Language of document : ECLI:EU:T:2009:402

ORDONNANCE DU 14. 10. 2009 – AFFAIRE T-353/08

VWD VEREINIGTE WIRTSCHAFTSDIENSTE / COMMISSION

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT
DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL

14 octobre 2009 (*)

« Confidentialité »

Dans l’affaire T‑353/08,

vwd Vereinigte Wirtschaftsdienste AG, établie à Francfort‑sur‑le‑Main (Allemagne), représentée par Mes R. Bechtold, U. Soltész et C. von Köckritz, avocats,

partie requérante,

soutenue par

MLex Ltd, établie à Londres (Royaume-Uni), représentée par Mes  E. Vahida et I.-G. Metaxas‑Maragkidis, avocats,

partie intervenante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. V. Di Bucci, M. Kellerbauer et R. Sauer, en qualité d’agents, assistés de Me A. Rinne, avocat,

partie défenderesse,

soutenue par

Thomson Reuters Corp., établie à Toronto (Canada),

Thomson Reuters plc, établie à Londres,

Reuters Group Ltd, établie à Londres,

et par

The Woodbridge Co. Ltd, établie à Toronto,

représentées par Me M. Struys, avocat, et M. M. Friend, solicitor,

parties intervenantes,

ayant pour objet un recours en annulation de la décision de la Commission du 19 février 2008 dans l’affaire COMP/M.4726 – Thomson Corporation/Reuters Group,

LE PRÉSIDENT DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête déposée le 27 août 2008 au greffe du Tribunal, vwd Wirtschaftsdienste AG (ci-après la « requérante »), a demandé, conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE, l’annulation de la décision de la Commission, du 19 février 2008, déclarant une concentration compatible avec le marché commun et le fonctionnement de l’accord EEE (COMP/M.4726 – Thomson Corporation/Reuters Group).

 Sur les demandes d’intervention

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 décembre 2008, Thomson Reuters Corp., Thomson Reuters plc, Reuters Group Ltd et The Woodbridge Company Ltd (ci-après « Thomson Reuters e.a. ») ont demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la Commission.

3        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 12 janvier 2009, MLex Ltd (ci-après « MLex ») a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la requérante.

4        Les demandes d’intervention ont été signifiées aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Celles-ci n’ont pas soulevé d’objections.

5        Par ordonnance du 18 mars 2009, le président de la septième chambre du Tribunal a admis Thomson Reuters e.a. à intervenir au soutien des conclusions de la Commission, et MLex à intervenir au soutien des conclusions de la requérante. Étant donné que, conformément à l’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure, la requérante et la Commission ont demandé que certains éléments confidentiels du dossier soient exclus de la communication aux parties intervenantes et ont produit, aux fins de cette communication, une version non confidentielle des mémoires ou pièces en question, le Tribunal a ordonné qu’une version non confidentielle de chaque acte de procédure signifié aux parties soit communiquée aux parties intervenantes.

 Sur les demandes de traitement confidentiel

 Sur l’objet des demandes

6        Par lettres séparées, déposées au greffe du Tribunal les 2 et 10 février 2009, la requérante a demandé le traitement confidentiel à l’égard de MLex et de Thomson Reuters e.a. de certaines informations contenues dans les annexes A.5, A.9 et A.10 de la requête introductive d’instance, à savoir :

–        les informations concernant la répartition du chiffre d’affaires de la requérante sur plusieurs sous-segments du marché qui se distinguent les uns des autres par la clientèle, et qui figurent à l’annexe A.5, p. 206, de la requête en réponse à la question 16 du questionnaire de la Commission du 4 septembre 2007 (ci-après le « premier questionnaire ») ;

–        les informations concernant la planification des nouveaux produits, les intervalles pour l’introduction de nouveaux produits et les actualisations des produits existants (« updates »), qui figurent à l’annexe A.5, p. 208, de la requête, en réponse à la question 21, sous b), du premier questionnaire ;

–        les informations concernant la répartition du chiffre d’affaires réalisé par la requérante avec plusieurs types d’informations financières (« discrete content sets ») ainsi que leur répartition entre des offres « desktop » et « stand-alone », qui figurent au tableau à l’annexe A.9, p. 238, de la requête, en réponse à la question 3 du questionnaire de la Commission du 15 octobre 2007 (ci-après le « second questionnaire») ;

–        les informations portant sur la quote-part des contenus d’information (« content sets ») élaborés par la requérante elle-même et la quote-part des contenus fournis par des tiers ainsi que la relation entre les deux, qui figurent au tableau à l’annexe A.9, p. 254, de la requête, en réponse à la question 15 du second questionnaire ;

–        les informations concernant l’identité des sources auprès desquelles la requérante se fournit en contenus de fondamentaux (« fundamentals ») et de « ownership », qui sont mentionnées à l’annexe A.9, p. 255, de la requête, en réponse à la question 16 du second questionnaire ;

–        les informations concernant le montant total des dépenses de la requérante pour l’acquisition de contenus auprès de tiers, figurant à l’annexe A.9, p. 256, de la requête, en réponse à la question 17 du second questionnaire ;

–        les informations contenues dans la lettre du 8 novembre 2007 de la requérante à la Commission, figurant à l’annexe A.10, p. 275 à 282, de la requête, qui concernent tous les noms des fournisseurs pertinents (banques, bourses), ainsi que l’indication des années faisant parties de dates indiquées dans les exemples d’un comportement abusif de Reuters par rapport aux « contribution data » (flux des données directes).

7        Par lettre du 20 mai 2009, déposée au greffe du Tribunal le jour même, Thomson Reuters e.a. ont émis des objections à la demande de traitement confidentiel, à l’exception du traitement confidentiel des informations contenues dans l’annexe A.5, p. 208 de la requête, en réponse à la question 21, sous b), du premier questionnaire. Ils réitèrent dans tous les cas que, s’ils n’avaient pas accès à ces informations, cela porterait atteinte à leurs droits en tant que parties intervenantes.

8        Par lettre séparée du 2 février 2009, déposée au greffe du Tribunal le même jour, la Commission a également demandé, à l’égard de MLex, le traitement confidentiel des passages occultés de son mémoire en défense ainsi que de ceux des annexes à ce mémoire, passages énumérés à l’annexe C.1 jointe à la lettre susmentionnée.

9        Par lettre du 15 mai suivant, déposée le même jour au greffe du Tribunal, MLex n’a soulevé aucune objection quant au traitement confidentiel de certaines données figurant tant aux annexes de la requête introductive d’instance et du mémoire en défense de la Commission qu’à ce dernier mémoire même.

 Sur les demandes de traitement confidentiel non contestées par les parties intervenantes

10      À titre liminaire, il incombe d’observer qu’une demande de traitement confidentiel doit être accueillie pour autant qu’elle porte sur des éléments qui n’ont pas été contestés par une partie intervenante, ou qui ne l’ont pas été de manière explicite et précise (voir, en ce sens, ordonnances du président de la cinquième chambre du Tribunal du 1er mars 2007, Viasat Broadcasting/Commission, T‑16/05, non publiée au Recueil, point 35, et du président de la quatrième chambre du Tribunal du 22 février 2005, Hynix Semiconductor/Conseil, T‑383/03, Rec. p. II‑621, publiée par extraits, point 36). Dès lors, il y a lieu d’accueillir les demandes de traitement confidentiel pour autant qu’elles n’ont pas été contestées par les parties intervenantes.

11      Ainsi, il y a lieu d’accueillir dès ce stade :

–        la demande d’un traitement confidentiel, formulée par la requérante à l’égard de MLex, de certaines informations occultées contenues dans les annexes A.5, A.9 et A.10 de la requête introductive d’instance ;

–        la demande d’un traitement confidentiel, formulée par la requérante à l’égard de Thomson Reuters e.a., des informations concernant la planification des nouveaux produits, les intervalles pour l’introduction de nouveaux produits et les actualisations des produits existants (updates), contenues dans l’annexe A.5, p. 208, de la requête, en réponse à la question 21, sous b), du premier questionnaire ;

–        la demande du traitement confidentiel de la Commission du 2 février 2009, à l’égard de MLex, concernant les passages occultés du mémoire en défense et des annexes à ce mémoire, énumérés dans l’annexe C.1 jointe à sa demande.

 Sur les demandes de traitement confidentiel contestées par Thomson Reuters e.a.

 Observations liminaires

12      L’article 116, paragraphe 2, du règlement de procédure, selon lequel « […] l’intervenant reçoit communication de tous les actes de procédure signifiés aux parties. Le président peut cependant, à la demande d’une partie, exclure de cette communication des pièces secrètes ou confidentielles », pose le principe que tous les actes de procédure signifiés aux parties doivent être communiqués aux intervenants et ne permet qu’à titre dérogatoire d’exclure certaines pièces ou informations secrètes ou confidentielles de cette communication (ordonnances du Tribunal du 4 avril 1990, Hilti/Commission, T‑30/89, Rec. p. II‑163, publication par extraits, point 10, et Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 18).

13      En premier lieu, il incombe à la partie qui présente une demande de confidentialité de préciser les pièces ou les informations visées et de dûment motiver leur caractère confidentiel (ordonnance Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 31). Les instructions pratiques aux parties (JO 2007, L 232, p. 7) reprennent ces exigences en leur point 76 et l’article 6, paragraphe 2, premier alinéa, des instructions au greffier du Tribunal (JO 2007, L 232, p. 1) prévoit qu’une demande de traitement confidentiel doit être présentée conformément, notamment, à ce point 76.

14      En l’espèce, la requérante décrit brièvement, mais précisément, l’objet des informations figurant dans les annexes pour lesquelles elle demande un traitement confidentiel.

15      En deuxième lieu, dans la mesure où une demande présentée au titre de l’article 116, paragraphe 2, seconde phrase, du règlement de procédure est contestée, il appartient au président, dans un premier temps, d’examiner si chacune des pièces et informations dont la confidentialité est contestée et à propos desquelles une demande de traitement confidentiel a été présentée, revêt un caractère secret ou confidentiel (voir, en ce sens, ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 38, et du président de la troisième chambre élargie du Tribunal du 13 janvier 2005, Deutsche Post/Commission, T‑266/02, non publiée au Recueil, point 21).

16      C’est au regard du caractère secret ou confidentiel de chacune des pièces et informations visées qu’il convient d’apprécier l’exigence de motivation de la demande de confidentialité à laquelle est soumise la requérante. En effet, il y a lieu de faire une distinction entre, d’une part, les informations qui sont par nature secrètes, telles que les secrets d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel, financier ou comptable, ou confidentielles, telles que les informations purement internes, et, d’autre part, les pièces ou informations susceptibles de revêtir un caractère secret ou confidentiel pour un motif qu’il appartient au demandeur de rapporter (ordonnance Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 34, et la jurisprudence citée).

17      Ainsi, le caractère secret ou confidentiel des pièces ou informations, pour lesquelles n’est apportée aucune motivation autre que celle consistant en la description de leur contenu, ne sera admis que pour autant que ces informations puissent être considérées comme secrètes ou confidentielles de par leur nature (ordonnance du président de la sixième chambre du Tribunal du 18 novembre 2008, Zhejiang/Conseil, T‑274/07, non publiée au Recueil, point 25).

18      En l’espèce, à l’exception de la demande de traitement confidentiel des informations figurant dans le courrier du 8 novembre 2007 que la requérante a adressé à la Commission (annexe A.10), la requérante se borne à réitérer, pour toutes les informations dont elle demande un traitement confidentiel, que celles-ci figurent au nombre des informations commerciales purement internes et/ou sensibles ayant un caractère confidentiel et qu’elles ne devaient pas être communiquées à d’autres opérateurs économiques. En plus, selon l’avis de la requérante, ces informations ne sont pas pertinentes pour la solution du litige.

19      En revanche, la requérante considère comme secrets commerciaux les informations contenues dans la lettre du 8 novembre 2007, reprise à l’annexe A.10, et s’applique à présenter à l’égard de celles-ci une motivation plus étoffée pour justifier la nécessité de traiter ces informations de manière confidentielle.

20      Au vu de la jurisprudence susmentionnée, il n’est pas nécessaire de vérifier notamment si le caractère succinct de la motivation des informations est suffisant puisque, en l’espèce, après examen individuel des informations en cause contenues dans les annexes A.5 et A.9, l’on arrive à confirmer que chacune d’elles est de nature confidentielle.

21      Il y a lieu d’ajouter, à propos de ces dernières annexes, que l’argument de la requérante, selon lequel les informations figurant à ces annexes sont dénuées de pertinence, est, d’une part, inopérant puisque, à ce stade de la procédure, la pertinence de telle ou telle information ne saurait faire l’objet d’appréciation du président. D’autre part, dès lors qu’il est établi que les sociétés intervenantes disposent d’un intérêt direct et actuel à ce qu’il soit fait droit aux conclusions de la Commission, force est en tout état de cause de considérer qu’elles ont tout intérêt à faire connaître leurs observations sur les questions faisant l’objet des moyens avancés par la requérante (voir, en ce sens, ordonnance Zhejiang/Conseil, précitée, point 27).

22      De même, la contestation de la confidentialité par Thomson Reuters e.a. doit porter sur des éléments précis des pièces de procédure qui sont restés occultés et indiquer les motifs pour lesquels la confidentialité à l’égard de ces éléments doit être refusée (voir ordonnances du président de la cinquième chambre du 1er mars 2007, Viasat Broadcasting/Commission, T‑329/04, non publiée au Recueil, point 55, et du président de la deuxième chambre du 29 avril 2008, Omya/Commission, T‑275/06, non publiée au Recueil, point 9).

23      À cet égard, il y a lieu de constater que Thomson Reuters e.a. ont, d’une part, présenté une motivation adaptée à chaque information faisant l’objet d’une demande de confidentialité afin de justifier la nécessité de la connaître. D’autre part, par rapport à chaque demande de confidentialité, ils estiment que s’ils n’avaient pas accès à ces informations, cela porterait atteinte à leurs droits en tant que parties intervenantes et réitèrent à l’égard de la plupart des informations occultées que des mesures moins restrictives, comme, par exemple, le recours au calcul de marges, pourraient également permettre de prendre en compte l’intérêt de la requérante au respect de la confidentialité. Une telle approche correspondrait à celle adoptée par la Commission pour protéger la confidentialité des données relatives au chiffre d’affaires de Thomson Reuters e.a. figurant dans la version non confidentielle et publiée de la décision d’autorisation de la Commission.

24      En troisième lieu, lorsque son examen le conduit à conclure que certaines des pièces et informations dont la confidentialité est contestée sont secrètes ou confidentielles, il appartient au président de procéder, dans un second temps, à l’appréciation et à la mise en balance des intérêts en présence, pour chacune de celles-ci (ordonnances Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 42 ; Omaya/Commission, précitée, point 8, et du président de la troisième chambre du 24 janvier 2006, Endesa/Commission, T‑417/05, non publiée au Recueil, point 15).

25      Lorsque le traitement confidentiel est demandé dans l’intérêt de la requérante, cette appréciation conduit le président, pour chaque pièce ou information visée, à mettre en balance le souci légitime de cette partie d’éviter que ne soit portée une atteinte sérieuse à ses intérêts et le souci tout aussi légitime des parties intervenantes de disposer des informations nécessaires à l’exercice de leurs droits procéduraux (voir ordonnances Hilti/Commission, précitée, point 11, et Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 44).

26      En toute hypothèse, la requérante doit envisager, eu égard au caractère contradictoire et public du débat judiciaire, la possibilité que certaines des pièces ou informations secrètes ou confidentielles qu’elle a entendu produire au dossier apparaissent nécessaires à l’exercice des droits procéduraux des parties intervenantes et, par suite, doivent être communiquées à ces derniers (voir ordonnance Zhejiang/Conseil, précitée, point 22).

27      C’est au regard de ces principes qu’il convient d’examiner les demandes de traitement confidentiel présentées dans la présente affaire.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations contenues dans l’annexe A.5, p. 206, de la requête introductive d’instance, en réponse à la question 16 du premier questionnaire

–       Arguments des parties

28      Pour les raisons précisées au point 18 de la présente ordonnance, la requérante demande un traitement confidentiel en faisant valoir que les informations en réponse à la question 16 du premier questionnaire concernent la répartition de son chiffre d’affaires sur plusieurs sous-segments du marché qui se distinguent les uns des autres par la clientèle.

29      Thomson Reuters e.a. font savoir que ces informations sont indispensables, notamment, pour déterminer sur quels sous-segments du marché intervient la requérante (et pour constater le volume de ces activités). Elles seraient également nécessaires, en particulier, pour déterminer le volume des activités de la requérante dans les secteurs ventes et transactions (sales & trading), ainsi qu’analyse & gestion du patrimoine (research & asset management) que concernent plusieurs moyens de la requête introductive d’instance.

–       Appréciation du président

30      Tout d’abord, il convient de constater que, en réponse à la question 16 du premier questionnaire, la requérante a précisé la répartition de son chiffre d’affaires sur plusieurs sous-segments du marché. Globalement, ces sous-segments font partie, ainsi que la requérante le fait savoir elle-même au point 3 de sa requête introductive d’instance, du domaine « research & asset management ».

31      La répartition du chiffre d’affaires sur plusieurs sous-segments constitue des informations que la requérante considère comme purement internes. Thomson Reuters e.a. ne mettent pas en cause cette qualification. Selon la jurisprudence du Tribunal, de telles informations doivent être considérées comme des informations qui sont par nature confidentielles (voir, à ce propos, ordonnance du président de la deuxième chambre du Tribunal du 21 mars 2006, UFEX e.a./Commission, T‑60/05, non publiée au Recueil, point 30).

32      Dans le cadre d’une mise en balance du souci légitime de la requérante d’éviter que ne soit portée une atteinte sérieuse à ses intérêts en divulguant ces informations et du souci tout aussi légitime de Thomson Reuters e.a. de disposer des informations nécessaires à l’exercice de leurs droits procéduraux, il y a lieu de constater, tout d’abord, que ces derniers ne précisent pas les moyens dans le cadre desquels ils jugent nécessaire la connaissance de ces chiffres. Si ces chiffres permettent d’apprécier les activités et les champs d’activité ainsi que notamment l’importance de tel ou tel sous-segment, il suffit toutefois que ces chiffres soit remplacés par des fourchettes des taux représentant le revenu par les différents sous-segments, d’ailleurs proposé par Thomson Reuters e.a. eux-mêmes (voir, par analogie, ordonnance du président de la quatrième chambre élargie du 2 mai 2007, Kronoply/Commission, T‑388/02, non publiée au Recueil, point 37).

33      Il y a donc lieu de faire droit à la demande de traitement confidentiel de la requérante en ce qu’elle vise la répartition de son chiffre d’affaires sur plusieurs sous-segments du marché qui se distinguent les uns des autres par la clientèle, à condition que la requérante remplace les chiffres concernés par des fourchettes.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations figurant au tableau à l’annexe A.9, p. 238, de la requête introductive d’instance, en réponse à la question 3 du second questionnaire

–       Arguments des parties

34      Pour les raisons précisées au point 18 de la présente ordonnance, la requérante demande un traitement confidentiel des informations concernant la répartition du chiffre d’affaires réalisé avec différents types d’informations financières (« discrete content sets »). 

35      Thomson Reuters e.a. considèrent que ces informations sont indispensables, notamment, pour déterminer sur quels types d’informations financières, à savoir les « discrete content sets » traités dans la décision d’autorisation de la Commission, intervient la requérante (et pour constater le volume de ces activités). Elles seraient également nécessaires, en particulier, pour déterminer le volume des activités de la requérante dans le domaine de la fourniture de flux de données en temps réel (« real time datafeeds ») et du « news content » qui font l’objet des premier, deuxième et cinquième moyens de la requête introductive d’instance. Les informations seraient également nécessaires pour déterminer le volume des activités de la requérante dans le domaine des informations financières qui faisaient l’objet des engagements pris par Thomson Reuters e.a. et acceptés par la Commission dans sa décision d’autorisation et qui font l’objet du neuvième moyen de la requête introductive d’instance. Il en irait de même des domaines comme celui des informations en temps réel sur le marché (« real time market data ») dans lesquels, selon la requérante, il existe des effets négatifs sur la concurrence.

–       Appréciation du président

36      Il importe de relever, en premier lieu, que, en réponse à la question 3 du second questionnaire, la requérante a précisé, sous forme de tableau, la répartition du chiffre d’affaires sur différents types d’informations financières (« content sets ») ainsi que leur répartition entre une offre « desktop» et une offre « stand alone ». Ce tableau concerne les informations qui forment les différents « discret content sets », à savoir les « Real time market data », les « Earning estimates : Current et Historical », les « Fundamentals », les « Broker reports : Real time et – Historica », les « Time series : Economics, – Fixed income securities, – Equities et – All products », le « Ownership », le « Deals » et les « News ».

37      Étant donné que le chiffre d’affaires appartenant à chaque type d’information financière précise permet de se faire une image de la répartition des activités économiques de la requérante, celui-ci fait partie des données commerciales internes. Ainsi, il faut le considérer, conformément à la jurisprudence précitée au point 16 de la présente ordonnance, comme par nature confidentiel.

38      Pour mettre en balance, conformément à la jurisprudence du Tribunal, les soucis de la requérante et ceux de Thomson Reuters e.a., il convient d’examiner les différents arguments de ces derniers par rapport aux soucis de la requérante.

39      En substance, Thomson Reuters e.a. cherchent à connaître le chiffre d’affaires réalisé par la requérante avec différents types d’informations financières (« discrete content sets ») afin de déterminer les volumes d’activités de la requérante dans les différents domaines. Si Thomson Reuters e.a. ont donc un intérêt certain pour ces informations précisant la position de la requérante sur les marchés en cause, il y a lieu de constater tout d’abord, par ailleurs, que la requérante ne court aucun risque si les domaines des « discrete content sets » dans lesquels elle n’exerce aucune activité ne resteront pas confidentiels. En éliminant de la liste des « discrete content sets » les domaines dans lesquels elle n’exerce aucune activité, la requérante permet à Thomson Reuters e.a. de connaître au moins les types d’information financière sur lesquels elle intervient.

40      Dans la mesure où Thomson Reuters e.a. considèrent comme nécessaire la connaissance des chiffres d’affaires relatives à la fourniture de flux de données en temps réel (« real time datafeeds ») faisant l’objet du premier et du deuxième moyen de la requête introductive d’instance, il convient de constater que ces deux premiers moyens ont essentiellement, mais pas exclusivement, trait à un prétendu défaut et à une prétendue erreur d’appréciation de la situation concurrentielle sur le marché en amont des fournisseurs de ce type de données.

41      Or, d’une part, les chiffres d’affaires que Thomson Reuters e.a. demandent à connaître sont réalisés par la requérante sur le marché en aval. Même si la requérante fait concurrence, dans une certaine mesure, à Reuters sur ce dernier marché, cette concurrence ne se rapporte pas à la situation concurrentielle sur le marché en amont, à savoir sur la concurrence entre les fournisseurs de flux de données en temps réel.

42      D’autre part, Thomson Reuters e.a. peuvent avoir un intérêt à connaître la position de la requérante en sa qualité de cliente de Reuters. Une telle connaissance leur permettrait d’apprécier l’impact exercé par la concentration sur la requérante. Or, il convient de réitérer que le chiffre d’affaires réalisé par la requérante sur le marché en aval ne saurait fournir des indications à ce propos. En conséquence, il ne semble pas impossible pour Thomson Reuters e.a. de faire valoir leurs droits procéduraux sans disposer du chiffre d’affaires obtenu par la requérante dans ce secteur.

43      Également, à propos du « news content » faisant l’objet du cinquième moyen, il ressort tant des arguments de la requérante que du tableau au point 148 de la décision attaquée que la requérante est essentiellement concernée par ce marché en tant que cliente des fournisseurs de « news » et que sa qualité de concurrente éventuelle ne semble pas être en discussion. Dès lors, il n’est pas indispensable pour Thomson Reuters e.a. de connaître le chiffre d’affaires de la requérante dans le domaine du « news content » pour faire valoir leurs droits procéduraux.

44      S’agissant de l’engagement de Thomson Reuters e.a., critiqué par la requérante dans le cadre du neuvième moyen, ceux-ci n’ont pas su justifier à suffisance de droit pourquoi ils ne peuvent pas faire valoir leurs droits procéduraux sans connaître le chiffre d’affaires de la requérante dans les domaines couverts par l’engagement. En effet, pour autant que Thomson Reuters e.a. se sont engagés à fournir des copies de certaines banques de données, la critique de la requérante fait abstraction de sa situation individuelle ou de celle d’autres concurrents et porte, sur un plan théorique, sur l’insuffisance et le caractère impropre de l’engagement.

45      Pour le volume des activités de la requérante dans le domaine des différents « discrete content sets » restants auxquels Thomson Reuters e.a. s’intéressent également, sans les mettre en rapport avec un moyen particulier, Thomson Reuters e.a. n’ont pas apporté des précisions permettant au président de la septième chambre d’apprécier dans quel contexte la connaissance de ces informations peut être nécessaire pour eux.

46      Il ressort de toutes les considérations qui précèdent que la demande visant un traitement confidentiel des informations concernant la répartition du chiffre d’affaires réalisé avec différents types d’informations financières (« discrete content sets ») et contenues dans l’annexe A.9, p. 238, de la requête introductive d’instance, en réponse à la question 3 du second questionnaire, doit être accueillie, à l’exception des domaines des « discrete content sets » dans lesquels la requérante n’exerce aucune activité.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations figurant à l’annexe A.9, p. 254, de la requête, en réponse à la question 15 du second questionnaire

–       Arguments des parties

47      Pour les raisons précisées au point 18 de la présente ordonnance, la requérante demande un traitement confidentiel des informations portant sur la quote-part des contenus d’information (« content sets ») élaborés par la requérante elle-même et la quote-part des contenus qui sont fournis par des tiers, ainsi que la relation entre les deux.

48      Thomson Reuters e.a. considèrent que ces informations sont indispensables, notamment, pour déterminer dans quelle mesure la requérante dépend des contenus d’informations préparés par des fournisseurs tels que Thomson Reuters e.a. Ces informations seraient aussi nécessaires, en particulier, pour constater le degré de dépendance de la requérante à l’égard des flux de données en temps réel (« real time datafeeds ») et du « news content », fournis par des tiers, comme le prétend la requérante dans les deuxième et cinquième moyens de la requête introductive d’instance. Elles seraient également nécessaires pour déterminer le volume des activités de la requérante liées à chacun des types d’informations financières qui faisaient l’objet des engagements acceptés par la Commission dans sa décision d’autorisation et du neuvième moyen de la requête introductive d’instance. Il conviendrait de signaler que, concernant les flux de données en temps réel, ces informations ont déjà été rendues accessibles au point 36 du mémoire en réponse de la Commission, où il est indiqué que 70 % des flux de données en temps réel de la requérante ont une origine interne et que seulement 30 % proviennent de tiers.

–       Appréciation du président

49      Il y a lieu de préciser que la réponse à la question 15 du second questionnaire ne concerne pas des précisions sur les sources d’approvisionnement, mais bien des précisions sur le pourcentage de l’approvisionnement externe par rapport à une élaboration interne de chaque « data content », énuméré et précisé au point 36 de la présente ordonnance. Faisant partie des domaines commerciaux internes, ces chiffres doivent néanmoins être considérés, en application de la jurisprudence, comme des informations internes qui sont par nature confidentielles.

50      En mettant en balance les intérêts légitimes de la requérante et ceux tout aussi légitimes de Thomson Reuters e.a., il importe de constater tout d’abord que le taux d’approvisionnement interne et externe en « real time datafeeds » ne saurait plus bénéficier de la protection de confidentialité, la Commission ayant déjà révélé dans son mémoire en défense les taux respectifs (voir, à ce propos, ordonnances Kronopoly, précitée, points 35 et 40, et du président de la quatrième chambre du Tribunal du 19 juin 2007, Édition Jacob/Commission, T‑279/04, non publiée au Recueil, point 26). D’ailleurs, la requérante ne s’est pas opposée à cette divulgation.

51      S’agissant des autres données en cause, il faut souligner que si la protection des sources d’approvisionnement revêt, en général, une importance particulière, en l’espèce, n’est en cause que la quote-part des données qui sont fournies par des tiers. D’une part, dans le cadre des deux premiers moyens et du neuvième moyen, Thomson Reuters e.a. ont un intérêt certain à savoir si et dans quelle mesure la requérante dépend de fournisseurs externes de données tels que Thomson. D’autre part, le dossier ne fait apparaître aucun élément permettant de croire à ce qu’une publication des parts de données fournies par des tiers puisse porter atteinte aux intérêts de la requérante.

52      Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’accorder un traitement confidentiel aux informations contenues dans l’annexe A.9, p. 254, de la requête, en réponse à la question 15 du second questionnaire.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations inscrites à l’annexe A.9, p. 255, de la requête, en réponse à la question 16 du second questionnaire

–       Arguments des parties

53      Pour les raisons précisées au point 18 de la présente ordonnance, la requérante demande un traitement confidentiel des informations concernant les sources auprès desquelles elle se fournit en contenus de fondamentaux et de « ownership » (« fundamentals and ownership contents »).

54      Thomson Reuters e.a. font valoir que ces informations sont indispensables, notamment, pour déterminer le volume des activités de la requérante liées aux fondamentaux (« fundamentals ») qui constituent l’un des types d’informations financières ayant fait l’objet des engagements acceptés par la Commission dans sa décision d’autorisation et faisant l’objet du neuvième moyen de la requête introductive d’instance. En outre, la requérante n’aurait pas expliqué pourquoi elle considère ces informations comme confidentielles alors qu’elle ne revendique pas la confidentialité pour l’identité des entreprises auprès desquelles elle acquiert des prévisions de résultats (« earning estimates ») et du « news content ».

–       Appréciation du président

55      À titre liminaire, il convient de constater que ces informations se rapportent à l’identité de certains fournisseurs de certains types de données en amont, plus exactement aux fournisseurs des fondamentaux (« fundamentals ») et des « ownership ». Ainsi qu’il ressort déjà de l’argumentation retenue au point 49 de la présente ordonnance, à l’égard de l’origine externe de certaines données, les sources d’approvisionnement et notamment les noms des fournisseurs appartiennent en principe au nombre des informations internes à qui il faut reconnaître un caractère confidentiel.

56      Pour autant que la requérante a limité sa demande de confidentialité aux fournisseurs de ces seuls « data contents », limitation critiquée par Thomson Reuters e.a., il y a lieu de noter, tout d’abord, en ce qui concerne la mention du nom même de Thomson Financial, en sa qualité de fournisseur, qu’il est évident que son nom ne peut en aucun cas resté confidentiel. La requérante elle-même a allégué, aux points 26, 41 et 48 de la requête introductive d’instance, qu’elle est cliente chez Thomson.

57      D’autre part, par rapport aux autres noms que la requérante ne considère pas comme confidentiels, elle n’explique pas pourquoi la divulgation des seuls noms des fournisseurs de fondamentaux et de « ownership » serait de nature à porter préjudice à ses intérêts commerciaux. À cet égard, il importe de rappeler que si la requérante supporte la charge de la preuve du caractère confidentiel des pièces et des noms dont elle demande au Tribunal le traitement confidentiel (voir, en ce sens, ordonnance du président de la troisième chambre du Tribunal du 24 janvier 2006, Endesa/Commission, T‑417/05, non publiée au Recueil, point 35), l’on ne saurait toutefois exiger d’elle qu’elle précise les raisons pour lesquelles elle ne demande pas la confidentialité des autres noms de fournisseurs.

58      En mettant en balance les intérêts de la requérante à conserver la confidentialité des noms des fournisseurs pour les « fundamentals » et les « ownership » contents et l’intérêt de Thomson Reuters e.a. à les connaître, selon ses propres dires, « pour déterminer le volume des activités de la requérante » liées à ces produits, il faut souligner que, d’une part, la divulgation des seuls noms de ces fournisseurs externes ne permet en aucun cas d’en déduire le volume des activités de la requérante. Même une lecture des noms des fournisseurs externes des « fundamentals » et « ownerships » ensemble avec celle des quote-parts énumérées en réponse à la question 15 du second questionnaire (voir le point 47 de la présente ordonnance) ne semble pas être de nature à faire apparaître le volume des activités de la requérante en ces domaines.

59      D’autre part, il convient de rappeler que le président de la septième chambre a accordé, dans le cadre de la réponse à la question 3 du second questionnaire (voir les points 34 et 35 de la présente ordonnance, le traitement confidentiel des chiffres d’affaires relatifs aux différents « discrete content sets ».

60      Or, par rapport à ces considérations, Thomson Reuters e.a. n’ont avancé aucun argument spécifique par rapport à leur allégation déjà mentionnée en faveur d’une divulgation de ces noms. En plus, le dossier ne fait non plus apparaître des éléments qui font croire que la connaissance de ces noms est indispensable pour Thomson Reuters e.a. pour faire valoir leurs droits procéduraux.

61      Il s’ensuit qu’il y a lieu d’accueillir la demande de traitement confidentiel des informations concernant l’identité des sources auxquelles la requérante achète des contenus de fondamentaux et de «ownership» (« fundamentals and ownership contents »), informations figurant à l’annexe A.9, p. 255, de la requête, en réponse à la question 16 du second questionnaire.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations contenues dans l’annexe A.9, p. 256, de la requête, en réponse à la question 17 du second questionnaire

–       Arguments des parties

62      Pour les raisons précisées au point 18 de la présente ordonnance, la requérante demande un traitement confidentiel du montant total des dépenses pour l’acquisition des « data contents » auprès de tiers. 

63      Thomson Reuters e.a. observent que ces informations sont indispensables, notamment, pour déterminer dans quelle mesure la requérante dépend des contenus d’informations («data content») achetés à des fournisseurs comme Thomson Reuters, comme elle le prétend dans plusieurs moyens de la requête.

–       Appréciation du président

64      Il va de soi que le montant total dépensé pour l’acquisition des données nécessaires est une information qu’il faut classer en tant que confidentielle.

65      En sus, il n’est pas évident, et Thomson Reuters e.a. ne l’expliquent pas non plus, comment le montant total des dépenses puisse permettre d’en déduire dans quelle mesure la requérante dépend de contenus d’informations («data content») achetés à des fournisseurs tiers.

66      Par voie de conséquence, en mettant en balance les soucis de la requérante et ceux de Thomson Reuters e.a., il faut constater un intérêt accru de la requérante à garder ce montant secret et un intérêt réduit de Thomson Reuters e. a. à pouvoir le connaître.

67      Dès lors, il y a lieu d’accorder à la requérante la confidentialité pour le montant de ses dépenses pour l’acquisition de contenus d’informations (« data content ») auprès de tiers.

 Sur la demande de traitement confidentiel des informations contenues dans la lettre du 8 novembre 2007 de la requérante à la Commission, figurant à l’annexe A.10, p. 275 à 282, de la requête

–       Arguments des parties

68      À l’appui de sa demande de traitement confidentiel des informations concernant notamment les noms de tous les fournisseurs (banques, bourses) ainsi que l’indication des années faisant partie des dates qui figurent dans les différents exemples illustrant le comportement abusif et entravant de Reuters, la requérante précise que les identités des différents fournisseurs qui ont eu le courage, dans le passé, de s’opposer avec elle à Reuters, sont des secrets commerciaux internes à la requérante. La publication de ces informations pourrait avoir comme conséquences de causer des désavantages et des préjudices économiques pour les banques et les bourses concernées. Il ne pourrait notamment pas être exclu que ces clients seraient exposés à des mesures de rétorsion de la part de Thomson Reuters e.a. auxquelles ils ne pourraient à l’heure actuelle pratiquement plus échapper à défaut d’autres opérateurs sur le marché. Il serait également concevable que les clients concernés puissent être identifiés grâce à l’indication des années où les incidents relatés avaient eu lieu. Ainsi, ces chiffres devraient également être occultés. La requérante estime que le contenu de l’annexe A.10 et les reproches soulevés par elle resteront compréhensibles en dépit de l’occultation.

69      Thomson Reuters e.a. précisent que les informations qualifiées de confidentielles concernent, notamment, les dates auxquelles la requérante a pris contact avec Reuters pour installer un flux de données direct par le biais de l’interface SSL et l’identité des clients (en apparence), qui se sont prétendument présentés chez Reuters, afin d’accélérer le processus de fourniture des kits de développement, etc. Ces informations seraient indispensables, notamment, pour répondre aux affirmations de la requérante dans le quatrième moyen de la requête. Il serait extrêmement difficile pour les collaborateurs concernés de commenter ces affirmations sans connaître la date du contact auquel se réfère la requérante. En outre, Thomson Reuters considère que les dates auxquelles ont eu lieu les contacts particuliers entre Reuters et la requérante concernant cette question ne peuvent pas, de par leur nature même, être confidentielles vis-à-vis de Thomson Reuters, puisque cette dernière était partie au contrat en cause. De même, l’identité des clients (supposés) qui se sont présentés chez Reuters ne pourrait pas être confidentielle vis-à-vis de Thomson Reuters, puisque Reuters a apparemment été informée des prétendues interventions.

–       Appréciation du président

70      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la requérante qualifie elle-même les noms et dates dont elle demande l’occultation dans sa lettre du 8 novembre 2007, adressée à la Commission, comme secrets commerciaux internes. À la différence de l’affaire Esat Telecommunications Ltd./Commission (ordonnance du président de la cinquième chambre du Tribunal du 23 avril 2001, T‑77/00, non publiée au Recueil, points 18, 83 et 84), ces informations ne comprennent toutefois pas de données sensibles des fournisseurs, mais visent à documenter un certain comportement abusif de Reuters à l’égard de la requérante et de certains de ses fournisseurs dans le domaine des « contribution data ». Ainsi, ne contenant pas d’informations qui pourraient être qualifiées de secrets d’affaires d’ordre commercial, concurrentiel, financier ou comptable, ces informations n’ont pas un caractère secret, à la différence de l’avis de la requérante.

71      Pour autant que Thomson Reuters e.a. font savoir que ces données ne sauraient être non plus qualifiées de confidentielles puisque, selon les allégations de la requérante même, Reuters était en contact, en vue d’installer un flux de données direct par le biais de l’interface SSL, tant avec la requérante qu’avec les clients de celle-ci, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence du Tribunal, de telles informations peuvent effectivement perdre leur nature secrète et confidentielle lorsque le grand public ou certains milieux spécialisés peuvent y avoir accès (ordonnances Kronopoly/Commission, précitée, point 35 ; Hynix Semiconductor/Conseil, précitée, point 56, et du président de la première chambre du 5 août 2003, Glaxo Wellcome, T‑168/01, non publiée au Recueil, point 43).

72      À ce propos, il faut d’abord noter que les allégations de la requérante sous-tendent que l’identification des fournisseurs concernés par Reuters seul ne serait pas garantie ou, du moins, difficile. Ensuite, il y a lieu d’observer que les fournisseurs de la requérante étaient au courant des démarches de cette dernière auprès de Reuters pour autant qu’ils y étaient impliqués. Au vu du fait qu’il n’était tout de même pas impossible, tant pour Reuters que pour ces milieux spécialisés, d’avoir accès aux informations concernant les différentes démarches entreprises par la requérante, ces informations sur les noms et les dates ne sauraient être tenues pour confidentielles.

73      Dès lors, conformément à la jurisprudence citée au point 16 de la présente ordonnance, les noms et les dates ne sauraient être susceptibles de revêtir un caractère secret ou confidentiel que pour un motif qu’il appartient à la requérante de rapporter.

74      À ce propos, la requérante fait état de ses préoccupations selon lesquelles, en cas de divulgation de ces informations, ses fournisseurs risqueraient des désavantages et des préjudices économiques du fait que ceux-ci seraient exposées à des mesures de rétorsion de la part de Thomson Reuters auxquelles ils ne pourraient à l’heure actuelle pratiquement plus échapper à défaut d’autres opérateurs sur le marché.

75      À l’égard du comportement reproché de Reuters, il ressort en substance des cas d’exemples présentés par la requérante dans sa lettre du 8 novembre 2007 que les négociations entre Reuters et la requérante et/ou ses fournisseurs pour installer les services demandés ont certainement pris du temps, sans qu’il ne puisse être exclu que le retard n’était dû qu’à la complexité du contrat souhaité. Il n’apparaît toutefois pas que Reuters ait de sa part refusé d’installer les services demandés. D’ailleurs, aucun élément du dossier ne fait apparaître qu’un des fournisseurs concernés, dont le nom figure dans la lettre du 8 novembre 2007, ait demandé à la requérante de tenir son nom ainsi que la période en cause secrets.

76      Or, à part le prétendu comportement de Reuters dans le passé, la requérante ne présente pas d’autres éléments permettant d’étayer et de corroborer ces préoccupations à propos d’un comportement hostile de Thomson Reuters dans le futur à l’égard des fournisseurs en cause.

77      Dès lors, la requérante n’a pas su apporter, à suffisance de droit, des motifs justifiant le caractère confidentiel des informations sur les noms et les dates des fournisseurs contenues dans sa lettre du 8 novembre 2007.

78      Compte tenu de ce qui précède, il convient de refuser le traitement confidentiel pour les informations contenues dans l’annexe A.10, p. 276 à 282 de la requête figurant dans le courrier de la requérante du 8 novembre 2007.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DE LA SEPTIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

ordonne :

1)      Il est fait droit à la demande de traitement confidentiel que la Commission a présentée, par lettre du 2 février 2009, à l’égard de la partie intervenante MLex Ltd et qui concerne les passages occultés de son mémoire en défense ainsi que dans les annexes de ce mémoire et qui sont énumérés dans l’annexe C.1 de sa demande de traitement confidentiel.

2)      Il est fait droit à la demande de traitement confidentiel que la requérante a présentée, par lettre du 2 février 2009, à l’égard de MLex Ltd et qui concerne les passages occultés des annexes A.5, A.9 et A.10 de la requête introductive d’instance.

3)      Il est fait droit à la demande de traitement confidentiel que la requérante a présentée, par lettre du 10 février 2009, à l’égard des parties intervenantes Thomson Reuters Corp., Thomson Reuters plc, Reuters Group Ltd et The Woodbridge Co. Ltd et qui porte sur les informations

–        concernant la planification des nouveaux produits, les intervalles pour l’introduction de nouveaux produits et les actualisations des produits existants (« updates »), contenues dans l’annexe A.5, p. 208, de la requête, en réponse à la question 21, sous b), du questionnaire de la Commission du 4 septembre 2007,

–        visant la répartition de son chiffre d’affaires sur plusieurs sous-segments du marché qui se distinguent les uns des autres par la clientèle figurant à l’annexe A.5, p. 206, de la requête introductive d’instance, en réponse à la question 16 du questionnaire de la Commission du 4 septembre 2007, à condition que la requérante remplace les chiffres concernés par des fourchettes,

–        concernant la répartition du chiffre d’affaires réalisé avec différents types d’informations financières (« discrete content sets ») qui figurent à l’annexe A.9, p. 238, de la requête introductive d’instance, en réponse à la question 3 du questionnaire de la Commission      du 15 octobre 2007, à l’exception des domaines des « discrete content sets » dans lesquels la requérante n’exerce aucune activité,

–        concernant l’identité des sources auprès desquelles la requérante se fournit en contenus de fondamentaux et de «ownership» (« fundamentals and ownership contents »), qui sont mentionnés à l’annexe A.9, p. 255, de la requête, en réponse à la question 16 du questionnaire de la Commission du 15 octobre 2007,

–        concernant le montant total des dépenses encourues par la requérante pour l’acquisition de contenus (« data content ») auprès de tiers et contenues dans l’annexe A.9, p. 256, de la requête, en réponse à la question 17 du questionnaire de la Commission du 15 octobre 200715 octobre 2007.

4)      La demande de traitement confidentiel de la requérante à l’égard des parties intervenantes Thomson Reuters Corp., Thomson Reuters plc, Reuters Group Ltd et The Woodbridge Co. Ltd est rejetée quant aux informations contenues dans sa réponse à la question 15 du questionnaire de la Commission du 15 octobre 2007 et celles qui figurent dans son courrier du 8 novembre 2007, adressé à la Commission.

5)      Une version non confidentielle des pièces du dossier comportant les passages visés au point 3, deuxième tiret, remplaçant les chiffres indiqués par des fourchettes ainsi que des pièces du dossier comportant les passages visés au point 4, communiquée par la partie requérante dans le délai imparti par le greffier, sera signifiée par les soins du greffier aux parties intervenantes concernées.

6)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 14 octobre 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       N. J. Forwood


* Langue de procédure : l’allemand.