Language of document : ECLI:EU:T:2022:851

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

21 décembre 2022 (*)

« Responsabilité non contractuelle – Instrument d’aide à la préadhésion – Enquête de l’OLAF – Contrôle sur place – Irrégularités et manquements prétendument commis par la Commission – Droit d’être entendu – Préjudice moral – Lien de causalité »

Dans l’affaire T‑617/17 RENV,

Vialto Consulting Kft., établie à Budapest (Hongrie), représentée par Mes S. Paliou et A. Skoulikis, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. D. Triantafyllou, J. Baquero Cruz et Mme A. Katsimerou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé, lors des délibérations, de M. R. da Silva Passos, président, Mme I. Reine et M. M. Sampol Pucurull (rapporteur), juges,

greffier : Mme M. Zwozdziak-Carbonne, administratrice,

vu l’arrêt de la Cour du 28 octobre 2021,

à la suite de l’audience du 19 mai 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 268 TFUE, la requérante, Vialto Consulting Kft., demande réparation du préjudice qu’elle aurait subi à la suite des illégalités commises, d’une part, par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), lors d’un contrôle effectué dans ses locaux, et, d’autre part, par la Commission européenne après ledit contrôle.

 Antécédents du litige

2        La requérante est une société de droit hongrois fournissant des services de conseil à des entreprises et à des entités appartenant aux secteurs privé et public.

3        En vertu de l’article 1er du règlement (CE) no 1085/2006 du Conseil, du 17 juillet 2006, établissant un instrument d’aide de préadhésion (IAP) (JO 2006, L 210, p. 82), l’Union européenne aide les pays mentionnés aux annexes I et II de ce règlement, parmi lesquels figure la République de Turquie, à s’aligner progressivement sur les normes et les politiques de l’Union, y compris, le cas échéant, l’acquis communautaire, en vue de leur adhésion.

4        L’article 10 du règlement (CE) no 718/2007 de la Commission, du 12 juin 2007, portant application du règlement no 1085/2006 (JO 2007, L 170, p. 1), prévoit, au titre des principes généraux de mise en œuvre de l’aide, que la Commission confie la gestion de certaines actions au pays bénéficiaire, tout en conservant la responsabilité finale de l’exécution du budget général. La gestion décentralisée couvre, au moins, la gestion des appels d’offres, l’adjudication et les paiements.

5        Le 11 juillet 2008, la Commission a conclu avec la République de Turquie un accord-cadre qui définit de manière générale les règles de coopération relatives à l’aide au titre de l’instrument d’aide de préadhésion (IAP). En vertu de l’article 6 dudit accord-cadre, il incombait à la République de Turquie, dans le cadre d’une gestion décentralisée du programme, de désigner les structures d’exécution.

6        Le 11 avril 2011, la Commission a conclu une convention de financement avec la République de Turquie sous le régime de la gestion décentralisée avec un contrôle ex ante, qui s’inscrivait dans le cadre du programme national en faveur de la République de Turquie au titre de la composante « aide à la transition et [au] renforcement des institutions » de l’IAP. La structure d’exécution désignée, au sens de l’article 21 du règlement no 718/2007, était la Central Finance and Contracts Unit (CFCU).

7        Le 17 décembre 2013 a été publié au Supplément au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2013/S 244-423607), sous la référence EuropeAid/132338/D/SER/TR, un appel d’offres restreint portant sur la fourniture de services de contrôle de qualité externe dans le cadre du projet TR2010/0311.01 « Digitization of Land Parcel Identification System » (numérisation du système d’identification des parcelles agricoles, ci-après le « projet en cause »). L’objet de l’appel d’offres était de conclure un contrat pour une durée initiale de 26 mois et pour un budget maximal de 4 500 000 euros. Le pouvoir adjudicateur désigné dans l’appel d’offres était la CFCU.

8        Le 19 septembre 2014, le marché correspondant à l’appel d’offres du projet en cause a été attribué à un consortium (ci-après le « consortium ») coordonné par la société Agrotec S.p.A (ci-après la « cheffe de file du consortium ») et composé de cinq participants, parmi lesquels la requérante. Le consortium a signé avec la CFCU le contrat de prestation de services portant la référence TR2010/0311.01-02/001 (ci-après le « contrat en cause »).

9        À la suite de l’ouverture d’une enquête en raison de soupçons d’actes de corruption ou de fraude commis dans le cadre du projet en cause, sur le fondement de l’article 3 du règlement (UE, Euratom) no 883/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 11 septembre 2013, relatif aux enquêtes effectuées par l’OLAF et abrogeant le règlement (CE) no 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (Euratom) no 1074/1999 du Conseil (JO 2013, L 248, p. 1), l’OLAF a décidé de procéder à des contrôles et à des vérifications dans les locaux de la requérante (ci-après le « contrôle sur place »).

10      Le 7 avril 2016, l’OLAF a délivré deux mandats désignant les agents chargés d’effectuer un contrôle sur place et une expertise technico-légale numérique. Aux termes de ces mandats, le but du contrôle sur place était de rassembler les preuves détenues par la requérante et qui démontraient son implication éventuelle dans les actes de corruption et de fraude qui auraient été commis dans le cadre du projet en cause. Le but de l’expertise technico-légale numérique était d’obtenir, notamment, des images technico-légales numériques de tous les appareils numériques de la requérante utilisés pour la gestion du projet en cause, tels que les ordinateurs de bureau, les ordinateurs portables, les tablettes, les dispositifs de stockage externes ou portables, les téléphones mobiles et tous autres appareils pouvant être pertinents aux fins de l’enquête, des serveurs d’échange de données et d’échange de fichiers, de la correspondance électronique de la direction et des employés de la requérante, des boîtes fonctionnelles de courrier électronique utilisées pour l’exécution du projet en cause ainsi que des fichiers ou dossiers figurant dans le réseau de la requérante qui pouvaient être pertinents aux fins de l’enquête.

11      Le contrôle sur place et l’expertise technico-légale numérique ont été réalisés du 12 au 14 avril 2016. Un procès-verbal de chaque journée de contrôle a été dressé par l’OLAF. Il a été relevé dans le procès-verbal relatif à la journée du 14 avril 2016 que la requérante avait refusé de fournir à l’OLAF certaines informations. La requérante a signé chacun des procès-verbaux, le cas échéant en formulant des commentaires.

12      Par lettre du 6 mai 2016, la requérante a saisi l’OLAF d’une plainte par laquelle elle a contesté ou commenté certains éléments contenus dans les procès-verbaux visés au point 11 ci-dessus. En particulier, elle a affirmé qu’elle n’était tenue de coopérer avec l’OLAF que dans la limite de l’objet de l’enquête menée par celui-ci, à savoir le financement du projet en cause, et que, par conséquent, elle n’était obligée de donner accès à l’OLAF qu’à des informations relatives à l’objet de cette enquête. En outre, elle a demandé à l’OLAF de prendre les mesures appropriées au regard des manquements aux garanties procédurales commis par ses agents lors du contrôle sur place. L’OLAF a accusé réception de cette plainte le 18 mai 2016.

13      Par lettre du 8 juillet 2016, l’OLAF a répondu à la plainte de la requérante. Après avoir résumé les griefs de cette dernière et rappelé l’étendue de ses pouvoirs d’enquête, il a fait valoir que ses enquêteurs avaient le droit de réaliser des images technico-légales numériques des disques durs de la requérante et qu’il avait mis fin au contrôle sur place en raison d’un défaut de coopération de celle-ci. En effet, la requérante, d’une part, ne l’avait pas autorisé à emporter une copie des informations présélectionnées ni, par conséquent, des images technico-légales numériques réalisées et, d’autre part, n’avait pas non plus fourni les informations financières demandées. L’OLAF a ajouté que l’article 339 TFUE et l’article 10, paragraphe 1, du règlement no 883/2013 garantissaient la confidentialité des informations collectées. Il en a conclu, d’une part, que ses agents avaient mené le contrôle sur place dans la limite de leurs pouvoirs et, d’autre part, que la protection des secrets d’affaires de la requérante ne constituait pas une raison légitime pouvant faire obstacle à leurs investigations. Il en a déduit qu’aucun manquement aux droits procéduraux de la requérante n’avait été commis lors du contrôle sur place.

14      Par lettre du 14 septembre 2016, l’OLAF a informé la requérante qu’elle était considérée comme une personne concernée par l’enquête portant sur les soupçons de corruption ou de fraude existant à l’égard du projet en cause et l’a invitée à présenter ses observations dans un délai de dix jours.

15      Par lettre du 23 septembre 2016, la requérante a présenté à l’OLAF ses observations et a affirmé avoir eu un comportement légal et avoir respecté toutes les conditions garantissant un accès légitime de l’OLAF à ses données. Elle s’est dite prête à continuer à coopérer avec l’OLAF et à lui donner accès à toute donnée pertinente pouvant être collectée aux fins de l’objet de l’enquête menée par celui-ci.

16      Par lettre du 29 septembre 2016, la CFCU a informé la cheffe de file du consortium du déroulement du contrôle sur place dans les locaux de la requérante et du fait que cette dernière n’avait pas consenti à donner à l’OLAF l’accès à certaines informations qu’il avait demandées pour mener à bien son enquête. Elle a ajouté que l’OLAF considérait que, par son comportement, la requérante avait violé l’article 25 des conditions générales applicables au contrat en cause (ci-après les « conditions générales ») et que celui-ci examinait la situation avec les services compétents de la Commission. Faisant enfin valoir que, selon les conditions générales, la cheffe de file du consortium était son unique interlocutrice pour toutes les questions contractuelles et financières, la CFCU l’a informée que, en conséquence, elle suspendait de manière préventive le paiement des factures présentées par celle-ci, au moins jusqu’à la clôture de l’enquête de l’OLAF.

17      Le 30 septembre 2016, la cheffe de file du consortium a transmis à la requérante la lettre de la CFCU reçue la veille et l’a invitée, d’une part, à clarifier immédiatement avec l’OLAF la situation dans laquelle elle se trouvait et, d’autre part, à l’informer, ainsi que les autres membres du consortium, de l’existence de tout manquement de sa part qui aurait conduit à l’ouverture de l’enquête de l’OLAF. Elle a ajouté qu’elle se réservait le droit d’adopter les mesures nécessaires, notamment auprès de la CFCU, pour protéger ses intérêts des actes incompatibles avec leur partenariat que la requérante aurait commis.

18      Par lettre du 4 octobre 2016, la requérante a informé la cheffe de file du consortium de l’état de l’enquête de l’OLAF à son égard et lui a transmis la correspondance qu’elle avait échangée avec ce dernier. En outre, elle lui a fait part des raisons pour lesquelles elle considérait que la CFCU n’était pas fondée, au regard des conditions générales, à décider de suspendre les paiements relatifs au contrat en cause.

19      Par lettre du 6 octobre 2016, la CFCU a avisé la cheffe de file du consortium que l’OLAF l’avait informée de l’enquête qu’il menait et que, dès lors que les mesures à prendre à l’égard de la requérante n’étaient pas encore arrêtées, la Commission lui avait recommandé de suspendre tous les paiements à l’égard du consortium jusqu’à la fin de l’enquête de l’OLAF.

20      Par lettre du 13 octobre 2016, la direction générale (DG) « Voisinage et négociations d’élargissement » (ci-après la « DG “Élargissement” ») a informé la CFCU du refus de la requérante, contrevenant à l’article 25 des conditions générales, de coopérer à l’enquête menée par l’OLAF et l’a invitée à prendre les mesures nécessaires en application desdites conditions générales et, à cet égard, à envisager comme l’une des mesures possibles la suspension de l’exécution du contrat en cause ou de la partie dudit contrat exécutée par la requérante, sur le fondement des articles 25 et 35 des conditions générales. Elle a ajouté qu’elle considérait que les montants payés à la requérante dans le cadre du contrat en cause n’étaient pas éligibles au financement de l’Union et a invité la CFCU à déterminer exactement lesdits montants.

21      Par lettre du 9 novembre 2016, l’OLAF a informé la requérante de la clôture de son enquête, de la transmission de son rapport d’enquête final à la DG « Élargissement » et des recommandations qu’il avait faites à ladite direction générale de prendre les mesures appropriées afin de garantir l’application des procédures et des sanctions qui découlaient de la violation grave des stipulations du contrat en cause par la requérante.

22      Par lettre du 11 novembre 2016, la CFCU a informé la cheffe de file du consortium de la clôture de l’enquête de l’OLAF et de la conclusion de ce dernier selon laquelle la requérante avait violé l’article 25 des conditions générales. La CFCU l’a également informé de sa décision d’exclure la requérante du contrat en cause, dans tous ses aspects, et de poursuivre l’exécution dudit contrat, au lieu de la suspendre totalement, ainsi que le lui avait recommandé, comme l’une des mesures possibles, la DG « Élargissement ». En conséquence, la CFCU a demandé à la cheffe de file du consortium de mettre immédiatement fin aux activités de la requérante à compter du 11 novembre 2016 et d’entreprendre les démarches nécessaires au retrait de cette dernière du consortium, à savoir la rédaction d’un addendum au contrat en cause.

23      Le 17 novembre 2016 a été signé entre la cheffe de file du consortium et les membres du consortium, à l’exception de la requérante, un addendum à l’accord de coopération qui les liait ayant pour objet d’établir une nouvelle répartition du travail entre ces sociétés.

24      Par courrier électronique du 5 décembre 2016 adressé à la CFCU, la requérante a contesté son exclusion du contrat en cause. La CFCU a rejeté les arguments de la requérante par lettre du 10 janvier 2017.

25      Le 13 décembre 2016 a été signé entre la CFCU et la cheffe de file du consortium un addendum au contrat en cause ayant pour objet de retirer la requérante de la liste des membres du consortium et d’en tirer des conséquences, notamment sur le plan financier.

26      Par lettre du 6 janvier 2017, la CFCU a informé la cheffe de file du consortium que le montant correspondant à la participation de la requérante à l’exécution du contrat en cause s’élevait à 182 350,75 euros et que ce montant était, en raison de la violation par la requérante de ses obligations contractuelles, inéligible au financement par l’Union.

 Procédures antérieures devant le Tribunal et la Cour

27      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 septembre 2017, la requérante a introduit un recours en indemnité.

28      Dans sa requête, la requérante concluait à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner la Commission à réparer le préjudice matériel qu’elle aurait subi du fait des illégalités qu’auraient commises l’OLAF lors du contrôle sur place et la Commission à la suite dudit contrôle qu’elle évaluait à la somme de 320 944,56 euros, augmentée d’intérêts moratoires au taux fixé par la Banque centrale européenne (BCE) pour ses opérations principales de refinancement, majoré de 2 points de pourcentage ;

–        condamner la Commission à réparer le préjudice moral porté à sa réputation professionnelle du fait des illégalités qu’auraient commises l’OLAF lors du contrôle sur place et la Commission à la suite dudit contrôle, qu’elle évaluait à la somme de 150 000 euros, augmentée d’intérêts moratoires au taux fixé par la BCE pour ses opérations principales de refinancement, majoré de 2 points de pourcentage ;

–        condamner la Commission aux dépens.

29      Dans sa réplique, la requérante a réduit la somme demandée à 26 083, 26 euros au titre du préjudice matériel et a maintenu la somme demandée au titre de son préjudice moral à 150 000 euros, majorée d’intérêts.

30      La Commission concluait à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

31      Lors de l’audience devant le Tribunal, la requérante a renoncé à demander réparation du préjudice matériel allégué et a réduit le montant demandé en réparation de son préjudice moral à la somme de 25 000 euros, majorée des intérêts.

32      Par l’arrêt du 26 juin 2019, Vialto Consulting/Commission (T‑617/17, non publié, ci-après l’« arrêt initial », EU:T:2019:446), le Tribunal a rejeté le recours.

33      Par requête déposée au greffe de la Cour le 3 septembre 2019, la requérante a formé un pourvoi, enregistré sous le numéro C‑650/19 P, à l’encontre de l’arrêt initial.

34      Par l’arrêt du 28 octobre 2021, Vialto Consulting/Commission (C‑650/19 P, ci-après l’« arrêt sur pourvoi », EU:C:2021:879), la Cour a annulé partiellement l’arrêt initial, a renvoyé l’affaire devant le Tribunal, en application de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, et a réservé les dépens.

35      La Cour a jugé, en substance, que le Tribunal avait commis une erreur de droit en jugeant, au point 122 de l’arrêt initial, que la Commission n’était pas soumise à une obligation d’entendre la requérante avant l’adoption, par le pouvoir adjudicateur turc, de sa décision d’exclure la requérante du contrat en cause et qu’elle n’avait pas commis de violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit de l’Union. La Cour en a conclu que la Commission avait commis une violation du droit d’être entendu, lequel constitue une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. S’agissant du caractère suffisamment caractérisé de cette violation, la Cour a rappelé que, lorsqu’une institution de l’Union ne disposait que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit de l’Union pouvait suffire à établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée de ce droit, susceptible d’engager la responsabilité non contractuelle de l’Union (voir arrêt du 20 janvier 2021, Commission/Printeos, C‑301/19 P, EU:C:2021:39, point 103 et jurisprudence citée). Or, la Commission avait une obligation d’entendre la requérante avant de transmettre au pouvoir adjudicateur turc sa prise de position sur les mesures à prendre à son égard en relation avec le contrat en cause, de sorte que cette institution ne disposait d’aucune marge d’appréciation à cet égard.

 Conclusions des parties

36      Dans ses observations sur les suites à donner à l’arrêt sur pourvoi dans la présente procédure, conformément à l’article 217, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, déposées au greffe du Tribunal le 12 janvier 2022, la requérante a pris position sur les conclusions à tirer dans la présente affaire de l’arrêt sur pourvoi. À cet égard, elle maintient les conclusions présentées dans le recours introductif d’instance visant à obtenir la condamnation de la Commission à lui verser une indemnité en réparation du préjudice moral subi au titre de l’atteinte à sa réputation et à son image. Elle conclut également à la condamnation de la Commission aux dépens pour l’ensemble des procédures devant le Tribunal, à savoir la présente procédure et la procédure ayant donné lieu à l’arrêt initial ainsi que la procédure ayant donné lieu à l’arrêt sur pourvoi.

37      Dans ses observations, déposées au greffe du Tribunal le 23 novembre 2021, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le recours comme non fondé ou, à défaut, comme irrecevable et de condamner la requérante aux dépens de la procédure engagée devant le Tribunal ayant conduit à l’arrêt initial et à ceux liés à l’affaire T‑617/17 RENV, ainsi qu’aux dépens de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt sur pourvoi. 

 En droit

 Sur l’objet du litige après son renvoi

38      Il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 61 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lorsque le pourvoi est fondé et que l’affaire est renvoyée devant le Tribunal pour qu’il statue sur le litige, celui-ci est lié par les points de droit tranchés par la décision de la Cour. Ainsi, à la suite de l’annulation par la Cour et du renvoi de l’affaire devant le Tribunal, celui-ci est saisi, en application de l’article 215 du règlement de procédure, par l’arrêt de la Cour et doit se prononcer une nouvelle fois sur l’ensemble des moyens d’annulation soulevés par la partie requérante, à l’exclusion des éléments du dispositif non annulés par la Cour ainsi que des considérations qui constituent le fondement nécessaire desdits éléments, ceux-ci étant passés en force de chose jugée (voir arrêts du 14 septembre 2011, Marcuccio/Commission, T‑236/02, EU:T:2011:465, point 83 et jurisprudence citée, et du 7 juillet 2021, HM/Commission, T‑587/16 RENV, non publié, EU:T:2021:415, point 38 et jurisprudence citée).

39      En l’espèce, et ainsi qu’il a été confirmé à l’audience par les parties, l’objet du recours ne porte que sur l’existence d’un lien de causalité entre la violation du droit d’être entendu et le préjudice moral allégué ainsi que sur la réalité dudit préjudice. De plus, à l’audience, la Commission a renoncé à son chef de conclusions tendant à l’irrecevabilité du présent recours, tel que formulé dans ses observations écrites déposées le 23 novembre 2021.

 Sur le fond

 Sur les conditions du recours en indemnité

40      En vertu de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, en matière de responsabilité non contractuelle, l’Union doit réparer, conformément aux principes généraux communs aux droits des États membres, les dommages causés par ses institutions ou par ses agents dans l’exercice de leurs fonctions.

41      L’engagement de la responsabilité non contractuelle de l’Union, au sens de l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, pour comportement illicite de ses institutions ou de ses organes, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché à l’institution ou à l’organe de l’Union, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir arrêt du 14 octobre 2014, Giordano/Commission, C‑611/12 P, EU:C:2014:2282, point 35 et jurisprudence citée).

42      S’agissant, d’une part, de la condition relative à la réalité du dommage, la responsabilité de l’Union ne saurait être engagée que si la partie requérante a effectivement subi un préjudice réel et certain (voir, en ce sens, arrêt du 16 janvier 1996, Candiotte/Conseil, T‑108/94, EU:T:1996:5, point 54). Il incombe à la partie requérante d’apporter des éléments de preuve au juge de l’Union afin d’établir l’existence et l’ampleur d’un tel préjudice (arrêt du 9 janvier 1996, Koelman/Commission, T‑575/93, EU:T:1996:1, point 97 ; voir également, en ce sens, arrêt du 21 mai 1976, Roquette frères/Commission, 26/74, EU:C:1976:69, points 22 à 24, et).

43      S’agissant, d’autre part, de la condition relative à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché et le préjudice invoqué, ledit préjudice doit découler de façon suffisamment directe du comportement reproché, ce dernier devant constituer la cause déterminante du préjudice. Il appartient à la partie requérante d’apporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre le comportement reproché et le préjudice invoqué (voir arrêt du 19 juillet 2007, Bouychou/Commission, T‑344/04, non publié, EU:T:2007:234, point 40 et jurisprudence citée).

44      Par ailleurs, le juge de l’Union n’est pas tenu d’examiner ces conditions dans un ordre déterminé (arrêt du 9 septembre 1999, Lucaccioni/Commission, C‑257/98 P, EU:C:1999:402, point 13).

45      Il convient d’examiner d’abord la question relative à l’existence d’un lien de causalité entre la violation du droit d’être entendu et le préjudice moral allégué, puis la réalité dudit préjudice.

 Sur le lien de causalité

46      La requérante soutient qu’il existe un lien de causalité direct entre l’illégalité qu’elle invoque et le préjudice moral dont elle demande réparation.

47      En l’espèce, la requérante fait valoir qu’elle a subi un préjudice moral du fait du comportement illégal de la Commission, constitué par la violation de son droit d’être entendue, avant d’adopter à son égard des sanctions en relation avec un prétendu manque de coopération de sa part lors du contrôle sur place réalisé par l’OLAF et avec la violation de l’article 25 des conditions générales formulées dans la lettre de la Commission du 13 octobre 2016.

48      Le préjudice moral allégué par la requérante consiste en une atteinte à son image et à sa réputation professionnelle auprès des autres membres du consortium. Selon elle, ce préjudice résulte de la manière dont la position de la Commission a été adoptée et portée à la connaissance des autres membres du consortium par l’entremise du pouvoir adjudicateur turc.

49      À ce titre, la requérante rappelle l’enchaînement des faits, à savoir, premièrement, la lettre du 29 septembre 2016 de la CFCU à la cheffe de file du consortium l’informant de son manque de coopération à l’occasion du contrôle sur place de l’OLAF et de la suspension du paiement de la dernière facture. Deuxièmement, elle mentionne celle du 30 septembre 2016 que la cheffe de file du consortium lui a adressée demandant des précisions sur les éléments mentionnés dans le courrier précédent. Troisièmement, elle fait état de sa lettre du 4 octobre 2016 en réponse à la demande d’explications de la cheffe de file du consortium. Quatrièmement, elle renvoie à celle du 6 octobre 2016 adressée à la cheffe de file du consortium par la CFCU sur son manquement présumé à ses obligations contractuelles essentielles, à celle du 13 octobre 2016 de la DG « Élargissement » formulant explicitement ses recommandations à la CFCU et indiquant l’inéligibilité au financement par le budget de l’Union des montants qui lui avaient été payés. Cinquièmement, elle signale les lettres du 9 novembre 2016 que l’OLAF lui a adressées, l’informant de la clôture de l’enquête et de ses recommandations à la DG « Élargissement », et du 11 novembre 2016 rédigée par la CFCU pour indiquer sa décision de l’exclure du contrat en cause. Cela aurait discrédité la requérante auprès des membres du consortium, avec qui elle collaborait de manière habituelle pour d’autres projets. En effet, par son comportement, la Commission aurait donné l’impression que le manquement était un fait accompli, mis à l’écart la requérante et véhiculé un sentiment d’urgence et de gravité particulière à l’égard du manquement reproché. Elle évalue ex æquo et bono à 25 000 euros le montant de son préjudice moral.

50      La Commission estime qu’il n’existe aucun lien de causalité entre la violation du droit d’être entendu et le préjudice allégué. Elle considère que la requérante échoue à démontrer l’existence d’un lien quelconque entre le fait de ne pas avoir été entendue une seconde fois par elle et le préjudice moral allégué. Elle rappelle que le projet en cause fait l’objet d’une gestion décentralisée par le pouvoir adjudicateur turc, ce qui en fait un marché national et que la décision de ce dernier interrompt le lien de causalité. De plus, elle estime que le comportement reproché n’a pas été la cause déterminante du préjudice allégué par la requérante. En outre, selon elle, la situation qui aurait résulté pour la requérante de l’absence d’illégalité n’aurait en rien été différente, car cela n’aurait en aucun cas remis en cause le bien-fondé des charges pesant contre elle et donc sa position à ce sujet. Elle fait valoir que le préjudice subi par la requérante résulte de sa propre décision de ne pas respecter ses obligations contractuelles en s’opposant au bon déroulement du contrôle sur place de l’OLAF. Elle ajoute que la requérante ne fait d’ailleurs aucune allusion à la violation du droit d’être entendu comme cause de son préjudice.

51      S’agissant de la condition relative à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué, il ressort d’une jurisprudence constante que le préjudice allégué doit découler de façon suffisamment directe du comportement reproché, ce dernier devant constituer la cause déterminante du préjudice, ce qu’il appartient à la partie requérante de prouver (voir arrêt du 20 septembre 2011, Evropaïki Dynamiki/BEI, T‑461/08, EU:T:2011:494, point 209 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 30 janvier 1992, Finsider e.a./Commission, C‑363/88 et C‑364/88, EU:C:1992:44, point 25 et jurisprudence citée).

52      Il résulte également de la jurisprudence qu’une conception selon laquelle il suffit, pour que le lien de causalité existe, que le comportement prétendument illégal ait constitué une condition nécessaire de la survenance du dommage, en ce sens que celui-ci ne se serait pas produit en l’absence de ce comportement, ne correspond pas à celle prévalant dans le droit de l’Union. En effet, une conception aussi large du lien de causalité ne se dégage pas de la jurisprudence relative à l’article 340, deuxième alinéa, TFUE. Cette dernière limite la responsabilité de l’Union aux dommages découlant de manière directe, voire suffisamment directe, du comportement illégal de l’institution concernée, ce qui exclut, en particulier, que ladite responsabilité couvre les dommages qui ne seraient qu’une conséquence éloignée de ce comportement. Dans cette logique, le Tribunal a également jugé que le simple fait que le comportement illégal ait constitué une condition nécessaire de la survenance du dommage, en ce que celui-ci ne se serait pas produit en l’absence de ce comportement, ne suffisait pas à établir un lien de causalité (voir arrêt du 7 décembre 2017, Missir Mamachi di Lusignano e.a./Commission, T‑401/11 P-RENV‑RX, EU:T:2017:874, point 69 et jurisprudence citée).

53      Néanmoins, selon la jurisprudence, lorsque, d’une part, le comportement reproché à une institution s’insère dans un processus plus vaste auquel des tiers ont participé et, d’autre part, le préjudice allégué a pour cause immédiate une intervention d’un de ces tiers, il incombe au juge de vérifier si cette intervention était rendue inévitable du seul fait de l’adoption du comportement reproché ou si, au contraire, elle constituait la manifestation d’une volonté autonome (voir, en ce sens, arrêts du 30 avril 2009, CAS Succhi di Frutta/Commission, C‑497/06 P, non publié, EU:C:2009:273, points 61 et 62, et du 18 décembre 2009, Arizmendi e.a./Conseil et Commission, T‑440/03, T‑121/04, T‑171/04, T‑208/04, T‑365/04 et T‑484/04, EU:T:2009:530, points 92 et 93). Dans le cas d’une volonté autonome, il appartient au juge de constater la rupture du lien de causalité (arrêt du 7 décembre 2017, Missir Mamachi di Lusignano e.a./Commission, T‑401/11 P-RENV-RX, EU:T:2017:874, point 68).

54      En outre, il y a lieu de rappeler que le juge de l’Union a considéré de manière explicite qu’un dommage pouvait ne pas trouver son origine directe et certaine dans une seule cause, mais avoir été provoqué par plusieurs causes, qui concouraient de manière déterminante à sa réalisation. Toutefois, cette jurisprudence concerne des cas d’atténuation de la responsabilité de l’institution concernée en raison du comportement de la victime, celle-ci n’ayant pas fait preuve de toute la diligence requise pour éviter ou minimiser son dommage (arrêt du 7 décembre 2017, Missir Mamachi di Lusignano e.a./Commission, T‑401/11 P-RENV-RX, EU:T:2017:874 point 71 ; voir également, en ce sens, arrêt du 12 juin 1986, Sommerlatte/Commission, 229/84, EU:C:1986:241, points 24 à 27).

55      De plus, afin de déterminer si le préjudice est imputable à une action fautive d’une institution de l’Union, il y a lieu de prendre en considération les effets du manquement générateur de l’engagement de responsabilité et non ceux de l’acte dans lequel il s’inscrit, pour autant que l’institution ait pu ou dû adopter un acte de même effet sans violer la règle de droit. En d’autres termes, l’analyse du lien de causalité ne peut partir de la prémisse incorrecte selon laquelle, en l’absence de comportement illégal, l’institution se serait abstenue d’agir ou aurait adopté un acte contraire, ce qui pourrait également être de sa part un comportement illégal, mais doit procéder par comparaison entre la situation engendrée, pour la partie requérante, par l’action fautive et la situation qui serait résultée pour elle d’un comportement de l’institution respectueux de la règle de droit (arrêt du 20 janvier 2010, Sungro/Conseil et Commission, T‑252/07, T‑271/07 et T‑272/07, EU:T:2010:17, point 48).

56      Il y a donc lieu de rechercher si l’illégalité rappelée au point 35 ci-dessus est directement à l’origine du préjudice invoqué (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 1992, Finsider e.a./Commission, C‑363/88 et C‑364/88, EU:C:1992:44, point 28) pour établir l’existence d’un lien direct de cause à effet entre le comportement reproché à la Commission et le dommage allégué (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2010, Sungro/Conseil et Commission, T‑252/07, T‑271/07 et T‑272/07, EU:T:2010:17, point 49).

57      En l’occurrence, la situation engendrée par l’action fautive de la Commission est le résultat de plusieurs échanges de courriers entre cette dernière, le pouvoir adjudicateur turc, la cheffe de file du consortium et la requérante.

58      En particulier, dès le 29 septembre 2016, la cheffe de file du consortium a été informée des motifs de l’enquête de l’OLAF ainsi que des problèmes rencontrés par ce dernier lors du contrôle sur place.

59      Par courrier du 13 octobre 2016, la Commission a transmis sa position sur le comportement reproché à la requérante, ses conséquences s’agissant du financement par le budget de l’Union des services fournis par la requérante ainsi qu’une recommandation sur la nécessité de prendre des mesures appropriées dans le cadre de l’exécution du marché de services.

60      Dans l’hypothèse où la Commission n’aurait pas commis l’illégalité visée au point 35 ci-dessus, le droit d’être entendu de la requérante aurait été respecté dans le cadre des différents échanges de courriers. La requérante aurait alors eu la possibilité d’informer le pouvoir adjudicateur des motifs de l’enquête, de son comportement à l’occasion du contrôle sur place et aurait pu formuler ses observations sur les suites à lui donner.

61      À cet égard, l’audition de la requérante aurait mis cette dernière en mesure non seulement de présenter son interprétation de ses obligations contractuelles et du cadre juridique applicable au contrôle sur place de l’OLAF, mais aussi de connaître les conséquences potentielles de ses actes. Elle aurait ainsi pu faire part, en temps utile, de sa position à l’ensemble des membres du consortium, voire les avertir de l’imminence d’une sanction.

62      D’ailleurs, il convient de remarquer que, conformément à l’article 9, paragraphe 4, du règlement no 883/2013, après avoir donné la possibilité à la requérante de présenter ses observations, l’OLAF lui a transmis, le 9 novembre 2016, une notification de clôture de l’enquête contenant sa recommandation à l’attention de la Commission sur les suites à donner à son comportement à l’occasion du contrôle sur place.

63      Les conséquences éventuelles de l’enquête de l’OLAF n’ont donc été connues de la requérante qu’à cette date, soit plus d’un mois après le courrier de la Commission du 13 octobre 2016.

64      De plus, conformément à l’article 9, paragraphe 4, et à l’article 11, paragraphe 1, du règlement no 883/2013, la transmission du rapport d’enquête de l’OLAF n’est intervenue qu’après l’écoulement du délai prévu afin de permettre à la requérante de formuler ses observations, comme elle y avait été invitée par le courrier du 14 septembre 2016, observations qu’elle a présentées par courrier du 26 septembre 2016.

65      Ainsi, bien que la requérante ait pu connaître depuis la fin du contrôle sur place la teneur des reproches qui étaient susceptibles de lui être faits quant à son comportement et les sanctions encourues, elle pouvait encore légitimement avoir des doutes sur les conséquences réelles de celui-ci jusqu’au moment où elle a eu connaissance de la recommandation de l’OLAF.

66      Dès lors, en n’entendant pas au préalable la requérante avant d’exprimer sa position sur le bien-fondé des recommandations de l’OLAF, et d’en faire part au pouvoir adjudicateur turc, la Commission a maintenu la requérante dans une situation juridique incertaine qui est à l’origine de sa perte de crédibilité auprès des membres du consortium, résultant des déclarations successives, contradictoires entre elles, de la requérante et de la Commission, et, ce faisant, de l’atteinte à son image et à sa réputation professionnelle (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T‑203/96, EU:T:1998:302, point 108).

67      À cet égard, l’atteinte à l’image et à la réputation professionnelle de la requérante découle directement des affirmations selon lesquelles elle aurait refusé de coopérer, en violation de l’article 25 des conditions générales, telles que formulées dans la lettre de la Commission du 13 octobre 2016, alors que la requérante avait rejeté clairement ces affirmations dans son courrier du 4 octobre 2016, et cela avant même que les conclusions de l’enquête de l’OLAF n’aient été transmises à la Commission le 9 novembre 2016. Ces conclusions ont ensuite été portées à la connaissance de la cheffe de file du consortium par le pouvoir adjudicateur turc et, étant donné la signature de l’addendum à l’accord de coopération, aux autres membres du consortium.

68      Partant, ces affirmations prématurées constituent la source tant de la situation d’incertitude dans laquelle la requérante s’est trouvée que de l’atteinte portée à sa crédibilité, à son image et à sa réputation professionnelle.

69      Par ailleurs, l’argument de la Commission selon lequel l’intervention du pouvoir adjudicateur turc a rompu le lien de causalité est sans effet sur le constat précédent. En effet, il est avéré que ce dernier n’a joué aucun rôle autonome à ce stade, mais a joué uniquement un rôle lors de l’exclusion de la requérante. Or, le préjudice moral allégué n’est pas lié à ce dernier évènement, mais bien à la position préalable de la Commission, que le pouvoir adjudicateur turc s’est contenté de relayer passivement aux membres du consortium.

70      Il s’ensuit que la condition relative à l’existence d’un lien de causalité est remplie.

 Sur le préjudice

71      Il convient d’examiner si le préjudice invoqué présente un caractère réel et certain avant de procéder à son évaluation.

72      La requérante affirme que le comportement illégal de la Commission a porté atteinte à son image et à sa réputation à l’égard des autres membres du consortium, en donnant une impression de gravité extrême à l’infraction qu’elle avait commise, mais également en décrédibilisant ses propos auprès des autres membres du consortium et en suscitant de la méfiance de leur part en raison de ses déclarations contradictoires et de celles de la Commission à ce sujet. Ce sentiment aurait été renforcé par la rapidité des prises de position additionnée à la totale éviction de la requérante des échanges entre la Commission, le pouvoir adjudicateur et les membres du consortium. Compte tenu de sa position sur le marché, en tant qu’entreprise de premier plan dans le domaine des services de conseil à des entreprises et à des entités appartenant aux secteurs privé et public, présente en Hongrie et à l’étranger, cette atteinte serait d’autant plus importante. De plus, la requérante fait valoir que la violation du droit d’être entendu a provoqué chez elle un sentiment d’injustice, d’impuissance et de frustration.

73      La Commission considère que le préjudice moral invoqué par la requérante est hypothétique et non étayé. Elle estime qu’une nouvelle audition de la requérante avant la formulation de sa position à l’attention du pouvoir adjudicateur turc n’aurait en rien amélioré son image à l’égard des tiers. Aucun préjudice n’aurait de ce fait été subi.

–       Sur la nature du préjudice

74      Il ressort de la jurisprudence rendue sur le fondement de l’article 268 TFUE, lu en combinaison avec l’article 340, deuxième alinéa, TFUE, qu’un préjudice moral peut, en principe, être indemnisé à l’égard d’une personne morale (voir, en ce sens, arrêts du 28 janvier 1999, BAI/Commission, T‑230/95, EU:T:1999:11, point 37, et du 15 octobre 2008, Camar/Commission, T‑457/04 et T‑223/05, non publié, EU:T:2008:439, point 56 et jurisprudence citée) et qu’un tel préjudice peut prendre la forme d’une atteinte à l’image ou à la réputation de ladite personne (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 1998, Embassy Limousines & Services/Parlement, T‑203/96, EU:T:1998:302, point 108 ; du 8 novembre 2011, Idromacchine e.a./Commission, T‑88/09, EU:T:2011:641, points 70 à 76 ; et du 25 novembre 2014, Safa Nicu Sepahan/Conseil, T‑384/11, EU:T:2014:986, points 80 à 85 et jurisprudence citée).

75      Ainsi, le dommage dont la requérante demande réparation, au titre d’un préjudice moral, est de nature immatérielle et correspond à une atteinte à son image et à sa réputation.

–       Sur la réalité du préjudice

76      Compte tenu des critères permettant d’établir la réalité du dommage, rappelés au point 42 ci-dessus, et plus particulièrement ceux concernant le préjudice immatériel, si la présentation d’une offre de preuve n’est pas nécessairement considérée comme une condition de la reconnaissance d’un tel préjudice, il incombe tout au moins à la partie requérante d’établir que le comportement reproché à l’institution concernée était, de par sa gravité, de nature à lui causer un tel préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 6 juin 2019, Dalli/Commission, T‑399/17, non publié, EU:T:2019:384, point 225 et jurisprudence citée).

77      À cet égard, il y a lieu de relever que, dans la mesure où la requérante allègue que les agissements de la Commission résultant de la communication de plusieurs lettres, relayées par le pouvoir adjudicateur aux autres membres du consortium, ont porté atteinte à son image et à sa réputation professionnelle, il convient d’examiner, conformément à la jurisprudence rappelée au point 74 ci-dessus, si elle a établi que les informations contenues dans ces lettres étaient de nature à lui causer un tel préjudice.

78      À titre liminaire, il importe d’identifier les informations relatives à l’enquête et à l’appréciation du comportement de la requérante qui ont été communiquées aux autres membres du consortium.

79      Premièrement, par une lettre du 29 septembre 2016 du pouvoir adjudicateur à la cheffe de file du consortium, il est mentionné que, à la suite d’une notification, celle-ci a été informée que, dans le cadre d’un contrôle sur place, la requérante s’était opposée à ce que l’OLAF accède à des informations pertinentes dans le cadre de son enquête. Le motif de l’enquête y était précisé, à savoir des soupçons de corruption ou de fraude dans le cadre du projet en cause. Il y était également mentionné que l’OLAF considérait cela comme une violation grave des conditions générales, notamment l’article 25, tout en précisant que l’évaluation des mesures à prendre n’était pas encore terminée. Le pouvoir adjudicateur concluait ce courrier en signifiant la suspension du paiement de la dernière facture pendante transmise.

80      Deuxièmement, en réaction à cette lettre, la cheffe de file du consortium a adressé un courrier à la requérante le 30 septembre 2016, en mettant en copie un autre membre du consortium, l’informant de la décision de suspension des paiements prise par le pouvoir adjudicateur. Dans ce courrier, elle lui faisait également part de sa stupeur et de son inquiétude quant au risque que ce comportement ne porte sérieusement atteinte à la réputation de l’ensemble des membres du consortium. Elle lui demandait donc des éclaircissements sur les faits rapportés.

81      Par une lettre du 4 octobre 2016, dont copie fut adressée à un autre membre du consortium, la requérante a exprimé sa position sur le courrier du pouvoir adjudicateur, mentionné au point 79 ci-dessus. Elle considérait avoir donné accès aux informations pertinentes pour l’enquête et réfutait les accusations du pouvoir adjudicateur. Elle l’informait également du déroulement du contrôle sur place.

82      Troisièmement, à la suite de la réponse de la requérante le 4 octobre 2016, le pouvoir adjudicateur a adressé une nouvelle lettre, datée du 6 octobre 2016, à la cheffe de file du consortium l’informant que l’enquête de l’OLAF n’était pas encore terminée et que le pouvoir adjudicateur n’avait connaissance d’aucun détail à ce sujet. Il y était précisé que, sur les conseils de la Commission, il leur avait été recommandé de suspendre tout paiement jusqu’à la clôture de l’enquête.

83      Quatrièmement, dans sa lettre du 13 octobre 2016, la Commission confirmait au pouvoir adjudicateur le motif de l’enquête, à savoir le refus de la requérante d’autoriser l’OLAF à accéder à des informations et à des documents qui n’étaient pas clairement liés au projet en cause. Elle en concluait que la requérante avait commis un manquement grave à l’article 25.2 des conditions générales. Elle invitait le pouvoir adjudicateur à prendre les mesures appropriées, lui en proposait certaines et renvoyait à des bases juridiques spécifiques pour les fonder. Elle y indiquait également que les montants payés à la requérante dans le cadre du contrat en cause ne seraient pas éligibles au financement par le budget de l’Union.

84      Cinquièmement, le 11 novembre 2016, le pouvoir adjudicateur informait la cheffe de file du consortium de la conclusion de l’enquête de l’OLAF et du manquement grave de la requérante à ses obligations contractuelles sur la base de l’article 25 des conditions générales. Celui-ci faisait part de sa décision d’exclure la requérante de l’exécution du contrat en cause et demandait à la cheffe de file du consortium de prendre les mesures nécessaires à cette fin.

85      De l’ensemble de ces échanges, deux périodes distinctes quant à la situation de la requérante apparaissent, l’une avant la lettre du 13 octobre 2016 et l’autre après celle-ci.

86      D’une part, à la suite des lettres des 29 et 30 septembre et du 4 octobre 2016, les membres du consortium étaient en mesure de connaître le motif de l’enquête, des détails sur le déroulement du contrôle sur place mené par les agents de l’OLAF, notamment en ce qui concernait le comportement de la requérante, ainsi qu’une première appréciation portée par l’OLAF sur sa gravité. En outre, ils étaient informés du caractère préliminaire de l’ensemble des conclusions. À ce stade, ils connaissaient également les arguments de la requérante pour sa défense.

87      D’autre part, à la suite du courrier du 13 octobre 2016, les membres du consortium se sont vu présenter une situation différente. En effet, par sa prise de position, la Commission a attesté de l’exactitude de la situation et du bien-fondé des accusations relatives au comportement de la requérante. Elle a recommandé de cesser la collaboration avec la requérante et a indiqué que les montants payés à cette dernière dans le cadre du contrat en cause n’étaient pas éligibles au financement du budget de l’Union, ce qui ne pouvait qu’avoir une incidence importante sur les suites à donner à ces accusations.

88      Ce courrier, intervenant une dizaine de jours après la prise de position de la requérante sur l’enquête et la suspension des paiements, adressée à la cheffe de file du consortium, a ainsi remis en cause l’ensemble des arguments qu’elle y avait présentés pour sa défense.

89      Cette contradiction a engendré, auprès des membres du consortium, une impression négative quant à la crédibilité de la requérante ainsi qu’une opinion défavorable à son égard.

90      Cette conviction des membres du consortium à l’égard de la requérante a été renforcée par le fait que le courrier du 13 octobre 2016 exprimait clairement la position de la Commission tant sur les sanctions envisageables à son égard que sur leur caractère indispensable.

91      Il convient aussi de relever que l’enchaînement temporel rapide de ces correspondances a pu également véhiculer une impression de gravité accrue et de certitude quant à l’appréciation du sérieux du comportement de la requérante, traduit par la forte progressivité de l’ampleur des sanctions.

92      Il en résulte que cette succession de courriers a porté effectivement atteinte à la crédibilité de la requérante, à son image et à sa réputation professionnelle, en la mettant dans l’impossibilité d’exposer clairement aux autres membres du consortium sa position sur l’interprétation retenue par la Commission des conséquences à tirer du contrôle sur place de l’OLAF, à défaut d’en avoir eu connaissance préalablement à l’envoi du courrier du 13 octobre 2016, mentionné au point 83 ci-dessus.

93      Dès lors, la Commission, en n’entendant pas préalablement la requérante sur son comportement, a porté atteinte à l’image et à la réputation professionnelle de cette dernière à l’égard des autres membres du consortium, rendant plus difficile la conclusion d’accords commerciaux et la coopération avec la requérante, dont la parole n’apparaissait plus crédible aux yeux de ses partenaires dans le contexte d’une accusation visant un comportement contraire à ses obligations contractuelles voire une violation de la législation.

94      À cet égard, si la requérante fait valoir avoir établi un lien de causalité entre ces agissements et le retrait de l’un des membres du consortium d’un autre projet de collaboration avec elle, il ne ressort néanmoins pas explicitement du dossier que cette décision a été principalement motivée par l’atteinte à l’image et à la réputation de la requérante. Dans ses observations, elle évoque également l’échec de plusieurs collaborations distinctes en cours avec les différents membres du consortium sans parvenir pour autant à prouver avec certitude les motivations réelles de ceux-ci.

95      Il convient toutefois de remarquer, à ce titre, que la cheffe de file du consortium fait état de son inquiétude quant aux répercussions du comportement de la requérante à l’égard de sa propre réputation et de celle des autres membres.

96      Partant, le comportement de la Commission a effectivement causé une atteinte à l’image et à la réputation professionnelle de la requérante.

97      Il s’ensuit que la condition relative à la réalité du dommage est satisfaite.

–       Sur l’évaluation du préjudice réparable

98      La requérante évalue le préjudice moral résultant de l’atteinte à son image et à sa réputation professionnelle ex æquo et bono à la somme de 25 000 euros. Elle demande également que cette indemnité soit majorée des intérêts de retard à compter de la date du prononcé de l’arrêt dans la présente affaire et jusqu’au paiement intégral de l’indemnisation due, sur la base du taux fixé par la BCE pour les opérations principales de refinancement, applicables en novembre 2016, majoré de 2 points.

99      La Commission ne se prononce pas sur la quantification du préjudice. Elle considère uniquement que la requérante a manqué à la charge qui pesait sur elle d’étayer son préjudice moral.

100    Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la partie requérante doit mettre le Tribunal en mesure d’apprécier l’étendue et le caractère de son préjudice. Ainsi, que la réparation d’un préjudice moral soit demandée à titre symbolique ou aux fins de l’obtention d’une véritable indemnité, il appartient à la partie requérante de préciser, notamment, la nature du préjudice moral allégué, au regard du comportement reproché à l’institution concernée, puis de préciser, même de façon approximative, l’évaluation de l’ensemble de ce préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2019, Fulmen/Conseil, T‑405/15, EU:T:2019:469, point 91 et jurisprudence citée).

101    Par ailleurs, si, dans le cadre d’un recours en annulation, l’annulation d’un acte entaché d’illégalité peut constituer en elle-même la réparation adéquate et, en principe, suffisante de tout préjudice moral que cet acte peut avoir causé (arrêt du 3 juillet 2018, Transtec/Commission, T‑616/15, EU:T:2018:399, point 165), en l’espèce, aucune annulation ne pourra intervenir sur le fondement de l’illégalité procédurale commise par la Commission, de sorte qu’aucune réparation adéquate de l’atteinte à l’image et à la réputation de la requérante ne pourra intervenir de cette manière. En effet, l’ensemble des moyens dirigés contre le comportement des agents de l’OLAF, à l’occasion du contrôle sur place, ont été rejetés par l’arrêt initial et par l’arrêt sur pourvoi, confirmant ainsi le bien-fondé des accusations formulées par la Commission, qui ont conduit à l’exclusion de la requérante du consortium du marché de services dans le cadre du projet en cause.

102    Dès lors, seule l’indemnisation de la requérante est susceptible de compenser intégralement le préjudice moral subi. À ce titre, celle-ci doit refléter la nature spécifique ainsi que les circonstances particulières de l’affaire.

103    Premièrement, s’agissant des facteurs dont la requérante estime qu’ils aggravent son préjudice, à savoir, d’une part, sa position d’entreprise de premier plan dans le domaine des services de conseil à des entreprises et à des entités appartenant aux secteurs privé et public, présente en Hongrie et à l’étranger, et, d’autre part, l’exclusion dont elle estime avoir été la victime de la part des autres membres du consortium, il y a lieu de constater, sur la base des éléments fournis, que ces facteurs ne sont pas de nature à l’avoir aggravé.

104    Deuxièmement, il convient de relever que la requérante n’apporte pas d’explication circonstanciée étayant sa demande d’octroi d’une indemnité d’un montant de 25 000 euros. À ce titre, elle n’avance aucun argument ou preuve permettant de comprendre les raisons pour lesquelles un tel montant constituerait une juste compensation pour l’atteinte portée à son image et à sa réputation. À cet égard, il peut être constaté, notamment, qu’il n’est pas soutenu que ce montant a un quelconque rapport avec le coût des investissements réalisés par la requérante pour créer, maintenir ou rétablir son image et sa réputation. D’ailleurs, en réponse aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience, la requérante a précisé que, compte tenu du fait que ce dommage moral n’était pas quantifiable, elle suggérait que le Tribunal lui accorde à ce titre une indemnité d’un montant 25 000 euros.

105    Troisièmement, il y a lieu de constater que la requérante était, en toute hypothèse, en mesure de limiter l’importance du préjudice moral subi. En effet, dans la mesure où elle avait connaissance des faits qui lui étaient reprochés à compter de la lettre du 14 septembre 2016, mentionnée au point 14 ci-dessus, et pour lesquels elle avait formulé ses observations dans sa réponse du 23 septembre 2016, mentionnée au point 15 ci-dessus, il doit en être déduit qu’elle pouvait contacter ses partenaires afin de les informer de l’existence d’un contrôle sur place de l’OLAF, ainsi que des désaccords l’opposant à ce dernier sur l’étendue de ce contrôle, avant même que la Commission ne transmette son courrier du 13 octobre 2016, et limiter ainsi l’ampleur de l’atteinte à son image et à sa réputation en découlant.

106    Partant, afin de satisfaire l’objectif visant à réhabiliter l’image et la réputation de la requérante, la réparation du préjudice subi doit tirer uniquement les conséquences d’une violation d’un droit procédural de la requérante par la Commission et ne vise pas à réparer les conséquences pécuniaires du comportement illégal de la requérante en ce qui concerne de son exclusion ni à combler le manque à gagner pour elle induit par la perte de contrats postérieurs.

107    À la lumière de l’ensemble des considérations exposées aux points 100 à 105 ci-dessus, et en l’absence d’éléments précis fournis par la requérante sur l’étendue de l’atteinte à l’image et à la réputation subie, le Tribunal estime qu’une indemnité d’un montant de 5 000 euros représente un dédommagement équitable et juste.

108    S’agissant des intérêts moratoires, selon la jurisprudence de la Cour, le montant de l’indemnité due peut être assorti d’intérêts moratoires à compter de la date du prononcé de l’arrêt constatant l’obligation de réparer le préjudice (voir, en ce sens, arrêts du 4 octobre 1979, Dumortier e.a./Conseil, 64/76, 113/76, 167/78, 239/78, 27/79, 28/79 et 45/79, EU:C:1979:223, point 25 ; du 19 mai 1992, Mulder e.a./Conseil et Commission, C‑104/89 et C‑37/90, EU:C:1992:217, point 35, et du 26 novembre 2008, Agraz e.a./Commission, T‑285/03, non publié, EU:T:2008:526, point 55).

109    Conformément à la jurisprudence, le taux d’intérêt à appliquer est calculé sur la base du taux fixé par la BCE pour les opérations principales de refinancement, applicable pendant la période concernée, majoré de 2 points (voir arrêt du 8 novembre 2011, Idromacchine e.a./Commission, T‑88/09, EU:T:2011:641, point 79 et jurisprudence citée).

110    Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que la Commission doit s’acquitter d’intérêts moratoires, à compter du prononcé du présent arrêt jusqu’au complet paiement de ladite indemnité, au taux fixé par la BCE pour les opérations principales de refinancement, applicable pendant la période concernée, majoré de 2 points, conformément aux conclusions de la requérante.

 Sur les dépens

111    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

112    Dans l’arrêt sur pourvoi, la Cour a réservé les dépens. Il appartient donc au Tribunal de statuer, dans le présent arrêt, sur les dépens relatifs, d’une part, aux procédures engagées devant lui et, d’autre part, à la procédure de pourvoi devant la Cour, conformément à l’article 219 du règlement de procédure.

113    La Commission ayant succombé, dans la procédure de pourvoi devant la Cour, dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt sur pourvoi, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux exposés par la requérante, liés à cette procédure et à la procédure devant le Tribunal antérieure au pourvoi, dans le cadre de l’affaire T‑617/17.

114    La Commission ayant également succombé sur le fond dans la procédure de renvoi devant le Tribunal, dans le cadre de l’affaire T‑617/17 RENV, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux de la requérante liés à cette procédure, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La Commission européenne est condamnée à verser à Vialto Consulting Kft. une indemnité de 5 000 euros au titre du préjudice moral subi.

2)      L’indemnité à verser à Vialto Consulting sera majorée d’intérêts moratoires, à compter du prononcé du présent arrêt jusqu’à complet paiement de ladite indemnité, au taux fixé par la Banque centrale européenne (BCE) pour les opérations principales de refinancement, applicable pendant la période concernée, majoré de 2 points.

3)      La Commission est condamnée aux dépens liés à la procédure de pourvoi devant la Cour, dans le cadre de l’affaire C650/19 P, ainsi qu’à ceux liés à la procédure initiale, dans le cadre de l’affaire T617/17, et à la procédure de renvoi, dans le cadre de l’affaire T617/17 RENV, devant le Tribunal.

da Silva Passos

Reine

Sampol Pucurull

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 décembre 2022.

Signatures


*      Langue de procédure : le grec.