Language of document : ECLI:EU:T:2014:943

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

12 novembre 2014 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative LOVOL – Marques communautaires verbale et figurative et marques nationales figuratives antérieures VOLVO – Motif relatif de refus – Profit indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure – Article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑525/11,

Volvo Trademark Holding AB, établie à Göteborg (Suède), représentée par Me M. Treis, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Geroulakos, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Hebei Aulion Heavy Industries Co., Ltd, établie à Zhangjiakou (Chine), représentée par Me A. Alejos Cutuli, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 23 juin 2011 (affaire R 1868/2010‑1), relative à une procédure d’opposition entre Volvo Trademark Holding AB et Hebei Aulion Heavy Industries Co., Ltd,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, O. Czúcz (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 septembre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 février 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 20 janvier 2012,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 29 mai 2012,

vu le mémoire en duplique de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 1er août 2012,

vu le mémoire en duplique de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 10 août 2012,

vu l’ordonnance du 27 mars 2014 portant jonction des affaires T‑524/11 et T‑525/11 aux fins de la procédure orale,

à la suite de l’audience du 2 avril 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 avril 2006, l’intervenante, Hebei Aulion Heavy Industries Co., Ltd., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7 et 12 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 7 : « Ramasseuses ; machines agricoles, rouleaux compresseurs ; excavateurs ; chargeurs ; bouteurs (bulldozers) ; malaxeurs de béton ; grues ; batteuses à grain ; repiqueuses de riz » ;

–        Classe 12 : « Automobiles ; véhicules de transport à usage agricole ; motocyclettes ; wagons-grues ; cycles ; voitures ; bicyclettes ; véhicules électriques ; moteurs pour véhicules terrestres ; chariots élévateurs ; malaxeurs de béton ; tracteurs ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 39/2006, du 25 septembre 2006.

5        Le 21 décembre 2006, la requérante, Volvo Trademark Holding AB, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée notamment sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque communautaire verbale VOLVO, enregistrée le 20 juin 2005 sous le numéro 2 361 087, désignant des produits et services relevant des classes 1 à 9, 11, 12, 14, 16 à 18, 20 à 22, 24 à 28 et 33 à 42 ;

–        la demande de marque communautaire figurative reproduite ci-après, déposée le 30 août 2001, désignant des produits et services relevant des classes 1 à 4, 6, 7, 9, 11, 12, 14, 16, 18, 25, 28, 35 à 39 et 41 :

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–        la marque nationale figurative reproduite ci-après, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 747 361, désignant des produits relevant de la classe 12 :

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–        la marque nationale figurative reproduite ci-après, enregistrée au Royaume-Uni sous le numéro 1 408 143, désignant des produits relevant de la classe 7 :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenus article 8, paragraphe 1, sous b), et article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Par décision du 29 juillet 2010, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité, au motif que les marques en conflit ne présentaient pas de degré de similitude suffisant au regard des exigences de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

9        Le 27 septembre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 23 juin 2011, notifiée à la requérante le 19 juillet 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition et rejeté le recours formé par la requérante. Elle a considéré que le niveau d’attention du public pertinent était particulièrement élevé, notamment en raison du prix des produits concernés et de leur caractère hautement technique. En outre, elle a estimé que les signes en conflit étaient différents. Ainsi, il ne pouvait pas exister un risque de confusion entre les signes au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. De plus, tout en reconnaissant que le degré minimal de similitude pouvait être plus bas dans le cas de l’application de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement, elle a pourtant estimé que les signes étant différents, la condition de similitude n’était pas remplie.

 Conclusions des parties

11      Dans la requête, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        rejeter la demande d’enregistrement de la marque LOVOL ;

–        condamner l’intervenante aux dépens exposés par elle dans la présente procédure et dans la procédure devant l’OHMI.

12      À l’audience, la requérante a renoncé à son troisième chef de conclusions.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

16      Aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 :

« Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure au sens du paragraphe 2, la marque demandée est […] refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à la marque antérieure et si elle est destinée à être enregistrée pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque, dans le cas d’une marque communautaire antérieure, elle jouit d’une renommée dans [l’Union européenne] et, dans le cas d’une marque nationale antérieure, elle jouit d’une renommée dans l’État membre concerné et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’il leur porterait préjudice. »

17      Les atteintes visées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, lorsqu’elles se produisent, sont la conséquence d’un certain degré de similitude entre les marques antérieure et postérieure, en raison duquel le public concerné effectue un rapprochement entre ces deux marques, c’est-à-dire établit un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas [arrêt du 12 mars 2009, Antartica/OHMI, C‑320/07 P, EU:C:2009:146, point 43 ; arrêt du 14 décembre 2012, Bimbo/OHMI – Grupo Bimbo (GRUPO BIMBO), T‑357/11, EU:T:2012:696, point 29 ; voir également, par analogie, arrêt du 27 novembre 2008, Intel Corporation, C‑252/07, Rec, EU:C:2008:655, point 30].

18      L’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 est soumise à trois conditions, à savoir, premièrement, l’identité ou la similitude des marques en conflit, deuxièmement, l’existence d’une renommée de la marque antérieure invoquée à l’appui de l’opposition et, troisièmement, le risque que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou leur porterait préjudice. Ces trois conditions sont cumulatives et l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du 27 septembre 2011, El Jirari Bouzekri/OHMI – Nike International (NC NICKOL), T‑207/09, EU:T:2011:537, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêts du 25 mai 2005, Spa Monopole/OHMI – Spa-Finders Travel Arrangements (SPA-FINDERS), T‑67/04, Rec, EU:T:2005:179, point 30, et du 27 novembre 2007, Gateway/OHMI – Fujitsu Siemens Computers (ACTIVY Media Gateway), T‑434/05, EU:T:2007:359, point 57].

19      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le territoire pertinent était l’ensemble de l’Union et que le public pertinent était constitué à la fois par le grand public et un public spécialisé intéressé par les machines et véhicules professionnels. En raison de la nature des produits et de leur prix, le niveau d’attention du public était élevé lors du choix des produits. Ces constatations ne sont pas mises en cause par la requérante.

20      La requérante conteste cependant l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle la demande d’enregistrement de la marque LOVOL ne pouvait pas être refusée sur la base de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, étant donné que les signes en conflit étaient différents et qu’une des conditions cumulatives de l’application dudit article faisait ainsi défaut.

 Sur la similitude des signes

21      Selon la jurisprudence, les critères à prendre en compte lors de l’appréciation de la similitude entre les marques en cause sont les mêmes dans le cas de figure du refus de l’enregistrement d’une marque demandée en raison d’un risque de confusion, en application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, et du refus en raison d’une atteinte à la renommée d’une marque antérieure, aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009 (arrêt NC NICKOL, point 18 supra, EU:T:2011:537, point 31). En effet, dans ces deux cas de figure permettant de refuser l’enregistrement d’une marque demandée, la condition d’une similitude entre les signes suppose l’existence, en particulier, d’éléments de ressemblance visuelle, phonétique ou conceptuelle, de sorte que, du point de vue du public pertinent, il existe entre les marques en cause une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents (arrêts ACTIVY Media Gateway, point 18 supra, EU:T:2007:359, point 35, et NC NICKOL, point 18 supra, EU:T:2011:537, point 31 ; voir également, par analogie, arrêt du 23 octobre 2003, Adidas-Salomon et Adidas Benelux, C‑408/01, Rec, EU:C:2003:582, points 28 et 30 et jurisprudence citée).

22      L’appréciation de la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, en particulier, de leurs éléments distinctifs et dominants [arrêts du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, Rec, EU:C:1997:528, point 23 ; du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, point 39, et du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJI by SPA), T‑3/04, Rec, EU:T:2005:418, point 38].

23      Dès lors, conformément à la jurisprudence citée au point 17 ci-dessus, il y a lieu d’examiner la question de savoir si les marques en conflit montrent un degré de similitude suffisant qui peut amener le public concerné à effectuer un rapprochement entre ces deux marques, c’est-à-dire à établir un lien entre celles-ci, alors même qu’il ne les confond pas.

–       Sur l’aspect visuel de la comparaison

24      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a d’abord comparé la marque demandée avec la marque verbale VOLVO et l’élément verbal figurant dans les marques antérieures figuratives. Elle a considéré que les signes en conflit avaient quatre lettres en commun sur cinq, dans un ordre toutefois différent. En outre, les signes diffèrent par leurs lettres initiales respectives « v » et « l » et leur première syllabe « vol » et « lo ». En outre, il est peu probable que le consommateur moyen disséquera les syllabes respectives des marques dans le but de créer une anagramme et associera ainsi « lovol » avec « volvo ». Ensuite, la chambre de recours a estimé que les éléments graphiques dans la marque demandée étaient banals et ne constituaient pas un élément de différenciation qui dominera ou influencera la perception visuelle des signes par le consommateur. En outre, l’élément verbal des marques antérieures apparaît en lettres blanches sur un fond noir, tandis que la marque contestée est reproduite en lettres noires dans une bannière blanche. Dès lors, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient visuellement différents.

25      La requérante limite son argumentation à la comparaison de l’élément verbal de la marque LOVOL avec la marque verbale VOLVO. Elle fait valoir que les deux signes comportent chacun cinq lettres et se composent de combinaisons similaires des lettres « v », « o » et « l ». Les lettres majuscules « V » et « L » étant formées d’un angle, leurs structures géométriques seraient similaires. Les marques seraient constituées de la même succession de voyelles, à savoir « o » et « o », et d’une succession similaire de consonnes, à savoir « v », « l » et « v », pour l’une, et « l », « v » et « l », pour l’autre. Enfin, les deux marques se caractérisent par les syllabes « vol » et « vo » ou leur inversion.

26      En premier lieu, il convient de souligner que le début des signes en conflit est différent, la marque demandée commençant par un « l », tandis que la première lettre de la marque VOLVO est un « v ». Or, selon la jurisprudence, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots [voir, par analogie, arrêt du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec, EU:T:2004:79, point 81].

27      En deuxième lieu, quant à l’argument de la requérante selon lequel la première syllabe de la marque LOVOL est une inversion de « vol », il y a lieu d’observer qu’elle ne spécifie aucune langue de l’Union dont les règles imposent le découpage de la marque LOVOL dans les syllabes « lov » et « ol ». En revanche, selon les règles des langues anglaise, allemande, française, italienne, espagnole, polonaise, néerlandaise et hongroise, le terme « lovol » est à scinder dans les syllabes « lo » et « vol ». Même à supposer que dans une langue de l’Union, la première syllabe serait « lov », la requérante n’a pas fourni de preuves pour étayer son allégation selon laquelle le consommateur moyen serait enclin à découper un terme court sans signification et d’en lire la première syllabe dans le sens inverse.

28      Au demeurant, la requérante ne saurait valablement invoquer à cet égard les arrêts du 11 juin 2009, Hedgefund Intelligence/OHMI – Hedge Invest (InvestHedge) (T‑67/08, EU:T:2009:198) et du 25 juin 2010, MIP Metro/OHMI – CBT Comunicación Multimedia (Metromeet) (T‑407/08, Rec, EU:T:2010:256).

29      Dans l’arrêt InvestHedge, le Tribunal a examiné la similitude entre les marques figuratives InvestHedge et HEDGE INVEST contenant chacune les éléments verbaux « invest » et « hedge ». Il a considéré que les signes en cause étaient, chacun, composés de deux éléments identiques clairement identifiables, puisque, dans la marque antérieure, ils étaient séparés par un espace et, dans la marque demandée, ils se détachaient nettement en raison de l’emploi des lettres majuscules « I » et « H ». Une telle disposition permettait immédiatement de les scinder en deux parties distinctes, à savoir « invest » et « hedge », qui étaient identiques. C’est dans ce contexte que le Tribunal a estimé que la simple inversion d’éléments d’une marque ne saurait permettre de conclure à l’absence de similitude visuelle (arrêt InvestHedge, point 28 supra, EU:T:2009:198, point 35).

30      De même, dans l’arrêt Metromeet, le Tribunal a examiné la similitude visuelle entre les marques meeting metro et Metromeet. Il a estimé que la marque demandée était composée de deux éléments, à savoir « metro » et « meet », qui se retrouvaient dans un ordre inversé dans la marque verbale antérieure, le mot « meeting » pouvant être aisément perçu par le public visé comme étant le gérondif du mot « meet ». Il a rappelé que la simple inversion d’éléments d’une marque ne saurait permettre de conclure à l’absence de similitude visuelle (arrêt Metromeet, point 28 supra, EU:T:2010:256, points 37 et 38).

31      Cependant, en l’espèce, contrairement aux affaires donnant lieu aux arrêts InvestHedge, point 28 supra (EU:T:2009:198), et Metromeet, point 28 supra (EU:T:2010:256), les signes VOLVO et LOVOL ne sont pas composés de termes ayant une signification distincte et compréhensibles pour le public pertinent. De même, rien dans l’arrangement des lettres dans la marque demandée LOVOL ne permet de penser que le consommateur moyen le scinderait, et regarderait les deux syllabes séparément. De plus, même à supposer que le consommateur moyen procède à une telle dissection, rien ne permet de penser que, contrairement au processus normal de lecture de l’alphabet latin, il lit les premières trois lettres « l », « o » et « v » dans le sens inverse, comme « vol ».

32      Il s’ensuit que les arguments de la requérante tirés des arrêts InvestHedge, point 28 supra (EU:T:2009:198), et Metromeet, point 28 supra (EU:T:2010:256), doivent être rejetés en raison des différences marquées entre le contexte factuel des affaires ayant donné lieu auxdits arrêts, d’une part, et celui de la présente affaire, d’autre part.

33      En troisième lieu, il convient de souligner que, même lors d’une lecture rapide des deux signes, aucun rapprochement ne sera fait par le consommateur moyen, étant donné que tant la première que la dernière lettre des signes en conflit sont différentes, et, de plus, la marque demandée contient deux « l », tandis que la marque VOLVO contient deux « v ».

34      En quatrième lieu, certes, les signes en conflit contiennent la combinaison des lettres « vol ». Cependant, dans la marque verbale antérieure, ces trois lettres se situent au début, tandis que dans la marque demandée, elles sont placées à la fin.

35      En cinquième lieu, la requérante ne saurait valablement tirer aucun argument de la prétendue similitude des lettres majuscules « L » et « V ». En effet, le consommateur moyen est censé distinguer instinctivement les lettres de l’alphabet latin, et, en l’espèce, percevra les différences séparant lesdites lettres, eu égard aussi au fait que les signes en conflit sont relativement courts.

36      Au demeurant, il y a lieu de souligner que les éléments figuratifs faisant partie des marques figuratives antérieures différentient davantage celles-ci de la marque demandée, et, que, en tout état de cause, la requérante ne tire aucun argument relatif auxdites différences entre les marques dans le contexte de la comparaison visuelle.

37      Eu égard à ces considérations, le seul fait que les signes en conflit comportent les lettres « v », « l » et « o », et qu’ils incluent la combinaison des lettres « vol », ne suffit pas pour amener le public pertinent à effectuer un rapprochement entre lesdits signes, sur la base de la perception visuelle. Ainsi, il ne s’agit pas d’une similitude visuelle qui est susceptible d’être prise en compte lors de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

38      Dès lors, il convient de confirmer la constatation de la chambre de recours selon laquelle les signes en cause sont différents sur le plan visuel.

–       Sur l’aspect phonétique de la comparaison

39      En ce qui concerne la comparaison phonétique des signes, la chambre de recours a estimé que le seul fait que les marques en conflit avaient le même nombre de syllabes ne revêtait aucune importance particulière. En revanche, eu égard aux « sonorités vocaliques » différentes dans les deux syllabes des marques en conflit, celles-ci sont différentes sur le plan phonétique.

40      La requérante estime que les marques VOLVO et LOVOL sont phonétiquement similaires. Elle fait valoir que la prononciation des marques en conflit est marquée par les syllabes « vol », « vo » et « lov », présentant des similitudes frappantes. Les deux signes partagent la répétition de la voyelle « o », laquelle domine la prononciation du signe, ainsi que les consonnes douces « l » et « v », dont la prononciation reste sourde.

41      Il convient de relever que la requérante ne saurait valablement prétendre que les deux marques se composent uniquement des syllabes « vol », « vo » et « lov », étant donné que la marque demandée n’est pas LOVVOL, mais LOVOL. En outre, il y a lieu de rappeler que la requérante ne mentionne aucune langue de l’Union dans laquelle le terme LOVOL serait divisé dans les syllabes « lov » et « ol ». Au contraire, selon les règles grammaticales des langues précisées au point 27 ci-dessus, la marque demandée se compose des syllabes « lo » et « vol ».

42      En outre, il y a lieu de réitérer que, selon la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots. Or, les premiers sons des signes en conflit sont différents.

43      Certes, les voyelles figurant dans les deux signes sont identiques et sont prononcées d’une manière identique dans plusieurs langues de l’Union. Cependant, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la prononciation des lettres « l » et « v » est nettement différente, le son « l » étant une consonne alvéolaire, tandis que le « v » est une consonne labiodentale.

44      De plus, l’élément verbal « volvo » contient des consonnes « l » et « v » juxtaposées, accrochant légèrement la prononciation, tandis que dans le terme « lovol » les voyelles et les consonnes alternent, de sorte qu’il est prononcé d’une manière plus souple. Les signes en conflit ont, dès lors, un rythme de prononciation différent.

45      Ainsi, il convient de constater que le seul fait que les signes en conflit comportent les lettres « v », « l » et « o » et qu’ils incluent la combinaison des lettres « vol », ne suffit pas pour amener le public pertinent à effectuer un rapprochement entre lesdits signes, sur la base de la perception phonétique. Ainsi, il ne s’agit pas d’une similitude phonétique qui est susceptible d’être prise en compte lors de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

46      Ainsi, il y a lieu de confirmer la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit sont différents sur le plan phonétique du point de vue de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

–       Sur l’aspect conceptuel de la comparaison

47      La requérante partage la position de la chambre de recours selon laquelle les signes en cause n’ayant pas de signification dans au moins une des langues de l’Union, la comparaison conceptuelle est impossible.

48      Cependant, elle fait valoir que le consommateur confronté à la « marque inventée » LOVOL sera intrigué par cette nouvelle marque de voiture, d’autant plus que le nombre de constructeurs automobiles est relativement limité. Dès lors, le consommateur se demandera si cette nouvelle marque de voiture a un lien quelconque avec une marque de voiture très ancienne et hautement réputée et sera alors amené à l’associer avec la marque VOLVO.

49      À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante ne s’appuie sur aucun principe établi dans la jurisprudence.

50      En outre, elle n’a pas apporté de preuve tendant à démontrer que le consommateur, montrant un haut degré d’attention lors de l’achat des produits en cause, associera une nouvelle marque instinctivement avec une marque existante lorsqu’il sera confronté à une « marque inventée », ne possédant aucune signification.

51      La requérante fait cependant valoir qu’un rapprochement des signes LOVOL et VOLVO pourrait s’effectuer dans l’esprit du consommateur en raison de l’existence d’un « dictionnaire visuel » qui existe dans le cerveau humain, développé lors de l’apprentissage de lecture. À cet égard, elle s’appuie sur un article scientifique intitulé « Les lecteurs expérimentés se fondent sur le ‘dictionnaire visuel’ de leur cerveau afin de reconnaître des mots », publié le 14 novembre 2011.

52      L’OHMI fait valoir que ledit article scientifique, annexé à la réplique, ne peut pas être pris en compte par le Tribunal, en raison de son dépôt tardif.

53      Le Tribunal estime qu’il n’est pas opportun d’examiner la recevabilité de l’offre de preuve que constitue l’article en cause, dès lors que, en tout état de cause, il ne soutient pas la thèse de la requérante. En effet, les auteurs soulignent que même dans le cas d’une coïncidence de plusieurs lettres dans deux mots, la différence du reste des lettres a pour résultat que la lecture desdits mots active des neurones différents dans le cerveau humain. Par exemple, selon la perception d’un lecteur expérimenté, la distance entre les mots anglais « hair » et « hare » est la même que celle entre les termes « hair » et « soup », et ce malgré la prononciation identique des termes « hair » et « hare ».

54      Dès lors, il y a lieu de conclure que la comparaison conceptuelle n’est pas possible en l’espèce. De même, la requérante n’a pas établi que la perception conceptuelle des signes pût donner pour résultat le rapprochement des signes au sens de la jurisprudence citée au point 17 ci-dessus. Ainsi, ces arguments doivent être rejetés.

55      Sur la base de ce qui précède, et eu égard en particulier aux constatations développées aux points 37 et 45 ci-dessus, il y a lieu de relever que le seul fait que les signes en conflit comportent les lettres « v », « l » et « o », et qu’ils incluent la combinaison des lettres « vol », n’est pas susceptible de générer, dans l’esprit du public concerné, un rapprochement entre lesdits signes ou de l’amener à établir un lien entre ceux-ci. Ainsi, ladite coïncidence des lettres ne peut pas être qualifiée de similitude aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

56      Dès lors, il convient de confirmer la décision attaquée en ce que la chambre de recours y a conclu, dans le contexte de l’application de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, que les signes en conflit étaient différents.

 Sur l’applicabilité de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009

57      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence citée au point 18 ci-dessus, l’absence de l’une des trois conditions cumulatives suffit à rendre inapplicable l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

58      En l’espèce, les signes en conflit sont différents. Il s’ensuit que la chambre de recours a valablement conclu que l’enregistrement de la marque demandée ne pouvait pas être refusé sur la base de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

59      Eu égard à ce qui précède, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante, et, dès lors, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

60      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Volvo Trademark Holding AB est condamnée aux dépens.

Berardis

Czúcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 novembre 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.