Language of document : ECLI:EU:T:2015:506

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

15 juillet 2015 (*) (1)

« Concurrence – Ententes – Marchés européens des stabilisants thermiques – Décision constatant deux infractions à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord EEE – Fixation des prix, répartition des marchés et échange d’informations commerciales sensibles – Durée des infractions – Prescription – Durée de la procédure administrative – Délai raisonnable – Droits de la défense – Imputation des infractions – Infractions commises par des filiales, par un partenariat sans personnalité juridique propre et par une filiale – Calcul du montant des amendes » 

Dans lʼaffaire T‑47/10,

Akzo Nobel NV, établie à Amsterdam (Pays-Bas),

Akzo Nobel Chemicals GmbH, établie à Düren (Allemagne),

Akzo Nobel Chemicals BV, établie à Amersfoort (Pays-Bas),

Akcros Chemicals Ltd, établie à Warwickshire (Royaume-Uni),

représentées initialement par Mes C. Swaak et M. van der Woude, puis par Mes Swaak et R. Wesseling, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. F. Ronkes Agerbeek et J. Bourke, puis par MM. Ronkes Agerbeek et P. Van Nuffel, en qualité dʼagents, assistés de M. J. Holmes, barrister,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 8682 final de la Commission, du 11 novembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38589 – Stabilisants thermiques), ou, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant des amendes infligées,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : Mme S. Spyropoulos, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 septembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La présente affaire a trait à la décision C (2009) 8682 final de la Commission, du 11 novembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38589 – Stabilisants thermiques) (ci-après la « décision attaquée »).

2        Le litige implique différentes entités.

I –  Entités impliquées

A –  Groupe Akzo

3        À la suite de l’acquisition de Nobel Industrier en 1993, Akzo NV est devenue Akzo Nobel NV (ci-après « Akzo Nobel »), la société faîtière d’un groupe de sociétés implantées et opérationnelles dans le monde entier (ci-après, prises ensemble, le « groupe Akzo »).

4        Jusqu’au 19 mars 1993, les activités de production et de vente de stabilisants thermiques du groupe Akzo étaient exercées par des filiales détenues, indirectement, à 100 %, d’une part, par Akzo, devenue Akzo Nobel, par l’intermédiaire d’Akzo Chemicals International BV, devenue Akzo Nobel Chemicals International BV, et, d’autre part, par les sociétés Akzo Chemie GmbH et Akzo Chemicals GmbH, devenues Akzo Nobel Chemicals GmbH (ci-après « Akzo GmbH »), pour les stabilisants étain, et par Akzo Chemie Nederland BV et Akzo Chemicals Nederland BV, devenue Akzo Nobel Chemicals BV (ci-après « Akzo BV »), pour le secteur ESBO/esters.

B –  Partenariat Akcros

5        Le 19 mars 1993, Akzo Chemicals International, une filiale détenue à 100 % par Akzo, puis par Akzo Nobel, a conclu un accord-cadre avec Harrisons Chemicals (UK) Ltd, une filiale détenue à 100 % par Harrisons & Crosfield plc, devenue Elementis plc, en vue du regroupement des activités de leurs groupes respectifs pour les activités de développement, de production et de commercialisation de certains produits chimiques, dont les stabilisants thermiques (ci-après l’« accord-cadre de 1993 »).

6        L’accord-cadre de 1993 a prévu le transfert des actifs et du personnel du secteur concerné à quatre partenariats, au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas et aux États-Unis d’Amérique, le capital de chaque partenariat et des sociétés existantes en France (Tinstab SA), en Italie (Harcros Chemicals Italia SpA), en Espagne (Harcros Chemicals Iberia SA) et au Danemark (Lankro Sandia ApS) devant être détenu à parts égales par le groupe d’Akzo Chemicals International, à savoir le groupe Akzo, et par le groupe de Harrisons Chemicals (UK).

7        Le 24 mars 1993, Akzo Chemicals International et Harrisons Chemicals (UK) ont notifié l’accord-cadre de 1993 à la Commission européenne, en application du règlement (CEE) n° 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (JO L 395, p. 1), tel que rectifié.

8        Par décision du 29 avril 1993, la Commission a déclaré l’accord-cadre de 1993 compatible avec le marché commun (ci-après la « décision de 1993 sur la concentration »).

9        En application de l’accord-cadre de 1993, le partenariat Akcros Chemicals (ci-après le « partenariat Akcros ») a été constitué au Royaume-Uni le 28 juin 1993 (voir considérant 536 de la décision attaquée).

10      Lors de sa création, le partenariat Akcros était détenu, à parts égales, par Pure Chemicals Ltd, une société détenue à 100 %, initialement, par Akzo, devenue Akzo Nobel, et par différentes sociétés, dont, en dernier lieu, Elementis UK Ltd et Elementis Services Ltd, faisant partie d’un groupe ayant pour société faitière Elementis plc (ci-après, prises ensemble, « Elementis »).

C –  Société commune Akcros

11      Le 15 juillet 1998, Akzo Nobel est convenue avec Elementis de l’acquisition, par l’intermédiaire de sa filiale à 100 % Pure Chemicals, des parts d’Elementis dans le p artenariat Akcros, lequel a été transformé en Akcros Chemical Ltd (ci-après « Akcros ») dont l’intégralité du capital a été détenue, indirectement, par Akzo Nobel à compter du 2 octobre 1998.

12      Le 15 mars 2007, Akzo Nobel a cédé Akcros à GIL Investments.

II –  Procédure administrative ayant mené à l’adoption de la décision attaquée

A –  Ouverture de l’enquête de la Commission

13      L’enquête qui a abouti à l’adoption de la décision attaquée a été engagée à la suite de l’introduction par Chemtura d’une demande d’immunité, le 26 novembre 2002, en application de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3) (voir considérants 79 et 80 de la décision attaquée).

14      Le 30 janvier 2003, la Commission a adopté la décision C (2003) 85/4 sur le fondement de l’article 14, paragraphe 3, du règlement nº 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (JO 1962, 13, p. 204), ordonnant à Akzo Nobel Chemicals Ltd à Akcros et à leurs filiales respectives de se soumettre à une vérification visant à rechercher les preuves d’éventuelles pratiques anticoncurrentielles (ci-après la « décision du 30 janvier 2003 »).

15      Le 10 février 2003, la Commission a adopté la décision C (2003) 559/4, également sur le fondement de l’article 14, paragraphe 3, du règlement nº 17, portant modification de la décision du 30 janvier 2003 (ci-après, prises ensemble, les « décisions d’inspection »).

16      Les 12 et 13 février 2003, des vérifications sur place ont été effectuées, sur le fondement des décisions d’inspection, dans les locaux d’Akzo Nobel Chemicals et d’Akcros situés à Eccles, Manchester (Royaume-Uni). Durant cette vérification, les agents de la Commission ont pris copie d’un nombre important de documents. Au cours de ces opérations, les représentants d’Akzo Nobel Chemicals et d’Akcros ont indiqué aux agents de la Commission que certains documents étaient susceptibles d’être couverts par le secret professionnel protégeant les communications avec des avocats (ci-après les « documents litigieux »).

17      Durant l’examen des documents litigieux, un différend est survenu à propos de cinq documents, qui ont fait l’objet de deux types de traitement. En effet, les agents de la Commission ne sont pas parvenus sur-le-champ à une conclusion définitive quant à la protection dont deux documents devaient éventuellement bénéficier. Ils en ont donc pris copie et les ont placés dans une enveloppe scellée, qu’ils ont emportée au terme de leur vérification. Quant aux trois autres documents controversés, l’agent de la Commission responsable de la vérification a considéré qu’ils n’étaient pas protégés par le secret professionnel, en a, en conséquence, pris copie et les a joints au reste du dossier, sans les isoler dans une enveloppe scellée.

18      Ce différend a suscité un important contentieux judiciaire (ci-après la « procédure judiciaire Akzo »).

B –  Procédure judiciaire Akzo

19      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 avril 2003, Akzo Nobel Chemicals et Akcros ont introduit un recours ayant pour objet, en substance, une demande d’annulation de la décision C (2003) 559/4, du 10 février 2003, et, en tant que de besoin, de la décision du 30 janvier 2003, obligeant ces sociétés et leurs filiales respectives à se soumettre à la vérification en cause (affaire T‑125/03, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission).

20      Le 17 avril 2003, Akzo Nobel Chemicals et Akcros ont introduit une demande en référé visant, notamment, au sursis à l’exécution des décisions d’inspection (affaire T‑125/03 R, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission).

21      Le 8 mai 2003, la Commission a adopté la décision C (2003) 1533 final sur la base de l’article 14, paragraphe 3, du règlement nº 17 (ci-après la « décision du 8 mai 2003 »), rejetant la demande des requérantes de voir respectée la confidentialité des documents litigieux.

22      Dans la décision du 8 mai 2003, la Commission a rejeté la demande d’Akzo Nobel Chemicals et d’Akcros visant à ce que les documents litigieux leur soient retournés et a indiqué son intention d’ouvrir l’enveloppe scellée en précisant, néanmoins, qu’elle ne procéderait pas à cette opération avant l’expiration du délai de recours contre ladite décision.

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juillet 2003, Akzo Nobel Chemicals et Akcros ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision du 8 mai 2003 (affaire T‑253/03, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission).

24      En outre, elles ont introduit une demande en référé visant, notamment, au sursis à l’exécution de la décision du 8 mai 2003 (affaire T‑253/03 R, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission).

25      Par ordonnance du président du Tribunal du 30 octobre 2003, la demande dans l’affaire T‑125/03 R, relative aux décisions d’enquête, a été rejetée, mais il a été fait partiellement droit à la demande dans l’affaire T‑253/03 R, relative à la protection de la confidentialité des documents litigieux (ordonnance du 30 octobre 2003, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T‑125/03 R et T‑253/03 R, Rec, EU:C:2003:287).

26      Cette ordonnance a été annulée par ordonnance du 27 septembre 2004, Commission/Akzo et Akcros [C‑7/04 P (R), Rec, EU:C:2004:566].

27      Par courrier du 15 octobre 2004, le greffe du Tribunal a retourné à la Commission l’enveloppe scellée contenant deux des documents litigieux (considérants 84 à 90 de la décision attaquée).

28      Par arrêt du Tribunal du 17 septembre 2007, le recours formé dans l’affaire T‑125/03, dirigé contre les décisions d’enquête, a été rejeté comme étant irrecevable. Le recours formé dans l’affaire T‑253/03, concernant les documents litigieux, a quant à lui été rejeté comme étant non fondé, dès lors que, en substance, la Commission n’avait pas commis d’erreur en décidant qu’aucun des documents litigieux n’était matériellement couvert par la protection de la confidentialité des communications entre avocats et clients (arrêt du 17 septembre 2007, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, T‑125/03 et T‑253/03, Rec, EU:T:2007:287, points 57 et 184).

29      Par arrêt du 14 septembre 2010, Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission (C‑550/07 P, Rec, EU:C:2012:512), la Cour a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt Akzo Nobel Chemicals et Akcros Chemicals/Commission, point 28 supra (EU:T:2007:287).

C –  Clôture de l’enquête de la Commission

30      Le 8 octobre 2007 et à plusieurs reprises en 2008, la Commission a envoyé aux entreprises impliquées des demandes de renseignements au titre de l’article 18 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1) (considérants 91 et 92 de la décision attaquée).

31      Le 17 mars 2009, la Commission a adopté une communication des griefs qui a été notifiée à plusieurs sociétés, dont Akzo Nobel, Akzo GmbH, Akzo BV et Akcros, les requérantes, le 18 mars 2009 (considérant 95 de la décision attaquée).

32      Le 11 novembre 2009, la Commission a adopté la décision attaquée.

III –  Décision attaquée

33      Par la décision attaquée, la Commission a considéré qu’un certain nombre d’entreprises avaient enfreint l’article 81 CE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) en participant à deux ensembles d’accords et de pratiques concertées anticoncurrentiels couvrant le territoire de l’EEE et concernant, d’une part, le secteur des stabilisants étain et, d’autre part, le secteur de l’huile de soja époxydée et des esters (ci-après le « secteur ESBO/esters »).

34      La décision attaquée retient l’existence de deux infractions portant sur deux catégories de stabilisants thermiques, lesquels constituent des produits ajoutés aux produits à base de polychlorure de vinyle (PVC) afin d’améliorer leur résistance thermique (considérant 3 de la décision attaquée).

35      Selon l’article 1er de la décision attaquée, chacune de ces infractions a consisté à fixer les prix, à répartir les marchés par le biais de quotas de vente, à répartir les clients et à échanger des informations commerciales sensibles, en particulier sur les clients, la production et les ventes.

36      La décision attaquée énonce que les entreprises concernées ont participé à ces infractions au cours de diverses périodes comprises entre le 24 février 1987 et le 21 mars 2000, portant sur les stabilisants étain, et entre le 11 septembre 1991 et le 26 septembre 2000, portant sur le secteur ESBO/esters.

37      La décision attaquée a été adressée, en ce qui concerne chaque infraction, à 20 sociétés, lesquelles ont soit participé directement aux infractions concernées, soit, vu leur responsabilité retenue, en tant que sociétés mères (considérant 510 de la décision attaquée).

A –  Imputation des infractions dans la décision attaquée

38      L’article 1er de la décision attaquée tient les requérantes pour responsables pour leur participation à l’infraction portant sur les stabilisants étain, du 24 février 1987 au 21 mars 2000 s’agissant d’Akzo Nobel, du 24 février 1987 au 28 juin 1993 s’agissant d’Akzo GmbH et du 28 juin 1993 au 21 mars 2000 s’agissant d’Akcros. De la même manière, l’article 1er de la décision attaquée tient les requérantes pour responsables pour leur participation à l’infraction portant dans le secteur ESBO/esters, du 11 septembre 1991 au 22 mars 2000 s’agissant d’Akzo Nobel, du 11 septembre 1991 au 28 juin 1993 s’agissant d’Akzo BV et du 28 juin 1993 au 22 mars 2000 s’agissant d’Akcros.

39      Ainsi, dans la décision attaquée, la responsabilité d’Akzo Nobel, en tant que société faîtière d’un groupe de sociétés dont certaines ont participé directement aux infractions, a été retenue pour toute la période infractionnelle, soit du 24 février 1987 au 22 mars 2000.

40      Pour la période antérieure au 28 juin 1993 (ci-après la « première période infractionnelle »), la Commission a considéré que des sociétés détenues indirectement par Akzo, devenue Akzo Nobel, avaient participé directement aux infractions, à savoir Akzo GmbH, pour l’infraction concernant les stabilisants étain, et Akzo BV, pour l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters (considérants 512 à 519 de la décision attaquée).

41      Pour la période allant du 28 juin 1993 au 2 octobre 1998 (ci-après la « deuxième période infractionnelle »), la Commission a considéré que les infractions avaient été commises par le partenariat Akcros (considérants 563 et 564 de la décision attaquée).

42      Pour la période allant du 2 octobre 1998 au 21 mars 2000, pour les stabilisants étain, et du 2 octobre 1998 au 22 mars 2000, pour le secteur ESBO/esters (ci-après la « troisième période infractionnelle »), la Commission a considéré que les infractions avaient été commises par Akcros (considérants 582 à 587 de la décision attaquée).

43      En ce qui concerne son pouvoir d’infliger des amendes aux requérantes pour ces infractions, la Commission a, dans la décision attaquée, rejeté leurs arguments, selon lesquels elle aurait pu et dû continuer son instruction pendant les procédures engagées devant le Tribunal dans le cadre de la procédure judiciaire Akzo. La Commission a, en effet, considéré que le délai de prescription de dix ans de son droit à imposer des amendes était suspendu, erga omnes, par la procédure judiciaire Akzo (considérants 672 à 682 de la décision attaquée).

B –  Imputation des amendes dans la décision attaquée

44      L’article 2 de la décision attaquée énonce ce qui suit :

« Pour l’/(les) infractions sur le marché des stabilisants étain […], les amendes suivantes sont infligées :

1)       Elementis plc, Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited, [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 875 200 euros ;

2)       Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited, [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 2 601 500 euros ;

3)       Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited et [Akzo Nobel] sont solidairement responsables pour le montant de 4 546 300 euros ;

4)       [Akzo Nobel], [Akzo GmbH] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 1 580 000 euros ;

5)       [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 944 300 euros ;

6)       [Akzo Nobel] et [Akzo GmbH] sont solidairement responsables pour le montant de 9 820 000 euros ;

7)       [Akzo Nobel] est responsable pour le montant de 1 432 700 euros ;

[…]

Pour l’/(les) infractions sur le [secteur ESBO/esters], les amendes suivantes sont infligées :

18)       Elementis plc, Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited, [Akzo Nobel] et [Akcros] sont responsables pour le montant de 1 115 200 euros ;

19)       Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited, [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 2 011 103 euros ;

20)       Elementis Holdings Limited, Elementis Services Limited et [Akzo Nobel] sont solidairement responsables pour le montant de 7 116 697 euros ;

21)       [Akzo Nobel], [Akzo BV] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 2 033 000 euros ;

22)       [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 841 697 euros ;

23)       [Akzo Nobel] et [Akzo BV] sont solidairement responsables pour le montant de 3 467 000 euros ;

24)       [Akzo Nobel] est responsable pour le montant de 2 215 303 euros […] »

45      Pour fixer le montant des amendes, la Commission a fait application des lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci-après les « lignes directrices de 2006 »).

IV –  Modification de la décision attaquée

46      Par décision de la Commission du 30 juin 2011, la décision attaquée a été modifiée en ce qu’elle était adressée à Akzo Nobel et à Akcros (ci-après la « décision modificative »).

47      Au considérant 1 de la décision modificative, la Commission a rappelé que, dans la décision attaquée, elle avait infligé des amendes à Akzo Nobel et à Akcros, « conjointement et solidairement » avec Elementis plc, Elementis Holdings Limited et Elementis Services Limited.

48      Au considérant 2 de la décision modificative, la Commission a énoncé que, à la suite de l’arrêt du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a. (C‑201/09 P et C‑216/09 P, Rec, EU:C:2011:190), elle avait décidé de retirer la décision attaquée en ce qu’elle était adressée, notamment, à Elementis et à Elementis Holdings Limited.

49      Partant, la Commission a modifié la décision attaquée, en ce qu’elle était adressée à Akzo Nobel et à Akcros dans la mesure où elles avaient été tenues pour solidairement responsables, avec Elementis, des amendes infligées.

50      Aux termes de l’article 1er de la décision modificative :

« La [décision attaquée] est modifiée comme suit :

l’article 2, point 4), est remplacé comme suit :

1)       [Akzo Nobel], [Akzo GmbH] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 1 580 000 euros ;

l’article 2, points 1), 2) et 5), est remplacé comme suit :

2)       [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 4 421 000 euros ;

l’article 2, point 6), est remplacé comme suit :

3)       [Akzo Nobel] et [Akzo GmbH] sont solidairement responsables pour le montant de 9 820 000 euros ;

l’article 2, points 3) et 7), est remplacé comme suit :

4)       [Akzo NV] est responsable pour le montant de 5 979 000 euros ;

l’article 2, point 21), est remplacé comme suit :

18)       [Akzo Nobel], [Akzo BV] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 2 033 000 euros ;

l’article 2, points 18), 19) et 22), est remplacé comme suit :

19)       [Akzo Nobel] et [Akcros] sont solidairement responsables pour le montant de 3 968 000 euros ;

l’article 2, point 23), est remplacé comme suit :

20)       [Akzo Nobel] et [Akzo BV] sont solidairement responsables pour le montant de 3 467 000 euros ;

l’article 2, points 20) et 24), est remplacé comme suit :

21)       [Akzo Nobel] est responsable pour le montant de 9 332 000 euros [...] »

 Procédure et conclusions des parties

51      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 janvier 2010, les requérantes ont formé un recours contre la décision attaquée.

52      Par lettre du 29 juillet 2011 adressée au greffe du Tribunal, la Commission a souhaité attirer l’attention du Tribunal sur l’incidence, dans la présente affaire, de l’arrêt ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., point 48 supra (EU:C:2011:190), ce dont le Tribunal a pris acte.

53      Dans ladite lettre, d’une part, la Commission a retiré les arguments qu’elle faisait valoir, à titre subsidiaire, tirés de la suspension de la procédure à l’encontre d’Akzo Nobel, d’Akzo GmbH et d’Akzo BV exposés aux points 55 à 65 du mémoire en défense et aux points 27 à 33 de la duplique.

54      D’autre part, aux fins de clarification, la Commission a précisé qu’elle maintenait son argument tiré de la suspension de la procédure à l’encontre d’Akcros et l’ensemble de sa réponse au moyen tiré de violations des règles de prescription à l’encontre de toutes les autres requérantes.

55      Par télécopie du greffe du Tribunal du 9 août 2011, les requérantes ont été invitées à soumettre leurs observations sur la lettre de la Commission du 29 juillet 2011.

56      Par télécopie du même jour, les requérantes ont demandé au Tribunal de prolonger le délai imparti pour soumettre leurs observations sur la lettre de la Commission du 29 juillet 2011.

57      Il a été fait droit à cette demande.

58      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 16 septembre 2011, les requérantes ont soumis des observations sur la lettre de la Commission du 29 juillet 2011.

59      Dans lesdites observations, d’une part, les requérantes ont maintenu leur moyen tiré de violations des règles de prescription.

60      D’autre part, elles ont rejeté l’argument que tirait la Commission de la suspension de la prescription à l’égard d’Akcros.

61      En date du 13 novembre 2012, les requérantes ont été invitées à préciser, d’une part, si elles maintenaient leur demande de production de documents figurant au point 43 de la requête et, d’autre part, si, dans le cadre du moyen qu’elles tiraient d’erreurs de calcul du montant des amendes, aux points 127 à 130 de la requête, elles visaient toutes les périodes infractionnelles ou une partie de celles-ci.

62      En date du 13 novembre 2012, la Commission a été invitée à préciser comment elle était parvenue, dans le calcul des amendes, aux montants figurant aux deux premières lignes en maigre des tableaux figurant aux considérants 717 et 773 de la décision attaquée, ainsi qu’à ceux figurant aux points 1 à 7 et 18 à 24 de l’article 2 de cette décision.

63      Par télécopie du 23 novembre 2012, les requérantes ont demandé au Tribunal de prolonger le délai imparti pour répondre aux questions du Tribunal du 13 novembre 2012.

64      Il a été fait droit à cette demande.

65      Par acte déposé au greffe le 12 décembre 2012, les requérantes ont répondu aux questions du Tribunal du 13 novembre 2012.

66      Par acte déposé au greffe le même jour, la Commission a répondu à la question du Tribunal du 13 novembre 2012.

67      La réponse de la Commission a été communiquée aux requérantes le 20 décembre 2012.

68      La réponse des requérantes a été communiquée à la Commission le même jour.

69      Par courrier déposé au greffe du Tribunal le 14 février 2013, les requérantes ont saisi le Tribunal d’une demande d’audition de témoins.

70      Le 4 mars 2013, le Tribunal a invité la Commission à soumettre ses observations sur ladite demande.

71      La Commission a soumis ses observations dans les délais impartis, à savoir le 18 mars 2013.

72      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 20 mars 2013, les requérantes ont précisé que leur courrier du 14 février 2013 n’était pas une demande déposée en application de l’article 68 du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

73      Il a été décidé de verser cette lettre au dossier.

74      Par demande du Tribunal du 25 juillet 2013, les parties ont été invitées à soumettre leurs observations sur une éventuelle suspension de l’affaire, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure du 2 mai 1991, dans l’attente des décisions de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires Commission/Siemens Österreich e.a., C‑23l/11 P à C‑233/11 P (JO C 204, p. 17).

75      Par acte déposé au greffe le 6 août 2013, la Commission a répondu à cette demande en déclarant ne pas s’opposer à ladite suspension.

76      Par acte déposé au greffe le 21 août 2013, les requérantes ont répondu à cette demande en déclarant ne pas s’opposer à ladite suspension.

77      La réponse de la Commission a été communiquée aux requérantes le 22 août 2013.

78      La réponse des requérantes a été communiquée à la Commission le même jour.

79      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée le 3 octobre 2013.

80      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 10 octobre 2013, il a été décidé, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure du 2 mai 1991, de suspendre l’affaire dans l’attente des décisions de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires Commission/Siemens Österreich e.a., C‑23l/11 P à C‑233/11 P (JO C 204, p. 17).

81      Le 10 avril 2014, la Cour a prononcé l’arrêt Commission/Siemens Österreich e.a. et Siemens Transmission & Distribution e.a./Commission (C‑231/11 P à C‑233/11 P, Rec, ci-après l’« arrêt Siemens », EU:C:2014:256).

82      Le même jour, la Cour a prononcé l’arrêt Areva e.a./Commission (C‑247/11 P et C‑253/11 P, Rec, ci-après l’« arrêt Areva », EU:C:2014:257).

83      Au titre des mesures d’organisation de la procédure, le Tribunal a, en date du 15 avril 2014, invité les parties à soumettre par écrit leurs observations sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256).

84      Par télécopie adressée au greffe du Tribunal le 25 avril 2014, les requérantes ont demandé au Tribunal de prolonger le délai imparti pour répondre à la question du Tribunal du 15 avril 2014.

85      Il a été fait droit à cette demande.

86      En date du 5 mai 2014, la Commission a soumis ses observations sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256).

87      En date du 15 mai 2014, les requérantes ont soumis leurs observations sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256).

88      Les observations de la Commission sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256), ont été communiquées aux requérantes le 16 mai 2014.

89      Les observations des requérantes sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256), ont été communiquées à la Commission le même jour.

90      En dates du 20 et du 22 mai 2014, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale et invité les parties à soumettre par écrit leurs observations, d’une part, sur une éventuelle jonction de la présente affaire et de l’affaire T‑485/11 aux fins de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance dans ces deux affaires et, d’autre part, sur l’incidence de l’arrêt Areva, point 82 supra (EU:C:2014:257), en particulier des points 132, 137 et 138 dudit arrêt.

91      En date du 5 juin 2014, les requérantes ont soumis leurs observations sur une éventuelle jonction de la présente affaire et de l’affaire T‑485/11 aux fins de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance.

92      Le même jour, les requérantes ont soumis leurs observations sur l’incidence de l’arrêt Areva, point 82 supra (EU:C:2014:257), dans la présente affaire.

93      Le 6 juin 2014, la Commission a soumis ses observations sur une éventuelle jonction de la présente affaire et de l’affaire T‑485/11 aux fins de la procédure orale et de la décision mettant fin à l’instance ainsi que sur l’incidence de l’arrêt Areva, point 82 supra (EU:C:2014:257), dans la présente affaire.

94      Les observations de la Commission sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Areva, point 82 supra (EU:C:2014:257), ont été communiquées aux requérantes le 11 juin 2014.

95      Les observations des requérantes sur l’incidence dans la présente affaire de l’arrêt Areva, point 82 supra (EU:C:2014:257), ont été communiquées à la Commission le même jour.

96      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 3 juillet 2014, la présente affaire a été jointe à l’affaire T‑485/11 aux fins de la procédure orale.

97      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 23 septembre 2014.

98      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, réduire le montant des amendes qui leur ont été infligées ;

–        condamner la Commission aux dépens.

99      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

100    Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 septembre 2011 et enregistrée sous la référence T‑485/11, Akzo Nobel et Akcros ont formé un recours contre la décision modificative.

101    Par arrêt prononcé ce jour, dans l’affaire Akzo Nobel et Akcros/Commission, T‑485/11, la décision modificative a été annulée.

 En droit

102    Au soutien du recours, les requérantes invoquent cinq moyens.

103    Le premier moyen est tiré de violations des règles de prescription. Le deuxième moyen est tiré d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable. Le troisième moyen est tiré de violations des droits de la défense. Le quatrième moyen est tiré d’erreurs d’imputation des infractions et des amendes. Le cinquième moyen est tiré d’erreurs de calcul du montant des amendes.

I –  Sur le premier moyen, tiré de violations des règles de prescription

104    Dans le cadre du premier moyen du recours, tiré de violations des règles de prescription, à titre principal, les requérantes soutiennent, d’une part, que la Commission ne pouvait plus agir contre elles concernant la première période infractionnelle et, d’autre part, que les infractions ont cessé « en 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997, de sorte que, par la décision attaquée, la Commission aurait enfreint l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003.

105    À titre subsidiaire, les requérantes prétendent que, en tout état de cause, la Commission a enfreint l’article 25, paragraphe 5, du règlement n° 1/2003, dès lors qu’elle n’a pas, dans la décision attaquée, établi l’existence des infractions durant les années 1999 et 2000.

106    Partant, il convient d’apprécier les arguments que font valoir les requérantes dans le cadre de leur premier moyen, tiré de violations des règles de prescription, pour ce qui a trait, en premier lieu, à la première période infractionnelle et, en second lieu, aux deuxième et troisième périodes infractionnelles.

A –  Sur la première période infractionnelle

1.     Arguments des parties

107    Les requérantes font observer qu’il ressort du considérant 512 et de l’article 1er, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, sous b), de la décision attaquée que les sociétés du groupe Akzo tenues par la Commission pour avoir commis directement l’infraction durant la première période infractionnelle (c’est-à-dire pour les stabilisants étain, du 24 février 1987 au 28 juin 1993, et pour le secteur ESBO/esters, du 11 septembre 1991 au 28 juin 1993), à savoir Akzo GmbH et Akzo BV, ont cessé leur participation aux infractions le 28 juin 1993.

108    Ainsi, en application de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, la Commission ne pouvait plus agir à l’encontre d’Akzo GmbH et d’Akzo BV à compter du 28 juin 1998.

109    Or, selon les requérantes, la première action officielle menée par la Commission à leur égard a eu lieu les 12 et 13 février 2003.

110    Par conséquent, aucune responsabilité ne saurait être retenue à l’égard d’Akzo GmbH et d’Akzo BV.

111    Il y aurait donc lieu d’annuler l’article 1er, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, sous b), de la décision attaquée.

112    Pour les mêmes motifs, la responsabilité d’Akzo Nobel ne saurait non plus être retenue, en tant que société mère de ces deux sociétés, pour la première période infractionnelle.

113    Partant, il y aurait lieu d’annuler, pour le moins partiellement dans le cadre des présents arguments, les amendes infligées à l’article 2, points 4, 6, 21 et 23, de la décision attaquée.

114    La Commission soutient avoir établi, dans la décision attaquée, que des entités du groupe Akzo ont participé à l’infraction dans le secteur des stabilisants étain, de 1987 à mars 2000, et à l’infraction dans le secteur ESBO/esters, de 1991 à mars 2000.

115    Ainsi que cela ressortirait du considérant 527 de la décision attaquée, la Commission est partie du constat que, si une entreprise a participé à une infraction sur une certaine période au cours de laquelle elle a successivement été constituée de différentes entités juridiques , ladite entreprise ne peut se prévaloir de règles de prescription qui découleraient de ces réorganisations internes. Sinon, les entreprises pourraient facilement échapper à l’application des règles de prescription par une réorganisation interne. L’article 81 CE et les règles de prescription visées à l’article 25 du règlement n° 1/2003 s’appliqueraient aux entreprises et non aux entités juridiques qui les composent. Il s’ensuivrait que, si des personnes morales faisant partie de l’entreprise Akzo participent à une infraction, le délai de prescription commence à courir seulement à compter du jour où les infractions commises par ladite entreprise cessent.

116    La Commission relève que les premiers actes d’instruction sont intervenus en janvier et en février 2003, relançant ainsi le délai de la prescription quinquennale et que d’autres actes d’instruction ont été pris par la suite, de sorte que la première décision attaquée a bel et bien été adoptée dans le délai de cinq ans à compter de l’acte d’instruction le plus récent.

2.     Appréciation du Tribunal

117    Dans le cadre de cette première branche du premier moyen, tirée d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, les requérantes prétendent que la Commission était forclose pour agir à l’encontre d’Akzo GmbH et d’Akzo BV à compter du 28 juin 1998 et, par là même, pour infliger à ces sociétés une amende solidaire avec Akzo Nobel, en tant que société mère desdites sociétés.

118    À cet égard, il convient, d’emblée, de rappeler que, en vertu de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, les pouvoirs de la Commission en matière d’imposition de sanctions pour les infractions à l’article 81 CE sont prescrits au terme d’un délai de cinq ans.

119    Le paragraphe 2 de l’article 25 du règlement n° 1/2003 précise que ce délai commence à courir à compter du jour où l’infraction a été commise, mais que, pour les infractions continues ou répétées, la prescription ne court qu’à compter du jour où l’infraction a pris fin.

120    En son paragraphe 3, l’article 25 du règlement n° 1/2003 énonce que la prescription en matière d’imposition d’amendes est interrompue par tout acte de la Commission visant à l’instruction ou à la poursuite de l’infraction.

121    Or, en l’espèce, il est constant que la Commission n’a, dans la décision attaquée, retenu la responsabilité tant d’Akzo GmbH, pour l’infraction portant sur les stabilisants étain, que d’Akzo BV, pour l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, que jusqu’au 28 juin 1993 [voir considérants 512 et 513 ainsi qu’article 1er, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 2, sous b), de la décision attaquée].

122    Il est également constant que, dans la décision attaquée, la responsabilité d’Akzo Nobel n’a été retenue, pour les infractions commises durant la première période infractionnelle, qu’au titre des comportements infractionnels d’Akzo GmbH, pour les stabilisants étain, et d’Akzo BV, pour le secteur ESBO/esters (voir considérant 514 de la décision attaquée).

123    Il est tout autant constant que les premiers actes de la Commission visant à l’instruction ou à la poursuite des infractions, portant tant sur les stabilisants étain que sur le secteur ESBO/esters, n’ont été pris qu’au début de l’année 2003.

124    Partant, il ne saurait être contesté que les premiers actes de la Commission visant à l’instruction ou à la poursuite des infractions, au sens de l’article 25, paragraphe 3, du règlement n° 1/2203, portant tant sur les stabilisants étain que sur le secteur ESBO/esters, ont été pris après l’expiration, pour Akzo GmbH et Akzo BV, du délai prévu au paragraphe 1 de cette disposition.

125    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’acquisition de la prescription prévue à l’article 25 du règlement n° 1/2003 n’a pas pour effet d’effacer l’existence d’une infraction, ni d’empêcher la Commission de constater, dans une décision, la responsabilité pour une telle infraction (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2005, Sumitomo Chemical et Sumika Fine Chemicals/Commission, T‑22/02 et T‑23/02, Rec, EU:T:2005:349, points 60 à 63), mais seulement de faire échapper aux poursuites destinées à l’imposition de sanctions ceux qui en bénéficient (voir, en ce sens, arrêt du 27 juin 2012, Bolloré/Commission, T‑372/10, Rec, EU:T:2012:325, point 194).

126    En outre, il ressort d’une interprétation textuelle, téléologique et contextuelle de l’article 25 du règlement n° 1/2003 que, à l’instar des garanties procédurales individuelles, telles que les droits de la défense, et de la nécessité pour la Commission de notifier tant une communication des griefs qu’une décision infligeant de telles sanctions à la personne juridique concernée (voir, en ce sens, arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec, EU:C:2009:536, points 57 et 59), le bénéfice de l’acquisition de la prescription au titre du paragraphe 1 profite à, et peut être invoqué par, chacune des personnes juridiques séparément lorsqu’elles sont exposées aux poursuites de la Commission. Ainsi, il a déjà été reconnu dans la jurisprudence que le seul fait pour une société filiale d’un groupe de sociétés, au sens d’une unité économique, de bénéficier de l’écoulement du délai de prescription n’avait pas pour conséquence de remettre en cause la responsabilité de la société mère et d’empêcher les poursuites à son égard (voir, en ce sens, arrêt Bolloré/Commission, point 125 supra, EU:T:2012:325, points 193 à 196, non remis en cause sur ce point par l’arrêt du 8 mai 2014, Bolloré/Commission, C‑414/12 P, EU:C:2014:301, point 109).

127    Cette appréciation n’est pas contredite par l’emploi, aux paragraphes 3 et 4 de l’article 25 du règlement n° 1/2003, de la notion d’entreprise, au sens de l’article 81, paragraphe 1, CE, qui ne vise qu’à définir les actes interruptifs du délai de prescription ainsi que la portée de leurs effets à l’égard de l’ensemble des entreprises et des associations d’entreprises ayant participé à l’infraction, c’est-à-dire en ce compris les personnes morales les constituant (voir, en ce sens, arrêt Bolloré/Commission, point 125 supra, EU:T:2012:325, points 198 et suivants).

128    Il s’ensuit que, en l’espèce, Akzo GmbH et Akzo BV, même si elles sont restées membres à part entière du groupe Akzo, pouvaient légitimement invoquer, à la différence d’Akzo Nobel, l’expiration du délai de prescription à leur égard.

129    Partant, il y a lieu d’accueillir les griefs que font valoir les requérantes, sur le fondement de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, et d’annuler l’article 2, points 4, 6, 21 et 23, de la décision attaquée en ce que des amendes ont été infligées à Akzo GmbH et à Akzo BV pour ce qui est de la première période infractionnelle, mais de les rejeter pour le surplus.

B –  Sur les deuxième et troisième périodes infractionnelles

1.     Synthèse des arguments des parties

130    Dans le cadre du premier moyen du recours, tiré de violations des règles de prescription, les requérantes soutiennent également que les infractions ont cessé en « 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997 et que, en tout état de cause, la Commission n’a pas établi leur participation aux infractions durant les années 1999 et 2000.

131    Pour sa part, la Commission estime qu’elle a, dans la décision attaquée, établi à suffisance de droit l’existence de l’infraction portant sur les stabilisants étain et de celle portant sur le secteur ESBO/esters durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

2.     Rappel de la jurisprudence pertinente

132    À cet égard, il y a lieu de rappeler, en ce qui concerne l’administration de la preuve d’une infraction à l’article 81, paragraphe 1, CE, que la Commission doit rapporter la preuve des infractions qu’elle constate et établir les éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs d’une infraction (voir arrêt du 14 mai 2014, Reagens/Commission, T‑30/10, EU:T:2014:253, point 117 et jurisprudence citée).

133    Aussi est-il nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour fonder la ferme conviction que l’infraction a été commise (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 118 et jurisprudence citée).

134    Certes, si la Commission constate une infraction aux règles de la concurrence en se fondant sur la supposition que les faits établis ne peuvent pas être expliqués autrement qu’en fonction de l’existence d’un comportement anticoncurrentiel, le juge de l’Union sera amené à annuler la décision en question lorsque les entreprises concernées avancent une argumentation qui donne un éclairage différent aux faits établis par la Commission et qui permet ainsi de substituer une autre explication plausible des faits à celle retenue par la Commission pour conclure à l’existence d’une infraction. En effet, dans un tel cas, il ne saurait être considéré que la Commission a apporté la preuve de l’existence d’une infraction au droit de la concurrence (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 119 et jurisprudence citée).

135    Toutefois, il ressort également de la jurisprudence que chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l’infraction, car il suffit que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 120 et jurisprudence citée).

136    Il convient également de considérer que l’interdiction de participer à des pratiques et à des accords anticoncurrentiels ainsi que les sanctions que les contrevenants peuvent encourir étant notoires, il est usuel que les activités que ces pratiques et ces accords comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement, le plus souvent dans un pays tiers, et que la documentation s’y rapportant soit réduite au minimum (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 121 et jurisprudence citée).

137    Par ailleurs, même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, telles que les comptes rendus d’une réunion, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 122 et jurisprudence citée).

138    Ainsi, dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices, qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de la concurrence (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 123 et jurisprudence citée).

139    En outre, il ressort de la jurisprudence que, en l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement l’intégralité de la durée d’une infraction, la Commission doit se fonder, au moins, sur des éléments de preuve se rapportant à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 124 et jurisprudence citée).

140    La Cour a également jugé que, dès lors que la Commission avait pu établir qu’une entreprise avait participé à des réunions entre entreprises à caractère manifestement anticoncurrentiel, le Tribunal avait pu estimer à juste titre qu’il incombait à cette dernière de fournir une autre explication du contenu de ces réunions. Ce faisant, le Tribunal n’avait pas opéré un renversement indu de la charge de la preuve, ni violé la présomption d’innocence (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 125 et jurisprudence citée).

141    De même, lorsque la Commission se fonde sur des éléments de preuve qui sont, en principe, suffisants pour démontrer l’existence de l’infraction, il ne suffit pas à l’entreprise concernée d’évoquer la possibilité qu’une circonstance s’est produite qui pourrait affecter la valeur probante de ces éléments de preuve pour que la Commission supporte la charge de prouver que cette circonstance n’a pas pu affecter la valeur probante de ceux-ci. Au contraire, sauf dans les cas où une telle preuve ne pourrait pas être fournie par l’entreprise concernée en raison du comportement de la Commission elle-même, il appartient à l’entreprise concernée d’établir à suffisance de droit, d’une part, l’existence de la circonstance qu’elle invoque et, d’autre part, que cette circonstance met en cause la valeur probante des éléments de preuve sur lesquels se fonde la Commission (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 126 et jurisprudence citée).

142    Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, pour prouver à suffisance de droit la participation d’une entreprise à une entente, il suffit de démontrer que l’entreprise concernée a participé à des réunions au cours desquelles des accords de nature anticoncurrentielle ont été conclus, sans s’y être manifestement opposée. Lorsque la participation à de telles réunions a été établie, il incombe à cette entreprise d’avancer des indices de nature à établir que sa participation auxdites réunions était dépourvue de tout esprit anticoncurrentiel, en démontrant qu’elle avait indiqué à ses concurrents qu’elle participait à ces réunions dans une optique différente de la leur (voir arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, point 127 et jurisprudence citée).

143    C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’apprécier les arguments des requérantes ayant trait aux deuxième et troisième périodes infractionnelles, c’est-à-dire de vérifier si la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des infractions pour toute leur durée.

3.     Sur la durée des infractions

144    En l’espèce, les requérantes soutiennent, à titre principal, que les comportements infractionnels ont cessé en « 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997, de sorte que la Commission ne pouvait plus agir contre elles, en application de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003. En effet, elles font valoir que le premier acte de la Commission les visant n’a été pris que par la décision du 30 janvier 2003, ce que ne conteste pas la Commission, soit plus de cinq ans, selon elles, après la cessation des comportements infractionnels.

145    À titre subsidiaire, elles prétendent que la Commission n’a pas, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des infractions pour les années 1999 et 2000, de sorte que ses pouvoirs de leur infliger des amendes étaient prescrits, en application de l’article 25, paragraphe 5, du règlement n° 1/2003. En effet, les requérantes font valoir que la décision n’a été adoptée que le 11 novembre 2009, soit plus de dix ans, selon elles, après la cessation des comportements infractionnels.

146    À cet égard, force est de constater que les requérantes admettent, dans leurs écrits devant le Tribunal au soutien de leur moyen tiré de violation des règles de prescription, l’existence des infractions pour la première période infractionnelle, ne serait-ce qu’en soutenant que les infractions ont cessé « en 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997.

147    Partant, il n’y a pas lieu, aux fins d’apprécier le premier moyen du recours, de vérifier si la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, les comportements infractionnels reprochés aux requérantes durant la première période infractionnelle.

148    En revanche, il faut considérer que, à titre principal, les requérantes soutiennent que la Commission n’a pas établi l’existence de l’infraction après « 1996/1997 » ou, « au plus tard », après 1997, et que, à titre subsidiaire et en tout état de cause, elles contestent la force probante des éléments avancés par la Commission dans la décision attaquée pour établir que les infractions ont perduré au-delà du 11 novembre 1999.

149    Il convient également de relever que les requérantes ne contestent pas que c’est principalement dans le cadre de réunions organisées en Suisse par AC-Treuhand (ci-après les « réunions AC-Treuhand ») que les comportements infractionnels en cause ont eu lieu durant la première période infractionnelle.

150    Les requérantes ne contestent pas non plus qu’Akzo GmbH et Akzo BV ont participé aux réunions AC-Treuhand durant la première période infractionnelle.

151    Elles ne contestent pas plus que, durant la première période infractionnelle, les réunions AC-Treuhand ont toutes été « animées », en toute connaissance du caractère infractionnel de l’objet desdites réunions, par M. S., un collaborateur d’AC-Treuhand.

152    Les requérantes admettent tout autant l’existence de réunions AC-Treuhand durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

153    Elles ne contestent pas la participation de représentants du partenariat Akcros et d’Akcros aux réunions AC-Treuhand durant, respectivement, les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

154    Elles ne contestent pas non plus que toutes les réunions AC-Treuhand ayant eu lieu durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles ont également été animées par M. S., et ce avec la quasi-totalité des entreprises ayant participé aux réunions AC-Treuhand durant la première période infractionnelle.

155    Les requérantes ne soutiennent pas, enfin, que, durant la deuxième ou avant la fin de la troisième période infractionnelle, elles se sont publiquement distanciées de l’objet des réunions AC-Treuhand.

156    Par conséquent, pour apprécier le premier moyen des requérantes, en ce qu’il vise les deuxième et troisième périodes infractionnelles, il suffit de vérifier si la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, que les réunions AC-Treuhand auxquelles des représentants du partenariat Akcros puis d’Akcros ont participé, durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles, avaient un objet anticoncurrentiel tout comme les réunions AC-Treuhand qui ont eu lieu durant la première période infractionnelle.

a)     Contenu de la décision attaquée

 Sur la deuxième période infractionnelle

157    Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que, pour la deuxième période infractionnelle, c’est-à-dire la période allant du 28 juin 1993 au 2 octobre 1998, les infractions en cause avaient été commises par le partenariat Akcros (considérants 563 et 564 de la décision attaquée).

158    Or, les requérantes soutiennent que les infractions ont cessé « en 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997.

159    Ainsi, les requérantes ne contestent pas la légalité de la décision attaquée en ce que la Commission y a constaté que le partenariat Akcros avait commis, au cours de la deuxième période infractionnelle, les infractions en cause durant les années 93 (à compter du 28 juin), 94 et 95.

160    Partant, pour ce qui est de la deuxième période infractionnelle, l’examen du Tribunal sera limité aux années 1996 à 1998.

161    Aux fins d’établir l’existence des infractions durant les années 1996 à 1998, la Commission a fait état de différents éléments aux considérants 242 à 297 de la décision attaquée, pour ce qui est de l’infraction sur les stabilisants étain et de celle sur le secteur ESBO/esters.

–       Sur l’infraction portant sur les stabilisants étain

162    Premièrement, pour ce qui est de l’année 1996, dans la décision attaquée, la Commission a établi l’existence de six réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu à Zurich (Suisse) les 8 et 9 janvier, les 15 et 16 juillet ainsi que les 6 et 7 novembre (considérant 242 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions du partenariat Akcros, de Baerlocher et de Ciba.

163    Deuxièmement, la Commission a fait valoir un document et des notes manuscrites saisis chez Baerlocher, datés du 8 janvier 1996, soit le jour d’une réunion AC-Treuhand, et faisant état de discussions sur les volumes des ventes et sur les prix des stabilisants étain appliqués à certains clients ainsi que sur des quotas (considérants 243 et 244 de la décision attaquée), ces documents mentionnant expressément « Akcros » et Ciba, notamment.

164    Troisièmement, la Commission a fait état d’une note de Ciba du 11 juin 1996, relative à un échange entre Baerlocher et Ciba, mentionnant « When do we see possibilities of increasing prices » et « after the exit from the tin prices agreement inevitable » (considérant 249 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

165    Quatrièmement, la Commission a mis en avant une lettre datée du 27 novembre 1996 et saisie chez Baerlocher. Cette lettre, rédigée et envoyée par AC-Treuhand, rapporte des statistiques pour les stabilisants étain pour le mois d’octobre 1996 sur le marché de l’Europe de l’Ouest (considérant 251 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

166    Cinquièmement, pour ce qui est de l’année 1997, quatre réunions AC-Treuhand ont eu lieu à Zurich et à Lugano (Suisse) les 11 et 12 mars ainsi que les 16 et 17 septembre (considérant 257 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de Baerlocher, de Ciba et de Reagens.

167    Sixièmement, la Commission a rapporté le contenu d’une note interne de Reagens intitulée « Réunion AC-Treuhand à Zurich le 11 mars 1997 avec M. [S] » et faisant état de niveaux des ventes de stabilisants étain et d’écarts par rapport à des « quotas » (considérants 258 et 259 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la mention dans cette note d’« Akcros », de Baerlocher et de Ciba, notamment, au titre des écarts par rapport aux « quotas ».

168    Septièmement, la Commission a reproduit le contenu de notes manuscrites de Baerlocher datées du 12 mars 1997, soit le jour d’une réunion AC-Treuhand, indiquant des écarts par rapport à des « quotas » géographiques pour chaque entreprise participante (considérants 260 et 261 de la décision attaquée), ces notes mentionnant expressément « Akcros », Baerlocher, Ciba et Reagens.

169    Huitièmement, la Commission a mentionné des notes manuscrites de Ciba rédigées à l’occasion d’une réunion AC-Treuhand à Lugano le 17 septembre 1997, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de Baerlocher, de Ciba et de Reagens ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, et indiquant « pas d’autres baisses des prix » (considérant 264 de la décision attaquée).

170    Neuvièmement, pour ce qui est de l’année 1998, six réunions AC-Treuhand ont eu lieu à Zurich et à Lugano les 10 et 11 février, les 29 et 30 juin, les 14 et 15 septembre (considérant 270 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de Baerlocher, de CECA, de Reagens et de Ciba.

171    Dixièmement, la Commission a invoqué des notes manuscrites, fournies par CECA dans le cadre de sa coopération avec la Commission et rédigées à l’occasion de la réunion AC-Treuhand du 11 février 1998, à laquelle le partenariat Akcros, Baerlocher, CECA, Reagens et Ciba ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, mentionnant des prix minimaux pour certains clients et un gel de la clientèle (considérant 272 de la décision attaquée).

172    Onzièmement, selon des notes manuscrites datées du 5 novembre 1998 de CECA, des discussions ont eu lieu entre les participants, dont le partenariat Akcros, Baerlocher, CECA et Reagens, ces notes faisant état de l’évolution de leurs parts de marché (considérant 276 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

− Sur l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters

173    Premièrement, pour ce qui est de l’année 1996, la Commission a, dans la décision attaquée, établi l’existence de quatre réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu les 13 et 14 février, le 16 juillet ainsi que le 6 novembre (considérants 252, 254 et 255 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci.

174    Deuxièmement, la Commission a fait état, au considérant 254 de la décision attaquée, de preuves fournies par Ciba concernant une réunion AC-Treuhand du 14 février 1996 à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de Chemson et de Ciba ont participé et durant laquelle ont été envisagés des quotas pour Faci en tant que nouvel arrivant.

175    Troisièmement, la Commission a fait état, au considérant 255 de la décision attaquée, de preuves fournies par Ciba concernant une réunion AC-Treuhand du 16 juillet 1996 à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson et de Ciba ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, et durant laquelle les participants ont confirmé leur souhait de « coopération » ainsi que la suppression des « audits ».

176    Quatrièmement, la Commission a fait état de notes manuscrites de Ciba, du 6 novembre 1996, obtenues dans le cadre de la coopération de cette entreprise durant la procédure administrative (considérant 256 de la décision attaquée).

177    Il ressort desdites notes, rédigées à l’occasion d’une réunion AC-Treuhand du 6 novembre 1996, à laquelle des représentants du partenariat d’Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, que les entreprises participantes sont convenues d’objectifs de prix pour la France.

178    Cinquièmement, pour ce qui est de l’année 1997, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence de trois réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu le 13 mars, le 10 juillet et le 10 septembre (considérant 267 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci.

179    Sixièmement, la Commission a reproduit dans la décision attaquée des notes manuscrites de Reagens, saisies par la Commission lors d’une inspection dans les locaux de cette entreprise, rédigées en octobre 1997 et commençant par les mentions, en lettres majuscules, « TRÈS CONFIDENTIEL » et « VEUILLEZ LIRE ET DÉTRUIRE » (considérants 268 et 269 de la décision attaquée).

180    Il ressort de ces notes, rédigées à l’occasion d’une réunion du 14 octobre 1997 à Milan (Italie), à laquelle des représentants du partenariat d’Akcros, de CECA, de Ciba et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, que les entreprises participantes ont non seulement échangé des informations commerciales sensibles sur leurs capacités de production, mais également fixé des « prix minimaux » et des « prix minimaux spéciaux ». Il ressort également clairement desdites notes que cette réunion avait été précédée et serait suivie, le 25 novembre 1997, d’une autre réunion entre les mêmes participants.

181    Septièmement, pour ce qui est de l’année 1998, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence de huit réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu les 11 et 12 mars, les 20 et 25 mai, le 20 juillet, le 13 août ainsi que les 19 et 20 octobre (considérant 278 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Ciba/Chemtura, de Chemson et de Faci.

182    Huitièmement, concernant la réunion AC-Treuhand qui s’est tenue en Suisse le 12 mars 1998, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba/Chemtura et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a produit des notes du représentant de CECA, cette entreprise ayant également participé à la réunion (considérant 279 de la décision attaquée).

183    Il ressort de ces notes que les entreprises participantes non seulement ont échangé des informations commerciales sensibles sur leurs parts de marché respectives en Europe de l’Ouest pour les années 1996 et 1997, mais également, d’une part, ont discuté d’augmentations de prix pour le deuxième trimestre de l’année 1998 dans certains États européens et, d’autre part, sont convenues d’un prix minimal et d’un prix indicatif à atteindre avant la fin de l’année, le contenu de ces notes étant corroboré par des notes du 12 mars 1998, obtenues dans le cadre de la coopération de Ciba durant la procédure administrative (considérant 280 de la décision attaquée).

184    Neuvièmement, concernant la réunion AC-Treuhand qui s’est tenue à Zurich le 20 mai 1998, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a fait valoir des notes rédigées par CECA (considérant 281 de la décision attaquée).

185    Ces notes font ressortir, pour les mois de janvier, de février, de mars et d’avril 1998, concernant l’Europe de l’Ouest et l’Europe de l’Est, les parts de marché de différentes entreprises, dont le partenariat Akcros, CECA, Chemson, Ciba/Chemtura et Faci, ce que ne contestent pas les requérantes, dans une colonne intitulée « Quotas ».

186    Dixièmement, concernant la réunion AC-Treuhand qui s’est tenue à Zurich le 25 mai 1998, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a fait valoir, au considérant 282 de la décision attaquée, des notes manuscrites et contemporaines de cette réunion rédigées par un collaborateur d’Arkema (ci-après les « notes Arkema de mai 1998 ») ainsi que des notes manuscrites et contemporaines de cette réunion rédigées par un collaborateur de Ciba/Chemtura.

187    Il ressort des notes Arkema de mai 1998 que les entreprises participantes ont échangé des informations commerciales sensibles non seulement sur les différents niveaux de prix pratiqués dans certains États européens, mais également sur des « quotas » et les volumes de vente des entreprises participantes, à savoir le partenariat Akcros, CECA, Chemson, Ciba et Faci.

188    Le contenu des notes Arkema de mai 1998 est corroboré par les notes de mai 1998 rédigées par un collaborateur de Ciba, susvisées, dont il ressort, de plus, que les entreprises participantes, le partenariat Akcros, CECA, Chemson, Ciba et Faci, sont également convenues de nouveaux prix indicatifs à appliquer à partir des mois de juin et de juillet 1998.

189    Onzièmement, concernant la réunion AC-Treuhand qui s’est tenue à Lugano le 20 juillet 1998, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a fait valoir, au considérant 284 de la décision attaquée, des notes manuscrites et contemporaines de cette réunion rédigées par un collaborateur de CECA ainsi que des notes manuscrites et contemporaines de cette réunion rédigées par un collaborateur de Ciba/Chemtura.

190    Il ressort des notes rédigées par un collaborateur de CECA que les entreprises participantes ont discuté des volumes de vente et des prix, de même qu’elles sont convenues de nouveaux quotas et de nouveaux prix indicatifs et minimaux, ces notes contenant la mention « directive : 1,95 aujourd’hui (pas de baisse) ».

191    Les notes rédigées par un collaborateur de Ciba/Chemtura contiennent une mention de la même teneur, à savoir : « pas de réduction de prix ! Objectif : 1,95 DM ».

192    Douzièmement, pour ce qui est de la réunion AC-Treuhand du 14 août 1998, à laquelle des représentants du partenariat Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba/Chemtura et de Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a fait valoir, au considérant 285 de la décision attaquée, des notes manuscrites et contemporaines rédigées à l’occasion de cette réunion faisant état d’échanges d’informations sur les prix pratiqués à certains clients et sur des objectifs de prix dans certains pays de l’EEE.

 Sur la troisième période infractionnelle

193    Dans la décision attaquée, la Commission a considéré que, pour la troisième période infractionnelle, c’est-à-dire la période allant du 2 octobre 1998 au 21 mars 2000, pour l’infraction portant sur les stabilisants étain, et du 2 octobre 1998 au 22 mars 2000, pour l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, les infractions avaient été commises par Akcros (voir considérants 582 à 587 de la décision attaquée).

194    Or, les requérantes soutiennent que la Commission n’a pas, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des infractions durant les années 1999 et 2000.

195    Dès lors que, à ce stade de l’appréciation du Tribunal, il a été considéré, aux points 170 à 172 du présent arrêt, concernant les stabilisants étain, et aux points 181 à 192 du présent arrêt, concernant le secteur ESBO/esters, que la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, que le partenariat Akcros avait participé aux infractions en cause pour la partie de l’année 1998 comprise dans la deuxième période infractionnelle, l’examen du Tribunal sera limité aux années 1999 et 2000 pour ce qui est de la troisième période infractionnelle.

196    Aux fins d’établir l’existence des infractions durant les années 1999 et 2000, la Commission a fait état de différents éléments aux considérants 299 à 323 de la décision attaquée pour ce qui est de l’infraction portant sur les stabilisants étain et de celle portant sur le secteur ESBO/esters.

–       Sur l’infraction portant sur les stabilisants étain

197    Premièrement, pour ce qui est de l’année 1998, deux réunions AC-Treuhand ont eu lieu à Zurich et à Lugano les 12 et 13 novembre (considérant 270 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions de représentants du partenariat Akcros, de Baerlocher, de CECA, de Reagens et de Ciba.

198    Deuxièmement, la Commission a fait valoir des notes manuscrites fournies par Ciba dans le cadre de sa coopération administrative avec la Commission, datées du 13 novembre 1998, rédigées à l’occasion d’une réunion AC-Treuhand de cette même date, à laquelle des représentants d’Akcros, de Baerlocher, de CECA et de Reagens ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, et faisant état d’un accord des participants sur des nouveaux prix indicatifs et des prix minimaux pour les marchés européens (considérant 277 de la décision attaquée).

199    Troisièmement, pour ce qui est de l’année 1999, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence de neuf réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu à Zurich et à Lugano, les 22 et 23 février, les 26 et 27 avril, les 19 et 20 juillet, le 23 septembre et les 29 et 30 novembre (considérant 299 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions d’Akcros, de Baerlocher, de CECA, de Reagens et de Chemtura.

200    Quatrièmement, la Commission a rapporté le contenu d’un courriel d’Akcros du 19 février 1999 dont ressort l’existence d’engagements sur les prix de la part des fournisseurs de stabilisants étain (considérant 300 de la décision attaquée).

201    Cinquièmement, la Commission a fait valoir des notes manuscrites fournies par Ciba dans le cadre de sa coopération avec la Commission et rédigées à l’occasion d’une réunion AC-Treuhand du 23 février 1999, à laquelle Akcros, Baerlocher, CECA, Chemtura et Reagens ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, et faisant état d’une adhésion des participants à une hausse sur les prix pour certains clients (considérant 301 de la décision attaquée).

202    Sixièmement, selon un rapport de Chemtura pour le mois d’août, daté du 16 septembre 1999, les concurrents de cette entreprise suivaient l’augmentation de ses prix, même si une entreprise avait des difficultés « à respecter une discipline des prix » et que des « actions [étaie]nt en cours pour mettre fin à cette tendance » (considérant 303 de la décision attaquée).

203    Septièmement, la Commission a fait état d’un courriel de Chemtura daté du 23 novembre 1999 indiquant une hausse des prix de 8 % en 1999 en Europe de l’Ouest et qu’une hausse de 3 % était attendue au quatrième trimestre (considérant 304 de la décision attaquée).

204    Huitièmement, un rapport mensuel de Chemtura pour le mois de novembre 1999, daté du 17 décembre 1999, a fait état d’une hausse des prix, menée par une entreprise concurrente soutenue par deux autres entreprises concurrentes, n’entrant « pas en vigueur avant le premier trimestre de 2000 » (considérant 304 de la décision attaquée).

205    Neuvièmement, pour ce qui est de l’année 2000, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence de deux réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu à Zurich, les 20 et 21 mars (considérant 316 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions d’Akcros, de Baerlocher, de CECA, de Chemtura et de Reagens.

206    Dixièmement, au considérant 317 de la décision attaquée, la Commission a fait valoir un mémorandum daté du 16 février 2000 et rédigé par un collaborateur d’Akcros pour l’un de ses supérieurs (ci-après le « mémorandum Akcros »), dont il convient de reproduire intégralement les termes, que ne contestent pas les requérantes, ci-après :

« J’ai parlé aux directeurs marketing qui connaissent très bien les marchés UE des stabilisants […] Aujourd’hui nous et la plupart de nos concurrents UE participons à des groupes industriels (un pour l’ESBO et un pour les stabilisants étains) dont l’objectif principal consiste à consolider les informations du marché sous la forme de ventes mensuelles de tonnes. Chaque entreprise membre envoie ces informations à AC-Treuhand, Suisse, qui renvoie les résultats à toutes les entreprises participantes sous la forme de totaux […] Aucune information concurrentielle n’apparaît. Ceci me paraît tout ce qu’il y a de plus régulier et utile. Toutefois, de deux à quatre fois par an, les entreprises membres se rencontrent en Suisse afin de débattre des points d’intérêt commun tels que les perspectives et les tendances du marché, les activités des entreprises non membres et ainsi de suite. Alors que la réunion présidée par AC-Treuhand ne semble pas en soi abusive, l’on m’a rapporté qu’une fois ensemble les concurrents discutaient des niveaux des prix et des clients. C’est pour cette raison que je recommanderais de faire savoir à AC-Treuhand que nous ne participerons plus à ces réunions, mais enverrons nos informations sur nos ventes afin de bénéficier de ce service. Il y a deux ans, la situation de ces groupes était tout à fait différente. Puis les feuilles rouges sont apparues : elles contenaient le procès-verbal des réunions et détaillaient les décisions de groupes, portant sur les hausses de tarifs et la répartition des marchés. L’on y parlait également de clients spécifiques. Ces procès-verbaux n’étaient pas distribués, mais conservés dans des dossiers AC-Treuhand, en ‘sécurité’, puisque la Suisse n’était pas membre de l’UE. En 1996 ou 1997, ce genre de réunion n’a plus eu lieu, vraisemblablement à cause des pressions accrues pour ne pas exercer de telles activités, en raison d’une application plus rigoureuse des lois. Plus d’un membre du groupe étain a exercé une pression sur notre représentant pour revenir à la situation où la fixation des prix et la répartition du marché étaient régulièrement convenues lors de ces réunions AC-Treuhand. Baerlocher exerce la plus forte pression sur nous ainsi que sur d’autres membres qui ne sont pas en faveur d’un tel accord. Ils parlent plus particulièrement de ‘geler’ les parts de marchés, mais si un membre augmente sa part en prenant un client, il devrait céder un autre client pour retrouver l’équilibre. Cela serait confirmé par des vérifications mensuelles des quotas. Nous n’accepterons plus de participer à de telles activités abusives, et ceci est une raison supplémentaire pour laquelle nous devrions nous retirer de ces réunions […] En résumé, il y a eu apparemment des réunions/discussions abusives auxquelles a bien participé Akcros. Bien que nous ayons encore probablement des discussions occasionnelles qui pourraient être considérées comme étant inadéquates, nous ne participons plus à ces réunions officielles qui sont clairement inappropriées. Je recommanderais de : 1) notifier à AC-Treuhand que nous n’assisterons plus aux réunions en Suisse pour les groupes étain et [ESBO/esters], même si nous continuons à envoyer nos données de vente comme auparavant ; 2) organiser une formation de sensibilisation […] pour nos directeurs marketing (et autres) afin qu’ils connaissent clairement les limites à ne pas franchir dans le cadre des contacts avec les concurrents. Veuillez me faire savoir si vous adhérez à ces suggestions. »

207    Onzièmement, pour corroborer son interprétation du mémorandum Akcros, la Commission a fait valoir, au considérant 318 de la décision attaquée, qu’Akzo Nobel avait reconnu que le mémorandum Akcros avait été précédé de notes manuscrites de l’auteur dudit mémorandum (ci-après les « notes manuscrites Akcros ») dont il ressort, d’une part, que des discussions « non écrites » avaient lieu sur le « niveau des prix », « devant être augmenté[s] » ou « soutenu[s] » ainsi que sur « certains clients » et, d’autre part, que les réunions avaient lieu en « Suisse, non membre de l’UE », car ne pouvant « pas faire l’objet de visites surprises ».

208    Douzièmement, la Commission a fait observer que, dans le prolongement du mémorandum Akcros, le représentant d’Akcros a fait savoir, dans le cadre d’une réunion AC-Treuhand du 21 mars 2000, à Zurich, qu’elle ne participerait plus aux réunions AC-Treuhand, « tout en continuant à échanger des données sur les ventes » (considérant 319 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

209    Treizièmement, la Commission a souligné qu’Akcros avait confirmé, par courrier du 5 juin 2000 adressé à M. S. d’AC-Treuhand, qu’elle ne participerait plus aux réunions AC-Treuhand (considérant 321 de la décision attaquée), ce que ne conteste pas les requérantes.

210    Quatorzièmement, la Commission a fait valoir des déclarations effectuées par Chemtura dans le cadre de sa coopération avec elle durant la procédure administrative, faisant état de la continuation de l’entente portant sur les stabilisants étain « jusqu’en 2000 » [considérant 420, sous a), de la décision attaquée].

–       Sur l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters

211    Premièrement, pour ce qui est de la réunion AC-Treuhand du 20 octobre 1998, à laquelle Akcros, CECA, Chemson, Ciba/Chemtura et Faci ont participé, ce que ne contestent pas les requérantes, la Commission a fait valoir, au considérant 287 de la décision attaquée, des notes manuscrites et contemporaines rédigées à l’occasion de cette réunion par un collaborateur de Ciba.

212    Ces notes contiennent un tableau présentant la répartition des clients entre les entreprises participantes, Akcros, CECA, Chemson, Ciba/Chemtura et Faci, et les prix appliqués à chacun d’eux.

213    Deuxièmement, la Commission a fait valoir, au considérant 290 de la décision attaquée, des notes manuscrites d’une collaboratrice d’Arkema du 24 novembre 1998, faisant état d’écarts des volumes des ventes en octobre 1998 pour Akcros, pour CECA, pour Chemson, pour Ciba/Chemtura et pour Faci.

214    Troisièmement, la Commission a fait valoir, au considérant 291 de la décision attaquée, des notes d’un collaborateur de CECA également datées du 24 novembre 1998, faisant état des parts de marché d’Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba/Chemtura et de Faci.

215    Quatrièmement, la Commission a fait valoir, au considérant 293 de la décision attaquée, des notes d’un autre collaborateur de CECA datées du 25 novembre 1998, faisant état des niveaux des ventes mensuelles d’Akcros, de CECA, de Chemson, de Ciba et de Faci, ainsi que des écarts par rapport aux « quotas » convenus entre ces entreprises

216    Cinquièmement, pour ce qui est de l’année 1999, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence de huit réunions AC-Treuhand, qui ont eu lieu les 25 et 26 janvier, les 26 et 27 mai, les 28 et 29 septembre et les 14 et 15 décembre (considérant 305 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions d’Akcros, de CECA, de Chemson, de Chemtura et de Faci.

217    Sixièmement, la Commission a fait état, au considérant 306 de la décision attaquée, de notes fournies par Ciba et prises à l’occasion de la réunion AC-Treuhand du 26 janvier 1999, faisant état d’échanges d’informations commerciales sensibles, concernant les quantités vendues et les clients, entre les entreprises participantes, à savoir Akcros, CECA, Chemson, Chemtura et Faci.

218    Septièmement, la Commission a fait état, au considérant 307 de la décision attaquée, de notes fournies par Ciba et prises à l’occasion de la réunion AC-Treuhand du 27 mai 1999, faisant état d’échanges d’informations commerciales sensibles, concernant les prix appliqués aux clients dans certains pays de l’EEE, entre les entreprises participantes, à savoir Akcros, CECA, Chemson, Chemtura et Faci.

219    Huitièmement, la Commission a souligné que le rapport mensuel de Chemtura pour le mois d’août 1999, daté du 16 septembre 1999, indiquait que des entreprises étaient parvenues « à une augmentation de prix d’environ 10 % pour [le secteur ESBO/esters] effective en octobre » (considérant 308 de la décision attaquée).

220    Neuxièmement, la Commission a rapporté des notes manuscrites fournies par Arkema et rendant compte d’une réunion AC-Treuhand du 29 septembre 1999, à laquelle Akcros, CECA, Chemson, Chemtura et Faci ont participé (considérant 309 de la décision attaquée), ce que les requérantes ne contestent pas.

221    Lesdites notes font état d’un accord sur les prix par la mention « oct. min. 1,9 nov. 2,0 DM ».

222    Dixièmement, pour ce qui est de l’année 2000, la Commission a établi, dans la décision attaquée, l’existence, notamment, de deux réunions AC-Treuhand qui ont eu lieu les 21 et 22 mars (considérant 316 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes, pas plus que la participation à ces réunions d’Akcros, de CECA, de Chemson, de Faci et de Chemtura.

223    Onzièmement, la Commission a fait valoir le mémorandum Akcros, dont le contenu a été reproduit au point 211 ci-dessus.

224    Douzièmement, la Commission a également fait valoir les notes manuscrites Akcros, dont il a été fait état au point 211 ci-dessus.

225    Treizièmement, la Commission a fait valoir que, dans le prolongement du mémorandum Akcros, le représentant d’Akcros a fait savoir, dans le cadre d’une réunion AC-Treuhand du 22 mars 2000 à Zurich, que ladite société ne participerait plus aux réunions AC-Treuhand (considérant 320 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

226    Quatorzièmement, la Commission a également précisé qu’Akcros avait confirmé, par courrier du 5 juin 2000, son intention de ne plus participer aux réunions AC-Treuhand (considérant 321 de la décision attaquée), ce que ne contestent pas les requérantes.

227    Quinzièmement, la Commission a également fait valoir des déclarations effectuées par Chemtura, dans le cadre de sa coopération avec elle durant la procédure administrative, faisant état de la continuation de l’entente sur le secteur ESBO/esters « jusqu’en 2001 » [considérant 420, sous b), de la décision attaquée].

b)     Appréciation du Tribunal

 Appréciation d’ensemble

228    Eu égard à ces éléments, pris ensemble, le Tribunal estime que la Commission a établi la participation du partenariat Akcros et, par la suite, d’Akcros, au cours des deuxième et troisième périodes infractionnelles. En effet, elle a fourni des éléments de preuve propres à démontrer, à suffisance de droit, l’existence des faits constitutifs de l’infraction portant sur les stabilisants étain et de celle portant sur le secteur ESBO/esters sur l’ensemble de ces périodes durant des réunions auxquelles des représentants du partenariat Akcros et, par la suite, d’Akcros ont participé, et ce jusqu’à ce qu’Akcros s’en distancie. La Commission a ainsi fait état, dans la décision attaquée, de preuves suffisantes pour fonder la ferme conviction que le partenariat Akcros et, par la suite, Akcros ont participé à l’infraction portant sur les stabilisants étain et à celle portant sur le secteur ESBO/esters durant les deuxième et troisièmes périodes infractionnelles.

229    En effet, considérés ensemble, les différents éléments rapportés aux points 162 à 172 et 197 à 210 ci-dessus, concernant les stabilisants étain, et aux points 173 à 192 et 211 à 227 ci-dessus, concernant le secteur ESBO/esters, établissent, à suffisance de droit, que, durant les deuxième et troisièmes périodes infractionnelles, les entreprises participantes aux réunions AC-Treuhand sont convenues de la fixation de prix et de la répartition des clients sous la forme de quotas, de même que de l’échange d’informations commercialement sensibles.

230    Lesdits éléments démontrent clairement que les réunions auxquelles le partenariat Akcros, puis, Akcros ont participé avaient pour objet la fixation de prix et la répartition des clients sous la forme de quotas, notamment pour ce qui était des réunions AC-Treuhand tenues entre 1996 et 2000, du mémorandum Akcros évoquant des discussions sur les prix et des quotas, et des notes manuscrites Akcros mentionnant également des discussions sur les prix et sur les clients.

231    Il en ressort que les réunions AC-Treuhand ayant eu lieu durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles, pour lesquelles les requérantes admettent la participation de représentants du partenariat Akcros, puis, d’Akcros, n’ont pas pris un tour différent, quant à leur objet anticoncurrentiel, des précédentes durant plusieurs années, alors que les mêmes entreprises et les mêmes personnes se rencontraient dans le même contexte autour de M. S.

232    Par conséquent, il y a lieu de juger que la Commission a fait état, dans la décision attaquée, d’un faisceau d’indices qui, apprécié globalement, fonde la ferme conviction que le partenariat Akcros, puis, Akcros ont participé à l’infraction portant sur les stabilisants étain et à celle portant sur le secteur ESBO/esters durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

233    L’ensemble des considérations qui précèdent ne saurait être remis en cause par les arguments des requérantes.

 Rejet des arguments des requérantes

–       Sur la deuxième période infractionnelle

234    Premièrement, pour établir la fin des infractions en « 1996/1997 » ou, « au plus tard », en 1997, les requérantes produisent plusieurs déclarations assermentées, passées devant notaire, de salariés qui ont principalement participé à leurs activités de production et de vente de stabilisants thermiques au cours des deuxième et troisième périodes infractionnelles.

235    Ces déclarations ne sauraient établir la fin des comportements infractionnels en « 1996/1997 ».

236    En effet, force est de constater, indépendamment de leur contenu dont la similarité terminologique force le soupçon, que ces déclarations émanent de personnes salariées de sociétés contrôlées par les requérantes et qui ont participé aux réunions AC-Treuhand, ou qui ont eu connaissance de celles-ci. Surtout, ces déclarations ont été effectuées in tempore suspecto.

237    Deuxièmement, les requérantes soutiennent que des éléments du dossier contiennent des preuves, émanant d’autres entreprises, de la fin des comportements infractionnels en « 1996/1997 », à savoir des déclarations de Baerlocher dans le cadre de sa coopération administrative avec la Commission et un mémorandum de Reagens du 31 octobre 2007.

238    Ces éléments ne sauraient non plus établir la fin des comportements infractionnels en « 1996/1997 ».

239    En effet, d’une part, Baerlocher, dont les déclarations ne sauraient en tout état de cause concerner que l’infraction portant sur les stabilisants étain et non celle portant sur le secteur ESBO/esters, a elle-même modifié sa position, ainsi que cela ressort du considérant 410 de la décision attaquée.

240    D’autre part, il est constant que le mémorandum de Reagens du 31 octobre 2007, dont la portée doit en tout état de cause être limitée à l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters et non à celle portant sur les stabilisants étain, a été rédigé in tempore suspecto par une entreprise qui a participé directement non pas à l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, bien qu’ayant assisté à certaines réunions en 1997, ainsi qu’il ressort des points 179 et 180 du présent arrêt, mais à celle portant sur les stabilisants étain, ainsi que cela a été établi par le Tribunal (arrêt Reagens/Commission, point 132 supra, EU:T:2014:253, points 122 à 185)

241    Dès lors, ledit mémorandum ne saurait remettre en cause la force probante des éléments, rapportés aux points 173 à 192 et 211 à 227 ci-dessus, concernant le secteur ESBO/esters.

242    Troisièmement, les requérantes font observer que la Commission elle-même a admis, au considérant 412 de la décision attaquée, que la « méthodologie et peut-être même le contenu exact de la collusion au sein d’AC-Treuhand [avaie]nt changé en 1996-1997 ».

243    Cette considération ne saurait non plus établir la fin des comportements infractionnels en « 1996/1997 ».

244    En effet, il ne saurait tout au plus en ressortir que les ententes en cause ont évolué, quant à leurs modalités et quant à leurs participants, ce qui caractérise au demeurant des infractions de très longue durée, comme en l’espèce, le fait que certaines entreprises aient cessé leur participation ne pouvant en tout état de cause établir la fin des comportements infractionnels du partenariat Akcros.

245    Quatrièmement, les requérantes prétendent avoir participé, après « 1996/1997 », aux « réunions régulières d’AC-Treuhand destinées à examiner les statistiques de calage consolidées », ce qui expliquerait les allusions à Akcros dans les procès-verbaux officiels des réunions d’AC-Treuhand dont il ressortirait à l’évidence que les échanges de vues concernaient simplement des questions statistiques.

246    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de relever que les requérantes se sont distanciées de ces réunions le 21 mars 2000, concernant les stabilisants étain, et le 22 mars 2000, concernant le secteur ESBO/esters et qu’elles ont confirmé par écrit adressé à AC-Treuhand leur distanciation le 5 juin 2000.

247    Or, de telles distanciations, en mars et en juin 2000, n’auraient présenté aucun intérêt si les comportements infractionnels avaient cessé « en 1996/1997 » ou, « au plus tard », « en 1997 ».

248    Partant, il y a lieu de considérer que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des comportements infractionnels reprochés au partenariat Akcros durant la deuxième période infractionnelle, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le premier moyen des requérantes, en ce qu’il est tiré d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003 pour ce qui est de la deuxième période infractionnelle.

–       Sur les arguments généraux relatifs aussi bien aux années 1999 que 2000

249    Pour contester les éléments retenus par la Commission dans la décision attaquée afin d’établir l’existence des infractions durant les années 1999 et 2000, d’une part, les requérantes rejettent, en bloc, l’interprétation retenue des procès-verbaux des réunions AC-Treuhand, lesquels ne contiendraient aucun élément à charge, mais seulement la preuve d’échanges de données statistiques.

250    Il suffit de relever que ces procès-verbaux ne figurent pas parmi les éléments de preuve retenus dans le présent arrêt pour vérifier si la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur les stabilisants étain et de celle portant sur le secteur ESBO/esters.

251    D’autre part, les requérantes contestent l’allégation suivant laquelle les notes manuscrites, invoquées dans la décision attaquée ont été prises au cours des réunions AC Treuhand, dès lors que lesdites notes « auraient pu tout aussi bien être prises dans le contexte de ces réunions, par exemple lorsque certains des délégués ou tous les délégués se sont réunis pour dîner la veille ».

252    Cette argumentation ne saurait prospérer en ce qu’elle ne remet en cause ni le caractère contemporain de ces notes par rapport aux réunions AC-Treuhand, ni l’existence des réunions AC-Treuhand, ni leur objet anticoncurrentiel.

–       Sur l’année 1999 pour les stabilisants étain

253    Premièrement, pour ce qui concerne spécifiquement l’année 1999 et les stabilisants étain, les requérantes soutiennent que ni le rapport de Chemtura du 15 novembre 1999, invoqué au considérant 303 de la décision attaquée, ni les notes de Ciba du 27 avril 1999, invoquées au considérant 302 de la décision attaquée, ne figuraient dans la communication des griefs, de sorte que ces éléments de preuve doivent être rejetés comme étant irrecevables.

254    Pour rejeter ces arguments et indépendamment de la question de leur recevabilité, il suffit de relever que ces éléments invoqués par la Commission ne figurent pas parmi les éléments retenus dans le présent arrêt pour considérer que la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur les stabilisants étain au cours de l’année 1999.

255    Deuxièmement, les requérantes soutiennent que le courriel de Chemtura du 23 novembre 1999 et le rapport de Chemtura du 17 décembre 1999, invoqués par la Commission au considérant 304 de la décision attaquée, ne contiennent aucun élément à charge et qu’ils ne mentionnent pas Akcros. De la même manière, elles allèguent que le rapport de Chemtura du 16 septembre 1999, invoqué par la Commission au considérant 303 de la décision attaquée, ne contient aucun élément à charge et qu’il ne mentionne pas Akcros.

256    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de considérer que le rapport de Chemtura du 16 septembre 1999, le courriel de Chemtura du 23 novembre 1999 et le rapport de Chemtura du 17 décembre 1999 portent sur des informations commerciales sensibles et ont été rédigés avant et à la suite des réunions AC-Treuhand auxquelles ces entreprises ont participé, de même qu’Akcros, ce que ne contestent pas les requérantes, et qu’Akcros s’est formellement distanciée des réunions AC-Treuhand en mars 2000, soit quelques mois seulement après la rédaction de ces documents.

257    Troisièmement, les requérantes affirment que les notes de Ciba du 23 février 1999, invoquées par la Commission au considérant 301 de la décision attaquée, n’évoquent qu’un « échange d’éléments d’informations rétrospectif » et que le courriel d’Akcros du 19 février 1999, invoqué par la Commission au considérant 300 de la décision attaquée, « contient simplement une observation objective des évolutions du marché et ne prouve pas la participation des requérantes à l’infraction à ce moment ».

258    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de considérer que le courriel d’Akcros du 19 février 1999 et les notes de Ciba du 23 février 1999 portent sur des informations commerciales sensibles et ont été rédigées dans le prolongement de réunions AC-Treuhand auxquelles ces entreprises ont participé, de même qu’Akcros, ce que ne contestent pas les requérantes.

259    Partant, il y a lieu de considérer que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur les stabilisants étain au cours de l’année 1999.

–       Sur l’année 1999 pour le secteur ESBO/esters

260    Premièrement, pour ce qui concerne spécifiquement l’année 1999 et le secteur ESBO/esters, les requérantes soutiennent que le procès-verbal de la réunion AC-Treuhand du 15 décembre 1999, invoqué par la Commission au considérant 315 de la décision attaquée, ne figurait pas dans la communication des griefs, de sorte que cet élément de preuve doit être rejeté comme étant irrecevable.

261    Pour rejeter cet argument, il suffit de relever que ledit procès-verbal ne figure pas parmi les éléments retenus dans le présent arrêt pour considérer que la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters durant l’année 1999.

262    Deuxièmement, les requérantes contestent l’interprétation retenue par la Commission, aux considérants 312 à 314 de la décision attaquée, des rapports de Chemtura du 12 octobre et du 15 novembre 1999 ainsi que des courriels de Chemtura du 16 septembre et du 23 novembre 1999.

263    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de relever que les éléments de preuve invoqués aux considérants 312 à 314 de la décision attaquée ne figurent pas parmi les éléments retenus dans le présent arrêt pour considérer que la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters durant l’année 1999.

264    Troisièmement, les requérantes nient la force probante des notes Arkema mentionnées au considérant 309 de la décision attaquée ainsi que des éléments retenus au considérant 310 de la décision attaquée.

265    Pour rejeter cette argumentation, d’une part, il suffit de relever que les éléments invoqués au considérant 310 de la décision attaquée ne figurent pas parmi les éléments retenus dans le présent arrêt pour vérifier si la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters durant l’année 1999.

266    D’autre part, il suffit de considérer que les notes Arkema mentionnées au considérant 309 de la décision attaquée portent sur des informations commerciales sensibles et ont été rédigées avant et à la suite des réunions AC-Treuhand auxquelles cette entreprise a participé, de même qu’Akcros, ce que ne contestent pas les requérantes, et qu’Akcros s’est formellement distanciée des réunions AC-Treuhand en mars 2000, soit quelques mois seulement après la rédaction de ces documents.

267    Les mêmes considérations valent mutatis mutandis pour rejeter l’argumentation des requérantes consistant à contester l’interprétation retenue par la Commission, au considérant 308 de la décision attaquée, du rapport de Chemtura du 16 septembre 1999/.

268    Quatrièmement, les requérantes contestent la force probante des notes de Ciba du 27 mai 1999, retenue par la Commission, au considérant 307 de la décision attaquée, en ce que ces notes seraient contradictoires à d’autres éléments retenus dans la décision attaquée.

269    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de considérer que le caractère éventuellement contradictoire de ces notes avec d’autres éléments retenus dans la décision attaquée ne saurait suffire, à lui seul, à remettre en cause la force probante de l’ensemble des éléments retenus dans le présent arrêt pour vérifier si la Commission avait établi l’existence de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters au cours de l’année 1999.

270    Cinquièmement, les requérantes contestent la force probante des notes de Ciba du 26 janvier 1999 en ce que, ainsi que la Commission l’aurait reconnu au considérant 306 de la décision attaquée, ces notes ne rendraient « compte que d’un échange d’éléments d’information rétrospective » et ne seraient pas « révélatrices de la participation des requérantes à un accord de fixation des prix ou d’une répartition de la clientèle ».

271    Pour rejeter cette argumentation, il suffit de considérer que les notes de Ciba du 26 janvier 1999 portent sur des informations commerciales sensibles et ont été rédigées avant et à la suite des réunions AC-Treuhand auxquelles cette entreprise a participé, de même qu’Akcros, ce que ne contestent pas les requérantes.

272    Partant, il y a lieu de considérer que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters au cours de l’année 1999.

–       Sur l’année 2000

273    Premièrement, pour ce qui concerne spécifiquement l’année 2000, les requérantes contestent la force probante du rapport de Chemtura du 6 avril 2000, mentionné au considérant 322 de la décision attaquée.

274    Pour rejeter cet argument, il suffit de relever que ledit rapport ne figure pas parmi les éléments retenus par le Tribunal, pour l’infraction portant sur les stabilisants étain et pour l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, aux fins de vérifier si la Commission avait, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de ces infractions durant la troisième période infractionnelle.

275    Deuxièmement, les requérantes contestent la force probante des éléments retenus par la Commission pour établir la distanciation d’Akcros, invoqués aux considérants 319 à 321 de la décision attaquée.

276    Pour rejeter cet argument, il suffit de relever que c’est précisément sur la base des éléments ayant établi la distanciation d’Akcros que la Commission a établi la fin de la responsabilité des requérantes au titre de la troisième période infractionnelle.

277    En outre, on ne saurait comprendre l’intérêt et la motivation de telles distanciations, en mars et en juin 2000, sinon à considérer que les comportements infractionnels avaient perduré durant la troisième période infractionnelle.

278    Troisièmement, les requérantes contestent l’interprétation retenue par la Commission dans la décision attaquée du mémorandum Akcros et des notes manuscrites Akcros, invoqués aux considérants 317 et 318 de la décision attaquée.

279    Pour rejeter l’argumentation des requérantes, il suffit de relever que l’interprétation retenue par la Commission du mémorandum Akcros et des notes manuscrites Akcros est la seule qui puisse expliquer et justifier les retraits formels des ententes de la part d’Akcros, tout d’abord en mars 2000, puis le 6 juin 2000.

280    Par conséquent, il y a lieu de considérer que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de l’infraction portant sur les stabilisants étain et de celle portant sur le secteur ESBO/esters au cours de l’année 2000.

281    Dès lors, il y a lieu de considérer que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence de ces infractions durant les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

282    Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 25, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 5, du règlement n° 1/2003, en ce qu’il vise les deuxième et troisième périodes infractionnelles.

283    Aussi le premier moyen, tiré de violations des règles de prescription, doit être retenu pour les amendes qui ont été infligées à Akzo GmbH et à Akzo BV pour ce qui est de la première période infractionnelle, mais doit être rejeté pour le surplus.

II –  Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable

284    Dans le cadre du deuxième moyen du recours, tiré d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable, les requérantes, en substance, concluent, à titre principal, à l’annulation de la décision attaquée, et, à titre subsidiaire, à la réformation du montant des amendes qui leur ont été infligées.

A –  Sur le deuxième moyen, en tant qu’il est soulevé aux fins de l’annulation de la décision attaquée

285    Dans le cadre du deuxième moyen du recours, tiré d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable, les requérantes, en substance, concluent, à titre principal, à l’annulation de la décision attaquée, en ce que la Commission a enfreint leurs droits de la défense.

286    Selon les requérantes, même si le Tribunal devait rejeter le premier moyen, tiré de violations des règles de prescription, il conviendrait encore d’annuler la décision attaquée, eu égard à la durée excessivement longue de la procédure administrative qui aurait compromis l’exercice de leurs droits de la défense et constitué une violation du principe de diligence administrative.

1.     Arguments des parties

287    Les requérantes font observer que 56 mois se sont écoulés entre la première mesure d’enquête de la Commission, en février 2003, et la reprise de l’enquête, en octobre 2007, une telle durée s’avérant, pour une enquête d’une durée totale de 74 mois, excessive et injustifiable.

288    En ce sens, elles font valoir, tout d’abord, que la Commission disposait de toutes les informations nécessaires, elles-mêmes ayant reproduit le contenu des documents litigieux en cause dans la procédure judiciaire Akzo dans leur demande de clémence de 2003. Elles allèguent, en outre, que les notes manuscrites, que la Commission invoque au considérant 318 de la décision attaquée, avaient été versées au dossier à compter de la date des inspections de février 2003. En tout état de cause, après le prononcé de l’ordonnance Commission/Akzo et Akcros, point 26 supra (EU:C:2004:566), la Commission était autorisée à avoir un accès sans réserve à tous les documents litigieux.

289    Ensuite, les requérantes soutiennent que rien n’empêchait la Commission de procéder à une appréciation préliminaire de certaines demandes de clémence, notamment de celle de Chemtura et de la leur.

290    Enfin, elles prétendent que les informations contenues dans les documents litigieux n’étaient nullement capitales aux fins de l’appréciation globale de l’affaire ni en ce qui concerne la durée, ni en ce qui concerne les produits, comme la Commission l’aurait observé au considérant 456 de la décision attaquée. Partant, la Commission aurait pu arrêter une décision en l’absence desdits documents. Tout recours couronné de succès contre ladite décision en raison d’une utilisation illégale des documents litigieux, quels qu’ils soient, aurait débouché tout au plus sur un retrait desdits documents du dossier de la Commission, ce qui serait d’autant plus évident que la procédure judiciaire Akzo n’était pas close lorsque la Commission a adopté la décision attaquée.

291    En tout état de cause, les 56 mois de passivité administrative auraient compromis la possibilité des parties requérantes de se défendre, certaines pièces n’étant plus disponibles ou étant devenues inaccessibles. Par ailleurs, les personnes essentielles pour l’enquête de la Commission, notamment pour la première période infractionnelle, auraient nécessairement une mémoire limitée des faits ou n’auraient tout simplement pas pu être retrouvées.

292    En renvoyant aux considérants 451 à 487 de la décision attaquée, la Commission soutient que les requérantes n’ont démontré ni que la Commission n’avait pas poursuivi l’enquête avec diligence, ni qu’elle avait porté atteinte d’une quelconque façon à leurs droits de la défense.

293    En premier lieu, la Commission aurait mené son enquête avec diligence et en rapporte les différentes phases, en soulignant le contenu des différentes décisions prononcées sur les demandes en référé dans le cadre de la procédure judiciaire Akzo.

294    Il en ressortirait clairement que la Commission a été confrontée, dès le début de son enquête, à un recours portant sur plusieurs éléments de preuve importants, qu’elle n’a pas été en mesure de transmettre à d’autres entreprises, s’étant engagée à ne pas le faire auprès de la Cour et du Tribunal. À l’égard des requérantes, la Commission ne pouvait invoquer, en toute sécurité, les documents litigieux tant que la légalité d’une telle mesure était contestée. Dès lors, elle ne pouvait raisonnablement passer à l’étape d’une communication des griefs. De même, tant qu’aucune décision n’avait été prise en ce qui concerne le statut des documents litigieux, la Commission ne pouvait pas apprécier de manière provisoire la demande de clémence des requérantes pour en déterminer l’exactitude et la valeur, comme elle en avait l’obligation avant d’émettre la communication des griefs.

295    La Commission soutient qu’elle ne pouvait pas poursuivre l’enquête avant que le Tribunal ne statue sur les documents litigieux dans le cadre de la procédure judiciaire Akzo, dès lors que ces documents, notamment le mémorandum Akcros, étaient essentiels pour établir la durée des infractions, qu’elle ne pouvait procéder à une appréciation provisoire des demandes de clémence sans s’appuyer sur lesdits documents et qu’elle ne pouvait donc en faire usage à l’encontre des autres parties, de sorte qu’elle ne pouvait, sans lesdits documents, adopter une communication des griefs.

296    En second lieu, la Commission soutient que les requérantes n’ont aucunement établi une violation de leurs droits de la défense du fait de la durée de la procédure administrative.

297    Elle fait tout d’abord observer que les difficultés éprouvées pour localiser les documents et les personnes, ainsi que la question de la fiabilité des souvenirs de ces personnes, sont les traits habituels d’une entente de longue durée, comportant un renouvellement important des personnes et une identification des preuves qui s’étend sur de nombreuses années. La Commission précise que, dès lors que les requérantes avaient connaissance de l’enquête en mars 2003 et aussi du fait que celle-ci devait être suspendue en attendant l’issue de la procédure judiciaire Akzo, elles auraient pu agir de manière à préserver leurs éléments de preuve.

298    La Commission souligne ensuite que les requérantes font état de documents devenus inaccessibles, sans toutefois établir une violation de leurs droits de la défense en résultant.

299    Elle prétend enfin que les requérantes n’ont pas démontré avoir fait des tentatives répétées et sérieuses pour contacter les personnes en question.

2.     Appréciation du Tribunal

300    Dans le cadre du deuxième moyen du recours, les requérantes soutiennent, à titre principal, qu’une violation par la Commission des principes de diligence et de respect d’un délai raisonnable a affecté l’exercice de leurs droits de la défense, de sorte que la décision attaquée doit être annulée.

a)     Rappel de la jurisprudence pertinente

301    À cet égard, il convient de rappeler, tout d’abord, que le respect d’un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de concurrence constitue un principe général du droit de l’Union (voir arrêt du 21 septembre 2006, Technische Unie/Commission, C‑113/04 P, Rec, EU:C:2006:593, point 40 et jurisprudence citée).

302    Il faut ensuite rappeler que le caractère raisonnable d’un délai donné ne saurait être examiné par référence à une limite maximale précise, déterminée de manière abstraite, mais doit être apprécié dans chaque espèce en fonction des circonstances de la cause (arrêt du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, Rec, EU:C:2002:582, point 192).

303    En outre, il y a lieu de rappeler que, même s’il est constaté que la Commission a dépassé le délai raisonnable, cela peut uniquement constituer un motif d’annulation d’une décision constatant des infractions des règles de concurrence, dès lors qu’il a été établi que le manquement de la Commission a porté atteinte aux droits de la défense des entreprises concernées (voir arrêt du 16 décembre 2003, Nederlandse Federatieve Vereniging voor de Groothandel op Elektrotechnisch Gebied et Technische Unie/Commission, T‑5/00 et T‑6/00, Rec, EU:T:2003:342, point 74 et jurisprudence citée).

304    Il convient enfin de rappeler que la charge de la preuve d’une éventuelle violation des droits de la défense, résultant de ce qu’une entreprise aurait éprouvé des difficultés pour se défendre contre les allégations de la Commission, en conséquence de la durée excessive de la procédure administrative, incombe à l’intéressée (voir arrêt du 31 mars 2009, ArcelorMittal Luxembourg e.a./Commission, T‑405/06, Rec, EU:T:2009:90, point 167 et jurisprudence citée).

305    Il appartient donc à l’entreprise concernée de démontrer à suffisance de droit qu’elle a éprouvé des difficultés pour se défendre, en conséquence de la durée de la procédure administrative, en indiquant les griefs spécifiques constatés par la Commission dans la décision qui auraient pu être réfutés (voir, en ce sens, arrêt Technische Unie/Commission, point 301 supra, EU:C:2006:593, points 61 et 64).

b)     Appréciation

306    En l’espèce, force est de constater que la Commission ne conteste pas la durée excessivement longue de la procédure administrative, ayant elle-même réduit, dans la décision attaquée, le montant des amendes infligées à toutes les entreprises impliquées, à l’exception des requérantes.

307    La Commission soutient toutefois que la durée de la procédure administrative résulte de la procédure judiciaire Akzo, de sorte que ne saurait lui être reproché un défaut de diligence administrative.

308    De plus, pour rejeter le moyen que les requérantes tirent d’une violation du principe du respect d’un délai raisonnable aux fins de l’annulation de la décision attaquée, la Commission soutient que les requérantes n’ont, en tout état de cause, pas établi l’existence d’une violation de leurs droits de la défense.

309    Aussi, pour apprécier le deuxième moyen du recours tiré d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable en ce qu’il tend à l’annulation de la décision attaquée, suffit-il de limiter l’appréciation du Tribunal à la question de savoir si les requérantes ont établi une violation de leurs droits de la défense du fait de la durée excessivement longue de la procédure administrative.

310    En effet, quand bien même il aurait été retenu que la Commission a enfreint les principes du délai raisonnable ou de diligence administrative et que ces manquements lui étaient imputables, la décision attaquée ne saurait être annulée que s’il était établi que les droits de la défense des requérantes ont effectivement été violés du fait même de cette durée excessive.

311    Or, sur cette question, les requérantes se contentent, en substance, de soutenir, sans preuve à l’appui, qu’elles auraient été en mesure de réfuter les preuves retenues par la Commission pour établir, d’une part, l’existence des infractions et, d’autre part, le contrôle de sociétés mères sur les filiales auteurs directs des infractions.

312    Or, il ressort de l’examen du premier moyen, tiré de violations des règles de prescription, que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des infractions.

313    À cet égard, les requérantes n’ont pas contesté leur participation aux réunions AC-Treuhand durant les trois périodes infractionnelles et la Commission a établi, à suffisance de droit, l’objet anticoncurrentiel desdites réunions, de sorte que l’on ne voit pas comment les requérantes auraient pu mieux vérifier si des débats anticoncurrentiels avaient eu lieu en présence de témoins essentiels, ni contester les interprétations, de la part de la Commission, des notes manuscrites sur lesquelles elle s’est appuyée ou encore de proposer des explications alternatives en ce qui concerne les éléments de preuve invoqués par la Commission.

314    D’autre part, pour ce qui est des éléments de fait que les requérantes auraient pu « recueillir afin de réfuter la présomption de responsabilité de la société mère », force est de constater que les requérantes se contentent de faire valoir le décès d’un membre du conseil de direction d’Akcros.

315    À cet égard, il convient de rappeler que le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre administration des preuves et le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité (arrêt Salzgitter Mannesmann/Commission, C-411/04 P, EU:C:2007:54, point 45).

316    Or, s’agissant plus précisément de la preuve testimoniale, il a déjà été jugé que ce mode de preuve ne joue qu’un rôle secondaire dans le cadre de la phase administrative d’enquête devant la Commission (arrêt Salzgitter Mannesmann/Commission, C-411/04 P, EU:C:2007:54, point 42).

317    Par conséquent, il convient de souligner que, en l’absence de possibilité de recueillir tout témoignage sous serment au cours de la phase administrative d’enquête et que, dans l’éventualité où le membre du conseil de direction d’Akcros aurait souhaité témoigner, ledit témoignage aurait eu une valeur probante moindre, de sorte qu’il n’aurait pu servir à réfuter efficacement les preuves à charge dont disposait la Commission et dont elle a fait état dans la décision attaquée.

318    Partant, il y a lieu de rejeter le moyen que les requérantes tirent d’une violation des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable aux fins de l’annulation de la décision attaquée.

B –  Sur le deuxième moyen, en tant qu’il est soulevé aux fins de la réformation de la décision attaquée

319    Dans le cadre du deuxième moyen du recours, tiré de violations des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable, les requérantes concluent, à titre subsidiaire, à la réformation de la décision attaquée, c’est-à-dire à une réduction du montant des amendes qui leur ont été infligées.

1.     Arguments des parties

320    Les requérantes estiment que, même si le Tribunal jugeait que les violations des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable n’ont pas généré une violation de leurs droits de la défense, de sorte que ce moyen ne saurait justifier l’annulation intégrale de la décision attaquée, le Tribunal devrait prendre en compte lesdites violations et réduire sensiblement, dans l’exercice de ses pouvoirs de pleine juridiction, le montant des amendes infligées ou pour le moins les réduire de 1 %, à l’instar de ce à quoi a procédé la Commission dans la décision attaquée pour toutes les autres entreprises.

321    En ce sens, elles soutiennent que, en ne leur ayant pas accordé une réduction de 1 %, en violation du principe d’égalité de traitement, la Commission semble les avoir sanctionnées, de manière discriminatoire, pour avoir fait valoir leurs droits dans le cadre de la procédure judiciaire Akzo, ce qui serait contraire au principe de protection juridictionnelle effective et dissuaderait les entreprises impliquées dans d’autres affaires de faire valoir tout autant leurs droits.

322    La Commission soutient que les réductions appliquées ont constitué une mesure de compensation pour les autres entreprises, qui avaient dû attendre l’issue de la procédure judiciaire Akzo, lesquelles étaient dans une situation différente de celles des requérantes, en ce que ces dernières avaient provoqué la procédure judiciaire Akzo. En outre, d’un point de vue pratique, il ne serait manifestement pas plausible de laisser entendre que le fait de ne pas accorder une réduction exceptionnelle de 1 % du montant de la sanction infligée aux requérantes en l’espèce aurait un quelconque effet dissuasif sur la volonté d’autres parties requérantes, confrontées à la même situation, d’exercer leurs droits dans d’autres affaires.

2.     Appréciation du Tribunal

323    Dans le cadre du deuxième moyen du recours, tiré de violations des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable, les requérantes concluent, à titre subsidiaire, à la réformation de la décision attaquée, c’est-à-dire à une réduction du montant des amendes qui leur ont été infligées.

324    À cet égard, il convient de rappeler que, à défaut de violation des droits de la défense du fait de la durée de la procédure administrative, une violation du principe du respect d’un délai raisonnable peut amener le Tribunal à réduire le montant des amendes infligées dans l’exercice de ses pouvoirs de pleine juridiction (arrêt du 6 février 2014, AC-Treuhand/Commission, T–27/10, Rec, sous pourvoi, EU:T:2014:59, point 278).

325    En l’espèce, force est de constater que la Commission ne conteste pas la durée excessivement longue de la procédure administrative, ayant elle-même réduit, dans la décision attaquée, le montant des amendes infligées à toutes les entreprises impliquées, à l’exception des requérantes.

326    Pour justifier cette différence de traitement, la Commission avance une différence des situations objectivement comparables, en ce que, contrairement aux autres entreprises, ce sont les requérantes qui ont généré la procédure judiciaire Akzo.

327    Cette justification ne saurait être acceptée.

328    En effet, indépendamment de la question de savoir si d’autres entreprises seraient dissuadées de faire valoir judiciairement leurs droits alors qu’elles sont impliquées dans une enquête de la Commission pour violation des règles de la concurrence, l’argumentation de la Commission s’avère incompatible avec le principe de protection juridictionnelle effective.

329    Par conséquent, en ayant accordé à toutes les autres entreprises impliquées une réduction du montant des amendes infligées du fait de la durée de la procédure administrative, mais non aux requérantes du seul fait de la procédure judiciaire Akzo, ainsi que cela ressort des considérants 771 et 772 de la décision attaquée, la Commission a entaché ladite décision d’une inégalité de traitement injustifiée.

330    Dès lors, dans l’exercice de ses pouvoirs de pleine juridiction, le Tribunal estime que le montant des amendes infligées aux requérantes doit être réduit de 1 %.

331    Partant, le montant total des amendes infligées à l’article 2, points 1 à 7 et 18 à 24, soit 40,6 millions d’euros pour Akzo Nobel et 12,002 millions d’euros pour Akcros, est réduit à 40,194 millions d’euros pour Akzo Nobel et à 11,881980 millions d’euros pour Akcros.

III –  Sur le troisième moyen, tiré de violations des droits de la défense

332    Dans le cadre du troisième moyen du recours, les requérantes invoquent, indépendamment du deuxième moyen tiré de violations des principes de diligence administrative et de respect d’un délai raisonnable, des violations de leurs droits de la défense.

333    En substance, le troisième moyen est composé de deux branches.

334    Par une première branche, les requérantes soutiennent que la Commission a, en violation de leurs droits de la défense, refusé de leur communiquer des éléments à décharge du dossier et, par une seconde branche, que la Commission a fait état, dans la décision attaquée, d’éléments à charge non mentionnés dans la communication des griefs.

A –  Arguments des parties

1.     Sur la première branche, tirée d’un refus de communication d’éléments à décharge

335    Les requérantes prétendent avoir demandé, avant la publication de la décision attaquée, à avoir accès aux réponses de tiers à la communication des griefs, lorsqu’il est apparu clairement, au cours de l’audition, qu’un grand nombre des autres parties avaient étayé leur conclusion suivant laquelle l’infraction avait cessé en 1996/1997. Il était donc de l’intérêt de la défense des requérantes de prendre connaissance de ces réponses, notamment concernant une déclaration de M. S., un ancien collaborateur d’AC-Treuhand. Or, nonobstant plusieurs demandes, les requérantes n’auraient jamais pu prendre connaissance de cette déclaration.

336    Elles demandent également au Tribunal d’ordonner la production de la déclaration de M. S.

337    La Commission soutient que les requérantes font état de manière générale et spéculative de la nature potentiellement à décharge des réponses des autres parties à la communication des griefs, alors que les seuls éléments nouveaux devant être communiqués sont ceux dont la nature clairement à charge ou à décharge est établie.

338    En tout état de cause, il serait inadéquat de considérer les pièces en question comme à décharge, dès lors que les déclarations faites à la Commission par des parties ne sauraient disculper une autre partie du simple fait qu’elles avancent les mêmes arguments que cette dernière.

339    Au surplus, les pièces en question ne seraient pas des éléments constitutifs du dossier d’enquête de la Commission, étant donné qu’elles lui ont été transmises après la communication des griefs.

340    En tout état de cause, les requérantes n’auraient pas démontré en quoi l’accès aux pièces en question aurait pu modifier l’issue de la procédure administrative.

341    Enfin, la déclaration de M. S. serait vague, générale et ne serait étayée par aucune pièce contemporaine des faits, cette déclaration datant du 23 mai 2009. Elle ne relèverait par conséquent que de la simple allégation et n’aurait pu aider les parties requérantes à se disculper. En tout état de cause, l’essentiel du contenu de cette déclaration aurait été distribué à tous les participants d’une audition, y compris aux requérantes, et leur était donc connu.

2.     Sur la seconde branche, tirée d’éléments à charge retenus dans la décision attaquée, mais non mentionnés dans la communication des griefs

342    Selon les requérantes, la Commission évoque, dans la décision attaquée, plusieurs documents auxquels elle n’a pas fait allusion dans la communication des griefs.

343    Il s’agirait, en particulier, d’une déclaration de Baerlocher, en réponse à la communication des griefs, modifiant sa position quant à la date de cessation de l’infraction.

344    La Commission conteste que les requérantes n’aient pas pu prendre position sur les déclarations de Baerlocher.

B –  Appréciation du Tribunal

345    Dans le cadre du troisième moyen du recours, les requérantes invoquent des violations de leurs droits de la défense, en ce que, dans le cadre d’une première branche, la Commission a refusé de leur communiquer des éléments à décharge du dossier et, dans le cadre d’une seconde branche, la Commission a fait état, dans la décision attaquée, d’éléments à charge non mentionnés dans la communication des griefs.

1.     Rappel de la jurisprudence pertinente

346    À cet égard, il convient de rappeler, tout d’abord, que les droits de la défense sont des droits fondamentaux faisant partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect (voir arrêt du 25 octobre 2011, Solvay/Commission, C‑110/10 P, Rec, EU:C:2011:687, point 47 et jurisprudence citée).

347    Le respect des droits de la défense dans une procédure suivie devant la Commission ayant pour objet d’infliger une amende à une entreprise pour violation des règles de concurrence exige que l’entreprise intéressée ait été mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et des circonstances alléguées ainsi que sur les documents retenus par la Commission à l’appui de son allégation de l’existence de l’infraction au traité. Ces droits sont visés à l’article 41, paragraphe 2, sous a) et b), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (voir arrêt Solvay/Commission, point 346 supra, EU:C:2011:687, point 48 et jurisprudence citée).

348    En tant que corollaire des droits de la défense, le droit d’accès au dossier implique que la Commission donne à l’entreprise concernée la possibilité de procéder à un examen de la totalité des documents figurant au dossier d’instruction qui sont susceptibles d’être pertinents pour la défense de cette entreprise. Ceux-ci comprennent tant les pièces à charge que celles à décharge, sous réserve des secrets d’affaires d’autres entreprises, des documents internes de la Commission et d’autres informations confidentielles (voir arrêt Solvay/Commission, point 346 supra, EU:C:2011:687, point 49 et jurisprudence citée).

349    La violation du droit d’accès au dossier au cours de la procédure préalable à l’adoption d’une décision est susceptible, en principe, d’entraîner l’annulation de cette décision lorsqu’il a été porté atteinte aux droits de la défense (voir arrêt Solvay/Commission, point 346 supra, EU:C:2011:687, point 50 et jurisprudence citée).

350    Il convient, ensuite, de rappeler que le simple fait qu’une entreprise, impliquée dans une procédure administrative diligentée pour violation des règles de concurrence, ait avancé, en substance, les mêmes arguments qu’une autre entreprise également impliquée dans ladite procédure quant à l’infraction commise ne saurait constituer un élément à décharge (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2006, Jungbunzlauer/Commission, T‑43/02, Rec, EU:T:2006:270, points 353 et 355).

351    Il y a lieu, enfin, de rappeler que l’absence de communication d’un document ne constitue une violation des droits de la défense que si l’entreprise concernée démontre, d’une part, que la Commission s’est fondée sur ce document pour étayer son grief relatif à l’existence d’une infraction et, d’autre part, que ce grief ne pourrait être prouvé que par référence audit document (arrêt du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec, EU:C:2004:6, point 71).

352    En effet, s’il existait d’autres preuves documentaires dont les parties ont eu connaissance au cours de la procédure administrative qui appuient spécifiquement les conclusions de la Commission, l’élimination en tant que moyen de preuve du document à conviction non communiqué n’infirmerait pas le bien-fondé des griefs retenus dans la décision contestée (arrêt Aalborg Portland e.a./Commission, point 351 supra, EU:C:2004:6, point 72).

353    Il incombe ainsi à l’entreprise concernée de démontrer que le résultat auquel la Commission est parvenue dans sa décision aurait été différent si devait être écarté comme moyen de preuve à charge un document non communiqué sur lequel la Commission s’est fondée pour incriminer cette entreprise (arrêts Aalborg Portland e.a./Commission, point 341 supra, EU:C:2004:6, point 73, et Solvay/Commission, point 351 supra, EU:C:2011:687, points 51 et 52).

354    C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’apprécier le troisième moyen des requérantes.

2.     Sur les éléments à décharge

355    Par la première branche du troisième moyen du recours, les requérantes soutiennent que la Commission a, en violation de leurs droits de la défense, refusé de leur communiquer des éléments à décharge.

356    Or, en l’espèce, d’une part, force est de constater que, à l’exception de la déclaration de M. S., les requérantes ne précisent pas de quels documents il s’agit, sinon par une référence à leur contenu éventuel quant à la date à laquelle les infractions ont cessé, à savoir, selon les requérantes, « vers 1996/1997 ».

357    D’autre part, il convient de considérer que le rôle essentiel joué par M. S. dans les deux infractions, qui demeure constant, rend plus que suspecte la valeur probante de sa déclaration au soutien des assertions des requérantes en l’espèce.

358    Par conséquent, il convient de rejeter la première branche du troisième moyen du recours, sans qu’il y ait lieu de donner suite à la demande de mesure d’organisation de la procédure sollicitée par les requérantes et consistant à ordonner la production de la déclaration de M. S.

3.     Sur les éléments à charge

359    Par la seconde branche du troisième moyen du recours, les requérantes soutiennent que la Commission a, en violation de leurs droits de la défense, retenu, dans la décision attaquée, des éléments à charge qui ne figuraient pas dans la communication des griefs.

360    Pour rejeter cette seconde branche du troisième moyen, il suffit de rappeler, ainsi que cela a été considéré dans le cadre du présent arrêt, que la Commission a, dans la décision attaquée, établi, à suffisance de droit, l’existence des infractions sur la base d’éléments de preuve auxquels les requérantes ne prétendent pas ne pas avoir eu accès ou sur lesquels elles n’auraient pas été en mesure de faire valoir leur point de vue.

361    Dès lors, il y a lieu de rejeter la seconde branche du troisième moyen, que les requérantes tirent d’une violation des droits de la défense du fait d’un refus de communication d’éléments à charge, et, partant, le troisième moyen dans son ensemble.

IV –  Sur le quatrième moyen, tiré d’erreurs d’imputation des infractions et des amendes

362    Dans le cadre du quatrième moyen du recours, les requérantes invoquent des erreurs d’imputation.

363    En substance, le quatrième moyen est composé de deux branches, la première étant tirée d’erreurs d’imputation des infractions et la seconde d’erreurs d’imputation des amendes.

A –  Sur la première branche, tirée d’erreurs d’imputation des infractions

364    Dans le cadre de la première branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des infractions, les requérantes font valoir des arguments visant, d’une part, la première période infractionnelle et, d’autre part, la deuxième période infractionnelle.

1.     Sur l’imputation des infractions durant la première période infractionnelle

365    Pour la première période infractionnelle, la Commission a considéré, dans la décision attaquée, que des sociétés détenues indirectement par Akzo, devenue Akzo Nobel, avaient participé directement aux infractions, à savoir Akzo GmbH, pour l’infraction portant sur les stabilisants étain, et Akzo BV, pour l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters (considérants 512 à 519 de la décision attaquée).

a)     Arguments des parties

366    Selon les requérantes, pour ce qui est de l’infraction portant sur les stabilisants étain, Akzo GmbH n’a pas produit de stabilisants étain au cours de la première période infractionnelle, la société qui produisait des stabilisants étain, et dans le capital de laquelle la société à laquelle Akzo GmbH a succédé avait une participation, ayant été Tinstab. Or, sa participation dans ce capital entre 1987 et 1993 (tout d’abord de 15 %, puis de 49 % « ultérieurement ») n’était pas suffisante pour qu’elle soit présumée avoir la possibilité d’exercer une influence décisive sur Tinstab et la Commission n’apporterait aucun élément de preuve révélateur de ce qu’elle avait en fait exercé une influence décisive sur Tinstab au cours de la première période infractionnelle. En tout état de cause, Akzo GmbH ne saurait être tenue pour responsable du comportement de Tinstab, cette dernière ayant été une entreprise commune structurelle.

367    Pour ce qui est de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, les requérantes ajoutent que la Commission n’a pas établi la participation directe d’Akzo BV, de sorte que, ipso jure, la responsabilité d’Akzo Nobel ne saurait non plus être retenue.

368    La Commission renvoie aux considérants 524, 525 et 527 de la décision attaquée, en soulignant que les requérantes ne nient pas qu’Akzo GmbH était représentée de manière distincte lors des réunions de l’entente durant la première période infractionnelle et était considérée comme un participant distinct et indépendant de Tinstab.

369    La Commission soutient également que les preuves contemporaines des faits montrent clairement que les représentants d’Akzo BV ont assisté aux réunions de l’entente dans le secteur ESBO/esters (considérant 512 de la première décision attaquée). La Commission était par conséquent fondée à constater qu’Akzo BV avait participé directement à l’infraction pendant la première période infractionnelle.

b)     Appréciation du Tribunal

370    Dans le cadre de la première branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des infractions, les requérantes font valoir, pour ce qui est de la première période infractionnelle, des arguments visant distinctement l’infraction portant sur les stabilisants étain et celle portant sur le secteur ESBO/esters.

 Sur l’infraction portant sur les stabilisants étain

371    Pour ce qui est, durant la première période infractionnelle, de l’infraction portant sur les stabilisants étain, les requérantes soutiennent qu’Akzo GmbH ne produisait pas de stabilisants thermiques, cette activité ayant été confiée à Tinstab, une société qu’elle ne contrôlait pas.

372    Cet argument ne saurait prospérer.

373    En effet, les requérantes ne contestent pas que des représentants d’Akzo GmbH participaient aux réunions AC-Treuhand durant la première période infractionnelle.

374    Elles ne contestent pas non plus que Tinstab était le fournisseur d’Akzo GmbH durant cette période.

375    Elles ne contestent pas enfin qu’Akzo GmbH commercialisait des stabilisants étain durant cette période.

376    Ainsi, l’argument selon lequel Akzo GmbH ne contrôlait pas Tinstab ne saurait valoir, dès lors que la responsabilité d’Akzo GmbH n’a pas été retenue en ce qu’elle aurait contrôlé Tinstab, mais parce qu’elle a elle-même participé à l’infraction, indépendamment de la question de savoir si elle fabriquait ou non des stabilisants étain dès lors qu’il est constant qu’elle en commercialisait.

377    Par conséquent, c’est à juste titre que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé l’infraction portant sur les stabilisants étain durant la première période infractionnelle à Akzo GmbH.

378    Au surplus, il convient, également, de relever que les requérantes ne soutiennent pas que les sociétés auxquelles Akzo Nobel a succédé ne contrôlaient pas Akzo GmbH.

379    Partant, c’est à juste titre que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé l’infraction portant sur les stabilisants étain durant la période infractionnelle à Akzo Nobel.

 Sur l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters

380    Pour ce qui est, durant la première période infractionnelle, de l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters, les requérantes soutiennent que la Commission n’a pas établi la participation directe d’Akzo BV, de sorte que, ipso jure, la responsabilité d’Akzo Nobel ne saurait non plus être retenue.

381    Or, ainsi qu’il ressort des points 146, 149, 150 et 151 du présent arrêt et des considérants 512, 182 et 200 de la décision attaquée, force est de constater que la Commission a établi, à suffisance de droit, que des représentants d’Akzo BV participaient aux réunions AC-Treuhand durant la première période infractionnelle, ce que ne contestent pas les requérantes.

382    Par conséquent, c’est à juste titre que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters durant la période infractionnelle à Akzo BV.

383    Au surplus, il convient, également, de relever que les requérantes ne soutiennent pas que les sociétés auxquelles Akzo Nobel a succédé ne contrôlaient pas Akzo BV.

384    Partant, c’est à juste titre que la Commission a, dans la décision attaquée, imputé l’infraction portant sur le secteur ESBO/esters durant la période infractionnelle à Akzo Nobel.

385    Aussi convient-il de rejeter le quatrième moyen, pris en sa première branche, en ce qu’elle vise la première période infractionnelle.

2.     Sur l’imputation des infractions durant la deuxième période infractionnelle

386    Pour la deuxième période infractionnelle, la Commission a considéré que les infractions avaient été commises par le partenariat Akcros, dont le capital était alors détenu à parts égales par Akzo Nobel et par Elementis (considérants 563 et 564 de la décision attaquée).

a)     Arguments des parties

387    Selon les requérantes, la Commission aurait commis tant des erreurs de droit que des erreurs de fait.

388    En premier lieu, la Commission se fonderait à tort sur l’affaire Avebe (arrêt du 27 septembre 2006, Avebe/Commission, T‑314/01, Rec, EU:T:2006:266) en méconnaissant la distinction fondamentale entre entreprises communes « coopératives », en cause dans l’affaire Avebe, et entreprises communes « structurelles », comme en l’espèce.

389    Elles soulignent que, dans la décision de 1993 sur la concentration, la Commission a approuvé le projet de création du partenariat Akcros en tant qu’entreprise commune structurelle, en considérant que l’« entreprise commune sera[it] indépendante de sa société mère pour son activité commerciale en utilisant ses propres dispositifs de distribution et de commercialisation » et qu’elle « exercera[it] durablement toutes les fonctions d’une entité économique autonome » (décision de 1993 sur la concentration, considérants 9 et 13).

390    Partant, la Commission ne saurait désormais considérer que le partenariat Akcros n’était pas autonome, en méconnaissant au demeurant sa pratique dans d’autres affaires.

391    Au surplus, le raisonnement de la Commission en l’espèce impliquerait qu’« Akzo Nobel et Elementis » constituaient une seule et même entreprise au cours de la deuxième période infractionnelle. Or, si Akzo Nobel et le partenariat Akcros constituaient une seule entreprise et si le partenariat Akcros constituait une entreprise englobant « Harcros/Elementis », « Akzo Nobel et Elementis » devraient être considérées comme une seule entreprise, quod non.

392    En second lieu, la Commission aurait erré, en fait, en imputant la « responsabilité pour Akcros à Pure Chemicals (ultérieurement Akcros Chemicals Ltd), le membre du partenariat au Royaume-Uni au sein d’Akcros » et en se focalisant sur le partenariat du Royaume-Uni.

393    La Commission nie avoir « fondé son raisonnement » sur l’affaire Avebe et renvoie aux considérants 546 à 564 de la décision attaquée, dont il ressortirait qu’elle est parvenue à sa conclusion après une analyse dans les règles des liens juridiques, économiques et organisationnels entre le partenariat Akcros et ses sociétés mères.

394    Ce serait également à tort que les requérantes soutiennent que le caractère de plein exercice du partenariat Akcros exonère ses sociétés mères de toute responsabilité. En effet, si les sociétés mères n’étaient pas tenues pour responsables des actes d’une entreprise commune de plein exercice, elles pourraient échapper à toute responsabilité en choisissant de créer une entreprise sur cette base, indépendamment de l’existence d’un pouvoir de gestion conjoint et d’un contrôle conjoint.

395    La décision de 1993 sur la concentration serait inopérante en l’espèce, dès lors que l’approbation par la Commission d’une concentration n’a assurément pas pour objectif d’accorder l’immunité aux sociétés mères s’agissant des infractions ultérieures à l’article 81 CE commises par l’entreprise commune sous l’influence déterminante de ses sociétés mères.

396    En tout état de cause, la Commission ajoute, en renvoyant aux considérants 546 et suivants de la décision attaquée, qu’Akzo Nobel a exercé une influence déterminante sur le partenariat Akcros avec Elementis.

397    Enfin, la Commission fait valoir, en renvoyant aux considérants 538 et 539 de la décision attaquée, que ce sont les représentants du partenariat Akcros qui ont assisté aux réunions AC-Treuhand et que les profits éventuels tirés de l’entente auraient été réalisés par lui et seraient au final revenus à ses sociétés mères.

398    Dans leur réponse à une question du Tribunal sur l’incidence, dans la présente affaire, de l’arrêt Siemens, point 81 supra (EU:C:2014:256), les requérantes se sont désistées de leur argumentation figurant aux points 102 à 114 de la requête, telle que résumée aux points 387 à 392 du présent arrêt, ce dont le Tribunal a pris acte.

b)     Rappel de la jurisprudence pertinente

399    À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt du 26 septembre 2013, The Dow Chemical Company/Commission, C‑179/12 P, EU:C:2013:605, point 52 et jurisprudence citée).

400    En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, la Commission peut adresser une décision infligeant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêt The Dow Chemical Company/Commission, point 399 supra, EU:C:2013:605, point 53 et jurisprudence citée).

401    La Cour précise qu’il convient de prendre en compte l’ensemble des éléments pertinents relatifs aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent cette filiale à la société mère, lesquels peuvent varier selon les cas et ne sauraient donc faire l’objet d’une énumération exhaustive (voir arrêt The Dow Chemical Company/Commission, point 392 supra, EU:C:2013:605, point 54 et jurisprudence citée).

402    Il importe de rappeler à cet égard que le principe selon lequel il convient de vérifier si la société mère a effectivement exercé une influence déterminante sur sa filiale ne s’applique que lorsque cette dernière n’est pas détenue à 100 % par sa société mère. En effet, selon une jurisprudence constante de la Cour, en cas de détention de la totalité du capital de la filiale, il n’y a plus lieu de procéder à une telle vérification, puisque, dans ce cas, joue la présomption d’influence déterminante de la société mère qu’il incombe à cette dernière de renverser (voir arrêt The Dow Chemical Company/Commission, point 399 supra, EU:C:2013:605, point 56 et jurisprudence citée).

403    Dans le cas où deux sociétés mères détiennent chacune 50 % de l’entreprise commune ayant commis une infraction aux règles du droit de la concurrence, c’est uniquement aux fins de la constatation de la responsabilité pour la participation à l’infraction à ce droit et seulement dans la mesure où la Commission a démontré, sur la base d’un ensemble d’éléments factuels, l’exercice effectif de l’influence déterminante des deux sociétés mères sur l’entreprise commune, que ces trois entités peuvent être considérées comme faisant partie d’une unité économique formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE (voir arrêt The Dow Chemical Company/Commission, point 399 supra, EU:C:2013:605, point 58 et jurisprudence citée).

404    Il incombe en principe à la Commission de démontrer, sur la base d’un ensemble d’éléments factuels, au nombre desquels figure, en particulier, l’éventuel pouvoir de direction de l’une de ces entités à l’égard de l’autre, que la société mère exerce effectivement une influence déterminante sur sa filiale (arrêt The Dow Chemical Company/Commission, point 399 supra, EU:C:2013:605, point 67).

405    C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier la première branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation à Akzo Nobel des infractions commises par le partenariat Akcros durant la deuxième période infractionnelle.

c)     Appréciation du Tribunal

406    Dans le cadre de la première branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des infractions, les requérantes font valoir, pour ce qui est de la deuxième période infractionnelle, que la Commission a erronément imputé à Akzo Nobel les infractions commises par le partenariat Akcros.

407    À cet égard, il convient, d’emblée, de relever que le fait que, dans sa décision de 1993 approuvant le projet de création du partenariat Akcros, la Commission ait pu considérer que l’entreprise commune serait indépendante de sa société mère pour son activité commerciale et exercerait durablement toutes les fonctions d’une entité économique autonome, n’empêchait nullement la Commission de constater par après que les sociétés mères avaient en réalité exercé une influence déterminante sur ledit partenariat. Ainsi, la décision de 1993 dont se prévaut les requérantes ne saurait suffire en elle-même à démontrer que le partenariat Akcros avait agi de façon indépendante.

408    Partant, l’argumentation des requérantes à cet endroit ne saurait prospérer.

409    Les requérantes soutiennent également qu’Akzo Nobel n’a exercé aucune influence déterminante sur le partenariat Akcros.

410    En l’espèce, force est de constater que, durant la deuxième période infractionnelle, Akzo, devenue Akzo Nobel, détenait 50 % des parts du partenariat Akcros.

411    La Commission pouvait donc tout à fait tenir Akzo Nobel pour responsable du comportement du partenariat Akcros eu égard et dans le respect de la jurisprudence rappelée au point 399 ci-dessus.

412    En effet, il ressort clairement des considérants 546 à 564 de la décision attaquée qu’Akzo Nobel exerçait un contrôle, conjoint avec Elementis, sur le partenariat Akcros.

413    Ainsi, aux considérants 554 et 555 de la décision attaquée, la Commission a constaté que le conseil de direction du partenariat Akcros, dont les membres étaient nommés, directement ou indirectement et à parts égales, par Akzo Nobel et par Elementis, prenait les décisions politiques et opérationnelles du partenariat Akcros.

414    Aux considérants 560 et 561 de la décision attaquée, la Commission a souligné que les membres du comité de direction du partenariat Akcros qui avaient été nommés par Akzo Nobel et par Elementis étaient des personnes occupant d’importantes fonctions de gestion au sein d’Akzo Nobel ou d’Elementis.

415    Au considérant 563 de la décision attaquée, la Commission a mis en avant le fait que c’étaient Akzo Nobel et Elementis qui étaient convenues, en 1998, de la cession, par Elementis à Pure Chemicals, une société détenue à 100 % par Akzo Nobel, des parts d’Elementis dans le capital du partenariat Akcros.

416    Cette conclusion ne saurait être infirmée par les arguments que font valoir les requérantes aux seuls points 115 et 116 de la requête, dès lors qu’ils ne remettent pas en cause la démonstration faite par la Commission quant à l’exercice effectif de l’influence déterminante d’Akzo Nobel sur le partenariat Akros conjointement avec Elementis durant la deuxième période infractionnelle.

417    Par conséquent, il y a lieu de rejeter la première branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des infractions, pour ce qui est de la deuxième période infractionnelle, et, partant, la première branche du quatrième moyen dans son ensemble.

B –  Sur la seconde branche, tirée d’erreurs d’imputation des amendes

418    Dans le cadre de la seconde branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des amendes, les requérantes soutiennent que la Commission leur a, dans la décision attaquée, erronément imputé des amendes solidairement avec Elementis.

1.     Arguments des parties

419    Les requérantes soutiennent qu’elles ne peuvent être tenues pour responsables du comportement d’Elementis ou de l’imposition d’amendes pour la deuxième période infractionnelle au cours de laquelle elles détenaient chacune 50 % du capital du partenariat Akcros, la Commission ayant l’obligation de déterminer le montant de l’amende à imputer séparément à chaque entreprise concernée. Les requérantes rejettent donc la thèse de la Commission selon laquelle elles devraient être tenues pour solidairement responsables avec Elementis.

420    La Commission rappelle qu’il a été constaté qu’Akzo Nobel et Elementis avaient chacune exercé une influence déterminante sur Akcros et considère, par conséquent, qu’elles ont été déclarées, à juste titre, solidairement responsables de la participation d’Akcros aux infractions.

421    Les requérantes soutiennent que, dans l’hypothèse où le Tribunal considérerait qu’Akzo Nobel était responsable (en partie) du comportement du partenariat Akcros, la Commission a, en tout état de cause, commis une erreur en déclarant Akzo Nobel solidairement responsable avec Elementis. Les deux groupes de sociétés formeraient des entreprises distinctes ayant exercé un contrôle conjoint sur une entreprise commune de plein exercice pendant cinq ans. Elles seraient donc individuellement responsables pour leurs parts respectives de 50 % dans l’entreprise commune.

422    Il serait incorrect ou injuste que la Commission demande à Akzo Nobel de s’acquitter de la totalité de l’amende si Elementis devenait insolvable ou se trouvait dans l’incapacité d’honorer sa part de l’amende. Cela équivaudrait à un « double comptage » de la responsabilité d’Akzo Nobel. Dès lors qu’elle reconnaît elle-même que les amendes font l’objet d’une division entre les parties, la Commission ne saurait donc générer une incertitude entre les parties quant à l’exécution de la décision attaquée, lorsque le versement des amendes sera demandé, l’objectif ultime de la Commission étant de faire cesser les comportements collusoires, pas de recouvrer les amendes.

2.     Appréciation du Tribunal

423    Dans le cadre de la seconde branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des amendes, les requérantes soutiennent que la Commission leur a, dans la décision attaquée, erronément imputé des amendes solidairement avec Elementis pour la deuxième période infractionnelle, et ce en faisant peser sur elles une obligation de paiement de l’intégralité des amendes dues solidairement par elles et Elementis.

424    Pour rejeter la seconde branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des amendes, d’une part, il suffit de relever qu’il a été considéré, aux points 406 à 417 ci-dessus, que c’était à bon droit que la Commission avait, dans la décision attaquée, imputé à Akzo Nobel et à Elementis l’infraction commise par le partenariat Akcros durant la deuxième période infractionnelle, dès lors que durant ladite période, ces sociétés constituaient une seule et même entreprise, au sens du droit de la concurrence de l’Union.

425    En effet, lorsque plusieurs personnes peuvent être tenues pour personnellement responsables de la participation à une infraction commise par une seule et même entreprise, au sens du droit de la concurrence de l’Union, elles peuvent être considérées comme solidairement responsables de ladite infraction (voir, en ce sens, arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, points 50 et 51).

426    D’autre part, s’il découle de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 que la Commission peut condamner solidairement à une amende plusieurs sociétés, dans la mesure où elles faisaient partie d’une même entreprise, ni le libellé de cette disposition ni l’objectif du mécanisme de solidarité ne permettent de considérer que ce pouvoir de sanction s’étendrait à celui de déterminer les quotes-parts des codébiteurs solidaires dans le cadre de leur relation interne (arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, point 58).

427    Au contraire, l’objectif du mécanisme de solidarité réside dans le fait qu’il constitue un instrument juridique supplémentaire, dont dispose la Commission afin de renforcer l’efficacité de son action en matière de recouvrement des amendes infligées pour des infractions au droit de la concurrence, dès lors que ce mécanisme réduit, pour la Commission en tant que créancier de la dette que représentent ces amendes, le risque d’insolvabilité, ce qui participe à l’objectif de dissuasion qui est généralement poursuivi par le droit de la concurrence (arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, point 59).

428    Or, la détermination, dans la relation interne existant entre codébiteurs solidaires, des quotes-parts de ceux-ci ne vise pas ce double objectif. Il s’agit, en effet, d’un contentieux qui intervient à un stade ultérieur, qui ne présente en principe plus d’intérêt pour la Commission, dans la mesure où la totalité de l’amende lui a été payée par l’un ou par plusieurs desdits codébiteurs (arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, point 60).

429    En outre, ni le règlement n° 1/2003 ni le droit de l’Union en général ne comportent de règles permettant de résoudre un tel contentieux, relatif à la répartition sur le plan interne de la dette au paiement de laquelle les sociétés concernées sont tenues solidairement (arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, point 61).

430    Dans ces conditions, en l’absence de fixation par voie contractuelle des quotes-parts des codébiteurs d’une amende à laquelle ceux-ci ont été condamnés solidairement, il incombe aux juridictions nationales de déterminer ces quotes-parts, dans le respect du droit de l’Union, en faisant application du droit national applicable au litige (arrêt Siemens, point 81 supra, EU:C:2014:256, point 62).

431    Partant, il y a lieu de rejeter la seconde branche du quatrième moyen du recours, tirée d’erreurs d’imputation des amendes, de même que, dans son ensemble, le quatrième moyen du recours, tiré d’erreurs d’imputation.

V –  Sur le cinquième moyen, tiré d’un calcul erroné du montant des amendes

432    Dans le cadre du cinquième moyen du recours, les requérantes soutiennent que la Commission a, dans la décision attaquée, commis des erreurs de calcul du montant des amendes infligées.

A –  Arguments des parties

433    Les requérantes soutiennent que la Commission a, à tort, imputé l’intégralité du chiffre d’affaires d’Akcros à la fois à Akzo Nobel et à Elementis.

434    En application du paragraphe 13 des lignes directrices de 2006, la Commission aurait retenu, pour les requérantes, la valeur des ventes pour 1999, soit 7 900 000 euros pour les stabilisants étain et 10 700 000 euros pour le secteur ESBO/esters (considérant 698 et note en bas de page 789 de la décision attaquée), pour toute la durée des infractions alléguées (considérant 717 de la première décision attaquée).

435    Or, ces valeurs représenteraient les activités commerciales combinées d’Elementis et d’Akzo Nobel au sein d’Akcros, Akzo ayant acquis, en 1998, la moitié du capital du partenariat Akcros détenue par Elementis. Avant 1998, Akzo Nobel n’était propriétaire que de la moitié du capital du partenariat Akcros, de sorte que la Commission aurait dû ajuster la valeur des ventes retenues pour ne pas prendre deux fois en compte le chiffre d’affaires d’Akcros.

436    Partant, la Commission aurait, erronément, calculé le montant de base des amendes pour la deuxième période infractionnelle et, a fortiori, pour la première. En effet, la Commission aurait, pour la première période infractionnelle, condamné séparément les requérantes et Elementis tout en utilisant dans les deux cas le chiffre d’affaires des requérantes pour 1999 [voir article 2, points 4 et 6, de la décision attaquée].

437    Selon les requérantes, la Commission aurait dû procéder, comme dans l’affaire Avebe, dans laquelle elle avait divisé le chiffre d’affaires de la société commune en deux et n’en avait attribué que la moitié à chacune des deux sociétés mères [décision de la Commission du 19 mars 2002 (affaire COMP/36.756 – Sodium Gluconate 1), considérants 383 et 384].

438    La Commission soutient que les amendes sont solidaires et ont, par conséquent, fait l’objet d’une division entre les parties, de sorte qu’il ne pourrait être question de doubles comptages.

439    Pour la première période infractionnelle, la Commission aurait, à juste titre, calculé le montant des amendes en se basant sur les ventes réalisées par l’entreprise pendant le dernier exercice social complet de sa participation, à savoir 1999, conformément au paragraphe 13 des lignes directrices de 2006, période à laquelle les requérantes détenaient l’intégralité d’Akcros.

B –  Appréciation du Tribunal

440    Dans le cadre du cinquième moyen du recours, tiré d’erreurs de calcul du montant des amendes, les requérantes soutiennent, en substance, que la Commission a, à tort, imputé l’intégralité du chiffre d’affaires d’Akcros à la fois à Akzo Nobel et à Elementis.

441    À cet égard, il convient de rappeler que, en application du paragraphe 13 des lignes directrices de 2006, en « vue de déterminer le montant de base de l’amende à infliger, la Commission utilisera la valeur des ventes de biens ou services, réalisées par l’entreprise, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné à l’intérieur du territoire de l’EEE », étant précisé que « la Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation à l’infraction (ci-après ‘la valeur des ventes’) ».

442    En l’espèce, il est constant que la Commission a déterminé le montant de base des amendes en s’appuyant sur la valeur des ventes d’Akcros pour l’année 1999, soit la dernière année complète de la participation des requérantes aux infractions, conformément au paragraphe 13 des lignes directrices de 2006.

443    Il est tout autant constant que, durant la troisième période infractionnelle, Akcros était contrôlée, indirectement, mais à 100 %, par Akzo Nobel.

444    Ainsi, pour ce qui est, tout d’abord, du calcul du montant des amendes pour la troisième période infractionnelle, le cinquième moyen des requérantes, lequel vise les trois périodes infractionnelles, ainsi qu’elles l’ont confirmé dans leur réponse à une question du Tribunal à cet effet, ne saurait prospérer.

445    Pour ce qui est, ensuite, de la première période infractionnelle, force est de constater que les requérantes n’ont nullement fait état ni devant la Commission durant la procédure administrative, ni dans leurs écrits devant le Tribunal, d’une variation sensible du chiffre d’affaires entre cette période et l’année 1999 retenue par la Commission dans la décision attaquée.

446    Pour ce qui est, enfin, de la deuxième période infractionnelle, force est de constater que l’argumentation des requérantes repose sur une prémisse erronée, dès lors que la Commission n’a aucunement doublé la valeur des ventes d’Akcros prise en compte dans la décision attaquée, mais a seulement infligé à Elementis et à Akzo Nobel des amendes solidaires pour le comportement du partenariat Akcros avec lequel la Commission a considéré qu’elles constituaient une entreprise, au sens de l’article 81 CE.

447    En d’autres termes, l’argumentation de la requérante implique que la Commission pourrait demander, une première fois, à Akzo Nobel le paiement des amendes infligées solidairement à Akzo Nobel et à Elementis et, une seconde fois, ce même paiement à Elementis, ce qui serait contraire au mécanisme de solidarité et ce qui ne ressort, en tout état de cause, nullement de la décision attaquée.

448    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le cinquième moyen.

 Sur les dépens

449    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

450    Or, en l’espèce, le Tribunal a fait droit, en partie, aux conclusions des requérantes.

451    Partant et au regard des circonstances de la présente affaire, il y a lieu de décider que la Commission supportera deux cinquièmes des dépens des requérantes et les trois cinquièmes de ses propres dépens. Les requérantes supporteront, quant à elles, les trois cinquièmes de leurs propres dépens et deux cinquièmes des dépens de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      L’article 2, points 4, 6, 21 et 23, de la décision C (2009) 8682 final de la Commission, du 11 novembre 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 CE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38589 – Stabilisants thermiques) est annulé en ce que des amendes ont été infligées à Akzo Nobel Chemicals GmbH et à Akzo Nobel Chemicals BV.

2)      Le montant total des amendes infligées à l’article 2, points 1 à 7 et 18 à 24, de la décision C (2009) 8682 final est réduit à 40,194 millions d’euros pour Akzo Nobel NV et à 11,881980 millions d’euros pour Akcros Chemicals Ltd.

3)      Le recours est rejeté pour le surplus.

4)      La Commission européenne supportera deux cinquièmes des dépens d’Akzo Nobel , d’Akzo Nobel Chemicals GmbH, d’Akzo Nobel Chemicals BV et d’Akcros Chemicals et les trois cinquièmes de ses propres dépens. Akzo Nobel, Akzo Nobel Chemicals GmbH, Akzo Nobel Chemicals BV et Akcros Chemicals supporteront, quant à elles, les trois cinquièmes de leurs propres dépens et deux cinquièmes des dépens de la Commission.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juillet 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.