Language of document : ECLI:EU:T:2021:437

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

14 juillet 2021 (*)

« Droit institutionnel ‐ Réglementation concernant les frais et indemnités des députés au Parlement – Indemnité d’assistance parlementaire – Recouvrement des sommes indûment versées ‐ Charge de la preuve – Obligation de motivation – Droits de la défense – Erreur de droit ‐ Erreur d’appréciation – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑170/20,

Robert Rochefort, demeurant à Paris (France), représenté par Mes M. Stasi, J.-L. Teheux et J.-M. Rikkers, avocats,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par MM. N. Görlitz, T. Lazian et Mme M. Ecker, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du secrétaire général du Parlement du 17 décembre 2019 relative au recouvrement auprès du requérant d’une somme de 61 423,40 euros indûment versée au titre de l’assistance parlementaire et de la note de débit correspondante du 22 janvier 2020,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. D. Spielmann, président, U. Öberg et Mme O. Spineanu‑Matei (rapporteure), juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 22 mars 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Robert Rochefort, a été député au Parlement européen de 2009 à 2019.

2        Le requérant a conclu avec A (ci-après l’« assistante locale ») un contrat de travail à durée indéterminée, avec effet à compter du 1er novembre 2009, ayant pour objet un emploi à temps partiel d’assistante locale (ci-après le « contrat de travail »).

3        À la suite du détachement de l’assistante locale dans le cadre de la campagne électorale de l’élection présidentielle en France, le contrat de travail a été suspendu pendant la période allant du 1er janvier au 30 mai 2012. Le 31 juillet 2012, à la suite de la démission de l’assistante locale, il a été mis fin au contrat de travail, ce dont le requérant a informé les services du Parlement.

4        Le contrat de travail prévoyait un travail de 87,13 heures par mois et une rémunération mensuelle brute de 1 470 euros. Cette rémunération a, à la suite de la demande du requérant, été prise en charge par le Parlement pendant toute la durée du contrat.

5        Le 27 octobre 2017, le directeur de la direction des droits financiers et sociaux des députés du Parlement a demandé au requérant, à la suite de la parution, dans les médias français, en juin 2017, d’informations mettant en cause la réalité du travail des assistants parlementaires de certains députés européens et sa conformité au regard des règles applicables, d’apporter des informations sur la situation de ses assistants parlementaires locaux et accrédités ainsi que sur les activités que ceux-ci exerçaient en parallèle.

6        Le 27 novembre 2017, le requérant a présenté ses justifications relatives aux activités et aux missions de ses assistants parlementaires.

7        Par lettre du 12 février 2019, le secrétaire général du Parlement a informé le requérant de l’ouverture d’une procédure de recouvrement fondée sur l’article 68 de la décision du bureau du Parlement des 19 mai et 9 juillet 2008 portant mesures d’application du statut des députés au Parlement (JO 2009, C 159, p. 1, ci-après les « mesures d’application ») et l’a invité à présenter ses observations dans un délai d’un mois. L’ouverture de ladite procédure était justifiée par l’absence d’éléments de réponse satisfaisants quant à la situation de l’assistante locale et à la nature et à l’étendue de ses activités exercées en parallèle, notamment, au regard de son activité d’attachée de presse pour le parti politique français « Mouvement démocrate » (MoDem).

8        Par lettre du 13 mars 2019, le requérant a présenté ses observations au secrétaire général du Parlement, accompagnées d’un dossier composé de 56 pièces destinées à établir la réalité du travail exercé par l’assistante locale.

9        Par décision du 17 décembre 2019, le secrétaire général du Parlement, d’une part, a estimé que, pour la période allant du 1er novembre 2009 au 31 juillet 2012, un montant de 61 423,40 euros avait été indûment versé en faveur du requérant au titre de l’assistance parlementaire et devait être recouvré auprès de celui-ci, et, d’autre part, a chargé l’ordonnateur du Parlement de procéder au recouvrement en cause (ci-après la « décision attaquée »).

10      Le 22 janvier 2020, le directeur général de la direction générale (DG) « Finances » du Parlement, en qualité d’ordonnateur du Parlement, a émis la note de débit no 7000000069, ordonnant le recouvrement de la somme de 61 423,40 euros avant le 21 février 2020 (ci-après la « note de débit »).

11      Le 24 janvier 2020, le directeur général de la DG « Finances » du Parlement a communiqué au requérant la décision attaquée et la note de débit.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 mars 2020, le requérant a introduit le présent recours.

13      Sur proposition de la juge rapporteure, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

14      Par décision du président de la cinquième chambre du Tribunal du 11 février 2021, la présente affaire a été jointe aux affaires T‑171/20, Rochefort/Parlement, et T‑172/20, Rochefort/Parlement, aux fins de la phase orale de la procédure, sur le fondement de l’article 68 du règlement de procédure du Tribunal, les parties ayant été entendues à cet égard.

15      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 22 mars 2021.

16      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la note de débit ;

–        condamner le Parlement aux dépens.

17      Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme étant non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

18      Au soutien du recours, le requérant invoque en substance, ainsi qu’il l’a confirmé lors de l’audience en réponse à une question du Tribunal, cinq moyens tirés, le premier, d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée, le deuxième, d’une erreur de droit quant à la charge de la preuve, le troisième, de la méconnaissance du droit d’être entendu, le quatrième, d’erreurs d’appréciation quant à la réalité du travail de l’assistante locale et, le cinquième, d’une violation du principe de proportionnalité.

 Sur le premier moyen, tiré d’une insuffisance de motivation de la décision attaquée

19      Le requérant invoque, ainsi qu’il l’a confirmé lors de l’audience en réponse à une question du Tribunal, une insuffisance de motivation de la décision attaquée, et non un défaut de motivation de celle-ci. Ainsi, ladite décision n’exposerait pas les motifs pour lesquels il a été conclu que les frais engagés au titre du contrat de travail ne correspondaient pas à l’« assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire » au sens des mesures d’application. Le secrétaire général du Parlement aurait fondé sa décision, sans jamais l’indiquer clairement, sur la présomption du travail exclusif de l’assistante locale au profit d’un parti politique et se serait contenté de remettre en question les pièces communiquées sans expliquer, de manière claire et non équivoque, en quoi l’absence de preuve de travail était équivalente à l’absence de la réalité du travail fourni.

20      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

21      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, l’institution concernée n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêt du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 125 et jurisprudence citée).

22      En l’espèce, il y a lieu de relever que, dans la décision attaquée, le secrétaire général du Parlement a, tout d’abord, retracé l’ensemble de la procédure administrative et des échanges avec le requérant ayant conduit à la décision attaquée. À cette occasion, il a souligné, en substance, d’une part, la prise en charge par le Parlement des frais d’assistance parlementaire pour l’assistante locale et, d’autre part, les informations parues dans la presse en France en juin 2017 mettant en cause la réalité du travail des assistants parlementaires de certains députés au Parlement.

23      Le secrétaire général du Parlement a, en outre, énoncé de façon détaillée le cadre juridique et la jurisprudence applicables dans l’hypothèse d’un contrôle ayant trait à l’utilisation des frais d’assistance parlementaire. Il a rappelé, en substance, en particulier, le libellé de l’article 33, paragraphes 1 et 2, de l’article 43, sous a), de l’article 62, paragraphe 1, et de l’article 68 des mesures d’application.

24      Le secrétaire général du Parlement a, ensuite, présenté son appréciation concernant les documents fournis par le requérant pour démontrer l’existence d’un travail de l’assistante locale conforme aux mesures d’application, en renvoyant en outre aux explications figurant dans l’annexe de la décision attaquée. À cet égard, il a souligné, en substance, que, bien que le requérant ait indiqué les tâches que l’assistante locale, en sa qualité première d’attachée de presse, aurait accomplies, à savoir assurer notamment des prises de contact avec les rédactions des médias, le suivi de l’actualité ainsi que la relecture et la correction des tribunes écrites par le requérant, il ressortait d’une analyse approfondie des pièces communiquées, exposée plus en détail dans l’annexe de la décision attaquée, qu’aucune preuve de l’accomplissement par l’assistante locale desdites tâches n’avait été apportée.

25      Premièrement, le secrétaire général du Parlement a relevé que la majorité des pièces communiquées par le requérant ne constituaient pas en tant que telles des preuves du travail de l’assistante locale. Ainsi, s’agissant des copies des agendas du requérant, du bulletin de salaire de l’assistante locale et des documents relatifs à la situation administrative et à l’état de santé de cette dernière, il a précisé qu’aucun de ces documents n’était de nature à démontrer que l’assistante locale avait effectivement fourni une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat de député européen du requérant. Deuxièmement, il a observé que, s’agissant des captures d’écran de liens vers des interventions du requérant, leur provenance n’était pas précisée et aucune preuve d’une éventuelle contribution de l’assistante locale n’était apportée. Troisièmement, il a indiqué que, s’agissant des articles de presse concernant le requérant ainsi que de la liste de ses interventions dans les médias, la preuve d’une quelconque contribution de l’assistante locale n’était pas apportée. Quatrièmement, il a estimé que plusieurs pièces apparaissaient comme étant liées à l’activité de l’assistante locale pour le MoDem et n’étaient dès lors pas acceptables en tant qu’éléments de preuve de son travail comme assistante locale du requérant. Cinquièmement, il a considéré que les éléments relatifs à une mission de l’assistante locale à Bruxelles (Belgique) en vue de suivre une formation ayant pour objet les relations entre la presse et les médias devaient être considérés comme étant liés à son activité pour le MoDem, et non pour le requérant, dans la mesure où ladite formation portait précisément sur des questions liées aux tâches dont l’assistante locale était responsable dans le cadre de son emploi pour le MoDem et où il n’existait pas d’éléments de preuve du travail de l’assistante locale pour le compte du requérant sur toute la durée du contrat.

26      Le secrétaire général du Parlement a, enfin, estimé que le requérant n’avait pas apporté la preuve de l’exercice effectif par l’assistante locale d’une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice de son mandat parlementaire tout au long du contrat et qu’il était dès lors fondé à demander le remboursement des sommes indûment versées. Il a ajouté que les éléments relatifs aux congés de l’assistante locale (maladie et vacances) communiqués par le requérant étaient inopérants en l’absence de toute preuve de travail effectué par celle-ci durant les périodes antérieures et postérieures à ces périodes de congés.

27      S’agissant de l’annexe de la décision attaquée, à laquelle cette dernière renvoie expressément, elle contient un tableau reprenant l’analyse des éléments produits par le requérant afin de démontrer un travail de l’assistante locale conforme aux mesures d’application. Cette annexe expose, en fonction de leur nature, la position du secrétaire général du Parlement quant à l’admissibilité desdits éléments et à leur valeur probante en tant que preuves du travail effectué par l’assistante locale.

28      Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision attaquée, lue conjointement avec son annexe, expose, à suffisance de droit, les motifs pour lesquels le secrétaire général du Parlement a estimé que les éléments produits par le requérant étaient insuffisants pour démontrer un travail effectif de l’assistante locale conforme aux mesures d’application. À cet égard, ladite décision évoque l’impossibilité, notamment, d’identifier la contribution de l’assistante locale à la production des documents communiqués ou d’établir un lien entre certaines activités de l’assistante locale et le mandat de député européen du requérant, et, en général, l’absence de preuves attestant l’exercice effectif de l’activité de ladite assistante.

29      Ainsi, aussi succincte qu’elle soit, la motivation de la décision attaquée permet d’étayer, à suffisance de droit, l’appréciation du secrétaire général du Parlement selon laquelle les éléments produits étaient insuffisants pour démontrer une activité de l’assistante locale conforme aux mesures d’application.

30      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’allégation du requérant selon laquelle le secrétaire général du Parlement n’a fourni aucune explication quant aux raisons pour lesquelles il a déduit de la présence de l’assistante locale dans l’organigramme du MoDem que celle-ci n’aurait jamais travaillé pour le requérant au cours de la période en cause. En effet, contrairement à ce que le requérant soutient en substance, le secrétaire général du Parlement n’a pas déduit du constat de cette présence que l’assistante locale n’avait jamais exercé les fonctions d’assistante parlementaire auprès du requérant. Ce constat est certes à l’origine de l’examen par le Parlement de la réalité des tâches de l’assistante locale, ainsi qu’il ressort de la lettre du directeur des droits financiers et sociaux des députés du Parlement du 27 octobre 2017 (voir point 5 ci-dessus). Il ne constitue pas, en revanche, le fondement des conclusions du secrétaire général du Parlement, lesquelles sont fondées sur la constatation de l’absence d’éléments probants produits par le requérant afin de démontrer l’accomplissement de tâches par l’assistante locale en conformité avec les mesures d’application.

31      Par ailleurs, eu égard au détail des développements du requérant dans le cadre du troisième moyen, tiré d’erreurs d’appréciation, force est de constater qu’il a nécessairement compris le raisonnement du Parlement contenu dans la décision attaquée, de sorte que la condition établie par la jurisprudence citée au point 21 ci-dessus est remplie en l’espèce.

32      Enfin, dans la mesure où le requérant fait valoir que le Parlement aurait dû expliquer en quoi l’absence de preuve de travail était équivalente à l’absence de la réalité du travail fourni, le Parlement devant démontrer que l’assistante locale n’avait pas fourni l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire du requérant, il doit être constaté que, par cette argumentation, ce dernier conteste que la charge de la preuve du travail de l’assistante locale conforme aux mesures d’application pesait sur lui, et non sur le Parlement. Partant, cette argumentation relève de l’examen du deuxième moyen.

33      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit quant à la charge de la preuve

34      Le requérant reproche au Parlement d’avoir commis une erreur de droit en ayant inversé la charge de la preuve en lui demandant de justifier le travail réalisé par l’assistante locale. En premier lieu, il fait valoir que la règle relative à la charge de la preuve sur laquelle le Parlement a fondé la décision attaquée n’est prévue par aucun texte et a une origine jurisprudentielle incertaine. Il allègue en outre qu’une enquête de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a été ouverte concernant les frais d’engagement des assistants parlementaires locaux du MoDem et, ainsi, du requérant. La décision du secrétaire général du Parlement serait dès lors parfaitement précipitée et d’autant plus injustifiée, car cette enquête aurait permis de confirmer ou d’infirmer les « doutes » du Parlement. Enfin, il constate que le « renversement de la charge de la preuve » n’est pas systématique, puisque seuls trois de ses neuf assistants parlementaires auraient été concernés par une demande de preuves.

35      En second lieu, le requérant soutient que cette règle institue une présomption irréfragable. Premièrement, il fait valoir que, alors que l’assistante locale n’était pas employée à temps complet par lui, son activité au sein du MoDem faisait peser sur lui une présomption de travail exclusif au profit dudit parti. Cette présomption porterait atteinte à la liberté de choix des collaborateurs parlementaires, instituée par l’article 21 de la décision 2005/684/CE, Euratom du Parlement, du 28 septembre 2005, portant adoption du statut des députés au Parlement (JO 2005, L 262, p. 1, ci-après le « statut des députés ») et par l’article 33, paragraphe 1, des mesures d’application ainsi qu’à la liberté de travail, d’opinion et d’engagement politique protégés par les droits français et européen. De plus, le « renversement de la charge de la preuve » résulterait de la localisation de l’activité de l’assistante locale au siège du MoDem. Deuxièmement, la présomption de travail exclusif de l’assistante locale pour le MoDem serait irréfragable dans la mesure où le requérant serait dans l’incapacité de fournir des preuves de l’intégralité des tâches exercées par celle-ci. Selon le requérant, le Parlement a exigé des « preuves écrites et quotidiennes de travail », alors que le travail de l’assistante locale aurait été essentiellement oral. En outre, les périodes de travail en question remonteraient à son premier mandat parlementaire et il aurait procédé à un « tri considérable dans la masse de documentation accumulée », en n’ayant pas imaginé devoir démontrer la réalité de l’activité de son assistante locale compte tenu de la « régularisation annuelle » exigée par les services du Parlement.

36      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

37      À cet égard, en premier lieu, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21 du statut des députés, notamment de ses paragraphes 1 et 2, le Parlement prend en charge les frais effectivement engagés au titre de l’emploi des collaborateurs personnels librement choisis par les députés pour l’assistance à laquelle ils ont droit.

38      Le mécanisme de la prise en charge des frais d’assistance parlementaire, dont les conditions d’exercice sont définies par les mesures d’application, notamment leur article 33, intitulé « Prise en charge des frais d’assistance parlementaire », est déclenché par le député lors de la présentation de sa demande de prise en charge à l’administration, accompagnée du contrat conclu avec l’assistant, fixant les tâches de celui-ci.

39      Selon l’article 33, paragraphe 1, deuxième phrase, des mesures d’application, le Parlement prend en charge les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants conformément aux mesures d’application.

40      Aux termes de l’article 33, paragraphe 2, première phrase, des mesures d’application, seuls peuvent être pris en charge les frais correspondant à l’assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire des députés.

41      En vertu de l’article 68, paragraphe 1, des mesures d’application, toute somme indûment versée en application de ce texte donne lieu à répétition et le secrétaire général du Parlement donne des instructions en vue du recouvrement de ces sommes auprès du député concerné.

42      Selon une jurisprudence constante, la définition de la notion d’assistance parlementaire ne relevant pas de la discrétion des députés, ces derniers ne sont pas libres de demander le remboursement des dépenses sans rapport avec l’engagement ou l’utilisation des services fournis par de tels assistants (voir arrêt du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement, T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270, point 114 et jurisprudence citée).

43      En effet, la nécessité de démontrer la réalité du travail fourni par l’assistant local découlant directement, notamment, des mesures d’application, le Parlement ne prend en charge que les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, ce qui implique que la réalité de ceux-ci soit démontrée par le député concerné (arrêts du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 119, et du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 112).

44      Il s’ensuit que, dans l’hypothèse d’un contrôle ayant trait à l’utilisation des frais d’assistance parlementaire, le député concerné doit être en mesure de prouver que les montants perçus ont été utilisés afin de couvrir les dépenses effectivement engagées et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, comme le prévoit l’article 33, paragraphe 1, seconde phrase, des mesures d’application, de sorte qu’il lui incombe d’être en mesure de produire les pièces justificatives qui y sont afférentes et, partant, de les conserver, et ce même en l’absence d’obligation explicite en ce sens découlant du droit de l’Union européenne (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122 ; du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 111, et du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement, T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270, point 118).

45      Dès lors, dans une telle situation, c’est sur le requérant, et non sur le Parlement, que repose la charge de la preuve de la réalité, de la nécessité et du lien direct des frais d’assistance parlementaire avec l’exercice de son mandat (ordonnances du 21 mars 2019, Troszczynski/Parlement, C‑462/18 P, non publiée, EU:C:2019:239, point 82, et du 21 mai 2019, Le Pen/Parlement, C‑525/18 P, non publiée, EU:C:2019:435, point 82).

46      Selon une jurisprudence désormais constante, en demandant au député concerné de justifier le travail réalisé par son assistant local, le Parlement n’exige pas une preuve impossible. En effet, il ne s’agit pas de démontrer un fait inexistant, mais un fait positif, à savoir la réalité du travail de l’assistant local, laquelle peut être attestée par de nombreux éléments de preuve concrets, tels que des agendas, attestant de rendez-vous ou de l’activité de l’assistant local, des courriels rédigés par ce dernier et échangés, notamment, avec le député concerné ainsi que des documents, y compris sous forme électronique, émanant de l’assistant local (voir, en ce sens, arrêts du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122 ; du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 118, et du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 111).

47      À cet égard, l’argument du requérant relatif à l’origine jurisprudentielle prétendument incertaine de la règle concernant la charge de la preuve doit être rejeté. En effet, le requérant lui-même reconnaît que l’arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848), cité dans la décision attaquée « indique effectivement que le député doit être en mesure de prouver la réalité du travail de son assistant parlementaire ». En outre, indépendamment de la référence à l’arrêt du 10 octobre 2014, Marchiani/Parlement (T‑479/13, non publié, EU:T:2014:866), dans l’arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848), contestée par le requérant, la Cour a récemment confirmé, dans sa jurisprudence sur pourvoi en matière de recouvrement sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application, qu’il résulte de la logique de l’article 33, paragraphes 1 et 2, des mesures d’application ainsi que de l’économie générale desdites mesures qu’il appartient aux députés qui demandent une prise en charge financière de prouver qu’ils satisfont aux conditions posées par celle-ci. Ainsi, un tel député doit, en réponse à une demande en ce sens de l’autorité compétente du Parlement, présenter tous les éléments de preuve dont il dispose, susceptibles de démontrer la réalité du travail effectué par son assistant, ainsi que le lien de ce travail avec l’exercice de son mandat (voir ordonnances du 21 mars 2019, Troszczynski/Parlement, C‑462/18 P, non publiée, EU:C:2019:239, points 35 et 82 et jurisprudence citée ; du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, points 63, 64 et 88 et jurisprudence citée, et du 21 mai 2019, Le Pen/Parlement, C‑525/18 P, non publiée, EU:C:2019:435, points 37 et 82 et jurisprudence citée).

48      Partant, la critique du requérant relative à l’origine jurisprudentielle de la règle de la charge de la preuve et à l’application erronée de la jurisprudence dans la décision attaquée à cet égard doit être écartée.

49      Par ailleurs, la décision attaquée n’est pas « précipitée » comme le prétend le requérant au motif qu’une enquête de l’OLAF aurait été ouverte. En effet, il résulte de la jurisprudence qu’aucune disposition, ni aucun principe du droit de l’Union ne s’opposent à ce que le Parlement adopte une décision de récupération de l’indu, quand bien même la personne auprès de laquelle l’indu est récupéré ferait également l’objet d’enquêtes ou de poursuites, pénales ou menées par l’OLAF (ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 52). Ainsi, le secrétaire général du Parlement n’était pas tenu d’attendre l’issue de l’enquête de l’OLAF avant d’adopter la décision attaquée.

50      Enfin, pour autant que le requérant invoque le fait que l’inversion de la charge de la preuve n’aurait concerné que trois de ses neuf assistants parlementaires, force est de constater que cet argument doit être rejeté comme inopérant, dès lors qu’il est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

51      En second lieu, le requérant soutient que le prétendu renversement de la charge de la preuve opéré par le Parlement institue une présomption irréfragable. Premièrement, il prétend que l’activité exercée par l’assistante locale au sein du MoDem fait peser sur lui une présomption de travail exclusif au profit dudit parti. Cependant, ainsi qu’il a déjà été relevé, la décision attaquée est fondée sur le fait que le requérant n’a pas apporté la preuve que l’assistante locale assurait des tâches en conformité avec les mesures d’application, et non sur la circonstance que celle-ci exerçait une activité au sein du MoDem.

52      En effet, ainsi qu’il ressort de la lettre du directeur des droits financiers et sociaux des députés du Parlement du 27 octobre 2017 (voir point 5 ci-dessus), l’activité de l’assistante locale en qualité d’attachée de presse pour le MoDem et le travail exercé par celle-ci au siège dudit parti en France ont été identifiés comme des éléments ayant suscité des doutes quant à la conformité de son travail avec les mesures d’application et ayant justifié un contrôle de l’utilisation effective des frais d’assistance parlementaire engagés conformément à celles-ci.

53      En revanche, il ne ressort ni de la lettre citée au point 52 ci-dessus ni de la décision attaquée que le Parlement aurait octroyé à ces éléments une force probante quelconque à l’encontre du requérant. La nécessité de démontrer la réalité du travail fourni par l’assistante locale découle, ainsi qu’il a déjà été relevé, directement, notamment, des mesures d’application, dont il ressort que le Parlement ne prend en charge que les frais effectivement engagés et résultant entièrement et exclusivement de l’engagement d’un ou de plusieurs assistants, ce qui implique que la réalité du travail de ces derniers soit démontrée par le député concerné. Il ne s’agit dès lors pas de l’application d’une présomption « de travail exclusif au profit d[u] parti politique » comme le soutient le requérant, lesdites mesures d’application lui permettant de fournir des éléments de preuve afin de démontrer la réalité du travail fourni par l’assistante locale conformément aux mesures d’application.

54      Par ailleurs, il ne ressort pas davantage de la lettre citée au point 52 ci-dessus, ni de la décision attaquée, que le Parlement aurait considéré que l’exercice d’une activité politique par l’assistante locale serait, en soi, incompatible avec ses fonctions d’assistante parlementaire. Partant, il n’a porté atteinte ni à la liberté de choix des collaborateurs parlementaires ni à la liberté de travail, d’opinion et d’engagement politique. En effet, il n’a, à aucun moment, considéré que le travail pour le parti politique national serait incompatible avec l’activité de l’assistante locale, ni prétendu que l’exercice de l’activité de celle-ci au siège dudit parti serait contraire aux mesures d’application. Ainsi qu’il a déjà été relevé, le travail pour ce parti et la localisation de l’activité de l’assistante locale ont seulement constitué des indices à l’origine de la mise en œuvre de la procédure de recouvrement. Le fait que l’activité d’assistante locale ait été exercée à temps partiel est, lui aussi, sans incidence sur l’obligation de rapporter la preuve du travail de celle-ci.

55      Enfin, dès lors que la question du lieu d’exécution du contrat ne constitue pas un motif sur lequel la décision attaquée est fondée et que, en tout état de cause, le fait que le Parlement ne se soit pas opposé au lieu de travail désigné dans le contrat de travail ne saurait l’empêcher de contrôler le caractère effectif des tâches réalisées par l’assistante locale au titre dudit contrat, il convient de rejeter l’argument pris de ce que la réglementation de l’Union ne comporte aucune obligation, positive ou négative, quant au lieu d’exécution du contrat.

56      Deuxièmement, le requérant reproche au Parlement d’avoir exigé des preuves du travail de l’assistante locale écrites et quotidiennes.

57      Il doit être rappelé que, selon la jurisprudence, s’il incombe au député de pouvoir produire des pièces justifiant d’une utilisation des sommes versées au titre de l’assistance parlementaire conforme aux contrats qu’il a conclus avec ses assistants, il n’est pas exigé qu’il soit en mesure de produire l’intégralité des éléments relatifs aux dossiers traités ou à l’emploi du temps journalier de son assistant sur l’ensemble de la législature. Les pièces en cause doivent, en effet, être en mesure de justifier une telle utilisation, sans, nécessairement, avoir à retracer de manière détaillée et exhaustive l’intégralité des activités de l’assistant (arrêt du 7 mars 2018, Le Pen/Parlement, T‑140/16, non publié, EU:T:2018:122, point 70).

58      Il doit être également rappelé que, s’agissant des preuves de travail acceptables, faute d’indication contraire, la preuve que la demande de prise en charge financière satisfait aux conditions posées par les mesures d’application est libre (voir, en ce sens, ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 100).

59      En l’espèce, ainsi qu’il ressort de la décision attaquée (voir point 28 ci-dessus), le Parlement a reproché au requérant de ne pas avoir pu apporter une quelconque preuve d’un travail effectif de l’assistante locale, conformément à ce que requièrent les mesures d’application, et non de ne pas avoir fourni des preuves écrites et quotidiennes de ce travail. Dès lors, l’argument du requérant doit être rejeté.

60      Il ressort de tout ce qui précède que le requérant n’a pas démontré que le Parlement aurait commis une erreur de droit quant à la charge de la preuve et, dès lors, l’argumentation exposée au point 32 ci-dessus doit être également écartée.

61      Partant, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la méconnaissance du droit d’être entendu

62      Le requérant invoque une méconnaissance de son droit d’être entendu, en ce que, en dépit de sa demande expresse, aucune audition ne lui aurait été accordée par le secrétaire général du Parlement avant l’adoption de la décision attaquée. Ce refus d’audition serait contraire à l’esprit de l’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application et démontrerait la volonté de ne pas prendre en compte ses arguments et les pièces produites. Le requérant soutient qu’il aurait pu exposer en quoi consistait le travail de l’assistante locale, combien la demande probatoire était difficile à satisfaire ainsi que la raison pour laquelle la majeure partie des pièces concernant l’assistante locale n’avaient pas été conservées. Il aurait eu en outre besoin de comprendre quelles preuves attendait le Parlement pour démontrer la réalité du travail, notamment oral et technique, de ses assistants. Enfin, il prétend que le Parlement n’est pas en mesure d’apporter la preuve que son secrétaire général a, personnellement, entendu, au sens de l’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application, les arguments et les explications qu’il a fournis.

63      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

64      Selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit de l’Union et exige que la personne concernée soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue au sujet des éléments qui pourraient être retenus à sa charge dans l’acte à intervenir (voir ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 59 et jurisprudence citée).

65      Toutefois, le droit d’être entendu n’implique pas nécessairement l’obligation de mettre la personne intéressée en mesure de s’exprimer oralement (voir ordonnance du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 60 et jurisprudence citée).

66      Partant, le droit d’être entendu dont bénéficie le député concerné, en particulier en vertu de l’article 68, paragraphe 2, des mesures d’application, exige qu’il doive pouvoir faire connaître utilement son point de vue au secrétaire général du Parlement avant l’adoption d’une éventuelle décision de recouvrement, cette obligation étant respectée en mettant ce député en mesure de présenter ses observations à cet égard par écrit ou par oral (arrêt du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 95).

67      En l’espèce, il n’est pas contesté que, le 27 octobre 2017, le Parlement a demandé au requérant de justifier de l’activité de l’assistante locale pour la durée du contrat de travail (voir point 5 ci-dessus). Le requérant a présenté ses justifications le 27 novembre 2017 (voir point 6 ci-dessus). Par ailleurs, le 12 février 2019, le secrétaire général du Parlement a informé le requérant de l’ouverture d’une procédure de recouvrement sur le fondement de l’article 68 des mesures d’application et l’a invité à présenter ses observations (voir point 7 ci-dessus). Celui-ci a ainsi pu lui communiquer, par lettre du 13 mars 2019, un dossier composé de 56 pièces (voir point 8 ci-dessus).

68      Dans ces conditions, force est de constater que le requérant a valablement été mis en mesure de faire valoir son point de vue.

69      Cette conclusion n’est pas remise en cause par le fait que, dans la jurisprudence, il a été reconnu que des circonstances particulières pouvaient rendre obligatoire l’audition du député concerné (voir, en ce sens, ordonnances du 21 mars 2019, Gollnisch/Parlement, C‑330/18 P, non publiée, EU:C:2019:240, point 61, et du 7 novembre 2019, Le Pen/Parlement, C‑38/19 P, non publiée, EU:C:2019:952, point 42).

70      À cet égard, force est de constater que le requérant n’apporte aucun élément susceptible de constituer un indice permettant, conformément à la jurisprudence citée au point 69 ci-dessus, de constituer une circonstance particulière justifiant son audition. L’argument du requérant selon lequel, en substance, s’il avait été auditionné par le secrétaire général du Parlement avant l’adoption de la décision attaquée, il aurait pu expliquer en quoi consistait le travail de son assistante locale et combien la demande probatoire lui était difficile à satisfaire ne caractérise pas l’existence de circonstances particulières justifiant une audition orale. Il était d’ailleurs loisible au requérant de présenter ces explications par écrit, s’il l’estimait pertinent. De même, il pouvait demander par écrit des explications quant aux preuves que le Parlement attendait pour démontrer la réalité du travail, notamment oral et technique, de ses assistants.

71      Partant, le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

72      Le requérant considère que la décision attaquée viole le principe de proportionnalité en ce qu’elle lui ordonne le remboursement de l’intégralité des sommes versées au titre des frais d’assistance parlementaire. En effet, il ne serait pas contesté qu’il n’a jamais perçu ces sommes, lesquelles auraient servi à payer le salaire de l’assistante locale et les charges sociales qui y sont afférentes. Une restitution intégrale des sommes versées en contrepartie du travail effectué aurait dès lors des conséquences manifestement disproportionnées.

73      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

74      À cet égard, il y a lieu de rappeler que le principe de proportionnalité constitue un principe général du droit de l’Union, qui exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause (voir arrêt du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement, T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270, point 186 et jurisprudence citée).

75      Toutefois, le Parlement ne dispose, en vertu de l’article 68, paragraphe 1, première phrase, des mesures d’application, d’aucune marge d’appréciation quant au montant à recouvrer au titre de la somme litigieuse, s’agissant de la répétition de sommes indues. En effet, en vertu de cette disposition, toute somme indûment versée en application des mesures d’application donne lieu à répétition (arrêts du 29 novembre 2017, Bilde/Parlement, T‑633/16, non publié, EU:T:2017:849, point 206 ; du 7 mars 2018, Gollnisch/Parlement, T‑624/16, non publié, EU:T:2018:121, point 219, et du 16 mai 2018, Troszczynski/Parlement, T‑626/16, non publié, EU:T:2018:270, point 187).

76      Or, dès lors que le Parlement a estimé qu’il n’avait pas été démontré que l’assistante locale assurait des tâches en conformité avec les mesures d’application et que, partant, les sommes qui lui ont été versées au titre des frais d’assistance parlementaire pour la période allant du 1er novembre 2009 au 31 juillet 2012, s’élevant à un montant de 61 423,40 euros, ne l’avaient pas été conformément à celles-ci, le Parlement était tenu par une obligation inconditionnelle de recouvrer l’intégralité de ces sommes.

77      Ainsi, à défaut de toute marge d’appréciation dans l’exécution de cette obligation inconditionnelle lui incombant, le Parlement n’a pas agi, en l’espèce, au-delà de ce qui était approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par les mesures d’application.

78      C’est donc à tort que le requérant fait valoir, en substance, que le Parlement aurait dû prouver que l’assistante locale n’avait jamais été son assistante parlementaire au cours de la période en cause.

79      Quant à la circonstance, invoquée par le requérant, que les sommes en cause n’ont jamais été perçues par lui et qu’elles ont bien servi à payer le salaire de l’assistante locale et les charges sociales qui y sont afférentes, elle est sans incidence sur l’obligation inconditionnelle incombant au Parlement en vertu de l’article 68, paragraphe 1, première phrase, des mesures d’application.

80      Il s’ensuit que le cinquième moyen doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’erreurs d’appréciation quant à la réalité du travail de l’assistante locale

81      Le requérant soutient que la décision attaquée est entachée d’erreurs d’appréciation justifiant son annulation. Tout d’abord, il fait valoir qu’il n’est pas contesté que les sommes prises en charge par le Parlement ont bien été versées à l’assistante locale et aux organismes sociaux, ce qui permettrait de confirmer que les frais pris en charge ont été effectivement engagés et résultent entièrement et exclusivement de l’engagement de celle-ci ainsi que l’exige l’article 33, paragraphe 1, des mesures d’application. Ensuite, il allègue que le Parlement a à tort recherché seulement des preuves écrites, alors que les missions de l’assistante locale auraient été effectuées pratiquement seulement par téléphone ou lors de réunions physiques. Enfin, il invoque des erreurs du secrétaire général du Parlement lors de l’appréciation des éléments soumis comme preuves.

82      Le Parlement conteste l’argumentation du requérant.

83      À titre liminaire, il convient de relever que, comme le Parlement le fait valoir, le fait que les sommes qu’il a prises en charge ont été versées à l’assistante locale et aux organismes sociaux n’implique pas que ces frais résultent entièrement et exclusivement de l’engagement de celle-ci ainsi que l’exige l’article 33, paragraphe 1, des mesures d’application.

84      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que l’argument selon lequel le Parlement aurait recherché seulement des preuves écrites a déjà été rejeté (voir point 59 ci-dessus).

85      Dans la décision attaquée, le secrétaire général du Parlement a considéré qu’aucun des éléments produits par le requérant n’était acceptable comme élément de preuve de la prestation effective par l’assistante locale d’une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice de son mandat parlementaire tout au long du contrat de travail, en conformité avec les articles 33 et 62 des mesures d’application, aux motifs, en substance :

–        de leur inaptitude à constituer, de manière générale, en tant que telles, des preuves du travail réalisé par l’assistante locale ;

–        de l’impossibilité d’attester que l’assistante locale en était l’auteure ou d’identifier sa contribution ;

–        de l’absence de lien avec le mandat de député européen du requérant.

86      Les éléments produits par le requérant, communiqués le 13 mars 2019 au secrétaire général du Parlement (voir point 8 ci-dessus), consistent en :

–        l’extrait du contrat de travail de l’assistante locale ;

–        un bulletin de paie de l’assistante locale ;

–        des courriels relatifs à la participation de l’assistante locale à la formation sur la presse et les médias organisée par le groupe de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) à Bruxelles le 15 avril 2010 (ci-après la « formation du 15 avril 2010 »), à une invitation à un dîner de Noël de la délégation MoDem au Parlement ainsi qu’à la publication des noms des assistants locaux sur le site Internet du Parlement ;

–        des extraits de l’agenda du requérant ;

–        des articles, des tribunes, des annonces ou communications et des brèves de presse concernant le requérant, une liste de ses interventions dans les médias, des captures d’écran de liens vers certaines de ses interventions et un extrait de journaux contenant le programme des « États généraux du renouveau » ;

–        des courriels émanant de l’assistante locale ;

–        des échanges relatifs à l’état de santé de l’assistante locale (courriel du tiers payant à une attachée parlementaire du requérant relatif à l’arrêt de travail de l’assistante locale ainsi que trois arrêts de travail de celle-ci).

87      C’est dans ce contexte qu’il convient d’examiner les arguments du requérant visant à contester les appréciations du secrétaire général du Parlement.

88      En premier lieu, en ce qui concerne l’extrait du contrat de travail de l’assistante locale, son bulletin de paie, les extraits de l’agenda du requérant et les courriels relatifs à l’invitation à un dîner de Noël de la délégation MoDem au Parlement et à la publication des noms des assistants locaux sur le site Internet du Parlement, il ressort, en substance, de la décision attaquée que le secrétaire général du Parlement a estimé qu’aucun de ces documents n’était de nature à démontrer que l’assistante locale avait effectivement fourni une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat de député européen du requérant.

89      À cet égard, premièrement, ainsi que le secrétaire général du Parlement l’a estimé dans la décision attaquée, force est de constater que le contrat de travail et la correspondance relative à la publication du nom de l’assistante locale sur le site Internet du Parlement ne sont pas de nature à constituer en eux-mêmes des preuves du travail exécuté par l’assistante locale.

90      En effet, le contrat de travail se limite à indiquer, notamment, que l’assistante locale devait, dans le cadre de l’exercice du mandat du requérant, assurer des tâches d’attachée de presse parlementaire, prendre en charge des sujets nationaux et, plus généralement, accomplir une mission d’assistance. Il peut ainsi constituer une preuve de la nature et de la portée des obligations de l’assistante locale. En revanche, ainsi que le fait valoir à juste titre le Parlement, il ne permet pas de démontrer que ces obligations ont effectivement été remplies et que, en l’occurrence, il y ait effectivement eu une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat parlementaire du requérant en conformité avec les mesures d’application. Il ne pouvait ainsi que constituer éventuellement un début de preuve, en ce sens qu’il devait nécessairement être complété par d’autres preuves pertinentes.

91      S’agissant du courriel du requérant datant du 28 octobre 2010, expédié depuis l’adresse électronique du député européen et adressé notamment à l’assistante locale, relatif à la publication de son nom sur le site Internet du Parlement, il n’est de nature à prouver que l’intention du requérant, déjà exprimée dans le contrat de travail, de s’attacher les services de l’assistante locale, sans pour autant pouvoir attester la prestation effective de tels services.

92      Deuxièmement, sur le bulletin de paie, sont précisés, en substance, les composants du salaire et les charges appliquées, sans précisions quant à l’emploi ou à la qualification de l’assistante locale. Ce bulletin ne permet pas de démontrer l’accomplissement des tâches indiquées dans le contrat de travail, ni de celles que le requérant a mentionnées dans sa réponse au secrétaire général du Parlement et dans ses écritures devant le Tribunal. En tout état de cause, ledit bulletin n’est pas de nature à prouver un quelconque lien avec le contrat de travail, car il indique comme employeur l’Union pour la démocratie française (UDF), et non le requérant, qui est l’employeur de l’assistante locale selon ledit contrat.

93      Troisièmement, s’agissant de l’invitation au dîner de Noël de la délégation MoDem au Parlement, force est de constater qu’elle a été adressée principalement aux députés de cette délégation, avec la précision que leurs « assistants locaux et à Paris [y étaient] également conviés ». Dès lors, la mention du nom de l’assistante locale en copie de ce courriel ne signifie pas nécessairement une reconnaissance d’un travail d’assistance parlementaire de sa part, en conformité avec les mesures d’application.

94      Quatrièmement, s’agissant des extraits de l’agenda du requérant, ainsi que le relèvent à bon droit le requérant et le Parlement, la production d’agendas constitue une preuve de la réalité du travail d’un assistant local qui est admissible. Toutefois, si, dans la jurisprudence, a été reconnue la valeur probante des agendas pour démontrer la réalité de travail d’un assistant local, cette reconnaissance a été soumise à la condition que les agendas attestent de rendez-vous ou de l’activité de l’assistant local (voir, en ce sens, arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement, T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 122), ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

95      En effet, en l’occurrence, le requérant a produit des extraits de son agenda papier personnel dont une partie des inscriptions manuscrites est illisible. De plus, bien qu’il soit possible, en dépit du caractère peu lisible des autres inscriptions manuscrites, d’identifier les rendez-vous énumérés par le requérant et la mention du prénom de l’assistante locale, il n’en ressort cependant pas une quelconque indication quant à l’objet de ces rendez-vous. Dès lors, contrairement à ce que le requérant soutient, ces inscriptions ne dévoilent aucune contribution de l’assistante locale conforme aux mesures d’application.

96      Partant, l’argument du requérant selon lequel il ressortirait de son agenda que de nombreuses séances de préparation et d’évaluation de ses interventions dans la presse écrite ont été réalisées par l’assistante locale ne peut pas être retenu.

97      Dans ces circonstances, c’est à bon droit que le Parlement a considéré que les extraits de l’agenda du requérant ne constituaient pas une preuve du travail effectué par l’assistante locale et encore moins une preuve d’un éventuel lien entre un tel travail et le mandat du requérant en tant que député au Parlement.

98      En deuxième lieu, s’agissant des articles, des tribunes, des annonces ou communications et des brèves de presse concernant le requérant, de la liste de ses interventions dans les médias, des captures d’écran de liens vers des interventions du requérant et de l’extrait de journaux contenant le programme des « États généraux du renouveau », il ressort de la décision attaquée que le secrétaire général du Parlement a indiqué qu’ils ne permettaient pas d’attester que l’assistante locale en serait l’auteure ou d’identifier sa contribution à ceux-ci et, en outre, concernant les captures d’écran, que leur provenance n’était pas indiquée.

99      À cet égard, le requérant soutient que ses nombreuses interventions dans la presse écrite, attestées par les documents produits, prouvent le travail effectif de l’assistante locale en tant qu’attachée de presse. Ainsi, pendant les 28 mois du contrat de travail de l’assistante locale, le requérant aurait réalisé 52 entretiens avec l’aide de celle-ci, qui aurait été, pendant cette période, la seule assistante à avoir la charge principale de sa relation avec la presse écrite. L’activité de l’assistante locale aurait également consisté à résumer les interventions du requérant et à recenser les liens Internet renvoyant vers celles parues dans la presse écrite, la source des captures d’écran étant le site Internet du requérant. Il serait évident que ces tâches techniques n’ont pas pu être effectuées par ce dernier.

100    Il convient de relever d’emblée que le requérant n’avance aucun élément permettant de remettre en cause l’appréciation du secrétaire général du Parlement relative à l’impossibilité d’attester que l’assistante locale est l’auteure des documents fournis ou qu’elle a contribué à ceux-ci. Il se borne en effet à affirmer qu’il serait habituel pour les « retombées presse » que le nom de l’assistante n’apparaisse pas. Certes l’une des finalités des articles de presse, des interventions dans les médias ou lors de conférences et des créations de contenu publiés sur des sites Internet est de mettre en évidence les opinions du député, et ainsi celui-ci, et non l’assistant qui aurait la charge de les préparer, voire de les rédiger, ou de les publier. Dès lors, ils peuvent ne pas faire mention du nom dudit assistant, qui les rédige ou contribue à leur rédaction ou les publie.

101    Il n’en demeure pas moins que, en l’espèce, le requérant n’a produit aucun élément permettant d’établir l’existence d’une quelconque contribution de l’assistante locale aux publications et aux travaux invoqués, tels que des projets, des brouillons, des notes préparatoires, des annotations diverses ou des courriels de cette dernière se rapportant à ceux-ci. Certains des articles produits étaient pourtant substantiels et devaient nécessairement être préalablement communiqués au député, sinon approuvés par lui. Dès lors, l’absence de toute production d’une correspondance entre le député et l’assistante locale à cet égard pouvait constituer un indice pertinent – sans être le seul –, sur lequel le Parlement pouvait se fonder pour apprécier la réalité du travail de ladite assistante. De même, aucun élément n’étaye l’affirmation du requérant selon laquelle les tâches de l’assistante locale consistaient à résumer ses interventions et à recenser les liens Internet renvoyant vers celles parues dans la presse écrite.

102    Partant, il doit être considéré que les documents produits par le requérant ne permettent pas d’établir l’existence d’un lien entre ceux-ci et l’assistante locale, afin d’étayer les allégations selon lesquelles, selon les cas, elle en aurait été l’auteure, aurait contribué à ceux-ci, les aurait résumés ou recensés. Comme le secrétaire général du Parlement l’a estimé en substance dans la décision attaquée, il ne peut être attesté qu’elle aurait ainsi, d’une manière ou d’une autre, contribué aux publications et aux travaux invoqués. Dans ce contexte, il doit être conclu que le fait évoqué par le requérant selon lequel, en substance, il a bénéficié d’une présence intense dans les médias grâce au travail de l’assistante locale n’est pas établi.

103    Par ailleurs, la circonstance que l’assistante locale était la seule assistante du requérant à avoir la charge principale de sa relation avec la presse écrite pendant la période en cause, faute d’être corroborée par des indices démontrant un travail conforme aux mesures d’application de sa part, ne saurait suffire à établir une présomption selon laquelle elle aurait contribué aux publications dans la presse qu’il invoque.

104    Enfin, est inopérant l’argument du requérant selon lequel les pièces qu’il a fournies indiquent clairement que les thèmes sur lesquels il intervenait dans les médias avec la collaboration de l’assistante locale portaient pour l’essentiel sur des questions et des enjeux européens, et non sur les prises de position d’un parti politique national ou sur des questions principalement nationales. En effet, le secrétaire général du Parlement s’est fondé sur l’absence de preuve de la contribution de l’assistante locale aux publications produites, et non sur le caractère national ou européen des thèmes abordés dans celles-ci.

105    En troisième lieu, s’agissant des courriels relatifs à la participation de l’assistante locale à la formation du 15 avril 2010 et des courriels, émanant de l’assistante locale, il ressort de la décision attaquée que le secrétaire général du Parlement a considéré qu’ils n’étaient pas acceptables comme éléments de preuve au motif, en substance, de l’absence de lien avec le mandat de député européen du requérant. Il a estimé en effet que ces éléments apparaissaient comme étant liés à l’activité de l’assistante locale « pour le compte du MoDem ».

106    D’une part, concernant la participation de l’assistante locale à la formation du 15 avril 2010, il importe de relever que le secrétaire général du Parlement a estimé que, dans la mesure où cette formation portait précisément sur des questions liées aux tâches dont l’assistante locale était responsable dans le cadre de son emploi pour le MoDem, et en l’absence de tout autre élément de preuve du travail de l’assistante locale pour le compte du député européen sur toute la durée du contrat, les éléments relatifs à cette formation produits par le requérant devaient être considérés comme étant liés à l’activité de l’assistante locale pour le parti, et non pour ledit député.

107    Il y a lieu de constater que le secrétaire général du Parlement n’a pas contesté que le suivi de la formation du 15 avril 2010 était utile afin d’améliorer l’accomplissement des tâches dont était chargée l’assistante locale pour le requérant en sa qualité de député européen et était, dès lors, pertinent aux fins de l’exécution de ces tâches, ainsi que le requérant le fait valoir. Dans ces circonstances, peu importe le fait qu’elle pouvait être également utile pour des activités dont l’assistante locale était responsable dans le cadre de son emploi pour le MoDem.

108    En outre, le fait que n’aurait pas été apporté d’autre élément de preuve du travail de l’assistante locale pour le compte du député européen sur toute la durée du contrat ne saurait permettre d’écarter les éléments produits relatifs à ladite formation. Dans le cas contraire, le rejet d’un seul élément de preuve pourrait conduire au rejet de tout autre élément pour ce seul motif et, de ce fait, au constat d’une absence d’un travail conforme aux exigences fixées dans l’article 33, paragraphe 2, première phrase, des mesures d’application durant la période concernée.

109    Or, en l’occurrence, il importe de constater que les éléments produits par le requérant, dont il est fait état dans la décision attaquée, sont deux courriels émanant d’une assistante parlementaire accréditée du requérant, l’un afin de confirmer la participation de l’assistante locale à la formation (pièce no 9) et l’autre portant sur la demande de remboursement des frais de déplacement de ladite assistante (pièce no 24). Contrairement à ce qu’affirme le Parlement, il était précisé dans le premier de ces deux courriels la qualité en laquelle cette dernière assisterait, pour le bureau du député, à la formation.

110    Quant à l’affirmation du Parlement selon laquelle le fait que la mission pour la formation du 15 avril 2010 a été acceptée comme élément de preuve pour un autre assistant local du requérant pour des raisons objectives qui distingueraient ce cas de la présente espèce, il doit être constaté que, comme le fait valoir le requérant, aucune précision n’a été apportée quant à ces raisons objectives.

111    Partant, il doit être considéré que, comme le requérant le soutient, les pièces nos 9 et 24 qu’il a produites concernant la formation du 15 avril 2010 devaient être prises en considération par le secrétaire général du Parlement, en ce qu’elles ont une valeur probante et démontrent une activité de l’assistante locale nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat du requérant.

112    D’autre part, concernant les courriels émanant de l’assistante locale, invoqués par le requérant, à savoir les pièces nos 11 à 14, 16 à 19, 34, 40 et 42, premièrement, il doit être relevé que, s’agissant des pièces nos 11 à 14, 16, 17, 19 et 40, le secrétaire général du Parlement a indiqué, dans la décision attaquée ou dans l’annexe de celle-ci, que ladite assistante s’était présentée et était intervenue « en tant que [m]embre du [s]ervice de presse du MoDem ».

113    À cet égard, il ressort des pièces nos 11 à 13 et 16 que, sous le nom de l’assistante locale figure la mention « [service de presse] ». Sur les pièces nos 14, 17, 19, apparaît en outre le logo du MoDem. S’agissant de la pièce n40, le nom de l’assistante locale y figure, sans la mention « [service de presse] », ni le logo du MoDem.

114    Il importe de relever que le secrétaire général du Parlement n’a pas contesté l’utilisation de l’adresse électronique avec l’extension « @lesdemocrates.fr ».

115    Le secrétaire général du Parlement n’a pas davantage contesté, contrairement à ce que fait valoir le Parlement, la mention du site Internet « www.lesdemocrates.fr » sur les courriels cités au point 113 ci-dessus. Partant, cette considération ne figurant ni dans la décision attaquée ni dans son annexe, le Tribunal ne saurait en tenir compte dans le cadre de son contrôle de légalité.

116    Par ailleurs, les courriels concernés portaient sur des rendez-vous du requérant avec la presse et correspondaient ainsi aux tâches définies à l’article 1er du contrat de travail.

117    Dans ces circonstances, s’agissant des pièces nos 11 à 13 et 16, la mention « [service de presse] » sur les courriels concernés, respectivement, des 28 avril, 29 avril, 5 mai et 15 juin 2010, ne permet pas de constater que l’assistante locale s’est alors présentée comme membre du service de presse du MoDem Ainsi que le requérant le soutient, il doit être considéré que ces pièces ont une valeur probante et démontrent l’accomplissement de tâches de l’assistante locale nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat du requérant.

118    Il en va de même, pour les raisons exposées aux points 114 et 115 ci-dessus, s’agissant de la pièce n40 concernant un courriel du 28 juin 2011, par lequel l’assistante locale a transféré une communication de l’Agence France-Presse (AFP) portant sur une prise de position du requérant, en sa qualité de député européen, sur une question économique concernant l’Union. Ledit courriel ne comporte d’ailleurs pas la mention « [service de presse] », contrairement à ce qui est indiqué au considérant 26 de la décision attaquée.

119    En revanche, s’agissant des pièces nos 14, 17 et 19 sur lesquelles apparaît le logo du MoDem, le secrétaire général du Parlement a estimé à juste titre que l’assistante locale s’était alors présentée comme membre du service de presse de ce parti politique.

120    Deuxièmement, dans l’annexe de la décision attaquée, est citée la pièce no 18, invoquée par le requérant, pour laquelle il est précisé qu’elle concerne un travail pour le service de presse du MoDem. Or, cette pièce correspond à un courriel du 18 mai 2010 dans lequel ne figurent ni la mention « [service de presse] » ni, comme le requérant le souligne, le logo du MoDem. De plus, ce courriel porte sur un rendez-vous du requérant avec la presse. Dès lors, il y a lieu de considérer que cette pièce a une valeur probante et démontre une activité de l’assistante locale nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat du requérant. Comme celui-ci le soutient, elle ne pouvait dès lors pas être écartée par le secrétaire général du Parlement.

121    Troisièmement, la pièce no 34, invoquée par le requérant, est citée dans l’annexe de la décision attaquée, avec l’appréciation du secrétaire général du Parlement selon laquelle il s’agit d’un échange, du 11 février 2011, entre l’assistante locale et B, concernant une prise de rendez-vous du requérant pour des « auditions économie », sans qu’il y ait une preuve d’un éventuel lien avec le mandat de député européen. Or, dans sa réponse du 13 mars 2019 (voir point 8 ci-dessus), le requérant avait indiqué que B était l’assistante locale d’un autre député européen, cette qualité n’étant pas contestée par le secrétaire général du Parlement et, au demeurant, ressortant d’une autre pièce produite par le requérant. Partant, la valeur probante de la pièce no 34 doit être reconnue, en ce que celle-ci prouve l’accomplissement de tâches de l’assistante locale nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat du requérant et, comme celui-ci le soutient, elle ne pouvait pas être écartée par le secrétaire général du Parlement.

122    De même devait être acceptée en tant que preuve de l’accomplissement de tâches de l’assistante locale nécessaires et directement liées à l’exercice du mandat du requérant et, comme celui-ci le soutient, ne pouvait pas être écartée par le secrétaire général du Parlement, la pièce no 42 consistant en un courriel du 6 juillet 2011 concernant la réaction du requérant sur un thème concernant l’Union, la qualité de député européen de celui-ci étant mentionnée. Le fait que les destinataires de ce courriel ne puissent être déterminés est inopérant en l’occurrence, car ce qui importe est que l’assistante locale en soit l’expéditrice, qu’il corresponde à des tâches de celle-ci auprès du député européen et que son contenu concerne celui-ci.

123    En revanche, la pièce no 20, également invoquée par le requérant, est un courriel dont le contenu ne le mentionne pas et dont il ne peut être affirmé qu’il lui a été transféré par l’assistante locale. Si le thème abordé porte certes sur une question relative à l’Union, il ne peut être affirmé que cette pièce constitue une preuve du travail de l’assistante locale pour le requérant, en sa qualité de député européen.

124    En quatrième lieu, en ce qui concerne les échanges relatifs à l’état de santé de l’assistante locale, à savoir un courriel du tiers payant à une assistante parlementaire accréditée du requérant relatif à l’arrêt de travail de l’assistante locale ainsi que trois avis d’arrêt de travail de celle-ci (pièce no 54), il ressort de la décision attaquée que le secrétaire général du Parlement a estimé qu’aucun de ces documents n’était de nature à démontrer que l’assistante locale avait effectivement fourni une assistance nécessaire et directement liée à l’exercice du mandat de député européen du requérant.

125    Il doit être constaté que ledit courriel, du 26 juin 2012, confirme notamment que « l’arrêt maladie n’a[llait] pas [avoir] d’impact sur la paie de [l’assistante locale] ». S’agissant des avis d’arrêt de travail, est mentionné comme employeur, sur l’avis initial, du 21 mai 2012, le MoDem, le nom du requérant n’y figurant pas, tandis que, sur les deux avis de prolongation, respectivement, du 4 juin et du 2 juillet 2012, les rubriques dédiées à l’employeur ne sont pas remplies.

126    À cet égard, il convient de relever qu’il n’est pas contesté que, durant la période couverte par les arrêts de travail, à savoir du 21 mai au 27 juillet 2012, l’assistante locale était employée par le requérant. Par ailleurs, il ne ressort pas des avis d’arrêt de travail qu’ils auraient visé une partie seulement des activités salariées de l’assistante locale.

127    En outre, il doit être relevé que, au considérant 28 de la décision attaquée, le secrétaire général du Parlement a estimé, en renvoyant à l’arrêt du 29 novembre 2017, Montel/Parlement (T‑634/16, non publié, EU:T:2017:848, point 214), que les éléments relatifs à un congé maladie étaient inopérants en l’absence de toute preuve de travail effectué par l’assistante locale durant les périodes antérieures et postérieures à la période de congé. Or, une telle considération est entachée d’une erreur de droit, car cette jurisprudence porte sur les périodes de congés payés et ne saurait être appliquée mutatis mutandis s’agissant de congés maladie. Un congé payé est en effet accordé en compensation de périodes de travail, lesquelles doivent dès lors avoir été accomplies, alors qu’un congé maladie implique l’impossibilité objective d’exercer une activité professionnelle et, dès lors, de démontrer l’existence d’une telle activité.

128    Par ailleurs, le secrétaire général du Parlement n’a avancé aucun élément par lequel il aurait estimé que les congés maladie de l’assistante locale n’avaient pas été accordés de manière conforme, notamment, au contrat de travail ou aux mesures d’application. À cet égard, si le Parlement soutient n’avoir eu connaissance de ces congés maladie que par le biais des éléments produits par le requérant, force est de constater que cette considération n’a pas été avancée ni dans la décision attaquée, ni dans son annexe et, dès lors, le Tribunal ne saurait en tenir compte dans le cadre de son contrôle de légalité.

129    Il s’ensuit qu’il doit être considéré que la pièce no 54, concernant les périodes de congé maladie de l’assistante locale, couvrant la période allant du 21 mai au 27 juillet 2012, a une valeur probante et qu’elle aurait dû être prise en considération par le secrétaire général du Parlement.

130    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu de considérer que les pièces nos 9 et 24, relatives à la formation du 15 avril 2010, et les pièces nos 11 à 13, 18, 16, 34, 40 et 42, concernant les courriels de l’assistante locale ont une valeur probante et devaient être prises en considération. De plus, ainsi qu’il a été considéré au point 129 ci-dessus, devait être prise en considération par le secrétaire général du Parlement la pièce no 54 relative aux congés maladie de l’assistante locale.

131    Par conséquent, c’est à tort que le Parlement a estimé que, concernant la période comprise entre avril et juin 2010, les mois de février, de juin et de juillet 2011 et, enfin, la période comprise entre le 21 mai et le 27 juillet 2012, aucun élément ne prouvait la réalité de l’emploi de l’assistante locale en tant qu’assistante parlementaire du requérant.

132    Dans ce contexte, il convient de souligner que, au regard du libellé de l’article 33 des mesures d’application, rien ne s’opposait à ce que, le cas échéant, le secrétaire général du Parlement constate que, pour une partie de la période concernée par la décision attaquée, le requérant avait apporté les éléments permettant de prouver un travail de l’assistante locale conforme auxdites mesures, le constat de la régularité ou de l’irrégularité des frais en cause ne devant pas nécessairement s’appliquer à la totalité de ladite période.

133    En revanche, durant les périodes comprises entre le 1er novembre 2009 et le 31 juillet 2012 autres que celles mentionnées au point 131 ci-dessus, force est de constater que le requérant n’a produit aucun élément permettant d’attester que l’assistante locale avait assuré des tâches en conformité avec les mesures d’application, notamment avec les articles 33 et 62 de celles-ci. C’est dès lors à tort que, s’agissant de ces périodes, le requérant prétend que le Parlement a procédé à une appréciation erronée des faits.

134    Partant, il s’ensuit que le quatrième moyen doit être accueilli en tant qu’il concerne la période comprise entre avril et juin 2010, les mois de février, de juin et de juillet 2011 et, enfin, la période comprise entre le 21 mai et le 27 juillet 2012, et rejeté pour le surplus.

135    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la décision attaquée et, par voie de conséquence, la note de débit doivent être annulées en tant qu’elles ont trait à des sommes versées pendant la période comprise entre avril et juin 2010, les mois de février, de juin et de juillet 2011 et, enfin, la période comprise entre le 21 mai et le 27 juillet 2012. Pour le surplus, il y a lieu de rejeter le recours.

 Sur les dépens

136    Aux termes de l’article 134, paragraphe 3, du règlement de procédure, chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. En l’espèce, il y a lieu de décider que le requérant et le Parlement supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du secrétaire général du Parlement européen du 17 décembre 2019 relative au recouvrement auprès de M. Robert Rochefort d’une somme de 61 423,40 euros indûment versée au titre de l’assistance parlementaire et la note de débit correspondante du 22 janvier 2020 sont annulées en tant qu’elles ont trait à des sommes versées pendant la période comprise entre avril et juin 2010, les mois de février, de juin et de juillet 2011 et, enfin, la période comprise entre le 21 mai et le 27 juillet 2012.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      M. Rochefort et le Parlement supporteront chacun leurs propres dépens.

Spielmann

Öberg

Spineanu-Matei

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.