Language of document : ECLI:EU:T:2021:896

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

15 décembre 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Recrutement – Concours interne COM/03/AD/18 (AD 6) – Décision de ne pas inscrire le nom du requérant sur la liste de réserve du concours – Obligation de motivation – Secret des travaux du jury – Absence de communication des notes intermédiaires et de la pondération des éléments composant une épreuve prévus à l’avis de concours »

Dans l’affaire T‑705/20,

OI, représenté par Me S. Orlandi, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mme D. Milanowska et M. T. Lilamand, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du jury du concours interne COM/03/AD/18 (AD 6) – Administrateurs, du 25 mars 2020, rejetant la demande de réexamen du requérant visant la décision de ce jury du 16 décembre 2019 de ne pas inscrire son nom sur la liste de réserve dudit concours,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. R. da Silva Passos, président, Mme I. Reine et M. L. Truchot (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, OI, s’est porté candidat au concours interne COM/03/AD/18 (AD 6) – Administrateurs (ci-après le « concours litigieux »).

2        L’avis du concours litigieux précisait que celui-ci visait la constitution d’une liste de réserve de lauréats pour chacun des trois domaines suivants : premièrement, l’administration publique européenne, deuxièmement, la coopération au développement et la politique de voisinage et, troisièmement, la recherche.

3        Le requérant a choisi le domaine de la coopération au développement et de la politique de voisinage, dans lequel le nombre de lauréats souhaité s’élevait à 20.

4        Selon le titre III de l’avis du concours litigieux, les candidats étaient tenus, dans un premier temps, de présenter un acte de candidature et de confirmer, lors du dépôt de celui-ci, qu’ils remplissaient les conditions d’admission prévues. Dans un deuxième temps, les candidats admissibles seraient invités à se soumettre à une série de tests se présentant sous la forme de questionnaires à choix multiple. Dans un troisième temps, les candidats ayant réussi ces tests seraient convoqués à l’épreuve orale.

5        La section 4 du titre III de l’avis du concours litigieux indique que l’épreuve orale pour le groupe de fonctions AD se compose de deux parties, décrites dans les termes ci-après :

« 1.      Un entretien […] pour évaluer :

–        les principales missions exercées et les compétences acquises au cours de [la] carrière professionnelle [du candidat] et

–        [la] capacité et [la] motivation [du candidat] à exercer les fonctions dévolues aux postes auxquels le concours donne accès ;

2.      une présentation structurée [qui] consistera en un briefing oral sur un sujet lié à une politique de l’Union européenne […] »

6        La section 4 du titre III de l’avis du concours litigieux ajoute que la notation globale pour les deux parties susmentionnées consiste en une note comprise entre zéro et 20 points, le minimum requis étant dix points.

7        La section 5 de ce même titre précise que le jury inscrit sur la liste de réserve les noms des candidats ayant obtenu les meilleures notes à l’épreuve orale ainsi que le minimum requis pour cette épreuve, dans la limite du nombre de lauréats souhaité.

8        Après avoir réussi la phase écrite du concours litigieux, le requérant a passé l’épreuve orale.

9        Par lettre du 16 décembre 2019, le jury du concours litigieux a informé le requérant de sa décision (ci-après la « décision du 16 décembre 2019 ») de ne pas inscrire son nom sur la liste de réserve de ce concours. Le jury a indiqué que, pour l’épreuve orale, le requérant avait reçu une note s’élevant à 13,5/20, qui, tout en étant supérieure au minimum de 10/20 fixé par l’avis du concours litigieux, était cependant inférieure au seuil de 14/20 qui devait être atteint pour que le requérant figure au nombre des meilleurs candidats dont les noms seraient inscrits sur la liste de réserve. Il a également précisé que la prestation globale du requérant lors de l’épreuve orale avait reçu l’appréciation verbale « bonne à forte ». Plus précisément, le jury a exposé que le requérant avait obtenu l’appréciation verbale « forte » s’agissant du « lien entre son expérience passée et les compétences requises », l’appréciation verbale « très forte » s’agissant de « la démonstration de ses compétences générales et de sa motivation à exercer les fonctions à pourvoir » et l’appréciation verbale « forte » s’agissant de sa capacité à effectuer une présentation sur un sujet relatif au domaine du concours litigieux.

10      Par courriel du 18 décembre 2019 (ci-après la « demande de réexamen »), le requérant a introduit auprès de l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) une demande de réexamen de la décision du 16 décembre 2019, conformément au point 6.3 de l’annexe III de l’avis du concours litigieux. Il a invoqué l’existence d’une incohérence entre les appréciations verbales qu’il avait obtenues pour les trois composantes de l’épreuve orale et l’appréciation verbale globale relative à cette même épreuve. Il a fait valoir que, si cette appréciation verbale globale avait été alignée sur celles relatives à ces trois composantes, sa note globale aurait atteint le niveau de 14/20, nécessaire pour que son nom soit inscrit sur la liste de réserve. Il a ajouté que certains lauréats avaient obtenu des appréciations verbales identiques ou même inférieures aux siennes aux différentes composantes de l’épreuve orale. Par ailleurs, il a exprimé son souhait de connaître la méthode exacte utilisée lors du calcul des notes globales, afin de pouvoir comprendre celle qui lui avait été attribuée et de s’assurer de la légalité du processus de sélection.

11      Par décision du 25 mars 2020 (ci-après la « décision du 25 mars 2020 »), le jury du concours litigieux a rejeté la demande de réexamen.

12      À cette fin, en premier lieu, le jury a rappelé que, avant d’entendre les candidats admis à l’épreuve orale, il avait défini le contenu de celle-ci, les questions envisagées, les critères d’évaluation, la procédure de notation et la pondération de chaque élément mentionné dans l’avis de ce concours au sujet de cette épreuve.

13      En deuxième lieu, le jury a précisé qu’il avait émis à l’égard de chaque candidat des commentaires portant sur les éléments spécifiques indiqués dans ledit avis (voir point 5 ci-dessus) et que ses commentaires incluaient également une appréciation globale de la prestation des candidats, « résumant l’évaluation de chaque élément ».

14      En troisième lieu, le jury a souligné que ses appréciations de l’expérience et des capacités des candidats étaient de nature comparative.

15      En quatrième lieu, le jury a relevé que, « en dépit de la qualité globale de [la] prestation [du requérant] à l’épreuve orale, qui correspond[ait] à la note attribuée, le dernier candidat sur la liste de réserve avait globalement eu une meilleure prestation ».

16      En conséquence, le jury a conclu que la décision de ne pas inclure le nom du requérant sur la liste de réserve du concours litigieux devait être confirmée.

17      Le 27 mai 2020, le requérant a introduit une réclamation, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), contre la décision du 25 mars 2020. Au soutien de sa réclamation, il a fait valoir que le jury avait violé l’obligation de motivation et le principe d’égalité de traitement.

18      La réclamation du requérant a été rejetée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») du 28 septembre 2020 (ci-après la « décision de rejet de la réclamation »).

 Procédure et conclusions des parties

19      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 novembre 2020, le requérant a introduit le présent recours.

20      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal à la même date, en application de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal, le requérant a demandé le bénéfice de l’anonymat. Par décision du 2 février 2021, le Tribunal (septième chambre) a fait droit à cette demande.

21      La phase écrite de la procédure a été close le 29 mars 2021.

22      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 13 avril 2021, le requérant a demandé la tenue d’une audience, sur le fondement de l’article 106 du règlement de procédure. Au titre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, le Tribunal a invité le requérant à indiquer si, à la lumière des principes résultant de l’arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission (T‑435/20, EU:T:2021:608), il maintenait sa demande d’audience. Par acte du 5 octobre 2021, le requérant y a renoncé.

23      Dans ces circonstances, conformément à l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal a décidé de statuer sans phase orale de la procédure.

24      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision du 25 mars 2020 ;

–        condamner la Commission européenne aux dépens.

25      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

26      Le requérant demande l’annulation de la décision du 25 mars 2020, qui a réexaminé la décision du 16 décembre 2019 et qui a été confirmée par la décision de rejet de la réclamation. À cette fin, il invoque, à titre principal, un moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation et, à titre subsidiaire, un moyen tiré d’une erreur manifeste d’appréciation.

 Sur l’objet du litige

27      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, lorsqu’un candidat à un concours sollicite le réexamen d’une décision prise par un jury, c’est la décision prise par ce dernier après réexamen de la situation du candidat qui constitue l’acte lui faisant grief au sens de l’article 90, paragraphe 2, ou, le cas échéant, de l’article 91, paragraphe 1, du statut. La décision prise après réexamen se substitue, ce faisant, à la décision initiale du jury (voir arrêt du 5 septembre 2018, Villeneuve/Commission, T‑671/16, EU:T:2018:519, point 24 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 mars 1986, Sorani e.a./Commission, 293/84, EU:C:1986:111, point 12). Dès lors, c’est à bon droit que le requérant dirige son recours contre la décision du 25 mars 2020.

28      Par ailleurs, au vu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, les précisions complémentaires figurant dans la décision de rejet de la réclamation doivent être prises en considération pour apprécier la légalité de la décision du 25 mars 2020 (voir, en ce sens, arrêts du 13 décembre 2018, CH/Parlement, T‑83/18, EU:T:2018:935, point 57 ; du 30 avril 2019, Wattiau/Parlement, T‑737/17, EU:T:2019:273, point 43, et du 23 septembre 2020, ZL/EUIPO, T‑596/18, non publié, EU:T:2020:442, points 30 et 31).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

29      Le requérant fait valoir que la motivation de la décision du 25 mars 2020, même complétée par la décision de rejet de la réclamation, ne lui permet pas de comprendre la manière dont les trois appréciations verbales « forte », « très forte » et « forte », qu’il a obtenues pour les trois différentes composantes de l’épreuve orale visées par l’avis de concours, ont permis au jury d’attribuer à sa prestation relative à cette épreuve l’appréciation verbale globale « bonne à forte », correspondant à la note globale chiffrée de 13,5.

30      Le requérant soutient que, à défaut de connaître les notes chiffrées qui lui ont été attribuées pour lesdites composantes et les coefficients de pondération utilisés pour obtenir la note chiffrée globale, il n’est pas en mesure de contrôler si la décision du 25 mars 2020 méconnaît l’avis de concours et est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

31      Selon le requérant, ces informations sont d’autant plus importantes qu’il a constaté que des candidats ayant obtenu la note chiffrée globale de 14/20 avaient reçu, pour les trois composantes de l’épreuve orale, des appréciations verbales inférieures aux siennes.

32      Le requérant ajoute que la pondération appliquée en l’espèce, qui a été définie par le jury de manière objective, avant que celui-ci ne commence ses travaux, n’est pas couverte par le secret dont bénéficient ces travaux, lequel ne serait applicable qu’aux appréciations subjectives et comparatives effectuées par le jury.

33      La Commission répond que, compte tenu du secret des travaux des jurys concernant l’expression d’un jugement de valeur, la communication aux candidats non retenus des notes obtenues aux différentes épreuves constitue une motivation suffisante de leurs décisions. La communication des notes obtenues aux composantes d’une épreuve ne serait pas nécessaire pour assurer le respect de l’obligation de motivation. Le requérant ayant été informé que, pour l’épreuve orale, il avait reçu la note de 13,5/20 et que seuls les candidats ayant obtenu une note s’élevant à au moins 14/20 auraient leurs noms inscrits sur la liste de réserve, la décision du 25 mars 2020 serait suffisamment motivée. Selon la Commission, ce n’est qu’à titre surabondant que, en application du principe de bonne administration, le jury a communiqué au requérant les appréciations verbales qu’il lui avait attribuées pour chacune des composantes de l’épreuve orale ainsi que l’appréciation verbale globale reçue à ce titre.

34      La Commission ajoute que la décision du 25 mars 2020 était non seulement suffisamment motivée, mais également exempte de contradiction, dans la mesure où l’erreur que croit avoir relevée le requérant dans le calcul de sa note globale est fondée sur deux prémisses erronées, selon lesquelles, d’un côté, il devrait exister une correspondance parfaite entre les appréciations verbales globales et partielles, de l’autre, les appréciations verbales partielles auraient fait l’objet d’une moyenne.

35      Il convient de rappeler, en premier lieu, que, selon l’article 25, deuxième alinéa, seconde phrase, du statut, toute décision faisant grief doit être motivée. Cette obligation correspond à celle prévue, plus généralement, à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE ainsi qu’à l’article 41 de la charte des droit fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), portant sur le principe de bonne administration, en particulier son paragraphe 2, sous c).

36      En second lieu, l’article 6 de l’annexe III du statut énonce que « [l]es travaux du jury sont secrets ».

37      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation a pour objet, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé de l’acte lui faisant grief et l’opportunité d’introduire un recours devant le juge de l’Union européenne et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de l’acte (voir arrêt du 13 septembre 2016, Pohjanmäki/Conseil, T‑410/15 P, non publié, EU:T:2016:465, point 77 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, Commission/Di Bernardo, C‑114/19 P, EU:C:2020:457, point 51).

38      Il convient également de relever que le droit à une bonne administration prévu par l’article 41 de la Charte entraîne l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions et que cette motivation ne constitue pas seulement, de façon générale, l’expression de la transparence de l’action de l’administration, mais doit également permettre au particulier de décider, en pleine connaissance de cause, s’il est utile pour lui de saisir une juridiction. Il existe donc un rapport étroit entre l’obligation de motivation et le droit fondamental à une protection juridictionnelle effective ainsi que le droit à un recours effectif garanti par l’article 47 de la Charte (arrêt du 10 octobre 2012, Sviluppo Globale/Commission, T‑183/10, non publié, EU:T:2012:534, point 40 ; voir également, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, EU:T:2009:313, point 148 et jurisprudence citée).

39      La motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief. L’absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de la décision au cours de la procédure devant le juge de l’Union. Cependant, en cas non d’absence, mais d’insuffisance de motivation, des explications données en cours de procédure peuvent, dans des hypothèses exceptionnelles, remédier à cette insuffisance, de sorte que le moyen tiré de cette dernière ne justifie plus l’annulation de la décision en cause (voir arrêt du 11 juin 2020, Commission/Di Bernardo, C‑114/19 P, EU:C:2020:457, points 51 et 52 et jurisprudence citée).

40      Selon la Cour, il n’existe ni un droit des institutions de l’Union de régulariser devant le juge de l’Union leurs décisions insuffisamment motivées ni une obligation de ce dernier de prendre en compte les explications complémentaires fournies seulement en cours d’instance par l’auteur de l’acte en cause pour apprécier le respect de l’obligation de motivation. En effet, un semblable état du droit risquerait de brouiller la répartition des compétences entre l’administration et le juge de l’Union, d’affaiblir le contrôle de légalité et de compromettre l’exercice du droit de recours. Ce n’est que dans des cas exceptionnels, dans lesquels il serait avéré que l’institution de l’Union concernée s’est trouvée dans l’impossibilité pratique de motiver à suffisance de droit la décision contestée, que la motivation peut être complétée par des explications fournies par l’auteur de l’acte au cours de l’instance (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, Commission/Di Bernardo, C‑114/19 P, EU:C:2020:457, points 58 et 59).

41      Quant aux décisions prises par un jury de concours, ainsi que la Cour l’a jugé dans l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), l’obligation de motivation doit être conciliée avec le respect du secret qui entoure les travaux du jury en vertu de l’article 6 de l’annexe III du statut. Ce secret a été institué en vue de garantir l’indépendance des jurys de concours et l’objectivité de leurs travaux, en les mettant à l’abri de toutes ingérences et pressions extérieures, qu’elles proviennent de l’administration de l’Union elle-même, des candidats intéressés ou de tiers. Le respect de ce secret s’oppose dès lors tant à la divulgation des attitudes prises par les membres individuels des jurys qu’à la révélation de tous éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 24).

42      L’exigence de motivation des décisions d’un jury de concours doit, dans ces conditions, tenir compte de la nature des travaux en cause (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 25).

43      Les travaux d’un jury de concours comportent, en général, au moins deux stades distincts, à savoir, en premier lieu, l’examen des candidatures pour faire le tri des candidats admis au concours et, en second lieu, l’examen des aptitudes des candidats à l’emploi à pourvoir, afin de dresser une liste de réserve (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 26).

44      Le premier stade consiste, notamment lors d’un concours sur titres, dans une confrontation des titres produits par les candidats avec les qualifications requises par l’avis de concours. Cette confrontation se faisant sur la base de données objectives et d’ailleurs connues par chacun des candidats en ce qui les concerne, le respect du secret entourant les travaux du jury ne s’oppose pas à ce que soient communiqués ces données objectives et, notamment, les critères d’appréciation qui sont à la base de la sélection faite, au stade des opérations préliminaires du concours, de manière à mettre les personnes dont les candidatures ont été écartées dès avant toute épreuve personnelle en mesure de reconnaître les motifs possibles de leur élimination (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 27).

45      En revanche, le second stade des travaux du jury de concours est avant tout de nature comparative et, de ce fait, couvert par le secret inhérent à ces travaux (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 28).

46      Les critères de correction adoptés par le jury préalablement aux épreuves font partie intégrante des appréciations de nature comparative auxquelles se livre le jury sur les mérites respectifs des candidats. En effet, ils tendent à assurer, dans l’intérêt de ces derniers, une certaine homogénéité des appréciations du jury, notamment lorsque le nombre de candidats est élevé. Ces critères sont donc couverts par le secret des délibérations au même titre que les appréciations du jury (arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati, C‑254/95 P, EU:C:1996:276, point 29).

47      Sur la base de ces principes, aux points 31 et 32 de l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), la Cour a considéré que, compte tenu du secret entourant les travaux du jury, la communication des notes obtenues aux différentes épreuves constituait une motivation suffisante des décisions du jury et qu’une telle motivation ne lésait pas les droits des candidats, dès lors qu’elle leur permettait de connaître le jugement de valeur qui avait été porté sur leurs prestations et de vérifier, le cas échéant, qu’ils n’avaient effectivement pas obtenu le nombre de points requis par l’avis de concours.

48      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’apprécier si la motivation de la décision du 25 mars 2020, telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation, est suffisante.

49      En premier lieu, il doit être constaté que, dans la décision du 25 mars 2020, le jury du concours litigieux a dû procéder à une appréciation de la prestation du requérant lors de l’épreuve orale dans le but non seulement d’examiner si celui-ci pouvait se voir attribuer la note minimale de 10/20 fixée par l’avis de concours, mais aussi d’évaluer cette prestation par rapport à celles des autres candidats. En effet, l’avis de concours prévoyait que, dans le domaine choisi par le requérant, seuls les 20 candidats ayant obtenu les meilleurs notes à l’épreuve orale pourraient être inscrits sur la liste de réserve (voir points 3, 6 et 7 ci-dessus).

50      En deuxième lieu, il convient de rappeler les informations déjà données au requérant dans la décision du 16 décembre 2019, confirmée par la décision du 25 mars 2020. Dans cette décision, ainsi qu’il a été exposé au point 9 ci-dessus, le jury a d’abord indiqué que la prestation du requérant lors de l’épreuve orale du concours litigieux lui avait valu l’attribution de la note globale de 13,5/20, alors que la comparaison entre les prestations des candidats admis à cette épreuve avait conduit le jury à inscrire sur la liste de réserve les seuls noms de ceux qui avaient obtenu une note globale minimale de 14/20.

51      Ensuite, le jury a précisé que la prestation globale du requérant lors de l’épreuve orale pouvait être qualifiée de « bonne à forte ».

52      Enfin, le jury a communiqué les appréciations verbales qu’il avait attribuées au requérant pour chacune des trois composantes de l’épreuve orale résultant de la section 4 du titre III de l’avis du concours litigieux (voir point 5 ci-dessus), selon laquelle cette épreuve comprenait deux parties, dont la première comportait deux sous-parties.

53      En troisième lieu, conformément à la jurisprudence citée au point 28 ci-dessus, doivent être pris en considération les éléments fournis par l’AIPN dans la décision de rejet de la réclamation.

54      À cette occasion, premièrement, l’AIPN a indiqué que, l’avis de concours ne précisant pas la manière dont les points à attribuer aux candidats au titre de l’épreuve orale devaient être répartis entre les trois composantes de celle-ci visées à cet avis, le jury disposait, selon la jurisprudence, d’un large pouvoir d’appréciation à cette fin. Dans l’exercice de ce pouvoir, le jury avait décidé de ne pas attribuer la même importance à ces trois composantes. Partant, la note chiffrée globale attribuée aux candidats n’était pas la moyenne arithmétique des trois notes chiffrées qu’ils avaient reçues pour ces trois composantes, mais était une moyenne pondérée de ces notes, qui comportaient des décimales.

55      Deuxièmement, l’AIPN a exposé que le jury avait décidé d’associer des appréciations verbales aux notes chiffrées, intermédiaires et globales. Elle a souligné que ces appréciations verbales avaient une nature purement explicative et ne pouvaient pas se substituer aux notes chiffrées aux fins de la sélection des candidats dont les noms figureraient sur la liste de réserve.

56      Troisièmement, l’AIPN a précisé que la conversion des notes chiffrées en appréciations verbales avait été obtenue par le biais de deux grilles distinctes. La grille de conversion utilisée pour obtenir les appréciations verbales partielles (ci-après la « première grille ») indiquait la correspondance entre, d’un côté, des notes chiffrées sans décimales comprises entre un et dix, de l’autre, les appréciations verbales « insuffisante », « satisfaisante », « bonne », « forte », « très forte », « excellente » et « exemplaire », étant précisé que les notes chiffrées comprises entre un et quatre correspondaient toutes à l’appréciation « insuffisante ». L’AIPN a spécifié que, en raison de la méthode d’arrondi utilisée, les mêmes appréciations verbales partielles pouvaient être associées à des notes chiffrées différentes. Par exemple, l’appréciation verbale partielle « forte » était applicable aux notes intermédiaires comprises entre 6,5/10 et 7,49/10.

57      La grille de conversion utilisée pour obtenir les appréciations verbales globales (ci-après la « seconde grille ») associait les notes, évaluées sur vingt, requises par l’avis de concours (voir point 6 ci-dessus) et qui pouvaient comporter des décimales, à huit appréciations verbales, à savoir celles figurant dans la première grille ainsi que l’appréciation verbale supplémentaire « bonne à forte », applicable aux notes comprises entre 13,25/20 et 13,74/20. L’AIPN a relevé que c’était cette dernière appréciation verbale qui était applicable au requérant, qui avait reçu la note chiffrée globale de 13,67/20, arrondie à 13,5/20.

58      Quatrièmement, l’AIPN a précisé que, les trois composantes de l’épreuve orale visées à l’avis de concours n’ayant pas toutes la même importance, l’ordre des appréciations verbales n’était pas interchangeable. Ainsi, par exemple, la suite « forte », « forte », « très forte » n’était pas équivalente à la suite « forte », « très forte », « forte ».

59      En quatrième lieu, il convient de relever que, dans le mémoire en défense, d’abord, la Commission a insisté sur le fait, déjà souligné par l’AIPN dans la décision de rejet de la réclamation, que la première et la seconde grilles, qu’elle a produites devant le Tribunal, étaient différentes. La Commission a ainsi précisé que la première grille avait été appliquée aux notes chiffrées intermédiaires, pour les convertir, après les avoir arrondies au point le plus proche, en appréciations verbales partielles, alors que la seconde grille avait été appliquée à la note chiffrée globale non arrondie, pour la convertir en une appréciation verbale globale.

60      Ensuite, la Commission a exposé que, pour calculer la note chiffrée globale, le jury avait calculé une moyenne pondérée de trois notes chiffrées intermédiaires non arrondies, avait transformé cette moyenne en vingtièmes et l’avait arrondie au demi-point le plus proche.

61      Enfin, la Commission a souligné que, si la note chiffrée globale résultait directement des notes chiffrées intermédiaires, il n’existait en revanche pas de correspondance directe entre les appréciations verbales partielles et l’appréciation verbale globale.

62      Il résulte de ce qui précède que le requérant a été informé de plusieurs éléments qui précisent dans une certaine mesure la méthode suivie par le jury pour établir la note chiffrée globale arrondie et les appréciations verbales partielles et globales.

63      Toutefois, le requérant ne dispose ni des notes chiffrées intermédiaires non arrondies qui lui ont été attribuées pour chaque composante de l’épreuve orale visée à l’avis de concours (ci-après les « notes intermédiaires brutes ») ni des coefficients de pondération appliqués à ces composantes (ci-après les « coefficients de pondération en cause »). Dès lors, il n’est pas en mesure de comprendre comment le jury est parvenu à lui attribuer la note chiffrée globale de 13,5/20, qui lui a valu d’être exclu de la liste des lauréats du concours litigieux.

64      Il convient cependant de déterminer si la communication des notes intermédiaires brutes et des coefficients de pondération en cause est compatible avec le secret des travaux du jury prévu à l’article 6 de l’annexe III du statut, tel qu’interprété par la Cour.

65      Ainsi qu’il a été rappelé au point 47 ci-dessus, dans l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276, points 31 et 32), la Cour, à la suite d’une mise en balance des exigences résultant, d’un côté, de l’obligation de motivation, de l’autre, du secret des travaux du jury, a jugé que la communication des notes obtenues aux différentes épreuves constituait une motivation suffisante des décisions du jury et qu’une telle motivation ne lésait pas les droits des candidats.

66      Toutefois, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), le requérant n’avait pas été admis aux épreuves d’un concours qui suivaient l’épreuve écrite à laquelle il avait obtenu une note inférieure au minimum requis par l’avis de concours. Ce dernier ne prévoyait pas que cette épreuve écrite était composée de plusieurs éléments. Par conséquent, la référence faite par la Cour aux « notes obtenues aux différentes épreuves » ne peut être interprétée comme visant uniquement les notes individuelles éliminatoires, par opposition aux évaluations intermédiaires relatives aux différentes composantes d’une épreuve prévues dans l’avis de concours. Il ne résulte donc pas de cette jurisprudence que la communication à un candidat d’une seule note individuelle éliminatoire constitue, en toutes circonstances, une motivation suffisante, indépendamment des spécificités de chaque concours.

67      En l’espèce, s’agissant, en premier lieu, des notes intermédiaires brutes, il convient de relever que l’avis de concours ne prévoyait pas l’attribution de notes distinctes pour les trois composantes de l’épreuve orale. Cependant, il résulte de la jurisprudence que, lorsqu’un jury a attribué de telles notes, l’obligation de motivation implique la communication de celles-ci sur demande d’un candidat. En effet, cette communication n’entraîne ni la divulgation des attitudes prises par les membres individuels du jury, ni la révélation d’éléments ayant trait à des appréciations de caractère personnel ou comparatif concernant les candidats. Elle n’est donc pas incompatible avec le respect du secret des travaux du jury (voir, en ce sens, arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 74 et jurisprudence citée).

68      Il importe de préciser que la communication d’éléments tels que les notes intermédiaires brutes, en l’espèce, ne remet pas en cause le principe selon lequel, au vu du large pouvoir d’appréciation dont dispose un jury de concours pour évaluer les résultats des épreuves d’un concours, celui-ci ne saurait être tenu, en motivant l’échec d’un candidat à une épreuve, de préciser les réponses des candidats qui ont été jugées insuffisantes ou d’expliquer pourquoi ces réponses ont été jugées insuffisantes (voir arrêt du 19 février 2004, Konstantopoulou/Cour de justice, T‑19/03, EU:T:2004:49, point 34 et jurisprudence citée).

69      S’agissant, en second lieu, des coefficients de pondération en cause, il y a lieu de rappeler que le jury de concours dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour conduire ses travaux. Partant, il lui est loisible, lorsque l’avis de concours ne prévoit pas de critères de notation, de fixer de tels critères ou, lorsque l’avis de concours en prévoit, sans pour autant faire état de leur pondération respective, de déterminer cette dernière (voir arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 80 et jurisprudence citée).

70      Il en découle que, lorsqu’un avis de concours ne précise pas la pondération de chaque critère d’évaluation mentionné à l’avis de concours pour une épreuve donnée, le jury peut déterminer la manière dont le nombre total de points que cet avis prévoit pour cette épreuve doit être réparti entre les différents éléments composant celle-ci, en fonction de l’importance qu’il attribue à ces éléments au regard des emplois à pourvoir (voir arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 81 et jurisprudence citée).

71      En l’espèce, l’avis du concours litigieux décrivait les éléments composant l’épreuve orale (voir point 5 ci-dessus), sans toutefois préciser la pondération que chacun de ces éléments se verrait appliquer dans la détermination de la note globale.

72      Dès lors, le jury du concours litigieux était en droit de fixer les trois coefficients de pondération en cause.

73      Toutefois, il ne résulte pas de ce qui précède que les coefficients de pondération en cause sont exclus des éléments qui doivent être communiqués aux candidats éliminés, pour assurer le respect de l’obligation de motivation.

74      En effet, selon la jurisprudence, dans les cas où une institution dispose d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance fondamentale. Parmi ces garanties figurent notamment pour l’institution compétente l’obligation d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce et celle de motiver sa décision de façon suffisante (arrêts du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14, et du 8 septembre 2009, ETF/Landgren, T‑404/06 P, EU:T:2009:313, point 163).

75      Il y a lieu de relever que les coefficients de pondération en cause contribuent de manière substantielle à la compréhension que le requérant peut avoir de la manière dont sa prestation, après avoir été évaluée dans ces trois composantes, a été convertie en une note globale chiffrée en vingtièmes, conformément à l’avis du concours litigieux (voir point 6 ci-dessus) (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 66).

76      En outre, il ne saurait être déduit de l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), que la notion de « critères de correction », dont la Cour a considéré qu’ils étaient protégés par le secret des travaux du jury, comprend des éléments tels que les coefficients de pondération en cause (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 70).

77      Il convient de relever que les « critères de correction » visés par l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), guident le jury dans l’évaluation des prestations des candidats au cours des épreuves d’un concours et des éventuelles composantes de chaque épreuve. Ils constituent un instrument auquel le jury recourt lorsqu’il porte un jugement de valeur sur ces prestations, afin d’assurer l’homogénéité de ses évaluations. En ce sens, ainsi que la Cour l’a jugé dans ledit arrêt, ces critères font partie intégrante des appréciations de nature comparative auxquelles se livre le jury sur les mérites respectifs des candidats et doivent, en conséquence, rester secrets (voir point 46 ci-dessus). En effet, afin d’évaluer en toute objectivité et liberté les candidats, un jury de concours doit pouvoir structurer son travail, en se donnant si nécessaire des critères et des sous-critères, le cas échéant, pondérés entre eux (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 71).

78      En revanche, les coefficients établis par un jury pour pondérer les éléments composant une épreuve prévus à l’avis de concours ne remplissent pas la même fonction que celle des critères de correction visés par l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276). En effet, ces coefficients ne sont pas destinés à contribuer à l’évaluation comparative des prestations des candidats à l’épreuve en question. Ils sont fixés par le jury, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, pour exprimer l’importance relative que celui-ci accorde aux différentes composantes de l’épreuve, visées à l’avis de concours, au sein de la note globale attribuée à un candidat au titre de l’ensemble de cette épreuve. La fixation préalable de la valeur relative des différentes composantes d’une épreuve prévues à l’avis de concours doit donc être distinguée de l’appréciation des prestations des candidats pour chacune de ces composantes (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 72).

79      Dès lors, l’arrêt du 4 juillet 1996, Parlement/Innamorati (C‑254/95 P, EU:C:1996:276), ne saurait être interprété en ce sens que la mise en balance entre les exigences visées au point 65 ci-dessus impose que, lorsqu’un avis de concours prévoit qu’une épreuve est constituée de plusieurs composantes, les coefficients attribués préalablement par le jury à chacune de ces composantes aux fins de leur pondération soient couverts par le secret des travaux du jury. Il ne découle donc pas dudit arrêt que ces coefficients sont exclus des éléments qui, en application de l’obligation de motivation, doivent être communiqués aux candidats éliminés du concours (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 73).

80      Partant, il y a lieu de constater que le secret des travaux du jury ne s’opposait pas à la communication au requérant, au titre du respect de l’obligation de motivation, des notes intermédiaires brutes et des coefficients de pondération en cause.

81      Cette constatation est conforme au rapport étroit qui existe, ainsi qu’il a été rappelé au point 38 ci-dessus, entre l’obligation de motivation et la protection juridictionnelle effective ainsi qu’à la limitation à des cas exceptionnels, telle qu’elle résulte de la jurisprudence de la Cour rappelée au point 40 ci-dessus, du droit de compléter une motivation insuffisante par des éléments fournis en cours d’instance. En effet, à défaut de connaître en temps utile la méthode suivie par le jury pour fixer la note globale éliminatoire attribuée à un candidat pour une épreuve, à partir des évaluations portées par le jury sur les prestations dudit candidat aux différentes composantes de cette épreuve prévues par l’avis de concours, ce candidat n’est pas en mesure de comprendre si le jury a commis une erreur non dans l’élaboration de ces évaluations, qui est protégée par le secret des travaux du jury, mais dans celle de la note globale éliminatoire. Ce candidat n’est donc pas à même d’évaluer s’il est opportun d’introduire un recours devant le Tribunal (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 76).

82      Il n’en demeure pas moins que, les jurys de concours disposant d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle de la légalité de leurs décisions consiste, pour le juge, à vérifier si ce pouvoir d’appréciation s’est exercé sur la base de critères objectifs et si cet exercice n’est pas entaché d’une erreur manifeste ou de détournement de pouvoir ou si les limites du pouvoir d’appréciation n’ont pas été manifestement dépassées (voir, en ce sens, arrêt du 11 février 1999, Jiménez/OHMI, T‑200/97, EU:T:1999:26, point 40 et jurisprudence citée). Ainsi, en l’espèce, si le Tribunal ne saurait substituer son appréciation à celle du jury, il doit néanmoins être en mesure de contrôler, au regard de l’obligation de motivation, que celui-ci a évalué la prestation orale du requérant sur la base des trois composantes de celle-ci prévues à l’avis du concours litigieux et qu’aucune erreur n’a été commise dans le calcul de la note globale effectué sur le fondement de l’appréciation portée par le jury sur chacune de ces trois composantes (arrêt du 22 septembre 2021, JR/Commission, T‑435/20, EU:T:2021:608, point 87).

83      Au vu de toutes les considérations qui précèdent, il doit être conclu que, dans la mesure où le requérant n’a pas eu connaissance des notes intermédiaires brutes et des coefficients de pondération en cause, la décision du 25 mars 2020 n’est pas suffisamment motivée, et ce malgré, d’une part, les éléments fournis au requérant par l’AIPN dans la décision de rejet de la réclamation et, d’autre part, les explications données par la Commission en cours d’instance, à supposer que ces dernières puissent être prises en compte en vertu de la jurisprudence rappelée aux points 39 et 40 ci-dessus.

84      Par conséquent, il y a lieu de faire droit au premier moyen du requérant et d’annuler la décision du 25 mars 2020, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le second moyen (voir point 26 ci-dessus).

 Sur les dépens

85      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du requérant.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision du jury du concours interne COM/03/AD/18 (AD 6) – Administrateurs, du 25 mars 2020, de ne pas inscrire OI sur la liste de réserve pour le recrutement d’administrateurs de grade AD 6 dans le domaine de la coopération au développement et de la politique de voisinage est annulée.

2)      La Commission européenne est condamnée aux dépens.

da Silva Passos

Reine

Truchot

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 décembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.