Language of document : ECLI:EU:T:2021:157

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

24 mars 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de déchéance – Marque de l’Union européenne figurative Power Stars – Déclaration partielle de déchéance – Absence partielle d’usage sérieux – Preuve de l’usage sérieux – Article 51, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement (UE) 2017/1001] – Obligation de motivation – Article 75, paragraphe 1, première phrase, du règlement no 207/2009 (devenu article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001) – Droit d’être entendu – Article 75, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 207/2009 (devenu article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑588/19,

Novomatic AG, établie à Gumpoldskirchen (Autriche), représentée par Me M. Ringer, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Walicka et M. S. Hanne, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

adp Gauselmann GmbH, établie à Espelkamp (Allemagne), représentée par Me K. Mandel, avocate,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 13 juin 2019 (affaire R 2038/2018‑2), relative à une procédure de déchéance entre adp Gauselmann et Novomatic,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, V. Kreuschitz et Mme G. Steinfatt (rapporteure), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 27 août 2019,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 8 novembre 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 28 octobre 2019,

à la suite de l’audience du 25 septembre 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 juillet 2009, la requérante, Novomatic AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI) [devenu l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)], en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO 2009, L 78, p. 1 [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est la marque figurative suivante :

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3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 28 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Matériel informatique et logiciels en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéoloterie ou jeux de hasard également sur l’internet » ;

–        classe 28 : « Équipements pour casinos, à savoir tables pour le jeu de roulette, roues pour le jeu de roulette ; jeux de casino, machines de jeux de hasard automatiques ou non, en particulier pour utilisation commerciale dans des casinos et des salles de jeux avec ou sans paiement de gains ou jeux de hasard sur l’internet ; machines à sous et/ou machines de jeux électroniques contre paiement avec ou sans possibilités de gains ; appareils de jeux de hasard électroniques et électrotechniques, automates de jeux de hasard, machines de jeux de hasard, machines à sous actionnées par l’insertion de pièces, de jetons, de billets, de tickets ou au moyen de supports d’enregistrement électroniques, magnétiques ou biométriques, en particulier pour l’utilisation industrielle dans des casinos et des salles de jeu avec ou sans compensation monétaire ; carrosseries de machines à sous, machines de jeux de hasard automatiques ou non ; appareils électriques, électroniques ou électromécaniques pour la réalisation de jeux de bingo, de jeux de loterie ou des jeux vidéo de loterie et pour bureaux de paris, connectés en réseau ou non ; machines à étirer électropneumatiques et électriques (jeux) » ;

–        classe 41 : « Gestion de casinos ou de bureaux de paris, de bureaux de loto et/ou de bureaux de loterie ; exploitation de locaux et de salles de jeu et/ou de casinos internet et de plateformes de paris en ligne ».

4        La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 36/2009, du 21 septembre 2009.

5        La marque contestée a été enregistrée le 21 janvier 2010 sous le numéro 8435695 pour les produits et services visés au point 3 ci-dessus et cet enregistrement a été publié au Bulletin des marques communautaires no 14/2010, du 25 janvier 2010.

6        Le 7 octobre 2016, l’intervenante, adp Gauselmann GmbH, a déposé une demande en déchéance partielle de la marque contestée, au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), du règlement 2017/1001], pour l’ensemble des produits et services relevant des classes 28 et 41 visés au point 3 ci-dessus ainsi que pour le « matériel informatique, en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéoloterie sur l’internet » relevant de la classe 9.

7        Le 13 mars 2017, la requérante a communiqué des éléments de preuve de l’usage de la marque contestée, dont deux déclarations tenant lieu de serment provenant de deux employés d’une de ses filiales, A et B.

8        Le 22 août 2018, la division d’annulation a déchu de ses droits la requérante pour les produits et services visés par la demande en déchéance.

9        Le 22 octobre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’annulation.

10      Par décision du 13 juin 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours formé devant elle.

11      Tout d’abord, la chambre de recours a estimé, aux points 20 à 22 de la décision attaquée, que la durée et le lieu de l’usage de la marque contestée avaient été prouvés à suffisance de droit. Ensuite, elle a considéré, aux points 23 à 31 de la décision attaquée, que les éléments de preuve fournis ne permettaient pas de prouver la nature de l’usage de la marque contestée pour les produits et services visés par la demande en déchéance. Enfin, aux points 32 à 35 de la décision attaquée, elle a ajouté, en substance, que l’importance de l’usage de la marque contestée pour les produits et services visés par la demande en déchéance n’était pas non plus suffisamment démontrée.

12      S’agissant de la nature de l’usage, la chambre de recours a constaté que les éléments de preuve fournis démontraient que la marque contestée avait servi à désigner l’un des multiples jeux disponibles sur des appareils dits « multi-jeux », car elle apparaissait sur l’écran desdits appareils. Elle a considéré que la marque contestée n’avait donc été utilisée que pour des logiciels de jeux. Étant donné que les « logiciels, en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéoloterie ou jeux de hasard également sur l’internet » n’étaient pas visés par la demande en déchéance, elle en a conclu que la nature de l’usage démontrée par les éléments de preuve n’était pas pertinente aux fins de la procédure de déchéance devant elle.

13      S’agissant de l’importance de l’usage de la marque contestée pour les produits et services visés par la demande en déchéance, la chambre de recours a également constaté qu’elle n’avait pas été suffisamment démontrée, dans la mesure où, d’une part, les chiffres d’affaires des années 2010 à 2016 fournis dans l’une des déclarations tenant lieu de serment n’étaient pas étayés par des éléments de preuve supplémentaires et, d’autre part, il n’existait qu’une seule facture, parmi les nombreuses factures produites par la requérante dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO en tant qu’annexe LSG 9, qui mentionnait la marque contestée. En l’absence d’autres éléments de preuve, tels que des bons de commande ou de livraison, cette facture, relative à la vente de deux pièces de Power Stars Super Gaminator III en 2012, a été considérée comme insuffisante pour prouver l’importance de l’usage de ladite marque. L’annexe LSG 10, contenant une liste de ventes à laquelle s’était référée la requérante devant la chambre de recours, a également été jugée insuffisante par cette dernière, au motif que la marque contestée n’y était prétendument pas mentionnée.

 Conclusions des parties

14      La requérante, en limitant le recours à certains des produits visés par la demande en déchéance devant l’EUIPO, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée dans la mesure où le recours a été rejeté pour les produits suivants (ci-après les « produits litigieux »):

–        « Matériel informatique en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéoloterie sur l’internet » relevant de la classe 9 ;

–        « Jeux de casino, machines de jeux de hasard automatiques ou non, en particulier pour utilisation commerciale dans des casinos et des salles de jeux avec ou sans paiement de gains ou jeux de hasard sur l’internet ; machines à sous et/ou machines de jeux électroniques contre paiement avec ou sans possibilités de gains ; appareils de jeux de hasard électroniques et électrotechniques, automates de jeux de hasard, machines de jeux de hasard, machines à sous actionnées par l’insertion de pièces, de jetons, de billets, de tickets ou au moyen de supports d’enregistrement électroniques, magnétiques ou biométriques, en particulier pour l’utilisation industrielle dans des casinos et des salles de jeu avec ou sans compensation monétaire ; carrosseries de machines à sous, machines de jeux de hasard automatiques ou non ; appareils électriques, électroniques ou électromécaniques pour la réalisation de jeux de bingo, de jeux de loterie ou des jeux vidéo de loterie et pour bureaux de paris, connectés en réseau ou non ; machines à étirer électropneumatiques et électriques (automates de jeux) » relevant de la classe 28 ;

–        à titre principal, réformer la décision attaquée en rejetant la demande de déchéance dans cette mesure et en condamnant l’intervenante à supporter les frais des procédures devant la chambre de recours et devant la division d’annulation, et, à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire devant l’EUIPO en ce qui concerne cette partie de la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

15      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

16      À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement 2017/1001, le deuxième, de la violation de l’obligation de motivation prévue à l’article 94, paragraphe 1, première phrase, dudit règlement et, le troisième, de la violation du droit d’être entendu prévu à l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du même règlement.

 Observations liminaires

 Sur l’objet du litige

17      À titre liminaire, s’agissant de la portée du recours, il convient d’observer, à l’instar de l’EUIPO et de l’intervenante, que la requérante ne remet pas en cause la décision attaquée en ce qu’elle rejette le recours pour ce qui est des services relevant de la classe 41 énumérés au point 3 ci-dessus et les « équipements pour casinos, à savoir tables pour le jeu de roulettes, roues pour le jeu de roulette » relevant de la classe 28.

 Sur le renvoi global aux arguments présentés pendant la procédure devant l’EUIPO

18      L’EUIPO invoque l’irrecevabilité du renvoi global, au point 60 de la requête, à tous les mémoires déposés par la requérante devant la division d’annulation et la chambre de recours.

19      À cet égard, il convient de rappeler que la requérante ne saurait valablement renvoyer le Tribunal, par un simple renvoi global, à l’ensemble des arguments qu’elle a développés dans le cadre de la procédure devant l’EUIPO. En effet, il n’incombe pas au Tribunal de se substituer aux parties en essayant de rechercher les éléments pertinents dans les documents auxquels elles se réfèrent. Il s’ensuit que la requête, pour autant qu’elle renvoie aux écrits déposés devant l’EUIPO, est irrecevable dans la mesure où le renvoi global qu’elle contient n’est pas rattachable aux moyens et aux arguments développés dans celle-ci [voir, en ce sens, arrêt du 15 décembre 2016, Keil/EUIPO – NaturaFit Diätetische Lebensmittelproduktion (BasenCitrate), T‑330/15, non publié, EU:T:2016:744, point 13 et jurisprudence citée].

 Sur le droit matériel applicable ratione temporis

20      Compte tenu de la date d’introduction de la demande de déchéance en cause, en l’occurrence le 7 octobre 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, le présent litige est régi par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009, tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil sur la marque communautaire et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d'application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21) (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 2019, Viridis Pharmaceutical/EUIPO, C‑668/17 P, EU:C:2019:557, point 3). À cet égard, il convient de noter qu’il ressort des dispositions de l’article 55, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 que l’effet d’une éventuelle déclaration de déchéance est rétroactif à compter de la date de la demande en déchéance. Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001. Il y a lieu de relever toutefois que, en ce qui concerne la preuve de l’usage sérieux de la marque contestée, en application notamment de l’article 82, paragraphe 2, sous d), f), et i) du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), le litige est régi par les dispositions du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1). 

21      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée ainsi que par la requérante et l’EUIPO dans leurs écritures aux dispositions du règlement 2017/1001 comme visant les dispositions d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement no 207/2009 [devenu article 58, paragraphe 1, sous a), et paragraphe 2, du règlement 2017/1001]

22      La requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a estimé que les éléments de preuve soumis n’étaient pas de nature à démontrer un usage sérieux de la marque contestée à l’égard, d’une part, des « jeux de casino » relevant de la classe 28 (premier grief), et, d’autre part, des autres produits couverts par la marque contestée relevant des classes 9 et 28, que la requérante qualifie globalement d’« automates de jeux » (second grief).

23      Aux termes de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, tel que modifié, le titulaire de la marque de l’Union européenne est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’EUIPO ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon, si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union européenne pour les produits ou les services pour lesquels elle était enregistrée, et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage.

24      En l’espèce, tant la division d’annulation que la chambre de recours ont considéré la période comprise entre le 7 octobre 2011 et le 6 octobre 2016 comme étant la période de cinq ans pour laquelle il incombait à la requérante de démontrer un usage sérieux de la marque contestée, ce que les parties ne contestent pas.

25      Selon l’article 51, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 (devenu article 58, paragraphe 2, du règlement 2017/1001), si la cause de déchéance n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, le titulaire n’est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés.

26      En vertu de la règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement no 2868/95 (devenue l’article 10, paragraphe 3, du règlement délégué 2018/625), applicable aux procédures de déchéance conformément à la règle 40, paragraphe 5, du même règlement (devenue article 19, paragraphe 1 du règlement délégué 2018/625), la preuve de l’usage doit porter sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les produits et les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée. Ces exigences en matière de preuves d’usage de la marque antérieure sont cumulatives [voir, en ce sens, arrêts du 5 octobre 2010, Strategi Group/OHMI – RBI (STRATEGI), T‑92/09, non publié, EU:T:2010:424, point 43, et du 12 mars 2020, Maternus/EUIPO – adp Gauselmann (Jokers WILD Casino), T‑321/19, non publié, EU:T:2020:101, point 51].

 Sur le premier grief du premier moyen, relatif à l’usage sérieux de la marque contestée pour les « jeux de casino » relevant de la classe 28

27      La requérante soutient que les éléments de preuve fournis étaient de nature à démontrer un usage sérieux de la marque contestée pour les « jeux de casino » relevant de la classe 28.

28      S’agissant de la nature de l’usage, la requérante explique que, lorsque le public est confronté à la marque contestée apposée sur des automates de jeux tels que ceux représentés au point 28 de la décision attaquée et sur les photos des annexes LSG 1, 4, 5, 22, 23, 24, 26, et 27, il la qualifie et la perçoit directement comme désignant un « jeu », plus précisément, en l’espèce, un « jeu de casino ». Les annexes LSG 5, 17, 18, 19, 20, 21, 23 et 24, qui qualifient la marque contestée de « jeu » ou, en anglais, de « game », plaideraient également en faveur de ce constat. À cet égard, la requérante fait référence au point 31 de la décision attaquée, dans lequel la chambre de recours a relevé qu’il découlait des éléments de preuve fournis que la marque contestée avait servi à désigner l’un des multiples « jeux qui p[ouvaient] être joués sur les appareils “Multi-Game” (multi-jeux) ».

29      Or, selon la requérante, les jeux virtuels relèvent également de la notion de « jeux de casino » de la classe 28, ainsi qu’il résulterait des termes utilisés dans la liste d’enregistrement de la marque contestée, à savoir « jeux de casino, en particulier pour utilisation commerciale dans des casinos et des salles de jeux avec ou sans paiement de gains ou jeux de hasard sur l’internet ». La requérante se réfère en outre aux annexes LSG 11 à 14, qui démontreraient que la marque contestée est également utilisée pour les « jeux sur internet ».

30      S’agissant de l’importance de l’usage de la marque contestée, la requérante fait valoir que la chambre de recours a, à tort, omis d’effectuer une appréciation globale des éléments de preuve produits, à savoir les déclarations tenant lieu de serment, les factures jointes dans l’annexe LSG 9 et la liste de ventes jointe dans l’annexe LSG 10, en tenant compte de tous les facteurs pertinents, et qu’elle a commis une erreur de droit en concluant à l’insuffisance desdits éléments de preuve. Elle estime notamment que les factures auraient dû être prises en considération et lues à la lumière des explications contenues dans les déclarations tenant lieu de serment selon lesquelles, si les factures ne mentionnaient pas spécifiquement la marque contestée, c’est en raison du fait que cette dernière désignait un jeu virtuel pratiqué sur des appareils multi-jeux, de sorte que toutes les variantes de ce type d’appareil (variantes appelées Gaminator, Super Gaminator, Coolfire II, Novostar II, etc.) affichaient sur leur écran la marque contestée. Elle critique aussi le fait que les déclarations tenant lieu de serment auraient été écartées par la chambre de recours, en avançant que le fait qu’elles proviennent de l’entourage de l’entreprise ne suffisait pas, selon la jurisprudence, à leur ôter toute valeur probante.  En outre, elle estime erroné le constat, figurant au point 34 de la décision attaquée, selon lequel les chiffres concernant les années 2010 à 2016 fournis dans l’une des déclarations tenant lieu de serment n’étaient pas étayés par des éléments de preuve supplémentaires et se réfère, à cet égard, à tous les autres éléments de preuve fournis dans les annexes LSG 1 à 29, tels que les documents publicitaires, photographies, articles de tiers, chiffres des ventes et consultations de sites. Enfin, elle fait valoir une appréciation incorrecte de la liste de ventes figurant dans l’annexe LSG 10, dans laquelle la marque Power Stars serait citée à la page 2, et cela en se référant à un numéro de commande 22321391, lequel correspondait à la facture produite dans l’annexe LSG 9.

31      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

32      Tout d’abord, s’agissant du fait que la marque contestée figure sur les écrans des appareils dits multi-jeux, il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré que, dès lors que c’était normalement le logiciel de jeux qui apparaissait sur ces écrans, ladite marque servait en réalité à désigner l’un des multiples jeux auxquels il était possible de jouer sur ces appareils et était donc utilisée pour des logiciels de jeux. Or, les « logiciels en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéoloterie ou jeu de hasard sur l’internet » relevant de la classe 9 ne figurent pas parmi les produits visés par la demande en déchéance.

33      Dans la mesure où la motivation est également critiquée dans le cadre du présent moyen, même si elle fait plus spécifiquement l’objet du deuxième moyen, il y a lieu de relever que, en constatant que les éléments de preuve fournis n’étaient de nature à confirmer l’usage de la marque contestée que pour les « logiciels de jeux », lesquels ont été considérés comme ne faisant pas partie des produits visés par la demande en déchéance, la chambre de recours a constaté un défaut de preuves de la nature de l’usage s’agissant de tous les produits et services visés par ladite demande, y compris les « jeux de casino » relevant de la classe 28.

34      Sur le fond, premièrement, force est de constater que la requérante, dans son argumentation relative aux « jeux de casino », énumère de façon erronée les produits contenus dans la classe 28. En effet, elle fait référence, au point 25 de la requête, aux « jeux de casino, en particulier pour utilisation commerciale dans des casinos et des salles de jeux avec ou sans paiement de gains ou jeux de hasard sur l’internet ». Au point 30 de la requête, elle fait valoir la même énumération, au soutien de l’argument selon lequel les « jeux de casino » relevant de la classe 28 couvriraient, « en particulier », les « jeux de hasard sur Internet ».

35      Or, la partie pertinente de la liste des produits compris dans la classe 28 pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée se lit comme suit : « jeux de casino, machines de jeux de hasard automatiques ou non, en particulier pour utilisation commerciale dans des casinos et des salles de jeux avec ou sans paiement de gains ou jeux de hasard sur l’internet ».

36      Étant donné le placement des virgules et l’utilisation de l’élément « en particulier » dans cette liste, les « jeux de hasard sur l’internet » se présentent comme une sous-catégorie à laquelle peuvent servir les « machines de jeux de hasard automatiques ou non » et non les « jeux de casino ». Sont donc couvertes par la marque contestée les machines de jeux, en particulier celles sur lesquelles il est possible de jouer aux jeux de hasard sur l’internet, relevant de la classe 28 et, dans une catégorie distincte, les « jeux de casino ».

37      Dès lors, l’argumentation selon laquelle les « jeux de casino » relevant de la classe 28 engloberaient les jeux virtuels, car ils comprendraient les « jeux de hasard sur l’internet » doit être rejetée.

38      Cette conclusion est corroborée par la règle 2, paragraphe 2, du règlement no 2868/95, applicable à la date de la demande d’enregistrement, soit le 20 juillet 2009, selon laquelle « [l]a liste des produits et services doit être établie de manière à faire apparaître clairement leur nature et à ne permettre la classification de chaque produit et de chaque service que dans une seule classe de la classification de Nice ».

39      Or, alors que les « jeux de casino » relevant de la classe 28 doivent correspondre à un « produit » susceptible de commercialisation, la requérante n’explique pas, alors que cela ne ressort pas non plus des éléments de preuve fournis, quel serait le produit « jeu de casino » qu’elle exploiterait commercialement et qui, tout en ne correspondant pas à un logiciel de jeu relevant de la classe 9, consisterait en un jeu « virtuel » apparaissant sur l’écran des appareils multi-jeux. Force est de constater qu’elle n’apporte pas de clarification à ce sujet et que les éléments de preuve fournis ne montrent la marque contestée que sur l’écran des appareils de jeux de casino, ce qui démontre, ainsi que la chambre de recours l’a constaté, qu’elle est utilisée pour désigner un programme informatique de jeu qui se matérialise sur l’écran des appareils de casino. La chambre de recours a donc considéré à juste titre que le logiciel et le « jeu » tel que visible sur l’écran, se confondaient.

40      Par conséquent, la requérante n’a pas prouvé l’usage de la marque contestée pour un autre produit « virtuel » qu’un logiciel de jeu relevant de la classe 9.

41      Le bien-fondé de l’analyse qui précède est encore corroboré par la neuvième édition de la classification de Nice, publiée en juin 2006 et entrée en vigueur en janvier 2007, à la lumière de laquelle l’enregistrement de la marque contestée, qui avait été demandé le 20 juillet 2009, doit être compris. La classe 9 comprend, selon la « liste alphabétique des produits dans l’ordre des classes » qui l’accompagne, les « jeux (appareils pour ---) conçus pour être utilisés avec un écran d’affichage indépendant ou un moniteur » et « jeux (logiciels de ---) ». En revanche, dans la classe 28 sont regroupés les « jeux automatiques [machines] à prépaiement » et les « jeux autres que ceux conçus pour être utilisés avec un écran d’affichage indépendant ou un moniteur » ainsi que les « appareils pour » les derniers. Sont donc enregistrables, d’une part, les logiciels de jeux et les appareils de jeux qui se jouent sur écran dans la classe 9 et, d’autre part, les machines de jeux automatiques à prépaiement et les jeux qui ne se jouent pas sur un écran dans la classe 28 ainsi que les appareils y afférant. À part ces catégories et leurs sous-catégories, il n’existe pas de produit qui pourrait être décrit comme « jeu virtuel » et qui serait susceptible d’être commercialisé et enregistré au titre du droit des marques.

42      Deuxièmement, l’argumentation de la requérante, se référant aux annexes LSG 11 à 14, qui démontrent, selon elle, que la marque contestée a également été utilisée pour les « jeux sur l’internet »,  est inopérante, dans la mesure où ceux-ci ne font pas partie, en tant que tels, des produits litigieux de la classe 28, qui désignent des machines sur lesquelles il est possible de jouer aux jeux de hasard sur l’internet (voir points 35 à 37 ci-dessus).

43      Troisièmement, l’annexe LSG 11 contient un extrait du site Internet « www.novomatic.com », présentant le nombre et la durée de vues de plusieurs pages Internet de la requérante, intitulées par exemple « Power Stars – Video Slots Single Games – Products & Services AGI – Novomatic » ou « Power Stars – Detail – Novomatic ». Les annexes LSG 12 à 14 sont des tableaux non datés recensant le nombre de fois où il a été joué au jeu Power Stars en ligne, sur divers sites Internet, de 2011 à 2016. Force est de constater que ces preuves ne font que confirmer que les jeux accessibles sur des sites de casinos en ligne correspondent en réalité à des « logiciels en particulier pour […] jeux de hasard également sur l’internet » relevant de la classe 9, qui, ainsi que la chambre de recours l’a dûment expliqué, n’étaient pas visés par la demande en déchéance.

44      Quatrièmement, en ce qui concerne les annexes LSG 5 et 17 à 24 invoquées par la requérante, il en ressort également que la marque contestée est utilisée pour désigner l’un des multiples jeux auxquels il est possible, ainsi que la chambre de recours l’a également constaté, de jouer sur certains appareils de jeux de casino.

45      Dès lors, les arguments afférents à l’importance de l’usage de la marque contestée pour un « jeu virtuel » s’avérant inopérants, étant donné qu’un tel produit ne fait pas partie des produits litigieux pour lesquels l’intervenant a demandé que la déchéance de la marque contestée soit déclarée, l’ensemble des arguments de la requérante s’agissant des « jeux de casino » relevant de la classe 28 doit être rejeté.

 Sur le second grief du premier moyen, relatif à l’usage sérieux de la marque contestée pour les produits relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino »

46      Par son second grief, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû conclure que les éléments de preuve fournis démontraient l’usage sérieux de la marque contestée pour les produits litigieux autres que les « jeux de casino », relevant des classes 9 et 28. Selon elle, ces produits peuvent tous être désignés sous le terme commun d’« automates de jeux », car leurs différences relèvent uniquement de caractéristiques spécifiques comme l’insertion de pièces, de billets, etc., voire même seraient purement terminologiques.

47      L’argumentation de la requérante au soutien de ce second grief se divise en deux branches, tirées, la première, de la nature de l’usage et, la seconde, de l’importance de l’usage.

48      À titre liminaire, il y a lieu de relever que les arguments de la requérante selon lesquels certains éléments de preuve permettraient de rattacher l’usage revendiqué à une date ou un lieu sont inopérants, dans la mesure où la chambre de recours a considéré, aux points 20 à 22 de la décision attaquée, que la durée et le lieu de l’usage de la marque contestée avaient suffisamment été prouvés.

–       Sur la première branche du second grief du premier moyen, tirée d’une appréciation erronée de la nature de l’usage concernant les produits relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino »

49      Premièrement, la requérante fait valoir que le public pertinent perçoit la marque contestée comme désignant non seulement des logiciels de jeux et des jeux de casino, mais également des automates ou des appareils de jeux, au motif que l’écran sur lequel apparaît la marque contestée ferait partie de l’appareil en tant que tel. À cet égard, la situation serait comparable à celle des écrans des ordinateurs portables sur lesquels les consommateurs verraient apparaître non seulement le nom du logiciel, mais aussi la marque de l’appareil. Deuxièmement, la requérante se réfère à un article publié par un tiers, produit dans l’annexe LSG 25, dans lequel il serait question de machines à sous et d’automates de jeux « Power Stars ». Troisièmement, la requérante renvoie à la facture reproduite en première page de l’annexe LSG 9, qui établirait que l’ensemble de l’appareil est vendu sous couvert de la marque contestée. Quatrièmement, la requérante estime que l’arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN) (T‑126/03, EU:T:2005:288, points 45 et 46), est transposable aux faits de l’espèce, en ce sens que l’usage propre à assurer le maintien des droits sur la marque contestée s’étendrait à l’ensemble des produits faisant l’objet du présent recours.

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

51      Une marque fait l’objet d’un usage sérieux lorsqu’elle est utilisée, conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l’identité d’origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l’exclusion d’usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque (voir, par analogie, arrêt du 11 mars 2003, Ansul, C‑40/01, EU:C:2003:145, point 43).

52      Pour examiner, dans un cas d’espèce, le caractère sérieux de l’usage d’une marque antérieure, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce [arrêt du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 32]. L’usage sérieux d’une marque ne peut pas être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent une utilisation effective et suffisante de la marque sur le marché concerné [voir arrêt du 13 mai 2009, Schuhpark Fascies/OHMI – Leder & Schuh (jello SCHUHPARK), T‑183/08, non publié, EU:T:2009:156, point 24 et jurisprudence citée]. L’appréciation du caractère sérieux de l’usage de la marque doit reposer sur l’ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de l’exploitation commerciale de celle-ci dans la vie des affaires, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l’étendue et la fréquence de l’usage de ladite marque. Lorsqu’il répond à une réelle justification commerciale, dans les conditions précitées, un usage même minime de la marque peut être suffisant pour établir l’existence d’un caractère sérieux [arrêt du 16 novembre 2011, Buffalo Milke Automotive Polishing Products/OHMI – Werner & Mertz (BUFFALO MILKE Automotive Polishing Products), T‑308/06, EU:T:2011:675, point 69 ; voir également, par analogie, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 27].

53      En ce qui concerne la nature de l’usage, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, il n’est pas nécessaire que la marque soit apposée sur les produits pour que cette dernière fasse l’objet d’un usage sérieux par rapport à ceux-ci [voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2015, Cactus/OHMI – Del Rio Rodríguez (CACTUS OF PEACE CACTUS DE LA PAZ), T‑24/13, non publié, EU:T:2015:494, point 65 et jurisprudence citée]. Il suffit que l’utilisation de la marque établisse un lien entre cette marque et la commercialisation des produits. La présence de la marque dans des factures, articles et publicités concernant les produits concernés peut établir ce lien [voir, en ce sens, arrêt du 6 mars 2014, Anapurna/OHMI – Annapurna (ANNAPURNA), T‑71/13, non publié, EU:T:2014:105, point 60].

54      Au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a exposé qu’il était indiqué dans la déclaration tenant lieu de serment de A que la marque contestée avait été utilisée sur différents appareils dits « multi-jeux » et figurait sur l’écran desdits appareils, ainsi que cela ressortirait des annexes LSG 1, 4, 5, 26 et 27. Au point 28 de la décision attaquée, elle a également précisé que c’était normalement le logiciel de jeux qui apparaissait sur l’écran, ce qui était confirmé par la déclaration de A et le mémoire exposant les motifs du recours de la requérante. La chambre de recours a toutefois relevé, au point 29 de sa décision, que la marque contestée n’était pas apposée sur les « appareils » ou « machines » de jeux en tant que tels, en ajoutant que ces appareils (ou machines) de jeux de casino étaient commercialisés sous d’autres appellations que celle de la marque contestée, telles que Gaminator, Super Gaminator, Ultimate 10, Novostar, Multigame, Novostar II, Coolfire II ou Novo Vision Slant Top, en s’appuyant à cet égard sur la déclaration tenant lieu de serment de A. Au point 30 de la décision attaquée, elle a ajouté que la requérante avait elle-même admis, dans sa lettre du 13 mars 2017, relative à l’annexe LSG 1, que la marque contestée ne figurait pas sur l’appareil de jeux lui-même, mais sur les « deux écrans ». La chambre de recours en a conclu que la marque contestée servait à désigner l’un des multiples jeux auxquels il était possible de jouer sur des appareils dits « multi-jeux » (multiple game) et était donc utilisée pour des logiciels de jeux. Partant, étant donné que les « logiciels en particulier pour casinos et salles de jeux de hasard, pour machines de jeux de hasard, machines à sous, jeux automatiques de vidéo loterie ou jeux de hasard également sur l’internet » relevant de la classe 9 n’étaient pas concernés par la demande en déchéance, la chambre de recours a conclu, en substance, que les éléments de preuve d’usage fournis étaient dénués de pertinence.

55      Les arguments de la requérante ne remettent pas en cause cette analyse.

56      En premier lieu, il ressort des photos d’appareils de jeux reproduites au point 28 de la décision attaquée, extraites des annexes LSG 1, 4, 5, 26 et 27, que la marque contestée ne figure pas sur l’appareil lui-même, mais uniquement sur l’écran de celui-ci. La requérante a elle-même confirmé ce constat dans ses écritures ainsi que dans ses plaidoiries à l’audience.

57      L’argument de la requérante selon lequel le public pertinent percevra la marque contestée comme désignant également des « automates de jeux », au motif que l’écran sur lequel apparaît la marque contestée fait partie de l’appareil en tant que tel, relève d’une lecture erronée de la décision attaquée. En soulignant que la marque contestée apparaissait « sur l’écran », la chambre de recours entendait indiquer que cette marque apparaissait, une fois que l’appareil de jeux était allumé, en tant que contenu numérique, généré par un logiciel, et non comme une inscription apposée sur la pièce de l’appareil que constituait l’écran. Dès lors, il y a lieu de rejeter cet argument.

58      Quant à l’analogie invoquée par la requérante avec les écrans des ordinateurs portables sur lesquels les consommateurs verraient apparaître non seulement le nom du logiciel, mais aussi la marque de l’appareil, il y a lieu de rappeler que la marque contestée sert à commercialiser l’un des jeux auxquels il est possible de jouer sur des appareils multi-jeux. Force est de constater que le public reconnaîtra la marque contestée par rapport à ce jeu dont la spécificité est de faire apparaître des jokers sous forme d’étoiles (Power Stars) sur les roulettes, et non par rapport à l’appareil sur lequel ce jeu est chargé et qui, quant à lui, ne présente pas de telles particularités. Il pourrait, à la rigueur, en être autrement si ledit jeu était commercialisé comme étant chargé en tant que jeu unique sur un automate de jeu. Dans ces circonstances, le consommateur pourrait, en effet, se servir du nom du jeu pour faire référence audit automate. Or, en l’espèce, le jeu Power Stars ne constitue que l’un, parmi plusieurs autres, des jeux chargés sur des appareils multi-jeux. Par conséquent, le consommateur ne se servira pas de la marque contestée pour faire référence à l’appareil lui-même.

59      En deuxième lieu, dans l’article d’un tiers auquel la requérante se réfère et qui a été publié le 18 avril 2013 sur le site Internet « www.casinoautomaten.org », il est, certes, affirmé que cette dernière a lancé sur le marché une machine à sous (Slotmachine) sous la marque contestée. Toutefois, dans la mesure où il ressort de l’ensemble des autres pièces fournies que le jeu commercialisé sous couvert de la marque contestée imite une machine à sous, il ne peut être déduit de cet article que ladite marque est utilisée en relation avec un automate physique de jeux. Bien au contraire, le titre de l’article en question est « Power Stars Automat online ». L’article se réfère donc à un jeu de machine à sous en ligne qui, partant, correspond à un logiciel de jeux de hasard sur l’internet. Cette analyse est corroborée par le fait que le contenu de l’article consiste en la description du fonctionnement du jeu Power Stars. Dès lors, cet argument doit être rejeté.

60      En troisième lieu, la requérante renvoie à la facture du 1er juin 2012 reproduite en première page de l’annexe LSG 9, qui établirait que l’appareil est vendu dans son ensemble sous couvert de la marque contestée. Elle estime qu’une facture prouve que la commande a été passée au préalable. La chambre de recours a considéré que cette facture n’était pas une preuve suffisante, car elle n’était pas étayée par d’autres éléments de preuve comme des bons de commande ou de livraison. L’EUIPO indique, dans le mémoire en réponse, que la même transaction apparaît deux fois, une première fois dans l’annexe LSG 10 et une seconde fois dans l’annexe LSG 9. Il fait valoir que le même fait ne peut pas être analysé deux fois au profit de la requérante, même s’il est mentionné dans différents documents, l’annexe LSG 10 ne contenant pas d’autre élément de preuve de l’usage de la marque contestée pour les machines de jeux, qui aille au-delà de celles contenues dans l’annexe LSG 9.

61      Il ressort de la facture du 1er juin 2012 que deux machines avec une désignation comportant notamment la dénomination Power Stars ont été vendues à un acheteur identifié au Portugal. La requérante relève à juste titre que cette vente se retrouve dans la liste des livraisons (annexe LSG 10) dans laquelle elle figure avec le même numéro d’ordre (22321391) et avec comme date de livraison le 11 mai 2012.

62      Toutefois, cette liste de livraisons ne corrobore pas l’usage de la marque pour les automates de jeux, la dénomination Power Stars n’y étant utilisée que pour identifier la compilation des jeux chargés sur les appareils vendus (Spielemix), alors que ces derniers, désignés comme « boîtiers » (Gehäuse), s’appellent FV610. Au contraire, il pourrait même être déduit de cette liste de livraisons que la dénomination Power Stars figurant sur la facture comprise dans l’annexe LSG 9 se réfère non pas aux deux appareils de jeux vendus, mais bien aux logiciels chargés sur ces appareils et vendus avec eux, la dénomination FV610, qui désigne, selon la liste des livraisons, le type de l’appareil, figurant aussi sur la facture, à savoir juste en-dessus des mots « power stars ». Il ressort en outre de cette liste des livraisons que l’appareil FV610 a été vendu avec différentes compilations de jeux.

63      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu que la seule facture jointe dans l’annexe LSG 9 ne suffisait pas à établir la nature de l’usage de la marque contestée pour les produits litigieux relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino », vu que d’autres éléments de preuve de la nature de l’usage qui viendraient s’y ajouter faisaient défaut.

64      En quatrième lieu, la requérante fait référence à la jurisprudence selon laquelle, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection, dans une procédure d’opposition, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée. En revanche, selon cette jurisprudence, si une marque a été enregistrée pour des produits ou services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie aux fins de l’opposition (arrêt du 14 juillet 2005, ALADIN, T‑126/03, EU:T:2005:288, point 45).

65      En l’espèce, la requérante soutient que, dès lors qu’elle a rapporté la preuve de l’usage sérieux de la marque pour les automates de jeu, cette preuve s’étend également à tous les produits autres que les « jeux de casino ». Or, cette argumentation est sans pertinence, dans la mesure où la requérante n’est parvenue à rapporter la preuve de l’usage de la marque contestée à l’égard d’aucun des produits auxquels elle fait référence en utilisant la dénomination commune « automates de jeu ».

–       Sur la seconde branche du second grief du premier moyen, tirée d’une appréciation erronée de l’importance de l’usage concernant les produits relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino »

66      S’agissant de l’importance de l’usage de la marque contestée pour les « automates de jeux », premièrement, la requérante fait valoir que la facture du 1er juin 2012, figurant parmi les factures jointes dans l’annexe LSG 9, aurait dû être jugée suffisante, car la vente au bénéfice d’un seul client n’exclut pas le caractère sérieux de l’usage, a fortiori pour des produits coûteux. Elle cite à cet égard l’ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology (C‑259/02, EU:C:2004:50, point 24), et l’arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI (C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 76).

67      Deuxièmement, la requérante réitère sa critique selon laquelle la chambre de recours a commis une erreur de droit en n’effectuant pas une appréciation globale des éléments de preuve fournis, notamment en n’établissant pas de lien entre les factures, la liste de ventes et les déclarations tenant lieu de serment.  Lorsqu’une facture est présentée à une entreprise tierce, il serait évident qu’une commande a été passée au préalable.

68      Troisièmement,  la requérante critique le fait que les déclarations tenant lieu de serment ont prétendument été écartées par la chambre de recours au motif qu’elles provenaient de l’entourage du titulaire de la marque contestée, alors que cette circonstance ne suffit pas, selon la jurisprudence, à leur ôter toute valeur probante.

69      Quatrièmement, elle soutient que le constat, figurant au point 34 de la décision attaquée, selon lequel les chiffres d’affaires fournis dans l’une des déclarations tenant lieu de serment ne sont pas étayés par des éléments de preuves supplémentaires est erroné. Elle se réfère, à cet égard, à tous les autres éléments de preuves fournis dans les annexes LSG 1 à 29, tels que des documents publicitaires, des photographies, des articles publiés par des tiers, des chiffres de ventes et des consultations de sites.

70      Cinquièmement,  la requérante invoque une appréciation incorrecte de la liste des ventes figurant dans l’annexe LSG 10.

71      L’EUIPO et l’intervenante contestent l’argumentation de la requérante.

72      Quant à l’importance de l’usage, il convient de tenir compte, notamment, du volume commercial de l’ensemble des actes d’usage, d’une part, et de la durée de la période pendant laquelle des actes d’usage ont été accomplis ainsi que de la fréquence de ces actes, d’autre part. Cette appréciation implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte. Ainsi, un faible volume de produits ou services commercialisés sous ladite marque peut être compensé par une forte intensité ou une certaine constance dans le temps de l’usage de cette marque et inversement. Toutefois, plus le volume commercial de l’exploitation de la marque est limité, plus il est nécessaire que le détenteur de la marque apporte des indications supplémentaires permettant d’écarter d’éventuels doutes quant au caractère sérieux de l’usage de la marque concernée [voir arrêt du 15 septembre 2011, centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM), T‑427/09, EU:T:2011:480, points 28 et 29 et jurisprudence citée].

73      Il importe toutefois de souligner qu’il n’est pas possible de déterminer a priori, de façon abstraite, quel seuil quantitatif devrait être retenu pour déterminer si l’usage a ou non un caractère sérieux. Une règle de minimis, qui ne permettrait pas à l’EUIPO ou, sur recours, au Tribunal, d’apprécier l’ensemble des circonstances du litige qui leur est soumis ne peut, dès lors, être fixée (arrêt du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, EU:C:2006:310, point 72).

74      En l’espèce, la chambre de recours a relevé, au point 35 de la décision attaquée, que l’annexe LSG 10, qui contenait des informations sur des commandes et des clients, ne mentionnait pas la marque contestée. Elle a également pris en compte les chiffres d’affaires pour les années 2010 à 2016 fournis dans le cadre d’une des déclarations tenant lieu de serment, mais a estimé qu’ils n’étaient pas étayés par des éléments de preuve supplémentaires.

75      Premièrement, concernant la facture du 1er juin 2012 jointe dans l’annexe LSG 9, qui, selon la requérante, aurait dû être considérée comme suffisante, la chambre de recours a constaté, au point 34 de la décision attaquée, qu’elle était la seule à mentionner la marque contestée et attestait la vente, en 2012, de deux machines de jeux Power Stars Super Gaminator III. Elle a estimé que cette facture n’était toutefois pas suffisante pour démontrer l’importance de l’usage de la marque contestée, dès lors qu’elle n’était pas étayée par des éléments de preuve supplémentaires.

76      Il ressort de cette facture qu’elle concernait deux machines de jeux destinées à un casino situé au Portugal. La facture en question porte sur un montant total de 31 141 euros pour ces deux machines. Sur la facture figure, outre la marque contestée, la dénomination FV610 qui identifie, selon la liste de ventes, le boîtier (Gehäuse). La marque contestée y est d’ailleurs combinée avec une autre appellation, soit POWER STARS […] SUPER GAMINATOR III. Il n’est donc même pas avéré que la marque contestée ait été utilisée pour désigner l’automate de jeu lui-même (voir point 62 ci-dessus).

77      En tout état de cause, la requérante n’a pas démontré que la spécificité du marché justifierait qu’une vente unique fonde un usage sérieux de la marque contestée. Au contraire, il résulte des factures, de la liste de ventes et de la déclaration tenant lieu de serment de A que, s’agissant de machines de jeux de casino, il est tout à fait possible de réaliser plusieurs ventes de machines de jeux par an. Il ressort même de cette déclaration tenant lieu de serment que la vente de 2 327 appareils au sein de l’Union est revendiquée sur la période s’étendant de 2011 à 2016, correspondant à un chiffre d’affaires de plus de 28 271 452, 89 euros.

78      Force est de constater que, sur les 93 pages de factures figurant dans l’annexe LSG 9, toutes relatives à des ventes d’appareils de jeux de casino, aucune autre mention de la marque contestée n’apparaît. Les mentions qui reviennent le plus souvent sur ces factures sont d’autres signes, par exemple Super Gaminator, Ultimate, Novostar SL, ainsi que l’a observé la chambre de recours, signes qui désignent, d’après la déclaration tenant lieu de serment de A, des variantes des appareils eux-mêmes. En outre, il ressort de la liste de ventes jointe dans l’annexe LSG 10 que, comme le relève à juste titre l’EUIPO, plus de 200 transactions concernaient des machines de jeux, dont une seule concernait la marque contestée. Certes, A déclare sous serment que ces appareils ont été commercialisés dans plusieurs États membres de l’Union et que 2 327 appareils ont été vendus, réalisant un chiffre d’affaires de plus de 28 millions d’euros. Toutefois, il reste muet sur la question de savoir si des ventes ont été effectuées sous couvert de la marque contestée. Pour concrétiser l’usage de celle-ci, il renvoie aux annexes LSG 15 à 24. Cependant, dans ces annexes, la marque contestée n’est utilisée que pour désigner l’un des jeux chargés sur les appareils qui portent des noms divers. À titre d’exemple, dans l’annexe LSG 15, il est fait référence à Power Stars de la manière suivante : « Power StarsTM Reach for the stars and the wins ! This CoolfireTMII fruit game on 10 lines and 5 reels will thrill you » (Power StarsTM atteindre les étoiles et les victoires ! Ce jeu de fruits CoolfireTMII sur 10 lignes et 5 bobines vous fera vibrer). Dans l’annexe LSG 18, dans laquelle l’appareil est dénommé Novostar II (The Winner Re-Born, The GAMINATOR® becomes NOVOSTAR II […] The Novostar® II’s modern design and sophisticated ergonomics are an ideal match for the new multi-game compendium THE ONE & ONLYTM.) (Le vainqueur renaît, le GAMINATOR® devient NOVOSTAR II [...] Le design moderne et l'ergonomie sophistiquée du Novostar® II s'accordent parfaitement avec le nouveau recueil multi-jeux THE ONE & ONLYTM.), Power Stars est l’un des jeux compris dans cette compilation de jeux.

79      Eu égard aux usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits protégés par la marque contestée, la nature de ces produits, les caractéristiques du marché, l’étendue, à savoir la vente de deux pièces dans une seule ville du Portugal, et la fréquence, en l’occurrence une vente unique, de l’usage de ladite marque ne répondent pas à une réelle justification commerciale, au sens de la jurisprudence citée aux points 52, 72 et 73 ci-dessus. Par conséquent, à supposer même que la facture du 1er juin 2012 puisse être regardée comme établissant l’existence d’une vente de deux appareils de jeux de casino sous couvert de la marque contestée, cette seule vente demeure insuffisante pour démontrer l’importance de l’usage de la marque contestée sur les produits couverts par celle-ci relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino ».

80      Dès lors, le premier argument de la requérante doit être rejeté.

81      Deuxièmement, la requérante fait grief à la chambre de recours, en substance, d’avoir examiné isolément les éléments de preuve, en particulier les déclarations tenant lieu de serment, les factures jointes à l’annexe LSG 9 et la liste de ventes jointe à l’annexe LSG 10. Elle fait valoir que les factures auraient dû être lues en combinaison avec la déclaration tenant lieu de serment, qui expliquerait que, si les factures ne mentionnaient pas spécifiquement la marque contestée, c’est en raison du fait que cette dernière désignait un jeu virtuel pratiqué sur des appareils multi-jeux, de sorte que toutes les variantes de ce type d’appareil (variantes appelées Gaminator, Super Gaminator, Coolfire II, Novostar II, etc.) affichaient sur leur écran la marque contestée.

82      Cette explication n’est toutefois pas susceptible de prouver que la marque contestée a été utilisée sur des appareils de jeux en tant que tels. Au point 29 de la décision attaquée, la chambre de recours avait déjà relevé que, d’après la déclaration tenant lieu de serment de A, c’étaient les dénominations Gaminator, Super Gaminator, etc., qui étaient utilisées pour commercialiser les appareils de jeux eux-mêmes, et non la marque contestée. En effet, l’argumentation de la requérante ne fait que corroborer le constat de la chambre de recours selon lequel le produit qui a été commercialisé sous le nom de Power Stars était un logiciel pour un jeu de casino et non pas des machines multi-jeux sur lesquelles ce jeu était chargé.

83      Troisièmement, s’agissant de la critique selon laquelle les déclarations tenant lieu de serment auraient été écartées par la chambre de recours, elle relève d’une lecture erronée de la décision attaquée. Certes, la chambre de recours a rappelé que, pour évaluer la force probante de déclarations tenant lieu de serment, il y avait lieu, selon la jurisprudence, de vérifier la vraisemblance de l’information qui y était contenue, de tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration ainsi que de son destinataire et de se demander si, d’après son contenu, il semblait sensé et fiable, en se référant à l’arrêt du 7 juin 2005, Lidl Stiftung/OHMI – REWE-Zentral (Salvita) (T‑303/03, EU:T:2005:200, point 42 et jurisprudence citée). Elle a également rappelé à juste titre qu’une déclaration provenant d’un employé ou d’un collaborateur de l’entreprise intéressée devait être étayée par des éléments complémentaires permettant de les corroborer [voir, en ce sens, arrêt du 21 septembre 2017, Repsol YPF/EUIPO – Basic (BASIC), T‑609/15, EU:T:2017:640, point 64 et jurisprudence citée]. Pourtant, la chambre de recours a pris en compte, aux points 27 à 30 et 34 de la décision attaquée, la déclaration de A. En outre, il résulte de ce qui précède que la chambre de recours l’a correctement interprétée. Quant à la déclaration de B, qui est, lui aussi, un employé d’une filiale de la requérante, la requérante ne fait pas valoir de passages particuliers qui auraient dû être pris en considération.

84      Quatrièmement, la requérante soutient que le constat, figurant au point 34 de la décision attaquée, selon lequel les chiffres d’affaires fournis dans le cadre d’une des déclarations tenant lieu de serment ne sont pas étayés par des éléments de preuves supplémentaires est erroné. Elle se réfère, à cet égard, à tous les autres éléments de preuve fournis en annexes LSG 1 à 29, tels que les documents publicitaires, photographies, articles de tiers, chiffres des ventes et consultations de sites.

85      À cet égard, il convient de relever que la requérante n’indique pas précisément quels sont les informations et éléments de preuves spécifiques qui corroboreraient les chiffres d’affaires en cause. Elle se contente d’une référence globale à l’ensemble des éléments de preuve fournis en annexes LSG 1 à 29, une telle référence n’étant pas recevable (voir point 19 ci-dessus). En outre, il ressort des points 77 et 78 ci-dessus que les factures et la liste des ventes ne corroboraient pas les chiffres d’affaires contenus dans une des déclarations tenant lieu de serment, contrairement à ce que fait valoir la requérante.

86      Cinquièmement, la requérante invoque une appréciation incorrecte de la liste de ventes figurant dans l’annexe LSG 10, au motif que la marque contestée y serait bien mentionnée, contrairement à ce qu’aurait affirmé la chambre de recours au point 35 de la décision attaquée.

87      Au point 35 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que l’annexe LSG 10, contenant des informations sur des commandes, des clients, des données et des produits vendus par la requérante, n’était pas suffisante pour attester l’importance de l’usage de la marque contestée, au motif que la marque contestée n’y était évoquée à aucun endroit.

88      Force est de constater que, ainsi que la requérante le relève à juste titre, la marque contestée est bien évoquée dans l’annexe LSG 10, en deuxième page. Toutefois, ainsi que la requérante l’admet elle-même, il s’agit de la mention de la même vente sous la marque contestée que celle répertoriée dans la facture figurant dans l’annexe LSG 9, le numéro de commande correspondant.

89      Partant, bien que l’indication contenue au point 35 de la décision attaquée ne soit pas exacte, il n’y a pas lieu de constater une erreur quant à la substance du raisonnement. La chambre de recours ne pouvait, en effet, prendre en compte l’annexe LSG 10 comme une preuve de faits supplémentaires établissant l’importance de l’usage, dans la mesure où cette annexe ne faisait, tout au plus, que confirmer l’information déjà fournie par les factures figurant dans l’annexe LSG 9 selon laquelle deux machines de jeux auraient été vendues en 2012 sous couvert de la marque contestée. Il ne peut pas non plus être reproché à la chambre de recours, à cet égard, de ne pas avoir procédé à une appréciation globale de ces éléments de preuve, dans la mesure où elles contenaient la même information.

90      S’agissant de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 septembre 2008, CAPIO (T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, points 39 et suivants) dont se prévaut la requérante, dans laquelle une liste de ventes corroborée par des factures avait été considérée comme de nature à démontrer un usage sérieux de la marque en cause, elle n’est pas pertinente. En effet, dans cette affaire, le tableau des ventes mentionnait plusieurs ventes des produits concernés dans divers États membres de l’Union, contrairement à la présente espèce où les factures et la liste de ventes n’attesteraient qu’une seule vente de deux appareils.

91      Dès lors, l’ensemble de l’argumentation de la requérante relative à l’importance de l’usage pour les produits litigieux relevant des classes 9 et 28 autres que les « jeux de casino » et, partant, la seconde branche du second grief du premier moyen ne sauraient prospérer. Il s’ensuit que le second grief ainsi que le premier moyen dans son intégralité doivent être rejetés.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001

92      Dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante critique la motivation de la décision attaquée sous deux aspects. Premièrement, elle invoque le fait que cette décision ne mentionne pas les « jeux de casino ». Deuxièmement, elle relève que la chambre de recours a indiqué, au point 35 de la décision attaquée, que la marque contestée n’était absolument pas évoquée dans l’annexe LSG 10, ce qui serait inexact.

93      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

94      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO sont motivées. Cette obligation de motivation des décisions de l’EUIPO a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE. Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. Cette obligation a pour objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (voir arrêt du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, EU:C:2004:649, points 63 à 65 et jurisprudence citée). Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir arrêt du 7 février 2007, Kustom Musical Amplification/OHMI (Forme d’une guitare), T‑317/05, EU:T:2007:39, point 57 et jurisprudence citée]. Il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêt du 25 mars 2009, Anheuser-Busch/OHMI – Budějovický Budvar (BUDWEISER), T‑191/07, EU:T:2009:83, point 128].

95      En premier lieu, il ressort clairement des points 23 à 31 de la décision attaquée que les seuls éléments de preuve d’usage de la marque contestée n’étaient relatifs qu’aux logiciels, produits non pertinents aux fins de la présente procédure, car non visés par la demande en déchéance. Par conséquent, il ressort clairement du raisonnement de la chambre de recours que les éléments de preuve d’usage fournis n’étaient pas pertinents pour prouver l’usage sérieux de la marque contestée s’agissant des produits et services contestés, dont les « jeux de casino ».

96      Cette motivation est claire et permet à la requérante en tant que personne intéressée de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et au Tribunal en tant que juridiction compétente de disposer d’éléments suffisants pour exercer son contrôle, au sens de la jurisprudence citée au point 94 ci-dessus. Il convient, par conséquent, de rejeter le premier argument de la requérante.

97      En second lieu, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel un défaut de motivation résulterait du fait que la chambre de recours a indiqué, à tort, que la marque contestée n’était évoquée à aucun endroit dans l’annexe LSG 10, il convient de rappeler que le défaut ou l’insuffisance de motivation constitue un moyen tiré de la violation des formes substantielles, distinct, en tant que tel, du moyen pris de l’inexactitude des motifs de la décision, dont le contrôle relève de l’examen du bien-fondé de cette décision [voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France, C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67, et du 23 septembre 2015, Mechadyne International/OHMI (FlexValve), T‑588/14, non publié, EU:T:2015:676, point 59].

98      Or, il existe bien une motivation s’agissant de cette annexe LSG 10, au point 35 de la décision attaquée. La question de savoir si celle-ci est exacte ou non relève du bien-fondé de la décision attaquée (voir points 74 et 86 à 89 ci-dessus), non de sa motivation.

99      Dès lors, il y a lieu de rejeter également le second argument de la requérante et, par conséquent, le deuxième moyen dans son intégralité.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001

100    La requérante invoque, en substance, deux griefs au soutien de son troisième moyen, tiré de la violation de son droit d’être entendue. Par un premier grief, elle affirme que la chambre de recours n’a pas apprécié ses arguments relatifs à l’usage sérieux de la marque contestée pour les « jeux de casino », dans la mesure où elle ne les a même pas examinés, ni traités. Elle renvoie à cet égard à ses arguments exposés dans le cadre du premier moyen. Par un second grief, elle critique le fait que la chambre de recours a erronément indiqué que l’annexe LSG 10 ne mentionnait pas la marque contestée. Le fait d’avoir ignoré ses arguments à cet égard constituerait une violation du droit d’être entendu.

101    L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

102    À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 94, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement 2017/1001, une chambre de recours de l’EUIPO ne peut fonder sa décision que sur des motifs ou des preuves au sujet desquels les parties ont pu prendre position.

103    Cette disposition consacre, dans le cadre du droit des marques de l’Union européenne, le principe général de protection des droits de la défense (arrêt du 7 février 2007, Forme d’une guitare, T‑317/05, EU:T:2007:39, point 26). Ce principe inclut le droit d’être entendu, qui est énoncé à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

104    En vertu de ce principe, toute personne à qui une décision d’une autorité publique fait grief doit avoir été mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue avant l’adoption de ladite décision [arrêts du 23 octobre 1974, Transocean Marine Paint Association/Commission, 17/74, EU:C:1974:106, point 15, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, EU:T:2002:41, point 21]. Le droit d’être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de ladite décision, mais non à la position finale que l’autorité publique entend adopter [voir arrêt du 1er juin 2016, Grupo Bimbo/EUIPO (Forme d’une barre avec quatre cercles), T‑240/15, non publié, EU:T:2016:327, point 61 et jurisprudence citée]. Dès lors, la chambre de recours n’est pas obligée d’entendre une partie requérante sur une appréciation factuelle qui relève de sa position finale [arrêt du 20 novembre 2007, Tegometall International/OHMI – Wuppermann (TEK), T‑458/05, EU:T:2007:349, point 45].

105    S’agissant du premier grief invoqué par la requérante, il convient de constater que cette dernière admet elle-même, au point 57 de la requête, avoir pu présenter des explications et des documents à propos de la question de l’usage sérieux de la marque contestée pour les « jeux de casino » et avoir pu « manifestement prendre position » sur cette question. En outre, il ressort du point 95 ci-dessus que, dans la décision attaquée, la chambre de recours a bel et bien examiné l’usage sérieux pour tous les produits et services en cause, y compris les « jeux de casino ». Dès lors, ce premier grief doit être rejeté.

106    En ce qui concerne le second grief invoqué par la requérante, il y a lieu de constater que, comme cela a déjà été relevé au point 88 ci-dessus, la chambre de recours a erronément indiqué, au point 35 de la décision attaquée, que l’annexe LSG 10 ne mentionnait pas la marque contestée. Il n’en demeure pas moins que, même si la chambre de recours n’avait pas commis cette erreur, la requérante n’aurait pas pu se prévaloir d’une preuve supplémentaire, étant donné que la mention de la marque contestée dans ladite annexe se réfère à la même vente que celle mentionnée dans la facture du 1er juin 2012 figurant dans l’annexe LSG 9. En outre, le seul fait que les arguments de la requérante n’aient pas été acceptés comme convaincants dans la position finale de la chambre de recours ne saurait constituer une violation de son droit d’être entendue.

107    Dès lors, le second grief de la requérante et, partant, le troisième moyen dans son intégralité doivent être rejetés.

108    Aucun des moyens soulevés par la requérante au soutien de ses conclusions n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble, tant les conclusions à titre principal tendant à l’annulation et à la réformation de la décision attaquée que les conclusions subsidiaires visant au renvoi de l’affaire devant l’EUIPO.

 Sur les dépens

109    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Novomatic AG est condamnée aux dépens.

Collins

Kreuschitz

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 24 mars 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.