DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)
27 février 2019 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative Dienne – Marque de l’Union européenne figurative antérieure ENNE – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 »
Dans l’affaire T‑107/18,
Erkan Aytekin, demeurant à Ankara (Turquie), représenté par Me V. Martín Santos, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral et Mme G. Sakalaite-Orlovskiene, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
Dienne Salotti Srl, établie à Altamura (Italie), représentée par Me D. Russo, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 15 décembre 2017 (affaire R 1444/2017‑2), relative à une procédure d’opposition entre M. Aytekin et Dienne Salotti,
LE TRIBUNAL (septième chambre),
composé de Mme V. Tomljenović, président, M. E. Bieliūnas et Mme A. Marcoulli (rapporteur), juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 20 février 2018,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 8 mai 2018,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 15 mai 2018,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 5 février 2016, l’intervenante, Dienne Salotti Srl, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

3 Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 20 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Lits à rangement ; dossiers pour position assise au lit ; fauteuils ; lits superposés ; divans ».
4 La demande de marque a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 2016/28, du 11 février 2016.
5 Le 17 février 2016, le requérant, M. Erkan Aytekin, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.
6 L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure enregistrée le 5 novembre 2012 sous le numéro 10863793, reproduite ci-après :

7 Les produits et services pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée relèvent des classes 20, 24 et 35 et correspondent, en ce qui concerne les produits relevant de la classe 20, à la description suivante : « Meubles en tous matériaux ; présentoirs et tableaux d’affichage ; meubles à fichiers ; armoires à médicaments ; bureaux pour écrire et dessiner ; dessertes (meubles) ; transatlantiques [chaises longues] ; comptoirs (tables) non métalliques ; établis ; étaux-établis ; huches ; boîtes aux lettres ; distributeurs fixes (non métalliques) de serviettes ; matelas ; matelas élastiques ; oreillers ; matelas à air et oreillers ; lits (hydrostatiques [à eau]) non à usage médical ; paillasses et sacs de couchage pour le camping ; miroirs ; ruches pour abeilles ; cire gaufrée pour ruches ; cadres de ruches ; parcs pour bébés ; chaises hautes pour bébés ; berceaux ; trotteurs ; plaques minéralogiques non métalliques ; enseignes ; enseignes en bois ou en matières plastiques ; tableaux d’affichage ; canons en bois ; tonneaux et barils ; récipients pour liquides ; boîtes en bois ; boîtes de transport ; palanches de transport ; récipients d’emballage en matières plastiques, fûts en plastique ; tonneaux et barils ; réservoirs ni en métal, ni en maçonnerie ; boîtes ; cadres ; baguettes (liteaux) d’encadrement ; moulures pour cadres [encadrements] ; embrasses non en matières textiles ; crochets de rideaux ; rails pour rideaux ; anneaux de rideaux ; tringles de rideaux ; galets pour rideaux ; embrasses pour retenir les rideaux ; manches ; tiges de poignée ; boutons ou tampons pour outils et instruments ; loquets non métalliques ; fermetures de bouteilles non métalliques ; capsules de bouteilles [non métalliques] ; bouchons de bouteilles ; cordons en liège ; rivets non métalliques ; boulons non métalliques ; vis non métalliques ; chevilles non métalliques ; attaches pour câbles ou tuyaux, tampons (chevilles) non métalliques ; cintres de placards, portemanteaux et housses à vêtements [penderie] ; objets d’art en bois, cire, plâtre ou plastique compris dans cette classe ; sculptures ; bustes ; mannequins ; mobiles (objets pour la décoration) ; articles de décoration murale (agencement intérieur) non en matière textile ; animaux empaillés ; paniers, panetons ; mannes [paniers] ; paniers en roseau ; bannetons ; niches de chiens ; nichoirs ; coussins ; couchettes pour animaux d’intérieur ; échelles portables en bois ou en plastique (non métalliques) ; échelles d’embarquement non métalliques ; échelles mobiles d’embarquement de passagers ; dévidoirs non mécaniques pour tuyaux flexibles [non métalliques] ; soupapes et vannes non métalliques, robinets de tonneaux (non métalliques) ; plaques d’identité non métalliques ; plaques minéralogiques non métalliques, pour véhicules ; plaques minéralogiques non métalliques ; garnitures de fenêtres non métalliques ; garnitures de portes (non métalliques) ; serrures non métalliques ; rayonnages, rayons pour casiers ; chariots (mobilier) ; poignées de porte non métalliques ; rails de tiroirs ; roues (de meubles), non métalliques ; rideaux de bambou ; stores intérieurs pour fenêtres (stores) ; stores d’intérieur à lamelles ; rideaux de perles pour la décoration ».
8 Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].
9 Le 29 mai 2017, la division d’opposition a rejeté l’opposition, au motif qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en cause.
10 Le 3 juillet 2017, le requérant a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009 (devenus articles 66 à 71 du règlement 2017/1001), contre la décision de la division d’opposition.
11 Par décision du 15 décembre 2017 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours, en considérant qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les marques en cause.
Conclusions des parties
12 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– accueillir le recours ;
– annuler la décision attaquée et rejeter dans son intégralité la marque demandée ;
– condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens engagés dans le cadre du présent recours et à tous les dépens de la procédure devant l’EUIPO.
13 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner le requérant aux dépens exposés par l’EUIPO.
14 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– confirmer la décision attaquée et la décision de la division d’opposition du 29 mai 2017 ;
– condamner le requérant aux dépens des procédures devant l’EUIPO, la deuxième chambre de recours et le Tribunal.
En droit
15 À titre liminaire, étant donné que « confirmer » la décision attaquée et la décision de la division d’opposition équivaut à rejeter le recours, il y a lieu de regarder le premier chef de conclusions de l’intervenante comme tendant, en substance, au rejet du recours [voir, par analogie, arrêt du 13 décembre 2016, Apax Partners/EUIPO – Apax Partners Midmarket (APAX), T‑58/16, non publié, EU:T:2016:724, point 15 et jurisprudence citée].
16 À l’appui du recours, le requérant invoque en substance un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.
17 Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.
18 Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].
19 Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].
Sur le public pertinent
20 Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].
21 En l’espèce, au point 11 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les produits désignés par les marques en conflit s’adressaient au grand public situé sur le territoire de l’Union européenne, ce qui n’est pas contesté par le requérant.
22 En outre, au point 12 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que ledit public faisait preuve d’un niveau d’attention supérieur à la normale, puisque les éléments d’ameublement ne sont pas achetés régulièrement et que le choix conduisant à l’achat de tels produits est précédé par un processus de comparaison et de réflexion opéré sur la base d’une série de considérations fonctionnelles et esthétiques, afin de créer une harmonie avec les autres éléments d’ameublement dont le consommateur dispose déjà, processus qui requiert un niveau d’attention élevé.
23 Le requérant fait valoir qu’il n’est pas vrai que, pour les produits relevant de la classe 20, le niveau d’attention du consommateur est supérieur à la moyenne. Selon le requérant, comme il s’agit de produits destinés au grand public, l’attention est présumée normale ou même plus faible que la moyenne. Pour ces produits, le consommateur serait susceptible de prêter plus d’attention à un design particulier, au prix et à un style qu’à la marque. D’ailleurs, le prix de ces produits ne serait pas élevé, puisque des chaises sont vendues à 6 euros et des tables à 10 euros.
24 À cet égard, force est de constater que la marque demandée ne vise pas, indistinctement, tous les produits relevant de la classe 20, ni d’ailleurs des chaises ou des tables, mais seulement des éléments d’ameublement bien spécifiques entrant dans cette classe, à savoir des lits à rangement ou superposés, des dossiers pour position assise au lit, des fauteuils et des divans. Or, bien que ces produits soient destinés au grand public, il s’agit de produits dont l’achat, ainsi que l’a considéré à juste titre la chambre de recours, n’est pas régulier ou quotidien mais occasionnel, de tels produits étant, en principe, destinés à durer dans le temps. En outre, l’achat de tels produits est sujet à une série de considérations fonctionnelles et esthétiques inhérentes, notamment, à leur confort et à leur coordination avec d’autres éléments d’ameublement. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que le niveau d’attention du public pertinent était supérieur à la normale. Par conséquent, les arguments du requérant doivent être écartés comme étant non fondés.
Sur la comparaison des produits
25 Au point 13 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que les produits visés par la marque demandée étaient inclus dans les produits visés par la marque antérieure et qu’ils étaient donc identiques, ce qui n’est pas contesté par le requérant.
Sur la comparaison des signes
26 Deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 10 septembre 2008, Boston Scientific/OHMI – Terumo (CAPIO), T‑325/06, non publié, EU:T:2008:338, point 89].
27 L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).
Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit
28 En l’espèce, tout d’abord, au point 19 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la marque antérieure était une marque figurative composée du groupe de lettres « enne » représentées dans une police de caractères gras noirs, que ces lettres étaient en majuscule, qu’elles constituaient un signe court qui était un palindrome et que le deuxième « n » était représenté à l’envers.
29 Ensuite, au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la marque demandée était aussi une marque figurative, composée du groupe de lettres « dienne » représentées dans une police de caractères standard gris, que la lettre « d », dont l’angle droit en bas à gauche n’apparaissait pas, était en majuscule et que le groupe de lettres « ienne » était en minuscule.
30 Enfin, aux points 21 et 22 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, bien que les lettres composant la marque antérieure fussent contenues dans la marque demandée, ces lettres ne ressortaient pas dans la marque demandée, étaient précédées du groupe de lettres « di » et ne constituaient pas un élément dominant. Sur la base de ces considérations, au point 23 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu qu’il n’était pas possible de considérer que la marque antérieure disposait d’une position distinctive autonome dans la marque demandée, ni que la marque demandée était constituée par la marque antérieure à laquelle un autre mot aurait été accolé.
31 À cet égard, d’une part, le requérant fait valoir que les signes en conflit contiennent le même élément « enne » avec un double « n », précédé, dans la marque demandée, par l’élément moins distinctif « di ». Or, dans une certaine mesure, la préposition « di » pourrait être considérée comme étant insignifiante. D’autre part, selon le requérant, la préposition « di » associe la marque antérieure à la marque demandée, puisqu’elle signifie « de » ou « de la part de » ou « appartenant à ». Un tel mot serait compris par la plupart des consommateurs de l’Union, puisqu’il est très fréquent que des marques et des noms fondés sur la langue italienne contiennent cette préposition, d’autant plus que beaucoup de langues de l’Union ont une racine latine commune et partagent des mots très similaires à « di ».
32 Premièrement, il y a lieu de relever que toutes les lettres constituant la marque demandée (« d », « i », « e », « n », « n » et « e ») sont représentées les unes après les autres sans espace ni élément de séparation, y compris entre le groupe de lettres « di » et le groupe « enne ». En outre, ces lettres sont toutes écrites dans la même police de caractères, la même couleur, la même taille et le même alignement horizontal. Seule la lettre « d », placée au début du signe, apparaît en majuscule alors que les autres lettres sont en minuscule. Il en résulte que la série de six lettres se présente comme un seul élément verbal (« dienne »).
33 Deuxièmement, force est de constater qu’aucune lettre ou aucun groupe de lettres ne domine l’image de la marque demandée. En particulier, si, certes, ainsi que le fait valoir le requérant, le groupe de lettres « enne » figure dans les deux marques, il ne domine pas l’image de la marque demandée, dès lors qu’il est représenté dans la même police de caractères que le groupe de lettres « di ». Il n’attire donc pas davantage l’attention du public. Il en va de même pour le groupe de lettres « nn » figurant dans les deux marques.
34 Troisièmement, dans la mesure où les arguments du requérant doivent être compris comme visant à soutenir que le groupe de lettres « di » serait perçu comme une simple préposition utilisée couramment sur le marché et dans la vie quotidienne des consommateurs et, partant, serait faiblement distinctif, il convient de relever que rien ne démontre que ledit groupe de lettres serait perçu, par le grand public situé sur le territoire de l’Union, comme correspondant à la préposition italienne « di » et comme signifiant « de », « de la part de » ou « appartenant à ».
35 En effet, d’une part, ainsi qu’il a été constaté au point 32 ci-dessus, dans la marque demandée, le groupe de lettres « di » n’est pas séparé du groupe de lettres « enne ». En outre, dès lors que la marque demandée ne présente aucun caractère particulier incitant à opérer une telle dissociation ou à s’interroger sur l’éventuelle signification des possibles combinaisons des lettres la composant, il y a lieu de considérer qu’il est très improbable que le consommateur moyen se livre à une analyse linguistique détaillée de la marque demandée, afin de la décomposer et de lui attribuer une signification dans une langue de l’Union, notamment en italien [voir, par analogie, arrêt du 26 novembre 2008, Rajani/OHMI – Artoz-Papier (ATOZ), T‑100/06, non publié, EU:T:2008:527, point 61]. Il est encore plus improbable que le consommateur fasse une telle dissociation en ayant à l’esprit des mots potentiellement similaires dans une autre langue. D’autre part, les exemples de noms ou de marques invoqués par le requérant (« oro di parma », « perle di pomodoro »), à les supposer même existants, ne corroborent pas l’argument du requérant, puisque, dans ces expressions ou marques, la préposition « di » est immédiatement identifiable en tant que telle et a précisément la fonction de faire le lien entre les deux mots qu’elle sépare. Par ailleurs, ainsi que la chambre de recours l’a indiqué, le groupe de lettres « di » correspond également, en italien, au nom de la lettre « d ».
36 Quatrièmement, rien ne démontre non plus que, dans la marque demandée, le groupe de lettres « enne » serait perçu comme se référant à la marque antérieure. En effet, non seulement le groupe de lettres « enne » n’est pas représenté de la même manière dans les deux marques, mais le deuxième « n » de la marque antérieure est représenté à l’envers. En outre, le requérant n’a pas fait valoir que la marque antérieure jouirait d’une renommée particulière.
37 Il s’ensuit que, d’une part, contrairement à ce qui est argué par le requérant, le groupe de lettres « di » n’est pas moins distinctif ni d’ailleurs insignifiant par rapport au groupe de lettres « enne ». D’autre part, le groupe de lettres « enne » ne ressort pas comme étant plus distinctif ou comme étant dominant par rapport au groupe de lettres « di ». En effet, comme l’a relevé la chambre de recours, la perception de la marque demandée n’est dominée par aucun élément.
38 Par conséquent, les arguments du requérant, selon lesquels, dans la marque demandée, l’élément « di » serait faiblement distinctif, voire insignifiant, et la préposition « di » associerait la marque demandée à la marque antérieure, doivent être écartés comme étant non fondés.
39 Par ailleurs, à supposer même que les arguments du requérant doivent être compris comme visant à contester l’appréciation opérée par la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée selon laquelle il n’était pas possible de considérer que la marque antérieure disposait d’une position distinctive autonome dans la marque demandée ni que la marque demandée était constituée par la marque antérieure à laquelle un autre mot aurait été accolé, de tels arguments sont également non fondés.
40 À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort effectivement de la jurisprudence mentionnée par la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée qu’il n’est pas exclu qu’une marque antérieure, utilisée par un tiers dans un signe composé comprenant le nom de l’entreprise de ce tiers, conserve une position distinctive autonome dans le signe composé (voir arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 24 et jurisprudence citée).
41 En outre, il convient de relever que l’examen de l’existence ou non d’une position distinctive autonome de l’un des éléments d’un signe composé vise à déterminer ceux desdits éléments qui seront perçus par le public visé (arrêt du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 33).
42 Or, en l’espèce, bien que la suite de lettres « e », « n », « n » et « e » formant l’élément verbal « enne » représenté dans la marque antérieure soit incluse dans la suite de lettres formant l’élément verbal « dienne » représenté dans la marque demandée, force est de constater que, dans la marque demandée, ces lettres sont représentées d’une manière telle qu’elles forment un élément unitaire avec les lettres « d » et « i » qui les précèdent. Partant, mis en présence de la marque demandée, le public pertinent ne percevra pas de manière autonome le groupe de lettres « enne » mais la marque demandée dans son ensemble, ainsi que l’a considéré à juste titre la chambre de recours au point 23 de la décision attaquée.
Sur la comparaison des signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel
43 S’agissant, en premier lieu, de la comparaison sur le plan visuel, au point 25 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que les marques en conflit étaient similaires à un très faible degré. Pour ce faire, aux points 24 et 25 de la décision attaquée, elle s’est appuyée, d’une part, sur la circonstance que le début des signes était différent, que la longueur des signes était également différente, que la marque antérieure était courte et que ses caractéristiques visuelles spécifiques, inhérentes notamment au fait qu’elle constitue un palindrome et que son deuxième « n » est représenté comme l’image en miroir de son premier « n », attireraient immédiatement l’attention des consommateurs et, d’autre part, sur la considération selon laquelle la présence, dans l’une des marques, d’éléments figuratifs présentés de manière particulière et originale aurait pour effet que l’impression visuelle globale produite par chaque marque serait différente.
44 Le requérant conteste cette appréciation. Il fait valoir que, bien que les deux marques soient figuratives, elles sont composées de polices de caractères banales et présentent la même palette de couleurs. Les éléments figuratifs n’apporteraient rien à la comparaison, tel qu’il ressortirait de la comparaison des marques ENNE et DIENNE dans une police uniforme ; sans les éléments figuratifs, les marques resteraient exactement les mêmes. La comparaison des signes en conflit devrait donc être opérée uniquement en tenant compte du nombre et de la séquence de lettres. Le requérant ajoute que les deux marques ont la même suite de lettres « e », « n », « n » et « e » dans la même position, que la marque demandée contient la marque antérieure dans son intégralité et que les deux marques partagent un double « n ». Selon le requérant, les signes sont donc similaires à un degré au moins moyen, voire élevé.
45 À titre liminaire, il convient d’observer que, contrairement à ce qui est suggéré par le requérant, la comparaison sur le plan visuel des signes en conflit ne saurait être opérée en retenant leurs éléments verbaux écrits dans une police de caractères uniforme, comme s’il s’agissait des marques verbales ENNE et DIENNE. En effet, d’une part, ainsi qu’il ressort des points 2 et 6 ci-dessus, la marque antérieure et la marque demandée sont toutes les deux des marques figuratives. D’autre part, la jurisprudence invoquée par le requérant selon laquelle, dans le cas d’une marque composée tant d’éléments verbaux que d’éléments figuratifs, les éléments verbaux doivent généralement être considérés comme étant plus distinctifs que les éléments figuratifs [voir, en ce sens, arrêt du 6 décembre 2013, Premiere Polish/OHMI – Donau Kanol (ECOFORCE), T‑361/12, non publié, EU:T:2013:630, point 32] ne saurait être interprétée en ce sens que, lors de la comparaison de deux marques figuratives composées chacune d’un élément verbal stylisé, tel qu’en l’espèce, la stylisation des éléments verbaux ne devrait pas être prise en compte, car cela reviendrait à considérer les marques figuratives en cause comme étant des marques verbales. Par conséquent, la comparaison des deux marques en cause ne saurait faire abstraction de la stylisation de leurs éléments verbaux respectifs.
46 Premièrement, s’agissant du nombre et de la séquence de lettres, dont la prise en compte est invoquée par le requérant, tout d’abord, force est de constater que chacune des deux marques est composée d’un seul élément verbal et que ces éléments verbaux n’ont pas la même longueur. En particulier, la marque antérieure est composée d’un élément verbal de quatre lettres (« enne »), tandis que la marque demandée est composée d’un élément verbal de six lettres (« dienne »).
47 Ensuite, non seulement le nombre de lettres est différent, mais le début des deux éléments verbaux est également différent. En particulier, la marque antérieure commence par la lettre « e » suivie par la lettre « n », tandis que la marque demandée commence par la lettre « d » suivie par la lettre « i ». Or, conformément à la jurisprudence, le consommateur est réputé prêter généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin, la partie initiale d’une marque ayant normalement, tant sur le plan visuel que sur le plan phonétique, un effet plus fort que la partie finale de celle-ci [voir arrêt du 19 juin 2018, Damm/EUIPO – Schlossbrauerei Au, Willibald Beck Freiherr von Peccoz (EISKELLER), T‑859/16, non publié, EU:T:2018:352, point 68 et jurisprudence citée].
48 Certes, les quatre autres lettres qui figurent dans la marque demandée sont les mêmes lettres qui, dans le même ordre, composent l’ensemble de la marque antérieure. Cependant, ces lettres, ainsi qu’il a été relevé au point 37 ci-dessus, ne ressortent pas dans la marque demandée et ne dominent pas la perception qu’en a le public pertinent. Cela n’est pas remis en cause par la jurisprudence, invoquée par le requérant, selon laquelle, s’agissant de signes verbaux relativement brefs, les éléments centraux sont aussi importants que les éléments de début et de fin de signe [arrêt du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, EU:T:2005:134, point 39]. En effet, il convient de rappeler que, au point 39 de l’arrêt du 20 avril 2005, CALPICO (T‑273/02, EU:T:2005:134), le Tribunal a en substance jugé que les signes qui étaient en conflit, CALPICO et CALYPSO, n’étaient pas visuellement similaires alors même que leurs trois premières lettres étaient identiques, motif pris de leurs lettres centrales différentes. Il découle donc de cet arrêt qu’il ne saurait être exclu que des signes puissent être considérés comme étant peu similaires, voire différents, du point de vue visuel, bien qu’ils contiennent une séquence de lettres identique [voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2013, Eckes-Granini/OHMI – Panini (PANINI), T‑487/12, non publié, EU:T:2013:637, point 42].
49 Par conséquent, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, la présence, dans la marque demandée, du groupe de lettres « di » a une importance particulière, dès lors que cet élément initial de dissemblance est susceptible d’attirer l’attention du public et contribue donc à mitiger, dans le cadre d’une impression d’ensemble, l’effet produit par l’élément de ressemblance « enne » [voir, par analogie, arrêt du 13 février 2008, Sanofi-Aventis/OHMI – GD Searle (ATURION), T‑146/06, non publié, EU:T:2008:33, points 49 et 50].
50 En outre, il convient de relever que, si l’élément verbal composant la marque antérieure apparaît comme étant un palindrome, en ce sens que l’ordre de ses lettres est le même de gauche à droite ou de droite à gauche et qu’il peut donc être lu indifféremment dans un sens ou dans l’autre, une telle propriété fait défaut en ce qui concerne l’élément verbal composant la marque demandée.
51 Enfin, il convient d’écarter l’argument du requérant selon lequel des marques figuratives composées de lettres peu stylisées sont similaires lorsqu’elles présentent un nombre significatif de lettres dans la même position. En effet, il suffit de rappeler que, en l’espèce, la chambre de recours n’a pas considéré que les signes en conflit n’étaient pas similaires du point de vue visuel, mais a considéré qu’ils étaient similaires à un très faible degré.
52 Deuxièmement, s’agissant de la stylisation des lettres, d’une part, il y a lieu de relever que les polices de caractères utilisées dans les marques en conflit sont différentes et qu’elles se présentent dans des couleurs différentes. La marque antérieure est représentée en caractères gras, de couleur noire et en majuscule. En revanche, la marque demandée est représentée en caractères standard, de couleur grise et en minuscule, sauf pour la première lettre qui est en majuscule.
53 De surcroît, force est de constater que la marque antérieure apparaît stylisée d’une manière telle que chaque lettre majuscule donne l’impression d’être légèrement plus large que haute, ce qui confère au signe une image plus écrasée sur le plan vertical et plus allongée sur le plan horizontal qu’une hypothétique marque ENNE dans une police de caractères uniforme, telle qu’invoquée par le requérant. Ce caractère fait défaut dans la marque demandée, dont les lettres, bien que stylisées, sont effectivement représentées dans une police de caractères plutôt standard.
54 D’autre part, chacune des deux marques présente des caractéristiques figuratives particulières. Dans la marque demandée, la première lettre, le « D » majuscule, est représentée d’une manière telle que son angle droit en bas à gauche n’apparaît pas. Dans la marque antérieure, la troisième lettre, le « N » majuscule, est représentée d’une manière telle qu’elle constitue l’image miroir de la deuxième lettre, le « N » majuscule, ce qui d’ailleurs renforce le caractère « palindrome » du mot.
55 Ainsi, contrairement à ce qui est suggéré par le requérant, le groupe de lettres « enne », y compris le double « n », n’est pas représenté de la même manière dans les deux marques, eu égard non seulement aux différentes polices de caractères utilisées mais, plus particulièrement, au fait que, tel que cela est relevé au point 54 ci-dessus, dans la marque antérieure, le second « n » est représenté à l’envers comme une image miroir du premier « n », tandis que, dans la marque demandée, cette lettre est représentée à l’endroit.
56 De telles caractéristiques contribuent à distinguer, sur le plan visuel, les deux marques, d’autant plus qu’il ressort de la jurisprudence que des différences, même peu importantes, entre des signes sont susceptibles d’entraîner une impression d’ensemble différente lorsque lesdits signes sont composés de mots courts [voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2014, Oracle America/OHMI – Aava Mobile (AAVA CORE), T‑618/13, non publié, EU:T:2014:1053, point 44 et jurisprudence citée].
57 Par conséquent, compte tenu du fait que les marques en cause présentent des différences visuelles inhérentes à leur longueur, à leur initiale, à leurs propriétés, à leurs polices de caractères et à leurs caractéristiques figuratives particulières, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a pu considérer que lesdites marques étaient similaires à un degré très faible sur le plan visuel.
58 S’agissant, en deuxième lieu, de la comparaison sur le plan phonétique, au point 26 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que la prononciation des signes concordait par le son du groupe de lettres « enne » et que les signes étaient donc similaires sur le plan phonétique. Elle a ajouté que, compte tenu du groupe de lettres initial « di » figurant dans la marque demandée qui n’a pas d’équivalent dans la marque antérieure, la prononciation des marques en cause différait par la longueur et l’intonation.
59 Le requérant fait valoir que la décision attaquée laisse entendre qu’il n’existe pas de similitude phonétique entre les signes et que cela est faux. Il serait incontesté que les marques partagent, dans le même ordre, quatre lettres, qui forment les deux mêmes syllabes et qui ont la même intonation. Ainsi, bien que le début des marques soit différent, il ne peut être nié qu’il existe des similitudes phonétiques marquantes, telle l’intonation du double « n ». Selon le requérant, il conviendrait donc de conclure qu’il existe un haut degré de similitude phonétique.
60 Or, les arguments du requérant procèdent d’une interprétation erronée de la décision attaquée et manquent en fait. En effet, la chambre de recours a expressément indiqué que les signes en conflit étaient similaires sur le plan phonétique, puisque leur prononciation concordait par le son du groupe de lettres « enne ». Ainsi, contrairement à ce qui est suggéré par le requérant, la chambre de recours n’a ni indiqué qu’il n’y avait pas d’éléments de similitude phonétique entre les marques, ni omis de prendre en compte ces éléments de similitude phonétique. La circonstance que la chambre de recours ait également relevé que la prononciation des marques différait compte tenu du groupe de lettres initial « di » figurant dans la marque demandée n’affecte aucunement sa précédente constatation quant à l’existence d’une similitude sur le plan phonétique.
61 À ce dernier égard, l’argument du requérant selon lequel le degré de ladite similitude phonétique serait élevé ne saurait être retenu. En effet, d’une part, cet argument n’est étayé par aucun élément concret, le requérant se bornant à évoquer génériquement qu’une telle conclusion serait plus en accord avec la réglementation et la jurisprudence applicable. D’autre part, il convient de rappeler que le groupe de lettres initial « di » n’a pas d’équivalent dans la marque antérieure et que, conformément à la jurisprudence rappelée au point 47 ci-dessus, le consommateur aura tendance à attacher plus d’importance à l’élément initial de la marque demandée, y compris sur le plan phonétique. Ainsi, si les marques en cause ont une certaine similitude phonétique, celle-ci ne saurait être considérée comme étant élevée.
62 Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que les signes étaient similaires sur le plan phonétique.
63 S’agissant, en troisième lieu, de la comparaison sur le plan conceptuel, aux points 27 et 28 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, d’une part, que les signes étaient dépourvus de signification pour le public pertinent non italophone et que, par conséquent, pour cette partie du public, dès lors qu’il était impossible de procéder à une comparaison conceptuelle, l’aspect conceptuel n’avait pas d’incidence sur l’appréciation de la similitude des signes. La chambre de recours a considéré, d’autre part, que, bien que, pour une petite partie du public italophone, pût exister un lien sémantique entre les deux marques par le biais du nom de la lettre « n », dans l’ensemble, la marque demandée n’avait pas de signification claire et directe pour le public pertinent et que le consommateur moyen ne comparait pas méticuleusement les signes l’un à côté de l’autre.
64 Le requérant fait valoir que les deux marques font référence au concept de la lettre « n » en italien et signifient donc « enne » et « de enne ». Les marques en cause seraient donc presque identiques du point de vue conceptuel. À titre subsidiaire, le requérant argue que les marques en cause n’ont pas de signification et que l’aspect conceptuel n’a donc pas d’incidence sur l’appréciation de la similitude des signes.
65 D’une part, il convient de commencer par observer que, ainsi que l’indique la chambre de recours au point 28 de la décision attaquée, pour le public pertinent non italophone, les marques en conflit n’ont pas de signification. Le requérant l’admet également, dès lors qu’il indique, à titre principal, que les deux marques font référence à un concept en italien et, à titre subsidiaire, qu’elles n’ont pas de signification. Partant, à supposer même que lesdites marques aient en italien la signification alléguée par le requérant, ce serait uniquement le public pertinent italophone qui percevrait ce concept. Par conséquent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’aspect conceptuel n’avait pas d’incidence sur l’appréciation de la similitude des marques en cause à l’égard du public non italophone.
66 D’autre part, en ce qui concerne le public pertinent italophone, s’il ne saurait, en principe, être exclu qu’une partie de ce public, outre à comprendre la marque antérieure comme se référant au nom de la lettre « n », puisse décomposer la marque demandée et la comprendre comme se référant également au nom de la lettre « n », une telle association n’est pas immédiate. En effet, ainsi qu’il a été observé au point 35 ci-dessus, il est très improbable que le consommateur moyen se livre à une analyse linguistique détaillée de la marque demandée, afin de la décomposer. Ainsi, la possibilité que le public italophone fasse une telle association demeure hypothétique et ne concerne tout au plus, comme l’a relevé la chambre de recours, qu’une petite partie de ce public. En effet, il ne saurait non plus être exclu que le public pertinent italophone puisse comprendre la marque demandée comme étant une suite de lettres n’ayant aucune signification, d’autant plus que les lettres en question ne sont pas séparées et apparaissent comme constituant un seul mot, lequel n’a effectivement aucune signification en italien. Par conséquent, c’est à juste titre que, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que si pour une petite partie du public pertinent italophone un certain « lien sémantique » pouvait exister entre les signes en conflit, la marque demandée n’avait pas, dans l’ensemble, de signification pour ce public.
67 Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur lors de la comparaison, sur le plan conceptuel, des marques en cause.
Sur le caractère distinctif de la marque antérieure
68 Aux points 32 et 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que le requérant n’avait pas fait valoir que la marque antérieure présentait un caractère particulièrement distinctif en raison de son usage ou de sa renommée et a donc considéré que l’appréciation du caractère distinctif de ladite marque reposait sur son caractère distinctif intrinsèque. À cet égard, elle a considéré que ce caractère distinct était normal pour l’ensemble du public pertinent. Cette appréciation n’est pas contestée par le requérant, selon lequel la marque antérieure possède un caractère distinctif intrinsèque normal.
Sur le risque de confusion
69 La chambre de recours, après avoir rappelé, aux points 34 à 40 de la décision attaquée, le raisonnement opéré par le Tribunal dans l’arrêt du 25 juin 2013, Aldi/OHMI – Dialcos (dialdi) (T‑505/11, non publié, EU:T:2013:332), ainsi que, au point 41 de la décision attaquée, le raisonnement retenu par la quatrième chambre de recours dans la décision du 13 juin 2014, DIALDI (Fig.)/ALDI (R 414/2014-4), a pris en compte les circonstances du cas d’espèce.
70 À cet égard, aux points 43 à 49 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la marque antérieure possédait des caractéristiques graphiques rares qui seraient clairement perçues et mémorisées (point 43 de la décision attaquée) ; que, pour les produits concernés, le public pertinent faisait preuve d’un niveau d’attention accru (point 45 de la décision attaquée) ; qu’il convenait de tenir compte de la manière dont les produits étaient commercialisés et que, s’agissant des meubles, si une communication orale n’était pas exclue, ils étaient généralement choisis visuellement, ce qui impliquait que l’aspect visuel jouait un plus grand rôle dans l’appréciation du risque de confusion (point 46 de la décision attaquée) ; que la marque demandée dans son ensemble ne transmettait aucune signification immédiate et claire et que, même si le concept de la lettre « n » était perçu dans les deux signes par une partie du public italophone, cela ne conduisait pas le public pertinent à penser que les signes provenaient d’entreprise liées, mais à les associer au simple concept de la lettre « n » (point 47 de la décision attaquée) ; que, bien que les produits fussent identiques, le niveau d’attention était accru et les différences visuelles et phonétiques étaient claires et suffisantes pour l’emporter sur le lien sémantique existant éventuellement pour cette partie du public, dans la mesure où les signes transmettaient des impressions globales différentes (point 48 de la décision attaquée) ; et, enfin, que l’élément que les signes avaient en commun (« enne ») n’était pas reconnaissable dans la marque demandée pour le reste du public pertinent (point 49 de la décision attaquée).
71 Compte tenu de toutes ces circonstances, aux points 50 et 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que la marque demandée, dans son ensemble, produisait une impression différente qui l’emportait sur les éléments de similitude avec la marque antérieure et que, par conséquent, rien ne permettait de supposer que le public pertinent penserait que les produits identiques provenaient de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Ainsi, selon la chambre de recours, il n’y avait pas de risque de confusion entre les signes en conflit.
72 Le requérant conteste cette conclusion et considère qu’il existe un risque de confusion entre les marques en cause. Il fait valoir que les faibles différences relevées entre la marque antérieure et la marque demandée ne sont pas suffisantes pour neutraliser leurs éléments de similitude, outre le fait que ces marques couvrent des produits identiques. En particulier, tout d’abord, le requérant argue que les marques en cause sont partiellement identiques parce qu’elles comportent le même élément « enne ». La décision attaquée accorderait une importance excessive aux éléments figuratifs des marques, alors que les deux marques sont susceptibles d’être associées entre elles en raison dudit élément verbal partagé. Ensuite, le requérant indique que les produits visés par les marques en conflit sont absolument identiques, ce qui signifie que le risque de confusion est accru. En effet, dans de telles circonstances, il ressortirait du point 69 de l’arrêt du 29 janvier 2013, Fon Wireless/OHMI – nfon (nfon) (T‑283/11, non publié, EU:T:2013:41), que le degré de différence entre les signes en conflit doit être élevé pour éviter un risque de confusion. Enfin, le requérant fait valoir qu’il n’est pas vrai que l’attention des consommateurs pour les produits relevant de la classe 20 est supérieure à la moyenne.
73 À titre liminaire, il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].
74 En outre, il y a lieu de préciser que, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids et il importe alors d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché [arrêt du 23 novembre 2010, Codorniu Napa/OHMI – Bodegas Ontañon (ARTESA NAPA VALLEY), T‑35/08, EU:T:2010:476, point 60]. En effet, selon la jurisprudence, l’importance des éléments de similitude ou de différence entre les signes en conflit peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux-ci ou des conditions de commercialisation des produits ou des services que ceux-ci désignent [arrêt du 18 mai 2018, Italytrade/EUIPO – Tpresso (teaespresso), T‑68/17, non publié, EU:T:2018:283, point 68]. En particulier, si les produits désignés par les marques en cause sont normalement vendus dans des magasins en libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance. Si, en revanche, le produit visé est surtout vendu oralement, il sera normalement attribué plus de poids à une similitude phonétique des signes [arrêt du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, EU:T:2004:293, point 49]. De même, le degré de similitude phonétique entre deux marques est d’une importance réduite dans le cas de produits qui sont commercialisés d’une manière telle que, habituellement, le public pertinent, lors de l’achat, perçoit la marque qui les désigne sous une forme visuelle [arrêt du 23 janvier 2008, Demp/OHMI – Bau How (BAU HOW), T‑106/06, non publié, EU:T:2008:14, point 45].
75 En l’espèce, la chambre de recours a relevé, à juste titre, que le choix des produits visés par les marques en cause, lesquels sont des éléments d’ameublement, était généralement effectué visuellement et qu’il existait donc généralement une perception visuelle des marques en cause avant l’achat. En effet, à titre d’exemple, même si les magasins qui vendent des meubles emploient du personnel pour aider les clients dans leur choix et que, dès lors, une communication orale sur les produits et sur les marques de ces produits n’est pas exclue, la perception visuelle des marques intervient normalement avant l’acte d’achat, car les produits et la documentation décrivant les produits et, partant, les marques sont exposés dans ces magasins. Par ailleurs, cette communication orale se fera, le cas échéant, avec des vendeurs qualifiés qui sont en mesure d’informer les clients sur les différentes marques.
76 Il en résulte que, en l’espèce, dans l’appréciation globale du risque de confusion, il convient d’attacher une importance particulière à la perception visuelle des marques en cause, tandis que leur similitude phonétique est d’une importance réduite par rapport aux différences visuelles qui existent entre celles-ci.
77 Dans ces circonstances, c’est à juste titre que la chambre de recours a pu considérer que, si les marques en cause visent des produits identiques, elles produisent une impression d’ensemble différente. En effet, compte tenu de leurs différences visuelles, inhérentes à leur longueur, à leur initiale, à leurs propriétés, à leurs polices de caractères et à leurs caractéristiques figuratives particulières, elles ne sont similaires qu’à un très faible degré sur le plan visuel, ce qui, eu égard aux modalités d’achat des produits concernés, a une importance particulière dans l’appréciation globale du risque de confusion entre les marques en cause. En revanche, leurs similitudes phonétiques ont une importance plus réduite, d’autant plus que, phonétiquement, ces marques se distinguent par le groupe de lettres initial « di », lequel figure uniquement au début de la marque demandée. Cette différente impression d’ensemble des marques en cause ne saurait non plus être remise en cause par l’éventuelle similitude conceptuelle que seule une petite partie du public pertinent italophone pourrait percevoir entre les marques en cause. Elle est au contraire corroborée par le fait que la marque antérieure ne dispose que d’un caractère distinctif intrinsèque normal ainsi que par le fait que le public pertinent fait preuve d’une attention supérieure à la moyenne en ce qui concerne les produits visés par les marques en cause, compte tenu notamment des critères fonctionnels et esthétiques entrant en jeu lors de leur achat. C’est, partant, sans commettre d’erreur que, dans le cadre d’une appréciation globale de tous ces éléments, telle qu’opérée aux points 43 à 51 de la décision attaquée, la chambre de recours a pu conclure à l’absence de risque de confusion entre les marques en cause.
78 Les arguments du requérant visant à remettre en cause cette conclusion ne sont pas fondés.
79 Premièrement, les arguments du requérant contestant le niveau d’attention du public pertinent retenu par la chambre de recours ont déjà été écartés comme étant non fondés au point 24 ci-dessus. Par ailleurs, les circonstances du cas d’espèce sont différentes de celles de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 26 septembre 2017, Banca Monte dei Paschi di Siena et Banca Widiba/EUIPO – ING-DIBa (WIDIBA) (T‑83/16, non publié, EU:T:2017:662), invoqué par le requérant, dès lors que, dans ladite affaire, deux marques verbales étaient en conflit et que la chambre de recours considérait qu’elles étaient similaires à tous égards, tandis que, dans la présente affaire, deux marques figuratives sont en conflit et qu’elles présentent notamment une très faible similitude sur le plan visuel.
80 Deuxièmement, s’agissant des arguments du requérant concernant la comparaison des marques en cause, il convient de rappeler que, ainsi qu’il a été relevé au point 57 ci-dessus, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que lesdites marques étaient visuellement similaires à un très faible degré. Ainsi, les arguments visant à démontrer que, sur le plan visuel, les marques seraient partiellement identiques doivent être écartés comme étant non fondés. Il en va de même, pour les raisons illustrées aux points 45 et 48 ci-dessus, des arguments du requérant suggérant que la chambre de recours aurait accordé une importance excessive aux éléments figuratifs ou au début de la marque demandée. Par ailleurs, les circonstances du cas d’espèce sont différentes de celles examinées dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 25 juin 2013, dialdi (T‑505/11, non publié, EU:T:2013:332), invoqué par le requérant, dès lors que, dans ladite affaire, une marque verbale et une marque figurative étaient en conflit, tandis que, dans la présente affaire, deux marques figuratives sont en conflit.
81 Au demeurant, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort des points 62 et 67 ci-dessus, la chambre de recours n’a pas non plus commis d’erreur dans la comparaison des signes en conflit sur les plans phonétique et conceptuel.
82 Troisièmement, s’agissant de l’argument du requérant tiré du point 69 de l’arrêt du 29 janvier 2013, nfon (T‑283/11, non publié, EU:T:2013:41), selon lequel, dès lors que les produits sont identiques, le degré de différence entre les signes en conflit doit être élevé pour éviter un risque de confusion, il convient de rappeler que la Cour a déjà relevé que, en énonçant ladite assertion, le Tribunal n’a pas formulé un principe d’interdépendance générale lui permettant, à défaut d’une différence élevée entre des marques, de conclure de manière automatique et sans qu’il y ait lieu de procéder à une appréciation globale tenant compte de tous les facteurs pertinents à l’existence d’un risque de confusion (ordonnance du 16 janvier 2014, nfon/Fon Wireless et OHMI, C‑193/13 P, non publiée, EU:C:2014:35, point 41). Or, ainsi qu’il a été relevé au point 77 ci-dessus, en l’espèce, la chambre de recours a opéré une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents.
83 Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que les arguments formulés à l’appui du moyen unique du requérant ne sont pas fondés et doivent être écartés.
84 Il s’ensuit que le moyen unique avancé par le requérant au soutien de ses conclusions doit être rejeté, de même que le recours dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité ou sur le bien-fondé de la seconde partie du deuxième chef de conclusions du requérant demandant au Tribunal de rejeter dans son intégralité la marque demandée, dès lors que ce chef de conclusions présuppose qu’il soit fait droit au recours en annulation et qu’il n’est donc formé que si le recours aboutit dans son premier chef de conclusions [voir, par analogie, arrêt du 28 juin 2005, Canali Ireland/OHMI – Canal Jean (CANAL JEAN CO. NEW YORK), T‑301/03, EU:T:2005:254, points 67 et 68].
Sur les dépens
85 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.
86 En outre, l’intervenante a conclu à la condamnation du requérant aux dépens qu’elle a exposés lors des procédures devant l’EUIPO et la deuxième chambre de recours.
87 À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 190, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition [arrêt du 26 octobre 2017, Sulayr Global Service/EUIPO – Sulayr Calidad (sulayr GLOBAL SERVICE), T‑685/15, non publié, EU:T:2017:761, point 53].
88 En tout état de cause, force est de constater que, dans la décision attaquée, le requérant a été condamné, par la chambre de recours, à payer à l’intervenante des dépens au titre des frais que celle-ci avait exposés dans le cadre des procédures d’opposition et de recours. Partant, dès lors que le présent arrêt rejette le recours dirigé contre la décision attaquée, c’est le dispositif de cette dernière qui continue à régler les dépens en cause [voir, par analogie, arrêts du 10 octobre 2017, Cofra/EUIPO – Armand Thiery (1841), T‑233/15, non publié, EU:T:2017:714, point 127, et du 19 octobre 2017, Aldi/EUIPO – Sky (SKYLITe), T‑736/15, non publié, EU:T:2017:729, point 131].
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) M. Erkan Aytekin est condamné à ses propres dépens ainsi qu’à ceux exposés, dans le cadre de la présente procédure, par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par Dienne Salotti Srl.
Tomljenović | Bieliūnas | Marcoulli |
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 février 2019.
Signatures