Language of document : ECLI:EU:C:2021:522

ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)

24 juin 2021 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »

Dans l’affaire C‑219/21 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 1er avril 2021,

Olimp Laboratories sp. z o.o., établie à Dębica (Pologne), représentée par Me M. Kondrat, adwokat,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),

partie défenderesse en première instance,

OmniVision GmbH, établie à Puchheim (Allemagne), représentée par Mes B. Sorg, M. Ringer et D. Wiedemann, Rechtsanwälte,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (chambre d’admission des pourvois),

composée de Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente de la Cour, M. L. Bay Larsen et Mme C. Toader (rapporteure), juges,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la proposition de la juge rapporteure et l’avocate générale, Mme J. Kokott, entendue,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Olimp Laboratories sp. z o.o. demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 27 janvier 2021, Olimp Laboratories/EUIPO – OmniVision (Hydrovision) (T‑817/19, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:41), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 13 septembre 2019 (affaire R 2371/2018-2), relative à une procédure d’opposition entre OmniVision et Olimp Laboratories.

 Sur la demande d’admission du pourvoi

2        En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.

3        Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

4        Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.

5        Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.

6        À l’appui de sa demande d’admission, la requérante fait valoir, en exposant trois arguments, que le pourvoi soulève des questions importantes pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union.

7        Par son premier argument, qui se rapporte au premier moyen de son pourvoi, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), la requérante reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit dans l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

8        Premièrement, la requérante soutient, en se référant aux points 71 à 73 de l’arrêt attaqué, que le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant qu’il existe une similitude entre les marques en cause, notamment en ce qu’il a jugé que la coïncidence dans un élément non distinctif, à savoir l’élément « vision », aboutirait au constat de l’existence d’un risque de confusion. Une telle interprétation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 serait contraire à la jurisprudence de la Cour relative à l’appréciation du risque de confusion, notamment aux arrêts du 12 juin 2019, Hansson (C‑705/17, EU:C:2019:481, point 55), et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO (C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 53), selon lesquels, lorsque la marque antérieure et le signe dont l’enregistrement est demandé coïncident dans un élément faiblement distinctif au regard des produits en cause, l’appréciation globale du risque de confusion aboutit fréquemment au constat de l’absence de ce risque. La requérante, estimant que le Tribunal et la Cour sont parvenus à des conclusions différentes, fait valoir que cette situation est contraire aux principes d’unité, de cohérence et de développement du droit de l’Union et que la Cour devrait guider les juridictions inférieures à cet égard.

9        Deuxièmement, la requérante reproche au Tribunal d’avoir considéré à tort, au point 43 de l’arrêt attaqué, qu’il existe un risque de confusion à l’égard de la partie germanophone du public pertinent, sans tenir compte de ses constatations selon lesquelles les deux éléments verbaux de la marque demandée « hydro » et « vision » sont faiblement distinctifs et l’élément verbal « hylo » de la marque antérieure est distinctif. Selon la requérante, il est impossible que le public pertinent confonde les marques en raison de leur similitude.

10      Troisièmement, la requérante fait valoir que le Tribunal a commis une erreur d’appréciation en jugeant, au point 69 de l’arrêt attaqué, que l’élément figuratif de la marque demandée est faiblement distinctif, voire non distinctif, pour les produits qu’elle désigne, notamment les préparations pour les yeux qui apportent l’humidité à l’œil, en raison de son caractère purement décoratif. À cet égard, elle reproche au Tribunal d’avoir omis d’expliquer la notion de « caractère décoratif » et les raisons pour lesquelles un tel caractère de l’élément graphique le rend non distinctif ainsi que de faire référence à d’autres produits concernés. La requérante soutient que la jurisprudence relative à l’appréciation de la similitude visuelle des marques, devant être considérées chacune dans son ensemble, devrait amener la Cour à conclure que cet élément figuratif de la marque demandée est susceptible de constituer un élément suffisamment distinctif pour exclure la similitude visuelle entre les signes en cause.

11      Par son deuxième argument, qui se rapporte au deuxième moyen de son pourvoi, tiré d’une violation de l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, lu conjointement avec l’article 65 de ce règlement, la requérante reproche au Tribunal d’avoir, aux points 24 à 26 et 59 de l’arrêt attaqué, rejeté les documents concernant le faible caractère distinctif de l’élément « hylo » de la marque antérieure qu’elle avait présentés, au motif que cet argument était avancé pour la première fois devant lui. À cet égard, la requérante se réfère à l’arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO (C‑702/18 P, EU:C:2020:489, points 43, 51 et 52), dans lequel, la Cour aurait, en substance, jugé, d’une part, que les instances de l’EUIPO étant tenues d’examiner le caractère distinctif intrinsèque de la marque antérieure, au besoin d’office, cette question fait partie de l’objet du litige devant la chambre de recours de l’EUIPO, et, d’autre part, qu’il n’était pas exclu que le Tribunal serait parvenu à une conclusion différente dans l’affaire concernée s’il avait considéré comme recevables les arguments présentés devant lui. En effet, la requérante fait valoir que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte des éléments produits par celle-ci, ce qui irait à l’encontre des principes d’unité et de cohérence de la jurisprudence des juridictions de l’Union.

12      Par son troisième argument, qui se rapporte au troisième moyen de son pourvoi, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime et du principe de sécurité juridique, la requérante reproche au Tribunal de s’être écarté de la pratique décisionnelle de l’EUIPO, ce qui aurait une incidence sur l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. En particulier, au vu des nombreuses marques comprenant l’élément « vision » enregistrées par l’EUIPO, ainsi que des nombreuses décisions dans lesquelles ce dernier a rejeté une opposition au motif qu’elle reposait sur des marques ne coïncidant que dans leurs éléments descriptifs, la requérante conclut que selon l’EUIPO, il n’existerait pas de risque de confusion pour de telles marques. À cet égard, elle fait valoir que tant la jurisprudence de la Cour et du Tribunal que la pratique de l’EUIPO sont essentielles pour les demandeurs d’une marque puisqu’elles leur permettent d’anticiper les actions de l’EUIPO et d’évaluer leurs chances de succès lors d’une demande d’enregistrement.

13      À titre liminaire, il convient de relever que c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 30 septembre 2020, Giorgio Armani/EUIPO, C‑240/20 P, non publiée, EU:C:2020:761, point 13 et jurisprudence citée).

14      En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure de la Cour, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut a pour but de limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 26 novembre 2020, Scorify/EUIPO, C‑418/20 P, non publiée, EU:C:2020:968, point 18 et jurisprudence citée).

15      Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser en quoi cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été violée par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la violation de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 15 et jurisprudence citée).

16      En effet, une demande d’admission du pourvoi ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait être, d’emblée, susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnance du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C‑613/19 P, EU:C:2019:905, point 16 et jurisprudence citée).

17      En l’occurrence, s’agissant, en premier lieu, de l’argumentation évoquée aux points 7 à 10 de la présente ordonnance, selon laquelle le Tribunal aurait commis une erreur de droit lors de l’appréciation du risque de confusion entre les marques en cause, il y a lieu de relever qu’une telle argumentation n’est pas, en soi, suffisante pour établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, le demandeur devant respecter l’ensemble des exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance. Or, force est de constater que la requérante n’a pas respecté toutes ces exigences.

18      En particulier, s’agissant de l’argumentation soulevée au point 8 de la présente ordonnance, tirée en substance d’une méconnaissance de la jurisprudence de la Cour relative à l’appréciation du risque de confusion, il importe de souligner que si la requérante précise les points de l’arrêt attaqué et ceux des arrêts de la Cour qui auraient été méconnus, elle ne fournit toutefois pas d’indications claires et précises permettant d’établir la méconnaissance alléguée. En effet, la requérante n’expose pas à suffisance de droit en quoi l’arrêt attaqué serait contraire à la jurisprudence issue de l’arrêt du 12 juin 2019, Hansson (C‑705/17, EU:C:2019:481, point 55), dont il ressort que, s’agissant des marques qui coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif ou descriptif, le constat de l’existence d’un risque de confusion ne peut pas, en raison de l’interdépendance des facteurs pertinents, être exclu d’avance et en toute hypothèse. D’ailleurs, la requérante ne fournit pas non plus d’indication sur les raisons concrètes pour lesquelles la contradiction alléguée, à la supposer établie, soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

19      En ce qui concerne l’argumentation résumée aux points 9 et 10 de la présente ordonnance, force est de constater que la requérante se limite à énoncer les erreurs prétendument commises par le Tribunal, sans exposer les raisons concrètes pour lesquelles son pourvoi soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

20      En tout état de cause, il apparaît que, par cette argumentation, la requérante cherche, en réalité, à remettre en cause l’appréciation factuelle opérée par le Tribunal lors de l’examen du risque de confusion entre les marques en cause. Or, il y a lieu de relever qu’une telle argumentation ne saurait soulever une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 18 mars 2021, Laboratorios Ern/EUIPO, C-667/20 P, non publiée, EU:C:2021:223, points 21 et 22).

21      En deuxième lieu, s’agissant de l’argumentation figurant au point 11 de la présente ordonnance, selon laquelle le Tribunal aurait violé la jurisprudence de la Cour en rejetant les documents produits pour la première fois devant lui, il est vrai que la requérante précise les points de l’arrêt attaqué et ceux de l’arrêt Primart/EUIPO (C‑702/18 P, EU:C:2020:489) qui auraient été méconnus, toutefois, elle ne fournit pas d’indications suffisantes sur la similitude des situations visées dans ces deux arrêts permettant d’établir la réalité de la contradiction alléguée. Premièrement, l’arrêt précité se rapportait à l’irrecevabilité de l’argumentation, alors que l’arrêt attaqué concerne l’irrecevabilité des documents. Deuxièmement, cette requérante n’expose pas clairement en quoi l’arrêt Primart/EUIPO (C‑702/18 P, EU:C:2020:489), en ce qu’il concerne la recevabilité de l’argumentation relative au caractère distinctif prétendument faible de la marque antérieure avancée pour la première fois devant le Tribunal, serait méconnu par le fait que, dans l’arrêt attaqué, ce dernier a rejeté certains éléments de preuve présentés pour la première fois devant lui. Troisièmement, ladite requérante ne précise pas non plus, à suffisance de droit, en quoi la contradiction alléguée soulèverait une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. Partant, force est de constater qu’elle ne respecte pas l’ensemble des exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance.

22      En troisième lieu, s’agissant de l’argumentation évoquée au point 12 de la présente ordonnance, par laquelle la requérante reproche, en substance, au Tribunal de s’être écarté de la pratique décisionnelle de l’EUIPO, il suffit de constater, ainsi que le Tribunal l’a rappelé au point 123 de l’arrêt attaqué, que la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO doit être appréciée uniquement sur la base du règlement no 207/2009, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure des instances de l’EUIPO (voir, en ce sens, ordonnance du 11 février 2021, Klose/EUIPO, C‑600/20 P, non publiée, EU:C:2021:110, point 21).

23      Dans ces conditions, il convient de conclure que la demande présentée par la partie requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.

24      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.

 Sur les dépens

25      Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.

26      La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :

1)      Le pourvoi n’est pas admis.

2)      Olimp Laboratories sp. z o.o. supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.