Language of document : ECLI:EU:T:2012:270

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

4 juin 2012 (*)

« Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises au regard de la situation en Côte d’Ivoire – Retrait de la liste des personnes concernées – Recours en annulation – Non-lieu à statuer »

Dans les affaires T‑118/11, T‑123/11 et T‑124/11,

Philipp Attey, demeurant à Abidjan (Côte d’Ivoire),

partie requérante dans l’affaire T‑118/11,

Thierry Legré, demeurant à Abidjan,

partie requérante dans l’affaire T‑123/11,

Stéphane Kipré, demeurant à Abidjan,

partie requérante dans l’affaire T‑124/11,

représentés par Me J.-C. Tchikaya, avocat,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. B. Driessen et M. Chavrier, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

République de Côte d’Ivoire, représentée par Mes J.‑P. Mignard et J.‑P. Benoit, avocats,

et par

Commission européenne, représentée par MM. A. Bordes et M. Konstantinidis, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

ayant pour objet des demandes d’annulation, d’une part, de la décision 2011/18/PESC du Conseil, du 14 janvier 2011, modifiant la décision 2010/656/PESC du Conseil renouvelant les mesures restrictives instaurées à l’encontre de la Côte d’Ivoire (JO L 11, p. 36), et, d’autre part, du règlement (UE) n° 25/2011 du Conseil, du 14 janvier 2011, modifiant le règlement (CE) n° 560/2005 infligeant certaines mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Côte d’Ivoire (JO L 11, p. 1), pour autant que ces actes concernent les requérants,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. S. Papasavvas (rapporteur), président, V. Vadapalas et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

Antécédents du litige

1        Les requérants, MM. Philipp Attey, Thierry Legré et Stéphane Kipré, sont des ressortissants de la République de Côte d’Ivoire.

2        Les présentes affaires s’inscrivent dans le cadre des mesures restrictives instaurées à l’encontre de la Côte d’Ivoire.

3        La décision 2010/656/PESC du Conseil, du 29 octobre 2010, renouvelant les mesures restrictives instaurées à l’encontre de la Côte d’Ivoire (JO L 285, p. 28), telle que modifiée, et le règlement (CE) n° 560/2005 du Conseil, du 12 avril 2005, infligeant certaines mesures restrictives spécifiques à l’encontre de certaines personnes et entités au regard de la situation en Côte d’Ivoire (JO L 95, p. 1), tel que modifié, prévoient, notamment, que les personnes et entités incluses dans la liste figurant à l’annexe II de ladite décision et à l’annexe I A dudit règlement sont soumises, dans les conditions prévues par ces actes, à des mesures restrictives.

4        Par la décision 2011/17/PESC, du 11 janvier 2011, modifiant la décision 2010/656 (JO L 11, p. 31), le Conseil de l’Union européenne a, notamment, procédé à l’inscription des noms de MM. Attey et Kipré sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/656.

5        Par la décision 2011/18/PESC, du 14 janvier 2011, modifiant la décision 2010/656 (JO L 11, p. 36), et par le règlement (UE) n° 25/2011, du 14 janvier 2011, modifiant le règlement n° 560/2005 (JO L 11, p. 1) (ci-après, pris ensemble, les « actes attaqués »), le Conseil a, notamment, d’une part, maintenu les noms de MM. Attey et Kipré sur ladite liste et ajouté sur celle-ci le nom de M. Legré, et, d’autre part, procédé à l’inscription des noms des requérants sur la liste figurant à l’annexe I A du règlement n° 560/2005.

6        Par la décision d’exécution 2012/144/PESC, du 8 mars 2012, mettant en œuvre la décision 2010/656 (JO L 71, p. 50) et le règlement d’exécution (UE) n° 193/2012, du 8 mars 2012, mettant en œuvre le règlement n° 560/2005 (JO L 71, p. 5), le Conseil a, notamment, retiré les noms des requérants de la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/656 et à l’annexe I A du règlement n° 560/2005.

 Procédure

7        Par requêtes déposées au greffe du Tribunal les 2 et 3 mars 2011, les requérants ont introduit les présents recours.

8        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 mars 2011, Mme Simone Gbagbo, une ressortissante de la République de Côte d’Ivoire également visée par des mesures restrictives instaurées au regard de la situation en Côte d’Ivoire, a introduit un recours contre les actes attaqués (affaire T‑119/11).

9        Par actes déposés au greffe du Tribunal les 14 et 15 juin 2011, la Commission européenne a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil dans les présentes affaires ainsi que dans l’affaire T‑119/11.

10      Par actes déposés au greffe du Tribunal le 21 juin 2011, la République de Côte d’Ivoire a demandé à intervenir au soutien des conclusions du Conseil dans lesdites affaires.

11      Le Conseil a déposé ses mémoires en défense dans les présentes affaires les 13 et 20 juillet 2011.

12      Les requérants n’ont pas déposé de mémoires en réplique dans les délais impartis.

13      Par ordonnance du 7 octobre 2011, le président de la cinquième chambre du Tribunal, les parties entendues, a décidé de joindre les affaires T‑118/11, T‑119/11, T‑123/11 et T‑124/11 aux fins de la procédure écrite et de la procédure orale.

14      Par ordonnances du 20 octobre 2011, le président de la cinquième chambre du Tribunal a fait droit aux demandes en intervention de la Commission et de la République de Côte d’Ivoire.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 8 décembre 2011, la Commission a renoncé à déposer un mémoire en intervention.

16      La République de Côte d’Ivoire a déposé son mémoire en intervention le 9 décembre 2011.

17      Seul le Conseil a déposé ses observations sur ce mémoire dans le délai imparti.

18      Le 15 mars 2012, le Tribunal (cinquième chambre) a invité les parties dans les affaires T‑118/11, T‑119/11, T‑123/11 et T‑124/11 à se prononcer, notamment, sur les conséquences à tirer, en particulier au regard de l’objet des recours dans les affaires T‑118/11, T‑123/11 et T‑124/11, de l’adoption de la décision d’exécution 2012/144 et du règlement d’exécution n° 193/2012, et notamment à prendre position sur la question de savoir s’il y avait encore lieu de statuer sur ces recours.

19      Seuls le Conseil et la Commission ont répondu à cette demande dans le délai imparti.

20      Les parties entendues, le Tribunal (cinquième chambre) estime qu’il y a lieu de joindre les affaires T‑118/11, T‑123/11 et T‑124/11 aux fins de l’ordonnance, conformément à l’article 50 du règlement de procédure.

 Conclusions des parties

21      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les actes attaqués, pour autant qu’ils les concernent ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

22      Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter les recours ;

–        condamner les requérants aux dépens.

23      La République de Côte d’Ivoire conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter les recours.

24      Dans la réponse à la question posée par le Tribunal visée au point 18 ci-dessus, le Conseil a fait valoir qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur les recours et que les requérants devaient être condamnés aux dépens.

25      La Commission a indiqué, quant à elle, qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur les présents recours.

 En droit

26      En vertu de l’article 113 du règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, statuer sur les fins de non-recevoir d’ordre public ou constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.

27      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sans poursuivre la procédure.

28      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’intérêt à agir d’un requérant doit, au vu de l’objet du recours, exister au stade de l’introduction de celui-ci sous peine d’irrecevabilité. Cet objet du litige doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir ordonnance du Tribunal du 6 juillet 2011, SIR/Conseil, T‑142/11, non publiée au Recueil, point 16, et la jurisprudence citée).

29      Or, si l’intérêt à agir du requérant disparaît au cours de la procédure, une décision du Tribunal sur le fond ne saurait procurer aucun bénéfice à celui-ci (voir ordonnance SIR/Conseil, précitée, point 17, et la jurisprudence citée).

30      Il convient également de rappeler que, selon une jurisprudence non moins constante, le retrait, ou l’abrogation dans certaines circonstances, de l’acte attaqué par l’institution défenderesse fait disparaître l’objet du recours en annulation, dès lors qu’il aboutit, pour le requérant, au résultat voulu et lui donne entière satisfaction (voir ordonnance SIR/Conseil, précitée, point 18, et la jurisprudence citée).

31      En l’espèce, force est de constater que, par la décision d’exécution 2012/144 et le règlement d'exécution n° 193/2012, le Conseil a procédé à l’abrogation des actes attaqués dans la mesure où ces actes concernent, notamment, les requérants. Cette abrogation aboutit, pour les requérants, au résultat voulu et leur donne entière satisfaction, étant donné que, à la suite de l’adoption de la décision d’exécution 2012/144 et du règlement d’exécution n° 193/2012, ils ne sont plus soumis aux mesures restrictives qui leur faisaient grief (voir, en ce sens, ordonnance SIR/Conseil, précitée, points 19 et 20).

32      Cependant, selon une jurisprudence constante, dans le cadre d’un recours en annulation, la partie requérante peut conserver un intérêt à voir annuler un acte abrogé en cours d’instance si l’annulation de cet acte est susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques (voir ordonnance SIR/Conseil, précitée, point 21, et la jurisprudence citée).

33      Toutefois, en l’espèce, nonobstant la demande que leur a adressée le Tribunal (voir point 18 ci-dessus), les requérants n’ont fourni aucun élément permettant de conclure que, malgré leur abrogation, ils conservaient un intérêt à voir annuler les actes attaqués.

34      En tout état de cause, aucun élément du dossier ne permet de considérer que, à la suite de l’adoption de la décision d’exécution 2012/144 et du règlement d’exécution n° 193/2012, les présents recours seraient susceptibles de procurer aux requérants un bénéfice, au sens de la jurisprudence visée au point 28 ci-dessus, de sorte qu’ils conserveraient un intérêt à agir (voir, en ce sens, ordonnance SIR/Conseil, précitée, points 25 à 27).

35      Il découle de l’ensemble de ce qui précède qu’il n’y a plus lieu de statuer sur les présents recours.

 Sur les dépens

36      Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure, les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens.

37      En outre, aux termes de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

38      En l’espèce, il convient de constater que c’est l’inscription des requérants, par les actes attaqués, sur la liste figurant à l’annexe II de la décision 2010/656 et à l’annexe I A du règlement n° 560/2005, puis le retrait de cette inscription, en cours d’instance, par la décision d’exécution 2012/144 et le règlement d’exécution n° 193/2012, qui ont conduit le Tribunal à déclarer le présent non-lieu à statuer. Ces circonstances justifient que le Conseil soit condamné à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par les requérants.

39      Il convient, en outre, de décider que la République de Côte d’Ivoire et la Commission supporteront leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Les affaires T‑118/11, T‑123/11 et T‑124/11 sont jointes aux fins de l’ordonnance.

2)      Il n’y a plus lieu de statuer sur les recours.

3)      Le Conseil de l’Union européenne est condamné à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par MM. Philipp Attey, Thierry Legré et Stéphane Kipré.

4)      La République de Côte d’Ivoire et la Commission européenne supporteront leurs propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 4 juin 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : le français.