Language of document : ECLI:EU:T:2014:900

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

21 octobre 2014 (*)

« Inexécution d’un arrêt de la Cour constatant un manquement d’État – Astreinte – Décision de liquidation de l’astreinte – Obligation de récupération – Entreprises faisant l’objet de procédures de faillite – Objet des procédures de faillite en cause – Diligence nécessaire – Charge de la preuve »

Dans l’affaire T‑268/13,

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Fiorentino, avvocato dello Stato,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. V. Di Bucci, G. Conte et B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2013) 1264 final de la Commission, du 7 mars 2013, ordonnant à la République italienne de verser sur le compte « Ressources propres de l’Union européenne » la somme de 16 533 000 euros à titre d’astreinte,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 mai 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par la décision 2000/128/CE, du 11 mai 1999, concernant les régimes d’aide mis à exécution par l’Italie portant mesures pour l’emploi (JO 2000, L 42, p. 1, ci-après la « décision litigieuse »), la Commission des Communautés européennes a ordonné à la République italienne de procéder à la récupération d’aides illégales et incompatibles avec le marché commun octroyées dans le cadre de mesures pour l’emploi.

2        Le recours formé par la République italienne contre la décision litigieuse a été rejeté par arrêt du 7 mars 2002, Italie/Commission (C‑310/99, Rec, EU:C:2002:143).

3        Par requête déposée au greffe de la Cour le 15 mars 2002, la Commission a introduit, en vertu de l’article 88, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE, un recours ayant pour objet de faire constater que, en n’ayant pas pris, dans les délais prescrits, toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès des bénéficiaires les aides qui, aux termes de la décision litigieuse, avaient été jugées illégales et incompatibles avec le marché commun et, en tout état de cause, en ayant omis de l’informer des mesures prises, la République italienne avait manqué aux obligations lui incombant en vertu de la décision litigieuse ainsi que du traité CE.

4        Par arrêt du 1er avril 2004, Commission/Italie (C‑99/02, Rec, ci-après l’« arrêt en manquement », EU:C:2004:207), la Cour a accueilli le recours de la Commission et a jugé que, en n’ayant pas pris, dans les délais prescrits, toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès des bénéficiaires les aides qui, aux termes de la décision litigieuse, avaient été jugées illégales et incompatibles avec le marché commun, la République italienne avait manqué aux obligations lui incombant en vertu de la décision litigieuse.

5        Par requête déposée au greffe de la Cour le 30 novembre 2009, la Commission a demandé à la Cour, notamment, d’une part, de déclarer que, en n’ayant pas adopté toutes les mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt en manquement (EU:C:2004:207), la République italienne avait manqué aux obligations lui incombant en vertu de la décision litigieuse et de l’article 228, paragraphe 1, CE et, d’autre part, d’ordonner à la République italienne de verser à la Commission une astreinte journalière d’un montant initialement fixé à 285 696 euros, réduit par la suite à 244 800 euros, pour le retard dans l’exécution de l’arrêt en manquement (EU:C:2004:207), à compter du prononcé de l’arrêt dans cette nouvelle affaire et jusqu’à l’exécution de l’arrêt en manquement (EU:C:2004:207).

6        Par arrêt du 17 novembre 2011, Commission/Italie (C‑496/09, Rec, ci-après l’« arrêt à exécuter », EU:C:2011:740), la Cour a accueilli le recours de la Commission.

7        Dans l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), la Cour a formulé les appréciations suivantes :

« 52. [… I]l convient d’imposer à la République italienne le paiement périodique d’une somme calculée en multipliant un montant de base par le pourcentage des aides illégales dont la récupération n’a pas encore été effectuée ou n’a pas été prouvée par rapport à la totalité des montants non encore récupérés à la date du prononcé du présent arrêt […]

53. À cet égard, pour le calcul de l’astreinte[,] la récupération desdites aides ne saurait être prise en compte qu’à la seule condition que la Commission en ait été informée et ait pu apprécier le caractère approprié de la preuve lui ayant ainsi été communiquée à cet égard […]

54. Dès lors, il convient de fixer la périodicité de l’astreinte en la déterminant sur une base semestrielle afin de permettre à la Commission d’apprécier l’état d’avancement des opérations de récupération eu égard à la situation prévalant à l’issue de la période en question, tout en permettant à l’État membre défendeur de disposer du temps nécessaire pour la réunion et la transmission à la Commission des éléments de nature à établir, pour la période considérée, la récupération des sommes indûment versées.

55. En conséquence, la quantification de l’astreinte sera effectuée sur une base semestrielle et son montant calculé en multipliant un montant de base par le pourcentage des aides illégales dont la récupération n’a pas encore été effectuée ou n’a pas été prouvée à l’issue de la période concernée par rapport à la totalité des montants non encore récupérés à la date du prononcé du présent arrêt.

[…]

67. [… L]a Cour considère que, en l’espèce, l’imposition d’une astreinte d’un montant de base de 30 millions d’euros par semestre est appropriée.

68. En conséquence, il convient de condamner la République italienne à payer à la Commission, sur le compte ‘Ressources propres de l’Union européenne’, une astreinte d’un montant correspondant à la multiplication du montant de base de 30 millions d’euros par le pourcentage des aides illégales incompatibles dont la récupération n’a pas encore été effectuée ou n’a pas été prouvée à l’issue de la période concernée, calculé par rapport à la totalité des montants non encore récupérés à la date du prononcé du présent arrêt, et ce par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt [en manquement], à compter du présent arrêt et jusqu’à l’exécution dudit arrêt [en manquement].

[…]

69. Il importe de rappeler […] qu’il appartient à l’État membre concerné d’apporter la preuve directe et fiable à la Commission de la mise en œuvre de la décision [litigieuse] et de la récupération effective des montants des aides illégales en cause.

[…]

72. S’agissant des hypothèses dans lesquelles les aides en cause doivent être récupérées auprès d’entreprises en état de faillite ou soumises à une procédure de faillite dont l’objet est de procéder à la réalisation de l’actif et à l’apurement du passif, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le fait que des entreprises soient en difficulté ou en faillite n’affecte pas l’obligation de récupération […]

73. Selon une jurisprudence également constante, le rétablissement de la situation antérieure et l’élimination de la distorsion de concurrence résultant des aides illégalement versées peuvent, en principe, être accomplis par l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées […]

74. Aux fins du calcul de l’astreinte […], il incombe donc à la République italienne d’apporter à la Commission la preuve de l’enregistrement des créances en cause dans le cadre de la procédure de faillite. À défaut de pouvoir y parvenir, il appartient à cet État membre de faire état de tout élément de nature à établir qu’il a effectué toute diligence nécessaire à cet effet. En particulier, dans le cas où la demande d’enregistrement d’une créance aurait été rejetée, il lui revient d’apporter la preuve qu’il a engagé, en application du droit national, toute procédure de nature à contester ledit refus. »

8        Au terme de son appréciation, la Cour a, d’une part, jugé que, en n’ayant pas pris, à la date à laquelle avait expiré le délai imparti dans l’avis motivé émis le 1er février 2008 par la Commission en application de l’article 228 CE, toutes les mesures que comportait l’exécution de l’arrêt en manquement (EU:C:2004:207), la République italienne avait manqué aux obligations lui incombant en vertu de la décision litigieuse et de l’article 228, paragraphe 1, CE (arrêt à exécuter, EU:C:2011:740, point 1 du dispositif).

9        D’autre part, au point 2 du dispositif de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), la Cour a jugé que la République italienne était condamnée à payer à la Commission, sur le compte « Ressources propres de l’Union européenne », une astreinte d’un montant correspondant à la multiplication du montant de base de 30 millions d’euros par le pourcentage des aides illégales incompatibles « dont la récupération n’a[vait] pas encore été effectuée ou n’a[vait] pas été prouvée à l’issue de la période concernée », calculé par rapport à la totalité des « montants non encore récupérés à la date du prononcé d[e l’]arrêt [à exécuter] », et ce par semestre de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt en manquement (EU:C:2004:207), à compter de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740) et jusqu’à l’exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740).

10      Par requête déposée au greffe de la Cour le 14 février 2013, la République italienne a, en vertu de l’article 43 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 158 du règlement de procédure de la Cour, introduit une demande en interprétation des points 52, 55 et 68 des motifs ainsi que du point 2 du dispositif de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740).

11      Dans la requête déposée au greffe de la Cour le 14 février 2013, la République italienne a ainsi demandé à la Cour d’interpréter, d’une part, l’expression « montants non encore récupérés à la date du prononcé d[e] [l’]arrêt [à exécuter (EU:C:2011:740)] », figurant aux points 52, 55 et 68 des motifs et au point 2 du dispositif de cet arrêt, en ce sens qu’elle vise les montants non encore récupérés à la date à laquelle s’est terminée, lors de la procédure, la phase d’administration des éléments de preuve, à savoir au moment de la cristallisation de la situation de fait procédurale sur la base de laquelle la Cour a tranché le litige, et, d’autre part, l’expression « dont la récupération n’a pas encore été effectuée ou n’a pas été prouvée à l’issue de la période concernée », employée aux points 52, 55 et 68 des motifs et au point 2 du dispositif du même arrêt, en ce sens qu’elle impose à la Commission de tenir compte, aux fins de l’évaluation semestrielle des progrès réalisés par la République italienne dans la récupération des aides concernées, non pas uniquement des documents relatifs à ce semestre portés à la connaissance de la Commission avant l’expiration dudit semestre, mais de tout document relatif au semestre de référence.

12      Le 11 mars 2013, la République italienne s’est vu notifier la décision C (2013) 1264 final de la Commission, du 7 mars 2013, lui ordonnant de verser sur le compte « Ressources propres de l’Union européenne » la somme de 16 533 000 euros à titre d’astreinte (ci-après la « décision attaquée »), en exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740).

13      Par la décision attaquée, la Commission a enjoint la République italienne, en exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), de payer une somme de 16 533 000 euros à titre d’astreinte.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 mai 2013, la République italienne a formé le présent recours.

15      Postérieurement au dépôt de la requête dans la présente affaire et par ordonnance du 11 juillet 2013, Italie/Commission (C‑496/09 INT, Rec, ci-après l’« ordonnance de la Cour », EU:C:2013:461), la Cour a rejeté la demande en interprétation de la République italienne comme étant irrecevable.

16      La Cour a en effet considéré que « force [étai]t de constater que le dispositif de l’arrêt [à exécuter], conformément à la motivation retenue à ses points 52, 55 et 68, vis[ait] expressément la date du prononcé dudit arrêt comme date de référence pour la détermination du montant total des aides non encore récupérées […] appelé à servir de base de calcul pour l’astreinte dégressive à laquelle cet État membre a[vait] été condamné » (ordonnance de la Cour, EU:C:2013:461, point 9).

17      De même, la Cour a considéré qu’« il [étai]t constant qu’une lecture strictement littérale du dispositif de l’arrêt [à exécuter étai]t de nature à fonder la prise en compte par la Commission, aux fins du calcul du pourcentage des aides devant être considérées comme non récupérées à l’issue d’un semestre déterminé, des seules preuves documentaires […] lui parv[e]n[a]nt avant l’expiration de la période concernée » (ordonnance de la Cour, EU:C:2013:461, point 10).

18      La Cour a jugé que « la demande de la République italienne tend[ait] à remettre en cause les conséquences d’une telle lecture strictement littérale du dispositif de l’arrêt [à exécuter], une telle remise en cause ne [pouvan]t se concilier ni avec [l’article] 43 du statut de la Cour et [l’article] 158, paragraphe 1, du règlement de procédure [de la Cour] ni avec la force de chose définitivement jugée attachée aux arrêts de la Cour » (ordonnance de la Cour, EU:C:2013:461, point 11).

19      Ainsi, « [n]’étant fondée sur aucune difficulté quant au sens et à la portée de l’arrêt [à exécuter], [la] demande d[eva]it donc être déclarée irrecevable » (ordonnance de la Cour, EU:C:2013:461, point 12).

20      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la quatrième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

21      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité la République italienne à préciser, à la suite de l’ordonnance de la Cour, (EU:C:2013:461), quels étaient les moyens, parmi ceux qu’elle invoquait dans sa requête, auxquels, le cas échéant, elle renonçait expressément.

22      Dans les délais impartis, la République italienne a indiqué au Tribunal qu’elle se désistait de deux des trois moyens du recours, ce qu’elle a confirmé lors de l’audience et ce dont le Tribunal a pris acte.

23      Dans le même cadre des mesures d’organisation de la procédure mentionné au point 21 ci-dessus, le Tribunal a posé une question à la République italienne pour réponse écrite avant l’audience.

24      Dans les délais impartis, la République italienne a répondu par écrit à la question du Tribunal.

25      La République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

26      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la République italienne aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du recours

27      Sans exciper formellement de l’irrecevabilité du recours, la Commission fait valoir que, en vertu de l’article 21, deuxième alinéa, du statut de la Cour et de l’article 44, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit être accompagnée de l’acte dont l’annulation est demandée.

28      Or, en l’espèce, la République italienne a produit, à l’annexe A.1 de la requête, la décision attaquée sans ses annexes, de sorte que la requête serait irrégulière.

29      À cet égard, en réponse à une question posée par le Tribunal à l’audience sur ce point, la Commission a précisé que ce grief ne portait pas tant sur la recevabilité du recours, mais sur le fond de l’argumentation de la République italienne.

30      En tout état de cause et quand bien même la Commission n’a pas formellement excipé de l’irrecevabilité du recours en application de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, il convient d’écarter son argumentation tirée d’une prétendue irrégularité de la requête.

31      En effet, il est constant, ainsi que l’admet la Commission elle-même dans ses écrits, que la République italienne a bien joint à sa requête la décision attaquée, de sorte qu’il ne saurait lui être reproché d’avoir enfreint l’article 21, deuxième alinéa, du statut de la Cour et l’article 44, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal.

32      En tout état de cause, le fait de ne pas avoir joint à la requête les annexes de la décision attaquée ne saurait entraîner l’irrecevabilité du recours que si un tel défaut est de nature à gêner les autres parties dans la préparation de leurs arguments (voir, en ce sens et par analogie, arrêts du 10 décembre 1975, Union nationale des coopératives agricoles de céréales e.a./Commission et Conseil, 95/74 à 98/74, 15/75 et 100/75, Rec, EU:C:1975:172, point 4 ; du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission, C‑82/01 P, Rec, EU:C:2002:617, point 11, et du 5 mars 2003, Ineichein/Commission, T‑293/01, RecFP, EU:T:2003:55, point 32).

33      Or, en l’espèce, force est de constater que la Commission a présenté un mémoire en défense particulièrement détaillé, ce qui atteste qu’elle n’a été aucunement gênée par l’absence de communication des annexes de la décision attaquée, et ce d’autant moins qu’elle disposait, en tant qu’auteur de l’acte attaqué, des pièces qui y étaient annexées, qu’elle a, au demeurant, communiquées au Tribunal en annexe de son mémoire en défense.

34      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il n’y a pas lieu de considérer la requête comme ayant été irrégulièrement déposée.

 Sur le fond

35      Ainsi que le Tribunal en a pris acte au point 22 du présent arrêt, la République italienne invoque un moyen unique au soutien du recours, lequel est composé de deux branches.

36      En sa première branche, ce moyen est tiré d’une violation de l’article 260, paragraphe 1, et paragraphe 3, second alinéa, TFUE et de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), en ce qui concerne les créances sur les entreprises faisant l’objet de procédures collectives de « concordato preventivo » (ci-après les « procédures de concordat ») ou d’« amministrazione straordinaria » (ci-après les « procédures d’administration extraordinaire ») (ci-après, prises ensemble, les « procédures collectives en cause »).

37      Par la seconde branche du moyen du recours, la République italienne invoque des violations de l’obligation de motivation.

 Décision attaquée

38      Dans la décision attaquée, la Commission a dressé un état des récupérations au 27 novembre 2011, en distinguant, aux considérants 33 à 39, les sociétés ayant fait l’objet de radiations du registre des sociétés et celles faisant l’objet de procédures de faillite dans le cadre desquels les créances en cause ont été régulièrement inscrites.

39      Par la suite, la Commission a dressé un état des récupérations au 17 mai 2012, en distinguant, aux considérants 49 à 64 de la décision attaquée, les sociétés ayant fait l’objet de radiations du registre des sociétés et celles faisant l’objet de procédures de faillite.

40      Pour ces dernières, la Commission a, au considérant 53 de la décision attaquée, repris les termes du point 74 de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), reproduits au point 7 du présent arrêt.

41      Au considérant 54 de la décision attaquée, la Commission s’est référée au point 36 de l’arrêt du 13 octobre 2011, Commission/Italie (C‑454/09, ci-après l’« arrêt New Interline », EU:C:2011:650), dont il ressort que l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées ne permet de satisfaire à l’obligation de récupération que si, dans le cas où les autorités étatiques ne pourraient récupérer l’intégralité du montant des aides, la procédure de faillite aboutit à la liquidation de l’entreprise, c’est-à-dire à la cessation définitive de son activité.

42      Au considérant 54 de la décision attaquée, la Commission a aussi relevé que l’annexe B du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO L 160, p. 1), ne mentionne, au titre des « procédures de liquidation » en droit italien, au sens dudit règlement, que les procédures de « fallimento » et de « liquidazione coatta amministrativa ».

43      Au considérant 55 de la décision attaquée, la Commission a renvoyé au point 72 de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), reproduit au point 7 du présent arrêt, pour corroborer son analyse selon laquelle seules les procédures collectives débouchant sur la liquidation des sociétés bénéficiaires, c’est-à-dire sur la cessation de leurs activités, pouvaient être considérées comme des « procédures de faillite », au sens du point 74 de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), dont les termes ont été reproduits au point 7 du présent arrêt.

44      Au considérant 56 de la décision attaquée, la Commission a considéré qu’elle devait, dans le cadre de son examen des procédures de faillite, distinguer les procédures ne pouvant connaître de développements ultérieurs pour des raisons objectives, notamment parce que les créances avaient été régulièrement inscrites, et celles en cours. Pour les premières, l’aide a été considérée comme ayant été récupérée, en application du point 74 de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), et son montant n’a pas été retenu aux fins du calcul de l’astreinte. Pour les secondes, lesquelles pouvaient connaître des développements ultérieurs en ce que les aides en cause pouvaient encore être récupérées, la Commission a considéré que la République italienne était tenue, aux termes du point 74 de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), « de faire état de tout élément de nature à établir qu’[elle] a[vait] effectué toute diligence nécessaire à cet effet ».

45      Par conséquent, la Commission a, au considérant 59 de la décision attaquée, considéré qu’elle ne pouvait prendre en compte les sociétés bénéficiaires faisant l’objet des procédures collectives en cause au titre de l’exécution de l’obligation de récupération incombant à la République italienne.

46      Au considérant 59 de la décision attaquée, la Commission a ajouté, s’agissant, d’une part, des procédures d’administration extraordinaire, que leur ouverture requerrait une décision du ministère compétent, de sorte que le recours à de telles procédures était pleinement imputable aux autorités italiennes.

47      S’agissant, d’autre part, des procédures de concordat, la Commission a relevé, également au considérant 59 de la décision attaquée, que chaque créancier intéressé pouvait contester, par voie d’action judiciaire, l’ouverture de telles procédures et considéré que les autorités italiennes n’avaient pas démontré avoir contesté l’ouverture de telles procédures.

 Sur la première branche du moyen du recours

48      Dans le cadre de la première branche du moyen du recours, la République italienne fait valoir que c’est à tort que, dans la décision attaquée, la Commission n’a pas, aux fins du calcul de l’aide en suspens et, partant, de la liquidation de l’astreinte due en exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), déduit les montants correspondant aux créances sur des entreprises faisant encore l’objet de procédures telles que les procédures collectives en cause, bien que les autorités italiennes aient fourni la preuve qu’elles avaient inscrit ces créances au passif desdites entreprises.

49      En ce sens, la République italienne soutient que l’obligation de récupération est également exécutée lorsque l’aide n’a certes pas encore été récupérée, mais que l’État membre en cause a fait preuve de toute la diligence nécessaire à cet effet, de sorte que, dans cette hypothèse, la Commission était obligée, en l’espèce, d’en tenir compte aux fins du calcul de la liquidation de l’astreinte due en exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740).

50      Par conséquent, l’argument tiré du règlement n° 1346/2000 ne serait pas décisif et procéderait en tout état de cause d’une lecture erronée dudit règlement.

51      Concernant les procédures de concordat, l’argument selon lequel les autorités italiennes n’auraient pas prouvé s’être opposées à l’ouverture des procédures de concordat ne serait pas non plus convaincant, car la Commission n’aurait pas précisé ce à quoi elle se référait en exigeant une opposition de la part des autorités italiennes.

52      Concernant les procédures d’administration extraordinaire, la République italienne conteste l’imputabilité du choix de telles procédures aux autorités italiennes, car, dans le cadre desdites procédures, le ministère compétent n’émettrait qu’un avis et ne pourrait s’y opposer en invoquant des créances relatives à des aides à récupérer.

53      À cet égard, il convient de considérer que, par la première branche du moyen du recours, la République italienne soutient, en substance, qu’elle s’est libérée de son obligation de récupération des aides versées aux entreprises concernées par les procédures collectives en cause et que, en tout état de cause, elle a accompli la diligence requise à cet effet, de sorte que la Commission ne pouvait retenir, dans la décision attaquée, les montants relatifs à ces aides, en tant qu’aides non récupérées, aux fins du calcul de l’astreinte due en exécution de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740).

54      Cette argumentation ne saurait prospérer.

55      En effet et en premier lieu, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que le seul moyen susceptible d’être invoqué à bon droit par un État membre aux fins de se libérer de l’obligation lui incombant de récupérer les aides qu’il a versées en violation du droit de l’Union est celui tiré d’une impossibilité absolue d’exécuter correctement la décision lui enjoignant de procéder à la récupération desdites aides (voir, en ce sens, arrêts du 4 avril 1995, Commission/Italie, C‑348/93, Rec, EU:C:1995:95, point 16 ; du 2 juillet 2002, Commission/Espagne, C‑499/99, Rec, EU:C:2002:408, point 21, et du 29 mars 2012, Commission/Italie, C‑243/10, Rec, EU:C:2012:182, point 40).

56      Il y a également lieu de rappeler qu’il a aussi été jugé que le fait qu’un bénéficiaire soit insolvable ou soumis à une procédure de faillite n’a aucune incidence sur son obligation de rembourser les aides illégales et incompatibles (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C‑42/93, Rec, EU:C:1994:326, point 33, et arrêt à exécuter, EU:C:2011:740, point 72).

57      Aussi l’insolvabilité de l’entreprise à laquelle a été versée une aide illégale ou incompatible ne saurait-elle affranchir l’État membre concerné de son obligation de la récupérer (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2013, Commission/Italie, C‑613/11, EU:C:2013:192, point 42 et jurisprudence citée).

58      Certes, il ressort de la jurisprudence relative aux entreprises bénéficiaires d’aides déclarées incompatibles avec le marché commun et qui sont tombées en faillite que le rétablissement de la situation antérieure et l’élimination de la distorsion de concurrence résultant des aides illégalement versées peuvent, en principe, être accomplis par l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées (voir arrêt New Interline, EU:C:2011:650, point 35 et jurisprudence citée).

59      Toutefois, l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées ne permet de satisfaire à l’obligation de récupération que si, dans le cas où les autorités étatiques ne pourraient récupérer l’intégralité du montant des aides, la procédure de faillite aboutit à la liquidation de l’entreprise, c’est-à-dire à la cessation définitive de son activité, que les autorités étatiques peuvent provoquer en leur qualité d’actionnaires ou de créanciers (voir arrêt New Interline, EU:C:2011:650, point 36 et jurisprudence citée).

60      En ce sens, la Cour a également déjà jugé que le fait que, en raison de la situation financière de l’entreprise bénéficiaire de l’aide en cause, les autorités de l’État membre concerné n’avaient pas pu récupérer la somme versée ne constitue pas une impossibilité d’exécution, dès lors que l’objectif poursuivi par la Commission est la suppression de l’aide, objectif susceptible d’être atteint par la liquidation de l’entreprise (arrêts du 15 janvier 1986, Commission/Belgique, 52/84, Rec, EU:C:1986:3, point 14, et Commission/Espagne, EU:C:2002:408, point 38).

61      Il en résulte que l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées ne saurait libérer l’État membre concerné de son obligation de récupérer des aides illégales et incompatibles que s’il rapporte la preuve que l’entreprise en cause fait l’objet d’une procédure collective destinée à aboutir à sa liquidation, c’est-à-dire à la cessation de ses activités, et que l’État membre concerné est susceptible de provoquer la cessation des activités de l’entreprise en cause s’il ne parvient pas à récupérer l’intégralité du montant des aides.

62      Ainsi, quand bien même l’État membre concerné en rapporterait la preuve, l’inscription au tableau des créances dans le cadre d’une procédure de faillite qui viserait à assurer la poursuite des activités de l’entreprise concernée ne permettrait pas, en soi, de remédier aux effets d’une aide versée en violation du droit de l’Union. En effet, de telles procédures ne permettent pas d’établir avec certitude que, si l’État membre ne récupère pas l’intégralité des aides versées, il pourra provoquer la cessation de l’activité de l’entreprise en cause.

63      Partant, l’inscription au tableau des créances dans le cadre d’une procédure de faillite qui viserait à assurer la poursuite des activités de l’entreprise concernée ne saurait libérer l’État membre concerné de l’obligation qui lui incombe de rapporter la preuve qu’il a procédé à la récupération des aides qu’il a versées en violation du droit de l’Union, de sorte que la preuve d’une telle inscription ne saurait, en soi, établir l’exécution de ladite obligation.

64      Par conséquent, c’est à bon droit que la Commission a pu considérer que l’inscription au tableau des créances, de celle relative à la restitution des aides concernées, des entreprises faisant l’objet de procédures collectives qui ne sont pas destinées à aboutir à leur liquidation, c’est-à-dire à la cessation de leurs activités, ne libère aucunement l’État membre concerné de son obligation de récupérer les aides illégales ou incompatibles qui leur ont été octroyées en violation du droit de l’Union.

65      Il s’ensuit que, dans de telles circonstances, la Commission a pu, à bon droit, inclure ces créances dans le champ de l’obligation de récupération des aides en suspens aux fins de liquider une astreinte.

66      En l’espèce, force est de constater, ainsi que la République italienne l’a elle-même et clairement affirmé lors de l’audience en réponse à une question du Tribunal, que les procédures collectives en cause ne sont pas destinées à aboutir à la liquidation des entreprises concernées, mais visent, bien au contraire, à assurer la poursuite de leurs activités.

67      En tout état de cause, indépendamment de l’objectif poursuivi par les procédures collectives en cause, la République italienne n’a, à aucun moment, rapporté la preuve que, pour les entreprises en cause en l’espèce, lesdites procédures aboutiraient à leur liquidation.

68      En outre, le règlement n° 1346/2000 s’applique, aux termes de son article 1er, paragraphe 1, aux procédures collectives fondées sur l’insolvabilité du débiteur qui entraînent le dessaisissement partiel ou total de ce débiteur ainsi que la désignation d’un syndic et, en vertu de l’article 2, sous a), dudit règlement, par « procédure d’insolvabilité», il convient d’entendre les procédures collectives visées à l’article 1er, paragraphe 1, du même règlement, dont la liste figure à l’annexe A de ce règlement, laquelle comprend les procédures collectives en cause.

69      Il n’en demeure pas moins que, en vertu de l’article 2, sous c), du règlement n° 1346/2000, les procédures de liquidation sont les procédures d’insolvabilité, au sens de l’article 2, sous a), dudit règlement, qui entraînent la liquidation des biens du débiteur, y compris lorsque cette procédure est clôturée par un concordat ou une autre mesure mettant fin à l’insolvabilité, ou est clôturée en raison de l’insuffisance de l’actif, la liste de ces procédures figurant à l’annexe B du même règlement, laquelle ne comprend manifestement pas les procédures collectives en cause, ainsi que la République italienne l’a elle-même et clairement affirmé en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience.

70      Ainsi que la République italienne l’a fait valoir à juste titre, certes, à l’annexe B du règlement n° 1346/2000, figurent également certaines procédures de concordat préventif et d’administration extraordinaire qui peuvent déboucher sur la liquidation des sociétés concernées, à savoir les procédures de « concordato preventivo con cessione dei beni », les procédures d’« amministrazione straordinaria con programma di cessione dei complessi aziendali » et les procédures d’« amministrazione straordinaria con programma di ristrutturazione di cui sia parte integrante un concordato con cessione dei beni ».

71      Toutefois, force est de constater que ces procédures sont des procédures spécifiques par rapport aux procédures collectives en cause, lesquelles ne figurent qu’à l’annexe A dudit règlement. Plus particulièrement, faute d’avoir démontré que les procédures collectives en cause relevaient également des procédures visées par l’annexe B du règlement n° 1346/2000, la République italienne ne peut alléguer que celles-ci sont non seulement des procédures de faillite, mais également des procédures de liquidation.

72      En effet, la République italienne n’a aucunement établi, ni même soutenu, que les entreprises en cause dans la présente affaire faisaient l’objet de procédures de « concordato preventivo con cessione dei beni » ou de procédures d’« amministrazione straordinaria con programma di cessione dei complessi aziendali ».

73      Ainsi, la République italienne ne saurait utilement faire valoir, sur la base des dispositions du règlement n° 1346/2000, que les procédures collectives en cause relèvent des procédures de faillite dans le cadre desquelles l’inscription au tableau des créances de celle relative à la restitution des aides concernées libère l’État membre concerné de son obligation de récupérer des aides illégales et incompatibles avec le marché commun.

74      La République italienne ne saurait d’autant moins invoquer les dispositions du règlement n° 1346/2000 qu’il ressort sans équivoque de ses réponses aux questions du Tribunal durant l’audience que les procédures collectives en cause ne visent pas à entraîner la liquidation des biens du débiteur, mais à chercher un accord avec les créanciers pour éviter la déclaration de faillite pour ce qui est de la procédure de concordat et, pour ce qui est de la procédure d’administration extraordinaire, à la récupération et à l’assainissement des grandes entreprises se trouvant en état d’insolvabilité, dans le but de préserver les emplois.

75      En tout état de cause, la République italienne n’a nullement établi que, dans l’hypothèse où elle ne pouvait pas récupérer la totalité du montant des aides dans les procédures collectives en cause, elle pouvait toutefois provoquer la cessation définitive de l’activité des entreprises en question.

76      En second lieu, la République italienne ne saurait non plus convaincre en affirmant qu’elle a effectué toute diligence nécessaire aux fins d’exécuter l’obligation de récupération lui incombant pour ce qui est des entreprises faisant l’objet des procédures collectives en cause.

77      Certes et ainsi que la République italienne l’a fait valoir à juste titre, il convient de rappeler que, dans l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), la Cour a jugé, au point 74, que, à défaut de pouvoir parvenir à rapporter à la Commission la preuve de l’enregistrement des créances en cause dans le cadre de procédures de faillite, il appartient à la République italienne de faire état de tout élément de nature à établir qu’elle a effectué toute diligence nécessaire à cet effet et, en particulier, que, dans le cas où la demande d’enregistrement d’une créance aurait été rejetée, il lui revient d’apporter la preuve qu’elle a engagé, en application du droit national, toute procédure de nature à contester ledit refus. 

78      Il n’en demeure pas moins que, en l’espèce, la République italienne n’a aucunement rapporté des éléments de nature à établir qu’elle avait effectué toute la diligence nécessaire aux fins de récupérer les aides en question.

79      Pour ce qui est, d’une part, des procédures de concordat, la République italienne se contente d’affirmer que les autorités italiennes ont subi lesdites procédures et qu’elles ne pouvaient s’y opposer en vertu de dispositions juridiques nationales, dès lors que de telles procédures sont engagées, poursuivies et interrompues, en droit italien, par des décisions de la majorité des créanciers.

80      De même et pour ce qui est, d’autre part, des procédures d’administration extraordinaire, la République italienne se limite à prétendre qu’elle ne pouvait s’opposer, en vertu de dispositions juridiques nationales, au choix d’une telle procédure en invoquant ses créances au titre de l’obligation de récupération lui incombant.

81      Or, la République italienne ne saurait se borner à faire valoir de telles difficultés juridiques s’opposant à l’exécution de l’obligation de récupération lui incombant aux fins d’établir qu’elle s’en est libérée (voir, en ce sens, arrêts du 5 mai 2011, Commission/Italie, C‑305/09, Rec, EU:C:2011:274, point 33 et jurisprudence citée ; du 14 juillet 2011, Commission/Italie, C‑303/09, EU:C:2011:483, point 34 ; du 17 octobre 2013, Commission/Italie, C‑344/12, EU:C:2013:667, point 49, et du 12 décembre 2013, Commission/Italie, C‑411/12, EU:C:2013:832, point 37).

82      En effet, force est de constater que la République italienne ne prétend nullement que les autorités italiennes ont contesté, en application du droit national, la mise en œuvre des procédures collectives en cause, ce qui aurait pu avoir pour conséquence d’entamer des procédures de faillite à même d’éliminer toute distorsion de concurrence, c’est-à-dire des procédures débouchant sur la liquidation des entreprises concernées et, partant, sur la cessation définitive des activités des entreprises auxquelles ont été octroyées des aides illégales et incompatibles avec le marché commun.

83      En particulier, s’agissant de l’argument selon lequel la République italienne ne pouvait s’opposer à la prise de position majoritaire des créanciers dans le contexte de l’approbation d’un concordat, il suffit d’observer que la République italienne n’a pas démontré, pour chaque entreprise sous concordat auprès de laquelle elle était tenue de récupérer l’aide en question, avoir participé au vote visé par l’article 177 de la loi italienne sur les faillites en votant contre le concordat. Or ; en l’absence de preuve d’une telle participation, qui était susceptible d’entraîner une absence d’approbation du concordat par la majorité des créanciers, la République italienne ne peut alléguer avoir fait preuve de toute la diligence nécessaire pour récupérer la totalité du montant des aides en question auprès desdites entreprises.

84      En outre et en tout état de cause, quand bien même certaines des procédures en cause pourraient, dans des circonstances marginales selon la République italienne, déboucher, de facto, sur la liquidation des entreprises concernées et, partant, sur la cessation définitive des activités des entreprises auxquelles ont été octroyées des aides illégales et incompatibles avec le marché commun, force est de constater que ce même gouvernement n’a, tout au long de la procédure, pas même tenté d’établir qu’il en était ainsi pour l’une des entreprises faisant l’objet des procédures collectives en cause et qu’il a expressément admis, lors de l’audience, ne pas avoir été en mesure de rapporter des éléments de preuve en ce sens.

85      Il en résulte que, pris en sa première branche, le moyen du recours, tiré d’une violation de l’article 260, paragraphe 1, et paragraphe 3, second alinéa, TFUE et de l’arrêt à exécuter (EU:C:2011:740), est non fondé et doit être rejeté.

 Sur la seconde branche du moyen du recours

86      Dans le cadre de la seconde branche du moyen du recours, la République italienne soutient que la Commission a, dans la décision attaquée, manqué à l’obligation de motivation qui lui incombe.

87      Selon la République italienne, la Commission aurait dû expliquer, dans la décision attaquée, pourquoi il incombait aux autorités italiennes de contester les décisions par lesquelles ses créances, au titre de l’obligation de récupération, ont été admises au tableau du passif des sociétés faisant l’objet des procédures de concordat.

88      La Commission aurait dû tout autant expliquer, dans la décision attaquée, pourquoi les procédures d’administration extraordinaire ne satisfaisaient pas à l’obligation de récupération.

89      Même à considérer qu’ils soient recevables en dépit du fait qu’ils ne sont que très peu étayés, les griefs de la République italienne tirés de prétendus défauts de motivation de la décision attaquée doivent être rejetés.

90      En effet, il résulte d’une jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt du Tribunal du 6 décembre 2005, Brouwerij Haacht/Commission, T‑48/02, Rec, EU:T:2005:436, point 45 et jurisprudence citée).

91      Or, en l’espèce, force est de constater que la Commission a exposé, à suffisance de droit, les motifs de son appréciation aux considérants 53 à 59 de la décision attaquée, mentionnés aux points 40 à 47 du présent arrêt, de sorte que la République italienne a été pleinement en mesure de connaître les justifications de la décision attaquée et le Tribunal d’exercer son contrôle, ainsi que cela ressort, au demeurant, de l’appréciation de la première branche du moyen du recours.

92      Par conséquent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du moyen du recours et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

93      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

94      La République italienne ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de celle-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République italienne est condamnée aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 octobre 2014.

Signatures



* Langue de procédure : l’italien.