Language of document : ECLI:EU:T:2014:964

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

18 novembre 2014 (*)

« Dumping – Importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de Chine – Droit antidumping définitif – Définition du produit concerné »

Dans l’affaire T‑394/13,

Photo USA Electronic Graphic, Inc., établie à Beijing (Chine), représentée par Me K. Adamantopoulos, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme S. Boelaert, en qualité d’agent, assistée de M. B. O’Connor, solicitor, et de Me S. Gubel, avocat,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. J.‑F. Brakeland et M. França, en qualité d’agents,

et par

Ancàp SpA, établie à Sommacampagna (Italie),

Cerame-Unie AISBL, établie à Bruxelles (Belgique),

Confindustria Ceramica, établie à Sassuolo (Italie),

et

Verband der Keramischen Industrie eV, établie à Selb (Allemagne),

représentées par Me R. Bierwagen, avocat,

parties intervenantes,

ayant pour objet une demande d’annulation du règlement d’exécution (UE) n° 412/2013 du Conseil, du 13 mai 2013, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO L 131, p. 1), pour autant qu’il impose un droit antidumping à la requérante,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, N. J. Forwood et E. Bieliūnas, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 24 juin 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Photo USA Electronic Graphic, Inc., est une société chinoise qui produit et exporte vers l’Union européenne des tasses en céramique à revêtement en polyester plein. De telles tasses peuvent faire l’objet d’une impression par sublimation, c’est-à-dire par le biais de la transformation, par chauffage, d’une encre à l’état solide en une encre à l’état gazeux, cette dernière se diffusant alors entre le revêtement en polyester et la surface en céramique pour y imprimer une image.

2        À la suite d’une plainte déposée au nom de producteurs de l’Union, la Commission européenne a ouvert, le 16 février 2012, une procédure antidumping concernant les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine et publié un avis relatif à l’ouverture de cette procédure (JO C 44, p. 22).

3        L’enquête a couvert la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2011 (ci-après la « période d’enquête ») et l’examen des tendances pertinentes aux fins de l’évaluation du préjudice a couvert la période allant du 1er janvier 2008 à la fin de la période d’enquête (ci-après la « période considérée »).

4        Le 14 novembre 2012, la Commission a adopté le règlement (UE) n° 1072/2012 instituant un droit antidumping provisoire sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO L 318, p. 28, ci-après le « règlement provisoire »).

5        Par le règlement provisoire, la Commission a restreint les produits concernés par l’enquête, ceux-ci correspondant aux articles en céramique pour la table et pour la cuisine, à l’exclusion des couteaux en céramique, originaires de Chine, relevant des codes NC ex 6911 10 00, ex 6912 00 10, ex 6912 00 30, ex 6912 00 50 et ex 6912 00 90.

6        Lors d’une audition qui s’est déroulée le 23 janvier 2013, la requérante a soumis des observations à la Commission et a notamment demandé que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein soient exclues des produits concernés par l’enquête.

7        Le 4 février 2013, la requérante a soumis des observations supplémentaires à la Commission.

8        Le 1er mars 2013, la requérante a reçu le document final d’information, prévu à l’article 20 du règlement (CE) n° 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, rectificatif JO 2010, L 7, p. 22, ci-après le « règlement de base »). Dans ce document, la Commission indique que la demande visant à l’exclusion des tasses en céramique à revêtement en polyester plein du champ de l’enquête a été rejetée.

9        Le 22 mars 2013, la requérante a soumis des observations supplémentaires à la Commission.

10      Le 15 mai 2013, le Conseil de l’Union européenne a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 412/2013 instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine originaires de la République populaire de Chine (JO L 131, p. 1, ci-après le « règlement attaqué »).

11      Dans le règlement attaqué, le Conseil rejette la demande visant à exclure de la définition du produit concerné les produits en grès à revêtement spécial de type utilisé pour l’impression par sublimation.

12      L’article 1er, paragraphe 1, du règlement attaqué se lit comme suit :

« Article premier

1.      Il est institué un droit antidumping définitif sur les importations d’articles en céramique pour la table et la cuisine, à l’exclusion des couteaux en céramique, des moulins à condiments et à épices en céramique ainsi que leurs éléments de broyage en céramique, des éplucheurs en céramique, des aiguiseurs à couteaux en céramique et des pierres à pizza en céramique de cordiérite des types utilisés pour la cuisson de pizzas ou de pains, relevant actuellement des codes NC ex 6911 10 00, ex 6912 00 10, ex 6912 00 30, ex 6912 00 50 et ex 6912 00 90 (codes TARIC 6911 10 00 90, 6912 00 10 11, 6912 00 10 91, 6912 00 30 10, 6912 00 50 10 et 6912 00 90 10) et originaires de la [République populaire de Chine]. »

13      En vertu de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement attaqué, la requérante se voit imposer un droit antidumping définitif de 17,9 %.

 Procédure

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 août 2013, la requérante a introduit le présent recours.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 1er octobre 2013, la Commission a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions du Conseil.

16      Le Conseil a déposé son mémoire en défense le 23 octobre 2013.

17      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 8 novembre 2013, Ancàp SpA, Cerame-Unie AISBL, Confindustria Ceramica et Verband der Keramischen Industrie eV ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions du Conseil.

18      Le 12 novembre 2013, le Tribunal (troisième chambre) a décidé de ne pas procéder à un second échange de mémoires.

19      Par ordonnance du même jour, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la Commission.

20      Le 19 novembre 2013, la Commission a renoncé à déposer un mémoire en intervention.

21      Par ordonnance du 11 février 2014, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis l’intervention d’Ancàp, de Cerame-Unie, de Confindustria Ceramica et de Verband der Keramischen Industrie (ci-après les « intervenantes »). Celles-ci ont déposé leur mémoire en intervention dans le délai imparti.

22      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et d’adopter une mesure d’organisation de la procédure.

23      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 24 juin 2014.

 Conclusions des parties

24      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué, pour autant qu’il lui impose un droit antidumping ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

25      Le Conseil, soutenu par les intervenantes, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

26      À l’appui de son recours, la requérante soulève quatre moyens, tirés, le premier, d’une erreur manifeste d’appréciation, le deuxième, d’une violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, le troisième, d’une violation de l’article 3, paragraphe 7, du même règlement et, le quatrième, d’une violation de l’article 3, paragraphe 2, dudit règlement.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

27      La requérante estime que le Conseil et la Commission (ci-après, pris ensemble, les « institutions ») ont commis une erreur manifeste d’appréciation en incluant les tasses en céramique à revêtement en polyester plein dans la définition du produit concerné par l’enquête (ci-après le « produit concerné »). D’une part, les institutions auraient commis une erreur manifeste d’appréciation des facteurs pris en compte pour décider cette inclusion, en l’occurrence l’apparence, l’utilisation finale et l’existence de producteurs dans l’Union de tasses en céramique à revêtement en polyester plein. D’autre part, la prise en compte d’autres facteurs, en l’occurrence les caractéristiques physiques, techniques et chimiques, les canaux de distribution, la perception du consommateur et l’interchangeabilité, justifierait l’exclusion desdites tasses des produits concernés.

28      À cet égard, il y a lieu de relever que, alors que l’article 1er, paragraphe 4, du règlement de base définit le produit similaire comme « un produit identique, c’est-à-dire semblable à tous égards au produit considéré, ou, en l’absence d’un tel produit, un autre produit qui, bien qu’il ne lui soit pas semblable à tous égards, présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré », ledit règlement ne précise pas comment doit être défini le produit ou la gamme de produits pouvant faire l’objet d’une enquête de dumping, ni n’exige de procéder à une taxinomie fine (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 septembre 1997, Shanghai Bicycle/Conseil, T‑170/94, Rec. p. II‑1383, point 61).

29      Selon une jurisprudence constante, la définition du produit concerné dans le cadre d’une enquête antidumping a pour objet d’aider à l’élaboration de la liste des produits qui, le cas échéant, feront l’objet de l’imposition des droits antidumping. Aux fins de cette opération, les institutions peuvent tenir compte de plusieurs facteurs, tels que, notamment, les caractéristiques physiques, techniques et chimiques des produits, leur usage, leur interchangeabilité, la perception qu’en a le consommateur, les canaux de distribution, le processus de fabrication, les coûts de production et la qualité (arrêts du Tribunal du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, Rec p. II‑5005, point 138, et du 17 décembre 2010, EWRIA e.a./Commission, T‑369/08, Rec p. II‑6283, point 82).

30      Dans ces conditions, l’examen du bien-fondé de l’inclusion d’un produit spécifique au sein de la liste des produits qui, le cas échéant, feront l’objet de l’imposition des droits antidumping doit être effectué au regard des caractéristiques du produit concerné tel que défini par les institutions et non au regard de celles des produits composant le produit concerné ou des sous-catégories de celui-ci.

31      En effet, des produits qui ne sont pas identiques à tous égards peuvent relever, en raison du fait qu’ils répondent aux facteurs dont les institutions ont tenu compte afin de définir le produit concerné, de la définition de ce dernier et, dans ce contexte, faire l’objet d’une enquête antidumping.

32      Ainsi, en l’espèce, afin de déterminer si les tasses en céramique à revêtement en polyester plein devaient être incluses dans la définition du produit concerné, il conviendra d’examiner leurs caractéristiques au regard de celles des articles en céramique pour la table et la cuisine, et non uniquement au regard de celles des tasses en céramique ne comportant pas un tel revêtement.

33      D’ailleurs, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, la requérante a indiqué que son argumentation visait à faire valoir que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein ne relevaient pas du marché des articles en céramique pour la table et la cuisine.

34      Enfin, il convient de relever qu’il ressort du point 29 ci-dessus que, dans le cadre de la définition du produit concerné, les institutions jouissent d’une marge de manœuvre dans la mesure où elles établissent les critères pertinents à prendre en compte afin de définir les produits qui seront concernés par l’éventuelle imposition des droits antidumping. Dans ce contexte, il est probable que plus d’une méthode de pondération et d’appréciation des différents paramètres soit objectivement valable, de sorte que les institutions sont tenues d’apprécier si un produit spécifique doit relever du produit concerné ou si, en revanche, il doit en être exclu. Cette appréciation doit être motivée de manière à permettre aux juridictions de l’Union d’en contrôler la légalité. À cet égard, le contrôle du juge de l’Union porte sur le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir (arrêts de la Cour du 22 octobre 1991, Nölle, C‑16/90, Rec. p. I‑5163, point 12, et du 29 mai 1997, Rotexchemie, C‑26/96, Rec. p. I‑2817, point 11 ; arrêt du Tribunal du 13 juillet 2006, Shandong Reipu Biochemicals/Conseil, T‑413/03, Rec. p. II‑2243, point 62).

35      C’est au regard de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner les arguments de la requérante visant à démontrer que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein devaient être exclues de la définition du produit concerné.

36      En l’espèce, s’agissant, en premier lieu, des facteurs que les institutions ont jugés pertinents, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort du considérant 29 du règlement attaqué, le Conseil a rejeté la demande d’exclusion des produits en grès à revêtement spécial utilisé pour l’impression par sublimation au regard de trois motifs. Premièrement, il a relevé que ces produits étaient visiblement identiques à d’autres articles de table non sublimés et qu’il était donc difficile, voire impossible, de les distinguer. Deuxièmement, il a constaté que ces produits avaient normalement la même utilisation finale que d’autres types d’articles en céramique pour la table. Troisièmement, il a souligné que plusieurs producteurs de l’Union fabriquaient ce type d’article et que les produits importés étaient donc en concurrence directe avec les produits fabriqués dans l’Union.

37      À cet égard, concernant, premièrement, l’argumentation de la requérante selon laquelle il n’existerait pas de production de tasses en céramique à revêtement en polyester plein dans l’Union, force est de constater, d’emblée, qu’elle doit être écartée. En effet, sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur le bien-fondé de cette affirmation, il suffit de relever que l’absence éventuelle de production dans l’Union de telles tasses n’est pas déterminante. En effet, la question déterminante est celle de savoir si ce type de tasses est, en raison de ses caractéristiques et, partant, de la perception qu’en a le consommateur, en concurrence avec des produits issus de la production de l’Union. Cette considération n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel, dans de nombreuses enquêtes antidumping, l’absence de production dans l’Union aurait constitué le fondement ou une raison supplémentaire pour exclure un produit du champ de l’enquête. En effet, à l’appui de son argumentation, la requérante invoque un seul règlement, à savoir le règlement (CE) n° 2155/97 du Conseil, du 29 octobre 1997, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de certaines chaussures à dessus en matières textiles originaires de la République populaire de Chine et d’Indonésie, et percevant définitivement le droit provisoire imposé (JO L 298, p. 1). Or, il ressort de ce règlement qu’une production du produit en cause existait encore dans l’Union, même si elle était d’importance marginale et que le motif principal d’exclusion dudit produit de l’enquête était lié à la circonstance que de tels produits pouvaient être distingués de tous les autres types de chaussures soumises à l’enquête. Par ailleurs, l’allégation selon laquelle l’identité des producteurs de l’Union n’a pas été divulguée et qu’il n’a pas été indiqué si l’un des plaignants ou l’un des producteurs compris dans l’échantillon produisait des tasses en céramique à revêtement en polyester plein doit être écartée. En effet, aucun élément n’indique que la requérante aurait, lors de l’enquête, demandé à avoir connaissance de ces informations, le Conseil indiquant d’ailleurs que tel n’a pas été le cas, et ce alors même qu’il ressort du dossier dont elle a pu avoir connaissance que l’industrie de l’Union à l’origine de la plainte avait présenté des observations faisant état de plusieurs producteurs desdites tasses dans l’Union. En tout état de cause, force est de constater qu’il ressort du dossier qu’il existe une production de tasses en céramique à revêtement en polyester plein dans l’Union, le Conseil et les intervenantes ayant produit des éléments tendant à démontrer l’existence de producteurs de l’Union de telles tasses. L’appréciation du Conseil concernant les producteurs de l’Union figurant au considérant 29 du règlement attaqué ne saurait donc être considérée comme étant entachée d’une erreur. Enfin, eu égard à ce qui précède, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de mesure d’instruction de la requérante visant à demander à la Commission de produire les documents et informations pertinents dans ce contexte.

38      Concernant, deuxièmement, l’utilisation finale, la requérante fait valoir que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein sont des produits semi-finis, qui font l’objet d’une transformation supplémentaire dans l’Union, en l’occurrence, une impression, de sorte qu’elles sont principalement utilisées dans l’industrie de l’Union et se distinguent des autres produits compris dans la définition du produit concerné, qui sont destinés essentiellement à être en contact avec des aliments. Or, force est de constater que, même si les tasses en cause peuvent subir une transformation dans l’Union et même à supposer qu’elles puissent être destinées à être utilisées comme des cadeaux ou des souvenirs, comme le prétend la requérante, il n’en demeure pas moins que cela n’a aucune influence sur leur potentielle utilisation finale, après transformation. Celles-ci peuvent en effet être, in fine, destinées à être en contact avec des denrées alimentaires, critère d’utilisation jugé pertinent par le Conseil pour la définition du produit concerné, ainsi qu’il ressort du considérant 54 du règlement provisoire, lequel a été confirmé par le règlement attaqué ainsi qu’il découle du considérant 37 de ce dernier. Aucun élément du dossier ne permet ainsi de considérer que l’utilisation finale des tasses en céramique à revêtement en polyester plein différerait substantiellement de celle des autres produits en céramique concernés. En particulier, aucune preuve ne démontre que le consommateur utiliserait lesdites tasses uniquement à des fins autres que celle d’être en contact avec des aliments ou des boissons, comme c’est le cas des articles en céramique visés par le produit concerné.

39      Concernant, troisièmement, l’apparence, la requérante soutient, en substance, que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein ont un aspect distinct de celui des autres tasses en céramique, mais que, en tout état de cause, ce critère n’est pas pertinent en l’espèce. À cet égard, il doit être rappelé que, ainsi qu’il ressort du point 30 ci-dessus, l’examen du bien-fondé de l’inclusion d’un produit spécifique au sein de la liste des produits qui, le cas échéant, feront l’objet de l’imposition des droits antidumping doit être effectué au regard de la définition générale du produit concerné et non au regard d’une sous-catégorie spécifique de celle-ci. Or, même si, ainsi que le Tribunal a pu le constater lors de l’audience, les tasses en céramique à revêtement en polyester plein sont visuellement identiques, ou à tout le moins semblables, aux tasses en céramique ne comportant pas un tel revêtement, il n’en demeure pas moins que, en tout état de cause, comme la requérante le fait valoir, l’apparence physique n’est pas un critère pertinent en l’espèce, dès lors que les différentes catégories de produits inclus dans la définition du produit concerné par l’enquête ne présentent, entre elles, aucune similitude visuelle. C’est ainsi que, par exemple, une tasse en céramique ne présente aucune similitude visuelle avec une assiette en céramique, un pot en céramique, une saucière en céramique ou un rond de serviette en céramique, alors que tous ces produits sont inclus dans la définition du produit concerné. Dans ces conditions, en l’espèce, la circonstance que des produits appartenant à une même catégorie présentent des similitudes visuelles n’est pas pertinente pour déterminer s’ils relèvent ou non des produits concernés. Il s’ensuit que les arguments du Conseil selon lesquels, en substance, les tasses en céramique à revêtement en polyester plein n’obéissent pas, en termes de taille et de dimension, à des exigences différentes de celles concernant d’autres tasses en céramique ne sont pas pertinents. Il découle de ce qui précède que c’est à tort que le Conseil a retenu, au considérant 29 du règlement attaqué, que les tasses en cause étaient « visiblement identique[s] à d’autres articles de tables non sublimés et qu’il était donc difficile, voire impossible, de les distinguer » pour déterminer si lesdites tasses devaient être exclues des produits concernés.

40      S’agissant, en second lieu, de l’application d’autres facteurs qui auraient imposé l’exclusion des tasses en cause de la définition du produit concerné, la requérante se réfère aux caractéristiques physiques, techniques et chimiques, aux canaux de distribution, à la perception du consommateur et à l’interchangeabilité.

41      Concernant, premièrement, les caractéristiques physiques, techniques et chimiques, la requérante allègue, en substance, que celles des tasses en céramique à revêtement en polyester plein diffèrent, en raison de la présence d’un tel revêtement, des autres articles en céramique pour la table et la cuisine. À cet égard, il convient de rappeler, à titre liminaire, que les institutions peuvent prendre en considération une variété de facteurs aux fins de la définition du produit concerné, au nombre desquels les caractéristiques physiques, techniques et chimiques des produits tiennent naturellement une place importante, sans être toutefois nécessairement prioritaires. Il ne saurait en tout état de cause être considéré que les différences quant aux caractéristiques physiques ou techniques ne soient pertinentes que lorsque celles-ci sont reflétées dans la perception du consommateur (arrêt Whirlpool Europe/Conseil, précité, point 141). Il convient donc d’emblée d’écarter l’argumentation de la requérante dans la mesure où elle se concentre sur la perception desdites caractéristiques par le consommateur. Ensuite, rien n’établit que les différences existant, sur les plans physiques, techniques et chimiques, entre les tasses en céramique à revêtement en polyester plein et les articles en céramique pour la table et la cuisine ont une importance telle que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein devraient être exclues des produits concernés par l’enquête. En particulier, aucun élément n’indique que les différences liées à la seule présence d’un revêtement spécial permettant une impression par sublimation seraient déterminantes, par rapport, notamment, à des tasses ou d’autres articles en céramique pouvant comporter un revêtement différent ou faire l’objet d’une décoration par un autre biais. La requérante reste d’ailleurs en défaut de démontrer que ces différences détermineraient, comme elle le prétend, la perception du consommateur et, partant, la relation concurrentielle existant avec les autres produits. De surcroît, rien ne permet de considérer que les autres produits inclus dans la définition du produit concerné ne pourraient pas être revêtus du revêtement en cause et, partant, faire l’objet d’une impression par sublimation. Au surplus, il doit être relevé qu’aucun élément ne permet de considérer, eu égard à leur diversité, que tous les produits inclus dans la définition du produit concerné seraient similaires sur les plans physique, technique et chimique.

42      Dans ces conditions, il convient de rejeter l’argumentation de la requérante concernant les caractéristiques physiques, techniques et chimiques.

43      Concernant, deuxièmement, les canaux de distribution, la requérante allègue que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein s’adressent à des entreprises actives dans l’industrie de l’impression ou dans la vente de produits destinés à l’impression alors que les autres articles pour la table et la cuisine sont distribués par le biais de détaillants indépendants, de supermarchés non spécialisés ou de grands magasins, comme retenu par le règlement provisoire. Or, force est de constater que la requérante n’apporte aucun élément de preuve au soutien de cette allégation, se bornant à renvoyer à une liste de clients. En outre, si la requérante avance avoir des clients principalement dans le secteur de l’impression, il n’en demeure pas moins que des détaillants vendant des articles en céramique pour la table et pour la cuisine peuvent également vendre des tasses en céramique à revêtement en polyester plein. D’ailleurs, le Conseil a apporté des éléments montrant qu’un même détaillant vend effectivement des tasses en céramique classiques, ainsi que des tasses à revêtement en polyester plein sur lesquelles il est possible d’apposer une impression de son choix par sublimation. De même, il a apporté des éléments permettant de démontrer que certains clients de la requérante ne commercialisent pas exclusivement des tasses destinées à recevoir une impression par sublimation, comme celles évoquées par la requérante, mais également d’autres tasses en céramique pouvant comporter un revêtement différent ou recevoir une décoration par un autre biais. Quant à l’argument de la requérante selon lequel les tasses en céramique à revêtement en polyester plein sont presque toujours vendues comme élément individuel alors que les autres articles en céramique et sans revêtement pour la table et la cuisine sont souvent inclus dans un assortiment, il n’est étayé par aucun élément de preuve, rien n’indiquant de surcroît que les tasses en céramique classiques ne seraient pas vendues comme éléments individuels.

44      Dans ces conditions, il convient d’écarter l’argumentation de la requérante selon laquelle il existerait des canaux de distribution distincts qui seraient clairement perceptibles et acceptés.

45      Concernant, troisièmement, la perception des consommateurs, la requérante soutient que ces derniers ne perçoivent pas les tasses en céramique à revêtement en polyester plein comme étant en concurrence avec les tasses ordinaires et sans revêtement. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, comme indiqué au point 30 ci-dessus, l’examen du bien-fondé de l’inclusion d’un produit spécifique au sein de la liste des produits qui, le cas échéant, feront l’objet de l’imposition des droits antidumping doit être effectué au regard de la définition générale du produit concerné et non au regard d’une sous-catégorie spécifique de celle-ci. L’examen de la perception des consommateurs doit donc être effectué dans le contexte des articles en céramique pour la table et pour la cuisine et non des seules tasses en céramique comme l’implique l’argumentation de la requérante. En tout état de cause, à supposer même que tel ne doive pas être le cas, il est à relever que, contrairement à ce que laisse en substance entendre la requérante, aucun élément ne permet de considérer que le consommateur, dont la perception doit être évaluée au stade de l’achat du produit fini, percevra une différence entre les tasses en céramique à revêtement en polyester plein sur lesquelles une impression aura été effectuée par sublimation et les autres tasses sur lesquelles un revêtement différent aura été apposé ou une décoration par un autre biais aura pu être effectuée. Il convient d’ailleurs de relever qu’il ressort du dossier que des détaillants commercialisent tant les premières que les secondes. Aucun élément ne permet de démontrer que, comme le soutient la requérante, les caractéristiques physiques objectives des tasses en céramique à revêtement en polyester plein peuvent être perçues par le consommateur. Il en va de même de l’allégation selon laquelle celui-ci ne percevra ces tasses comme un produit fini qu’après l’impression par sublimation. À cet égard, il doit être relevé que, si lesdites tasses peuvent effectivement subir cette transformation spécifique, il n’en demeure pas moins que leur fonction potentielle consistant à contenir une boisson peut être remplie sans cette impression, et ce de la même manière qu’une tasse en céramique classique. D’ailleurs, comme le relève le Conseil, il est possible que les tasses classiques aient besoin, avant d’être commercialisées, d’être encore transformées par l’ajout d’éléments décoratifs, le cas échéant selon une technique différente de la sublimation, les intervenantes évoquant notamment les décalcomanies ou la peinture numérique. Quant à l’argument de la requérante concernant les canaux de distribution, il a déjà été rejeté. Enfin, aucun élément ne permet de considérer que, si un consommateur souhaite acheter une tasse pour l’utiliser comme souvenir ou comme cadeau, il achètera un tasse dotée d’un revêtement particulier auquel une image est ajoutée, comme le soutient la requérante. En particulier, rien ne permet d’exclure que, dans un tel cas, le consommateur choisira une tasse classique avec un revêtement différent ou sur laquelle a été ajoutée une décoration selon une autre technique que la sublimation.

46      Dans ces conditions, il convient de rejeter les arguments de la requérante concernant la perception du consommateur.

47      Concernant, quatrièmement, l’interchangeabilité, la requérante fait valoir que, en appliquant le double test d’interchangeabilité, il est constaté que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein peuvent remplacer d’autres tasses ordinaires et être utilisées pour contenir des boissons, mais que les tasses ordinaires ne peuvent pas remplacer les tasses en céramique à revêtement en polyester plein étant donné qu’il n’est pas possible d’utiliser d’autres articles en céramique pour procéder à une impression par sublimation.

48      À cet égard, il convient d’emblée de relever que la Commission n’a pas l’obligation de procéder au double test évoqué par la requérante et qui aurait été appliqué dans une procédure antérieure évoquée par celle-ci. Aucune disposition n’impose en effet d’effectuer systématiquement un tel test et les institutions se doivent uniquement de procéder à l’examen adapté à chaque cas d’espèce. En outre, conformément aux considérations figurant au point 30 ci-dessus, l’examen de l’interchangeabilité ne saurait être opéré entre les tasses en céramique à revêtement en polyester plein et les autres types de tasses, mais entre les tasses en céramique à revêtement en polyester plein et les articles en céramique pour la table et pour la cuisine. Par ailleurs, eu égard à la grande diversité des produits compris dans la définition du produit concerné, l’interchangeabilité n’apparaît pas comme un critère pertinent pour déterminer, en l’espèce, si un produit relève ou non de la catégorie générale des articles en céramique pour la table et la cuisine. En tout état de cause, à titre surabondant, il doit être relevé qu’il ressort de l’argumentation de la requérante que celle-ci reconnaît elle-même que les tasses en céramique à revêtement en polyester plein peuvent remplacer d’autres tasses ordinaires, admettant ainsi indirectement l’interchangeabilité des tasses en question. De surcroît, s’il est vrai, comme le soutient la requérante, que les tasses ordinaires ne peuvent, en raison de l’absence de revêtement spécial, être utilisées pour subir une impression par sublimation, elles peuvent faire l’objet d’une décoration par une autre méthode, de sorte que ces produits finis seraient semblables et donc interchangeables. Aussi, les différents types de tasses se recoupent et se concurrencent jusqu’à un certain degré.

49      Dans ces conditions, il convient d’écarter l’argumentation de la requérante relative à l’interchangeabilité.

50      Concernant, cinquièmement, les prix des produits, il est à noter que, dans la requête, la requérante ne développe, au soutien du premier moyen, aucune argumentation étayée visant à faire valoir que les différences de prix entre les tasses en céramique à revêtement en polyester plein et les articles en céramique pour la table et la cuisine, ou les tasses ne comportant pas un tel revêtement, étaient un facteur qui aurait imposé l’exclusion des tasses en cause de la définition du produit concerné. Dans ces conditions, les arguments avancés lors de l’audience et pouvant se rapporter à une telle argumentation doivent être rejetés comme irrecevables. Au demeurant, ainsi qu’il ressort du point 62 ci-après, ils ne pourraient qu’être rejetés.

51      Il découle de ce qui précède que, même si c’est à tort que le Conseil a retenu, au considérant 29 du règlement attaqué, que les tasses en cause étaient « visiblement identique[s] à d’autres articles de table non-sublimés et qu’il était donc difficile, voire impossible, de les distinguer » pour déterminer si lesdites tasses devaient être exclues des produits concernés, il n’en demeure pas moins que la requérante n’a pas été en mesure de démontrer qu’il aurait commis une erreur manifeste d’appréciation concernant les autres critères qui ont été pris en compte pour justifier l’inclusion des tasses en céramique à revêtement en polyester plein dans la définition du produit concerné, ni n’a valablement démontré que la prise en compte d’autres facteurs aurait justifié l’exclusion desdites tasses de cette définition.

52      Il s’ensuit que le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base

53      La requérante soutient que, en regroupant, afin de procéder à la comparaison équitable prévue à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, les tasses en céramique à revêtement en polyester plein et d’autres types de tasses en céramique, alors que ces produits présentent des différences fondamentales, les institutions ont violé cette disposition.

54      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 1er, paragraphe 2, du règlement de base, un produit est considéré comme faisant l’objet d’un dumping lorsque son prix à l’exportation vers l’Union est inférieur au prix comparable, pratiqué au cours d’opérations commerciales normales, pour le produit similaire dans le pays exportateur.

55      L’article 1er, paragraphe 4, du règlement de base définit le produit similaire comme étant un produit identique, c’est-à-dire semblable à tous égards au produit considéré, ou, en l’absence d’un tel produit, un autre produit qui, bien qu’il ne lui soit pas semblable à tous égards, présente des caractéristiques ressemblant étroitement à celles du produit considéré.

56      Selon l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, il est procédé à une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale.

57      En l’espèce, il ressort du considérant 70 du règlement attaqué que, aux fins d’une comparaison équitable entre la valeur normale et le prix à l’exportation, il a été dûment tenu compte, sous la forme d’ajustements, des différences affectant les prix et la comparabilité des prix, conformément à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, et que des ajustements ont été effectués, le cas échéant, pour tenir compte du stade commercial, des différences dans les caractéristiques physiques et d’autres facteurs influant sur la comparabilité des prix, notamment la valorisation liée aux marques.

58      En particulier, aux considérants 71 à 88 dudit règlement, le Conseil a examiné si un ajustement était justifié au regard des différences de caractéristiques physiques.

59      La requérante objecte que le regroupement incorrect effectué par les institutions aurait abouti à la comparaison de produits qui sont caractérisés par des différences fondamentales et qui n’entrent même pas en concurrence entre eux.

60      À cet égard, il convient d’emblée de relever qu’il ne ressort pas du dossier que la requérante aurait demandé, lors de la procédure administrative, un ajustement, sur le fondement de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, pour les motifs qu’elle invoque dans le cadre du présent moyen. Le Conseil indique d’ailleurs qu’une telle demande n’a pas été présentée.

61      Ensuite, s’agissant de l’argument de la requérante pris de l’existence de différences considérables entre lesdites tasses et les autres types d’articles pour la table et la cuisine, il convient de rappeler que, ainsi qu’il découle de l’examen du premier moyen, les institutions n’ont pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en incluant les tasses en céramique à revêtement en polyester plein dans les produits concernés. En tout état de cause, même à supposer que ces différences existent, de substantielles différences peuvent également être constatées entre l’ensemble des produits inclus dans la définition du produit concerné (voir, notamment, point 39 ci-dessus).

62      Enfin, s’agissant de l’argument selon lequel le prix desdites tasses représenterait presque le double de celui des articles en céramique ordinaire, sans revêtement, il doit être relevé que la requérante procède par pure affirmation. Elle n’apporte en effet aucun élément de preuve permettant valablement de démontrer cette différence de prix. Au demeurant, ainsi que le font valoir les intervenantes, il apparaît pertinent de comparer les prix au même niveau de la production, et non ceux d’un produit semi-fini et d’un produit fini. En tout état de cause, à supposer que cette différence soit avérée, aucun élément ne permet d’exclure que, eu égard aux importantes disparités existant entre les produits qu’elles recouvrent, des différences considérables existent également entre d’autres catégories de produits concernés. Au surplus, il découle du considérant 77 du règlement attaqué que la Commission a effectué une analyse approfondie des types de produits compris dans la définition du produit concerné et a comparé les prix à l’exportation avec le type de produit le plus ressemblant fabriqué et vendu dans le pays analogue, la requérante n’ayant apporté aucun élément permettant de remettre valablement en cause cette analyse.

63      Il découle de l’ensemble de ce qui précède que le deuxième moyen doit être écarté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 7, du règlement de base

64      La requérante considère que les institutions ont commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que les pratiques anticoncurrentielles sur lesquelles enquêtait le Bundeskartellamt (autorité de la concurrence allemande) n’auraient pas d’effet sur les indicateurs microéconomiques et macroéconomiques, de sorte qu’elles ont violé l’article 3, paragraphe 7, du règlement de base.

65      À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 3, paragraphe 6, du règlement de base que les institutions doivent démontrer que les importations faisant l’objet d’un dumping causent un préjudice important à l’industrie de l’Union, compte tenu de leur volume et de leur prix. Il s’agit là de l’analyse dite d’imputation (arrêt du Tribunal du 6 septembre 2013, Godrej Industries et VVF/Conseil, T‑6/12, non encore publié au Recueil, point 62).

66      Il ressort également de l’article 3, paragraphe 7, du règlement de base que les institutions doivent, d’une part, examiner tous les autres facteurs connus qui causent un préjudice à l’industrie de l’Union, au même moment que les importations faisant l’objet d’un dumping, et, d’autre part, faire en sorte que le préjudice causé par ces autres facteurs ne soit pas imputé auxdites importations. Il s’agit là de l’analyse dite de non-imputation (arrêt Godrej Industries et VVF/Conseil, précité, point 62).

67      Il ressort de cette dernière disposition que les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents à cet égard comprennent, notamment, le volume et les prix des importations non vendues à des prix de dumping, la contraction de la demande ou les modifications de la configuration de la consommation, les pratiques commerciales restrictives des producteurs de pays tiers et de l’Union et la concurrence entre ces mêmes producteurs, l’évolution des techniques, ainsi que les résultats à l’exportation et la productivité de l’industrie de l’Union.

68      L’objectif de l’article 3, paragraphes 6 et 7, du règlement de base est donc de faire en sorte que les institutions dissocient et distinguent les effets préjudiciables des importations faisant l’objet d’un dumping de ceux des autres facteurs. Si les institutions s’abstenaient de dissocier et de distinguer l’impact des différents facteurs de préjudice, elles ne pourraient pas valablement conclure que les importations faisant l’objet d’un dumping ont causé un préjudice à l’industrie de l’Union (arrêt Godrej Industries et VVF/Conseil, précité, point 63).

69      Il est enfin à noter que, lors de la détermination du préjudice, les institutions doivent notamment examiner si le préjudice qu’elles entendent retenir aurait sa cause dans le comportement propre des producteurs de l’Union (voir arrêt Godrej Industries et VVF/Conseil, précité, point 64, et la jurisprudence citée).

70      En l’espèce, il ressort du considérant 175 du règlement provisoire que la Commission a estimé que les résultats de l’enquête du Bundeskartellamt n’avaient pas été rendus publics par les autorités allemandes, de sorte qu’il n’était pas possible d’en tirer des enseignements et que cette enquête a porté sur un seul État membre, alors que l’industrie de l’Union est assez largement dispersée.

71      En outre, le Conseil a indiqué, au considérant 169 du règlement attaqué, que l’enquête était toujours en cours. Il a également souligné audit considérant que, étant donné que les producteurs de l’Union bénéficiaient d’une clause de confidentialité et que les résultats définitifs de l’enquête du Bundeskartellamt n’avaient pas encore été publiés, il n’était pas possible de se prononcer sur les détails de l’analyse. Il a précisé que, toutefois, il pouvait être confirmé qu’aucun des producteurs de l’Union figurant dans l’échantillon n’était soumis à cette enquête. Il a également indiqué que l’enquête avait permis de conclure que les indicateurs microéconomiques n’avaient pas été affectés par les pratiques examinées et que les indicateurs macroéconomiques ne pouvaient l’être, le cas échéant, que dans une mesure très limitée.

72      En conclusion, le Conseil a, au considérant 171 du règlement attaqué, rejeté les allégations relatives à l’incidence, notamment, de l’enquête du Bundeskartellamt sur l’analyse du préjudice et du lien de causalité et, au considérant 173 dudit règlement, confirmé les appréciations figurant aux considérants 174 à 176 du règlement provisoire.

73      À cet égard, il convient d’emblée de relever qu’il n’est pas contesté que, lors de l’adoption du règlement attaqué, l’enquête du Bundeskartellamt était toujours en cours et n’était donc pas clôturée, celle-ci ne l’ayant été que le 16 octobre 2013, soit postérieurement à l’introduction du présent recours. Dans ces conditions, à cette date, les pratiques restrictives évoquées par la requérante n’avaient pas été constatées par une décision contraignante de l’autorité allemande compétente, de sorte que les institutions ne pouvaient les prendre en considération. Dans ce contexte, il convient de préciser que l’article 3, paragraphe 7, du règlement de base vise, parmi les facteurs qui peuvent être considérés comme pertinents, notamment, les pratiques commerciales restrictives des producteurs de l’Union. L’enquête du Bundeskartellamt n’ayant pas été clôturée au moment de l’adoption du règlement attaqué, aucune pratique restrictive des producteurs de l’Union ne pouvait être considérée comme établie par l’autorité compétente et valablement constatée.

74      Au demeurant, il convient de relever que l’enquête du Bundeskartellamt a porté sur la période comprise entre les mois de juillet 2005 et février 2008, cette dernière date ayant été confirmée par le Conseil lors de l’audience, de sorte que ladite enquête concernait une période, d’une part, ne correspondant pas à la période d’enquête en cause en l’espèce et, d’autre part, correspondant au maximum à deux mois de la période considérée.

75      En tout état de cause, force est de constater que les griefs avancés par la requérante à l’égard des affirmations du Conseil figurant dans le règlement attaqué relatives, d’une part, à la circonstance qu’aucun des producteurs de l’Union figurant dans l’échantillon n’a été soumis à l’enquête du Bundeskartellamt et, d’autre part, au fait que cette enquête n’a concerné que l’Allemagne ne peuvent qu’être écartés.

76      À cet égard, il doit être observé, à titre liminaire, que, contrairement à ce que laisse entendre la requérante, le Conseil n’a pas fondé sa conclusion selon laquelle les indicateurs microéconomiques n’avaient pas été affectés par les pratiques en cause sur la circonstance que l’échantillon n’incluait pas de producteur soumis à l’enquête du Bundeskartellamt, mais, ainsi qu’il ressort du considérant 169 du règlement attaqué, sur l’enquête qui a été menée en l’espèce. L’argument pris de ce que le critère selon lequel aucune des entreprises de l’échantillon ne faisait l’objet de l’enquête du Bundeskartellamt est donc inopérant. Il n’y a donc pas lieu de procéder à la mesure d’instruction sollicitée par la requérante visant à ce que le Conseil présente les éléments pertinents concernant la composition de l’échantillon.

77      Ensuite, il est à relever que, selon le considérant 118 du règlement attaqué, les indicateurs macroéconomiques ont été évalués au niveau de l’industrie de l’Union dans son ensemble, tandis que les indicateurs microéconomiques ont été analysés au niveau des producteurs de l’Union inclus dans l’échantillon, qui comprenait des sociétés n’étant pas à l’origine de la plainte. Or, la requérante n’a ni prétendu ni apporté d’élément visant à démontrer que cette méthode d’analyse serait erronée.

78      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel, même si aucun des producteurs de l’échantillon n’a fait l’objet de l’enquête du Bundeskartellamt, cela ne signifie pas que leurs indicateurs microéconomiques n’ont pas été affectés par les pratiques en cause, il doit être relevé qu’il ressort du règlement attaqué que les indicateurs microéconomiques n’ont pas été affectés par les pratiques en cause. À cet égard, le Conseil indique, dans sa défense, que la Commission a enquêté pour vérifier si lesdites pratiques auraient pu affecter les indicateurs microéconomiques, à savoir les stocks, les prix de vente, la rentabilité, le flux de liquidités, les investissements, le retour sur investissements, l’aptitude à mobiliser des capitaux, les salaires et les coûts de producteur, sur lesquels reposait l’évaluation du préjudice, et a conclu que tel n’était pas le cas. Or, la requérante n’a avancé aucun élément de preuve permettant de remettre valablement en cause ces affirmations.

79      Il convient donc de rejeter les arguments de la requérante relatifs à l’atteinte portée aux indicateurs microéconomiques par les pratiques en cause.

80      Quant aux arguments de la requérante relatifs à l’atteinte aux données macroéconomiques, il y a lieu de relever que, eu égard à la circonstance, relevée par le Conseil, que l’enquête du Bundeskartellamt n’a concerné qu’un État membre et que, de surcroît, ainsi qu’il a été relevé, elle a porté sur une période ne chevauchant pas la période d’enquête en cause en l’espèce et ne chevauchant que de manière limitée la période considérée en l’espèce, c’est sans commettre d’erreur que le Conseil a pu estimer que les indicateurs macroéconomiques ne pouvaient être affectés que dans une mesure très limitée par les prétendues pratiques en cause.

81      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la circonstance que l’Allemagne est un producteur majeur d’articles de table et de cuisine et qu’une entente aurait eu un impact significatif à l’intérieur et à l’extérieur de cet État membre, en raison de l’absence ou du recoupement limité des périodes pertinentes dans le cadre de l’enquête antidumping et de l’enquête du Bundeskartellamt. Dans ce contexte, il convient d’ajouter qu’il ressort du dossier que la production allemande ne représente pas plus de 17 % de la production de l’Union et le marché allemand pas plus de 16 % de son marché s’agissant du produit concerné, de sorte que c’est à tort que la requérante allègue que les pratiques anticoncurrentielles en cause auraient affecté 53 % du commerce de l’Union portant sur ledit produit.

82      Quant à la référence, faite par la requérante, au règlement (CE) n° 1095/2005 du Conseil, du 12 juillet 2005, instituant un droit antidumping définitif sur les importations de bicyclettes originaires du Viêt Nam et modifiant le règlement (CE) n° 1524/2000 instituant un droit antidumping définitif sur les importations de bicyclettes originaires de la République populaire de Chine (JO L 183, p. 1), elle est sans pertinence. En effet, dans ledit règlement, les institutions ont pris en compte une décision d’une autorité nationale de la concurrence constatant l’existence d’un comportement anticoncurrentiel de la part de producteurs de l’Union et infligeant à ceux-ci des amendes, lesdits producteurs faisant partie de l’échantillon faisant l’objet de l’enquête en cause dans l’affaire ayant donné lieu à ce règlement. A également été prise en compte l’existence d’un recoupement entre le comportement anticoncurrentiel et la période considérée. Or, en l’espèce, ainsi qu’il a déjà été relevé, à la date d’adoption du règlement attaqué, le Bundeskartellamt n’avait pas adopté de décision constatant une quelconque infraction. De plus, le recoupement entre le comportement anticoncurrentiel en cause et la période considérée est très limité.

83      Il convient donc de rejeter les arguments de la requérante relatifs à l’atteinte aux indicateurs macroéconomiques par les pratiques en cause.

84      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le troisième moyen doit être écarté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base

85      La requérante fait valoir que, eu égard à l’erreur invoquée dans le cadre du troisième moyen, les institutions n’ont pas procédé à un examen objectif de la situation de l’industrie de l’Union, de sorte qu’elles ont violé l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base.

86      À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base que « [p]eut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans [l’Union] cause un préjudice ».

87      Selon l’article 3, paragraphe 2, dudit règlement, la détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif.

88      En l’espèce, il suffit de constater que le quatrième moyen repose sur la prémisse que les institutions auraient commis une erreur en concluant que les indicateurs microéconomiques et macroéconomiques du préjudice n’avaient pas été affectés par les prétendues pratiques anticoncurrentielles faisant l’objet de l’enquête du Bundeskartellamt.

89      Or, ainsi qu’il ressort de l’examen du troisième moyen, une telle prémisse est erronée.

90      Il s’ensuit que le quatrième moyen doit être écarté, ainsi que, par voie de conséquence, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

91      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Conseil et des intervenantes.

92      Conformément à l’article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Photo USA Electronic Graphic, Inc. supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne et par Ancàp SpA, Cerame-Unie AISBL, Confindustria Ceramica et Verband der Keramischen Industrie eV.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Papasavvas

Forwood

Bieliūnas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 18 novembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.