ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
17 juillet 1998 (1)
«Fonctionnaires Recours en annulation Mutation/Réaffectation Intérêt du
service Absence de motivation Recours en indemnité»
Dans l'affaire T-28/97,
Agnès Hubert, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes,
demeurant à Bruxelles, représentée par Me Marc-Albert Lucas, avocat au barreau
de Liège, ayant élu domicile à Luxembourg en l'étude de Me Évelyne Korn, 21, rue
de Nassau,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Gianluigi
Valsesia, conseiller juridique principal, et Mme Christine Berardis-Kayser, membre
du service juridique, en qualité d'agents, assistés de Me Denis Waelbroeck, avocat
au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos
Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
ayant pour objet, d'une part, une demande d'annulation de la décision de la
Commission, du 27 mars 1996, de modifier l'affectation de la requérante et, d'autre
part, une demande de dommages-intérêts en réparation des préjudices matériel et
moral prétendument en découlant,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),
composé de Mme P. Lindh, président, MM. K. Lenaerts et J. D. Cooke, juges,
greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 1er avril 1998,
rend le présent
Arrêt
Faits et procédure
Antécédents du litige
- 1.
- La requérante, Mme Hubert, a été recrutée par la Commission le 15 janvier 1981
au grade A 7, échelon 3, et affectée à la direction générale Personnel et
administration (DG IX), puis à la direction générale Développement (DG VIII).
Elle fut promue au grade A 6 le 1er juin 1985, puis, le 1er décembre 1988, nommée
à l'unité 3 «information développement» de la direction A «information» de la
direction générale Information, communication et culture (DG X) (ci-après «unité
X.A.3») pour y exercer ses fonctions dans le domaine de la politique de
développement de la Commission.
- 2.
- Ayant obtenu une promotion au grade A 5 le 1er mai 1990, elle a été nommée, le
1er février 1992, chef de l'unité 4 «actions en faveur de l'emploi et de l'égalité des
femmes» au sein de la direction B «emploi et marché du travail» de la direction
générale «Emploi, relations industrielles et affaires sociales» (DG V). Cette unité
est devenue, après réorganisation de la DG V le 1er septembre 1993, l'unité 3
«égalité des chances entre les femmes et les hommes» de la direction A «emploi
et marché du travail» de la DG V (ci-après «unité V.A.3»).
- 3.
- Le 1er avril 1995, Mme Q., qui avait été le chef de l'unité «égalité des chances entre
les hommes et les femmes» entre 1981 et 1989, a été nommée directeur de la
direction A «emploi et marché du travail» de la DG V (ci-après «direction V.A»).
- 4.
- Par une décision en date du 1er décembre 1995, prenant effet le 1er janvier 1995,
la requérante a été promue au grade A 4.
- 5.
- Au début du mois de décembre 1995, le directeur de la direction V.A, notateur de
la requérante, lui a fait parvenir le projet de son rapport de notation pour la
période allant du 1er juillet 1993 au 30 juin 1995. Par note du 15 décembre 1995,
la requérante, n'étant pas d'accord sur certains points du projet de rapport, a
sollicité un entretien avec son directeur, en sa qualité de notateur. Celui-ci a eu lieu
entre le 20 décembre 1995 et le 5 mars 1996, la date exacte n'étant pas connue.
- 6.
- A la suite dudit entretien, la requérante a reçu son rapport de notation, daté du
7 décembre 1995, pour la période du 1er juillet 1993 au 30 juin 1995 (ci-après
«rapport de notation 1993/1995»). Les appréciations analytiques variaient en
comparaison du rapport de notation pour la période du 1er juillet 1987 au 30 juin
1989, reconduit pour les périodes du 1er juillet 1989 au 30 juin 1991 et du 1er juillet
1991 au 30 juin 1993. L'appréciation passait d'«excellent» à «très bon» pour les
rubriques «Connaissances nécessaires à l'exercice des fonctions», «Aptitudes
compréhension», «Qualité du travail», «Adaptation aux exigences du service» et
«Relations humaines» et de «très bon» à «bon» pour la rubrique «Aptitudes
sens de l'organisation» où le notateur avait précisé: «dans un contexte de gestion
difficile (taille, structure des effectifs, charge de travail). Un effort particulier doit
être fait pour améliorer l'organisation de l'unité et dès lors sa rentabilité». Pour les
rubriques «Aptitudes expression écrite» et «Aptitudes expression orale»
l'appréciation passait de «très bon» à «excellent». L'appréciation générale était
libellée comme suit:
«Mme Hubert assure avec beaucoup d'enthousiasme, de conviction, de volonté et
de ténacité la tâche difficile de chef de l'unité 'égalité des chances entre les
femmes et les hommes. Il convient de souligner que la gestion de cette unité est
particulièrement lourde compte tenu de la charge de travail et de la structure des
effectifs.
Elle montre par ailleurs un grand esprit d'initiative et un grand sens des
responsabilités.
Elle doit toutefois veiller à ce que sa motivation pour le thème dont elle est
responsable ne l'entraîne pas hors des orientations fixées par la Commission, et
améliorer l'organisation du travail de son unité ainsi que les relations tant à
l'intérieur qu'à l'extérieur de la Commission.
Elle a par contre des qualités importantes d'expression et d'information qui
devraient être plus largement exploitées.»
- 7.
- Lors d'un entretien le 25 janvier 1996, le directeur de la requérante l'a informée
que lui-même et l'unité V.A.3 devaient être transférés à la direction D «dialogue
social et libre circulation des travailleurs» de la DG V (ci-après «direction V.D»),
et qu'elle-même serait nommée à un poste de conseiller à la DG V.
- 8.
- La requérante a, ensuite, eu cinq entretiens avec le directeur général de la DG V,
respectivement les 26 janvier, 5, 9, 12 et 14 février 1996, au cours desquels a été
discutée la proposition du directeur général de nommer la requérante conseiller
chargé des relations avec les organisations non gouvernementales (ci-après
«ONG»). Lors de ces entretiens, la requérante a indiqué qu'elle percevait le retrait
de ses responsabilités de chef de l'unité V.A.3 comme une sanction injustifiée. Elle
a également mis en doute le contenu du poste proposé.
- 9.
- Le 14 février 1996, la requérante a adressé à son directeur une note relative à leur
entretien du 25 janvier 1996. Dans cette note, la requérante a exprimé sa surprise
en ce qui concerne la décision administrative qui devrait être prise de lui retirer ses
fonctions de chef d'unité, «notamment en regard du fait [qu'elle avait] été
proposée par la direction générale en première position pour une promotion au
grade A 4 en 1995, et que le rapport de notation [...] établi fin 1995 [lui
reconnaissait] des qualités très bonnes ou excellentes». Afin d'éviter tout
malentendu, elle priait le directeur de l'informer des raisons tangibles qui
motivaient la décision qui devait être prise à son égard.
- 10.
- Par note datée du même jour, le directeur de la direction V.A a répondu qu'il
s'était contenté, en sa qualité de supérieur hiérarchique immédiat de la requérante,
de lui communiquer les orientations arrêtées par la DG V dans l'intérêt du service
concernant son propre transfert, celui de l'unité V.A.3 et celui de la requérante. Il
ne s'agirait pas d'une décision de sa part mais d'une information préalable, avant
la formalisation de la décision appartenant à l'autorité investie du pouvoir de
nomination (ci-après «AIPN»), «sur les intentions de [cette dernière],
communiquée par le supérieur hiérarchique immédiat et suivie d'ailleurs d'une série
d'entretiens avec le directeur général».
- 11.
- Le 15 février 1996, le directeur général de la DG V a adressé une note au
directeur général de la DG IX (ci-après «note du 15 février 1996») dans le but de
procéder, dans l'intérêt du service, à une série de cinq modifications de
l'organigramme de la DG V, avec effet au 1er mars 1996:
«1. Passage de l'unité 'égalité des chances entre les femmes et les hommes de
la V.A.3 à la V.D.5;
2. Modification de la numérotation de l'unité V.A.4 en V.A.3;
3. Transfert du poste de conseiller (ex-Wallyn) à la direction E et pourvoi en
A 4 par la mutation de [la requérante] actuellement C.U. à la V.A.3;
4. Transformation du secteur 'actions spécifiques, assistance technique de la
V.B.4 en chef d'unité adjoint avec nomination sur ce poste de [M. X],
fonctionnaire A 4 dans la même unité V.B.4. Les fonctions exercées dans
le secteur susdit seront transférées à la V.B.2, sans changement de
l'organigramme;
5. Modification des responsabilités du directeur général adjoint:
coordination des directions B, C et E (sauf V.E.5) et de l'unité V.D.5.»
- 12.
- Le 19 février 1996, la requérante a adressé une note au directeur général de la
DG V par laquelle, après avoir pris note que celui-ci agissait en qualité d'AIPN
dans cette affaire, elle lui demandait de préciser les raisons qui motivaient la
décision proposée de lui retirer ses fonctions de chef d'unité. Par la même note, la
requérante transmettait un compte rendu, préparé par elle, de leurs réunions des
26 janvier, 5, 9, 12 et 14 février 1996.
- 13.
- Par une note datée du 5 mars 1996, la requérante a transmis au directeur général
une copie de son rapport de notation 1993/1995 en indiquant qu'elle ne pouvait pas
marquer son accord et qu'elle demandait la saisine du notateur d'appel.
- 14.
- Par courrier du 27 mars 1996, le directeur général de la DG V a notifié à la
requérante la décision de changement d'affectation (ci-après «décision attaquée»):
«En vertu de la décision de la Commission du 20 novembre 1985 relative à
l'exercice des pouvoirs dévolus par le statut des fonctionnaires à l'autorité investie
du pouvoir de nomination, modifiée en dernier lieu par la décision de la
Commission du 21 septembre 1994 sur l'extension des pouvoirs délégués aux
directeurs généraux et chefs de services en matière de gestion du personnel, j'ai
l'honneur de vous informer qu'il a été décidé de modifier votre affectation en tant
que chef de l'unité V.A.3 'égalité des chances entre les femmes et les hommes et
de vous affecter en tant que conseiller auprès du directeur de la direction E
'politique et action sociale à la direction générale de l'Emploi, relations
industrielles et affaires sociales.
Cette décision prend effet le 1er avril 1996.»
- 15.
- Le 18 avril 1996, la requérante a eu un entretien avec le directeur de la direction
E «politique et action sociale» de la DG V (ci-après «direction V.E»). Dans une
note pour le dossier, du 29 avril 1996, envoyée au directeur général de la DG V
(ci-après «note du 29 avril 1996»), le directeur a relaté cet entretien dans les
termes suivants:
«I met Mrs Agnès Hubert on 18 April.
I explained that since she has been posted to my Directorate as adviser to me, I
should outline what would be the tasks and duties attached to the post.
I explained that following the Social Policy Forum, it was clear that a much
improved method of liaison with NGOs was necessary since within DG V the
contact was spread throughout the DG. It was now felt that this function should go
to one person who would coordinate and develop the contacts with the 'DG V
NGOs, which were largely in the field of women, older people, social exclusion, etc.
As far as resources were concerned, I explained that 2 MECU was available under
Declaration 23 and that this was likely to rise to about 4 MECU for use on building
up contacts with NGOs.
I expressed the view that given her background and experience, she would be the
ideal person to deal with this.
Mrs Hubert expressed interest in the idea but explained that she was still dis-satisfied with her position in DG V, following her removal as Head of the Equal
Opportunity Unit, and she stated that she is still awaiting an explanation in writing
as to why this happened. In these circumstances, she felt that while it appeared to
be an interesting job, she could not accept at this time.»
(«J'ai rencontré Mme Agnès Hubert le 18 avril.
Je lui ai expliqué que, étant donné qu'elle a été affectée à ma direction en tant que
mon conseiller, je devais lui indiquer en quoi consistaient les tâches et les fonctions
dudit poste.
J'ai expliqué que, à la suite du Social Policy Forum, il était devenu évident qu'une
nette amélioration de la méthode de liaison avec les ONG était nécessaire, puisque
dans la DG V les contacts étaient dispersés dans toute la DG. Le sentiment actuel
était que cette fonction devrait être attribuée à une seule personne qui serait
responsable de la coordination et du développement des contacts avec les ONG de
la DG V, dont la plupart travaillaient à des questions touchant aux femmes, aux
personnes âgées, à l'exclusion sociale, etc. Quant aux ressources, j'ai expliqué que,
selon la déclaration 23, 2 millions d'écus étaient disponibles, et que cette somme
allait probablement augmenter jusqu'à 4 millions d'écus, pour l'établissement de
contacts avec les ONG.
Je lui ai dit que, à mon avis, avec sa formation et son expérience elle serait la
personne idéale pour s'occuper de ces questions.
Mme Hubert s'est dite intéressée par cette idée mais a expliqué qu'elle était toujours
peu satisfaite de sa situation dans la DG V, après avoir été déchargée de ses
responsabilités de chef de l'unité 'égalité des chances, et elle a indiqué qu'elle
attendait toujours une explication écrite précisant pourquoi ceci s'était passé. Dans
ces circonstances, elle était d'avis que, bien que le travail paraisse intéressant, elle
ne pouvait pas en ce moment l'accepter.»)
- 16.
- Par décision du 25 avril 1996, parvenue à la requérante le 30 avril, le directeur
général de la DG V a confirmé le rapport de notation 1993/1995.
- 17.
- Par note du 10 mai 1996, la requérante a demandé au directeur général de la
DG V de saisir le comité paritaire des notations.
- 18.
- Le 24 mai 1996, le directeur général de la DG V a adressé une note à la
requérante (ci-après «note du 24 mai 1996»), à laquelle il avait joint la note du 29
avril 1996 rédigée par le directeur de la direction V.E (voir point 15 ci-dessus) ainsi
qu'une description des tâches du poste de conseiller à cette même direction ainsi
rédigée:
«Adviser, with particular responsibility for relations with the NGOs.
The SPAP states that: 'A wide range of voluntary organisations and other
representative bodies need to be much more actively engaged in helping to
reconcile economic performance with a widespread social solidarity.
The realisation of this commitment is in progress through the preparation of the
first European Social Policy Forum (building on the Green Paper Conference in
1994) and, for the first time, the NGOs have created a 'Platform at European
level, which demonstrates the embryo of what could become a more structured
dialogue.
Tasks to be undertaken:
General responsibility for relations with NGOs and voluntary bodies i.e
DG V's point of contact for information and advice;
Development of a process of information for and consultation of NGOs and
voluntary bodies, building on the Social Policy Forum and creating an on-going 'forum. This will be of particular importance in the 1996/7 period in
view of the IGC discussions, and the need to maintain the momentum
created by the March 1996 Forum;
This general responsibility will require in depth knowledge of DG V's
activities in general and to be closely in touch with political developments.
An associated responsibility for internal information (newsletter) could be
a valuable addition to this set of responsibilities.»
(«Conseiller, ayant des responsabilités précises dans le domaine des relations avec
les ONG.
Le SPAP précise que: 'Il est nécessaire qu'un large éventail d'organisations
bénévoles et autres organismes représentatifs soient engagés de manière bien plus
active dans la conciliation des performances économiques et d'une solidarité sociale
accrue.
La réalisation de cet engagement est en cours au moyen de la préparation du
premier European Social Policy Forum (basé sur la conférence sur le livre vert en
1994) et, pour la première fois, les ONG ont créé une 'plate-forme au niveau
européen, qui constitue un embryon de ce qui pourrait devenir un dialogue plus
structuré.
Les tâches qu'il convient d'entreprendre:
Responsabilité générale des relations avec les ONG et les organisations
bénévoles, c'est-à-dire être la personne de contact de la DG V qui fournit
informations et conseils;
Développement d'un processus d'information et de consultation des ONG
et des organisations bénévoles, basé sur le Social Policy Forum, et la
création d'un 'forum permanent. Ceci sera d'une importance particulière
pendant la période 1996/1997 étant donné les discussions de la CIG, et le
besoin de maintenir l'élan créé par le Forum de mars 1996;
Cette responsabilité générale requerra une connaissance approfondie des
activités de la DG V en général et exigera de suivre de près les
développements politiques. Une responsabilité additionnelle, en matière
d'information interne (bulletin d'information), pourrait compléter utilement
cet ensemble de responsabilités.»)
- 19.
- Dans sa note, le directeur général demandait à la requérante de lui indiquer
immédiatement si elle refusait d'exercer cette fonction. Étant donné la nécessité
urgente d'adopter des mesures donnant suite au Social Policy Forum, il la priait de
répondre au plus tard la semaine suivante.
- 20.
- Par une note datée du 28 mai 1996, la requérante, soulignant que c'était la
première fois qu'elle recevait une description des tâches du poste de conseiller à
la direction V.E depuis la décision attaquée de son directeur général la destituant
de ses fonctions de chef d'unité, a répondu qu'elle serait prête à assumer ses
nouvelles fonctions aussitôt qu'elle serait de retour d'un séminaire de formation en
Allemagne, le 17 juin 1996.
- 21.
- Après un échange de lettres avec l'Union syndicale, le directeur général de la
DG V a eu, le 11 juin 1996, un entretien avec des représentants du personnel et
des représentants de la DG V, au cours duquel ont notamment été discutés les
motifs du transfert de l'unité «égalité des chances entre les femmes et les hommes»
et du transfert d'un chef d'unité vers une fonction de conseiller.
- 22.
- Le 13 juin 1996, a été publié l'avis de vacance du poste COM/065/96 de chef de
l'unité 5 «égalité des chances entre les femmes et les hommes» de la direction D
de la DG V (ci-après «unité V.D.5»), de grade A 5, échelon 4.
- 23.
- Le 27 juin 1996, la requérante a introduit une réclamation au titre de l'article 90,
paragraphe 2, du statut, visant l'annulation de la décision attaquée et de la décision
du notateur d'appel du 25 avril 1996, confirmant son rapport de notation
1993/1995, ainsi que l'octroi de dommages et intérêts pour préjudice matériel et
moral.
- 24.
- Le 4 juillet 1996, le conseiller principal de la cellule de prospective de la
Commission a adressé au directeur général de la DG V une demande de mise à
disposition de la requérante. Le directeur général a marqué son accord par une
note datée du 15 juillet 1996, dans laquelle il proposait que la mise à disposition
prenne effet le 1er août 1996.
- 25.
- Par décision du 6 novembre 1996, reçue le 11 novembre par la requérante, la
Commission a rejeté la partie de sa réclamation relative à la décision attaquée.
Quant à la partie portant sur le rapport de notation, la Commission a constaté que,
dès lors que le comité paritaire des notations n'avait pas encore rendu son avis, la
réclamation devait être considérée comme prématurée et qu'elle n'était donc pas
en mesure de fournir une réponse à la requérante.
- 26.
- Le 5 décembre 1996, le directeur général de la DG V a adressé au président du
comité paritaire des notations, en réponse à une demande de ce dernier du 8 juillet
1996, une note dans laquelle il indiquait les motifs essentiels des modifications
apportées à la notation de la requérante (ci-après «note du 5 décembre 1996»).
- 27.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 février 1997, la requérante a
introduit le présent recours.
- 28.
- Le 24 février 1997, le comité paritaire des notations a arrêté son avis final sur le
rapport de notation 1993/1995 de la requérante.
- 29.
- Par note du 15 avril 1997, le directeur général de la DG V a informé la requérante
qu'il considérait sa notation pour la période 1993/1995 comme définitive.
- 30.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 juillet 1997, la requérante a
introduit un second recours en annulation, inscrit sous le numéro T-212/97, à
l'encontre de la décision du 15 avril 1997 de son directeur général agissant en tant
que notateur.
Conclusions des parties
- 31.
- Mme Hubert, partie requérante, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
annuler la décision de l'AIPN de la muter ou de modifier son affectation,
de l'emploi ou des fonctions de chef de l'unité V.A.3 à un emploi ou à des
fonctions de conseiller auprès de la direction V.E ainsi que toute décision
connexe;
lui allouer un franc symbolique de dommages-intérêts à titre provisionnel
pour le préjudice matériel, sous réserve de majoration par la suite en
fonction de l'évolution de ce préjudice, et 300 000 BFR pour le préjudice
moral;
condamner la Commission aux dépens.
- 32.
- Dans sa réplique, la requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal, avant dire
droit ordonner à la défenderesse la production des documents préparatoires de la
décision attaquée, prévus par la décision du 21 septembre 1994.
- 33.
- La Commission, partie défenderesse, conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
rejeter le recours comme non fondé;
rejeter la demande de dommages-intérêts, tant au titre d'un préjudice
matériel qu'au titre d'un préjudice moral;
statuer comme de droit sur les dépens.
Conclusions en annulation
- 34.
- La requérante invoque trois moyens à l'appui de son recours, tirés respectivement
d'une violation des articles 4 et 29 du statut, en ce qu'un avis de vacance du poste
de conseiller à la direction V.E n'aurait pas été publié, d'une violation de l'article
25 du statut, en ce que la décision attaquée n'aurait pas été motivée, et d'une
violation de l'article 7 du statut, en ce que la réaffectation de la requérante n'aurait
pas été décidée dans l'intérêt du service. Étant donné que le deuxième moyen est
tiré d'une absence de motivation, il convient de l'examiner après le troisième.
- 35.
- En outre, dans sa réplique, la requérante soulève un moyen qu'elle qualifie elle-même de nouveau, tiré de la violation de la procédure prévue par la décision de
la Commission du 21 septembre 1994, intitulée «Coordination et management au
niveau des services de la Commission» et relative à l'extension des pouvoirs des
directeurs et des chefs de service en matière de gestion du personnel (ci-après
«décision du 21 septembre 1994»). Il y a lieu d'examiner ce moyen en premier lieu.
Sur le moyen nouveau, tiré d'une violation de la procédure prévue par la décision du
21 septembre 1994
Arguments des parties
- 36.
- La requérante affirme que ce moyen nouveau est recevable car, conformément à
l'article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, il est fondé sur
des éléments qui se sont révélés au cours de la procédure. En effet, en soutenant
dans son mémoire en défense que la note du 15 février 1996 (voir point 11 ci-dessus) est compatible avec l'hypothèse d'une réaffectation, plutôt que de soutenir
qu'elle a été purement et simplement annulée et remplacée par un autre projet de
décision, la Commission aurait amené la requérante à douter que la décision
attaquée, à supposer qu'elle soit une décision de réaffectation, ait été adoptée dans
le respect de la procédure prévue par la décision du 21 septembre 1994.
- 37.
- La Commission affirme que ce moyen nouveau est irrecevable. En effet, la
requérante aurait su, lorsqu'elle a introduit son recours, que la décision attaquée
avait été prise en vertu de ladite décision du 21 septembre 1994.
Appréciation du Tribunal
- 38.
- Il ressort des dispositions combinées des articles 44, paragraphe 1, sous c), et 48,
paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal que la requête introductive
d'instance doit contenir l'objet du litige et l'exposé sommaire des moyens invoqués
et que la production de moyens nouveaux en cours d'instance est interdite à moins
que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont
révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue une ampliation
d'un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête
introductive d'instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être
considéré comme recevable (voir, notamment, arrêts de la Cour du 19 mai 1983,
Verros/Parlement, 306/81, Rec. p. 1755, point 9, et du Tribunal du 5 février 1997,
Ibarra Gil/Commission, T-207/95, RecFP p. II-31, point 51, et du 17 décembre
1997, Passera/Commission, T-217/95, RecFP p. II-1109, point 87).
- 39.
- En l'espèce, d'une part, le moyen en question n'a été invoqué ni directement ni
implicitement dans la requête et il ne présente pas de lien étroit avec les autres
moyens. Il constitue donc un moyen nouveau, ainsi que le reconnaît la requérante
elle-même, et non l'ampliation d'un moyen énoncé antérieurement dans la requête.
D'autre part, la décision attaquée précise qu'elle a été prise «en vertu de la
décision de la Commission du 20 novembre 1985 relative à l'exercice des pouvoirs
dévolus par le statut des fonctionnaires à l'[AIPN], modifiée en dernier lieu par la
décision de la Commission du 21 septembre 1994». Il en résulte que, contrairement
à ce que soutient la requérante, le moyen nouveau n'est pas fondé sur des éléments
de droit ou de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Dès lors, la question
de savoir si la Commission, en soutenant dans son mémoire en défense que la note
du 15 février 1996, jointe à la requête et donc connue de la requérante, était
compatible avec l'hypothèse d'une réaffectation, a ou non amené la requérante à
douter que la décision attaquée soit en conformité avec la décision du 21
septembre 1994 est sans pertinence.
- 40.
- Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation de la procédure établie par la décision
du 21 septembre 1994, soulevé pour la première fois dans la réplique, doit être
rejeté comme irrecevable.
Sur le moyen tiré de la violation des articles 4 et 29 du statut
Arguments des parties
- 41.
- En premier lieu, la requérante rappelle que «le fait pour les parties de qualifier
une mesure de mutation, de réaffectation ou de transfert ne saurait lier le
Tribunal» et que le transfert d'un fonctionnaire à un emploi vacant constitue une
mutation (voir arrêts du Tribunal du 8 juin 1993, Fiorani/Parlement, T-50/92, Rec.
p. II-555, point 27, et du 16 décembre 1993, Turner/Commission, T-80/92, Rec.
p. II-1465, point 30).
- 42.
- En l'espèce, la nature de la décision attaquée serait incertaine. D'une part, les
termes mêmes de la note du 15 février 1996 établiraient que la mutation de la
requérante à un poste de conseiller vacant a été, à tout le moins, demandée à
l'AIPN, et il ressortirait de l'avis de vacance d'emploi COM/065/96, du 13 juin 1996,
qu'un poste de chef de l'unité 5 était vacant. D'autre part, dans la décision
attaquée, le directeur général de la DG V ferait état non d'une mutation mais
d'une modification de l'affectation de la requérante décidée sur la base de la
décision du 21 septembre 1994.
- 43.
- Étant donné que la Commission n'a pas établi l'affirmation avancée dans la
décision de rejet de la réclamation, selon laquelle la requérante aurait été affectée
à ses nouvelles fonctions de conseiller avec son poste, la requérante fait valoir que,
en l'absence de publication d'un avis de vacance pour le poste de conseiller à la
direction V.E, la Commission a violé les articles 4 et 29 du statut (voir arrêts
Fiorani/Parlement et Turner/Commission, précités).
- 44.
- En deuxième lieu, la requérante affirme que, à supposer même que la décision
litigieuse soit une réaffectation, il ressort de la jurisprudence que, en cas de
transfert d'un emploi d'un service à un autre, il y a création d'un nouvel emploi,
lorsque les fonctions qu'il comporte sont substantiellement modifiées, de sorte
qu'un avis de vacance doit être publié avant qu'il ne soit pourvu (voir arrêt de la
Cour du 16 juin 1971, Vistosi/Commission, 61/70, Rec. p. 535, points 8 à 11).
- 45.
- D'après la requérante, les fonctions afférentes à son emploi ont été
substantiellement modifiées, puisqu'il s'agissait, avant la décision attaquée, d'un
emploi de chef de l'unité «égalité des chances entre les femmes et les hommes»,
et après, d'un poste de conseiller aux ONG.
- 46.
- Il aurait donc été indispensable de respecter l'exigence de publication prévue aux
articles 4 et 29 du statut dans la procédure de pourvoi de ce poste.
- 47.
- La requérante fait remarquer que les arrêts de la Cour du 24 janvier 1981,
Carbognani et Coda Zabetta/Commission (161/80 et 162/80, Rec. p. 543, point 19),
et du Tribunal Fiorani/Parlement et Turner/Commission, précités, invoqués par la
Commission, concernent des hypothèses dans lesquelles les emplois en question
n'avaient pas été substantiellement modifiés à l'occasion de leur transfert.
- 48.
- La Commission relève que, en ce qui concerne la distinction entre les décisions de
mutation et celles de réaffectation, «il résulte du système du statut qu'il n'y a lieu
à mutation, au sens propre du terme, qu'en cas de transfert d'un fonctionnaire à
un emploi vacant. Il en découle que toute mutation proprement dite est soumise
aux formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut. En revanche, ces formalités
ne sont pas applicables en cas de réaffectation du fonctionnaire avec son emploi,
en raison du fait qu'un tel transfert ne donne pas lieu à vacance d'emploi» (voir
arrêts Carbognani et Coda Zabetta/Commission, précité, point 19,
Fiorani/Parlement, précité, point 27, et Turner/Commission, précité).
- 49.
- La formulation de la décision attaquée, en se référant à la modification de
l'affectation de la requérante, serait dépourvue de toute ambiguïté à cet égard.
- 50.
- Par ailleurs, il ressortirait de la jurisprudence citée au point 48 ci-dessus que la
publication d'un avis conformément au prescrit des articles 4 et 29 du statut n'est
nécessaire qu'en cas de mutation, et non dans l'hypothèse d'une réaffectation. On
ne pourrait aucunement tirer de l'arrêt Vistosi/Commission, précité, une règle selon
laquelle une réaffectation s'accompagnant d'une modification substantielle des
fonctions du fonctionnaire réaffecté avec son emploi devrait faire l'objet de la
publication d'un avis de vacance. Une telle interprétation, a contrario, serait
incompatible avec la formulation même de l'article 4 du statut, car on ne pourrait
pas imaginer la publication d'un avis de vacance d'emploi lorsqu'il n'y a pas de
vacance d'emploi.
Appréciation du Tribunal
- 51.
- Selon l'article 4 du statut, une nomination ou une promotion ne peut avoir pour
objet que de pourvoir à une «vacance d'emploi», laquelle doit être portée à la
connaissance du personnel. Dans le cas d'une telle «vacance d'emploi», l'article 29
du statut prévoit que l'AIPN examine les possibilités, d'abord, de promotion ou de
mutation au sein de l'institution, ensuite, d'organisation de concours internes et,
enfin, de transfert de fonctionnaires d'autres institutions, avant d'ouvrir la
procédure de concours.
- 52.
- Il ressort de la jurisprudence que les dispositions des articles 4 et 29 du statut ne
s'appliquent que dans le cas d'une «vacance d'emploi» au sens de ces articles. Par
conséquent, la réaffectation d'un fonctionnaire en l'absence d'une telle «vacance
d'emploi» ne constitue pas une mutation au sens desdits articles 4 et 29 (voir arrêt
du Tribunal du 6 juillet 1993, Rasmussen/Commission, T-32/92, Rec. p. II-765, point
33).
- 53.
- L'existence d'une vacance d'emploi, au sens des articles 4 et 29 du statut,
présuppose qu'un emploi n'est pas pourvu parmi le nombre total d'emplois
permanents compris dans le tableau des effectifs annexé, conformément à l'article
6 du statut, à la section du budget afférente à l'institution en cause et fixant, pour
chacune des catégories et chacun des cadres, le nombre des emplois par grade dans
chaque carrière (voir arrêt Rasmussen/Commission, précité, point 34).
- 54.
- En l'espèce, il ressort du dossier, d'une part, que le numéro d'emploi de la
requérante est demeuré inchangé après son transfert au poste de conseiller à la
direction V.E (extrait de l'historique de la carrière de la requérante) et, d'autre
part, que l'emploi du poste de conseiller à la direction V.D («ex-Wallyn») a été
utilisé comme support budgétaire du poste du successeur de la requérante comme
chef de l'unité «égalité des chances entre les femmes et les hommes» (fiche interne
de publication de l'avis de vacance du poste COM/065/96). Il s'ensuit que la
requérante a été transférée avec son emploi et non à un emploi vacant et que, dès
lors, elle a fait l'objet d'une réaffectation et non d'une mutation.
- 55.
- A cet égard, il y a lieu de relever que, même si la terminologie employée par le
directeur général de la DG V dans la note du 15 février 1996, qui, d'ailleurs, n'était
pas adressée à la requérante, a pu prêter à confusion, l'utilisation d'une
terminologie inappropriée aux circonstances n'est pas de nature à affecter l'analyse
juridique du Tribunal (voir arrêt Rasmussen/Commission, précité, point 41).
- 56.
- Dès lors, l'argument de la requérante selon lequel son transfert au poste de
conseiller à la direction V.E était en fait une mutation doit être rejeté.
- 57.
- Il y a également lieu de rejeter l'argument de la requérante selon lequel, en cas de
transfert d'un emploi d'un service à un autre, il y a création d'un nouvel emploi,
lorsque les fonctions qu'il comporte sont substantiellement modifiées, de sorte
qu'un avis de vacance doit être publié avant que le poste ne soit pourvu.
- 58.
- En effet, selon une jurisprudence constante, il n'y a lieu à mutation, et donc àl'application des formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut, qu'en cas de
transfert d'un fonctionnaire à un emploi vacant. En revanche, ces formalités ne sont
pas applicables en cas de réaffectation du fonctionnaire avec son emploi, en raison
du fait qu'un tel transfert ne donne pas lieu à vacance d'emploi (voir arrêts
Carbognani et Coda Zabetta/Commission, précité, point 19, Fiorani/Parlement,
précité, point 27, et Turner/Commission, précité, point 30).
- 59.
- Or, ainsi qu'il résulte du point 54, ci-dessus, en l'espèce, la requérante a été
affectée avec son emploi et non pas à un emploi vacant.
- 60.
- Dès lors qu'il s'agit d'une réaffectation avec l'emploi, il ressort de la jurisprudence
citée au point 58 ci-dessus, contrairement à ce que prétend la requérante, que les
formalités prévues par les articles 4 et 29 du statut ne sont pas applicables.
- 61.
- Cette conclusion n'est pas infirmée par l'arrêt Vistosi/Commission, précité. En effet,
si la Cour a constaté, au point 6 de cet arrêt, que, lorsqu'un emploi est transféré
sans modification substantielle des fonctions qu'il comporte, il n'y a pas création
d'un nouvel emploi, il n'en demeure pas moins vrai que, au point suivant, elle a
sans ambiguïté dit pour droit que, lorsque le fonctionnaire est transféré avec son
emploi, «il n'y a pas de vacance ni, par conséquent, d'obligation de mettre en
oeuvre la procédure prévue en ce cas».
- 62.
- Il découle de ce qui précède que le présent moyen doit être rejeté.
Sur le moyen tiré d'une violation de l'article 7, paragraphe 1, du statut
Arguments des parties
- 63.
- La requérante rappelle qu'une décision de mutation ou de réaffectation d'un
fonctionnaire à l'encontre de sa volonté n'est admissible que si elle se fonde sur
l'intérêt du service (voir arrêt de la Cour du 21 mai 1981, Kindermann/Commission,
60/80, Rec. p. 1329, point 14, et arrêts du Tribunal du 10 juillet 1992,
Eppe/Commission, T-59/91 et T-79/91, Rec. p. II-2061, point 48, et
Turner/Commission, précité, point 53).
- 64.
- Tel ne serait pas le cas en l'espèce. En effet, le transfert de l'unité «égalité des
chances entre les femmes et les hommes» de la direction V.A à la direction V.D
ne justifierait pas que la requérante soit démise de ses fonctions de chef d'unité,
ce qui, selon elle, aurait également été confirmé par le directeur général de la
DG V dans sa réponse à une question qu'elle lui avait posée lors de l'un de leurs
entretiens des mois de janvier et de février 1996. En outre, l'échange de
correspondance entre l'Union syndicale et le directeur général de la DG V à
propos de la réorganisation des services de la DG V démontrerait que ce dernier
avait perdu de vue l'existence même de cette «réorganisation». De manière plus
fondamentale, le transfert de l'unité «égalité des chances entre les femmes et les
hommes» de la direction V.A à la direction V.D ne serait pas incompatible avec
le maintien de la requérante dans ses fonctions.
- 65.
- Le transfert de la requérante ne serait pas non plus justifié par le fait qu'elle aurait
pu démériter en tant que chef d'unité.
- 66.
- A cet égard, d'une part, la requérante affirme qu'une telle opinion serait en
contradiction avec sa promotion au grade A 4 le 1er décembre 1995 et ne serait pas
non plus l'opinion personnelle du directeur général de la DG V, qui aurait indiqué
implicitement que c'était seulement celle du directeur de la direction V.A.
- 67.
- D'autre part, le rapport de notation 1993/1995, même s'il était justifié, ne serait pas
de nature à justifier un retrait des fonctions. Comme cela aurait été souligné par
le directeur de la direction V.A dans une note du 26 avril 1996, adressée au
directeur général de la DG V, ainsi que par ce dernier dans sa note du 5 décembre
1996, ce rapport ne serait pas mauvais, la note la plus basse, à savoir la mention
«bon», correspondant «au niveau élevé que la Commission est en droit d'attendre
d'un fonctionnaire des Communautés».
- 68.
- La requérante expose en outre que les griefs contenus dans ledit rapport de
notation et invoqués au cours de la procédure qui lui a fait suite n'étaient pas
justifiés.
- 69.
- En ce qui concerne l'affirmation de la Commission selon laquelle les fonctions de
conseiller aux ONG auxquelles la requérante a été réaffectée correspondaient
parfaitement à son profil et comportaient des responsabilités importantes, la
requérante fait remarquer que la description des fonctions de conseiller aux ONG,
lesquelles n'ont été définies de manière précise que par la note du 24 mai 1996, fait
apparaître que ce poste ne requiert des compétences en matière d'information que
d'une manière très accessoire. De plus, le poste de conseiller auquel elle devait être
initialement réaffectée ne serait pas celui-là mais un poste de conseiller chargé de
l'information à la DG V. La dernière mention de la note du 24 mai 1996, qui
précise qu'une connaissance en matière d'information interne constituerait un
avantage supplémentaire pour ce poste, ne paraît donc y figurer que pour les
besoins de la cause.
- 70.
- La requérante fait observer que, lors de leurs entretiens aux mois de janvier et de
février 1996, le directeur général de la DG V n'a pas contesté que le poste de
conseiller aux ONG était, en réalité, dénué de substance, étant donné le travail
qu'accomplissait déjà la DG V en relation avec le forum social et la plate-forme
des ONG. En outre, son détachement auprès de la cellule de prospective aurait été
accordé par la note du 15 juillet 1996 du directeur général, ce qui contredirait ses
affirmations sur l'importance des tâches afférentes au poste et sur l'urgence
d'assurer le suivi du Social Policy Forum. Par ailleurs, les fonctions de conseiller
aux ONG seraient toujours vacantes à l'heure actuelle.
- 71.
- La Commission fait observer que, selon la jurisprudence, il est reconnu aux
institutions «un large pouvoir d'appréciation dans l'organisation de leurs services
en fonction des missions qui leur sont confiées et dans l'affectation en vue de
celles-ci du personnel qui se trouve à leur disposition, à la condition cependant que
cette affectation se fasse dans l'intérêt du service et dans le respect de l'équivalence
des emplois» (voir arrêts de la Cour du 14 juillet 1983, Nebe/Commission, 176/82,
Rec. p. 2475, point 17, du 21 juin 1984, Lux/Cour des comptes, 69/83, Rec. p. 2447,
point 17, et du 23 mars 1988, Hecq/Commission, 19/87, Rec. p. 1681, point 6).
- 72.
- Le poste de conseiller auprès du directeur de la direction V.E comporterait des
responsabilités importantes, particulièrement en matière de relation avec les ONG,
comme en témoignerait, par exemple, la description des tâches jointe à la note du
24 mai 1996. La Commission aurait considéré que la requérante, dont les
compétences générales n'étaient absolument pas remises en cause, était plus utile
dans les fonctions de conseiller à la direction V.E que dans celles de chef de l'unité
V.A.3. Elle n'aurait donc pas outrepassé le pouvoir d'appréciation dont disposent
les institutions dans l'organisation de leurs services, indispensable en vue d'arriver
à une organisation efficace des travaux (voir arrêt du Tribunal du 12 juillet 1990,
Scheuer/Commission, T-108/89, Rec. p. II-411, point 37), en prenant à l'égard de
la requérante une décision de réaffectation dans le cadre d'une restructuration des
services au sein de la DG V et dans la mesure où il apparaissait clairement que les
compétences indéniables de la requérante seraient mieux utilisées dans ces
fonctions de conseiller à la direction V.E.
- 73.
- La Commission fait observer que, les compétences en matière d'information de la
requérante n'ayant pas été les seules à avoir été prises en compte, le fait que le
poste ne requiert que de façon accessoire ces compétences n'établit en rien
l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation de sa part. De plus, lesdites
compétences ne seraient pas aussi accessoires que le prétend la requérante. En
effet, la note du 24 mai 1996 ferait amplement référence à des activités
d'information dans la description des fonctions.
- 74.
- Le poste de conseiller à la direction V.E ne serait donc pas dénué de substance.
Le fait que la requérante ait été ensuite mise à la disposition du conseiller principal
à la cellule de prospective de la Commission ne permettrait pas d'en tirer la
conclusion selon laquelle la réaffectation précédente aux fonctions de conseiller à
la direction V.E n'aurait pas été opérée dans l'intérêt du service. Ce détachement
serait temporaire et la requérante serait donc appelée à réintégrer ses fonctions de
conseiller à la direction V.E.
- 75.
- Quant au rapport de notation 1993/1995, la Commission estime qu'il n'y a pas lieu
de répondre point par point aux contestations de la requérante. En effet, ledit
rapport concernerait l'exercice des fonctions de chef de l'unité V.A.3, et, à ce titre,
ne serait pas pertinent quant à la question de savoir si la réaffectation de la
requérante correspondait bien à l'intérêt du service, qui aurait été de s'assurer les
services d'un fonctionnaire compétent pour l'exercice des responsabilités
qu'entraîne l'occupation des fonctions de conseiller à la direction V.E. Le rapport
ne serait qu'un élément laissant transparaître le fait que la requérante n'avait pas
été affectée à des fonctions où ses compétences étaient utilisées de manière
optimale. De plus, la contestation du rapport de notation 1993/1995 ferait l'objet
de l'affaire T-212/97, actuellement pendante devant le Tribunal.
Appréciation du Tribunal
- 76.
- Il est de jurisprudence constante que les institutions disposent d'un large pouvoir
d'appréciation dans l'organisation de leurs services en fonction des missions qui leur
sont confiées et dans l'affectation, en vue de celles-ci, du personnel qui se trouve
à leur disposition, à la condition, cependant, que cette affectation se fasse dans
l'intérêt du service et dans le respect de l'équivalence des emplois. Un tel pouvoir
d'appréciation est indispensable en vue d'arriver à une organisation efficace du
travail et afin de pouvoir adapter cette organisation à des besoins variables. La
Cour a même spécifiquement rejeté l'argument selon lequel une réaffectation ne
devrait normalement pas avoir lieu sans le consentement de l'intéressé, au motif
qu'une telle approche aurait pour effet de limiter d'une manière intolérable la
liberté de disposition des institutions dans l'organisation de leurs services et dans
leur adaptation à l'évolution des besoins. Les problèmes éventuels que le départ
d'un fonctionnaire peut causer à son service antérieur et le profit que son nouveau
service peut tirer de la réaffectation sont, eux aussi, des considérations qui relèvent
du même pouvoir d'appréciation. Compte tenu de l'étendue du pouvoir
d'appréciation des institutions dans l'évaluation de l'intérêt du service, le contrôle
du Tribunal doit donc se limiter à la question de savoir si l'AIPN s'est tenue dans
des limites non critiquables et n'a pas usé de son pouvoir d'appréciation de
manière manifestement erronée (voir arrêts Carbognani et Coda
Zabetta/Commission, précité, point 28, Scheuer/Commission, précité, point 37, et
Turner/Commission, précité, point 53).
- 77.
- En outre, c'est au fonctionnaire qu'il incombe de rapporter la preuve que la
décision prise à son égard est contraire à l'intérêt du service (voir arrêts
Kindermann/Commission, précité, point 17, et Scheuer/Commission, précité, point
48).
- 78.
- En l'espèce, il est constant que la requérante a gardé le même grade après son
transfert. Dans la mesure où elle a été transférée avec son emploi (voir point 54
ci-dessus), l'équivalence des emplois a, par hypothèse, été respectée (voir arrêt du
Tribunal du 22 janvier 1998, Costacurta/Commission, T-98/96, non encore publié
au Recueil, point 37).
- 79.
- Il n'est pas contesté que plusieurs modifications ont été apportées àl'organigramme de la DG V à l'époque où est intervenue la réaffectation de la
requérante. En effet, il ressort des notes du 14 février 1996 (voir points 9 et 10 ci-dessus) et de celle du 15 février 1996 (voir point 11 ci-dessus) qu'elle a été
réaffectée dans le cadre d'une réorganisation des services de la DG V. Cette
conclusion n'est pas infirmée par le fait que le directeur général de la DG V, dans
le courrier échangé avec l'Union syndicale, a indiqué qu'il n'y avait pas de
«réorganisation de la DG V» en cours. Cette indication démontre tout au plus que
la réorganisation ne concernait pas toute la DG.
- 80.
- Il convient de rejeter les arguments avancés par la requérante dans le but de
démontrer que le poste de conseiller à la direction V.E était dénué de substance.
A ce propos, contrairement à ce que prétend la requérante, il ressort clairement
de la description des tâches du poste en question, jointe à la note du 24 mai 1996
(voir point 18 ci-dessus), que le poste exigeait d'importantes compétences en
matière d'information. Si, dans le cadre des discussions avec la requérante, il était
initialement question d'un conseiller chargé de l'information, ce qui n'a pas été
établi, cela ne saurait étonner car une partie substantielle desdites tâches exige
précisément des compétences en cette matière. Au demeurant, les trois mentions
comprises dans la description font référence à différents aspects de la diffusion de
l'information.
- 81.
- Pour ce qui est des arguments tirés du fait que le détachement de la requérante
auprès de la cellule de prospective a été accordé et du fait que le poste de
conseiller aux ONG est toujours vacant, il suffit de constater qu'ils ne démontrent
pas que ledit poste est dénué de substance. A la limite, ils démontreraient que le
directeur général de la DG V a considéré comme encore plus importantes les
bonnes relations avec les autres services de la Commission et qu'il n'a pas réussi
à trouver une autre personne possédant les compétences et l'expérience requises.
- 82.
- Enfin, force est de constater que les arguments de la requérante tendant à faire
valoir, respectivement, que le transfert de l'unité «égalité des chances entre les
femmes et les hommes» de la direction V.A à la direction V.D ne justifiait pas
qu'elle soit démise de ses fonctions de chef d'unité, que sa réaffectation n'était pas
justifiée par le fait qu'elle aurait pu démériter en tant que chef d'unité et que le
rapport de notation 1993/1995 n'était pas de nature à justifier un retrait de ses
fonctions de chef d'unité sont inopérants. En effet, ils ont tous pour objet, en fait,
de démontrer que le retrait de ses fonctions de chef d'unité n'était ni nécessaire ni
justifié. Ils ne démontrent pas que la décision de réaffecter la requérante au poste
de conseiller aux ONG à la direction V.E n'a pas été adoptée dans l'intérêt du
service.
- 83.
- En tout état de cause, il n'est pas contesté entre les parties que la requérante et
son supérieur hiérarchique, le directeur de la direction V.A, n'étaient pas d'accord,
notamment, sur la façon dont il fallait organiser l'unité V.A.3. Ce fait, en
combinaison avec le besoin de trouver quelqu'un pour s'occuper des relations avec
les ONG et les qualités de la requérante pour exercer ces responsabilités, a pu
amener la Commission à estimer qu'il était dans l'intérêt du service de la réaffecter
au poste de conseiller aux ONG, afin de mieux utiliser ses compétences.
- 84.
- La requérante n'ayant pas avancé d'éléments susceptibles de démontrer que la
décision attaquée a été prise pour des raisons étrangères à l'intérêt du service et
que l'AIPN ne s'est pas tenue dans des limites non critiquables et a usé de son
pouvoir d'appréciation de manière manifestement erronée, le présent moyen doit
être rejeté.
Sur le moyen tiré d'une absence de motivation
Arguments des parties
- 85.
- La requérante fait valoir que, en l'espèce, ni la décision attaquée portant à la
connaissance de la requérante son transfert, ni les entretiens avec, respectivement,
son directeur et son directeur général, ni le rejet de sa réclamation n'ont été
motivés. De plus, les demandes de motivation qu'elle aurait adressées à son
directeur, dans sa note du 14 février 1996, et au directeur général, dans sa note du
19 février 1996, seraient toutes deux restées sans réponse.
- 86.
- Elle précise que, lors de ses entretiens avec le directeur général, ce dernier s'est
contenté de l'informer qu'il n'avait personnellement rien à reprocher ni à elle-même ni à l'ensemble de l'unité mais qu'il faisait confiance à ses directeurs dans
le choix de leurs collaborateurs. Il renverrait donc la responsabilité de la décision
au directeur de la requérante.
- 87.
- Au cas où la motivation de la décision attaquée serait censée se trouver dans le
rapport de notation, la requérante soutient que cette motivation était imprécise et
ambiguë, voire contradictoire.
- 88.
- En effet, d'abord, la procédure de notation constituerait un contexte procédural
distinct de celui de la décision de mutation ou de réaffectation. De plus,
l'administration n'aurait nullement établi de rapport entre la notation dont la
requérante a fait l'objet et le retrait de ses fonctions de chef d'unité. Son directeur
lui aurait même affirmé, lors de leur entretien du 25 janvier 1996, que le
changement de chef d'unité était normal après quelques années de fonction et dans
la perspective d'un nouveau programme, et le directeur général de la DG V lui
aurait également affirmé, lors de leurs entretiens des mois de janvier et de février
1996, qu'il n'avait personnellement rien à lui reprocher. En outre, même si ses
notes avaient baissé, celles-ci seraient demeurées néanmoins, selon le rapport,
«bonnes», «très bonnes» ou «excellentes». Enfin, le directeur et le directeur
général auraient, eux-mêmes, souligné qu'il s'agissait, somme toute, d'un «bon
rapport», même si les appréciations analytiques avaient baissé et s'il contenait
certaines critiques à l'égard de la requérante.
- 89.
- La requérante fait observer que, tout en excluant la procédure de notation du
contexte de la motivation, la Commission reconnaît que cette procédure révélait
que les compétences de la requérante seraient mieux utilisées dans des fonctions
de conseiller que dans des fonctions de chef d'unité et que tel était un des motifs
de sa décision de la réaffecter à des fonctions de conseiller.
- 90.
- La Commission soutient que l'étendue de l'obligation de motiver doit, dans chaque
cas, être appréciée en fonction des circonstances concrètes. En particulier, une
décision est suffisamment motivée dès lors que l'acte qui fait l'objet du recours est
intervenu dans un contexte connu du fonctionnaire concerné, qui permet de
comprendre la portée de la mesure prise à l'égard de ce même fonctionnaire (voir
arrêts de la Cour du 29 octobre 1981, Arning/Commission, 125/80, Rec. p. 2539, et
du 7 mars 1990, Hecq/Commission, C-116/88 et C-149/88, Rec. p. I-599, et du
Tribunal du 6 juillet 1995, Ojha/Commission, T-36/93, RecFP p. II-497, point 60).
- 91.
- En l'espèce, la requérante aurait été informée de la perspective et des raisons de
sa réaffectation au cours d'un entretien avec son directeur ainsi qu'au cours des
cinq entretiens avec le directeur général de la DG V au cours des mois de janvier
et de février 1996. La requérante admettrait dans sa requête que les cinq entretiens
avec le directeur général ont eu pour objet la motivation de sa réaffectation et le
contenu du poste de conseiller à la direction V.E. La Commission estime donc que
les circonstances dans lesquelles la réaffectation est intervenue, et notamment les
mesures de réorganisation au sein des directions V.A et V.D, étaient connues de
la requérante et qu'elle s'est vu préciser le contexte de sa réaffectation, à savoir
une utilisation optimale de ses compétences par l'exercice des fonctions de
conseiller à la direction V.E. Partant, la motivation de la réaffectation de la
requérante serait suffisante.
- 92.
- Par ailleurs, le rapport de notation 1993/1995 ne serait qu'un élément laissant
transparaître le fait que la requérante n'était pas affectée à des fonctions où ses
compétences étaient utilisées de manière optimale. La réaffectation de la
requérante ne serait pas motivée par ce rapport de notation en tant que tel, mais
par le fait que l'AIPN considérait que ses compétences indéniables pouvaient être
mieux utilisées dans ses nouvelles fonctions que dans celles de chef de l'unité
V.A.3.
Appréciation du Tribunal
- 93.
- L'obligation de motiver une décision faisant grief, prévue à l'article 25 du statut, a
pour but de permettre au juge communautaire d'exercer son contrôle sur la légalité
de la décision attaquée et de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour
savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d'un vice permettant
d'en contester la légalité. Il est satisfait à cette exigence lorsque l'acte qui fait
l'objet du recours est intervenu dans un contexte connu du fonctionnaire concerné
et qui lui permet de comprendre la portée d'une mesure qui le concerne
personnellement (voir arrêts Turner/Commission, précité, point 62, et
Ojha/Commission, précité, points 59 et 60).
- 94.
- A cet égard, il ressort de la note du 14 février 1996 rédigée par la requérante
qu'elle a été informée, lors d'une entrevue le 25 janvier 1996 avec son directeur,
de son futur transfert du poste de chef de l'unité V.A.3 au poste de conseiller
chargé de l'information à la DG V et que, par la note du 14 février 1996 rédigée
par le directeur de la direction V.A, la requérante a été informée que ce transfert
avait été décidé dans l'intérêt du service. De plus, dans sa requête, la requérante
expose elle-même que, lors des trois premiers des cinq entretiens qu'elle a eus avec
le directeur général de la DG V aux mois de janvier et février 1996, furent discutés
la motivation de la décision de la transférer ainsi que le contenu du poste de
conseiller proposé. Étant donné, en particulier, que la procédure de notation se
déroulait en parallèle, il n'a pas non plus pu échapper à la requérante que son
supérieur hiérarchique n'était pas d'accord, notamment, avec sa façon d'organiser
l'unité V.A.3.
- 95.
- En outre, il ressort de la note du 29 avril 1996, relative à la réunion du 18 avril
1996 entre la requérante et le directeur de la direction V.E, jointe à la note du 24
mai 1996, que ce dernier a informé la requérante que, après le Social Policy
Forum, la DG V avait besoin d'une personne qui pouvait coordonner et développer
les contacts avec les ONG actives dans des domaines qui tombaient sous la
compétence de la DG V, à savoir les domaines relatifs aux femmes, aux personnes
âgées, à l'exclusion sociale, etc. et que, d'après lui, étant donné l'expérience de la
requérante, elle était la personne idéale pour s'occuper desdites tâches. Enfin, dans
la note du 24 mai 1996, le directeur général de la DG V a souligné le besoin urgent
d'adopter des mesures afin de donner suite au Social Policy Forum.
- 96.
- Compte tenu de l'étendue du pouvoir d'appréciation dont dispose l'AIPN en
matière d'organisation des services et du contexte dans lequel a été adoptée la
décision attaquée, les explications données lors des entretiens et dans les notes
mentionnés aux points précédents satisfaisaient à l'obligation de motivation prévue
à l'article 25 du statut. Ces explications auraient dû permettre à la requérante de
comprendre que la décision attaquée a été prise afin de mieux utiliser ses
compétences.
- 97.
- Dans ce contexte, il convient de souligner que la motivation de la décision attaquée
ne se trouvait pas dans le rapport de notation 1993/1995 mais que la procédure de
notation y relative faisait indéniablement partie du contexte dans lequel la décision
a été prise.
- 98.
- En conséquence, ce moyen est également non fondé. Il s'ensuit que les conclusions
en annulation doivent être rejetées dans leur ensemble.
Conclusions en indemnité
Arguments des parties
- 99.
- La requérante soutient que les illégalités dénoncées dans le cadre des conclusions
en annulation constituent des fautes de service qui engagent la responsabilité de
la Communauté. Même si le présent recours aboutissait à l'annulation de la
décision attaquée, il subsisterait néanmoins pour la requérante un préjudice
matériel ainsi qu'un préjudice moral.
- 100.
- La Commission affirme que, étant donné que la requérante n'a pas démontré que
la décision de la réaffecter au poste de conseiller à la direction V.E était illégale,
il n'y a, a fortiori, pas lieu de lui accorder des dommages et intérêts.
Appréciation du Tribunal
- 101.
- L'engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté suppose
la réunion d'un ensemble de conditions tenant à l'illégalité du comportement
reproché à l'organe communautaire, à la réalité du dommage et à l'existence d'un
lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (voir,
notamment, arrêt du Tribunal du 15 février 1996, Ryan-Sheridan/FEACVT,
T-589/93, RecFP p. II-77, point 141).
- 102.
- Or, ainsi qu'il résulte de l'examen des moyens d'annulation, la requérante n'a fourni
aucune preuve d'illégalités commises par la Commission lors de l'adoption de la
décision attaquée. Étant donné que l'illégalité du comportement reproché à la
Commission n'est pas établie, la demande en réparation des préjudices matériel et
moral prétendument subis par la requérante en raison de la décision du 27 mars
1996, modifiant son affectation en tant que chef de l'unité V.A.3 et l'affectant en
tant que conseiller à la direction V.E, doit être rejetée (voir arrêt Ryan-Sheridan/FEACVT, précité, point 142).
- 103.
- Il résulte de tous les développements précédents que le recours doit être rejeté
dans son intégralité.
- 104.
- Par ailleurs, la demande formulée par la requérante au stade de la réplique et
visant à ce que le Tribunal prenne des mesures d'instructions, ayant pour objet
d'ordonner la production par la Commission des documents préparatoires de la
décision litigieuse prévus par la décision du 21 septembre 1994, ne peut être
accueillie. Il appartient, en effet, au Tribunal d'apprécier l'utilité de telles mesures
(voir, notamment, arrêt du Tribunal du 29 janvier 1998, Affatato/Commission,
T-157/96, non encore publié au Recueil, point 57). Or, en l'espèce, les mesures
demandées ne présentent aucun intérêt pour la solution du litige. En outre, les
documents sollicités l'ont été dans le cadre du moyen nouveau qui a été rejeté
comme irrecevable.
Sur les dépens
- 105.
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie
qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Toutefois, selon
l'article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs
agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. La
requérante ayant succombé en ses moyens, chaque partie supportera ses propres
dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) Chacune des parties supportera ses propres dépens.
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 juillet 1998.
Le greffier
Le président
H. Jung
P. Lindh