Language of document : ECLI:EU:T:2009:156

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

13 mai 2009 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative et verbale jello SCHUHPARK – Marque nationale verbale antérieure Schuhpark – Motif relatif de refus – Preuve de l’usage de la marque antérieure – Article 43, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑183/08,

Schuhpark Fascies GmbH, établie à Warendorf (Allemagne), représentée par Mes A. Peter et J. Braune, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. S. Schäffner, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Leder & Schuh AG, établie à Graz (Autriche), représentée par Mes W. Kellenter et A. Schlaffge, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 13 mars 2008 (affaire R 1560/2006‑4), relative à une procédure d’opposition entre Schuhpark Fascies GmbH et Leder & Schuh AG,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Papasavvas (rapporteur) et N. Wahl, juges,

greffier : M. E. Coulon, greffier,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 mai 2008,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 septembre 2008,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 19 août 2008,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 6 août 1999, l’intervenante, Leder & Schuh AG, a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif et verbal représenté ci-après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, notamment, des classes 18, 21, 25 et 26 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Sacs, pochettes, sacs à porter en bandoulière, porte-monnaie, portefeuilles, valises et sacs de voyage, tous ces articles en particulier en cuir et en imitations de cuir ; sacs pour chaussures, sacs à porter à la ceinture » ;

–        classe 21 : « Formes pour chaussures » ;

–        classe 25 : « Chaussures, bottes, pantoufles, sandales, bottines, chaussures de randonnée, chaussures d’intérieur, espadrilles, chaussures de gymnastique, bottes en caoutchouc, chaussettes, bas, collants, jambières, semelles intérieures, vêtements, sous-vêtements, chapellerie, écharpes, gants, bikinis, bandeaux contre la transpiration, bandeaux pour le front, ceintures » ;

–        classe 26 : « Lacets de chaussures, pinces à cheveux ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 78/00, du 2 octobre 2000.

5        Le 20 décembre 2000, la requérante, Schuhpark Fascies GmbH, a formé une opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée, en se fondant sur la marque verbale allemande antérieure Schuhpark, enregistrée sous le numéro 100 71 49.

6        Cette marque avait été déposée le 14 novembre 1979 et enregistrée le 3 septembre 1980. Le dernier renouvellement date du 14 novembre 1999.

7        Les produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée relèvent de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante : « Bottes, demi-bottes, chaussures d’intérieur, chaussures, mocassins, pantoufles, sandales, couvre-chaussures, couvre-bottes, chaussures en caoutchouc, chaussures en bois ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé par l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. L’opposition était dirigée contre tous les produits désignés par la marque demandée dans les classes 18, 21, 25 et 26 au sens de l’arrangement de Nice et se fondait sur tous les produits couverts par la marque antérieure.

9        Ayant été invitée à produire la preuve de l’usage de la marque antérieure, la requérante a présenté, le 11 janvier 2002, les éléments de preuve suivants :

–        un arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm (tribunal régional supérieur de Hamm, Allemagne) du 8 novembre 2001 ;

–        des étiquettes à coudre qui garniraient des chaussures ;

–        une déclaration du directeur des ventes de son entreprise ;

–        six plaquettes commerciales qui auraient été distribuées dans ses magasins et points de vente spécialisés ;

–        sept photocopies d’annonces publicitaires parues dans différents journaux ;

–        un sac en plastique sur lequel figure la marque antérieure.

10      Par décision du 26 octobre 2006, la division d’opposition a fait droit à l’opposition pour tous les produits visés au point 3 ci-dessus, à l’exception des « pinces à cheveux » relevant de la classe 26 au sens de l’arrangement de Nice, et l’a rejetée pour le surplus.

11      Le 27 novembre 2006, l’intervenante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 13 mars 2008 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition, en considérant que l’usage de la marque antérieure n’avait pas été prouvé à suffisance.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

14      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 43, paragraphe 2, deuxième phrase, et paragraphe 3, du règlement n° 40/94 ainsi que de la règle 22, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1).

 Arguments des parties

16      La requérante estime qu’elle a apporté la preuve d’un usage sérieux de la marque antérieure pendant la période pertinente, à savoir les cinq ans précédant le 2 octobre 2000. À cet égard, premièrement, elle se réfère aux éléments de preuve qu’elle a apportés lors de la procédure d’opposition. Deuxièmement, elle s’appuie sur la décision de la division d’opposition dans la présente procédure. Troisièmement, la requérante fait référence à la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 27 novembre 2002 rendue dans une procédure parallèle (affaire R 494/1999-3) concernant la demande de marque verbale communautaire JELLO SCHUHPARK. Quatrièmement, elle a présenté au Tribunal des photographies de chaussures portant des étiquettes de la marque antérieure prétendument commercialisées par elle pendant la période pertinente. Cinquièmement, la requérante a joint, en annexe à la requête, l’attestation d’un fournisseur du 17 novembre 2000, de laquelle il résulterait qu’il a livré à la requérante des chaussures commercialisées sous la marque antérieure pendant la période pertinente. Sixièmement, elle prend appui sur le témoignage d’un de ses fondés de pouvoirs. Septièmement, la requérante se réfère aux arrêts du Landgericht München I (tribunal régional de Munich I, Allemagne) du 17 juin 2004 (affaire 4 HK O 17288/03), de l’Oberlandesgericht München (tribunal régional supérieur de Munich) du 13 janvier 2005 (affaire 29 U 4387/04) et de la première chambre civile du Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) du 3 avril 2008 (affaire BGH I ZR 49/05).

17      L’OHMI et l’intervenante concluent au rejet de ce moyen.

 Appréciation du Tribunal

18      Il résulte du neuvième considérant du règlement n° 40/94 que le législateur a considéré que la protection de la marque antérieure n’est justifiée que dans la mesure où celle-ci est effectivement utilisée. En conformité avec ce considérant, l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 prévoit que le demandeur d’une marque communautaire peut requérir la preuve que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux sur le territoire sur lequel elle est protégée au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque ayant fait l’objet d’une opposition [arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, Kabushiki Kaisha Fernandes/OHMI – Harrison (HIWATT), T‑39/01, Rec. p. II‑5233, point 34 ; voir, également, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2007, La Mer Technology/OHMI – Laboratoires Goëmar (LA MER), T‑418/03, non publié au Recueil, point 51, et la jurisprudence citée].

19      En vertu de la règle 22, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95, la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure (arrêt LA MER, précité, point 52).

20      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (arrêt de la Cour du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, Rec. p. I‑2439, point 43).

21      À cet égard, la Cour a précisé, s’agissant de l’article 5, paragraphe 1, de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), qu’une dénomination sociale, un nom commercial ou une enseigne n’a pas, en soi, pour finalité de distinguer des produits ou des services. En effet, une dénomination sociale a pour objet d’identifier une société, tandis qu’un nom commercial ou une enseigne a pour objet de signaler un fonds de commerce. Dès lors, lorsque l’usage d’une dénomination sociale, d’un nom commercial ou d’une enseigne se limite à identifier une société ou à signaler un fonds de commerce, il ne saurait être considéré comme étant fait « pour des produits ou des services » (arrêt de la Cour du 11 septembre 2007, Céline, C‑17/06, Rec. p. I‑7041, point 21).

22      En revanche, il y a usage « pour des produits » lorsqu’un tiers appose le signe constituant sa dénomination sociale, son nom commercial ou son enseigne sur les produits qu’il commercialise. En outre, même en l’absence d’apposition, il y a usage « pour des produits ou des services » au sens de ladite disposition lorsque le tiers utilise ledit signe de telle façon qu’il s’établit un lien entre le signe constituant la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne du tiers et les produits commercialisés ou les services fournis par le tiers (arrêt Céline, précité, points 22 et 23).

23      De plus, la condition relative à l’usage sérieux de la marque exige que celle-ci, telle qu’elle est protégée sur le territoire pertinent, soit utilisée publiquement et vers l’extérieur (voir arrêt LA MER, précité, point 54, et la jurisprudence citée ; voir également, par analogie, arrêt Ansul, précité, point 37).

24      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce [arrêt du Tribunal du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié au Recueil, point 31]. L’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [arrêts du Tribunal du 6 octobre 2004, Vitakraft-Werke Wührmann/OHMI – Krafft (VITAKRAFT), T‑356/02, Rec. p. II‑3445, point 28, et LA MER, précité, point 59].

25      En vertu de la règle 22, paragraphe 3, du règlement n° 2868/95, les preuves se limitent, en principe, à la production de pièces justificatives comme des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94.

26      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner si c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 14 de la décision attaquée, que les éléments de preuve produits par la requérante ne sont pas de nature à prouver l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits visés, mais prouveraient uniquement que celle-ci exploite, sous ladite marque, des magasins de détail qui vendent des chaussures.

27      En premier lieu, quant aux éléments de preuve apportés lors de la procédure d’opposition, il convient de rappeler que la requérante a fait référence à un arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm du 8 novembre 2001 à sept photocopies d’annonces publicitaires parues dans différents journaux, à six plaquettes commerciales dont elle prétend qu’elles ont été distribuées dans ses magasins et points de vente spécialisés, à un sac portant la marque antérieure, à des étiquettes à coudre qu’elle prétend avoir apposées sur des chaussures et à une « déclaration sur l’honneur » du directeur des ventes de son entreprise.

28      Premièrement, s’agissant de l’arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm, la chambre de recours a relevé, au point 23 de la décision attaquée, qu’il lui était impossible de comprendre les motifs dudit arrêt sans connaître le dossier dans son intégralité et, en particulier, les éléments qui prouvaient, selon ladite juridiction, la commercialisation de chaussures portant l’étiquette « Schuhpark ».

29      À cet égard, il convient de relever que l’Oberlandesgericht Hamm s’est limité à considérer, au point 2 de son arrêt, que la requérante « a présenté des formes d’usage » et que « la vente des quantités alléguées et non contestées des chaussures avec des étiquettes cousues dedans et portant le signe ‘Schuhpark’ (chemise page 63) en tant que signe distinctif constitue, en tout état de cause, un tel usage ». Partant, à supposer même que ce passage puisse être considéré comme étant un élément de preuve, il indiquerait, tout au plus, que la requérante a vendu des chaussures avec lesdites étiquettes portant la marque antérieure. Il n’indiquerait pas, cependant, le lieu, la durée, l’importance et la nature du prétendu usage ainsi que l’exige la règle 22, paragraphe 2, du règlement nº 2868/95. Force est donc de constater que c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que, sans avoir connaissance, à tout le moins, de la « chemise page 63 » du dossier et des chiffres d’affaires auxquels il est fait référence, ledit passage de l’arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm ne lui permettait pas de conclure à un usage de la marque antérieure au sens de l’article 43, paragraphe 2, du règlement n° 40/94.

30      Deuxièmement, s’agissant des annonces publicitaires, des plaquettes commerciales et du sac portant la marque antérieure, la chambre de recours a considéré, aux points 15, 16 et 21 de la décision attaquée, que ces éléments ne décrivaient l’usage de la marque antérieure que dans le cadre de l’exploitation de magasins de chaussures et ne prouvaient pas que ces magasins vendaient des chaussures portant la marque antérieure.

31      Ces constatations doivent être entérinées. En effet, ni dans les annonces, ni sur les plaquettes commerciales, ni sur le sac en plastique ne figurent des chaussures portant la marque antérieure. La marque antérieure n’est pas non plus utilisée sur ces éléments de preuve de façon à établir un lien entre le signe en cause et les produits concernés. À cet égard, il convient de relever que les annonces et les plaquettes commerciales ne contiennent aucune indication de l’existence d’une marque maison pour des chaussures, et que les chaussures y figurant sont soit associées à des marques de tiers, soit dépourvues de toute référence à une marque. La marque antérieure n’apparaît, à côté des représentations des chaussures, qu’en tant qu’élément du prix, indiquant ainsi qu’il s’agit, tant pour les chaussures de marque que pour les chaussures autres, de prix « Schuhpark Fascies ». Or, cela ne suffit pas à établir un lien entre le signe en cause et les produits visés.

32      En revanche, il y est fait référence, à de multiples reprises, au fait qu’il existe un nombre élevé de « magasins Schuhpark » et que le « Schuhpark Fascies » est « le paradis de la chaussure pour toute la famille, offrant un choix gigantesque de chaussures de marque ». En outre, sur le sac en plastique ne figure que l’indication « Schuhpark Fascies », sans aucun ajout permettant d’établir un lien avec les produits visés. Dans ces circonstances, il doit être constaté que l’usage de la marque antérieure ressortant desdites preuves visait la dénomination sociale, le nom commercial ou l’enseigne de la requérante, permettant au consommateur d’identifier le magasin de détail dans lequel il peut acheter les chaussures, mais n’avait pas pour finalité de distinguer les produits de la requérante des produits similaires de tiers.

33      Troisièmement, s’agissant des étiquettes à coudre et de la déclaration du directeur des ventes de la requérante, la chambre de recours a considéré, aux points 16 à 19 de la décision attaquée, que la requérante n’avait apporté aucune preuve du fait que des chaussures portant cette étiquette avaient effectivement été vendues.

34      À cet égard, il y a lieu de relever, tout d’abord, que ces étiquettes, d’une part, ne prouvent pas à elles seules que la requérante les ait apposées sur des chaussures et, d’autre part, à supposer même que l’arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm puisse être considéré, à cet égard, comme étant un élément de preuve, n’indiquent pas le lieu, la durée, l’importance et la nature du prétendu usage, tel que prévu à la règle 22, paragraphe 2, du règlement nº 2868/95.

35      Ensuite, il convient de relever que la chambre de recours a considéré, au point 18 de la décision attaquée, que la déclaration du directeur des ventes de la requérante ne constituait pas une preuve au sens de l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94, car sa valeur probante était réduite du fait qu’elle n’était pas passible de sanctions pénales si elle n’était pas véridique. Toutefois, la chambre de recours a pris en compte, aux points 19, 21 et 22 de la décision attaquée, ladite déclaration comme étant l’un des moyens de preuve non explicitement repris dans l’énumération non exhaustive de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 40/94. Dans ces circonstances, la chambre de recours a considéré que, cette déclaration émanant d’un cadre de la requérante, elle ne pouvait prouver, sans être corroborée par des preuves additionnelles, les ventes alléguées de chaussures portant la marque antérieure entre 1994 et 1999.

36      À cet égard, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû prendre en compte ladite déclaration comme étant une preuve au sens de l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94 et elle semble en tirer la conséquence que les faits énoncés dans cette déclaration, en ce que cette dernière relève de ladite catégorie de preuve, ne nécessitent pas de corroboration.

37      Or, il a été rappelé au point 24 ci-dessus qu’il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et que la preuve de l’usage sérieux doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné.

38      Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que, même pour apprécier la valeur probante de « déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites » au sens de l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94, il y a lieu de vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue en tenant compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et de se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable. Rien dans le règlement n° 40/94 ni dans le règlement n° 2868/95 ne permet de conclure que la force probante des éléments de preuve de l’usage de la marque, y compris les déclarations solennelles, devrait être analysée à la lumière de la législation nationale d’un État membre [voir arrêt du Tribunal du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita), T‑303/03, Rec p. II‑1917, point 42, et la jurisprudence citée].

39      En l’espèce, à supposer même que la déclaration en cause soit, comme le prétend la requérante, une déclaration au sens de l’article 76, paragraphe 1, sous f), du règlement n° 40/94, celle-ci a été établie par l’un des cadres de la requérante. Par conséquent, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il ne pouvait être attribué une valeur probante à ladite déclaration que si elle était corroborée par d’autres éléments de preuve (voir, en ce sens, arrêt Salvita, précité, point 43).

40      À cet égard, à supposer même que l’allégation selon laquelle, d’une part, les étiquettes à coudre ont été apposées sur des chaussures et, d’autre part, de telles chaussures ont été vendues par la requérante soit corroborée par l’arrêt de l’Oberlandesgericht Hamm, la requérante n’a apporté, à aucun moment de la procédure devant l’OHMI, d’autres éléments permettant de corroborer les chiffres de ventes de telles chaussures avancés dans ladite déclaration susceptibles de prouver l’étendue et la fréquence de l’usage de la marque antérieure, ainsi que l’exige la règle 22, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95.

41      Par conséquent, les arguments de la requérante tirés d’erreurs d’appréciation des éléments de preuve apportés lors de la procédure d’opposition doivent être rejetés.

42      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument tiré de la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 27 novembre 2002 rendue dans une procédure parallèle (affaire R 494/1999-3), il suffit de rappeler que la légalité des décisions des chambres de recours s’apprécie uniquement sur la base du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de celles-ci [voir arrêt du Tribunal du 12 mars 2008, Suez/OHMI (Delivering the essentials of life), T‑128/07, non publié au Recueil, point 32, et la jurisprudence citée].

43      En troisième lieu, quant à l’argument tiré de la décision de la division d’opposition dans la présente procédure, il convient de relever que, afin de constater la preuve de l’usage de la marque antérieure, la division d’opposition s’est appuyée, au point 1 de sa décision, sur la déclaration du directeur des ventes de la requérante, sur les autres éléments de preuve présentés devant elle et sur la décision de la troisième chambre de recours de l’OHMI du 27 novembre 2002. Or, les arguments relatifs à ces éléments de preuve ont été rejetés aux points 28 à 42 ci-dessus. Partant, le présent argument doit être rejeté.

44      En quatrième lieu, il convient de relever que les photographies de chaussures revêtues d’étiquettes de la marque antérieure prétendument commercialisées par la requérante pendant la période pertinente, la confirmation du fournisseur du 17 novembre 2000, le témoignage d’un fondé de pouvoirs de la requérante et les arrêts du Landgericht München I, de l’Oberlandesgericht München et de la première chambre civile du Bundesgerichtshof ont été présentés pour la première fois devant le Tribunal.

45      Or, à cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de ces preuves est contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [arrêt du Tribunal du 6 mars 2003, DaimlerChrysler/OHMI (Calandre), T‑128/01, Rec. p. II‑701, point 18].

46      En particulier, s’agissant des arrêts du Landgericht München I, de l’Oberlandesgericht München et de la première chambre civile du Bundesgerichtshof, il convient de relever que la requérante n’a pas produit ces arrêts aux fins de l’interprétation du droit communautaire, ce dont la requérante ne saurait être empêchée [arrêts du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 20, et du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, Rec. p. II‑5309, point 16]. En effet, elle les a produits afin de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure pendant la période pertinente, tendant ainsi à modifier les circonstances de fait et, partant, l’objet du litige devant la chambre de recours.

47      Il s’ensuit que l’ensemble des éléments de preuve invoqués pour la première fois devant le Tribunal et annexés à la requête doit être déclaré irrecevable.

48      Eu égard à tout ce qui précède, le recours doit être rejeté.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Schuhpark Fascies GmbH est condamnée aux dépens.

Martins Ribeiro

Papasavvas

Wahl

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 mai 2009.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.