Language of document : ECLI:EU:T:2021:339

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

9 juin 2021 (*)

« Fonction publique – Fonctionnaires – Exercice de promotion 2019 – Décision de non-promotion – Dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut – Exception d’illégalité – Congé de convenance personnelle – Inéligibilité à la promotion »

Dans l’affaire T‑453/20,

KZ, représenté par Me N. de Montigny, avocate,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes M. Brauhoff et L. Radu Bouyon, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision de la Commission, publiée aux Informations administratives no 32-2019 du 14 novembre 2019, de ne pas inscrire le nom du requérant sur la liste des fonctionnaires promus au titre de l’exercice de promotion 2019,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. J. Svenningsen, président, R. Barents et Mme T. Pynnä (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, KZ, est un fonctionnaire de la Commission européenne classé au grade AD 8 depuis le 1er janvier 2016.

2        Le 2 avril 2019, la Commission a lancé l’exercice de promotion 2019 par publication aux Informations administratives no 14-2019. Après l’examen et la comparaison des mérites des fonctionnaires promouvables classés au grade AD 8, le requérant a été proposé à la promotion par sa direction générale dans le cadre de cet exercice.

3        Le 21 août 2019, la mère du requérant est décédée.

4        Le 2 septembre 2019, le requérant a sollicité un congé de convenance personnelle d’un mois, du 1er au 30 novembre 2019, pour s’occuper de son père. Cette demande a été acceptée.

5        Le 14 novembre 2019, la Commission a clos l’exercice de promotion 2019 et a publié aux Informations administratives no 32-2019 du 14 novembre 2019 la liste des fonctionnaires promus au titre de cet exercice, sur laquelle le nom du requérant ne figurait pas (ci-après la « décision attaquée »).

6        Le 16 décembre 2019, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») contre la décision attaquée.

7        Le 7 avril 2020, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») de la Commission a rejeté la réclamation du requérant.

8        Le 18 juin 2020, la liste des fonctionnaires proposés à la promotion pour l’exercice de promotion 2020 de la Commission a été publiée. Le nom du requérant figurait sur cette liste. À la fin de l’exercice de promotion 2020, le requérant a été promu.

 Procédure et conclusions des parties

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 juillet 2020, le requérant a introduit le présent recours.

10      Par acte séparé déposé le même jour, le requérant a demandé l’omission envers le public de certaines données relatives à sa vie privée, conformément à l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal.

11      Par lettre du 23 juillet 2020, le requérant a demandé le bénéfice de l’anonymat conformément à l’article 66 du règlement de procédure. Par décision du 14 septembre 2020, le Tribunal a fait droit à cette demande.

12      Le 30 septembre 2020, la Commission a introduit le mémoire en défense.

13      Le 27 novembre 2020, le requérant a déposé la réplique.

14      Le 8 février 2021, la Commission a déposé la duplique.

15      Par décision du 18 mars 2021, le Tribunal a rejeté la demande d’omission envers le public de certaines données relatives à sa vie privée, en considérant que l’anonymat accordé en l’espèce était une protection suffisante de l’identité et de la vie privée du requérant.

16      Aucune partie n’ayant demandé la tenue d’une audience de plaidoiries, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

17      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

18      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

19      Le requérant présente un moyen unique, consistant en une exception d’illégalité dirigée contre la décision C(2013) 8968 final de la Commission, du 16 décembre 2013, portant dispositions générales d’exécution de l’article 45 du statut (ci-après les « DGE de l’article 45 »).

20      Premièrement, le requérant considère les DGE de l’article 45 comme étant illégales en ce que la Commission y interprète l’article 40, paragraphe 3, du statut comme signifiant que le fonctionnaire en congé de convenance personnelle (ci-après le « CCP ») à la date de l’adoption de la décision de promotion est inéligible à l’exercice de promotion clos.

21      Le requérant admet que le législateur a expressément considéré à l’article 40, paragraphe 3, du statut que, pendant la durée de son CCP, le fonctionnaire cessait de participer à l’avancement d’échelon et à la promotion de grade. Cependant, il fait valoir que le libellé de cette disposition ne préciserait pas le moment auquel cette cessation devrait être appréciée. Ainsi, l’interprétation de la Commission, selon laquelle un fonctionnaire en CCP à la date de l’adoption de la décision de promotion est inéligible à la promotion, ne découlerait pas d’une interprétation littérale de l’article 40, paragraphe 3, du statut.

22      Le requérant allègue que l’article 40, paragraphe 3, du statut devrait être interprété dans le sens qu’un fonctionnaire ne peut bénéficier d’une promotion s’il est en CCP pendant la période prise en compte aux fins de la promotion, laquelle débute à partir de la précédente promotion ou de l’entrée en fonction. La période de CCP ne pourrait être prise en considération ni en ce qui concerne la condition d’éligibilité liée à l’ancienneté dans le grade, ni en ce qui concerne les mérites accumulés par le fonctionnaire pendant la période de référence. En revanche, en dehors de cette période, le CCP ne pourrait pas influencer le droit à la promotion, particulièrement lorsque le CCP ne viserait qu’une courte période à la fin de la procédure de promotion.

23      Deuxièmement, le requérant fait valoir que le système de promotion serait fondé sur l’accumulation des mérites durant des positions d’activité. Ainsi, ce serait l’activité ou l’absence d’activité durant une période de référence qui aurait une influence sur le bénéfice d’une promotion. Le requérant, qui a été en activité durant toute la période de référence prise en compte pour l’exercice de promotion de l’année 2019, aurait donc légitimement pu penser être en droit de participer à l’exercice de promotion jusqu’à sa clôture.

24      L’interprétation de la Commission serait contraire aux principes de sécurité juridique et de prévisibilité. Selon le requérant, les conditions d’éligibilité devraient être fixées définitivement en début d’exercice, à un moment déterminé. En revanche, selon l’interprétation de la Commission, la condition d’éligibilité litigieuse est liée à une décision future, adoptée à une date qui ne serait pas communiquée par avance. En effet, durant plusieurs années, cette décision aurait été arrêtée en octobre, et non en novembre comme ce fut le cas en 2019.

25      Le requérant relève que l’appréciation d’une condition d’éligibilité à la fin d’une procédure de sept mois créerait des conséquences qui seraient contraires à la procédure même, en ce qu’elle nécessiterait de déterminer les quotas disponibles et de comparer les mérites de fonctionnaires considérés comme étant éligibles au moment du lancement de la procédure. En outre, cette interprétation serait susceptible de modifier la décision devant être finalement adoptée du simple fait que, entre la position finale de l’AIPN et la signature de cette décision, le statut d’un fonctionnaire peut encore avoir évolué.

26      Selon le requérant, en ce qui concerne la procédure de promotion au sein du Conseil de l’Union européenne, tout changement intervenu après le 1er janvier de l’année de l’exercice de promotion, y compris le CCP, ne serait pas pris en considération.

27      Troisièmement, le requérant relève que la Commission créerait une inégalité de traitement entre les fonctionnaires qui ont accumulé des mérites équivalents et présentent une ancienneté identique, mais se voient dans une position différente au jour de l’adoption de la décision de clôture de la procédure de promotion. Par ailleurs, un fonctionnaire proposé à la promotion, qui se trouve en CCP seulement durant le mois de l’adoption de la décision de promotion, serait traité moins favorablement qu’un fonctionnaire qui était en CCP toute l’année, sauf le mois de l’adoption de ladite décision. Ainsi, l’exclusion des fonctionnaires en CCP à la date de l’adoption de la décision de promotion ne serait pas de nature à atteindre l’objectif poursuivi, selon la Commission, par l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45, notamment celui de favoriser le maintien du lien entre le fonctionnaire et l’institution. En effet, une réelle valorisation d’un tel lien ressortirait de la situation du requérant, qui a toujours accompli ses fonctions, sauf pendant une courte période d’un mois.

28      Quatrièmement, l’interprétation de la Commission serait contraire au principe de proportionnalité, en ce que le fonctionnaire en CCP durant le second semestre de l’année 2019 serait finalement exclu de la promotion pour l’année 2019 et le CCP, eu égard à sa longueur, pourrait également lui porter préjudice l’année suivante. Il serait donc, sinon doublement pénalisé, du moins pénalisé de manière disproportionnée.

29      La Commission conteste les arguments du requérant.

30      À titre liminaire, il y a lieu de constater que l’article 35 du statut prévoit que le fonctionnaire peut être placé dans une des positions suivantes : l’activité, le détachement, le CCP, la disponibilité, le congé pour services militaires, le congé parental ou le congé familial et le congé dans l’intérêt du service.

31      L’article 40 du statut dispose ce qui suit :

« 1. Le fonctionnaire titulaire peut, à titre exceptionnel et sur sa demande, être mis en congé, sans rémunération, pour des motifs de convenance personnelle.

[...]

3. Pendant la durée de son congé, le fonctionnaire cesse de participer à l’avancement d’échelon et à la promotion de grade ; son affiliation au régime de sécurité sociale prévu aux articles 72 et 73 ainsi que la couverture des risques correspondants sont suspendus. »

32      À l’inverse, il est précisé aux articles 38, 42, 42 bis et 42 ter du statut, respectivement, que, pendant un détachement dans l’intérêt du service, le congé pour services militaires, ainsi que pendant le congé parental ou familial, le fonctionnaire conserve sa vocation à la promotion de grade.

33      Il est précisé à l’article 45, paragraphe 1, du statut ce qui suit :

« La promotion est attribuée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination en considération de l’article 6, paragraphe 2. À moins que la procédure prévue à l’article 4 et à l’article 29, paragraphe 1, ne s’applique, les fonctionnaires ne peuvent être promus que s’ils occupent un emploi qui correspond à l’un des emplois types indiqués à l’annexe I, section A, pour le grade immédiatement supérieur. La promotion entraîne pour le fonctionnaire la nomination au grade supérieur du groupe de fonctions auquel il appartient. Elle se fait exclusivement au choix, parmi les fonctionnaires justifiant d’un minimum de deux ans d’ancienneté dans leur grade, après examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion. Aux fins de l’examen comparatif des mérites, l’autorité investie du pouvoir de nomination prend en considération, en particulier, les rapports dont les fonctionnaires ont fait l’objet, l’utilisation dans l’exercice de leurs fonctions des langues autres que la langue dont ils ont justifié posséder une connaissance approfondie conformément à l’article 28, [sous] f) et le niveau des responsabilités exercées. »

34      L’article 3 des DGE de l’article 45 dispose ce qui suit :

« Un fonctionnaire peut faire l’objet d’une décision de promotion si, de façon cumulative :

–        il a acquis, au plus tard le 31 décembre de l’année de l’exercice de promotion, le minimum d’ancienneté dans le grade requis par l’article 45, paragraphe 1, du statut ;

–        au moment du lancement de l’exercice de promotion en vertu de l’article 2, paragraphe 2, il occupe un emploi qui correspond à l’un des emplois types pour le grade auquel il est susceptible d’être promu, indiqués à l’annexe I, section A, à l’article 30, paragraphe 1, ou à l’article 31, paragraphe 1, de l’annexe XIII du statut ;

–        il a démontré, avant sa première promotion après recrutement, sa capacité à travailler dans une troisième langue parmi celles visées à l’article 55, paragraphe 1, du traité sur l’Union européenne ;

–        il est en position d’activité, en congé parental ou familial, en congé pour services militaires ou détaché dans l’intérêt du service à la date de l’adoption des décisions de promotion par l’autorité investie du pouvoir de nomination ; et

–        ses rapports d’évaluation sont devenus définitifs en application des dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut, si un rapport était exigé en application de ces mêmes dispositions. Dans les cas où un rapport d’évaluation n’a pas été finalisé en raison d’un retard qui n’est pas imputable au titulaire de poste, ce dernier participe néanmoins à la procédure de promotion sur la base d’autres éléments d’information valables suppléant l’absence de rapport d’évaluation et peut donc faire l’objet d’une décision de promotion. »

35      C’est au regard de ces dispositions qu’il convient d’apprécier le bien-fondé de l’exception d’illégalité soulevée par le requérant.

 Sur le grief relatif à la période pertinente pour l’appréciation de l’éligibilité à la promotion du fonctionnaire en CCP

36      L’article 40, paragraphe 3, du statut précise que, pendant le CCP, le fonctionnaire cesse de participer à la promotion de grade. Il ressort de l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 qu’un fonctionnaire en CCP à la date de l’adoption de la décision de promotion de l’AIPN n’est pas éligible à la promotion.

37      Le requérant fait valoir que l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 serait illégal en ce que la Commission y interprète l’article 40, paragraphe 3, du statut comme signifiant que le fonctionnaire en CCP à la date de l’adoption de la décision de promotion est inéligible à l’exercice de promotion ainsi clos. Le requérant allègue que l’article 40 du statut devrait être interprété dans le sens qu’un fonctionnaire ne peut participer à l’exercice de promotion s’il est en CCP pendant la période de référence.

38      Autrement dit, le requérant propose une interprétation de l’article 40, paragraphe 3, du statut alternative à celle retenue dans l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45.

39      À cet égard, il convient de noter, premièrement, que, selon la jurisprudence, l’article 45 du statut laisse à l’institution, dans le cadre de sa politique de gestion du personnel, une large marge d’appréciation quant à la mise en œuvre et à la modification du système d’évaluation et de promotion par le moyen de l’adoption de mesures de portée générale. Si le Tribunal peut contrôler si l’institution compétente, dans l’exercice de ce large pouvoir d’appréciation, respecte pleinement les limites de ce pouvoir, il n’en reste pas moins que la portée de ce contrôle n’est que restreinte et se limite à la question de savoir si les mesures prises présentent un caractère manifestement inapproprié et si l’appréciation de l’institution à ce titre est manifestement erronée (voir, en ce sens, arrêt du 14 février 2007, Simões Dos Santos/OHMI, T‑435/04, EU:T:2007:50, point 133 et jurisprudence citée).

40      Deuxièmement, le requérant ne démontre pas l’illégalité de l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 au regard de l’article 40 du statut, puisque cette dernière disposition n’exclut pas qu’un fonctionnaire en CCP à la date de l’adoption de la décision de promotion soit inéligible à la promotion. En effet, l’article 40, paragraphe 3, du statut se borne uniquement à prévoir que, « [p]endant la durée de son congé, le fonctionnaire cesse de participer à l’avancement d’échelon et à la promotion de grade ».

41      Le requérant justifie son interprétation alternative de l’article 40 du statut par la cohérence du système de promotion, qui serait fondé sur l’accumulation de mérites durant des positions d’activité.

42      Certes, l’article 45 du statut dispose que la promotion se fonde sur un examen comparatif des mérites des fonctionnaires ayant vocation à la promotion, ainsi qu’il est également prévu à l’article 4 des DGE de l’article 45. Toutefois, eu égard aux articles 36 à 42 quater du statut, l’administration doit également prendre en considération d’autres facteurs comme la position du fonctionnaire et ses conséquences éventuelles sur la vocation de l’intéressé à la promotion.

43      La Commission a, par ailleurs, expliqué dans son mémoire en défense que l’objectif poursuivi par la distinction faite à l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 entre les différentes positions administratives était d’accorder une promotion aux fonctionnaires qui, par la nature de leur position administrative à la date d’adoption de la décision sur les promotions, maintenaient leur lien avec l’institution. Cela ne peut pas être considéré comme un objectif manifestement inapproprié dans le cadre de la promotion, par lequel la Commission aurait été au-delà de son pouvoir d’appréciation en adoptant l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45.

44      Il convient de conclure que l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 ne méconnaît pas l’article 40, paragraphe 3, du statut. Ce grief doit donc être rejeté.

 Sur le grief relatif à la violation du principe de sécurité juridique

45      L’argument du requérant selon lequel l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 serait contraire au principe de sécurité juridique, car, ayant été en activité durant toute la période prise en compte pour l’exercice de promotion de l’année 2019, il pouvait légitimement penser être en droit de participer à l’exercice de promotion jusqu’à sa clôture, ne saurait prospérer.

46      En effet, il ressort de ce qui précède que cette argumentation repose sur une lecture erronée de l’article 40, paragraphe 3, du statut. Cette disposition ne saurait, en particulier, être interprétée comme conférant au fonctionnaire un droit au maintien d’une vocation à la promotion pendant la période où ce dernier est en CCP.

47      En outre, il y a lieu de noter qu’il ressort d’une jurisprudence constante que le statut ne confère aucun droit à une promotion, même aux fonctionnaires qui réunissent toutes les conditions pour pouvoir être promus. En effet, l’attribution de points de promotion au cours de l’exercice de promotion ne fixe pas définitivement la position de l’institution au terme de la procédure de promotion, l’AIPN conservant son pouvoir d’appréciation (voir arrêt du 14 décembre 2017, RL/Cour de justice de l’Union européenne, T‑21/17, EU:T:2017:907, point 55 et jurisprudence citée). De même, le seul fait d’avoir été en activité durant la période prise en compte aux fins de la promotion ne confère aucun droit à la promotion.

48      En outre, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, tout fonctionnaire ou agent normalement diligent est censé connaître le statut et, plus particulièrement, les règles régissant la carrière. La diligence qui peut être raisonnablement attendue d’un fonctionnaire s’apprécie au regard de sa formation, de son grade et de son expérience professionnelle (voir ordonnance du 16 octobre 2020, Valiante/Commission, T‑13/20, non publiée, EU:T:2020:503, point 40 et jurisprudence citée).

49      En l’espèce, le requérant, fonctionnaire de grade AD 8 depuis 2016, devait comprendre l’effet qu’aurait son CCP sur son éligibilité à la promotion, dès lors que cet effet résulte clairement du libellé de l’article 40, paragraphe 3, du statut ainsi que de l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45.

50      Le requérant relève également que l’interprétation de la Commission serait contraire aux principes de sécurité juridique et de prévisibilité dans la mesure où la décision sur l’éligibilité à la promotion mentionnée à l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 serait prise à une date non communiquée à l’avance et susceptible d’être modifiée. Il fait valoir que les conditions d’éligibilité devraient être fixées définitivement en début d’exercice, à un moment déterminé, en s’appuyant sur l’interprétation des règles litigieuses par le Conseil, mentionnée au point 26 ci-dessus.

51      Il y a lieu de noter à cet égard que, conformément à la procédure de promotion précisée à l’article 5 des DGE de l’article 45, l’exercice de promotion comprend plusieurs examens comparatifs des mérites des fonctionnaires et des échanges de vues de différents acteurs au sein de la Commission, et est effectué selon les modalités et les disponibilités budgétaires identifiées par la direction générale des ressources humaines au début de chaque exercice. Ainsi, la date de clôture de chaque exercice est susceptible de varier selon, notamment, le volume et la charge de travail liés à chaque exercice. Contrairement à ce que relève le requérant, dans le cadre de cet exercice, l’AIPN n’avait aucune obligation de communiquer à l’avance la date de sa décision finale.

52      En outre, il convient de rappeler que si, selon le principe d’unicité de la fonction publique tel qu’il est énoncé à l’article 9, paragraphe 3, du traité d’Amsterdam, tous les fonctionnaires de toutes les institutions de l’Union européenne sont soumis à un statut unique, un tel principe n’implique pas que les institutions doivent user à l’identique du pouvoir d’appréciation qui leur a été reconnu par le statut, alors que, au contraire, dans la gestion de leur personnel, ces dernières jouissent d’un « principe d’autonomie » (arrêts du 28 avril 2017, Azoulay e.a./Parlement, T‑580/16, EU:T:2017:291, point 57, et du 18 septembre 2013, Scheidemann/Commission, F‑76/12, EU:F:2013:132, point 26). Ainsi, une différence entre les interprétations faites par les institutions ne permet pas d’établir une illégalité de l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45.

53      Le grief relatif à la violation des principes de sécurité juridique et de prévisibilité doit donc être rejeté.

 Sur le grief relatif à la violation du principe d’égalité de traitement

54      À l’appui de ce grief, le requérant fait valoir que l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 serait contraire au principe d’égalité de traitement dans la mesure où l’application de cette disposition aboutirait à le traiter différemment de ses collègues qui ont été promus tout en disposant d’une ancienneté identique ainsi que de mérites équivalents aux siens. Le requérant expose également qu’il serait traité moins favorablement qu’un fonctionnaire qui aurait été en CCP pendant onze mois au cours de l’année 2019 mais qui aurait été en position d’activité le jour de l’adoption de la décision attaquée.

55      Il ressort de la jurisprudence que l’existence d’une violation du principe d’égalité de traitement suppose que deux catégories de personnes, dont les situations factuelles et juridiques ne présentent pas de différence essentielle, se voient appliquer un traitement différent ou lorsque des situations juridiques différentes sont traitées de manière identique, sans qu’un tel traitement soit objectivement justifié (voir arrêts du 6 septembre 2018, Piessevaux/Conseil, C‑454/17 P, non publié, EU:C:2018:680, point 78 et jurisprudence citée, et du 3 mai 2006, Klaas/Parlement, T‑393/04, EU:T:2006:118, point 69 et jurisprudence citée).

56      Selon la jurisprudence, la violation du principe d’égalité de traitement du fait d’un traitement différencié présuppose que les situations visées soient comparables eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent, dont, notamment, l’objet et le but de l’acte de l’Union qui institue la distinction en cause de même que les principes et les objectifs du domaine dont relève l’acte en cause (voir arrêt du 17 mai 2017, Piessevaux/Conseil, T‑519/16, non publié, EU:T:2017:343, point 66 et jurisprudence citée).

57      Il convient également de rappeler que, vu le large pouvoir d’appréciation dont dispose l’administration en la matière, ainsi que cela a été constaté au point 39 ci-dessus, le juge, dans son contrôle du respect du principe d’égalité de traitement, doit se limiter à vérifier que l’institution concernée n’a pas procédé à une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi (voir, en ce sens, arrêts du 17 mai 2017, Piessevaux/Conseil, T‑519/16, non publié, EU:T:2017:343, point 67 et jurisprudence citée, et du 25 février 2010, Pleijte/Commission, F‑91/08, EU:F:2010:13, point 58).

58      En l’espèce, il est incontesté que le requérant figurait parmi les fonctionnaires proposés à la promotion au début de l’exercice de promotion 2019. Toutefois, même si dans la comparaison des mérites faite par la Commission subséquemment à cette proposition il a été constaté que le requérant possédait les mérites requis pour être promu, il est également incontesté qu’il était dans une position différente de celle des fonctionnaires possédant les mêmes mérites que lui mais étant en position d’activité, congé parental ou familial, congé pour services militaires ou détachement dans l’intérêt du service à la date de l’adoption des décisions de promotion.

59      À cet égard, il convient de noter que l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 s’applique de la même manière à tous les fonctionnaires de la Commission. En outre, et ainsi qu’il a été noté au point 43 ci-dessus, l’objectif poursuivi par la distinction faite à l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 entre les différentes positions administratives est, selon la Commission, d’accorder une promotion aux fonctionnaires qui, par la nature de leur position administrative à la date d’adoption de la décision sur les promotions, maintiennent leur lien avec l’institution. Ainsi, il y a lieu de constater que cette distinction ne résulte pas d’une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate au regard de l’objectif poursuivi.

60      En outre, ainsi que l’a constaté la Commission, il résulte d’une jurisprudence constante que, même s’il doit résulter dans des situations marginales des inconvénients casuels de l’instauration d’une réglementation générale et abstraite, il ne peut être reproché au législateur d’avoir eu recours à une catégorisation, dès lors qu’elle n’est pas discriminatoire par essence au regard de l’objectif qu’elle poursuit (voir arrêt du 26 mars 2020, Teeäär/BCE, T‑547/18, EU:T:2020:119, point 42 et jurisprudence citée).

61      Le grief relatif à la violation du principe de non-discrimination doit donc être rejeté.

 Sur le grief relatif à la violation du principe de proportionnalité

62      Le requérant fait valoir que l’interprétation de la Commission serait contraire au principe de proportionnalité, en ce que le fonctionnaire en CCP durant le second semestre de l’année 2019 serait exclu de la promotion pour l’année 2019 et que ce même CCP pourrait également lui porter préjudice l’année suivante.

63      À cet égard, il suffit de constater que, en application de l’article 40, paragraphe 3, du statut et de l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45, un fonctionnaire dans la situation du requérant ne peut pas être promu aussi longtemps qu’il est en CCP. En revanche, lorsque son CCP prend fin, l’intéressé recouvre une pleine vocation à la promotion, laquelle reste subordonnée à une décision de l’AIPN, adoptée à l’issue d’une comparaison des mérites des fonctionnaires remplissant les conditions pour une éventuelle promotion. Dans ce contexte, aucune disposition statutaire n’interdit à l’AIPN de tenir compte, le cas échéant, du fait que l’intéressé avait été proposé à la promotion lors de l’exercice de promotion précédent.

64      En l’espèce, il y a d’ailleurs lieu de relever que le requérant a été promu lors de l’exercice de promotion 2020, malgré le fait qu’il avait été en CCP pendant une partie de l’année 2019.

65      Le grief relatif à la violation du principe de proportionnalité doit donc être rejeté.

66      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que l’exception d’illégalité dirigée contre l’article 3, quatrième tiret, des DGE de l’article 45 n’est pas fondée. La Commission n’a donc pas commis d’erreur de droit en appliquant cette disposition dans la décision attaquée. Par conséquent, le moyen unique et, partant, le recours dans son intégralité doivent être rejetés.

 Sur les dépens

67      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      KZ est condamné aux dépens.

Svenningsen

Barents

Pynnä

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : le français.