Language of document : ECLI:EU:T:2007:142

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

16 mai 2007 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’annulation – Marque communautaire verbale NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC – Marques nationales figuratives et verbale antérieures la PERLA et LA PERLA PARFUMS – Motif relatif de refus – Article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 40/94 – Article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑137/05,

Gruppo La Perla SpA, établie à Bologne (Italie), représentée par Mes R. Morresi et A. Dal Ferro, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme M. Capostagno, puis par M. O. Montalto, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Worldgem Brands – Gestão e Investimentos Lda, anciennement Cielo Brands – Gestão e Investimentos Lda, établie à Madère (Portugal), représentée par Mes G. Bozzola et C. Bellomunno, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 25 janvier 2005 (affaire R 537/2004‑1), relative à une procédure de nullité entre Gruppo La Perla SpA et Worldgem Brands – Gestão e Investimentos Lda,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 1er avril 2005,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 29 juillet 2005,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 27 juillet 2005,

à la suite de l’audience du 16 novembre 2006,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 30 décembre 1997, Worldgem Brands – Gestão e Investimentos Lda, anciennement Cielo Brands – Gestão e Investimentos Lda, a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 14 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Joaillerie, horlogerie, orfèvrerie et horlogerie ; métaux précieux ; perles ; pierres précieuses ».

4        La marque demandée a été enregistrée le 21 juillet 1999.

5        Le 15 avril 2002, la requérante a demandé que soit déclarée la nullité de cet enregistrement, d’une part, en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, au motif que l’enregistrement se heurtait aux motifs absolus de refus prévus par l’article 7, paragraphe 1, sous a) et b), dudit règlement et, d’autre part, en vertu de l’article 52, paragraphe 1, sous a), dudit règlement, au motif que l’enregistrement se heurtait aux motifs relatifs de refus prévus par l’article 8, paragraphe 1, sous b), et par l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement.

6        Les marques antérieures invoquées à l’appui de la demande en nullité, qui sont protégées en Italie, sont :

–        la marque figurative la PERLA, représentée ci-après, enregistrée sous le n° 769 526, avec effet au 20 mars 1996, pour les produits suivants relevant de la classe 25 : « Maillots de bain, habillements de sport et habillements en général » ;

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–        la marque verbale LA PERLA PARFUMS, enregistrée sous le n° 776 082, avec effet au 9 octobre 1996, pour les produits suivants de la classe 3 : « Produits de parfumerie en général » ;

–        la marque figurative la PERLA, représentée ci-après, enregistrée sous le n° 804 992, avec effet au 8 octobre 1997, pour les produits et services suivants :

–        classe 3 : « Parfumerie, huiles essentielles, lotions pour les cheveux » ;

–        classe 9 : « Lunettes » ;

–        classe 14 : « Produits de joaillerie et bijouterie ; horlogerie » ;

–        classe 16 : « Produits de l’imprimerie, papeterie » ;

–        classe 18 : « Cuir, peaux et leurs imitations, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; malles et valises ; parapluies, sacs, sacs à main et portefeuilles » ;

–        classe 24 : « Serviettes, mouchoirs » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 35 : « Services relatifs à l’organisation et la mise en place publicitaire, services relatifs à la présentation de produits au public ; services d’aide dans la gestion des affaires commerciales ».

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7        La requérante a invoqué également deux demandes d’enregistrement en Italie des marques figuratives la PERLA, respectivement déposées le 11 octobre 2000 et le 12 juin 2002.

8        Au soutien de sa demande en nullité, la requérante a produit devant la division d’annulation de la documentation consistant, notamment, en des listes d’enregistrements de marques, en des articles publiés dans la presse, en des listes de magasins portant l’enseigne « La Perla », ainsi qu’en des statistiques relatives à son chiffre d’affaires et à ses dépenses publicitaires afin de prouver la renommée de ses marques.

9        Le 4 mai 2004, la division d’annulation a déclaré la nullité de la marque communautaire NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC au motif que l’usage de cette marque pouvait permettre à son titulaire de tirer indûment profit de la renommée de la marque figurative la PERLA, visée par l’enregistrement n° 769 526 (ci-après la « décision de la division d’annulation »).

10      Le 1er juillet 2004, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision du 25 janvier 2005 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a accueilli le recours de l’intervenante et a annulé la décision de la division d’annulation. Elle a considéré que la marque communautaire NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC n’était pas assez semblable à la marque figurative la PERLA, visée par l’enregistrement n° 769 526, ni aux autres marques énumérées dans la demande de déclaration de nullité pour pouvoir conclure à l’existence d’un risque de confusion tel que prévu à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 ou d’un lien, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, rétablir la décision de la division d’annulation et, en toute hypothèse, déclarer la nullité de la marque contestée ;

–        condamner l’intervenante aux dépens de l’ensemble de la procédure, y compris la procédure devant la division d’annulation et devant la chambre de recours de l’OHMI.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        accueillir les conclusions de la requérante en ce qu’elles visent l’annulation de la décision attaquée, motif pris de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 5, et de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 ;

–        rejeter les conclusions de la requérante en ce qu’elles visent l’annulation de la décision attaquée, motif pris de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 1, sous a) et b), et de l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 ;

–        rejeter les conclusions de la requérante en ce qu’elles visent la déclaration de nullité de la marque contestée ;

–        condamner chaque partie à supporter ses propres dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal confirmer la décision attaquée.

15      Lors de l’audience, le Tribunal a pris acte de ce que la requérante a précisé qu’elle n’invoquait pas l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 à l’appui de son recours.

 Sur la recevabilité des conclusions de la requérante en ce qu’elles visent le rétablissement de la décision de la division d’annulation et la déclaration de nullité de la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC

16      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, outre l’annulation de la décision attaquée, de rétablir la décision de la division d’annulation et de déclarer la nullité de la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC.

17      À cet égard, il suffit de constater que le Tribunal n’a pas compétence pour rétablir une décision de la division d’annulation ni pour déclarer la nullité d’une marque.

18      Au surplus, dans la mesure où ces demandes doivent être comprises en ce sens que la requérante demande au Tribunal d’enjoindre à l’OHMI de rétablir la décision de la division d’annulation et de déclarer la nullité de la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC, il convient de rappeler que, conformément à l’article 63, paragraphe 6, du règlement nº 40/94, l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge communautaire. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser une injonction à l’OHMI. Il incombe, en effet, à ce dernier de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du Tribunal [arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 33 ; du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 12, et du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser‑Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 22]. Ces demandes sont donc irrecevables.

 Sur la recevabilité des conclusions de l’OHMI

19      En ce qui concerne la position procédurale de l’OHMI, il convient de rappeler que, si l’OHMI ne dispose pas de la légitimation active requise pour introduire un recours contre une décision d’une chambre de recours, en revanche, il ne saurait être tenu de défendre systématiquement toute décision attaquée d’une chambre de recours ou de conclure obligatoirement au rejet de tout recours dirigé à l’encontre d’une telle décision [arrêts du Tribunal du 30 juin 2004, GE Betz/OHMI – Atofina Chemicals (BIOMATE), T‑107/02, Rec. p. II‑1845, point 34 ; du 15 juin 2005, Spa Monopole/OHMI – Spaform (SPAFORM), T‑186/04, Rec. p. II‑2333, point 20, et du 25 octobre 2005, Peek & Cloppenburg/OHMI (Cloppenburg), T‑379/03, Rec. p. II‑4633, point 22]. Rien ne s’oppose à ce que l’OHMI se rallie à une conclusion de la partie requérante ou encore se contente de s’en remettre à la sagesse du Tribunal, tout en présentant tous les arguments qu’il estime appropriés pour éclairer le Tribunal (arrêts BIOMATE, précité, point 36, et Cloppenburg, précité, point 22). En revanche, il ne peut pas formuler de conclusions visant à l’annulation ou à la réformation de la décision de la chambre de recours sur un point non soulevé dans la requête ou présenter des moyens non soulevés dans la requête (arrêt Cloppenburg, précité, point 22 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 octobre 2004, Vedial/OHMI, C‑106/03 P, Rec. p. I‑9573, point 34).

20      Il s’ensuit que le chef de conclusions de l’OHMI par lequel celui-ci se rallie aux conclusions de la requérante en ce qu’elles visent l’annulation de la décision attaquée, motif pris de l’application erronée de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, doit être déclaré recevable, dès lors que ce chef de conclusions et les arguments exposés à son appui ne sortent pas du cadre des conclusions et des moyens avancés par la requérante.

 Sur le fond

 Arguments des parties

21      La requérante invoque trois moyens à l’appui de son recours. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94. Le deuxième moyen est tiré, à titre subsidiaire, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Le troisième moyen est tiré de la violation de l’obligation de motivation.

22      En ce qui concerne le premier moyen, la requérante fait valoir, en substance, que sa marque la PERLA est une marque renommée et qu’il existe un risque précis et concret de confusion avec la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC, cette confusion s’étant d’ailleurs déjà produite dans la presse spécialisée. Elle ajoute que, en tout état de cause, un tel risque de confusion n’est pas exigé, mais qu’il suffit qu’il existe un lien entre les marques en cause. La requérante soutient, en outre, que l’expression « la perla » contenue dans la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC n’est pas descriptive pour tous les produits de l’intervenante et conteste la référence faite aux perles sous la même forme que dans sa marque protégée. Elle fait valoir que l’usage de la marque contestée peut permettre à son titulaire de tirer indûment profit du caractère distinctif et de la renommée de la marque antérieure ou porter préjudice à celle-ci et que cet usage doit donc être considéré comme étant fait sans juste motif.

23      L’OHMI soutient les arguments de la requérante. Selon lui, la chambre de recours n’a pas interprété ni appliqué à bon droit l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 en ce qu’elle a omis de prendre en compte la renommée de la marque antérieure et refusé d’admettre l’existence d’un certain degré de similitude entre les marques en cause.

24      L’intervenante fait valoir que les marques en cause ne sont pas suffisamment semblables pour que le public concerné puisse établir un lien entre elles. En outre, aucun profit injustifié ne pourrait être tiré de l’utilisation d’une expression qui serait parfaitement générique à l’égard des produits auxquels elle s’applique.

 Appréciation du Tribunal

25      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, « [s]ur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est également refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans la Communauté et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice ».

26      Ainsi, l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 suppose, premièrement, l’identité ou la similitude des marques en cause, deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure, troisièmement, l’existence d’un risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porte préjudice. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicables les dispositions de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [arrêt du Tribunal du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA-FINDERS), T‑67/04, Rec. p. II‑1825, point 30].

27      À cet égard, le Tribunal relève, tout d’abord, que la décision de la division d’annulation porte uniquement sur la marque figurative italienne la PERLA, visée par l’enregistrement n° 769 526, et que la chambre de recours n’a pas non plus explicitement examiné dans la décision attaquée les autres marques invoquées par la requérante. Dès lors, le Tribunal va limiter son examen à cette seule marque. Ensuite, il y a lieu de constater que le territoire pertinent aux fins de l’examen de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 est celui de l’Italie.

28      En l’espèce, il convient d’examiner d’abord la condition relative à la renommée.

 Sur la renommée de la marque antérieure

29      La chambre de recours n’a pas consacré de développements spécifiques à la renommée de la marque antérieure la PERLA dans la décision attaquée, mais elle y a reconnu la renommée précédemment établie par la division d’annulation en ce qui concerne la lingerie intime et les maillots de bain. L’OHMI reconnaît cette renommée.

30      L’intervenante ne conteste pas la renommée de la marque antérieure la PERLA, mais elle a fait valoir lors de l’audience que cette renommée n’existait que pour la marque figurative antérieure la PERLA prise dans son ensemble, c’est-à-dire en ce qu’elle comprend non seulement l’expression « la perla » mais également des éléments figuratifs de cette marque.

31      Dès lors, il convient de relever que la renommée de la marque antérieure la PERLA n’est pas contestée en tant que telle et qu’il n’y a donc pas lieu d’examiner les différents documents présentés par la requérante au cours de la procédure devant l’OHMI pour démontrer la renommée de sa marque antérieure la PERLA.

32      S’agissant de l’argument de l’intervenante concernant l’importance des éléments figuratifs, il y a lieu de constater que ces éléments sont d’une importance purement secondaire dans le cadre de l’appréciation de la renommée de la marque antérieure et que, partant, ils ne sauraient aucunement la remettre en cause.

33      La renommée de la marque antérieure étant ainsi établie, il convient d’examiner si la condition relative à l’identité ou à la similitude des marques en cause est remplie.

 Sur l’identité ou la similitude des marques en cause

34      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la protection conférée par l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 n’est pas subordonnée à la constatation d’un degré de similitude tel entre les marques en cause qu’il existe, dans l’esprit du public concerné, un risque de confusion entre celles-ci. Il suffit que le degré de similitude entre ces marques ait pour effet que le public concerné établisse un lien entre elles (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, Adidas-Salomon et Adidas Benelux, C‑408/01, Rec. p. I‑12537, point 31).

35      L’existence d’un tel lien doit, de même qu’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, être appréciée globalement, en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, par analogie, arrêt Adidas-Salomon et Adidas Benelux, précité, point 30). Dès lors, cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips‑Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

36      En l’espèce, il y a lieu de rappeler que les marques qu’il convient de comparer sont les suivantes :

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NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC

marque antérieure

marque communautaire


37      La chambre de recours a constaté que les marques en cause n’étaient pas assez semblables pour pouvoir établir entre les deux l’existence d’un lien aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94. Selon la décision attaquée, l’expression « la perla » figurant dans la marque communautaire NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC ne remplit aucune fonction distinctive, puisqu’elle ne fait qu’évoquer le matériau utilisé dans la fabrication des produits couverts par cette marque.

38      La requérante conteste cette appréciation de la chambre de recours. Elle souligne que, non seulement une telle circonstance n’est pas prouvée, mais encore que, dans le secteur de l’horlogerie, il est difficile de concevoir un usage possible des perles.

39      L’OHMI conteste également l’appréciation de la chambre de recours devant le Tribunal et estime que l’expression « la perla » figurant dans la marque communautaire NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC rend les signes en cause similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

40      L’intervenante, quant à elle, fait valoir que le rôle distinctif et dominant du terme « nimei » ainsi que le caractère purement descriptif de l’expression qui suit, à savoir « la perla modern classic », excluent l’existence d’un degré suffisant de similitude entre la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC et la marque antérieure la PERLA et, par conséquent, tout risque que le public concerné puisse établir un lien entre ces deux marques.

41      Le Tribunal constate que la marque antérieure est constituée des éléments verbaux « la » et « perla », présentés en caractères typographiques de fantaisie, à l’intérieur d’un cadre ornemental au dessin floral stylisé. Il y a lieu de relever que les éléments figuratifs sont purement secondaires dans l’ensemble de la marque antérieure. Contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, l’élément dominant de cette marque est constitué par les deux éléments verbaux « la » et « perla ». En effet, même si l’élément verbal « la » apparaît en plus petits caractères que l’élément verbal « perla », ces deux éléments sont associés l’un à l’autre de telle manière qu’on ne saurait les considérer séparément, ces deux éléments formant une seule expression (« la perla »), qui possède un caractère distinctif intrinsèque.

42      La marque communautaire se compose, quant à elle, des éléments verbaux « nimei », « la », « perla », « modern » et « classic ». Il convient de relever que l’élément dominant de la marque antérieure la PERLA est ainsi entièrement inclus dans la marque communautaire NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC. Il y a également lieu de constater que les éléments verbaux « modern » et « classic » ont une importance secondaire, car ils sont purement descriptifs, comme le font valoir l’OHMI et l’intervenante.

43      En ce qui concerne l’élément verbal « nimei » figurant dans la marque communautaire, il convient de relever qu’il s’agit d’un mot de fantaisie.

44      S’agissant des éléments verbaux « la » et « perla » figurant dans la marque communautaire, il y a lieu de constater qu’ils forment également une expression dans cette marque qui, contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, n’est pas seulement descriptive et dépourvue de caractère distinctif par rapport aux produits concernés. En effet, comme le soulignent à juste titre la requérante et l’OHMI, l’intervenante avait demandé l’enregistrement pour les produits de la classe 14, à savoir « joaillerie, horlogerie, orfèvrerie et horlogerie ; métaux précieux ; perles ; pierres précieuses », lesquels peuvent également recouvrir d’autres produits que des bijoux réalisés avec des perles, par exemple des bijoux ou des montres réalisés avec n’importe quel matériau, ou encore tout autre produit réalisé avec différents métaux précieux.

45      Il y a ainsi lieu de constater, à l’instar de l’OHMI, que l’expression « la perla » a la même importance que l’élément verbal « nimei » sur le plan visuel, contrairement à ce que fait valoir l’intervenante.

46      Dès lors, étant donné que l’élément dominant de la marque antérieure est entièrement inclus dans la marque communautaire, ni la différence liée à l’ajout de l’élément verbal « nimei » au début de la marque communautaire ni l’ajout des éléments verbaux purement descriptifs « modern » et « classic » à la fin de cette marque ne sont suffisamment importants pour pouvoir écarter une certaine similitude visuelle créée par la coïncidence d’une partie importante de la marque communautaire, à savoir l’expression « la perla » [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBebé), T‑164/03, Rec. p.II‑1401, point 60].

47      En ce qui concerne la similitude phonétique, eu égard à la présence de l’expression « la perla » dans la marque antérieure comme dans la marque communautaire, les marques en cause présentent également une certaine similitude de ce point de vue. Contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, ni la différence liée à l’ajout de l’élément verbal « nimei » au début de la marque communautaire, ni l’ajout des éléments verbaux purement descriptifs « modern » et « classic » à la fin de cette marque ne remettent en cause l’existence d’une certaine similitude phonétique, dans la mesure où les deux marques ont un élément dominant en commun.

48      Quant à la comparaison des marques en cause sur le plan conceptuel, il convient de relever qu’il existe également une similitude entre celles-ci. En effet, les deux marques contiennent l’expression « la perla », laquelle a un contenu conceptuel clair pour le public italien, puisqu’il signifie « la perle » en langue italienne. En revanche, l’élément verbal « nimei » n’a pas de signification évidente pour le public italien. Dans ces circonstances, l’élément verbal « nimei » ne saurait être retenu comme l’élément dominant de la marque communautaire sur le plan conceptuel. N’est pas pertinent, à cet égard, l’argument de l’intervenante selon lequel l’expression « la perla » est descriptive des caractéristiques des produits couverts par la marque communautaire, ce qui lui conférerait un caractère secondaire au sein de la marque communautaire. En effet, une telle circonstance n’altère pas le contenu conceptuel de ladite marque.

49      En tout état de cause, comme il l’a déjà été relevé ci-dessus, étant donné que la marque communautaire a été enregistrée également pour des produits qui ne sont pas fabriqués à partir de perles, ce mot n’est aucunement descriptif pour ces produits. L’expression « la perla » constitue donc un élément important dans la marque communautaire. En outre, contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, le fait que, dans la marque antérieure, l’expression « la perla » ne présente pas de caractère descriptif pour les produits couverts par cette marque n’altère pas non plus son contenu conceptuel.

50      En ce qui concerne les mots « modern » et « classic », il y a lieu de relever qu’ils ne constituent que des adjectifs qui qualifient l’expression « la perla ». Ils sont ainsi les éléments les moins caractéristiques de la marque communautaire et ne sauraient par conséquent altérer son contenu conceptuel principal.

51      Il résulte de ce qui précède qu’il existe un certain degré de similitude entre la marque la PERLA et la marque NIMEI LA PERLA MODERN CLASSIC. En outre, comme le fait observer à juste titre l’OHMI, il importe de relever que les produits couverts par la marque antérieure et ceux couverts par la marque communautaire appartiennent à des segments de marché proches, à savoir la bijouterie et les vêtements féminins. Contrairement à ce que fait valoir l’intervenante, dans les circonstances de l’espèce, cette similitude est donc suffisante pour que le public italien puisse établir un lien entre ces deux marques, tel que celui requis pour l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, étant rappelé à cet égard qu’un risque de confusion n’est pas exigé à cette fin.

52      Par conséquent, la chambre de recours a commis une erreur en considérant que les marques en cause ne sont pas assez semblables pour pouvoir établir entre elles un lien tel que celui requis aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94.

53      Dès lors, il y a lieu d’accueillir le premier moyen de la requérante et d’annuler la décision attaquée, sans que le Tribunal se substitue à l’OHMI quant à l’appréciation de la condition relative à l’usage sans juste motif, qu’il appartient à l’OHMI d’effectuer. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu non plus d’examiner les autres moyens de la requérante.

 Sur les dépens

54      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

55      En l’espèce, l’intervenante a succombé, dans la mesure où il y a lieu d’annuler la décision attaquée, conformément aux conclusions de la requérante. L’OHMI a également succombé, dans la mesure où la décision attaquée est annulée, et ce même s’il a par ailleurs soutenu partiellement les conclusions de la requérante. Cependant, la requérante n’a pas conclu à ce que l’OHMI soit condamné aux dépens.

56      En effet, la requérante a conclu à ce que l’intervenante soit condamnée aux dépens de l’ensemble de la procédure, y compris la procédure devant la division d’annulation et devant la chambre de recours. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, « [l]es frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours […] sont considérés comme dépens récupérables ». Il en résulte que les frais encourus au titre de la procédure de nullité devant la division d’annulation ne peuvent être considérés comme des dépens récupérables. Les conclusions de la requérante tendant à la condamnation de l’intervenante aux dépens doivent donc être rejetées comme irrecevables en ce qu’elles visent les frais exposés devant la division d’annulation.

57      Dans ces circonstances, il y a lieu de condamner l’intervenante à supporter, outre ses propres dépens, un tiers des dépens de la requérante. La requérante supportera deux tiers de ses propres dépens et l’OHMI supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 25 janvier 2005 (affaire R 537/2004‑1) est annulée.

2)      L’intervenante est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, un tiers des dépens de la requérante.

3)      La requérante supportera deux tiers de ses propres dépens.

4)      L’OHMI supportera ses propres dépens.

Jaeger

Tiili

Czúcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mai 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.