Language of document : ECLI:EU:T:2015:831

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

20 octobre 2015 (*)

« Dessin ou modèle communautaire – Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑11/08 DEP,

Kwang Yang Motor Co., Ltd, établie à Kaohsiung (Taïwan), représentée par Mes P. Rath, W. Festl-Wietek et M. Wetzel, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie aux procédures devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal étant

Honda Giken Kogyo Kabushiki Kaisha, établie à Tokyo (Japon), représentée par Mes  T. Musmann, H. Timmann et M. Büttner, avocats,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par la partie requérante à la partie intervenante à la suite de l’arrêt du Tribunal du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne) (T‑11/08, EU:T:2011:447),

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen, (rapporteur), président, F. Dehousse et A. M. Collins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par ses arrêts du 9 septembre 2011, Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne avec ventilateur sur le dessus) (T‑10/08, EU:T:2011:446) et Kwang Yang Motor/OHMI – Honda Giken Kogyo (Moteur à combustion interne) (T‑11/08, EU:T:2011:447), le Tribunal a rejeté les recours présentés par la requérante, Kwang Yang Motor Co., Ltd, et condamné celle-ci aux dépens de l’intervenante, Honda Giken Kogyo Kabushiki Kaisha. Les affaires ayant donné lieu à ces arrêts avaient été joints aux fins de la phase orale de la procédure par d’ordonnance du président du Tribunal du 16 décembre 2010.

2        L’intervenante a, par lettre du 30 janvier 2012, invité la requérante à lui rembourser un montant total de 36 067,60 euros au titre de l’ensemble des procédures l’ayant opposé à la requérante, y compris devant la division d’annulation et devant la troisième chambre de recours de l’OHMI.

3        En mars 2013, en réponse à cette demande de l’intervenante, la requérante a remboursé à l’intervenante un montant de 4 100 euros correspondant aux frais exposés par cette dernière aussi bien lors la procédure devant la division d’annulation que devant la troisième chambre de recours de l’OHMI.

4        Par courrier envoyé à la requérante le 3 avril 2013, l’intervenante a confirmé ce remboursement et a indiqué que les dépens récupérables au titre des deux procédures devant le Tribunal restaient encore à rembourser.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 23 décembre 2014, l’intervenante a introduit, en application de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991, la présente demande de taxation des dépens, par laquelle elle a invité le Tribunal à fixer le montant des dépens récupérables dont le remboursement incombait à la requérante, en vertu de l’arrêt Moteur à combustion interne (point 1 supra, EU:T:2011:447), à 16 176,90 euros.

6        Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 25 février 2015, la requérante a présenté ses observations sur la demande de l’intervenante. Elle demande au Tribunal de rejeter cette demande dans son ensemble ou, à titre subsidiaire, de fixer le montant des dépens récupérables dont le remboursement lui incombe d’un montant de 8 088,45 euros, qu’elle considère raisonnable.

 En droit

 Arguments des parties

7        L’intervenante fournit, à l’appui de sa demande de taxation des dépens un décompte d’un montant total de 16 176,90 euros pour des frais et honoraires ventilés en les rubriques et les montants suivants. D’une part, elle réclame la somme de 15 989,90 euros au titre de frais de représentation de l’intervenante, d’affranchissement, de télécopie et de photocopie, majorés d’un montant de 500 euros au titre des honoraires d’avocats liés aux frais de la procédure. D’autre part, la somme de 187 euros est réclamée, au titre de frais de voyage, concernant la participation d’un avocat à l’audience du 2 février 2011.

8        L’intervenante estime que l’affaire présentait un intérêt très important du point de vue du droit de l’Union car il s’agissait d’un des premiers litiges concernant l’interprétation et l’application du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires (JO 2002, L 3, p. 1). L’affaire aurait été également très difficile et complexe, notamment du fait du nombre très important d’annexes déposées par la requérante avec sa requête du 7 janvier 2008, comprenant une quarantaine de dessins ou modèles communautaires supplémentaires qui ne faisaient pas partie de la procédure initiale. Par ailleurs, l’intervenante soutient avoir eu un intérêt économique important à ce que le Tribunal rejette le recours déposé contre la décision attaquée.

9        La requérante conteste ces affirmations et considère, en substance, que la somme demandée par l’intervenante n’est ni raisonnable ni fondée.

 Appréciation du Tribunal

10      L’article 170 du règlement de procédure du Tribunal dispose :

« 1. S’il y a contestation sur les dépens récupérables, la partie intéressée saisit le Tribunal par voie de demande. […]

3. Après avoir mis la partie concernée par la demande en mesure de présenter ses observations le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours. »

11      Ainsi qu’il a été indiqué aux points 2 à 4 ci-dessus, le 30 janvier 2012 l’intervenante a demandé à la requérante le remboursement des dépens qu’elle considérait récupérables. À la suite d’un acquittement partiel par la requérante en mars 2013, le 3 avril 2013 l’intervenante lui a réclamé à nouveau le solde du montant en question. N’ayant pas été acquitté à la date de l’introduction de la présente demande, il doit être considéré comme étant contesté par la requérante.

12      Certes, une période de temps non négligeable s’est écoulée entre la date de l’arrêt condamnant la requérante aux dépens et l’introduction par l’intervenante de la présente demande. Toutefois, contrairement à ce que prétend la requérante, au regard de la chronologie des faits rappelée au point 11 ci-dessus, l’écoulement d’une telle période ne peut pas être reproché exclusivement à l’intervenante et la renonciation par celle-ci à sa demande ne saurait être retenue.

13      Selon l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ». Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir, en ce sens, ordonnance du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec, EU:T:2004:192, point 13, et la jurisprudence citée).

14      À défaut de dispositions de l’Union de nature tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représenté pour les parties (voir, en ce sens, ordonnances Airtours/Commission, point 11 supra, EU:T:2004:192, point 18, et du 3 octobre 2012, Diputación Foral de Álava e.a./Commission, T-86/02 DEP à T-88/02 DEP, EU:T:2012:520, point 16).

15      C’est à la lumière des considérations qui précèdent, qu’il y a lieu d’évaluer le montant des dépens récupérables en l’espèce.

16      En premier lieu, le Tribunal relève que l’affaire au principal constituait, ainsi que le souligne, à juste titre, l’intervenante, une des premières affaires relevant du contentieux relatif à l’application du règlement n° 6/2002. De ce fait, l’affaire en question revêtait une certaine importance sous l’angle du droit de l’Union.

17      En deuxième lieu, s’agissant spécifiquement de l’objet et la nature de l’affaire en question, il ressort de l’arrêt Moteur à combustion interne (point 1 supra, EU:T:2011:447), que cette affaire avait pour objet un recours en annulation de la requérante fondé sur un moyen unique, tiré d’une prétendue violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 6/2002 lu en combinaison avec l’article 6 du même règlement. Il ressort également de cet arrêt que l’affaire a soulevé notamment une question de fait relative à l’appréciation de la chambre de recours concernant les parties visibles lors de l’utilisation du moteur faisant l’objet du dessin ou modèle contesté, qui avait été qualifié en tant que pièce d’un produit complexe, ainsi que deux questions de droit relatives aux notions d’utilisateur averti et du degré de liberté du créateur. Il y a lieu de relever que ces questions n’avaient pas encore fait l’objet, au moment où les écritures des parties ont été présentées, d’interprétation par la jurisprudence du Tribunal. Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que l’affaire en question posait un certain degré de difficulté et de complexité.

18      En troisième lieu, le Tribunal constate que, si l’affaire présentait, certes, un intérêt économique pour l’intervenante, cet intérêt ne saurait être considéré, en l’absence totale d’éléments concrets apportés par cette dernière à cet égard, comme inhabituel ou significativement différent de celui qui sous-tend toute demande en nullité d’un dessin ou modèle communautaire (voir, en ce sens, ordonnance du 17 juin 2015, Mundipharma/OHMI, T‑328/12 DEP, EU:T:2015:430, point 25 et jurisprudence citée).

19      Finalement, s’agissant de l’appréciation de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer, il appartient au juge de l’Union de tenir principalement compte du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (voir ordonnance du 14 mai 2013, Arrieta D. Gross/OHMI, T‑298/10 DEP, EU:T:2013:237, point 19 et jurisprudence citée).

20      Par ailleurs, il importe de rappeler que, selon la jurisprudence, la rétribution horaire dont l’application est demandée doit être prise en considération, dans la mesure où la prise en compte d’un taux horaire d’un niveau élevé n’apparaît appropriée que pour rémunérer les services de professionnels capables de travailler de façon efficace et rapide et doit, par voie de conséquence, avoir pour contrepartie une évaluation nécessairement stricte du nombre total d’heures de travail indispensables aux fins de la procédure contentieuse (voir ordonnance Arrieta D. Gross/OHMI, point 19 supra, EU:T:2013:237, point 20 et jurisprudence citée).

21      En l’espèce, il ressort du décompte du conseil de l’intervenante présenté par celle-ci à l’appui de sa demande de taxation des dépens, que le montant de 15 989,90 euros qu’elle réclame au titre de la représentation de l’intervenante au cours de la procédure devant le Tribunal, correspond à 73 heures et 30 minutes de travail consacré par ses avocats, entre le 29 janvier 2008 et le 14 décembre 2011, notamment à l’étude de la procédure devant le Tribunal, la préparation et l’élaboration du mémoire en réponse, l’étude de la décision attaquée et les écritures présentées au cours de la procédure devant l’OHMI, l’analyse du rapport d’audience, la préparation de l’audience et l’assistance à celle-ci, et l’élaboration et communication à l’intervenante de rapports concernant le déroulement de l’audience et l’arrêt rendu dans l’affaire au principal.

22      D’une part, s’agissant du taux horaire pratiqué par le conseil de l’intervenante, le Tribunal estime qu’un montant de 200 euros parait approprié pour ce type de contentieux (voir, en ce sens, ordonnance du 2 juin 2015, Optilingua/OHMI, T‑538/12 DEP, EU:T:2015:366, point 21) et, au demeurant, relève que la requérante ne l’a pas contesté elle-même.

23      D’autre part, s’agissant du nombre d’heures qui devraient être considérées indispensables aux fins de la procédure devant le Tribunal, il y a lieu de relever, tout d’abord, à la lumière des considérations effectuées au point 20 ci-dessus, qu’il parait excessif, pour un professionnel rémunéré à un taux horaire raisonnable pour représenter son client devant le Tribunal, de consacrer 6 heures et 40 minutes à l’étude de la procédure devant le Tribunal, qu’il est censé connaître.

24      Ensuite, il y a lieu d’observer que, bien qu’il s’agissait d’une affaire d’une certaine importance et d’un certain degré de complexité, ainsi qu’il a été constaté aux points 16 et 17 ci-dessus, la procédure écrite a consisté en un seul tour de mémoires dans le cadre duquel l’intervenante a déposé un mémoire en réponse (16 pages hors annexes), des observations concernant la participation à l’audience (une page) ainsi que concernant une proposition de jonction (une page). En outre, le conseil de l’intervenante a été amené à analyser la requête présentée par la requérante qui comportait 23 pages et 291 pages d’annexes, dont douze pages correspondaient à la décision attaquée, 27 pages contenaient des catalogues publicitaires et 250 pages contenaient des enregistrements de modèles de moteurs, principalement aux États-Unis. À l’égard de ces derniers documents, il y a lieu relever que bien qu’ils représentent un volume important de données, celles-ci sont pour la plupart encadrées dans le format standard des enregistrements qui permet aux professionnels experts en la matière un traitement relativement rapide des informations pertinentes.

25      En outre, il importe de rappeler la jurisprudence selon laquelle, la connaissance que le conseil d’une des parties dispose déjà de l’affaire pour avoir représenté celle-ci préalablement à l’introduction du recours au principal, auprès des instances de l’OHMI, est de nature à faciliter, de manière non négligeable, le travail et à réduire le temps de préparation nécessaire du mémoire en réponse et des autres documents déposés auprès du Tribunal [voir ordonnance du 23 octobre 2013, Phonebook of the World/OHMI – Seat Pagine Gialle (PAGINE GIALLE), T‑589/11 DEP, EU:T:2013:572, point 18 et jurisprudence citée]. En l’espèce, il ressort du dossier que le cabinet d’avocats représentant l’intervenante devant le Tribunal, l’avait également représentée auprès de l’OHMI.

26      Par ailleurs, ainsi que la requérante le fait valoir à juste titre, il y a lieu de prendre en considération le fait que le même conseil a représenté l’intervenante aux fins de la procédure devant le Tribunal dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Moteur à combustion interne avec ventilateur sur le dessus (point 1 supra, EU:T:2011:446), opposant les mêmes parties sur un modèle communautaire très similaire à celui en question dans l’affaire au principal en l’espèce, dont la décision attaquée et les écritures des parties présentent des similitudes très importantes et qui a été jointe à l’affaire au principal en l’espèce aux fins de la phase orale de la procédure. À cet égard, il y a lieu de constater que l’intervenante a présenté une demande de taxation des dépens récupérables en vertu de l’arrêt précité pour un montant total de 12 374,65 euros, dont notamment 11 500 euros au titre de frais de représentation de l’intervenante correspondant à 57 heures et 30 minutes de travail consacrées par ce conseil aux fins de la procédure en question. À la lumière de ces considérations, le Tribunal estime qu’il existe un chevauchement entre les deux demandes de taxation de dépens présentées par l’intervenante qu’il convient de prendre en considération lors de l’évaluation du montant des dépens récupérables dans chacune des deux affaires.

27      Dans ces conditions, le Tribunal estime que le nombre de 48 heures et demie de travail dédiées à la phase écrite de la procédure et aux tâches connexes, tel que retenu dans le décompte du conseil de l’intervenante est excessif.

28      Enfin, s’agissant des heures de travail consacrées à la préparation et la participation à l’audience, il y a lieu de rappeler, que, à la suite de l’ordonnance de jonction indiquée au point 1 ci-dessus, une seule audience s’est déroulée le 2 février 2011 de 9h39 à 10h59. Ainsi, le Tribunal estime que le nombre de 19 heures de travail liées à l’audience dans l’affaire au principal en l’espèce, tel que retenu dans le décompte du conseil de l’intervenante, est manifestement excessif.

29      Dans ces conditions, le Tribunal estime que le nombre de 76 heures et 30 minutes de travail liées à la représentation de l’intervenante au cours des phases écrite et orale de la procédure devant le Tribunal, tel que retenu dans le décompte du conseil de l’intervenante est, dans son ensemble, manifestement excessif et dépasse largement ce qui est indispensable aux fins de la procédure devant le Tribunal.

30      S’agissant des frais de photocopies et d’affranchissement évalués à 189,9 euros et des frais de voyage d’un avocat pour assister à l’audience, évalués à 187 euros, dont les pièces justificatives ont été produites par l’intervenante, ils paraissent, dans l’ensemble, raisonnables et justifiés.

31      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il sera fait une juste appréciation de l’intégralité des dépens récupérables par l’intervenante au titre de la procédure devant le Tribunal en fixant leur montant total à 8 088,45 euros, que la requérante elle-même considère raisonnable. Ce montant tient compte de toutes les circonstances de l’affaire jusqu’à la date d’adoption de la présente ordonnance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens que Kwang Yang Motor Co., Ltd doit rembourser à Honda Giken Kogyo Kabushiki Kaisha est fixé à 8 088,45 euros.

Fait à Luxembourg, le 20 octobre 2015.

Le greffier

 

      Le président

E.  Coulon

 

      S. Frimodt Nielsen


* Langue de procédure : l’anglais.