Language of document : ECLI:EU:T:2023:64

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

15 février 2023 (*)

« Énergie – Marché intérieur de l’électricité – Cadre de mise en œuvre de la plateforme européenne pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de restauration de la fréquence avec activation automatique – Procédure d’adoption des modalités, des conditions et des méthodologies – Rejet de la proposition commune des gestionnaires de réseau – Compétence de l’ACER – Erreur de droit – Droits de la défense – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑606/20,

Austrian Power Grid AG, établie à Vienne (Autriche), et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe (1), représentées par Me M. Levitt, avocat, M. B. Byrne et Mme D. Jubrail, solicitors,

parties requérantes,

contre

Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), représentée par Me E. Ameye, avocate, Mme A. Tellidou et M. E. Tremmel, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie),

composé, lors des délibérations, de M. S. Papasavvas, président, Mmes V. Tomljenović, P. Škvařilová‑Pelzl (rapporteure), MM. I. Nõmm et D. Kukovec, juges,

greffier : Mme I. Kurme, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 7 juin 2022,

rend le présent

Arrêt

1        Par leur recours fondé sur l’article 263 TFUE, les requérantes, Austrian Power Grid AG et les autres personnes morales dont les noms figurent en annexe, demandent l’annulation de la décision de la commission de recours de l’Agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) du 16 juillet 2020 confirmant la décision 02/2020 de l’ACER, du 24 janvier 2020, sur le cadre de mise en œuvre de la plateforme européenne pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de restauration de la fréquence avec activation automatique (ci-après la « plateforme aFRR ») et rejetant leurs recours dans l’affaire A-001-2020 (consolidée) (ci-après la « décision attaquée »), pour autant que cette décision les concerne, ainsi que l’annulation de l’article 1er de la décision 02/2020 et de l’article 3, paragraphe 3 et paragraphe 4, sous b), de l’article 4, paragraphe 6, de l’article 6, de l’article 11, paragraphe 1, sous c), et de l’article 12 du cadre de mise en œuvre de la plateforme aFRR, telle que figurant en annexe I de la décision 02/2020 (ci-après la « méthodologie aFRR » ou l’« aFRRIF »).

 Antécédents du litige

2        À la suite de l’entrée en vigueur, le 18 décembre 2017, du règlement (UE) 2017/2195 de la Commission, du 23 novembre 2017, concernant une ligne directrice sur l’équilibrage du système électrique (JO 2017, L 312, p. 6), tous les gestionnaires de réseau de transport (ci-après les « GRT ») ont, conformément à l’article 21, paragraphe 1, dudit règlement, élaboré une proposition de méthodologie aFRR.

3        Le 18 décembre 2018, les GRT ont, conformément à l’article 5, paragraphe 1, et paragraphe 2, sous a), du règlement 2017/2195, transmis à toutes les autorités de régulation nationales (ci-après les « ARN »), pour approbation, leur proposition de méthodologie aFRR (ci-après la « proposition initiale d’aFRRIF »). L’article 12 de ladite proposition, intitulé « Proposition d’entité », disposait ce qui suit :

« 1. Tous les GRT désignent une entité chargée d’exécuter toutes les fonctions [requises pour l’exploitation] de la plateforme aFRR.

2. L’entité sera constituée par un consortium de GRT ou une société détenue par des GRT. »

4        Par lettre du 24 juillet 2019, la présidente du forum des régulateurs de l’énergie (FRE) a, au nom de l’ensemble des ARN, informé l’ACER qu’elles avaient conjointement décidé, en vertu de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195, de lui demander de statuer sur la proposition initiale d’aFRRIF (ci-après la « demande conjointe »). Cette lettre était accompagnée d’une « note informelle de toutes les [ARN] approuvée par le [FRE] sur la proposition [initiale d’aFRRIF] conformément à l’article 21 du règlement [2017/2195] » (ci-après la « note informelle des ARN »).

5        Dans le cadre des échanges et des consultations qu’elle a engagés avec les ARN et les GRT à partir du mois de juillet 2019, l’ACER a considéré que la proposition initiale d’aFRRIF, qui prévoyait que l’entité chargée d’exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR pourrait prendre la forme d’un consortium de GRT, n’était pas conforme au règlement 2017/2195.

6        Par courriel du 28 novembre 2019, les GRT ont adressé à l’ACER une deuxième version de la proposition de méthodologie aFRR (ci-après la « deuxième proposition d’aFRRIF »). L’article 12 de la deuxième proposition d’aFRRIF disposait que l’entité chargée d’exécuter toutes les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR serait une société détenue par les GRT. Dans une note explicative jointe à ce courriel, les GRT ont précisé quel était l’objet poursuivi par ledit article.

7        À la suite de l’examen de la deuxième proposition d’aFRRIF, l’ACER a considéré que celle-ci n’était pas conforme au règlement 2017/2195, au motif qu’elle ne désignait que l’entité chargée d’exécuter la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT, alors que ledit règlement requérait de désigner une entité chargée de chacune des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, y compris les fonctions qui, telle la gestion de capacité, en tant que processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible aux fins des échanges d’énergie d’équilibrage, étaient des fonctions multiplateformes, dans la mesure où la capacité de transport entre zones disponible était une donnée à prendre en compte dans chacune des plateformes européennes d’équilibrage. En outre, elle a suggéré aux GRT, afin de respecter l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, de conserver les deux options proposées pour l’entité chargée d’exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, à savoir soit un seul GRT, soit une société détenue par les GRT.

8        Par courriel du 13 décembre 2019, les GRT, par l’intermédiaire d’un membre du Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité, ont adressé à l’ACER une troisième version de la proposition de méthodologie aFRR (ci-après la « troisième proposition d’aFRRIF »).

9        L’article 12 de la troisième proposition d’aFRRIF disposait ce qui suit :

« […]

2. Tous les GRT désignent une entité chargée d’exécuter la [fonction d’optimisation de l’activation] et la fonction de règlement des GRT-GRT de la plateforme [aFRR]. Cette entité sera un GRT unique ou une société détenue par les GRT.

[…]

5. Lorsque les GRT mettent en œuvre une fonction multiplateforme, tous les GRT désignent une entité chargée d’exécuter ladite fonction, qui pourra être différente de l’entité visée au [paragraphe] 2.

6. Dans les six mois suivant l’approbation de [la méthodologie] d’une plateforme européenne pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de remplacement avec activation [manuelle ou automatique], tous les GRT désignent l’entité proposée pour exécuter la [fonction de gestion de capacité].

[…] »

10      Par courriel du 17 décembre 2019 adressé au Réseau européen des gestionnaires de réseau de transport d’électricité, l’ACER a informé les GRT que les modifications apportées à l’article 12 dans la troisième proposition d’aFRRIF n’étaient toujours pas conformes au règlement 2017/2195. En effet, dès lors que, selon ladite proposition, les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR pourraient être exécutées par plusieurs entités, cette proposition devrait respecter les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, ce qui n’avait pas été démontré.

11      Par courriel du 18 décembre 2019 adressé par un membre du personnel du GRT belge en réponse au courriel de l’ACER du 17 décembre 2019, les GRT ont adressé à l’ACER une version modifiée de la troisième proposition d’aFRRIF (ci-après la « troisième proposition d’aFRRIF modifiée »). Ils ont confirmé qu’une entité unique (un seul GRT ou une société détenue par les GRT) serait chargée d’exécuter les fonctions spécifiquement requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, à savoir l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, et que, s’agissant de l’exécution de la gestion de capacité, qui était une fonction multiplateforme, celle-ci pourrait être confiée à une autre entité unique (un seul GRT ou une société détenue par les GRT).

12      Le 20 décembre 2019, l’ACER a établi une version finale de son projet de décision de méthodologie aFRR, qui a été communiquée aux requérantes.

13      Le 24 janvier 2020, l’ACER a adopté la décision 02/2020, relative à la méthodologie aFRR, à laquelle était jointe, en annexe I, une méthodologie aFRR, telle qu’amendée et approuvée par celle-ci (ci-après l’« aFRRIF litigieux »).

14      L’article 12 de l’aFRRIF litigieux dispose ce qui suit :

« […]

2. Tous les GRT désignent une entité, qu’il s’agisse d’un GRT ou d’une société détenue par les GRT, chargée d’exécuter la [fonction d’optimisation de l’activation] et la [fonction de règlement des GRT-GRT] de la plateforme aFRR. Au plus tard huit mois avant que la fonction de gestion de capacité ne devienne une fonction requise pour exploiter la plateforme aFRR conformément à l’article 6, [paragraphe] 4, tous les GRT élaborent une proposition de modification de [l’]aFRRIF qui désignera une entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité conformément à l’article 21, [paragraphe] 3, [sous] e), [du règlement 2017/2195] et précisera si la plateforme aFRR sera exploitée par une entité unique ou par plusieurs entités.

3. La désignation de l’entité se fera conformément à l’article 21, [paragraphe] 4, [du règlement 2017/2195].

[…] »

15      Le 23 mars 2020, en vertu de l’article 28 du règlement (UE) 2019/942 du Parlement européen et du Conseil, du 5 juin 2019, instituant une agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (JO 2019, L 158, p. 22), Austrian Power Grid, ČEPS, a.s., Polskie sieci elektroenergetyczne S.A., Red Eléctrica de España SA, RTE Réseau de transport d’électricité et Svenska kraftnät (ci-après le « groupe A ») ont introduit devant la commission de recours de l’ACER un recours dirigé, notamment, contre la décision 02/2020, qui a initialement été enregistré sous le numéro A-001-2020. TenneT TSO BV et TenneT TSO GmbH ont introduit devant la commission de recours de l’ACER un recours dirigé, notamment, contre la décision 02/2020, qui a initialement été enregistré sous le numéro A-004-2020. Dans la mesure où ces affaires avaient le même objet, la commission de recours les a ensuite regroupées sous le numéro d’affaire A-001-2020 (consolidée).

16      Dans son recours, le groupe A a, en vertu de l’article 20, paragraphe 3, sous d), de la décision de la commission de recours no 1‑2011, telle que modifiée le 5 octobre 2019, établissant les règles d’organisation et de procédure devant la commission de recours de l’ACER, demandé à cette dernière d’ordonner à l’ACER de divulguer (ci-après la « demande de divulgation »), sous une forme non expurgée, plusieurs documents, à savoir, d’une part, une copie de l’évaluation qui aurait été effectuée par l’ACER dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 21, paragraphe 5, du règlement 2017/2195 et, d’autre part, une copie des formulaires contenant les avis qui auraient été formulés par le conseil des régulateurs de l’ACER au sujet de la décision 02/2020 et de la méthodologie aFRR, avant l’adoption définitive de ces dernières par l’ACER (ci-après les « documents litigieux ») ainsi que de lui donner la possibilité de commenter ces documents. Le groupe A a réitéré cette demande de divulgation par lettre du 28 mai 2020.

17      Le 2 juin 2020, le greffe de la commission de recours a communiqué au groupe A la décision par laquelle le président de ladite commission avait rejeté sa demande de divulgation (ci-après la « décision rejetant la demande de divulgation »).

18      Par décision du 16 juillet 2020, la commission de recours a adopté la décision attaquée, qui confirme la décision 02/2020 et rejette les recours des requérantes dans l’affaire A-001-2020 (consolidée).

 Conclusions des parties

19      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, pour autant qu’elle les concerne ;

–        annuler l’article 1er de la décision 02/2020 ainsi que l’article 3, paragraphe 3 et paragraphe 4, sous b), l’article 4, paragraphe 6, l’article 6, l’article 11, paragraphe 1, sous c), et l’article 12 de l’aFRRIF litigieux ;

–        condamner l’ACER aux dépens.

20      L’ACER conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions du recours

21      Selon une jurisprudence constante, les conditions de recevabilité d’un recours fixées par l’article 263 TFUE relèvent des fins de non-recevoir d’ordre public et il appartient donc au Tribunal de les examiner d’office (voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2019, Pebagua/Commission, C‑204/18 P, non publié, EU:C:2019:425, point 28 et jurisprudence citée).

22      En l’espèce, après que les parties ont été invitées à présenter leurs observations à cet égard, il convient d’examiner d’office la recevabilité du deuxième chef de conclusions du recours, qui vise l’annulation de l’article 1er de la décision 02/2020 et de plusieurs dispositions de l’aFRRIF litigieux.

23      À cet égard, il ressort du considérant 34, de l’article 28, paragraphe 1, et de l’article 29 du règlement 2019/942 ainsi que de l’article 263, cinquième alinéa, TFUE, tels qu’interprétés à la lumière de la jurisprudence pertinente, que les parties requérantes non privilégiées peuvent uniquement poursuivre devant le Tribunal l’annulation des décisions adoptées par la commission de recours (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 16 mars 2022, MEKH et FGSZ/ACER, T‑684/19 et T‑704/19, EU:T:2022:138, points 31 à 42).

24      Dans le cadre de l’examen du présent recours, les requérantes, qui n’ont pas le statut de parties requérantes privilégiées, peuvent uniquement poursuivre l’annulation de la décision attaquée, adoptée par la commission de recours, mais non celle de la décision 02/2020 et de ses annexes.

25      Il y a donc lieu de se limiter, en l’espèce, au contrôle de la légalité de la décision attaquée, notamment en ce qu’elle confirme intégralement la décision 02/2020 ainsi que les dispositions de l’aFRRIF litigieux, à la lumière des moyens et des griefs avancés par les requérantes ainsi que des moyens ou des griefs qu’il conviendrait, le cas échéant, de relever d’office à l’égard de la décision attaquée.

 Sur le fond

26      À l’appui de leur recours, les requérantes soulèvent trois moyens, tirés en substance, le premier, d’une erreur de droit résultant d’une violation du principe d’attribution et du règlement 2019/942 commise par la commission de recours, dans la décision attaquée, en constatant que l’ACER avait pu, dans la décision 02/2020, s’écarter, dans l’exercice de sa compétence, de la demande conjointe des ARN, le deuxième, d’erreurs de droit commises par la commission de recours, dans la décision attaquée, en ne constatant pas que l’ACER, dans la décision 02/2020, avait violé l’article 21 du règlement 2017/2195 et, le troisième, d’une violation par la commission de recours, au cours de la procédure ouverte devant elle, du principe de bonne administration, du principe du respect des droits de la défense, de l’obligation de motivation et des obligations légales qui lui incombaient.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit résultant d’une violation du principe d’attribution et du règlement 2019/942 commise par la commission de recours en constatant que l’ACER avait pu s’écarter, dans l’exercice de sa compétence, de la demande conjointe des ARN

27      Le premier moyen se subdivise en deux branches. La première branche est prise de ce que la commission de recours a conclu à tort, dans la décision attaquée, que l’ACER ne s’était pas écartée de la position commune des ARN, telle qu’elle ressortait de la demande conjointe. La seconde branche est tirée de ce que la commission de recours a conclu à tort, dans la décision attaquée, que, en tout état de cause, l’ACER était autorisée à s’écarter de la position commune des ARN, telle qu’elle ressortait de la demande conjointe.

28      Le Tribunal estime opportun de commencer par l’examen de la seconde branche du premier moyen.

29      Dans le cadre de cette dernière, les requérantes soutiennent en substance que la commission de recours a conclu à tort, dans la décision attaquée, que l’ACER était autorisée à s’écarter de la position commune des ARN, telle qu’elle ressortait de la demande conjointe, alors que le champ de compétence de l’ACER était défini par la demande conjointe et que, en s’écartant des termes de celle-ci, dans la décision 02/2020, sur le fondement de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 et de l’article 6, paragraphe 10, deuxième alinéa, sous b), du règlement 2019/942, pour poursuivre son programme politique, elle avait agi ultra vires, en violation desdites dispositions. Le fait que certaines des ARN concernées n’aient pas contesté la décision attaquée à cet égard ne priverait pas les autres ARN de leur droit de le faire.

30      Premièrement, selon les requérantes, il ressort de l’article 6, paragraphe 4, du règlement 2019/942, de la jurisprudence et de la pratique décisionnelle de l’ACER que la compétence décisionnelle de l’ACER ne peut s’étendre à des points sur lesquels les ARN sont déjà parvenues à un accord ou ne lui ont pas demandé de statuer. En l’espèce, l’ACER n’aurait été saisie que des deux points de désaccord entre les ARN mentionnés dans la note informelle, portant sur le fonctionnement technique du processus de restauration de la fréquence automatique par les GRT et sur le modèle de « demande de contrôle » à choisir pour une conception de haut niveau de la plateforme aFRR.

31      Deuxièmement, les requérantes soutiennent que, en adoptant une décision qui dépassait les limites de sa compétence, telles que définies par la demande conjointe, l’ACER a violé le principe d’attribution inscrit à l’article 5, paragraphe 2, TUE. La méthodologie aFRR aurait été adoptée sur le fondement du règlement 2017/2195, qui serait un acte d’exécution. Ainsi qu’il ressortirait de son considérant 16, le règlement 2017/2195 fixerait les limites de la compétence attribuée à l’ACER et seule la Commission européenne pourrait, par la procédure de comitologie, modifier lesdites limites. En outre, contrairement à ce que prétendrait la commission de recours, au paragraphe 108 de la décision attaquée, l’ACER n’aurait pas exercé, en l’espèce, une compétence propre, mais une compétence déléguée ou dérivée des ARN. Conformément à la jurisprudence, seule la nécessité d’assurer un effet utile au règlement 2017/2195 pourrait justifier que l’ACER excède les limites de la compétence qui lui a été attribuée. Cependant, il ressortirait du point 69 de l’arrêt du 24 octobre 2019, E-Control/ACER (T‑332/17, non publié, EU:T:2019:761), que rien ne justifierait que, comme en l’espèce, l’ACER substitue sa position à celle des ARN, telle qu’exprimée dans la demande conjointe, concernant les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et la ou les entités désignées pour les exécuter.

32      Troisièmement, les requérantes soutiennent que l’interprétation de l’article 5, paragraphe 2, sous b), du règlement 2019/942, retenue par la commission de recours dans la décision attaquée, afin de reconnaître à l’ACER un pouvoir général de réviser les propositions des GRT soumises aux ARN, était erronée, dans la mesure où cette disposition n’était pas applicable au processus décisionnel visé à l’article 6, paragraphe 10, deuxième alinéa, sous b), dudit règlement et ne respectait pas le principe d’attribution, tel qu’il est rappelé au point 31 ci-dessus. En l’espèce, l’adoption de la méthodologie aFRR relevait, en premier lieu, de la compétence des ARN et, en second lieu et en l’absence d’accord entre celles-ci ou à leur demande conjointe, de la compétence de l’ACER.

33      Quatrièmement, les requérantes estiment que l’invocation, par l’ACER, du caractère prétendument « ascendant » du processus réglementaire prévu par le règlement 2019/942 ne légitime pas que, dans la décision 02/2020, l’ACER se soit écartée de la position commune des ARN, et ce indépendamment de l’avis favorable émis par le conseil des régulateurs sur le projet de décision de l’ACER. Par la décision 02/2020, l’ACER aurait imposé aux GRT un ensemble d’obligations qu’ils auraient constamment rejeté et que les ARN n’auraient pas identifié, dans la demande conjointe, comme étant des points de désaccord existant entre elles et nécessitant un arbitrage de l’ACER. La décision 02/2020, telle qu’elle est confirmée par la commission de recours, aurait non seulement été illégale, mais également préjudiciable aux GRT. En effet, elle les aurait privés de la possibilité de désigner un consortium de GRT pour exécuter la fonction d’optimisation de l’activation et celle du règlement des GRT-GRT et leur aurait imposé, dans un certain délai, d’inclure la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et de désigner l’un des GRT ou une société détenue par ces derniers pour exécuter cette fonction, conformément à l’article 21, paragraphe 4, du règlement 2017/2195. En vertu de l’article 21 du règlement 2017/2195, il serait revenu aux GRT de définir la méthodologie aFRR et non à l’ACER de la leur imposer, en se retranchant derrière une hypothétique possibilité, pour les GRT, de présenter une proposition de modification de ladite méthodologie, en application de l’article 6, paragraphe 3, du règlement 2017/2195.

34      L’ACER conclut au rejet de la seconde branche du premier moyen.

35      En l’espèce, conformément à la détermination de la recevabilité du recours et de l’utilité des moyens soulevés au soutien de celui-ci effectuée au point 25 ci-dessus, il convient de vérifier si la commission de recours a commis une erreur de droit en omettant, dans la décision attaquée, de constater que, en adoptant la décision 02/2020, l’ACER avait dépassé les limites de sa compétence, comme les requérantes l’avaient invoqué à l’appui du recours introduit devant elle.

36      À cet égard, il ressort de la jurisprudence concernant les règles qui régissent la compétence des institutions, des organes et des organismes de l’Union européenne que la disposition constituant la base juridique d’un acte et habilitant l’institution de l’Union à adopter l’acte en cause doit être en vigueur au moment de l’adoption de celui-ci (voir arrêts du 26 mars 2015, Commission/Moravia Gas Storage, C‑596/13 P, EU:C:2015:203, point 34 et jurisprudence citée, et du 3 février 2011, Cantiere navale De Poli/Commission, T‑584/08, EU:T:2011:26, point 33 et jurisprudence citée).

37      Au moment où a été adoptée la décision attaquée, qui est le seul acte dont les requérantes sont recevables à contester la légalité dans le cadre du présent recours (voir point 25 ci-dessus), à savoir le 16 juillet 2020, le règlement 2019/942 était applicable. En outre, le règlement 2017/2195 était également en vigueur et applicable, et ce conformément à l’article 65 de celui-ci, depuis le 18 décembre 2017, à savoir le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne, le 28 novembre 2017. Or, l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 habilitaient l’ACER, dans un délai de six mois, à statuer ou à adopter des décisions individuelles sur des questions ou des problèmes de réglementation ayant un effet sur le commerce transfrontalier ou sur la sécurité du réseau transfrontalier relevant de la compétence des ARN, telles que l’adoption de la méthodologie aFRR, si les ARN compétentes n’étaient pas parvenues à un accord dans le délai qui leur était imparti pour ce faire ou si les ARN compétentes lui avaient adressé une demande conjointe en ce sens. Au jour de l’adoption de la décision attaquée, seules ces dispositions étaient susceptibles d’offrir une base juridique à ladite décision.

38      Ainsi, il convient de vérifier si l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 étaient de nature à fonder la compétence de l’ACER pour adopter définitivement la méthodologie aFRR, telle que figurant dans l’annexe I de la décision attaquée, ce qui implique d’interpréter la portée de ces dispositions.

39      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, pour interpréter des dispositions du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celles-ci, mais également de leur contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elles font partie [voir arrêts du 11 juillet 2018, COBRA, C‑192/17, EU:C:2018:554, point 29 et jurisprudence citée, et du 28 janvier 2020, Commission/Italie (Directive lutte contre le retard de paiement), C‑122/18, EU:C:2020:41, point 39 et jurisprudence citée].

40      En l’espèce, tous les GRT ont, comme ils y étaient tenus en application de l’article 5, paragraphe 2, sous a), et de l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2017/2195, soumis pour approbation à leurs ARN une proposition de méthodologie aFRR, à savoir la proposition initiale d’aFRRIF. Selon l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 et l’article 6, paragraphe 10, deuxième alinéa, sous b), du règlement 2019/942, l’ACER devait toutefois, en cas de demande conjointe des ARN, statuer elle-même sur cette proposition dans un délai de six mois, à compter de la date de notification de cette demande. Or, il est constant que, par lettre du 24 juillet 2019, les ARN ont demandé conjointement à l’ACER, en vertu de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195, de statuer sur la proposition initiale d’aFRRIF que les GRT leur avaient soumise (point 4 ci-dessus).

41      Ainsi, la compétence de l’ACER pour statuer ou pour adopter une décision définitive sur la méthodologie aFRR reposait, en l’espèce, sur la circonstance, visée à l’article 6, paragraphe 10, deuxième alinéa, sous b), du règlement 2019/942 et à l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195, que toutes les ARN lui avaient conjointement demandé de statuer sur cette méthodologie.

42      Or, premièrement, il ne ressort pas des termes de l’article 6 du règlement 2019/942 et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 que, dans le cadre de l’exercice d’une telle compétence et au-delà de l’obligation qui lui incombait, en application de l’article 6, paragraphe 11, du règlement 2019/942, de consulter les ARN et les GRT concernés au stade de la préparation de sa décision, l’ACER aurait été liée par les observations transmises par ces derniers. En particulier, il ne ressort pas desdites dispositions que la compétence de l’ACER serait limitée aux seuls aspects sur lesquels les ARN n’auraient pas réussi à trouver un accord. Au contraire, l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 appréhendent les « questions de r[é]glementation » ou les « propositions […] de méthodologies soumises [par les GRT] » relevant initialement de la compétence des ARN avant, sur demande conjointe de ces dernières, de ressortir de celle de l’ACER comme un tout indissociable dont les ARN, puis l’ACER, se trouvent être globalement saisies sans opérer une telle distinction. Au vu de leur formulation, l’article 6 du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 doivent donc être interprétés en ce sens que, en cas de demande conjointe des ARN portant sur des questions de réglementation ou des propositions soumises par les GRT, l’ACER est habilitée à statuer ou à décider elle-même sur ces questions ou ces propositions.

43      Deuxièmement, cette interprétation littérale de l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942 et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 est confortée par le contexte et les objectifs poursuivis par la réglementation dont ces dispositions font partie, tels qu’éclairés par les travaux préparatoires de cette dernière.

44      À cet égard, il ressort de l’exposé des motifs de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une agence de coopération des régulateurs de l’énergie (COM/2007/0530 final), à l’origine du règlement (CE) no 713/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, instituant une agence de coopération des régulateurs de l’énergie (JO 2009, L 211, p. 1), qui a ensuite été remplacé par le règlement 2019/942, que les dispositions contenues dans celle-ci reposaient notamment sur le constat que, « [b]ien que le marché intérieur de l’énergie s[e fû]t considérablement développé, la réglementation sur les questions transfrontalières présent[ait] encore des lacunes » et que « [l]a pratique […] qui exige[ait] généralement l’assentiment de 27 régulateurs et de plus de 30 gestionnaires de réseau de transport pour parvenir à un accord, ne donn[ait] pas de résultats satisfaisants » et « ne s’[étai]t pas avérée capable de conduire à de réelles décisions sur les questions difficiles, décisions devenues indispensables ». Pour ces motifs, il avait été décidé de créer « [l]’[a]gence [qui] compléterait, à l’échelon européen, les tâches de régulation effectuées au niveau national par les autorités de régulation », notamment grâce à l’attribution de « [p]ouvoirs de décision individuelle ». Lesdits pouvoirs devaient être attribués à l’ACER « [e]n vue de gérer des questions transnationales spécifiques », notamment « de décider du régime réglementaire applicable aux infrastructures sur le territoire de plus d’un État membre », comme cela avait finalement été prévu à l’article 8 du règlement no 713/2009.

45      En outre, il ressort de l’exposé des motifs de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil instituant une agence de l’Union européenne pour la coopération des régulateurs de l’énergie (COM/2016/0863 final) que les dispositions contenues dans celle-ci devaient notamment permettre d'« [a]dapter la surveillance réglementaire aux marchés régionaux ». En particulier, il ne semblait plus approprié aux nouvelles réalités de ces marchés que « [t]outes les principales décisions réglementaires so[ie]nt […] prises par les autorités de régulation nationales, même dans les cas où une solution régionale commune [étai]t nécessaire » et que « [l]a surveillance réglementaire rest[ât] fragmentée, ce qui entraîn[ait] un risque de décisions divergentes et des retards inutiles ». Pour ces motifs, il était considéré que « [l]e renforcement des pouvoirs de l’ACER pour ces questions transfrontalières, qui requ[é]r[ai]ent une décision coordonnée au niveau régional, contribuerait à une prise de décision plus efficace et plus rapide sur les questions transfrontalières », étant observé que « [l]es régulateurs nationaux, se prononçant au sein de l’ACER sur ces questions par un vote à la majorité, resteraient pleinement impliqués dans ce processus ». L’attribution à l’ACER de « compétences supplémentaires limitées » était jugée conforme au principe de subsidiarité, dans la mesure où elle intervenait « dans les domaines où la fragmentation des décisions nationales concernant des questions de portée transfrontalière aboutirait à des problèmes ou à des incohérences pour le marché intérieur ». En outre, elle était jugée conforme au principe de proportionnalité, dans la mesure où « [l]’ACER d[evai]t se voir confier des missions supplémentaires, en particulier dans l’exploitation régionale du réseau énergétique, tout en maintenant le rôle central des [ARN] en matière de régulation énergétique ». C’est dans ce cadre que la proposition de règlement, en son « chapitre [I,] défini[ssai]t […] un certain nombre de nouvelles tâches pour l’ACER, […] concernant la surveillance des opérateurs du marché de l’électricité désignés et liées à l’approbation de méthodes et propositions relatives à l’adéquation de la production et à la préparation aux risques ». Ces nouvelles tâches de l’ACER ont notamment été formalisées à l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942.

46      Il découle de l’exposé des motifs de ces propositions de règlement une volonté claire du législateur de l’Union de rendre la prise de décisions sur des questions transfrontalières, difficiles mais indispensables, plus efficace et plus rapide, et ce par un renforcement des pouvoirs de décision individuelle de l’ACER qui soit conciliable avec le maintien du rôle central des ARN en matière de régulation énergétique.

47      Cela correspond également à certains des objectifs poursuivis par les règlements nos 713/2009 et 2019/942. En effet, comme cela est rappelé au considérant 10 du règlement 2019/942, antérieurement au considérant 5 du règlement no 713/2009, les États membres doivent coopérer étroitement et supprimer les obstacles aux échanges transfrontaliers d’électricité et de gaz naturel en vue de réaliser les objectifs de la politique énergétique de l’Union et un organe central indépendant, à savoir l’ACER, a été institué pour combler le vide réglementaire au niveau de l’Union et pour contribuer au fonctionnement efficace des marchés intérieurs de l’électricité et du gaz naturel. Ainsi, comme cela est indiqué au considérant 11 du règlement 2019/942, antérieurement au considérant 6 du règlement no 713/2009, l’ACER doit veiller à ce que les fonctions réglementaires remplies par les ARN soient correctement coordonnées et, si nécessaire, complétées au niveau de l’Union. Elle dispose ainsi, comme cela est précisé aux considérants 33 et 34 du règlement 2019/942, antérieurement aux considérants 18 et 19 du règlement no 713/2009, de pouvoirs de décision propres pour lui permettre de remplir ses fonctions réglementaires de façon efficace, transparente, motivée et, surtout, indépendante à l’égard des producteurs d’électricité et de gaz, des GRT et des consommateurs. Elle doit exercer ces pouvoirs en veillant à la conformité de ces décisions au droit de l’Union relatif à l’énergie, sous le contrôle de la commission de recours, qui fait partie de l’ACER tout en étant indépendante au sein de cette dernière, et de la Cour de justice de l’Union européenne.

48      Il s’ensuit que l’ACER a notamment été dotée de fonctions réglementaires et de pouvoirs décisionnels propres, qu’elle exerce en toute indépendance et sous sa propre responsabilité, afin de pouvoir suppléer les ARN lorsque leur coopération volontaire ne leur permet pas d’arrêter des décisions individuelles sur des questions ou sur des problèmes particuliers relevant de leur compétence réglementaire. Comme cela est indiqué aux considérants 11 et 45 du règlement 2019/942, antérieurement aux considérants 6 et 29 du règlement no 713/2009, l’ACER ne devient ainsi compétente, pour statuer, en toute indépendance et sous sa propre responsabilité, sur des questions de réglementation ou des problèmes importants pour le fonctionnement efficace des marchés intérieurs de l’électricité et du gaz naturel, que lorsque et dans la mesure où, conformément aux principes de subsidiarité et de proportionnalité exposés à l’article 5 TUE, les objectifs poursuivis par l’Union n’ont pas pu être atteints de manière suffisante par la coopération des États membres concernés, faute d’un accord global trouvé entre leurs ARN sur des questions de réglementation ou des problèmes relevant initialement de leur compétence. Cela vaut a fortiori lorsque les ARN s’accordent elles-mêmes à considérer qu’il est plus approprié que l’ACER statue elle-même sur ces questions ou sur ces problèmes.

49      Ainsi, la logique du système qui sous-tend l’article 6 du règlement 2019/942, antérieurement l’article 8 du règlement no 713/2009, et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 est que, lorsque les ARN, au niveau des États membres, estiment plus approprié que l’ACER statue elle-même par une décision individuelle sur des questions de réglementation ou sur un problème relevant de leur compétence, qui sont importants pour le fonctionnement efficace des marchés intérieurs de l’électricité, tels que l’élaboration de la méthodologie aFRR prévue à l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2017/2195, la compétence pour l’adoption de cette décision revient à l’ACER, sans qu’il soit prévu qu’une part de cette compétence puisse être retenue, au niveau national, par les ARN, par exemple pour certaines des questions de réglementation ou pour certains des aspects du problème en cause sur lesquels elles seraient parvenues à un accord.

50      Par ailleurs, dans la mesure où l’ACER exerce sa compétence en toute indépendance et sous sa propre responsabilité, c’est à bon droit que la commission de recours indique, au paragraphe 110 de la décision attaquée, qu’elle ne saurait être liée par la position prise par les ARN compétentes sur certaines des questions de réglementation ou sur certains des aspects des problèmes qui leur étaient soumis et sur lesquels elles étaient parvenues à se mettre d’accord, notamment lorsqu’elle considère que cette position n’est pas conforme au droit de l’Union relatif à l’énergie. Au demeurant, les requérantes ne contestent pas, dans le cadre du présent recours, cette appréciation de la commission de recours.

51      En outre, dans la mesure où des pouvoirs de décision propres ont été attribués à l’ACER pour lui permettre de remplir ses fonctions réglementaires de façon efficace, l’article 6 du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 doivent être compris en ce sens qu’ils autorisent l’ACER à modifier les propositions des GRT afin d’assurer leur conformité au droit de l’Union relatif à l’énergie, avant leur approbation. Ce pouvoir est indispensable pour que l’ACER puisse remplir efficacement ses fonctions réglementaires, puisque, comme la commission de recours l’a souligné à bon droit au paragraphe 125 de la décision attaquée, aucune disposition du règlement 2019/942 ou du règlement 2017/2195 ne prévoit que l’ACER puisse demander aux GRT de modifier leur proposition, avant de l’approuver.

52      Enfin, il y a lieu de relever que, dans le règlement 2019/942, les pouvoirs de décision propres attribués à l’ACER ont été conciliés avec le maintien du rôle central reconnu aux ARN en matière de régulation énergétique puisque, conformément à l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, dudit règlement, l’ACER, en la personne de son directeur, n’arrête ou n’adopte ses décisions qu’après avoir reçu ou obtenu l’avis favorable du conseil des régulateurs dans lequel toutes les ARN sont représentées au côté de la Commission, chaque membre dudit conseil disposant d’une voix et ce conseil statuant à la majorité des deux tiers, comme cela est prévu à l’article 21 et à l’article 22, paragraphe 1, de ce même règlement.

53      Ainsi, la finalité de l’article 6 du règlement 2019/942 et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 de même que le contexte dans lequel ces dispositions s’inscrivent confirment que, en cas de demande conjointe des ARN portant sur des questions de réglementation ou des propositions soumises par les GRT, l’ACER est habilitée à statuer ou à décider elle-même sur ces questions ou ces propositions, sans préjudice du maintien du rôle central reconnu aux ARN par le biais de l’avis conforme du conseil des régulateurs et sans que sa compétence se limite aux seuls aspects particuliers sur lesquels le désaccord entre lesdites ARN se serait cristallisé.

54      Les arguments des requérantes tirés de ce que le règlement 2017/2195 serait un acte d’exécution, de ce que la commission de recours aurait erronément désigné le processus ayant abouti à l’adoption de la décision attaquée comme étant « ascendant » ou n’aurait pas respecté ce que prévoyait l’article 5, paragraphe 2, sous b), du règlement 2019/942 doivent être écartés comme étant, en tout état de cause, inopérants, dans la mesure où ils ne sont pas de nature à modifier le fait que, en l’espèce, l’article 6 du règlement 2019/942 et l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 fournissaient à la commission de recours une base juridique légale suffisante pour adopter définitivement la méthodologie aFRR, telle que figurant dans l’annexe I de la décision attaquée.

55      Troisièmement, le bien-fondé de l’interprétation de l’article 6 du règlement 2019/942 et de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 exposée au point 53 ci-dessus est confirmée par l’application qui a été faite de ces dispositions au cas d’espèce.

56      En premier lieu, il ressort de l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2017/2195 que la méthodologie aFRR est conçue comme un ensemble réglementaire indissociable, devant donner lieu à une approbation unique de la part des autorités de régulation compétentes.

57      En second lieu et pour autant que les requérantes se réfèrent au contenu de la note informelle des ARN, il y a lieu d’observer que cette dernière constitue un document, émis par les ARN, qui n’est pas juridiquement contraignant pour l’ACER et qui n’est pas susceptible d’influer sur la détermination de la portée de l’article 6 du règlement 2019/942 ou de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195, ni sur celle des compétences ou des devoirs de l’ACER qui en découlent. En tout état de cause, le contenu de ce document n’atteste pas l’allégation des requérantes selon laquelle la note informelle des ARN a concrètement distingué les questions réglementaires ou les aspects de la méthodologie aFRR sur lesquels toutes les ARN étaient parvenues à se mettre d’accord, en particulier sur le fait que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, mais non la gestion de capacité, étaient des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et le choix d’un consortium pour exercer lesdites fonctions était une option compatible avec l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, de ceux sur lesquels elles n’avaient pas trouvé un tel accord et qu’elles avaient, en tant que tels, renvoyés à l’ACER pour qu’elle statue.

58      En effet, dans la note informelle des ARN, ces dernières ont, après avoir rappelé que la capacité de transport entre zones disponible devait être prise en compte par la fonction d’optimisation de l’activation, constaté, de manière non contraignante pour l’ACER, leur accord sur le fait que la proposition initiale d’aFRRIF devait prévoir que le calcul de la capacité de transport entre zones disponible soit effectué, par tous les GRT, de manière centralisée et coordonnée pour toutes les plateformes européennes d’équilibrage et, par ailleurs, devait être reformulée afin de préciser, sans ambiguïté, s’ils souhaitaient charger une entité unique ou plusieurs entités d’exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, étant donné qu’un consortium de GRT, dépourvu de personnalité juridique, équivalait à une structure à entités multiples. Ces observations des ARN attestent que leur accord portait moins, en l’espèce, sur une validation des articles de la proposition initiale d’aFRRIF portant sur le calcul de la capacité de transport entre zones disponible et sur la désignation des entités chargées des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR que sur la nécessité, pour les GRT, de faire évoluer les articles relatifs à ces questions figurant dans la proposition initiale d’aFRRIF.

59      C’est donc à tort que les requérantes reprochent à l’ACER d’avoir méconnu le fait que la note informelle des ARN attestait que ces dernières étaient d’accord sur le fait que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, mais non la gestion de capacité, étaient des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et que le choix d’un consortium pour exercer lesdites fonctions était une option compatible avec l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195.

60      Eu égard à l’ensemble des appréciations qui précèdent, il convient de constater que la commission de recours n’a pas commis d’erreur de droit en ce que, dans la décision attaquée, elle n’a pas constaté que, en adoptant la décision 02/2020, l’ACER avait dépassé les limites de sa compétence en statuant sur des points de la méthodologie aFRR qui avaient été mentionnés dans la note informelle des ARN comme ayant fait l’objet d’un accord entre elles.

61      Par conséquent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen, comme étant non fondée. Dès lors que l’examen de cette dernière a permis de constater que l’ACER avait, en tout état de cause, compétence pour statuer sur des points de la méthodologie aFRR qui auraient été mentionnés dans la note informelle des ARN comme ayant fait l’objet d’un accord entre elles, il devient sans importance de savoir si, en adoptant la décision 02/2020, l’ACER s’est effectivement écartée de la position commune des ARN, telle qu’elle ressortait de leur demande conjointe. Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen, comme étant inopérante, de sorte que ce dernier moyen doit être intégralement rejeté.

 Sur le deuxième moyen, pris d’erreurs de droit commises par la commission de recours en ne constatant pas que l’ACER avait violé l’article 21 du règlement 2017/2195

62      Le deuxième moyen se subdivise en huit branches, qu’il convient d’examiner successivement, le cas échéant en les regroupant.

–       Sur la première branche du deuxième moyen, tirée de ce que la commission de recours a conclu à tort que les GRT s’étaient imposés à eux-mêmes de recourir à une entité unique

63      Les requérantes font grief à la commission de recours d’avoir conclu à tort, au paragraphe 161 de la décision attaquée, que les GRT s’étaient imposés à eux-mêmes de recourir à une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Ladite commission n’aurait pas tenu compte du fait que la proposition de désigner un GRT unique, figurant dans la troisième proposition des GRT, résultait de l’opposition constante de l’ACER, dans le cadre du processus décisionnel, à la désignation d’un consortium de GRT et de sa préférence pour celle d’une entité juridique unique, sous la forme d’un GRT ou d’une société créée par les GRT. L’ACER aurait ainsi illégalement imposé sa position aux GRT, sous couvert du caractère prétendument « ascendant » du processus réglementaire prévu par le règlement 2019/942. Le fait que certaines des ARN concernées n’aient pas contesté la décision attaquée à cet égard ne priverait pas les autres ARN de leur droit de le faire.

64      L’ACER conteste les arguments des requérantes et conclut au rejet de la première branche du deuxième moyen.

65      Premièrement, la première branche du deuxième moyen soulève, en substance, la question de savoir si l’ACER pouvait, voire devait, tenir compte des propositions successives d’aFRRIF que les GRT avaient déposées devant elle, après qu’elle avait été appelée à statuer sur la proposition initiale d’aFRRIF sur demande conjointe des ARN.

66      En l’espèce, il ressort du document, avec corrections apparentes, figurant en annexe A.6.1 à la requête ainsi que du paragraphe 161 de la décision attaquée que l’ACER a retenu la proposition initiale d’aFRRIF comme étant le document de base sur lequel elle était appelée à statuer, puis qu’elle a finalement tenu compte de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée pour établir l’aFRRIF litigieux, dont le projet final a été communiqué aux GRT le 20 décembre 2019 (voir point 12 ci-dessus).

67      À cet égard, il n’existe pas d’obstacle juridique à ce que, d’une part, au cours de la phase de consultation à laquelle l’ACER doit procéder, conformément à l’article 6, paragraphe 11, du règlement 2019/942, les GRT déposent successivement devant elle une ou plusieurs versions modifiées de leur proposition initialement adressée aux ARN et, d’autre part, au titre de ladite consultation, l’ACER tienne compte des modifications successives ainsi apportées par les GRT.

68      En l’espèce, il y a lieu de constater que le dépôt des propositions successives d’aFRRIF est intervenu de la propre initiative des GRT, afin de tenter de répondre aux observations de l’ACER. Dans une telle circonstance, il est conforme à l’esprit de la réglementation applicable et au principe de coopération loyale, qui doit prévaloir dans le cadre de la consultation que l’ACER est tenue de mener, conformément à l’article 6, paragraphe 11, du règlement 2019/942, que cette dernière ait tenu compte de la dernière proposition d’aFRRIF déposée par les GRT pour établir la version finale de son projet de décision de méthodologie aFRR, tel qu’il a été communiqué aux GRT le 20 décembre 2019.

69      Or, ainsi que les requérantes le reconnaissent elles-mêmes, dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, finalement prise en compte par l’ACER, les GRT avaient proposé de désigner un GRT unique, et non une structure ayant la forme d’un consortium, pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR.

70      Partant, c’est à juste titre que la commission de recours, dans la décision attaquée, a constaté que l’ACER, dans la décision 02/2020, n’avait pas imposé une structure avec une entité unique et s’était contentée « d’aligner étroitement l[a méthodologie] aFRR sur la troisième proposition [d’aFRRIF modifiée] » pour refléter « ce que les GRT demandaient ».

71      Deuxièmement et en tout état de cause, contrairement à ce que font valoir les requérantes dans leurs écritures et ainsi que la commission de recours l’a constaté au paragraphe 175 de la décision attaquée, il ressort de la décision 02/2020 que l’ACER n’avait pas exclu que l’entité désignée par les GRT pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR prît la forme d’un consortium. En revanche, à l’instar des ARN dans leur note informelle, elle a toujours considéré que, si une telle forme devait être retenue par les GRT, celle-ci ne conférant pas la personnalité juridique à l’entité en cause, elle ne pourrait pas être considérée comme étant une entité unique.

72      Il convient de constater qu’un consortium est un groupement dépourvu de personnalité morale. En l’absence de personnalité juridique conférée à cette entité, ce sont les GRT qui continuent, au regard de leur personnalité juridique, d’assurer l’exploitation de la plateforme aFRR.

73      Dans ces conditions, c’est à bon droit que, tenant compte du fait que la forme du consortium devait être considérée comme une structure à entités multiples, correspondant aux GRT qui en étaient membres, la commission de recours, à l’instar des ARN et de l’ACER, a estimé que les GRT devaient démontrer, dans leur proposition d’aFRRIF, que les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 étaient respectées.

74      Partant, l’argument, réitéré à de multiples reprises par les requérantes, selon lequel l’ACER a refusé que l’entité désignée par les GRT prît la forme d’un consortium et imposé sa préférence pour une structure avec une entité unique, à savoir un seul GRT ou une société détenue par les GRT, manque en fait et doit, en tout état de cause, être rejeté comme étant non fondé.

75      Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la première branche du deuxième moyen.

–       Sur la deuxième branche du deuxième moyen, tirée d’une erreur de droit commise par la commission de recours en ne constatant pas la violation, par l’ACER, de l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195

76      Les requérantes font grief à la commission de recours d’avoir commis une erreur de droit en ne constatant pas, dans la décision attaquée, la violation de l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195 commise par l’ACER dans la décision 02/2020 en refusant la désignation, par les GRT, d’un consortium de GRT, au motif que ladite disposition n’avait prévu que deux options, pour une entité unique, à savoir soit un GRT, soit une société créée par les GRT, et non un consortium. Rien n’aurait justifié que, au considérant 69 de la décision 02/2020, l’ACER prétende que l’entité visée à l’article 21 du règlement 2017/2195 devait être pourvue d’une capacité juridique et ne pouvait donc être un consortium, qui en serait dépourvu.

77      L’ACER conteste les arguments des requérantes et conclut au rejet de la deuxième branche du deuxième moyen.

78      Ainsi que cela a déjà été constaté au titre de l’examen de la première branche du deuxième moyen, au point 71 ci-dessus, l’ACER n’a jamais exclu la possibilité que l’entité désignée par les GRT prît la forme d’un consortium. En revanche, elle a constamment indiqué que, si telle devait être la forme retenue par les GRT, il s’agirait d’entités multiples, compte tenu de l’absence de personnalité juridique du consortium, et les GRT devraient démontrer, dans leur proposition d’aFRRIF, que les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 seraient respectées.

79      À ce titre, il convient de rappeler que, conformément à l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux, tel qu’il est cité au point 14 ci-dessus, dans un premier temps, les GRT étaient tenus de désigner une entité unique, à savoir un seul GRT ou une société détenue par les GRT, chargée de la fonction d’optimisation de l’activation et de la fonction de règlement des GRT-GRT. Dans un second temps, ils devaient, dans le respect des dispositions de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, établir une proposition de désignation de l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité et, à cet égard, préciser si les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR seraient exécutées par une entité unique ou par des entités multiples, qui devraient se coordonner.

80      Partant, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ne ressort pas de l’aFRRIF litigieux que l’ACER a rejeté l’option du consortium.

81      En outre, ainsi que le fait valoir l’ACER, elle n’a pas ajouté une condition supplémentaire, à savoir la « capacité juridique », pour exclure prétendument l’option du consortium, mais elle a uniquement invoqué l’absence de capacité juridique du consortium pour justifier que ce dernier ne soit pas considéré comme étant une entité unique, mais des entités multiples.

82      Ce constat de l’absence de capacité juridique du consortium a été explicitement relevé par les ARN dans leur note informelle. Ainsi, sous le titre e), intitulé « Entités (article 12 de l’aFRRIF) », du chapitre IV, intitulé « Questions sur lesquelles les [ARN] sont d’accord », celles-ci ont indiqué qu’elles n’étaient pas toutes en faveur de la proposition des GRT quant à la désignation de l’entité ou des entités chargées des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, en vertu de l’article 12 de l’aFRRIF, et qu’elles demandaient que ladite proposition soit modifiée, en tenant compte du fait que, au regard des deux options visées à l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, si les GRT prévoyaient que la plateforme aFRR soit exploitée par une entité qu’ils avaient créée, cette entité devait être juridiquement distincte d’eux et jouir d’une capacité juridique entière. Or, selon les ARN, un consortium ne disposait pas d’une telle capacité, dans la mesure où il ne disposait pas de la personnalité juridique, de sorte qu’il ne constituait pas une entité juridiquement distincte des GRT. Les ARN avaient néanmoins précisé que cela ne permettait pas d’exclure qu’un consortium puisse exploiter une plateforme, mais que, dans ce cas, les GRT faisant partie du consortium étaient entièrement responsables de cette exploitation et que, en présence d’une structure à plusieurs entités, il convenait de veiller à ce que les conditions visées à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 fussent respectées.

83      L’argument des requérantes selon lequel l’ACER a ajouté la condition que l’entité disposât d’une capacité juridique propre doit donc être écarté.

84      En tout état de cause, il y a lieu de rappeler que, en vertu des dispositions de l’article 2, point 35, de la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil, du 5 juin 2019, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE (JO 2019, L 158, p. 125), un GRT se définit comme « une personne physique ou morale qui est responsable de l’exploitation, de la maintenance et, si nécessaire, du développement du réseau de transport dans une zone donnée et, le cas échéant, de ses interconnexions avec d’autres réseaux, et chargée de garantir la capacité à long terme du réseau à satisfaire une demande raisonnable de transport d’électricité ». En vertu de l’article 46, paragraphe 3, de la directive 2019/944, les GRT sont organisés sous l’une des formes juridiques énoncées à l’annexe I de la directive (UE) 2017/1132 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, relative à certains aspects du droit des sociétés (JO 2017, L 169, p. 46). Or, ladite annexe liste les différentes formes de sociétés anonymes, au sein des États membres, qui disposent toutes de la personnalité juridique, auxquelles renvoie notamment son article 2, paragraphes 1 et 2, sur le champ d’application de la section 1, intitulée « Constitution de la société anonyme », du chapitre II, intitulé « Constitution et nullité de la société et validité de ses engagements », du titre I, intitulé « Dispositions générales et constitution et fonctionnement des sociétés de capitaux ». Partant, les GRT, qu’il s’agisse d’une personne physique ou d’une personne morale, disposent de la personnalité juridique et, ainsi, de la capacité juridique qui doit leur permettre de réaliser, au regard de leurs pouvoirs et de leurs droits, les tâches qui leur sont confiées en toute indépendance, conformément aux dispositions de l’article 47 de la directive 2019/944.

85      Dans ces conditions, dans la mesure où, en vertu de la première option, prévue à l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, la plateforme est exploitée par les GRT et, partant, par des personnes juridiques disposant d’une capacité juridique, il ne devrait pas en aller autrement de l’entité que les GRT peuvent créer, en vertu de la seconde option prévue par ce même article.

86      Partant, au regard des appréciations déjà effectuées au point 72 ci-dessus, c’est sans commettre d’erreur de droit que la commission de recours, à l’instar de l’ACER et des ARN, a considéré que, au titre de la proposition des GRT de désigner une entité prenant la forme d’un consortium, ce dernier ne disposant pas de la personnalité juridique et, partant, de la capacité juridique, il convenait de considérer que ce n’était pas le consortium, mais les GRT le composant, qui étaient chargés de l’exploitation de la plateforme aFRR, de sorte que les GRT devaient démontrer que les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 étaient respectées.

87      Au vu des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la deuxième branche du deuxième moyen.

–       Sur la troisième branche du deuxième moyen, tirée d’une erreur de droit commise par la commission de recours en refusant de constater la violation par l’ACER de l’article 21 du règlement 2017/2195, au motif que l’entité unique visée à l’article 12, paragraphe 2, de la méthodologie aFRR était provisoire

88      Les requérantes soutiennent que la commission de recours semble avoir considéré, dans la décision attaquée, que la violation de l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, consistant à avoir imposé la désignation d’une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, imputée à l’ACER n’était que provisoire, dans la mesure où les GRT auraient toujours eu la possibilité, en application de l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux, de proposer une modification de ce dernier afin de désigner plusieurs entités, telles qu’un consortium de GRT. En tout état de cause, une telle considération aurait été sans fondement, car l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux n’aurait pas prévu que l’entité unique désignée pour exécuter la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT puisse être convertie en plusieurs entités. En tout état de cause, une telle conversion n’aurait pas fait disparaître la violation de l’article 21 du règlement 2017/2195 commise par l’ACER dans la décision 02/2020 et aurait été purement théorique puisque l’ACER aurait toujours considéré que l’entité visée à l’article 21 du règlement 2017/2195 ne pouvait être qu’une entité juridique unique, et non un consortium.

89      L’ACER conteste les arguments des requérantes et conclut au rejet de la troisième branche du deuxième moyen.

90      Les requérantes soutiennent, en substance, que, en confirmant la décision 02/2020 d’imposer une structure avec une entité unique, fût-elle provisoire, pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, la commission de recours a violé l’article 21 du règlement 2017/2195, et ce d’autant plus qu’une éventuelle conversion de cette entité unique en entités multiples était théorique, puisque l’ACER avait exigé que l’entité désignée soit une personne juridique, ce qui aurait écarté toute possibilité de désigner une entité prenant la forme d’un consortium.

91      À cet égard, il importe de rappeler que, conformément à l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, la plateforme aFRR devait être exploitée soit par les GRT eux-mêmes, soit par une entité créée par ces derniers. En outre, la proposition de méthodologie que les GRT élaborent, en vertu de l’article 21, paragraphe 1, dudit règlement, comprend notamment, selon l’article 21, paragraphe 3, sous e), de ce règlement, la ou les entités proposées pour assumer les fonctions définies dans la proposition et, lorsque les GRT proposent de désigner plusieurs entités, la proposition doit démontrer et garantir le respect de plusieurs exigences supplémentaires.

92      En l’espèce, ainsi que l’ACER l’a relevé au considérant 69 de la décision 02/2020, dans la proposition initiale d’aFRRIF, les GRT avaient prévu de désigner un consortium pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Néanmoins, aux considérants 70 et 71 de ladite décision, elle a constaté que, alors qu’un consortium ne disposait pas de la personnalité juridique et que, par conséquent, les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR seraient exécutées par les multiples GRT membres du consortium, la proposition aurait dû démontrer que les exigences supplémentaires prévues, dans un tel cas, à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 étaient respectées. Or, la proposition ne contenait pas une telle démonstration. Au considérant 81 de la décision 02/2020, l’ACER a relevé que, au regard des termes de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, les GRT n’avaient proposé ni une structure avec des entités multiples, respectant les dispositions de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, ni une structure avec une entité unique chargée d’exécuter toutes les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Partant, au même considérant, elle a décidé d’accepter partiellement la proposition des GRT, en ce qu’elle prévoyait que la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT seraient exécutées par une entité unique. En revanche, s’agissant de la fonction de gestion de capacité, au sujet de laquelle les GRT avaient proposé qu’elle puisse être exécutée par une autre entité, l’ACER a relevé qu’il n’avait pas été démontré que, dans un tel cas, les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 seraient respectées. C’est dans ces circonstances que, au considérant 82 de la décision 02/2020, l’ACER ayant constaté que la désignation de l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité n’était pas encore finalisée à la date de l’adoption de ladite décision et que celle-ci pouvait être reportée afin de permettre aux GRT de prendre la décision la plus efficiente à cet égard, elle a décidé que les GRT soumettraient ultérieurement une proposition de modification de la méthodologie aFRR dans laquelle ils désigneraient l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité, dans le respect des exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195.

93      Ainsi que le fait valoir à juste titre l’ACER, ces motifs de la décision 02/2020 reprennent la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, qui prévoyait de désigner, dans un premier temps, un seul GRT ou une société détenue par des GRT pour la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT et, à un stade ultérieur, une même entité ou une entité différente pour exécuter la fonction de gestion de capacité.

94      Dans la mesure où, ainsi que cela a été constaté dans le cadre de l’examen des première et deuxième branches du deuxième moyen, c’est à tort que les requérantes soutiennent que l’ACER a refusé le choix des GRT de recourir à une structure prenant la forme d’un consortium et leur a imposé une structure avec une entité unique pour exécuter la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT, c’est également à tort qu’elles reprochent à l’ACER d’avoir violé l’article 21 du règlement 2017/2195 en leur refusant un tel choix, ne fût-ce que de manière temporaire.

95      Au regard des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la troisième branche du deuxième moyen.

–       Sur la quatrième branche du deuxième moyen, tirée d’une erreur de droit, commise par la commission de recours, en constatant à tort que l’inclusion de la fonction de gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR n’avait pas été imposée aux GRT par l’ACER, mais découlait directement de l’application du règlement 2017/2195

96      Les requérantes font grief à la commission de recours d’avoir considéré, au paragraphe 187 de la décision attaquée, que l’ACER n’avait pas imposé aux GRT d’inclure la fonction de gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, puisque cela découlait directement de l’application du règlement 2017/2195.

97      Premièrement, les requérantes soutiennent que l’affirmation de la commission de recours, au paragraphe 179 de la décision attaquée, selon laquelle la fonction de gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR ne reposait sur aucune disposition légale. L’insertion des mots « au moins », à l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, aurait eu pour objet de préciser que d’autres fonctions que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT pouvaient être requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, mais pas que ces fonctions supplémentaires pouvaient inclure la gestion de capacité. L’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195 aurait prévu que les GRT définissent, dans leur proposition, les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, de sorte que l’ACER n’aurait pas été autorisée à leur imposer, comme telles, d’autres fonctions que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, qui étaient les seules à être expressément visées à l’article 21, paragraphe 2, dudit règlement. Partant, la commission de recours aurait commis une erreur de droit, au paragraphe 188 de la décision attaquée, en considérant, en substance, que l’ACER pouvait inclure la gestion de capacité dans les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au même titre que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, en s’appuyant sur l’article 21, paragraphe 2, et paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195.

98      Deuxièmement, les requérantes estiment que, contrairement à l’affirmation de la commission de recours aux paragraphes 182, 188, 191 et 192 de la décision attaquée, le fait que l’article 37 du règlement 2017/2195 obligeait les GRT à mettre à jour en continu la disponibilité de la capacité de transport entre zones ne permettait pas de considérer la gestion de capacité comme étant une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21 dudit règlement. En effet, le règlement 2017/2195 aurait établi une distinction entre les fonctions spécifiques requises pour l’exploitation des plateformes européennes d’équilibrage et les composantes ou les processus d’équilibrage du système électrique. L’affirmation contraire de l’ACER, au considérant 54 de la décision 02/2020, n’aurait été fondée sur aucune base juridique.

99      Troisièmement, les requérantes arguent qu’aucune autre raison, avancée par la commission de recours pour justifier l’inclusion par l’ACER de la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, ne peut être retenue. Tout d’abord, dès lors que le module informatique de gestion de la capacité proposé par les GRT aurait été centralisé, à un niveau multiplateforme, la commission de recours n’aurait pas pu, au paragraphe 192 de la décision attaquée, se fonder sur le simple fait que la fonction de gestion de capacité était requise sur le plan technique pour la qualifier de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR. En outre, la commission de recours n’aurait pas pu, au considérant 73 de la décision 02/2020, se référer à des critères, fondés sur l’efficacité de la prise en compte de la fonction de gestion de capacité pour l’exploitation de la plateforme aFRR, qu’elle n’aurait pas clairement explicités. Ensuite, contrairement à ce qu’a considéré la commission de recours au paragraphe 198 de la décision attaquée, le fait que l’exécution de la fonction d’optimisation de l’activation, qui était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, requérait une mise à jour en continu de la disponibilité de la capacité de transport entre zones n’aurait pas suffi à justifier que la gestion de capacité soit elle-même qualifiée de fonction requise pour cette exploitation, dès lors que le module informatique de gestion centralisée de la capacité opérait à un niveau multiplateforme et ne pouvait donc pas être considéré comme étant une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, comme telle soumise au respect de l’article 21 du règlement 2017/2195. En outre, dans la mesure où la plateforme aFRR devait fonctionner, durant une période transitoire de deux ans, avant que la fonction de gestion de capacité ne soit introduite sous forme d’un module informatique de gestion centralisée de la capacité, la commission de recours aurait conclu à tort, au paragraphe 199 de la décision attaquée, que cela ne remettait pas en cause la qualification de la gestion de capacité de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, soumise au respect de l’article 21 du règlement 2017/2195. Enfin, dans la mesure où le règlement 2017/2195 aurait été un acte d’exécution, ni l’ACER ni la commission de recours n’auraient disposé de la liberté d’en étendre le champ d’application, en incluant la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, comme elles l’auraient fait dans la décision 02/2020 et aux paragraphes 189 et 190 de la décision attaquée, en se référant aux objectifs listés à l’article 3, paragraphe 1, sous c), et au considérant 5 dudit règlement. En tout état de cause, la commission de recours n’aurait pas expliqué pourquoi le module informatique de gestion centralisée de la capacité, proposé par les GRT, ne suffisait pas à atteindre lesdits objectifs et à répondre aux exigences de l’article 37 du règlement 2017/2195, mentionnées au paragraphe 182 de la décision attaquée.

100    L’ACER conteste les arguments des requérantes et conclut au rejet de la quatrième branche du deuxième moyen.

101    Afin de statuer sur ladite branche, il convient, en premier lieu, d’examiner si la gestion de capacité constituait une des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens du règlement 2017/2195. En effet, cette qualification se révèle déterminante pour apprécier si les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), i) à iii), du règlement 2017/2195 devaient être respectées, dans l’hypothèse où les GRT proposeraient de désigner plusieurs entités pour assumer ces différentes fonctions. Ce n’est qu’en cas de réponse affirmative à cette première question qu’il conviendrait, en second lieu, d’examiner le grief des requérantes pris de ce que, en l’espèce, la commission de recours a considéré à tort que l’ACER n’avait pas imposé aux GRT de prendre en compte la gestion de capacité en tant que fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR.

102    S’agissant de la question de savoir si le règlement 2017/2195 peut être interprété en ce sens que la gestion de capacité est une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes dudit règlement, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont il fait partie.

103    Aux fins d’une interprétation littérale, il importe de relever que la notion de « fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme [aFRR] » n’est pas définie dans le texte du règlement 2017/2195, notamment à l’article 2 dudit règlement. Elle est uniquement employée à l’article 21 de ce même règlement.

104    Conformément à l’article 21, paragraphe 1, du règlement 2017/2195, il incombe aux GRT d’élaborer la proposition de méthodologie aFRR. À cet égard, l’article 21, paragraphe 3, sous a) et c), de ce même règlement précise que ladite proposition doit comprendre, au moins, « la conception de haut niveau de la plateforme européenne » et « la définition des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme [aFRR] ». Cette dernière disposition doit être lue conjointement avec l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, qui énonce notamment que « [l]a plateforme [aFRR] exploitée par les GRT ou par une entité créée par les GRT eux-mêmes est fondée sur des principes de gouvernance et des processus opérationnels communs et comporte au moins la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT ».

105    Il ressort des dispositions mentionnées au point 104 ci-dessus que la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT doivent implicitement être considérées comme étant des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR qui doivent, comme telles, être définies dans la proposition de méthodologie aFRR soumises par les GRT. Toutefois, dans la mesure où l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195 énonce que la plateforme aFRR comporte « au moins la fonction d’optimisation de l’activation et la fonction de règlement des GRT-GRT », cette disposition n’exclut pas que, dans le cadre de la conception d’une plateforme aFRR de « haut niveau », une fonction, autre que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, telle que la gestion de capacité, soit également considérée comme étant requise pour l’exploitation de cette plateforme et, comme telle, définie dans la proposition de méthodologie aFRR des GRT, conformément à l’article 21, paragraphe 2, du règlement 2017/2195, en particulier si l’ajout d’une telle fonction apparaît comme étant nécessaire pour assurer une conception de haut niveau de cette plateforme répondant à des principes de gouvernance et à des processus opérationnels communs.

106    C’est donc essentiellement à partir des objectifs poursuivis par le règlement 2017/2195 et du contexte de l’espèce qu’il convient d’identifier si la gestion de capacité devait, au même titre que l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, être considérée comme étant une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR.

107    Aux fins de savoir si les objectifs poursuivis par le règlement 2017/2195 permettent de considérer la gestion de capacité comme étant une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, il importe de rappeler que, comme cela est souligné au considérant 1 dudit règlement, un marché intérieur de l’énergie pleinement fonctionnel et interconnecté est crucial pour maintenir la sécurité d’approvisionnement énergétique, renforcer la concurrence et garantir des prix de l’énergie abordables pour tous les consommateurs. L’article 3, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/2195 indique, en ce sens, que ce même règlement vise notamment à intégrer les marchés de l’équilibrage et à promouvoir les possibilités d’échanges de services d’équilibrage tout en contribuant à la sécurité d’exploitation. Comme cela est indiqué au considérant 10 dudit règlement, la mise en place de plateformes européennes communes pour la mise en œuvre du processus de compensation des déséquilibres et la réalisation des conditions d’échange d’énergie d’équilibrage doit permettre de faciliter une telle intégration des marchés de l’énergie d’équilibrage.

108    Comme cela est expliqué dans son considérant 6, le règlement 2017/2195 a aussi pour objectif de garantir la gestion optimale du réseau européen de transport d’électricité. L’article 3, paragraphe 2, sous c), de ce même règlement dispose que, aux fins de l’application de ce dernier, les États membres, les ARN compétentes et les GRT appliquent le principe d’optimisation entre l’efficacité globale maximale et les coûts totaux minimaux pour toutes les parties concernées.

109    C’est dans ce cadre que le considérant 7 du règlement 2017/2195 expose que « [l]es GRT devraient […] rester responsables des tâches qui leur sont confiées […] en ce qui concerne l’élaboration de méthodologies à l’échelle européenne, ainsi que la mise en place et l’exploitation des plateformes d’équilibrage à l’échelle européenne » et que le considérant 10 dudit règlement précise que « [l]a coopération entre les GRT devrait être strictement limitée à ce qui est nécessaire pour une conception, une mise en place et une exploitation efficaces et sûres de ces plateformes européennes ».

110    Une interprétation téléologique et contextuelle de la notion de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR incite donc à considérer qu’il s’agit d’une fonction qui, tant sur le plan technique que juridique, apparaît comme étant nécessaire pour une mise en place et une exploitation efficaces et sûres de ladite plateforme.

111    Au demeurant, cette conclusion est corroborée par la comparaison des différentes versions linguistiques de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195, de laquelle il ressort que les termes « required », en anglais, ou « requis », en français, ont été traduits, notamment dans les versions tchèque, allemande, croate, italienne, slovaque et slovène de cette disposition, par des termes pouvant également avoir le sens de « nécessaire », en français, ou de « necessary », en anglais.

112    À cet égard, comme l’expose l’ACER aux points 138 à 143 du mémoire en défense, il n’est pas contesté par les requérantes que la nécessité de mettre à jour en continu la capacité de transport entre zones disponible, qui sous-tend la fonction de gestion de capacité, est tant une réalité technique qu’une obligation légale qui s’imposent aux GRT.

113    Sur le plan technique, comme cela ressort des propositions successives d’aFRRIF et, en particulier, de l’article 3, paragraphe 4, sous b), de ces dernières, dans le cadre de la plateforme aFRR, la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible est un intrant essentiel de la fonction d’optimisation de l’activation, qui est elle-même une fonction requise de la plateforme aFRR visant à optimiser l’activation des offres d’énergie d’équilibrage les mieux classées (dans la liste d’ordre de mérite commune) en tenant compte des capacités de transport entre zones limitées qui sont disponibles. En effet, pour organiser des échanges d’énergie d’équilibrage qui se trouvent soumis à des contraintes de transport et, partant, allouer de manière optimale auxdits échanges des capacités de transport qui sont limitées, il faut, d’abord, être en mesure de connaître et de calculer les capacités de transport disponibles. Ainsi, la fonction de gestion de capacité, dans le cadre de laquelle s’effectue la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, est un élément techniquement indispensable au bon fonctionnement de la fonction d’optimisation de l’activation. D’ailleurs, comme cela est indiqué au paragraphe 193 de la décision attaquée, les requérantes ne contestent pas que la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, sous-jacente à la fonction de gestion de capacité, doit être exécutée et le résultat de celle-ci introduit dans la fonction d’optimisation de l’activation pour que la plateforme aFRR puisse être exploitée de manière efficace.

114    Sur le plan juridique, l’article 37, paragraphe 1, du règlement 2017/2195 impose aux GRT, après l’heure de fermeture du guichet infrajournalier entre zones, de mettre à jour la capacité de transport entre zones disponible en continu, à savoir à chaque fois qu’une portion de la capacité de transport entre zones est utilisée ou que la capacité de transport entre zones est recalculée, aux fins de l’échange d’énergie d’équilibrage ou de la compensation des déséquilibres. En outre, conformément à l’article 37, paragraphe 3, du règlement 2017/2195, il était prévu que, dans les cinq ans après l’entrée en vigueur dudit règlement, tous les GRT d’une région de calcul de la capacité élaborent une méthodologie de calcul de la capacité de transport entre zones à l’échéance du marché de l’équilibrage. Avant la mise en œuvre de cette méthodologie, ces mêmes GRT devaient, en application de l’article 37, paragraphe 2, de ce même règlement, utiliser la capacité de transport entre zones restante après l’heure de fermeture du guichet infrajournalier entre zones.

115    Au vu de ce double constat, la fonction permettant de calculer et de mettre à jour en continu la capacité de transport entre zones disponible, en suivant une méthodologie harmonisée à l’égard de tous les GRT, doit être considérée, au regard de l’objectif d’assurer une exploitation efficace et sûre de la plateforme aFRR poursuivi par le règlement 2017/2195, comme étant, d’un point de vue tant technique que juridique, une fonction requise pour l’exploitation d’une plateforme dont la conception, comme cela était rappelé à l’article 21, paragraphe 3, sous a), du règlement 2017/2195, doit être de haut niveau et répondre à des principes de gouvernance et à des processus opérationnels communs.

116    Les faits de l’espèce confirment que la fonction qui permet, dans le cadre de la fonction de gestion de capacité, de calculer et de mettre à jour en continu la capacité de transport entre zones disponible aux fins de son insertion automatique, en tant qu’intrant, dans la fonction d’optimisation de l’activation de la plateforme aFRR a bien été considérée comme étant une fonction requise pour l’exploitation de cette plateforme, raison pour laquelle les GRT ont décidé de l’y ajouter, bien que de manière différée dans le temps.

117    À cet égard, il importe de relever que, dès la proposition initiale d’aFRRIF, les GRT ont indiqué, à l’article 3, paragraphe 4, sous b), et paragraphe 7, de ladite proposition, décrivant l’architecture de haut niveau qui devait être celle de la plateforme aFRR, que, dans le cadre de cette plateforme, la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible était un intrant essentiel de la fonction d’optimisation de l’activation qui devait être calculé, par chaque GRT, conformément au processus décrit à l’article 4, paragraphe 2, de cette même proposition. Ce dernier article, consacré au calcul de la capacité de transport entre zones disponible en tant qu’intrant de la fonction d’optimisation de l’activation, décrivait expressément, à son paragraphe 5, le processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible comme faisant partie intégrante de la plateforme aFRR. En outre, l’article 6, paragraphes 1 et 4, de la proposition initiale d’aFRRIF, intitulé « Fonctions de la plateforme aFRR », disposait que, si cela était jugé efficace lors de l’application de la méthodologie de calcul de la capacité de transport entre zones à l’échéance du marché de l’équilibrage, conformément à l’article 37, paragraphe 3, du règlement 2017/2195, une fonction de calcul de la capacité de transport entre zones disponible pourrait être ajoutée à cette plateforme, dont le but serait de mettre en œuvre ladite méthodologie. Enfin, l’article 12 de la proposition initiale d’aFRRIF prévoyait que toutes les fonctions de la plateforme aFRR seraient exécutées par une entité unique désignée par tous les GRT concernés, qui serait soit un consortium desdits GRT, soit une société détenue par ces mêmes GRT.

118    Lors de la phase de consultation qui s’est engagée sur la proposition initiale d’aFRRIF, d’abord avec les ARN, puis avec l’ACER, un débat s’est développé sur la meilleure manière de prendre en compte, dans l’aFRRIF, le processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible. Au vu de ce débat, les GRT ont, d’un commun accord, accepté de faire évoluer la proposition initiale d’aFRRIF de manière à inclure formellement, dans les articles 3, 4 et 6 des propositions modifiées, une référence à la gestion de capacité en tant que fonction permettant à tous les GRT et à la plateforme aFRR de procéder à la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible pour que, à tout moment, les limites s’imposant à l’échange d’énergie d’équilibrage ou à la compensation des déséquilibres puissent être prises en compte. Cette fonction devait être instaurée dans un délai de deux ans suivant l’entrée en application de la plateforme aFRR. En outre, en vertu du principe d’optimisation énoncé à l’article 3, paragraphe 2, sous c), du règlement 2017/2195 (voir point 108 ci-dessus), les GRT ont indiqué aux ARN et à l’ACER leur intention d’adopter une approche coordonnée et centralisée du processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, dans le cadre de la fonction de gestion de capacité, pour toutes les plateformes européennes d’échange d’énergie d’équilibrage. Ils souhaitaient que, si d’autres plateformes que la plateforme aFRR disposaient de la même fonction que la gestion de capacité, cette fonction fût identique pour toutes ces plateformes, pour autant que l’obligation de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible s’imposât à chacune d’elles. L’article 12 figurant dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée soumise, d’un commun accord, par les GRT disposait que toutes les fonctions spécifiquement requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR seraient exécutées par une entité unique désignée par tous les GRT concernés et qui serait soit l’un de ces GRT, soit une société détenue par lesdits GRT.

119    Ainsi que cela ressort du schéma de gouvernance de la plateforme aFRR reproduit dans la partie « Introduction » de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, les GRT, tenant compte du fait que l’obligation de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible s’imposait à chacune des plateformes européennes d’échange d’énergie d’équilibrage, ont constaté, d’un commun accord, que la fonction de gestion de capacité était, de fait, une fonction multiplateforme, au sens où elle devrait être exécutée, à terme, de manière coordonnée et centralisée pour toutes ces plateformes. Le calcul de la capacité de transport entre zones disponible pour l’échange d’énergie d’équilibrage par le biais de la plateforme aFRR serait pris en charge, pour l’ensemble des GRT concernés, par un « module informatique de gestion des capacités » qui injecterait directement les résultats obtenus dans la fonction d’optimisation de l’activation de la plateforme aFRR. Les GRT indiquaient vouloir conserver toute liberté de pouvoir confier la gestion de capacité, sous cette forme coordonnée et centralisée, à une entité autre que l’entité unique chargée de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT. En attendant que la fonction de gestion de capacité, sous cette forme coordonnée et centralisée, soit mise en place, les GRT estimaient que, en théorie, l’entité unique chargée de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT pourrait aussi exécuter la gestion de capacité en injectant, dans la fonction d’optimisation de l’activation, les données qui seraient fournies par chacun des GRT concernés.

120    Il ressort de ce qui précède que les GRT responsables de la mise en place et de l’exploitation de la plateforme aFRR, qui devait être une plateforme « de haut niveau » et « fondée sur des principes de gouvernance et des processus opérationnels communs », ont eux-mêmes décidé, pour des raisons d’efficacité, d’ajouter à la plateforme aFRR, une fonction de calcul de la capacité de transport entre zones disponible, sous-jacente à la fonction de gestion de capacité, conformément à ce qui avait été systématiquement prévu à l’article 6, paragraphe 1, de leurs propositions successives d’aFRRIF. Le simple fait que l’ajout de cette fonction ait été différé dans le temps ne change rien au fait que, dès le départ, cette nouvelle fonction avait été considérée comme étant une fonction requise pour l’exploitation d’une plateforme aFRR de haut niveau. En effet, ce délai était légalement prévu et techniquement nécessaire pour tenir compte de ce que, d’une part et conformément à l’article 37, paragraphe 3, du règlement 2017/2195, les GRT devaient préalablement élaborer une méthodologie de calcul de la capacité de transport entre zones à l’échéance du marché de l’équilibrage et, d’autre part et dans la mesure où, pour répondre au principe d’optimisation énoncé à l’article 3, paragraphe 2, sous c), du règlement 2017/2195, lesdits GRT avaient décidé que cette fonction serait exécutée par un module informatique, de manière coordonnée et centralisée, à un niveau multiplateforme, ils devaient également mettre préalablement en place ce module et organiser sa gestion.

121    Ainsi, l’argument maintes fois répété par les requérantes, notamment lors de l’audience, selon lequel la plateforme aFRR allait fonctionner, pendant un temps, sans qu’une nouvelle fonction de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, sous une forme coordonnée et centralisée, soit introduite est sans pertinence puisque, dès l’origine, l’ajout d’une telle fonction à ladite plateforme avait été prévu, afin que celle-ci réponde, sur le plan tant technique que juridique, aux exigences d’une conception de haut niveau, en termes d’efficacité et de sûreté, et le fait que cet ajout ait été différé de deux ans, impliquant une exploitation sous-optimale de la plateforme aFRR durant cette période initiale, était uniquement dû aux contraintes techniques et juridiques posées par le développement de ladite fonction.

122    Il y a dès lors lieu de conclure que la fonction de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, sous-jacente à la fonction de gestion de capacité, et, partant, la fonction de gestion de capacité elle-même doivent être globalement qualifiées de fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Cette conclusion est également corroborée par la nécessité de garantir que les fonctions requises, à savoir la gestion de capacité, l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, dans l’hypothèse où elles seraient assumées par des entités différentes, le soient de manière coordonnée, cohérente et efficace, conformément aux exigences supplémentaires de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195. Ainsi, une telle qualification ne prive pas les GRT d’une quelconque liberté quant au choix de l’entité proposée pour exécuter la gestion de capacité, laquelle peut être distincte de celle chargée de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT. À cet égard, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, les requérantes sont d’ailleurs restées en défaut de démontrer, à suffisance de droit, une raison factuelle pertinente pour laquelle l’exécution de la fonction de gestion de capacité devrait échapper, en l’espèce, au respect des exigences supplémentaires de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195.

123    Par ailleurs, les requérantes n’ont pas expliqué, ni a fortiori établi, en quoi le fait que le règlement 2017/2195 ait la nature d’un acte d’exécution pourrait avoir un impact sur la qualification de la gestion de capacité de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Dès lors, leur argumentation à cet égard doit être écartée comme étant irrecevable.

124    Il résulte des appréciations qui précèdent que l’argument des requérantes selon lequel la commission de recours a considéré, à tort, que l’ACER n’avait pas imposé aux GRT de prendre en compte la gestion de capacité en tant que fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR manque en fait. En effet, ainsi qu’il ressort du point 122 ci-dessus, ce ne sont pas la décision 02/2020 ni l’aFRRIF litigieux, tels qu’ils sont confirmés par la commission de recours dans la décision attaquée, qui ont imposé aux GRT de prendre en compte la gestion de capacité, en tant que processus coordonné et centralisé à un niveau multiplateforme de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, en tant que fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195, mais cette dernière disposition, lue à la lumière de l’article 37 de ce même règlement. Quant au fait que l’ACER, confirmé en cela par la commission de recours, a considéré qu’elle devait évaluer la conformité avec la réglementation applicable de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée soumise par les GRT, en tenant compte du fait que la gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195, celui-ci était pleinement justifié au regard de la compétence décisionnelle dont celle-ci disposait, en vertu de l’article 6, paragraphe 10, sous b), du règlement 2019/942, lu conjointement avec l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 et conformément à l’article 21 de ce dernier règlement. En effet, si la gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195, il y avait lieu, dans la mesure où les GRT envisageaient de désigner pour son exécution une autre entité que celles chargées de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT, qu’ils démontrassent et garantissent que les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 seraient respectées.

125    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du deuxième moyen.

–       Sur les cinquième et sixième branches du deuxième moyen, tirées, d’une part, d’un examen insuffisant par la commission de recours des moyens spécifiques invoqués devant elle quant à l’application illégale par l’ACER de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 à la gestion de capacité et aux autres fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et, d’autre part, de ce que cette commission a conclu à tort que l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 s’appliquait à la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible et aux autres fonctions requises

126    Parmi les requérantes, le groupe A, dans le cadre de la cinquième branche du deuxième moyen, fait grief à la commission de recours de ne pas avoir contrôlé l’application faite par l’ACER, dans la décision 02/2020, de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 à la lumière de tous les moyens spécifiques qu’il avait invoqués devant elle. Comme cela est indiqué dans ses moyens, la gestion de capacité n’aurait pas été une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR. En outre, aucune ARN n’aurait exigé son inclusion parmi les fonctions requises listées dans la proposition initiale d’aFRRIF. Enfin, les GRT n’auraient pas proposé de désigner, pour exécuter la gestion de capacité, une entité autre que celle déjà chargée de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT.

127    Dans le cadre de la sixième branche du deuxième moyen, le groupe A soutient que l’ACER a illégalement imposé aux GRT d’inclure la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et que, même à supposer que l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 ait été applicable à la gestion de capacité, elle a imposé à tort aux GRT, à l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux, de respecter des exigences supplémentaires, prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, qui n’auraient été applicables que si les GRT avaient effectivement décidé de désigner plusieurs entités pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

128    L’ACER conteste les arguments du groupe A et conclut au rejet de la cinquième branche du deuxième moyen.

129    En l’espèce, la commission de recours a confirmé la décision 02/2020 qui exigeait que les GRT démontrassent que leur proposition respectait les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, au motif que, selon elle, ces GRT avaient éventuellement envisagé de désigner une entité chargée d’exécuter la gestion de capacité, en tant que fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, différente de celle chargée d’exécuter l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT.

130    Afin de se prononcer sur les cinquième et sixième branches du deuxième moyen, il y a lieu d’examiner si, ainsi que le soutient le groupe A, l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 s’applique uniquement aux fonctions définies dans la proposition des GRT ou, comme le soutient l’ACER, s’il s’applique à l’ensemble des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, parmi lesquelles la gestion de capacité.

131    L’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 dispose ce qui suit :

« La proposition [de méthodologie aFRR] visée au paragraphe 1 comprend au moins :

[…]

e)      la ou les entités proposées pour assumer les fonctions définies dans la proposition. Lorsque les GRT proposent de désigner plusieurs entités, la proposition démontre et garantit :

i)      une attribution cohérente des fonctions aux entités exploitant la plateforme européenne. La proposition tient pleinement compte de la nécessité de coordonner les différentes fonctions attribuées aux entités exploitant la plateforme européenne ;

ii)      que la structure proposée pour la plateforme européenne et l’attribution des fonctions garantissent une gouvernance, un fonctionnement et une supervision par les [ARN] efficients et efficaces, et contribuent à la réalisation des objectifs du présent règlement ;

iii)      une coordination et un processus décisionnel efficaces en vue de résoudre toutes positions conflictuelles entre les entités exploitant la plateforme européenne ».

132    Certes, dans la première phrase de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, il est uniquement renvoyé aux « fonctions définies dans la proposition ». Toutefois, au regard de l’énoncé du paragraphe 3 de ce même article, les seules fonctions devant être définies dans la proposition sont, en vertu de l’article 21, paragraphe 3, sous c), dudit règlement, les « fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme [aFRR] ».

133    Par conséquent, il ressort clairement des dispositions de l’article 21, paragraphe 3, du règlement 2017/1295 que l’application des exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, du règlement 2017/1295, sous e), de ce règlement est conditionnée par la désignation, dans la proposition de méthodologie aFRR, de plusieurs entités chargées des différentes fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, telles qu’elles sont définies conformément à l’article 21, paragraphe 3, du règlement 2017/1295, sous c), de ce même règlement.

134    Or, en l’espèce, d’une part, il convient de constater que l’ACER dans la décision 02/2020, de même que la commission de recours dans la décision attaquée, a fait grief aux GRT alors qu’elle avait proposé de désigner une entité chargée de la gestion de capacité susceptible d’être différente de celle chargée de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT, de ne pas avoir démontré et garanti, dans une telle hypothèse, le respect des exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195.

135    D’autre part, la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, finalement prise en compte par l’ACER, prévoyait la désignation d’une entité unique chargée des deux fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195, qui étaient expressément visées à l’article 21, paragraphe 2, de ce même règlement, à savoir l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT. La gestion de capacité était également prise en compte, dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, en tant que fonction multiplateforme dont l’exécution était nécessaire à l’exploitation de la plateforme aFRR, même si elle n’avait pas été qualifiée, dans celle-ci, de fonction requise pour ladite exploitation, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du règlement 2017/2195. Toutefois, conformément à la conclusion qui a été tirée au point 122 ci-dessus au terme de l’examen de la quatrième branche du deuxième moyen, c’est à bon droit que la commission de recours, dans la décision attaquée, à l’instar de l’ACER, dans sa décision 02/2020, a considéré que la gestion de capacité, telle que prévue à l’article 37 du règlement 2017/2195, constituait une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c), de ce même règlement.

136    Au regard des appréciations qui précèdent, il y a lieu de constater que le groupe A n’est pas fondé à faire valoir que les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 n’étaient pas applicables à la fonction de gestion de capacité.

137    Il y a donc lieu de rejeter les cinquième et sixième branches du deuxième moyen, prises ensemble.

–       Sur la septième branche du deuxième moyen, tirée de ce que la commission de recours a conclu à tort que la gestion de capacité devait être incluse parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR visées à l’article 21 du règlement 2017/2195, en tant que fonction multiplateforme liée à l’équilibrage

138    Le groupe A fait grief à la commission de recours d’avoir, en substance, illégalement conclu que la gestion de capacité devait être incluse parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR au titre de l’article 21 du règlement 2017/2195 alors qu’il s’agissait d’une fonction multiplateforme liée à l’équilibrage. Premièrement, à supposer même que l’ACER ait disposé d’une base juridique, qu’elle n’a pas identifiée, pour inclure la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR visées à l’article 21 du règlement 2017/2195, ce règlement ne lui aurait conféré aucune compétence pour exiger, ainsi qu’elle l’a fait à l’article 4, paragraphe 6, de l’aFRRIF litigieux, que la gestion de capacité ait un contenu identique et soit exécutée par la même entité pour toutes les plateformes européennes d’équilibrage. Deuxièmement, la commission de recours aurait considéré à tort, au paragraphe 222 de la décision attaquée, que l’exigence d’introduire la gestion de capacité sous la forme d’une fonction multiplateforme n’était pas une obligation nouvelle imposée par l’ACER. Cela aurait été contredit par les arguments de l’ACER exposés au point 170 de son mémoire en défense devant la commission de recours et n’aurait pas été confirmé par le rapport de l’ACER de 2015, relatif aux objectifs de l’équilibrage de l’énergie, mentionné au paragraphe 222 de la décision attaquée, lequel ne portait que sur les échanges transfrontaliers d’énergie d’équilibrage et non sur les fonctions multiplateformes. Cela n’aurait pas non plus été confirmé par les évaluations des GRT quant à l’efficacité et à la prise en compte d’une fonction de gestion de capacité commune à toutes les plateformes européennes d’équilibrage, mentionnées aux paragraphes 224 et 225 de la décision attaquée, qui auraient été formulées par rapport au module informatique de gestion centralisée de la capacité à un niveau multiplateforme et non à la gestion de capacité, en tant que fonction requise pour l’exploitation de toutes ces plateformes. Enfin, il serait sans pertinence de renvoyer, à cet égard, à la note informelle des ARN, car la mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible par les GRT, conformément à l’article 37 du règlement 2017/2195, ne serait pas une fonction des plateformes européennes d’équilibrage, de sorte qu’elle s’effectuerait sous le contrôle des ARN, sans relever de la surveillance réglementaire de l’ACER.

139    L’ACER conteste les arguments avancés par le groupe A et conclut au rejet de la septième branche du deuxième moyen.

140    À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que les articles 19 à 22 du règlement 2017/2195 prévoient l’adoption d’une méthodologie pour chacune des plateformes européennes pour l’échange d’énergie d’équilibrage, à savoir, respectivement, la plateforme européenne pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de remplacement, la plateforme pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de restauration de la fréquence avec activation manuelle, la plateforme aFRR et la plateforme européenne pour le processus de compensation des déséquilibres. Lesdits articles contiennent chacun des dispositions similaires, notamment un paragraphe 3, sous e), en vertu duquel, en présence de plusieurs entités chargées d’exécuter des fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme européenne définies dans la proposition de méthodologie en cause, ladite proposition doit démontrer et garantir le respect de trois exigences supplémentaires.

141    Deuxièmement, il y a lieu de constater que, dans l’introduction de la troisième proposition d’aFRRIF, les GRT ont explicitement indiqué que « [t]outes les plateformes d[e]v[ai]ent utiliser la même fonction multiplateforme de gestion de la capacité [...] en plus des fonctions spécifiques aux plateformes prévues ». Ils avaient précisé qu’une entité unique serait chargée d’exécuter les fonctions spécifiques aux plateformes, à savoir l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, et qu’une entité unique, sous la forme d’un GRT ou d’une société détenue par les GRT, serait chargée de la gestion de capacité, en tant que fonction multiplateforme. Un schéma intitulé « Structure de gouvernance », reproduisant deux zones verticales correspondant, chacune, à deux plateformes différentes, à savoir la plateforme aFRR et la plateforme pour l’échange d’énergie d’équilibrage à partir des réserves de restauration de la fréquence avec activation manuelle, identifiait clairement, d’une part, les deux fonctions spécifiques à chacune de ces plateformes, à savoir l’optimisation de l’activation et le règlement des GRT-GRT, exécutées par une seule entité, et, d’autre part, une entité unique pour les deux plateformes, chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité.

142    Troisièmement, il convient de constater que ce même schéma, réintitulé « Structure de gouvernance et fonctions », était reproduit dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, prise en compte par l’ACER. En revanche, les GRT avaient précisé que la gestion de capacité n’était pas une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme concernée, mais une fonction multiplateforme, ajoutée pour améliorer la coordination entre celles-ci. De même, toujours dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, les GRT avaient indiqué qu’ils avaient l’intention de « maximiser l’efficience des plateformes en établissant des fonctions multiplateformes ». Ils en avaient déduit que, dès lors que la gestion de capacité n’était pas une fonction requise pour l’exploitation d’une plateforme, les exigences supplémentaires prévues aux paragraphes 3, sous e), des articles 19 à 22 du règlement 2017/1295, en cas de désignation de plusieurs entités chargées d’exécuter une telle fonction, n’étaient pas applicables.

143    Il ressort des constatations qui précèdent que, ainsi que le fait valoir l’ACER, les GRT, dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, avaient eux-mêmes proposé, pour des raisons tendant à améliorer la coordination entre les plateformes d’équilibrage, de désigner une entité unique chargée d’exécuter la gestion de capacité, en tant que fonction multiplateforme. Certes, contrairement à l’ACER, les GRT avaient soutenu que la gestion de capacité n’était pas une fonction requise pour l’exploitation de chaque plateforme. Toutefois, conformément à la conclusion qui a été tirée au point 122 ci-dessus au terme de l’examen de la quatrième branche du deuxième moyen, cette allégation n’est pas fondée. En tout état de cause, il ressort de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée que les GRT ont eux-mêmes exprimé leur intérêt pour désigner une entité unique pour exécuter ladite fonction, tel que l’ont également fait valoir l’ACER et la commission de recours.

144    En conséquence, la commission de recours n’a pas commis d’erreur de droit en confirmant la décision 02/2020, qui n’avait nullement imposé aux GRT de prendre en compte la gestion de capacité, en tant que fonction multiplateforme, dans leur proposition d’aFRRIF, telle qu’ils ont eux-mêmes accepté de la faire évoluer durant la phase de consultation, d’abord avec les ARN, puis avec l’ACER.

145    Par conséquent, il y a lieu de rejeter la septième branche du deuxième moyen.

–       Sur la huitième branche du deuxième moyen, tirée de ce que la commission de recours a conclu à tort que l’ACER n’avait pas enfreint le règlement 2017/2195, notamment l’article 21, paragraphe 5, et l’article 10 de celui-ci, en obligeant les GRT à proposer une modification de la méthodologie aFRR

146    Le groupe A reproche à la commission de recours d’avoir commis une erreur de droit en concluant que l’obligation imposée par l’ACER aux GRT de soumettre une proposition de modification de la méthodologie aFRR était légale, alors même qu’il n’existait aucune base juridique pour ce faire et que l’ACER n’avait aucune compétence pour contraindre les GRT à soumettre une proposition de modification de cette méthodologie. Il ressortirait des paragraphes 145 à 152 de la décision attaquée que, contrairement à ce que l’ACER aurait soutenu devant elle, la commission de recours aurait considéré que cette obligation était prévue par le règlement 2017/2195 et ne découlait pas de la décision 02/2020. Ce serait de manière contradictoire que la commission de recours aurait, au paragraphe 149 de la décision attaquée, prétendu que la consultation publique sur la première proposition des GRT était conforme à l’article 10 du règlement 2017/2195 alors que ni l’inclusion de la gestion de capacité parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, ni la proposition de modification de la méthodologie aFRR n’auraient été mentionnées dans cette proposition. Enfin, dans une décision ultérieure, du 22 décembre 2020, dans l’affaire A‑008‑2020, la commission de recours aurait considéré, contrairement à ce qu’elle avait fait dans la décision attaquée, que l’article 6, paragraphe 3, du règlement 2017/2195 ne s’appliquait pas à la création, mais seulement à la modification, d’une méthodologie de plateforme européenne d’équilibrage.

147    L’ACER conteste les arguments avancés par le groupe A et conclut au rejet de la huitième branche du deuxième moyen.

148    À titre liminaire, il convient de constater que, certes, ainsi qu’il ressort de la décision 02/2020 telle que confirmée par la commission de recours dans la décision attaquée, l’ACER avait demandé aux GRT d’élaborer une proposition de modification de la méthodologie aFRR, afin de procéder, ainsi que cela était envisagé dans la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, à la désignation de l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité.

149    Toutefois, cette demande de l’ACER était explicitement justifiée par le fait que la gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR et que, partant, dans l’hypothèse où plusieurs entités seraient chargées de l’exécution des différentes fonctions requises pour l’exploitation de cette plateforme, les exigences supplémentaires, prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, devraient être respectées.

150    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux considérants 76 à 84 de la décision 02/2020 et, en particulier, au considérant 82 de celle-ci, l’ACER a formellement déclaré que la fonction de gestion de capacité devrait être introduite, en tant que fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, mais que, afin de donner aux GRT le temps nécessaire pour résoudre les problèmes liés au caractère multiplateforme de la fonction de gestion de capacité, la proposition de l’entité chargée d’exécuter cette dernière pouvait être reportée et intervenir dans les deux ans après la mise en œuvre de la plateforme aFRR. C’est ainsi qu’elle a demandé aux GRT de prévoir une proposition de modification de la méthodologie aFRR dans laquelle ils désigneraient l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité, dans le respect des dispositions de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195.

151    Conformément à la conclusion qui a été tirée au point 122 ci-dessus au terme de l’examen de la quatrième branche du deuxième moyen, l’ACER et, à sa suite, la commission de recours ont à juste titre qualifié la fonction de gestion de capacité de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Par ailleurs, dans le cadre de la mise en œuvre de la compétence décisionnelle dont elle dispose sur le fondement de l’article 6, paragraphe 10, deuxième alinéa, sous b), du règlement 2019/942, lu conjointement avec l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195 et conformément à l’article 21 de ce dernier règlement, l’ACER devait indiquer aux GRT si et, le cas échéant, à quelles conditions l’aFRRIF proposé par ceux-ci était ou serait conforme à la réglementation applicable, notamment en fonction de certains choix qui restaient à faire, en particulier en ce qui concernait l’entité qui serait chargée de l’exécution de la gestion de capacité au moment de l’introduction de celle-ci sous une forme centralisée, en juillet 2024.

152    De plus, il convient de ne pas confondre l’approbation par l’ACER de la méthodologie d’aFRR proposée par les GRT, sous certaines conditions tenant au fait que cette méthodologie soit complétée par les GRT, dans un certain délai, sur certains aspects laissés ouverts, dans le respect de la réglementation applicable, et une proposition des GRT de modifier cette méthodologie elle-même, après son approbation par les autorités de régulation. En l’espèce, la condition, posée dans l’aFRRIF litigieux, selon laquelle, huit mois avant son entrée en vigueur, les GRT désignent l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité dans le respect de l’article 21, paragraphe 4, du règlement 2017/2195 est une condition à l’approbation même dudit aFRRIF et non une modification postérieure de ce dernier, introduite conformément à la procédure de modification prévue à l’article 6, paragraphe 3, du règlement 2017/2195.

153    Partant, il y a lieu de rejeter la huitième branche du deuxième moyen.

154    Au regard de l’ensemble des appréciations portées sur les huit branches du deuxième moyen, il y a donc lieu de rejeter intégralement ledit moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation par la commission de recours, au cours de la procédure devant elle, du principe de bonne administration, du principe du respect des droits de la défense, de l’obligation de motivation et des obligations légales qui lui incombaient

155    Pour autant que, dans le cadre du troisième moyen, les requérantes ou seul le groupe A invoquent une violation par la commission de recours, au cours de la procédure devant elle, du principe de bonne administration garanti par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), il y a lieu de relever que ceux-ci imputent, plus précisément, à ladite commission d’avoir violé l’obligation qui lui incombait de traiter les affaires portées devant elle de manière indépendante, impartiale et diligente, leur droit d’être entendu, leur droit d’accès au dossier et l’obligation de motivation. En outre, ils reprochent à la commission de recours de ne pas avoir exercé un contrôle entier sur la décision 02/2020 et d’avoir commis une erreur d’interprétation et procédé à un examen insuffisant des moyens qu’ils avaient soulevés devant elle.

–       Sur la violation des principes d’indépendance, d’impartialité et d’examen diligent

156    Les requérantes soutiennent que, conformément à l’article 41 de la Charte, il ressort d’une lecture combinée du considérant 34 ainsi que de l’article 26, paragraphe 2, et de l’article 28, paragraphe 4, du règlement 2019/942 que l’examen des recours introduits contre les décisions de l’ACER doit être effectué par la commission de recours en tout indépendance et impartialité et de manière consciencieuse et diligente. Or, dans la décision attaquée, celle-ci se serait surtout efforcée de justifier la décision 02/2020 et, dans le cadre du présent recours, l’ACER ne répondrait pas non plus à leurs moyens et à leurs griefs. Premièrement, d’une part, dans la décision attaquée, la commission de recours aurait contesté que l’ACER ait imposé la fonction de gestion de capacité, alors que celle-ci l’aurait elle-même admis, au point 208 du mémoire en défense qu’elle avait déposé dans le cadre de la procédure devant elle. D’autre part, dans la partie de la décision attaquée consacrée à la présentation des faits, elle aurait constaté que la gestion de capacité était une fonction spécifique de la plateforme aFRR, en niant qu’elles avaient contesté cela devant elle et en reprenant des éléments du mémoire en défense de l’ACER. Deuxièmement, alors que l’absence de consultation organisée par l’ACER sur la troisième proposition d’aFRRIF modifiée avait été critiquée devant elle par le groupe A, la commission de recours aurait, dans la partie consacrée à la présentation des faits de la décision attaquée, indiqué que l’ACER avait été contrainte par le délai de six mois dont elle disposait pour rendre sa décision sur la proposition des GRT, qui expirait le 24 janvier 2020, et qu’elle ne pouvait pas demander à ces derniers de compléter une nouvelle fois leur proposition. Aux paragraphes 162, 199 et 260 de la décision attaquée, sans explication ni preuve, la commission de recours aurait porté un jugement positif et subjectif sur la conduite de l’ACER à cet égard. Troisièmement, ce serait sans aucune justification, si ce n’est de porter préjudice aux requérantes et de renforcer la ligne de défense de l’ACER, que la commission de recours leur aurait reproché, aux paragraphes 176 et 201 de la décision attaquée, de ne pas avoir exprimé leur opposition, lors de la consultation publique, au choix d’une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Quatrièmement, les requérantes reprochent à la commission de recours d’avoir rejeté à tort leur moyen subsidiaire, tiré d’une violation de la Charte résultant de ce que l’ACER n’avait pas justifié, dans la décision 02/2020, sa position en faveur d’une entité juridique unique, plutôt que d’un consortium de GRT, pour exécuter toutes les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. L’absence d’objectivité de ladite commission à cet égard ressortirait du fait qu’elle n’aurait pas examiné l’économie de 60 millions d’euros, en matière de protection sociale, invoquée par le groupe A pour justifier le choix d’un consortium de GRT. Cinquièmement, le manque d’impartialité de la commission de recours ressortirait également de l’invocation fallacieuse, par celle-ci, du caractère prétendument « ascendant » du processus réglementaire prévu par le règlement 2019/942, pour soustraire la décision 02/2020 à un véritable contrôle juridique.

157    L’ACER conteste les arguments des requérantes et conclut au rejet du présent grief.

158    À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 41 de la Charte, qui, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, TUE, a la même valeur juridique que les traités, consacre le droit à une bonne administration. Ce droit implique, en vertu de l’article 41, paragraphe 1, de la Charte, notamment, le droit pour toute personne de voir ses affaires traitées impartialement par les institutions, les organes et les organismes de l’Union (arrêt du 20 octobre 2021, Kerstens/Commission, T‑220/20, EU:T:2021:716, point 32).

159    Selon la jurisprudence, l’administration est tenue, en vertu du principe de bonne administration, d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce dont elle est saisie et de réunir tous les éléments de fait et de droit nécessaires à l’exercice de son pouvoir d’appréciation ainsi que d’assurer le bon déroulement et l’efficacité des procédures qu’elle met en œuvre (voir arrêt du 20 octobre 2021, Kerstens/Commission, T‑220/20, EU:T:2021:716, point 33 et jurisprudence citée).

160    Il convient également de rappeler que l’exigence d’impartialité recouvre, d’une part, l’impartialité subjective, en ce sens qu’aucun membre de l’institution, de l’organe ou de l’organisme chargé de l’affaire ne doit manifester de parti pris ou de préjugé personnel et, d’autre part, l’impartialité objective, en ce sens que l’institution, l’organe ou l’organisme doit offrir des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (voir arrêt du 20 octobre 2021, Kerstens/Commission, T‑220/20, EU:T:2021:716, point 34 et jurisprudence citée).

161    La commission de recours a été établie, au sein de l’ACER, pour statuer au fond, les parties entendues, sur les recours recevables formés contre les décisions de l’ACER, conformément à l’article 28, paragraphe 4, du règlement 2019/942.

162    Ainsi que le prévoit le considérant 34 du règlement 2019/942, la commission de recours fait partie de l’ACER, mais est indépendante de la structure administrative et réglementaire de cette dernière.

163    À cette fin, l’article 26, paragraphe 2, du règlement 2019/942 dispose que les membres de la commission de recours prennent leurs décisions en toute indépendance et ne sont liés par aucune instruction. L’exercice, par ceux-ci, de fonctions au sein de l’ACER ou la possibilité de les démettre de leurs fonctions sont encadrés de manière à garantir leur indépendance.

164    En l’espèce, les requérantes n’ont pas rapporté la preuve de ce que la commission de recours avait violé les principes d’indépendance, d’impartialité et d’examen diligent lors de l’adoption de la décision attaquée, qui portait, en substance, sur la question de savoir, à la lumière des arguments soulevés par les parties à la procédure devant elle, si la décision 02/2020 et l’aFRRIF litigieux étaient fondés et, en particulier, si ceux-ci pouvaient se fonder sur le double constat que la gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR et que, si, pour cette plateforme, les GRT devaient choisir que cette fonction soit exécutée par une entité différente de celle chargée de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT, les exigences supplémentaires prévues dans la seconde phrase de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195 devraient être respectées.

165    Il ressort de la décision attaquée que la commission de recours s’est efforcée, dans celle-ci, de répondre à la question de savoir si ou à quelles conditions, compte tenu des informations communiquées par les GRT sur la proposition initiale d’aFRRIF au cours de la phase de consultation menée par l’ACER avec les ARN et les GRT, conformément à l’article 6, paragraphe 11, du règlement 2019/942, et, en particulier, des propositions successives d’aFRRIF que les GRT lui avaient soumises, l’aFRRIF finalement proposé par les GRT était ou serait conforme au règlement 2017/2195 et au règlement (UE) 2017/1485 de la Commission, du 2 août 2017, établissant une ligne directrice sur la gestion du réseau de transport de l’électricité (JO 2017, L 220, p. 1) ainsi qu’à d’autres réglementations applicables.

166    Dans ce cadre, il ne ressort pas du dossier que la commission de recours, en général, ou certains de ses membres, en particulier, ont manifesté un parti pris ou un préjugé personnel qui les ont conduits à s’écarter du contrôle de la conformité de la proposition d’aFRRIF soumise par les GRT avec la réglementation applicable ou qu’ils n’ont pas, à cet égard, décidé en toute indépendance, après consultation des ARN et des GRT. De même, il ne ressort pas du dossier que le cadre dans lequel la commission de recours a pris la décision attaquée n’offrait pas des garanties suffisantes pour exclure, à cet égard, tout doute légitime sur son impartialité ou sur son indépendance.

167    Les arguments avancés par les requérantes devant le Tribunal ne remettent pas en cause ce constat.

168    Contrairement à ce que les requérantes prétendent, la commission de recours n’a pas cherché à couvrir, dans la décision attaquée, un agissement illégal de l’ACER qui aurait consisté à imposer aux GRT, dans l’aFRRIF litigieux, la prise en compte d’une fonction, à savoir la gestion de capacité, qui n’aurait pas été requise par la réglementation applicable pour l’exploitation de la plateforme aFRR. Dans la décision attaquée, celle-ci a seulement estimé que, contrairement à ce que soutenaient les requérantes devant elle, la gestion de capacité devait être qualifiée de fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, au sens de l’article 21, paragraphe 3, sous c) et e), du règlement 2017/2195, dont la prise en compte dans l’aFRRIF avait également été demandée par les ARN et qui avait d’ailleurs été intégrée dans les deuxième et troisième propositions d’aFRRIF soumises par les GRT. Ensuite, elle a tiré toutes les conséquences qui en découlaient, dans son appréciation de la question de savoir si, dans sa décision 02/2020 et dans l’aFRRIF litigieux, l’ACER avait pu considérer à bon droit que, dans le cas où les GRT confieraient l’exécution de cette fonction à une autre entité que celle chargée de l’exécution de l’optimisation de l’activation et du règlement des GRT-GRT, dans le cadre de l’exploitation de la plateforme aFRR, les exigences supplémentaires prévues à l’article 21, paragraphe 3, sous c) et e), du règlement 2017/2195 devraient être respectées. Le fait que la commission de recours a pu éventuellement se tromper dans son interprétation de la réglementation applicable, effectuée sous le contrôle du Tribunal, ne suffit pas à considérer qu’elle a été partiale ou qu’elle a manqué d’indépendance dans sa décision.

169    De même, le constat de la commission de recours, dans la décision attaquée, selon lequel l’absence de consultation des GRT organisée par l’ACER entre la réception de la troisième proposition d’aFRRIF modifiée, le 18 décembre 2019, et l’établissement de la version finale de la décision 02/2020, adoptée le 24 janvier 2020, était justifié par le délai qui était imparti à l’ACER pour prendre sa décision, ne révèle nullement un manque d’impartialité ou d’indépendance de la part de ladite commission. En effet, il traduit seulement la prise en compte, par celle-ci, d’un fait objectif, à savoir que le délai de six mois, après la saisine, qui était imparti à l’ACER pour prendre sa décision, conformément à l’article 6, paragraphe 12, du règlement 2019/942, expirait le 24 janvier 2020.

170    En outre, le constat de la commission de recours, dans la décision attaquée, selon lequel, au cours de la procédure ayant mené à l’adoption de la décision 02/2020, l’ACER avait agi dans un esprit de coopération et de bonne foi, compte tenu du cadre contraint, notamment en termes de délai, dans lequel elle devait prendre cette décision (voir point 169 ci-dessus), ne révèle pas un manque d’impartialité ou d’indépendance de la part de ladite commission, mais la prise en compte, par celle-ci, de faits objectifs qui témoignaient de ce que l’ACER avait fait des efforts pour prendre en compte la volonté de tous les GRT, et ce même lorsque les solutions souhaitées par ces derniers ne lui paraissaient pas idéales. Ainsi, la commission de recours a avancé des éléments permettant de comprendre que la prise en compte, par l’ACER, du report de deux ans pour l’entrée en application de la fonction de gestion de capacité et de la désignation de l’entité chargée de son exécution témoignait de sa volonté de laisser aux GRT le temps de régler, selon une approche coordonnée et centralisée à un niveau multiplateforme, le processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, qui était sous-jacent à la fonction de gestion de capacité.

171    Par ailleurs, le constat de la commission de recours, dans la décision attaquée, selon lequel, au cours de la procédure ayant mené à l’adoption de la décision 02/2020, les GRT n’avaient pas manifesté, durant la phase de consultation préalable à l’adoption de cette décision, leur opposition à ce que les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR soient exécutées par une structure avec une entité unique est également un fait objectif. Les requérantes n’ont cité aucun extrait des observations des GRT au cours de ladite phase, notamment tirés de l’annexe II de la décision 02/2020, qui aurait infirmé un tel constat. La seule prise en compte par la commission de recours, dans la décision attaquée, d’un fait objectif ne révèle pas, de sa part, un manque d’impartialité ou d’indépendance.

172    Pour autant que les requérantes reprochent, en substance, à la commission de recours de ne pas avoir contrôlé si, dans la décision 02/2020, l’ACER avait justifié son choix en faveur d’une structure avec une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et son rejet d’une structure prenant la forme d’un consortium, il y a lieu de constater que, comme l’a relevé à bon droit la commission de recours dans la décision attaquée, il ne ressort pas du dossier que, à un moment donné, l’ACER a imposé aux GRT de recourir à une structure avec une entité unique ou empêché le recours à une structure prenant la forme d’un consortium. En effet, l’ACER a seulement tiré les conséquences qui, selon elle, résultaient de l’application de la réglementation existante aux choix faits par les GRT dans leur proposition initiale d’aFRRIF, en tenant compte de l’évolution de la position des GRT dans les différentes versions successives de cette proposition qu’ils lui ont soumises. Dans ce cadre, elle a notamment signalé que, si les GRT devaient choisir la structure d’un consortium, qui ne disposait pas de la personnalité juridique, il s’agirait alors d’une structure avec plusieurs entités, constituées des différents GRT membres du consortium, et non d’une structure avec une entité unique et, par conséquent, ladite structure devrait être conforme aux exigences supplémentaires prévues dans la seconde phrase de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195, ce qui ne ressortait pas de la proposition initiale d’aFRRIF. Elle a également rappelé sa position selon laquelle ces mêmes exigences devraient être respectées si les GRT faisaient finalement le choix de confier les différentes fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR à plusieurs entités. Le présent argument des requérantes manque donc en fait.

173    Enfin, manque également en fait l’argument des requérantes selon lequel, en substance, la commission de recours a inventé la notion de « processus décisionnel ascendant » pour soustraire les actions de l’ACER à un contrôle juridique. En effet, comme cela a déjà été constaté au point 54 ci-dessus, les requérantes ne soutiennent pas utilement que la désignation du processus décisionnel, par la commission de recours, comme étant « ascendant » était illégale, au motif qu’elle n’aurait reposé sur aucune base juridique dans la réglementation applicable.

174    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le grief pris d’une violation des principes d’indépendance, d’impartialité et d’examen diligent.

–       Sur la violation du droit d’accès au dossier

175    Le groupe A reproche à la commission de recours d’avoir, dans la décision attaquée, confirmé la décision rejetant la demande de divulgation, qui avait été adoptée en violation des droits que lui confère l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte ainsi que de ses droits de la défense. Les motifs de la décision rejetant la demande de divulgation, tels qu’ils sont résumés aux paragraphes 274 à 284 de la décision attaquée, auraient été que, premièrement, l’ACER n’ayant pas demandé le traitement confidentiel des annexes de son mémoire en défense devant la commission de recours, le groupe A aurait eu accès à des informations complètes sur les documents échangés entre l’ACER et les GRT avant l’adoption de la décision 02/2020 et, deuxièmement, alors que les dispositions de l’article 4, paragraphe 3, du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 45, p. 43) étaient applicables, faute d’intérêt public supérieur justifiant une divulgation, le groupe A n’aurait pas établi la nécessité d’une telle divulgation pour l’exercice de ses droits de la défense et les documents dont la divulgation était demandée n’auraient pas revêtu une pertinence suffisante par rapport aux arguments qu’il avait avancés devant la commission de recours.

176    Premièrement, le groupe A estime que le respect de ses droits ne pouvait dépendre de la décision de l’ACER de joindre ou non les documents visés par la demande de divulgation en annexe à son mémoire en défense devant la commission de recours. Deuxièmement, il rappelle que le droit d’accès au dossier prévu à l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, sur lequel la demande de divulgation était exclusivement fondée, est distinct et indépendant du droit d’accès aux documents prévu par le règlement no 1049/2001. Conformément à la jurisprudence, ce droit ne pourrait pas être satisfait par une divulgation sélective des documents en cause, ni apprécié par rapport au bien-fondé de la demande de divulgation. Troisièmement, ce serait sans fondement et, en tout état de cause, à tort que la commission de recours lui aurait reproché de ne pas avoir expliqué en quoi l’accès aux documents en cause était nécessaire pour l’exercice de ses droits de la défense. Quatrièmement, lesdits documents auraient été pertinents devant la commission de recours puisque, lors d’une audition, ladite commission aurait posé à l’ACER une question directement liée à leur contenu et, dans la décision attaquée, elle se serait appuyée sur ledit contenu pour rejeter leur recours. Cette violation du droit d’accès au dossier aurait influencé le contenu de la décision attaquée, à son détriment, notamment sur la question de savoir si la gestion de capacité devait être incluse parmi les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR et si le conseil des régulateurs avait soutenu la position de l’ACER en faveur d’une entité juridique unique pour exécuter toutes ces fonctions.

177    L’ACER conteste les arguments du groupe A et conclut au rejet du présent grief.

178    À titre liminaire, il y a lieu d’observer que la demande formulée par le groupe A au point 161, sous d), du recours qu’il avait formé devant la commission de recours en application de l’article 28 du règlement 2019/942 visait à ce que ladite commission adopte une mesure procédurale, au titre de l’article 20, paragraphe 3, sous d), de son règlement de procédure, portant sur la production de versions confidentielles des documents litigieux (voir point 16 ci-dessus), qu’il estimait être utiles aux fins de la procédure ouverte devant cette même commission contre la décision 02/2020. La décision de non-divulgation doit donc être analysée comme une décision, adoptée par le président de la commission de recours agissant au nom de cette dernière, portant rejet de la mesure procédurale demandée.

179    Les documents litigieux se rattachaient à la procédure normative, impliquant les GRT, les ARN et l’ACER, qui a conduit à l’adoption de la décision 02/2020 et de la méthodologie aFRR qui y était annexée.

180    Il s’ensuit que la demande adressée par le groupe A à la commission de recours n’était ni une demande d’accès au dossier de la procédure ouverte devant cette dernière, au sens de l’article 41, paragraphe 2, sous b), de la Charte, ni une demande d’accès aux documents, au sens de l’article 42 de la Charte et du règlement no 1049/2001.

181    Au vu du texte de l’article 20 de la décision de la commission de recours no 1‑2011, telle que modifiée le 5 octobre 2019, établissant les règles d’organisation et de procédure devant la commission de recours de l’ACER et d’une application, par analogie, de la jurisprudence applicable aux demandes de mesures d’organisation de la procédure ou d’instruction adressées au Tribunal dans le cadre des procédures ouvertes devant lui (voir, en ce sens, arrêts du 17 décembre 1998, Baustahlgewebe/Commission, C‑185/95 P, EU:C:1998:608, points 90 à 93, et du 12 mai 2010, Commission/Meierhofer, T‑560/08 P, EU:T:2010:192, point 61), il y a lieu de constater que, pour permettre à cette même commission, représentée par son président, de déterminer si une telle production était utile au bon déroulement de la procédure ouverte devant elle, le groupe A devait non seulement identifier dans sa demande les documents sollicités, mais également fournir à la commission de recours un minimum d’éléments accréditant l’utilité de ces documents pour les besoins de cette procédure. La nécessité d’adopter la mesure procédurale sollicitée en levant, le cas échéant, la confidentialité des documents litigieux à l’égard du groupe A relevait ensuite de l’appréciation de la commission de recours représentée par son président, ledit groupe pouvant, le cas échéant, contester cette appréciation dans le cadre du recours introduit devant le Tribunal, conformément à l’article 29 du règlement 2019/942, contre la décision adoptée au terme de la procédure, à savoir la décision attaquée, s’il estimait que l’absence d’adoption de la mesure procédurale demandée avait eu un impact sur le contenu de ladite décision.

182    Ainsi, la décision de non-divulgation pouvait être légalement adoptée par la commission de recours représentée par son président sur le seul fondement, exposé aux points 9 et 10 de ladite décision et repris aux paragraphes 281 et 282 de la décision attaquée, que le groupe A avait manqué de lui fournir, à l’appui de sa demande de mesure procédurale, le minimum d’éléments qui auraient accrédité l’utilité des documents litigieux pour les besoins de la procédure en cause, comme cela aurait été nécessaire pour qu’elle puisse donner une suite favorable à sa demande.

183    Le groupe A objecte néanmoins avoir justifié l’utilité des documents litigieux pour les besoins de la procédure ouverte devant la commission de recours aux points 76 et 157 du recours qu’il avait formé devant cette dernière.

184    À cet égard, d’une part, il y a lieu de constater que, au point 76 dudit recours, relatif au troisième moyen soulevé par le groupe A, il n’a nullement expliqué en quoi la copie d’une éventuelle évaluation effectuée par l’ACER conformément à l’article 21, paragraphe 5, du règlement 2017/2195 et visant à déterminer si et comment les GRT pourraient mener l’analyse coûts-bénéfices nécessaire pour étayer la modification requise par l’article 12, paragraphe 2, de la méthodologie aFRR aurait été nécessaire pour statuer sur ce moyen, qui tendait essentiellement à faire constater que l’ACER avait violé l’article 10 et l’article 21, paragraphe 5, du règlement 2017/2195, en excédant sa compétence, par le fait d’obliger les GRT à lui soumettre une proposition de modification de la méthodologie aFRR, ce qu’elle n’aurait pas eu le pouvoir de faire en application de l’article 6, paragraphe 10, du règlement 2019/942 ou de l’article 5, paragraphe 7, du règlement 2017/2195. En effet, comme l’a observé à juste titre la commission de recours, représentée par son président, au point 12 de la décision de non-divulgation, l’existence du document dont la divulgation était demandée était sans pertinence pour apprécier, à cet égard, la compétence de l’ACER au regard de la réglementation applicable.

185    D’autre part, au point 157 du recours devant la commission de recours, relatif au septième moyen soulevé dans ce dernier, lu conjointement avec les premier à troisième moyens, le groupe A n’a nullement expliqué en quoi une copie des éventuels formulaires contenant les avis du conseil des régulateurs et de l’ACER sur la décision 02/2020 et la méthodologie aFRR qui y était annexée, avant leur adoption, permettant, comme cela est indiqué par le groupe A, de connaître le contenu et l’étendue des discussions qui avaient eu lieu à son égard au sein de l’ACER, aurait été nécessaire pour statuer sur le septième moyen du recours, qui tendait essentiellement à faire constater que l’ACER avait violé l’article 6, paragraphe 11, et l’article 14, paragraphe 6, du règlement 2019/942 ainsi que l’article 41 de la Charte, en ne consultant pas suffisamment les GRT et les ARN concernées avant l’adoption de la décision 02/2020 et de la méthodologie aFRR qui y était annexée et en ne motivant pas suffisamment cette dernière décision.

186    Partant, dans les circonstances de l’espèce, la commission de recours représentée par son président était fondée à ne pas donner suite à la demande de production des documents litigieux formulée par le groupe A, au titre de l’article 20, paragraphe 3, sous d), de son règlement de procédure, au point 161, sous d), de son recours formé devant cette même commission.

187    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le grief tiré d’une prétendue violation du « droit d’accès au dossier ».

–       Sur la violation de l’obligation de motivation

188    Le groupe A soutient que, dans la décision attaquée, la commission de recours a violé, à plusieurs égards, l’obligation de motivation qui lui incombait. Premièrement, celle-ci n’aurait pas motivé de manière suffisante le rejet du grief, soulevé dans le cadre du sixième moyen du recours qu’il avait introduit devant elle, tiré d’une violation par l’ACER du principe de proportionnalité, en ce que, dans la décision 02/2020, elle aurait imposé aux GRT de désigner une entité juridique unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, y compris la gestion de capacité, alors que cette exigence n’aurait été ni nécessaire ni adéquate pour atteindre les objectifs énoncés à l’article 3 du règlement 2017/2195. Deuxièmement, contrairement à ce qu’elle aurait prétendu faire aux paragraphes 245 à 262 de la décision attaquée, la commission de recours n’aurait pas examiné et, a fortiori, motivé le fait d’avoir écarté l’argument principal, invoqué à l’appui du deuxième moyen du recours introduit devant elle, selon lequel l’ACER avait apporté une modification fondamentale, après la troisième proposition d’aFRRIF modifiée soumise par les GRT, en incluant la fonction de gestion de capacité dans l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux, sur laquelle lesdits GRT n’auraient pas été consultés et qui n’aurait pas figuré dans la version finale du projet de décision de l’ACER.

189    L’ACER conteste les arguments du groupe A et conclut au rejet du présent grief.

190    À cet égard, il importe de rappeler que, en vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la Charte, il incombe à l’administration de motiver ses décisions.

191    Il ressort d’une jurisprudence constante que la motivation exigée également par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du 29 juin 2017, E-Control/ACER, T‑63/16, non publié, EU:T:2017:456, point 68 et jurisprudence citée).

192    Toutefois, il ne saurait être exigé d’une commission de recours qu’elle fournisse un exposé qui suivrait exhaustivement un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elle. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la commission de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt du 29 juin 2017, E-Control/ACER, T‑63/16, non publié, EU:T:2017:456, point 69 et jurisprudence citée).

193    À la lumière de cette jurisprudence, premièrement, il y a lieu de rejeter le grief du groupe A selon lequel la commission de recours a rejeté le grief tiré de la violation du principe de proportionnalité par l’ACER sans expliquer en quoi l’exigence d’une structure avec une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, incluant la gestion de capacité, était adéquate pour atteindre les objectifs poursuivis. En effet, à titre principal, la commission de recours a réfuté que l’ACER a imposé aux GRT une structure avec une entité unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR. À titre subsidiaire, elle a observé que l’ACER ne pouvait pas approuver une méthodologie aFRR qui n’aurait pas été conforme, selon elle, à la réglementation applicable et qu’il était nécessaire et proportionné qu’elle mentionne, dans sa décision, les conditions d’une telle conformité. Cette motivation était suffisante pour permettre au groupe A de comprendre le raisonnement, principal et subsidiaire, sur lequel la commission de recours avait fondé le rejet, dans la décision attaquée, du grief tiré de la violation du principe de proportionnalité par l’ACER et pour le contester, le cas échéant, devant le Tribunal. En outre, elle était suffisante pour permettre au Tribunal de contrôler, le cas échéant, le bien-fondé d’un tel rejet. Dans ce contexte, le groupe A ne peut reprocher à la commission de recours de ne pas avoir répondu à l’ensemble de l’argumentation qu’il avait développée devant elle.

194    Deuxièmement, s’agissant du défaut allégué de motivation du rejet du grief selon lequel l’ACER avait apporté une modification fondamentale au libellé de l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux, par rapport à la version finale du projet de décision du 20 décembre 2019, en incluant la gestion de capacité dans celui-ci comme étant une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR, sans que les GRT aient été consultés sur cette modification, il ressort du contexte dans lequel la décision 02/2020 a été adoptée et, notamment, des réponses de celle-ci à leurs deuxième et troisième propositions d’aFRRIF que les GRT ne pouvaient ignorer que l’ACER considérait, d’une part, que la gestion de capacité était une fonction requise pour l’exploitation de la plateforme aFRR et, d’autre part, que si toutes les fonctions requises pour l’exploitation de cette plateforme devaient être exécutées par plusieurs entités, il conviendrait de respecter les exigences supplémentaires prévues dans la seconde phrase de l’article 21, paragraphe 3, sous e), du règlement 2017/2195.

195    Ainsi, c’est en toute connaissance de cause que les GRT ont refusé de répondre, dans leur troisième proposition d’aFRRIF modifiée, aux attentes de l’ACER à cet égard, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort du présent recours, certains d’entre eux ne partageaient pas son point de vue concernant les exigences qui auraient découlé de l’application de la réglementation régissant le cas d’espèce. C’est dans ce contexte que, dans la décision attaquée, la commission de recours a, pour répondre au grief du groupe A selon lequel les GRT n’avaient pas été consultés sur une modification fondamentale de la méthodologie aFRR introduite au dernier moment par l’ACER, indiqué que la question concernée par cette modification avait été au cœur des discussions entre elle et les GRT pendant la phase de consultation et que les GRT avaient été pleinement en mesure d’échanger avec l’ACER sur les positions prises par celle-ci, mais que, compte tenu des contraintes de délai qui encadraient son pouvoir de décision, l’ACER avait fini par adopter l’aFRRIF litigieux en indiquant à quelles conditions les choix qui seraient effectués par les GRT concernant l’entité chargée d’exécuter la fonction de gestion de capacité seraient conformes à la réglementation applicable.

196    Au vu du contexte dans lequel elle était fournie, cette motivation était suffisante, en l’espèce, pour permettre au groupe A de comprendre les raisons pour lesquelles, dans la décision attaquée, son grief était rejeté par la commission de recours et pour les contester, le cas échéant, devant le Tribunal. En outre, elle était suffisante pour permettre au Tribunal de contrôler, le cas échéant, le bien-fondé d’un tel rejet.

197     Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le grief tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

–       Sur la violation de l’obligation incombant à la commission de recours d’effectuer un contrôle entier des décisions de l’ACER

198    Les requérantes font grief à la commission de recours d’avoir commis une erreur de droit, dans la décision attaquée, en ne procédant pas à un contrôle entier de la décision 02/2020, au regard du moyen, qu’elles avaient soulevé devant elle, tiré d’une violation de l’article 21 du règlement 2017/2195 résultant de ce que l’ACER aurait imposé aux GRT de désigner une entité juridique unique pour exécuter les fonctions requises pour l’exploitation de la plateforme aFRR, y compris la fonction de gestion de capacité. Il ressortirait de l’arrêt du 18 novembre 2020, Aquind/ACER (T‑735/18, sous pourvoi, EU:T:2020:542, points 69 et 70), que la commission de recours devrait procéder à un contrôle entier des décisions de l’ACER. Or, alors que, au paragraphe 168 de la décision attaquée, la commission de recours aurait clairement indiqué devoir effectuer un contrôle entier sur la question de droit qui était soulevée par les requérantes, elle aurait, en pratique et conformément à sa pratique décisionnelle, procédé à un contrôle restreint, ainsi que cela ressortirait de la note en bas de page no 81 de cette même décision. En pratique, l’ACER n’aurait pas démontré que la commission de recours avait effectué, dans la décision attaquée, un contrôle entier de la décision 02/2020.

199    L’ACER conteste les arguments avancés par les requérantes et conclut au rejet du présent grief.

200    Certes, comme le relèvent les requérantes, le contenu de la note en bas de page no 81 de la décision attaquée, ainsi que du paragraphe 192 de ladite décision, laisse entendre que la commission de recours, conformément à sa pratique décisionnelle de l’époque, n’a effectué un contrôle entier que sur les appréciations juridiques de l’ACER dans sa décision 02/2020, mais qu’elle s’est limitée à effectuer un contrôle restreint, limité à la recherche d’erreurs manifestes, sur ses appréciations factuelles complexes, d’ordre technique, en reconnaissant, à cet égard, à l’ACER une certaine marge d’appréciation.

201    Or, il ressort notamment du point 69 de l’arrêt du 18 novembre 2020, Aquind/ACER (T‑735/18, sous pourvoi, EU:T:2020:542), que le contrôle effectué par la commission de recours des appréciations d’ordre technique et économique complexes figurant dans une décision de l’ACER ne doit pas être limité au contrôle restreint de l’erreur manifeste d’appréciation. Au contraire, en se fondant sur l’expertise scientifique de ses membres, ladite commission doit examiner si les arguments avancés par la partie requérante sont susceptibles de démontrer que les considérations sur lesquelles la décision de l’ACER est fondée sont entachées d’erreurs.

202    Ainsi, comme le soulignent à bon droit les requérantes, la commission de recours était tenue de procéder, dans la décision attaquée, à un contrôle entier de la décision 02/2020.

203    Cependant, il ressort d’un examen attentif de la décision attaquée que, dans celle-ci, la commission de recours a essentiellement fait porter son contrôle sur des appréciations juridiques effectuées par l’ACER dans sa décision 02/2020, à l’égard desquelles elle a exercé un entier contrôle.

204    Par ailleurs, dans les rares cas où, comme au paragraphe 192 de la décision attaquée, elle a été appelée à contrôler des appréciations d’ordre technique complexes, la commission de recours a, en pratique, effectué un contrôle qui allait au-delà d’un simple contrôle restreint, de sorte que, de facto, celle-ci s’est conformée à ses obligations en ce qui concernait l’intensité du contrôle qu’elle devait effectuer sur la décision 02/2020. En effet, dans le paragraphe en cause, la chambre de recours, après avoir relevé qu’il s’agissait d’une appréciation d’ordre technique complexe pour laquelle l’ACER bénéficiait d’une marge d’appréciation, a néanmoins vérifié si celle-ci avait pu conclure à juste titre que le processus de mise à jour en continu de la capacité de transport entre zones disponible, sous une forme centralisée ou décentralisée, était une fonction requise, sur le plan technique, pour l’exploitation de la plateforme aFRR.

205    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le grief pris d’une violation de l’obligation incombant à la commission de recours d’effectuer un contrôle entier des décisions de l’ACER.

–       Sur une erreur d’interprétation et un examen insuffisant, par la commission de recours, des moyens soulevés devant elle

206    Le groupe A reproche à la commission de recours une erreur d’interprétation et un examen insuffisant, dans la décision attaquée, des moyens qu’il avait soulevés devant elle. Premièrement, la commission de recours aurait examiné le recours qu’il avait introduit devant elle sans comprendre la portée et l’objet de ce recours. Ainsi, contrairement à ce que la commission de recours affirmerait aux paragraphes 76, 141 et 181 de la décision attaquée, il aurait contesté les faits mentionnés aux considérants 67 à 77 de la décision 02/2020 et formé un recours contre l’article 6, paragraphe 4, et l’article 4, paragraphe 6, de l’aFRRIF litigieux. En outre, aux paragraphes 67 à 77 de la décision attaquée, la commission de recours n’aurait pas exposé des faits, mais résumé la position de l’ACER. Quant aux erreurs de la commission de recours qui auraient été corrigées par un rectificatif versé au dossier de la présente affaire, les requérantes auraient contesté, par actes déposés au greffe de la commission de recours et versés au dossier de la présente affaire, qu’il s’agissait de simples erreurs d’écritures, plutôt que de fond. Deuxièmement, le groupe A critique la commission de recours pour ne pas avoir tiré les conséquences découlant de l’examen du troisième moyen qu’il avait soulevé devant elle. En effet, dans la mesure où celle-ci avait constaté que l’obligation prévue à l’article 12, paragraphe 2, de l’aFRRIF litigieux avait été imposée par l’ACER et ne découlait pas directement du règlement 2017/2195, elle aurait dû accueillir ce moyen ou, à défaut, exposer les raisons pour lesquelles, nonobstant le libellé des dispositions pertinentes, l’ACER n’avait pas outrepassé les limites de sa compétence.

207    L’ACER conteste les arguments du groupe A et conclut au rejet du présent grief.

208    Concernant le reproche du groupe A selon lequel la commission de recours n’a pas compris la portée et l’objet du recours qu’il avait introduit devant elle, il y a lieu de relever que, certes, dans la décision attaquée, ladite commission a commis certaines erreurs ou maladresses.

209    En premier lieu, il est exact et, au demeurant, l’ACER le reconnaît, au point 219 du mémoire en défense, que la commission de recours a indiqué à tort, aux paragraphes 141 et 181 de la décision attaquée, que le groupe A n’avait pas remis en cause, devant elle, la légalité de l’article 6, paragraphe 4, et de l’article 4, paragraphe 6, de l’aFRRIF litigieux.

210    En second lieu, il est exact que la commission de recours a indiqué à titre liminaire, au paragraphe 76 de la décision attaquée, que le groupe A n’avait pas remis en cause, devant elle, les « faits contenus aux [considérants] 67 [à] 77 de la [décision 02/2020] », ce qui était maladroit, dans la mesure où, dans ces considérants, la présentation d’informations purement factuelles était mêlée à celle de l’interprétation juridique de la réglementation applicable par l’ACER, laquelle n’était pas partagée par le groupe A.

211    Toutefois, indépendamment du rectificatif intervenu le 21 décembre 2020, après l’introduction et, donc, au vu du présent recours, ce qui a été dénoncé par les requérantes, il y a lieu de relever qu’elles ne prétendent ni, a fortiori, ne démontrent que ces erreurs dans les motifs de la décision attaquée, ultérieurement corrigées, ont eu un impact sur le dispositif de ladite décision, de sorte qu’elles ne peuvent justifier une annulation de cette dernière.

212    En tout état de cause, s’agissant des critiques dirigées contre les considérants 67 à 77 de la décision 02/2020, il y a lieu de relever que, dans ceux-ci, la commission de recours a clairement indiqué que l’interprétation juridique de la réglementation applicable qui était exposée était celle de l’ACER et qu’elle n’était pas partagée par les requérantes, de sorte que le grief formulé par le groupe A manque en fait.

213    Concernant la critique du groupe A selon laquelle la commission de recours n’a pas tiré les conséquences découlant de son appréciation du troisième moyen qu’il avait soulevé devant elle, cette critique repose sur une argumentation qui a déjà été rejetée au point 168 ci-dessus. Pour les mêmes raisons, il y a lieu d’écarter ladite critique comme étant non fondée.

214    Au vu de l’ensemble des appréciations qui précèdent, il y a lieu de rejeter intégralement le grief tiré d’une erreur d’interprétation et un examen insuffisant par la commission de recours des moyens soulevés devant elle, le troisième moyen et, par suite, le présent recours.

 Sur les dépens

215    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter leurs propres dépens ainsi que ceux exposés par l’ACER, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Austrian Power Grid AG et les autres parties requérantes dont les noms figurent en annexe sont condamnées aux dépens.

Papasavvas

Tomljenović

Škvařilová-Pelzl

Nõmm

 

      Kukovec

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 février 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.


1      La liste des autres parties requérantes n’est annexée qu’à la version notifiée aux parties.