé par la Commission s’inscrit dans la logique du système mis en place par le législateur de l’Union et ne va pas à l’encontre de l’économie du régime de restructuration de l’industrie sucrière.

247    Dès lors, il y a lieu de rejeter les arguments de la République française et de la Hongrie.

248    En sixième lieu, la République italienne fait valoir, en substance, que le démantèlement des silos destinés à l’activité d’emballage et de conditionnement est contraire à l’objectif de préservation de l’emploi et de l’activité des entreprises concernées par la restructuration.

249    Plusieurs dispositions des règlements nos 320/2006 et 968/2006 attestent de l’importance que le législateur de l’Union a accordée à la situation de l’emploi dans les régions concernées par la restructuration de l’industrie sucrière. À titre d’exemple, il découle de l’article 3, paragraphe 3, sous c), et paragraphe 4, sous c), du règlement no 320/2006 que le démantèlement total et le démantèlement partiel des installations de production nécessitent l’adoption de mesures visant à faciliter le reclassement de la main-d’œuvre. En outre, en cas de démantèlement partiel, l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 320/2006, autorise la conservation des installations de production aux fins de les réaffecter à la fabrication de produits autres que ceux relevant de l’OCM sucre (voir point 211 ci-dessus) en permettant ainsi le maintien des emplois sur les anciens sites de production de sucre. De la même manière, l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006, lu à la lumière du considérant 4 du même règlement, autorise, en cas de démantèlement total, le maintien des installations autres que celles nécessaires à la production de sucre, d’isoglucose ou de sirop d’inuline ou qui sont directement liées à la production desdits produits, comme les installations de conditionnement, qui sont utilisées et ne sont pas destinées à être démantelées et enlevées pour des raisons de protection de l’environnement (voir point 210 ci-dessus).

250    Cela étant, l’objectif de protection de l’emploi et de l’activité des entreprises concernées par la restructuration doit être apprécié avec l’objectif principal de la réglementation en cause, à savoir la réduction de la capacité de sucre non rentable dans l’Union, conformément aux considérants 1 et 5 du règlement no 320/2006 (voir point 204 ci-dessus).

251    En outre, les considérations d’ordre social invoquées par la République italienne ne sauraient justifier l’interprétation que celle-ci propose de la réglementation en cause, laquelle porte atteinte à la distinction essentielle que le législateur de l’Union a entendu instaurer entre démantèlement partiel et démantèlement total (voir points 206, 207 et 218 ci-dessus), et, partant, est contraire à ladite réglementation.

252    Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argument de la République italienne.

253    En septième lieu, il convient de rejeter l’argument de la République italienne et de la Hongrie selon lequel, en substance, le critère posé par la Commission serait contraire à la lettre de l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006.

254    À cet égard, il a été précédemment indiqué, aux points 209 et 210 ci-dessus, que l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006 autorisait uniquement la conservation des installations autres que celles de production. Partant, c’est à bon droit que la Commission a demandé à la République française de démontrer, en substance, que les silos de conditionnement, dont la présence sur les sites de production démantelés avait été constatée dans le cadre de l’enquête EX/2010/12, relevaient de l’une des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration et échappait ainsi à la qualification d’installation de production.

255    Par ailleurs, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a jugé qu’un silo ayant servi au stockage du sucre du bénéficiaire de l’aide constituait une installation directement liée à la production de sucre au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous b), du règlement no 968/2006 (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, points 26 et 31) et ne relevait donc pas des autres installations, notamment de conditionnement, visées à l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006, dont la conservation pouvait être admise en cas de démantèlement total à condition qu’elles fussent utilisées et ne fussent pas destinées à être démantelées et enlevées pour des raisons de protection de l’environnement.

256    Partant, l’article 4, paragraphe 1, sous c), du règlement no 968/2006 ne saurait autoriser la conservation de silos qui étaient utilisés pour le stockage de la production du bénéficiaire de l’aide, ladite conservation ne pouvant avoir lieu qu’en cas de démantèlement partiel et à condition que, à l’issue de la restructuration, lesdits silos ne soient plus utilisés pour la fabrication de produits relevant de l’OCM sucre.

257    Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argument de la République italienne et de la Hongrie.

258    Aucun des arguments invoqués par la République française, par la République italienne et par la Hongrie n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, tiré de la violation des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement

259    Le deuxième moyen se divise, en substance, en deux branches, tirées, la première, de la violation du principe de proportionnalité et, la seconde, de la violation du principe d’égalité de traitement.

–       Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de la violation du principe de proportionnalité

260    La République française, soutenue par la République italienne et par la Hongrie, prétend, en substance, que la correction de 25 % appliquée par la Commission, correspondant à la différence entre le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement total et le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement partiel, est disproportionnée par rapport à l’objectif inhérent au régime de restructuration de l’industrie sucrière, à savoir la réduction de la capacité de production de sucre non rentable dans l’Union. À cet égard, elle rappelle que la différence entre le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement total et celui de l’aide pour démantèlement partiel s’explique par le coût supérieur du démantèlement total par rapport à celui du démantèlement partiel. Or, elle indique que la charge supplémentaire liée au démantèlement d’un silo ne représente qu’une faible partie des coûts totaux du démantèlement, ce que la Cour aurait d’ailleurs relevé dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737). En outre, elle fait valoir que les producteurs qui ont démantelé l’intégralité des installations de production à l’exception d’un silo, d’une part, ont engagé des frais supérieurs aux producteurs qui ont procédé à un démantèlement partiel et, d’autre part, n’ont pas pu valoriser la partie des installations de production destinée à être utilisée pour de nouvelles productions.

261    La République italienne ajoute, en substance, que la destruction des silos est disproportionnée, notamment au regard de l’objectif de préservation de l’emploi inhérent à la réglementation en cause.

262    La Commission conteste les arguments de la République française.

263    D’une part, il convient de rappeler que, en application de la réglementation en cause, le démantèlement des silos qui constituent des installations de production à la date de la demande d’octroi de l’aide à la restructuration n’est exigé que dans l’hypothèse du démantèlement total. Dès lors, la conservation des silos, y compris ceux qualifiés d’installations de production au moment de la demande d’octroi de l’aide, est admise dans l’hypothèse du démantèlement partiel. Dans ce cas, l’entreprise bénéficiaire de l’aide pourra continuer à exercer des activités économiques sur le site de production partiellement démantelé, notamment grâce aux silos conservés, ce qui explique qu’elle percevra un montant de l’aide à la restructuration inférieur de 25 % à celui qu’elle aurait pu percevoir en cas de démantèlement total.

264    Par ailleurs il convient de rappeler que, s’agissant de la question de la proportionnalité de la réglementation en cause, la Cour a relevé, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), que celle-ci permettait au producteur de décider librement s’il voulait profiter de l’aide, de choisir l’usine pour laquelle il renonçait au quota correspondant et, le cas échéant, d’opter pour un démantèlement total ou seulement partiel des installations de production. Elle a en outre jugé que le bénéfice que le producteur pouvait tirer de l’aide à la restructuration dépendait ainsi, en grande partie, des choix opérés par lui. Partant, elle a conclu que la réglementation en cause n’était pas disproportionnée (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, points 44 à 46).

265    Compte tenu de ce qui précède, en imposant une correction de 25 %, correspondant à la différence entre le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement total perçue par les entreprises françaises et le montant de l’aide à la restructuration pour démantèlement partiel que ces dernières auraient dû percevoir eu égard à la conservation des silos litigieux, la Commission n’a pas violé le principe de proportionnalité.

266    Dès lors, l’argument de la République française, tiré de la violation du principe de proportionnalité, doit être rejeté.

267    D’autre part, il ressort des points 249 et 250 ci-dessus que, même si la réglementation en cause n’a pas pour objectif principal la protection de l’emploi, plusieurs dispositions permettent néanmoins d’atténuer l’impact de la restructuration sur la situation de l’emploi en ce qu’elles prévoient la possibilité de maintenir certaines activités sur les sites démantelés. Ainsi, l’obligation de démanteler l’ensemble des installations de production aux fins de percevoir une aide à la restructuration pour démantèlement total ne saurait entraîner des conséquences manifestement excessives par rapport au maintien des emplois, étant rappelé, au demeurant, que le maintien des silos est tout à fait possible s’il est démontré que, à la date de la demande d’octroi de l’aide, ils relèvent des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737).

268    Dès lors, la République italienne n’est pas fondée à invoquer le caractère disproportionné de la destruction des silos au regard de l’objectif de préservation de l’emploi.

269    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter la première branche du deuxième moyen.

–       Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de la violation du principe d’égalité de traitement

270    La République française, soutenue par la République italienne et par la Hongrie, prétend que l’application d’une correction financière de 25 % aux entreprises bénéficiaires de l’aide à la restructuration pour démantèlement total qui n’ont pas détruit les silos litigieux conduirait à traiter de manière différente des situations comparables en violation du principe d’égalité de traitement. À cet égard, elle rappelle que, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a jugé que la situation d’un producteur de sucre renonçant à un quota attribué à l’une de ses usines dotée d’un silo serait comparable à celle d’un producteur devant démanteler une usine qui n’en est pas équipée, car ces deux catégories de producteurs renoncent à un nombre identique de tonnes de quota libéré. Dès lors, la circonstance selon laquelle un producteur n’aurait pas à supporter les frais liés au démantèlement d’un silo ne s’opposerait pas à ce qu’il puisse bénéficier d’une aide à la restructuration pour démantèlement total. Dans cet arrêt, la Cour aurait également précisé que l’octroi d’un même montant d’aide à la restructuration par tonne de quota de sucre libéré aux entreprises qui ont un silo et à celles qui n’en disposent pas ne serait pas contraire au principe d’égalité de traitement. Dès lors, selon la République française, le fait qu’une entreprise n’a pas à supporter les frais liés au démantèlement d’un silo ne s’oppose pas à ce qu’elle puisse obtenir une aide à la restructuration pour démantèlement total.

271    La Commission conteste les arguments de la République française.

272    Ainsi que le fait valoir à juste titre la Commission, dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), la Cour a déjà tranché la question de savoir s’il était contraire au principe d’égalité de traitement d’octroyer un même montant de l’aide à la restructuration par quota de sucre libéré, d’une part, à un opérateur qui dispose d’un silo qu’il doit démanteler et, d’autre part, à un opérateur qui n’en dispose pas.

273    En effet, aux points 48 à 52 de l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), d’une part, la Cour a estimé que, au regard de l’objectif de l’aide à la restructuration, qui était d’inciter le producteur à renoncer volontairement au quota de production attribué à une usine sucrière, la situation d’un producteur de sucre qui choisissait de renoncer à un quota attribué à une usine dotée d’un silo et celle d’un producteur devant démanteler une usine qui n’en avait pas étaient tout à fait comparables dans la mesure où ces producteurs renonçaient à un nombre identique de tonnes de quota libéré (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 50). D’autre part, la Cour a considéré que les coûts directs liés à la démolition d’un silo ne représentaient qu’une faible partie du coût total du démantèlement des installations de production. Partant, le fait que, en cas de démantèlement total d’un site de production, le même montant de l’aide soit octroyé à un producteur dont l’usine est dotée d’un silo et à un producteur dont l’usine n’en est pas équipée n’est pas manifestement inapproprié par rapport à l’objectif poursuivi par la réglementation en cause (arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a., C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737, point 51).

274    Il ressort de ce qui précède que l’octroi d’un même montant d’aide à la restructuration pour démantèlement total à un opérateur qui dispose d’un silo et à un opérateur qui n’en dispose pas n’est pas contraire au principe d’égalité de traitement.

275    Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la République italienne selon lequel l’opérateur qui est obligé de démanteler un silo qui ne fait pas partie de la ligne de production, en ce qu’il est utilisé pour le conditionnement et l’emballage du sucre, sera contraint de faire face à des coûts supplémentaires par rapport à un autre opérateur, car il devra rétablir les silos aux fins de poursuivre l’activité de conditionnement.

276    Premièrement, si à la date de la demande d’octroi de l’aide le silo est employé pour le conditionnement et l’emballage du sucre du bénéficiaire de l’aide, celui-ci ne relèvera pas de l’une des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), et devra être démantelé. En revanche, si, à la même date, le silo relève de l’une des exceptions posées par la Cour dans l’arrêt du 14 novembre 2013, SFIR e.a. (C‑187/12 à C‑189/12, EU:C:2013:737), celui-ci pourra être conservé aussi bien en cas de démantèlement total que en cas de démantèlement partiel.

277    Deuxièmement, il convient de rappeler que les opérateurs ont le choix entre un démantèlement partiel ou total de leurs sites de production et, partant, qu’il leur revient d’apprécier s’il est plus rentable, pour eux, de solliciter une aide à la restructuration pour démantèlement partiel afin de pouvoir conserver un silo visé par l’obligation de démantèlement et y stocker des produits autres que ceux relevant de l’OCM sucre [ article 3, paragraphe 4, sous b), du règlement no 320/2006 et article 4, paragraphe 2, du règlement no 968/2006], ou l’exploiter pour y exercer une activité de conditionnement du sucre produit par d’autres producteurs ou acheté à ces derniers.

278    Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter la seconde branche et, partant, le deuxième moyen dans son ensemble.

 Sur le troisième moyen, tiré, en substance, de la violation du document VI/5330/97

279    Dans la réplique, la République française, soutenue par la Hongrie, fait valoir que, en raison des difficultés d’interprétation de la réglementation pertinente, au demeurant relevées par l’organe de conciliation, la Commission devait appliquer une correction d’un montant plus faible ou s’abstenir de toute correction financière conformément au document VI/5330/97.

280    La Commission excipe de l’irrecevabilité de ce moyen en ce qu’il a été invoqué pour la première fois dans la réplique. Dès lors, elle prétend que l’argumentation de la Hongrie venant au soutien de ce moyen est, elle aussi, irrecevable.

281    À titre subsidiaire, la Commission conteste au fond l’applicabilité du cas limite prévu dans le document VI/5330/97. À cet égard, elle fait valoir, en substance, premièrement, que la République française n’a pas saisi l’organe de conciliation, deuxièmement, que sa position a toujours été cohérente avec l’interprétation qu’elle a communiquée aux États membres relative à la nécessité du démantèlement des silos, troisièmement, que la République française n’a pas fait le nécessaire pour remédier à la carence dès que celle-ci a été décelée et ne remplit donc pas l’une des conditions d’application du cas limite prévu par le document VI/5330/97 et, quatrièmement, que l’absence ou la réduction du montant de la correction financière au cas d’espèce violerait le principe d’égalité de traitement.

282    Selon une jurisprudence constante, lorsqu’il apparaît qu’un recours dont la recevabilité fait débat doit en tout état de cause être rejeté au fond, il est loisible au juge, dans un souci d’économie de la procédure, de se prononcer d’emblée sur sa substance (voir, en ce sens, arrêts du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, EU:C:2002:118, point 52, et du 23 mars 2004, France/Commission, C‑233/02, EU:C:2004:173, point 26).

283    S’agissant de l’examen au fond du troisième moyen, il convient de rappeler que l’annexe 2 du document VI/5330/97, intitulée « Conséquences financières, pour l’apurement des comptes de la section garantie du FEOGA, des carences des contrôles effectués par les États membres », indique que des corrections financières doivent être appliquées lorsque la Commission constate que les États membres n’ont pas effectué les contrôles spécifiquement exigés par les règlements applicables ou, en tout état de cause, essentiels pour garantir la régularité de la dépense effectuée au titre de la section « Garantie » du FEOGA.

284    L’annexe 2 du document VI/5330/97, sous le titre « Cas limites », deuxième alinéa (ci-après le « cas limite prévu à l’annexe 2 du document VI/5330/97 »), prévoit ce qui suit :

« Lorsque les carences proviennent de difficultés d’interprétation des textes communautaires, sauf dans les cas où il est raisonnablement permis de penser que l’État membre soulèvera ces difficultés avec la Commission, et lorsque les autorités nationales ont fait le nécessaire pour remédier aux carences dès que celles-ci ont été décelées, ces facteurs de pondération peuvent être pris en compte et donner lieu à l’application d’un taux plus bas ou à l’absence de correction. »

285    Le cas limite prévu à l’annexe 2 du document VI/5330/97 est un facteur de pondération qui n’ouvre pas automatiquement un droit à ce qu’il soit appliqué. En effet, son application est subordonnée aux conditions, d’une part, que la carence constatée par la Commission, lors de la procédure d’apurement, découle des difficultés d’interprétation de la réglementation de l’Union et, d’autre part, que les autorités nationales aient fait le nécessaire pour remédier à la carence dès que celle-ci a été décelée par la Commission (voir point 284 ci-dessus).

286    Il convient de relever que, en réponse à une question écrite du Tribunal lui demandant d’indiquer les mesures correctives qu’elle avait adoptées en réponse aux griefs formulés par la Commission dans la première communication du 28 février 2011, la République française a indiqué, d’une part, qu’il existait un différend opposant la Commission à plusieurs États membres sur l’interprétation des exigences liées à l’aide à la restructuration pour démantèlement total, lequel faisait l’objet de plusieurs procédures devant le Tribunal, et, d’autre part, que les décisions qui seront rendues par le Tribunal permettront de confirmer ou d’infirmer le bien-fondé des mesures correctives préconisées par la Commission et, ainsi, permettront à la République française d’apprécier les suites à y donner.

287    Force est donc de constater que la République française n’a pas établi avoir adopté de mesures aux fins de remédier à la carence dès que celle-ci a été décelée par la Commission.

288    Partant, l’une des conditions d’application du cas limite prévu à l’annexe 2 du document VI/5330/97, rappelées au point 285 ci-dessus, n’est pas remplie.

289    Dès lors, la République française et la Hongrie ne sont pas fondées à reprocher à la Commission de ne pas avoir appliqué un taux de correction plus bas ou de ne pas s’être abstenue de toute correction financière.

290    Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la République française selon lequel, en substance, dans une situation comme celle de l’espèce, où des difficultés d’interprétation ont abouti à une divergence entre elle et la Commission, elle ne pourrait pas valablement se voir opposer la condition selon laquelle il lui incombait de faire le nécessaire pour remédier à la carence dès que celle-ci avait été décelée, car cela reviendrait, en substance, à la priver de la possibilité de faire trancher le problème d’interprétation de la réglementation en cause par le Tribunal.

291    À cet égard, il convient de relever que la faculté de faire examiner par le Tribunal la légalité de la décision attaquée et, dans ce cadre, d’obtenir un jugement statuant sur l’interprétation correcte de la réglementation en cause n’est aucunement liée à l’adoption, par la République française, de mesures visant à remédier à la carence dès que celle-ci a été décelée par la Commission. En revanche, l’adoption de telles mesures est une condition nécessaire aux fins de l’application du cas limite prévu à l’annexe 2 du document VI/5330/97.

292    Eu égard à ce qui précède, il y lieu de rejeter le troisième moyen.

293    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée partiellement, en tant qu’elle écarte du financement de l’Union l’ensemble des dépenses effectuées par la République française en Haute-Corse au titre des aides directes à la surface du premier pilier afférentes aux années de demande 2011 et 2012. Le présent recours est rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

294    En vertu de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens.

295    En l’espèce, il y a lieu de décider que la République française et la Commission supporteront chacune leurs propres dépens.

296    En outre, aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens.

297    Dès lors, la République italienne et la Hongrie supporteront chacune leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision d’exécution (UE) 2015/103 de la Commission, du 16 janvier 2015, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), est annulée en tant qu’elle écarte du financement de l’Union européenne l’ensemble des dépenses effectuées par la République française en Haute-Corse au titre des aides directes à la surface du premier pilier afférentes aux années de demande 2011 et 2012.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne et la République française supporteront chacune leurs propres dépens.

4)      La République italienne et la Hongrie supporteront chacune leurs propres dépens.

Kanninen

Schwarcz

Iliopoulos

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 mars 2019.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

H. Kanninen


Table des matières


Cadre juridique

Règlement (CE) n o 1975/2006

Règlement (UE) n o 65/2011

Programme de développement rural hexagonal pour la période 2007-2013

Circulaire ICHN

Règlement (CE) n o 320/2006

Règlement (CE) n o 968/2006

Antécédents du litige

Décision attaquée

Sur les premier et deuxième groupes de corrections concernant les aides directes à la surface relevant du premier pilier

Sur le troisième groupe de corrections concernant les dépenses effectuées au titre des ICHN (mesures 211 et 212)

Sur le quatrième groupe de corrections concernant les aides à la restructuration de l’industrie sucrière

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la correction forfaitaire de 2 % appliquée aux aides directes à la surface du premier pilier octroyées en France au titre des années de demande 2011 et 2012 (enquêtes AA/2011/10 et AA/2012/06)

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n o 885/2006 et des droits de la défense de la République française

Sur les conséquences découlant de l’examen du premier moyen, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n o 885/2006

Sur la correction forfaitaire de 100 % appliquée aux aides directes à la surface du premier pilier octroyées en Haute-Corse au titre des années de demande 2011 et 2012

Sur la correction forfaitaire de 5 % appliquée aux ICHN octroyées au titre des exercices financiers 2010 à 2013 sur le fondement du PDRH (enquête RD 2/2011/03)

Sur les fins de non-recevoir concernant la contestation de la correction financière afférente aux ICHN octroyées en Corse et la mesure 214

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 10, paragraphes 2 et 4, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n o 1975/2006 ainsi que de l’article 4, paragraphe 1, de l’article 10, paragraphe 2, et de l’article 14, paragraphe 2, du règlement no 65/2011

Sur le deuxième moyen, invoqué à titre subsidiaire, tiré de l’extension illégale de la correction forfaitaire aux ovins non éligibles à la prime à la brebis

Sur la correction ponctuelle de 25 % appliquée aux aides octroyées dans le cadre du régime temporaire de restructuration de l’industrie sucrière (enquête EX/2010/12)

Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 3 et 4 du règlement n o 320/2006 ainsi que de l’article 4 du règlement no 968/2006

Sur le deuxième moyen, soulevé à titre subsidiaire, tiré de la violation des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement

– Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de la violation du principe de proportionnalité

– Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée de la violation du principe d’égalité de traitement

Sur le troisième moyen, tiré, en substance, de la violation du document VI/5330/97

Sur les dépens



*      Langue de procédure : le français.