Language of document : ECLI:EU:T:2005:449

ARRÊT DU TRIBUNAL (grande chambre)

14 décembre 2005 (*)

« Responsabilité non contractuelle de la Communauté – Incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) – Instauration par les États-Unis d’Amérique de mesures de rétorsion sous la forme d’une surtaxe douanière prélevée sur les importations en provenance de la Communauté en vertu d’une autorisation de l’OMC – Décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC – Effets juridiques – Responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes – Lien de causalité – Préjudice anormal et spécial »

Dans l’affaire T-69/00,

Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio SpA (FIAMM), établie à Montecchio Maggiore (Italie),

Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio Technologies, Inc.(FIAMM Technologies), établie à East Haven, Delaware (États‑Unis),

représentées par Mes I. Van Bael, A. Cevese et F. Di Gianni, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par MM. G. Maganza, J. Huber, F. Ruggeri Laderchi et S. Marquardt, en qualité d’agents,

et

Commission des Communautés européennes, représentée initialement par MM. P. Kuijper, L. Gussetti, V. Di Bucci, C. Brown et Mme E. Righini, puis par MM. Kuijper, Gussetti, Di Bucci et Mme Righini, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties défenderesses,

soutenus par

Royaume d’Espagne, représenté initialement par Mme R. Silva de Lapuerta, puis par M. E. Braquehais Conesa, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie intervenante,

ayant pour objet un recours en réparation du préjudice censé découler de la surtaxe douanière dont le prélèvement par les États-Unis d’Amérique sur les importations d’accumulateurs stationnaires des requérantes a été autorisé par l’organe de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), à la suite de la constatation de l’incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les accords et les mémorandums annexés à l’accord instituant l’OMC,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (grande chambre),

composé de M. B. Vesterdorf, président, Mme P. Lindh, MM. J. Azizi, J. Pirrung, H. Legal, R. García-Valdecasas, Mme V. Tiili, MM. J. D. Cooke, A. W. H. Meij, M. Vilaras et N. Forwood, juges,

greffier : M. H. Jung,

vu la procédure écrite et à la suite des audiences des 11 mars 2003 et 26 mai 2004,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Le 15 avril 1994, la Communauté a signé l’acte final concluant les négociations commerciales multilatérales du cycle de l’Uruguay, l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ainsi que l’ensemble des accords et des mémorandums figurant aux annexes 1 à 4 de l’accord instituant l’OMC (ci-après les « accords OMC »).

2        À la suite de cette signature, le Conseil a adopté la décision 94/800/CE, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO L 336, p. 1).

3        Comme il ressort du préambule de l’accord instituant l’OMC, les parties contractantes ont entendu souscrire des accords « visant, sur une base de réciprocité et d’avantages mutuels, à la réduction substantielle des tarifs douaniers et des autres obstacles au commerce et à l’élimination des discriminations dans les relations commerciales internationales ».

4        L’article II, paragraphe 2, de l’accord instituant l’OMC dispose :

« Les accords et instruments juridiques connexes repris dans les annexes 1, 2 et 3 […] font partie intégrante du présent accord et sont contraignants pour tous les membres ».

5        L’article XVI, intitulé « Dispositions diverses », de l’accord instituant l’OMC, dispose en son paragraphe 4 :

« Chaque membre assurera la conformité de ses lois, réglementations et procédures administratives avec ses obligations telles qu’elles sont énoncées dans les accords figurant en annexe ».

6        Par ailleurs, le mémorandum d’accord sur les règles et procédures régissant le règlement des différends (ci-après le « MRD »), qui figure en annexe 2 à l’accord instituant l’OMC, spécifie, au paragraphe 2, dernière phrase, de son article 3, intitulé « Dispositions générales » :

« Les recommandations et décisions de l’[organe de règlement des différends] ne peuvent pas accroître ou diminuer les droits et obligations énoncés dans les accords visés ».

7        Aux termes de l’article 3, paragraphe 7, du MRD :

« Avant de déposer un recours, un membre jugera si une action au titre des présentes procédures serait utile. Le but du mécanisme de règlement des différends est d’arriver à une solution positive des différends. Une solution mutuellement acceptable pour les parties et compatible avec les accords visés est nettement préférable. En l’absence d’une solution mutuellement convenue, le mécanisme de règlement des différends a habituellement pour objectif premier d’obtenir le retrait des mesures en cause, s’il est constaté qu’elles sont incompatibles avec les dispositions de l’un des accords visés. Il ne devrait être recouru à l’octroi d’une compensation que si le retrait immédiat de la mesure en cause est irréalisable, et qu’à titre temporaire en attendant le retrait de la mesure incompatible avec un accord visé. Le dernier recours que le [MRD] ouvre au membre qui se prévaut des procédures de règlement des différends est la possibilité de suspendre l’application de concessions ou l’exécution d’autres obligations au titre des accords visés, sur une base discriminatoire, à l’égard de l’autre membre, sous réserve que l’[organe de règlement des différends] l’y autorise ».

8        L’article 7 du MRD prévoit que des groupes spéciaux procèdent aux constatations propres à aider l’organe de règlement des différends (ci-après l’« ORD ») à formuler des recommandations ou à statuer sur les questions dont cet organe est saisi. Selon l’article 12, paragraphe 7, du MRD, dans les cas où les parties au différend ne parviennent pas à élaborer une solution mutuellement satisfaisante, le groupe spécial présente ses constatations sous la forme d’un rapport écrit à l’ORD.

9        L’article 17 du MRD prévoit l’institution par l’ORD d’un organe d’appel permanent chargé de connaître des appels concernant des affaires soumises aux groupes spéciaux.

10      Aux termes de l’article 19 du MRD, dans les cas où un groupe spécial ou l’organe d’appel conclut à l’incompatibilité d’une mesure avec un accord OMC, il recommande que le membre concerné rende celle-ci conforme à cet accord. Outre les recommandations qu’il fait, le groupe spécial ou l’organe d’appel peut suggérer au membre concerné des façons de mettre en œuvre ces recommandations.

11      Selon l’article 21, paragraphe 1, du MRD, intitulé « Surveillance de la mise en œuvre des recommandations et décisions », pour que les différends soient résolus efficacement dans l’intérêt de tous les membres, il est indispensable de donner suite dans les moindres délais aux recommandations ou aux décisions de l’ORD.

12      En vertu de l’article 21, paragraphe 3, du MRD, le membre concerné se trouvant dans l’impossibilité de se conformer immédiatement aux recommandations et aux décisions de l’ORD dispose d’un délai raisonnable, déterminé, le cas échant, par un arbitrage contraignant.

13      En cas de désaccord au sujet de l’existence ou de la compatibilité avec un accord OMC de mesures prises pour se conformer aux recommandations ou aux décisions de l’ORD, l’article 21, paragraphe 5, du MRD précise que ce différend est réglé suivant les procédures de règlement des différends définies par le MRD, y compris, dans tous les cas où cela est possible, avec recours au groupe spécial initial.

14      Selon l’article 21, paragraphe 6, du MRD, l’ORD tient sous surveillance la mise en œuvre des recommandations ou des décisions adoptées et, à moins que l’ORD n'en décide autrement, la question de la mise en œuvre des recommandations ou des décisions est inscrite à l’ordre du jour de la réunion de l’ORD après une période de six mois suivant la date à laquelle le délai raisonnable prévu au paragraphe 3 aura été fixé et demeure inscrite à l'ordre du jour des réunions de l'ORD jusqu’à ce qu’elle soit résolue.

15      L’article 22 du MRD, intitulé « Compensation et suspension de concessions », dispose :

« 1. La compensation et la suspension de concessions ou d’autres obligations sont des mesures temporaires auxquelles il peut être recouru dans le cas où les recommandations et décisions ne sont pas mises en oeuvre dans un délai raisonnable. Toutefois, ni la compensation ni la suspension de concessions ou d’autres obligations ne sont préférables à la mise en oeuvre intégrale d’une recommandation de mettre une mesure en conformité avec les accords visés. La compensation est volontaire et, si elle est accordée, elle sera compatible avec les accords visés.

2. Si le membre concerné ne met pas la mesure jugée incompatible avec un accord visé en conformité avec ledit accord ou ne respecte pas autrement les recommandations et décisions dans le délai raisonnable déterminé conformément au paragraphe 3 de l’article 21, ce membre se prêtera, si demande lui en est faite et au plus tard à l’expiration du délai raisonnable, à des négociations avec toute partie ayant invoqué les procédures de règlement des différends, en vue de trouver une compensation mutuellement acceptable. Si aucune compensation satisfaisante n’a été convenue dans les 20 jours suivant la date à laquelle le délai raisonnable sera venu à expiration, toute partie ayant invoqué les procédures de règlement des différends pourra demander à l’ORD l’autorisation de suspendre, à l’égard du membre concerné, l’application de concessions ou d’autres obligations au titre des accords visés.

3. Lorsqu’elle examinera les concessions ou autres obligations à suspendre, la partie plaignante appliquera les principes et procédures ci-après :

a)      le principe général est le suivant : la partie plaignante devrait d’abord chercher à suspendre des concessions ou d’autres obligations en ce qui concerne le(s) même(s) secteur(s) que celui (ceux) dans lequel (lesquels) le groupe spécial ou l’Organe d’appel a constaté une violation ou autre annulation ou réduction d’avantages ;

b)      si cette partie considère qu’il n’est pas possible ou efficace de suspendre des concessions ou d’autres obligations en ce qui concerne le(s) même(s) secteur(s), elle pourra chercher à suspendre des concessions ou d’autres obligations dans d’autres secteurs au titre du même accord ;

c)      si cette partie considère qu’il n’est pas possible ou efficace de suspendre des concessions ou d’autres obligations en ce qui concerne d’autres secteurs au titre du même accord, et que les circonstances sont suffisamment graves, elle pourra chercher à suspendre des concessions ou d’autres obligations au titre d’un autre accord visé ;

[...]

4. Le niveau de la suspension de concessions ou d’autres obligations autorisée par l’ORD sera équivalent au niveau de l’annulation ou de la réduction des avantages.

[…]

6. Lorsque la situation décrite au paragraphe 2 se produira, l’ORD accordera, sur demande, l’autorisation de suspendre des concessions ou d’autres obligations dans un délai de 30 jours à compter de l’expiration du délai raisonnable, à moins qu’il ne décide par consensus de rejeter la demande. Toutefois, si le membre concerné conteste le niveau de la suspension proposée, ou affirme que les principes et procédures énoncés au paragraphe 3 n’ont pas été suivis dans les cas où une partie plaignante a demandé l’autorisation de suspendre des concessions ou d’autres obligations […], la question sera soumise à arbitrage. Cet arbitrage sera assuré par le groupe spécial initial, si les membres sont disponibles, ou par un arbitre désigné par le directeur général, et sera mené à bien dans les 60 jours suivant la date à laquelle le délai raisonnable sera venu à expiration. Les concessions ou autres obligations ne seront pas suspendues pendant l’arbitrage.

7. L’arbitre, agissant en vertu du paragraphe 6, n’examinera pas la nature des concessions ou des autres obligations à suspendre, mais déterminera si le niveau de ladite suspension est équivalent au niveau de l’annulation ou de la réduction des avantages […] Les parties accepteront comme définitive la décision de l’arbitre et les parties concernées ne demanderont pas un second arbitrage. L’ORD sera informé dans les moindres délais de cette décision et accordera, sur demande, l’autorisation de suspendre des concessions ou d’autres obligations dans les cas où la demande sera compatible avec la décision de l’arbitre, à moins que l’ORD ne décide par consensus de rejeter la demande.

8. La suspension de concessions ou d’autres obligations sera temporaire et ne durera que jusqu’à ce que la mesure jugée incompatible avec un accord visé ait été éliminée, ou que le membre devant mettre en oeuvre les recommandations ou les décisions ait trouvé une solution à l’annulation ou à la réduction d’avantages, ou qu’une solution mutuellement satisfaisante soit intervenue. Conformément à [l’article 21, paragraphe 6, du MRD], l’ORD continuera de tenir sous surveillance la mise en oeuvre des recommandations ou décisions adoptées, y compris dans le cas où une compensation aura été octroyée ou dans les cas où des concessions ou d’autres obligations auront été suspendues, mais où des recommandations de mettre une mesure en conformité avec les accords visés n’auront pas été mises en œuvre.

[...] »

 Faits à l’origine du litige

16      Le 13 février 1993, le Conseil a adopté le règlement (CEE) nº 404/93, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane (JO L 47, p. 1, ci-après l’« OCM bananes »). Le régime des échanges avec les États tiers établi par le titre IV de ce règlement prévoyait des dispositions préférentielles au profit des bananes originaires de certains États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) cosignataires de la quatrième convention ACP-CEE de Lomé du 15 décembre 1989 (JO 1991, L 229, p. 3).

17      Sur plaintes déposées en février 1996 devant l’ORD par plusieurs membres de l’OMC, dont l’Équateur et les États-Unis d’Amérique, le groupe spécial constitué conformément aux dispositions du MRD a remis, le 22 mai 1997, ses rapports concluant à l’incompatibilité du régime d’importation de l’OCM bananes avec les engagements assumés par la Communauté au titre des accords OMC. Les rapports établis par le groupe spécial ont également recommandé que l’ORD invite la Communauté à mettre ce régime en conformité avec les obligations lui incombant au titre des accords OMC.

18      Sur appel formé par la Communauté, l’organe d’appel permanent a, le 9 septembre 1997, confirmé en substance les conclusions du groupe spécial et recommandé que l’ORD invite la Communauté à mettre en conformité avec les accords OMC les dispositions communautaires litigieuses.

19      Le 25 septembre 1997, les rapports du groupe spécial et de l’organe d’appel ont été adoptés par l’ORD.

20      Le 16 octobre 1997, la Communauté a informé l’ORD, conformément à l’article 21, paragraphe 3, du MRD, qu’elle respecterait pleinement ses engagements internationaux.

21      Le 17 novembre 1997, les États plaignants ont demandé, en application de l’article 21, paragraphe 3, sous c), du MRD, qu’un arbitrage contraignant fixe le délai raisonnable dans lequel la Communauté devrait se conformer à ses obligations.

22      Par sentence arbitrale publiée le 7 janvier 1998, l’arbitre saisi a retenu à cet effet la période comprise entre le 25 septembre 1997 et le 1er janvier 1999.

23      En adoptant le règlement (CE) n° 1637/98, du 20 juillet 1998, modifiant le règlement n° 404/93 (JO L 210, p. 28), le Conseil a amendé le régime des échanges de bananes avec les États tiers.

24      Le préambule du règlement n° 1637/98 relève :

« (1) […] il y a lieu d’apporter un certain nombre de modifications au régime des échanges avec les États tiers instauré par le titre IV du règlement […] n° 404/93 ;

(2) […] il convient de respecter les engagements internationaux souscrits par la Communauté dans le cadre de l’[OMC], ainsi que les engagements contractés vis-à-vis des autres signataires de la quatrième convention ACP-CE de Lomé, tout en assurant la réalisation des objectifs de l’[OCM bananes ] ;

[…]

(9) […] il convient d’étudier le fonctionnement du présent règlement au terme d’une période d’expérimentation suffisante ;

[…] »

25      Le 28 octobre 1998, la Commission a adopté le règlement (CE) nº 2362/98, portant modalités d’application du règlement nº 404/93 en ce qui concerne le régime d’importation des bananes dans la Communauté (JO L 293, p. 32). Ce texte comporte l’ensemble des dispositions nécessaires à la mise en œuvre du nouveau régime des échanges de bananes avec les États tiers, y compris les mesures transitoires justifiées par l’entrée en vigueur très rapprochée de ses modalités d’application.

26      Estimant que la Communauté avait instauré un régime d’importation des bananes conçu pour maintenir les éléments illégaux du régime précédent, en méconnaissance des accords OMC et de la décision du 25 septembre 1997 de l’ORD, les États-Unis d’Amérique ont publié dans le Federal Register, le 10 novembre 1998, la liste provisoire des produits originaires d’États membres de la Communauté qu’ils envisageaient de frapper, à titre de rétorsion, d’une surtaxe douanière à l’importation.

27      Les États-Unis d’Amérique ont annoncé, le 21 décembre 1998, leur intention d’appliquer, dès le 1er février 1999 ou, au plus tard, à partir du 3 mars 1999, des droits de douane au taux de 100 % sur les importations de produits communautaires figurant sur une liste établie par l’administration américaine.

28      Le 14 janvier 1999, les États-Unis d’Amérique ont demandé à l’ORD, en vertu de l’article 22, paragraphe 2, du MRD, l’autorisation de suspendre l’application à la Communauté et à ses États membres de concessions tarifaires et d’obligations connexes au titre de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1994 et de l’accord général sur le commerce des services (GATS), à raison d’un montant d’échanges commerciaux de 520 millions de dollars américains (USD).

29      Au cours d’une réunion de l’ORD qui s’est tenue du 25 janvier au 1er février 1999, la Communauté a contesté ce montant, au motif qu’il ne correspondait pas au niveau de l’annulation ou de la réduction des avantages subie par les États-Unis d’Amérique et a soutenu que les principes et les procédures définis par l’article 22, paragraphe 3, du MRD n’avaient pas été respectés.

30      Le 29 janvier 1999, l’ORD a décidé, à la demande de la Communauté, de soumettre cette question à l’arbitrage du groupe spécial initial, sur le fondement de l’article 22, paragraphe 6, du MRD, et a suspendu la demande d’autorisation des États-Unis d’Amérique jusqu’à la détermination du montant autorisé des droits à prélever à titre de mesure de rétorsion.

31      Le 3 mars 1999, l’administration américaine a imposé aux exportateurs communautaires de produits figurant sur une nouvelle liste établie par ses soins l’obligation de constituer une caution bancaire à hauteur de 100 % de la valeur des produits d’importation visés.

32      Par décision du 9 avril 1999, les arbitres ont, d’une part, estimé plusieurs dispositions du nouveau régime d’importation de l’OCM bananes contraires à des dispositions des accords OMC, fixé à 191,4 millions de USD par an le niveau de l’annulation ou de la réduction d’avantages subie par les États-Unis d’Amérique et, d’autre part, considéré que la suspension par ce pays de l’application à la Communauté et à ses États membres de concessions tarifaires et d’obligations connexes au titre du GATT de 1994 portant sur des échanges d’un montant maximal de 191,4 millions de USD par an serait compatible avec l’article 22, paragraphe 4, du MRD.

33      Le 7 avril 1999, les États-Unis d’Amérique ont demandé à l’ORD, en application de l’article 22, paragraphe 7, du MRD, l’autorisation de percevoir des droits de douane à l’importation à concurrence de ce montant.

34      Par un communiqué de presse du 9 avril 1999, le United States Trade Representative (le représentant spécial des États-Unis d’Amérique pour les questions commerciales, ci-après le « représentant spécial ») a annoncé la liste des produits grevés de droits de douane à l’importation au taux de 100 %. Dans cette liste de produits, originaires d’Autriche, de Belgique, de Finlande, de France, d’Allemagne, de Grèce, d’Irlande, d’Italie, du Luxembourg, du Portugal, d’Espagne, de Suède ou du Royaume-Uni, figuraient notamment les « accumulateurs plomb-acide, autres que ceux utilisés pour l’allumage de moteurs à piston ou comme source primaire d’énergie pour les véhicules électriques ». Il était indiqué que le représentant spécial publierait la décision introduisant les droits de 100 % dans le Federal Register et qu’il avait l’intention de fixer la date de prise d’effet de leur prélèvement au 3 mars 1999.

35      Cette décision, publiée le 19 avril 1999 dans le Federal Register (volume 64, nº 74, p. 19209 à 19211), a été adoptée sur le fondement de la section 301 du Trade Act de 1974, aux termes duquel le représentant spécial prend les mesures autorisées s’il constate la violation des droits que les États-Unis d’Amérique tirent d’un accord commercial.

36      Il ressort de la rubrique « Date de prise d’effet » de la mesure précitée que « [le représentant spécial] a décidé que le droit ad valorem de 100 % serait appliqué, avec effet au 19 avril 1999, aux produits mis en consommation et ceux retirés d’un entrepôt en vue de leur mise en consommation, le 3 mars 1999 ou après cette date ».

37      Un groupe spécial constitué à la demande présentée par l’Équateur le 18 décembre 1998, conformément à l’article 21, paragraphe 5, du MRD, a également conclu, le 6 avril 1999, à l’incompatibilité du nouveau régime communautaire d’importation des bananes avec les dispositions des accords OMC. Le rapport du groupe spécial a été approuvé le 6 mai 1999 par l’ORD.

38      Le 19 avril 1999, l’ORD a autorisé les États-Unis d’Amérique à prélever sur les importations originaires de la Communauté des droits de douane à concurrence d’un montant annuel d’échanges de 191,4 millions de USD.

39      Le 25 mai 1999, la Communauté a contesté devant les instances de l’OMC les mesures de rétorsion américaines pour la période du 3 mars 1999 au 19 avril suivant, en raison notamment de leur prise d’effet au 3 mars 1999.

40      Considérant que l’entrée en vigueur de la surtaxe américaine à cette dernière date était contraire aux dispositions du MRD, le groupe spécial saisi par la Communauté a différé la date de prise d’effet de cette mesure au 19 avril 1999.

41      Dans le cadre de négociations avec toutes les parties intéressées, la Communauté a proposé des modifications à apporter à la nouvelle OCM bananes. Ces modifications ont été édictées par le règlement (CE) n° 216/2001 du Conseil, du 29 janvier 2001, modifiant le règlement n° 404/93 (JO L 31, p. 2).

42      Selon le préambule du règlement n° 216/2001 :

« (1) Des contacts nombreux et intenses ont été établis avec les pays fournisseurs ainsi qu’avec les autres parties concernées afin de mettre fin aux contestations soulevées par le régime d’importation établi par le règlement […] n° 404/93, et afin de tenir compte des conclusions du groupe spécial institué dans le cadre du système de règlement des différends de l’[OMC].

(2) L’analyse de toutes les options présentées par la Commission conduit à estimer que l’établissement, à moyen terme, d’un régime d’importation fondé sur l’application d’un droit de douane d’un taux approprié et l’application d’une préférence tarifaire pour les importations originaires des pays ACP présente les meilleures garanties pour, d’une part, réaliser les objectifs de l’organisation commune des marchés en ce qui concerne la production communautaire et la demande des consommateurs et, d’autre part, respecter les règles du commerce international, afin de prévenir de nouvelles contestations.

(3) L’instauration d’un tel régime doit, toutefois, intervenir au terme de négociations avec les partenaires de la Communauté selon les procédures de l’OMC, en particulier de l’article XXVIII [du GATT …] Le résultat de ces négociations doit être soumis pour approbation au Conseil qui doit également, conformément aux dispositions du traité, fixer le taux du tarif douanier commun applicable.

(4) Jusqu’à l’entrée en vigueur de ce régime, il convient d’approvisionner la Communauté dans le cadre de plusieurs contingents tarifaires, ouverts pour des importations de toutes origines, aménagés en tenant compte des recommandations faites par l’[ORD …]

(5) Compte tenu des obligations contractées à l’égard des pays ACP et de la nécessité de leur garantir des conditions de compétitivité adéquates, l’application à l’importation des bananes originaires de ces pays d’une préférence tarifaire de 300 euros par tonne doit permettre de maintenir les flux commerciaux en cause. Cela conduit, en particulier, à l’application, pour ces importations, d’un droit zéro dans le cadre des […] contingents tarifaires.

(6) Il convient d’autoriser la Commission à ouvrir des négociations avec les pays fournisseurs ayant un intérêt substantiel à l’approvisionnement du marché de la Communauté pour tenter d’opérer une répartition négociée des deux premiers contingents tarifaires […] »

43      Le 11 avril 2001, les États-Unis d’Amérique et la Communauté ont conclu un mémorandum d’accord définissant « les moyens qui peuvent permettre de régler le différend de longue date concernant le régime d’importation des bananes » dans la Communauté. Ce mémorandum prévoit que la Communauté s’engage à « [mettre] en place un régime uniquement tarifaire pour les importations de bananes au plus tard le 1er janvier 2006 ». Ce document définit les mesures que la Communauté s’engage à prendre au cours de la période intérimaire expirant au 1er janvier 2006. En contrepartie, les États-Unis d’Amérique se sont engagés à suspendre provisoirement l’imposition de la surtaxe douanière qu’ils étaient autorisés à prélever sur les importations communautaires. Les États-Unis d’Amérique ont toutefois précisé, par communication du 26 juin 2001 à l’ORD, que ce mémorandum d’accord « ne constitu[ait] pas en lui-même une solution convenue d’un commun accord conformément à l’article [3, paragraphe 6, du MRD et que,] en outre, compte tenu des mesures que toutes les parties ont encore à prendre, il serait aussi prématuré de retirer ce point de l’ordre du jour de l’ORD ».

44      Par règlement (CE) n° 896/2001, du 7 mai 2001, portant modalités d’application du règlement n° 404/93 en ce qui concerne le régime d’importation de bananes dans la Communauté (JO L 126, p. 6), la Commission a défini les modalités d’application du nouveau régime communautaire d’importation des bananes introduit par le règlement n° 216/2001.

45      Les États-Unis d’Amérique ont suspendu l’application de leur surtaxe douanière avec effet au 30 juin 2001. À compter du 1er juillet 2001, leur droit à l’importation sur les accumulateurs stationnaires originaires de la Communauté a été ramené à son taux initial de 3,5 %.

46      Il ressort des statistiques produites par la Commission à la demande du Tribunal que la valeur totale caf (coût, assurance et fret) des importations d’origine communautaire d’accumulateurs plomb-acide aux États-Unis s’est élevée à 33 748 879 USD en 1998, à 21 825 385 USD en 1999, à 15 938 040 USD en 2000 et, enfin, à 15 617 997 USD en 2001.

47      Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio SpA (FIAMM) et Fabbrica italiana accumulatori motocarri Montecchio Technologies, Inc. (FIAMM Technologies) exercent leur activité notamment dans le secteur des accumulateurs stationnaires utilisés principalement dans le domaine des télécommunications et faisant partie des produits grevés de la surtaxe douanière du 19 avril 1999 au 30 juin 2001.

 Procédure

48      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mars 2000, les requérantes ont introduit le présent recours en réparation du préjudice censé découler de cette surtaxe.

49      Par ordonnance du président de la quatrième chambre du 11 septembre 2000, le Royaume d’Espagne a été admis à intervenir au soutien des conclusions des parties défenderesses.

50      Sur demande de la Commission introduite en vertu de l’article 51, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, la présente affaire a été renvoyée devant une chambre élargie, composée de cinq juges, par décision du Tribunal du 4 juillet 2002.

51      L’affaire a été réattribuée à la première chambre élargie, le 7 octobre 2002, en vertu de la décision du Tribunal du 4 juillet 2002, relative à la composition des chambres et à l’attribution des affaires à celles-ci.

52      À la suite de l’empêchement du juge rapporteur initialement désigné, en raison de la cessation de ses fonctions, le président du Tribunal a, par décision du 13 décembre 2002, nommé un nouveau juge rapporteur.

53      Par ordonnance du président de la première chambre élargie du 3 février 2003, la présente affaire et les affaires connexes T‑151/00 et T‑301/00 ont été jointes, les parties entendues, aux fins de la procédure orale, conformément à l’article 50 du règlement de procédure.

54      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience de la première chambre élargie qui s’est déroulée le 11 mars 2003.

55      Par décision du 23 mars 2004, le Tribunal a rouvert la procédure orale dans la présente affaire.

56      Le 1er avril 2004, le Tribunal, les parties entendues, a décidé de renvoyer devant la grande chambre du Tribunal les affaires jointes T‑69/00, T‑151/00 et T‑301/00, ainsi que les affaires connexes T‑320/00, T‑383/00 et T‑135/01.

57      Par ordonnance du 19 mai 2004, le président de la grande chambre, les parties entendues, a joint les six affaires précitées aux fins de la procédure orale.

58      Au titre des mesures d’organisation de la procédure, le Tribunal a invité les parties à répondre par écrit à une série de questions avant l’audience. Les parties ont régulièrement produit les informations requises.

59      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience de la grande chambre qui s’est déroulée le 26 mai 2004.

 Conclusions des parties

60      Dans leur requête, les requérantes ont conclu à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner les parties défenderesses à leur payer une indemnité d’un montant de 10 760 798,35 euros (20 835 811 027,16 lires italiennes) ou à concurrence de tout autre montant jugé raisonnable, sous réserve d’actualisation en cours d’instance, outre les intérêts au taux légal italien à partir du moment où elles ont acquitté effectivement à l’administration douanière américaine les droits majorés à concurrence de 96,5 % et jusqu’au paiement du solde, ainsi que les intérêts moratoires au taux de 8 % en cas de retard de paiement des sommes allouées après le prononcé de l’arrêt ;

–        condamner les parties défenderesses aux dépens.

61      Invitées à actualiser le préjudice allégué, les requérantes ont précisé en cours d’instance qu’elles avaient subi une perte de 12 139 521 euros au seul titre du paiement de la surtaxe douanière.

62      Les parties défenderesses, soutenues par le Royaume d’Espagne, concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou comme non fondé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

 Sur la recevabilité

63      Sans soulever une exception formelle au titre de l’article 114 du règlement de procédure, les parties défenderesses font observer que le recours est irrecevable en raison du défaut de conformité de la requête aux prescriptions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, d’une part, et du défaut de compétence du Tribunal, d’autre part.

 Sur le défaut de conformité de la requête aux prescriptions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure

 Arguments des parties

64      Les parties défenderesses font valoir que, contrairement aux exigences posées par l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, la requête ne détermine pas clairement l’acte des institutions générateur de la responsabilité non contractuelle de la Communauté, ni n’expose clairement le comportement, acte positif ou omission, reproché aux institutions défenderesses.

65      Les requérantes estiment au contraire avoir défini de manière suffisamment précise le comportement qu’elles reprochent aux défenderesses, à savoir l’absence d’adoption, dans le délai imparti par l’ORD, de dispositions modifiant utilement le règlement nº 404/93, en violation des obligations assumées par la Communauté au titre des accords OMC.

66      Les requérantes qualifient de purement terminologique la question de savoir si la Communauté a enfreint les règles de l’OMC de manière délibérée, par l’adoption des dispositions communautaires contestées, ou par omission, en raison de l’absence de mise en conformité de ces normes aux dispositions des accords OMC.

 Appréciation du Tribunal

67      En vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, de ce statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, toute requête doit indiquer l’objet du litige et contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels il se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même.

68      Pour satisfaire à ces exigences, une requête visant, comme en l’occurrence, à la réparation de dommages prétendument causés par des institutions communautaires doit contenir les éléments permettant d’identifier tant le comportement que le requérant reproche à ces institutions que les raisons pour lesquelles il estime qu’un lien de causalité existe entre ce comportement et le préjudice qu’il prétend avoir subi (arrêt du Tribunal du 29 janvier 1998, Dubois et Fils/Conseil et Commission, T‑113/96, Rec. p. II‑125, points 29 et 30).

69      Comme il ressort de leur argumentation, les requérantes soutiennent avoir subi un préjudice du fait de l’absence d’adoption par les institutions défenderesses de modifications du régime communautaire d’importation des bananes de nature à mettre celui-ci, dans les délais impartis par l’ORD, en conformité avec les engagements assumés par la Communauté au titre des accords OMC.

70      La requête contient ainsi, contrairement à ce que soutiennent les parties défenderesses, les éléments permettant d’identifier le comportement que leur reprochent les requérantes et que celles-ci considèrent comme étant à l’origine de leur préjudice.

71      Il ressort d’ailleurs de l’argumentation développée par les parties défenderesses sur le bien-fondé du recours qu’elles ont pu utilement préparer leur défense sur les conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté. Il s’ensuit que le Tribunal est en mesure de statuer sur le présent recours en pleine connaissance des éléments du dossier et dans le respect du principe du contradictoire.

72      Il y a donc lieu de rejeter le grief tiré par les parties défenderesses du défaut de conformité de la requête aux prescriptions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure.

 Sur la compétence du Tribunal

 Arguments des parties

73      La Commission estime que l’application de la surtaxe douanière aux produits importés par les requérantes sur le territoire des États-Unis résulte d’une décision du gouvernement de cet État et non d’un acte d’une institution de la Communauté.

74      En outre, le libellé de l’article 288 CE impliquerait la nécessité d’un lien direct entre l’acte litigieux et les activités de la Communauté, la compétence du Tribunal ne pouvant dépendre uniquement de l’allégation formelle des requérantes selon laquelle leur dommage découlerait d’actes adoptés par les institutions de la Communauté.

75      Lorsqu’elles allèguent que le gouvernement américain n’aurait jamais relevé les droits à l’importation litigieux s’il n’y avait été autorisé par l’ORD à la suite de la constatation de l’incompatibilité de la réglementation communautaire avec les règles de l’OMC, les requérantes ne démontreraient pas l’imputabilité directe d’une telle décision aux institutions communautaires. Cette prétention prouverait au contraire que l’acte dont les requérantes déplorent les effets est un acte adopté par les États-Unis d’Amérique dans l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire. Dans ces conditions, le Tribunal ne saurait se déclarer compétent pour statuer sur le présent recours (arrêt de la Cour du 7 juillet 1987, Étoile commerciale et CNTA/Commission, 89/86 et 91/86, Rec. p. 3005, points 18 à 20).

76      Les requérantes estiment qu’on ne peut raisonnablement nier l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice qu’elles ont subi et le comportement des institutions défenderesses. Il ne ferait aucun doute que le gouvernement américain n’aurait pas introduit une surtaxe à l’importation sur les produits des requérantes s’il n’y avait été autorisé par l’ORD à la suite de la violation des règles de l’OMC par la Communauté. L’origine du préjudice subi devrait être recherchée dans le fait que la réaction des États-Unis d’Amérique a été la conséquence de la violation des accords OMC par la Communauté.

 Appréciation du Tribunal

77      Les dispositions combinées de l’article 235 CE et de l’article 288, deuxième alinéa, CE donnent compétence au juge communautaire pour connaître des recours tendant à la réparation de dommages causés par les institutions communautaires ou par leurs agents dans l’exercice de leurs fonctions.

78      En l’occurrence, les requérantes demandent la réparation du dommage qu’elles auraient subi en raison de la majoration des droits à l’importation imposés sur leurs produits par les autorités des États-Unis d’Amérique, conformément à l’autorisation donnée par l’ORD à la suite de la constatation de l’incompatibilité avec les accords OMC du régime communautaire d’importation des bananes.

79      Le recours est fondé sur la responsabilité non contractuelle de la Communauté, engagée, selon les requérantes, à raison du fait que la cause du dommage subi par elles est à rechercher dans l’édiction par le Conseil et la Commission d’une réglementation qui a été considérée par l’ORD comme incompatible avec les accords OMC.

80      Le Tribunal est par conséquent compétent pour connaître, au titre de l’article 235 CE et de l’article 288, deuxième alinéa, CE, de la présente demande en indemnité qui, à la différence de la situation prévalant dans l’arrêt Étoile commerciale et CNTA/Commission, point 75 supra, qu’invoque la Commission, ne vise pas exclusivement, comme fondement de la responsabilité, la décision d’un organisme national.

81      Certes, l’engagement de la responsabilité de la Communauté suppose, de jurisprudence constante, l’imputabilité du dommage allégué au comportement des institutions communautaires. Toutefois, il s’agit là d’une condition de fond, qui doit être vérifiée dans le cadre du contrôle du caractère suffisamment direct du lien de causalité entre le dommage allégué et le comportement des institutions et qui ne permet pas d’écarter la compétence du Tribunal, dès lors qu’est alléguée l’imputabilité du dommage au comportement des institutions communautaires.

82      Il y a donc lieu de rejeter l’argumentation développée par la Commission au sujet de l’incompétence du Tribunal, sans préjudice de l’appréciation qui sera faite du lien de causalité entre le comportement du Conseil et de la Commission et le dommage allégué, dans le cadre de l’examen du respect des conditions de l’engagement de la responsabilité non contractuelle.

83      Dans ces conditions, il convient de déclarer le recours recevable.

 Sur le fond

84      La demande indemnitaire des requérantes est principalement fondée sur le régime de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en raison du comportement illicite de ses organes. Les requérantes demandent également le bénéfice de l’application par analogie du régime de la responsabilité non contractuelle applicable aux États membres en cas de violation de leurs obligations communautaires constatée par la Cour en vertu de l’article 226 CE. Enfin, les requérantes invoquent le régime de la responsabilité non contractuelle que la Communauté pourrait encourir même en l’absence de comportement illicite de ses organes.

 Sur la responsabilité de la Communauté pour comportement illicite de ses organes

85      Il convient de rappeler au préalable que, comme il résulte d’une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêt de la Cour du 29 septembre 1982, Oleifici Mediterranei/CEE, 26/81, Rec. p. 3057, point 16 ; arrêts du Tribunal du 11 juillet 1996, International Procurement Services/Commission, T‑175/94, Rec. p. II‑729, point 44 ; du 16 octobre 1996, Efisol/Commission, T‑336/94, Rec. p. II‑1343, point 30, et du 11 juillet 1997, Oleifici Italiani/Commission, T‑267/94, Rec. p. II‑1239, point 20).

86      Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions (arrêt de la Cour du 15 septembre 1994, KYDEP/Conseil et Commission, C‑146/91, Rec. p. I‑4199, points 19 et 81, et arrêt du Tribunal du 20 février 2002, Förde-Reederei/Conseil et Commission, T‑170/00, Rec. p. II‑515, point 37).

87      Le comportement illégal reproché à une institution communautaire doit consister en une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers (arrêt de la Cour du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, point 42).

88      Le critère décisif permettant de considérer que cette exigence est remplie est celui de la méconnaissance manifeste et grave, par l’institution communautaire concernée, des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation.

89      Lorsque cette institution ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit communautaire peut suffire pour établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée (arrêts du Tribunal du 12 juillet 2001, Comafrica et Dole Fresh Fruit Europe/Commission, T‑198/95, T‑171/96, T‑230/97, T‑174/98 et T‑225/99, Rec. p. II‑1975, point 134, et du 10 février 2004, Afrikanische Frucht-Compagnie et Internationale Fruchtimport Gesellschaft Weichert/Conseil et Commission, T‑64/01 et T‑65/01, Rec. p. II-521, point 71).

90      C’est sous le bénéfice de ces observations qu’il convient d’examiner la demande indemnitaire des requérantes.

 Arguments des parties

–       Sur les illégalités reprochées aux institutions défenderesses

91      Les requérantes font grief au Conseil et à la Commission de ne pas avoir mis, dans le délai de quinze mois imparti par l’ORD, le régime communautaire d’importation des bananes en conformité avec les engagements assumés par la Communauté au titre des accords OMC. La surtaxe américaine, qui causerait un grave dommage aux requérantes, serait la conséquence directe du maintien en vigueur de ce régime, dont l’incompatibilité avec les accords OMC a été constatée par l’ORD.

92      Les requérantes considèrent que le maintien en vigueur de ce régime est contraire à certains principes fondamentaux de l’ordre juridique communautaire, dont le principe pacta sunt servanda. Sous ce premier aspect, la Communauté aurait manqué aux obligations qui lui incombent en sa qualité de membre de l’OMC, eu égard au caractère contraignant des accords OMC et du MRD.

93      Les défenderesses auraient également violé les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique. Tout citoyen devrait pouvoir jouir de la certitude juridique qu’il n’aura pas à assumer les conséquences du comportement illégal des autorités communautaires. Les requérantes revendiquent le bénéfice d’une confiance légitime, non pas dans la pérennité des concessions tarifaires négociées avec les États-Unis d’Amérique sous la forme du droit à l’importation originaire au taux de 3,5 %, mais dans le fait que ces concessions ne seraient pas modifiées à cause du comportement illégal des institutions de la Communauté. Or, cette dernière n’aurait pas adapté sa réglementation aux règles de l’OMC, bien qu’elle eût, d’une part, assuré ses partenaires commerciaux de son intention de respecter les décisions de l’ORD et, d’autre part, bénéficié d’une prorogation exceptionnelle du délai accordé à cet effet.

94      Les institutions défenderesses auraient encore méconnu le droit de propriété et d’initiative économique des requérantes, protégé par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), signée à Rome le 4 novembre 1950. En l’occurrence, les requérantes auraient été contraintes d’acquitter des droits de douane prohibitifs sur leurs importations d’accumulateurs aux États-Unis et de procéder à une délocalisation de leurs installations de production.

95      Enfin, le Conseil et la Commission auraient violé le principe de bonne administration en ne mettant pas la réglementation communautaire litigieuse en conformité avec les règles de l’OMC et en sous-évaluant l’incidence que pouvait avoir l’adoption des mesures de rétorsion américaines sur l’activité de leurs propres administrés.

96      Les institutions défenderesses objectent que la Communauté a toujours entendu se conformer à toutes ses obligations internationales, dont celles découlant des conventions de Lomé et des accords OMC.

97      La négociation et l’octroi de compensations étant un mode de règlement des différends, les requérantes n’auraient pu fonder aucune confiance légitime sur l’hypothèse d’une modification du régime d’importation de bananes, en lieu et place de la négociation de compensations. En outre, une créance indemnitaire contre la Communauté ne saurait être fondée sur l’existence d’un droit acquis au maintien d’une concession commerciale par un État tiers, en l’absence de toute obligation incombant à la Communauté d’agir en vue d’obtenir un niveau déterminé de concessions tarifaires.

98      Les restrictions au droit de propriété alléguées ne seraient nullement comparables à une expropriation et n’excéderaient pas les limites des risques normaux de toute activité commerciale.

99      Enfin, aucune violation du principe de bonne administration n’aurait été commise. La Commission aurait négocié avec tous les membres intéressés de l’OMC afin de trouver une solution acceptable pour tous et tenté d’obtenir des États-Unis d’Amérique des compensations en termes d’accès au marché communautaire de certains produits américains, pour éviter un retrait de concessions unilatéral.

–       Sur la nature juridique des normes prétendument méconnues par les défenderesses

100     Les requérantes font observer que tous les principes méconnus par les défenderesses seraient de rang supérieur et viseraient à protéger les particuliers. Avant l’instauration de la surtaxe douanière américaine, le régime de l’OMC aurait directement ouvert aux requérantes le droit d’importer leurs produits aux États-Unis en acquittant la taxe à l’importation originaire au taux réduit de 3,5 %. À supposer que les accords OMC ne soient pas à regarder comme directement applicables, un tel effet devrait être reconnu à la décision de l’ORD condamnant la Communauté, laquelle remplirait toutes les conditions établies à cet égard par la jurisprudence communautaire.

101    Les défenderesses rétorquent que les dispositions des accords OMC ne créent des droits qu’en faveur des parties contractantes, à l’exclusion des particuliers. Il en irait de même des décisions de l’ORD, qui ne font qu’interpréter les règles de l’OMC.

102    Les accords OMC viseraient à réglementer et à gérer les relations commerciales internationales entre les seuls sujets de droit international. Les concessions tarifaires consenties par les membres de l’OMC permettraient l’accès à un marché national sans toutefois garantir un tel accès ou un niveau déterminé de prix sur ce marché, ni conférer directement aux opérateurs un droit à un traitement tarifaire donné ou un droit opposable aux institutions communautaires.

103    La Communauté, qui supporte, à titre temporaire et pendant la période nécessaire à la recherche d’une solution au conflit de la banane, les suspensions des concessions américaines, se trouverait de ce fait en parfaite harmonie avec les règles de l’OMC, dont l’augmentation des droits à l’importation américains sur les accumulateurs constituerait une simple application.

104    Puisque les accords OMC ne peuvent pas être invoqués par les requérantes, la violation du principe pacta sunt servanda ou de la confiance légitime qui aurait été placée dans le respect de ces accords ne pourrait être davantage alléguée.

–       Sur la gravité des violations alléguées

105    Les requérantes soutiennent que les violations commises par les défenderesses sont suffisamment caractérisées pour pouvoir engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté. Il conviendrait de retenir, d’une part, le degré de clarté et de précision des normes méconnues et, d’autre part, l’absence de marge d’appréciation laissée aux institutions défenderesses pour mettre en conformité avec les accords OMC la réglementation communautaire incompatible, compte tenu des précisions fournies à cet égard par les recommandations et les décisions de l’ORD. De plus, la Communauté aurait persisté dans sa méconnaissance du droit de l’OMC et, partant, du droit communautaire, même après l’expiration du délai de quinze mois qui lui avait été accordé par l’arbitre pour se conformer aux règles de l’OMC.

106    Les parties défenderesses estiment avoir d’autant moins dépassé les limites de leur pouvoir d’appréciation qu’étaient complexes les situations à régler et difficiles l’application et l’interprétation des dispositions en cause. On ne saurait reprocher aux défenderesses de s’être abstenues de prendre les mesures nécessaires, dès lors que les règlements n° 1637/98 et n° 2362/98, objet d’une nouvelle procédure ouverte par les États-Unis d’Amérique, institueraient un régime communautaire d’importation différent du régime originaire.

107    Il conviendrait de rappeler à cet égard le rôle joué par la suspension des concessions prévue par l’article 22 du MRD, qui constitue la meilleure solution après la pleine application des recommandations de l’ORD. Il résulterait de l’article 3, paragraphe 7, du MRD, qui privilégie le choix d’une solution mutuellement convenue, un large pouvoir d’appréciation des organes compétents des membres de l’OMC leur permettant de se démarquer, fût-ce à titre temporaire, de leurs obligations découlant des accords OMC.

 Appréciation du Tribunal

–       Sur la question préalable de l’invocabilité des règles de l’OMC

108    Avant de procéder à l’examen de la légalité du comportement des institutions communautaires, il convient de trancher la question de savoir si les accords OMC engendrent pour les justiciables de la Communauté le droit de s’en prévaloir en justice en vue de contester la validité d’une réglementation communautaire, dans l’hypothèse où l’ORD a déclaré que tant celle-ci que la réglementation subséquente adoptée par la Communauté, en vue notamment de se conformer aux règles de l’OMC en cause, étaient incompatibles avec ces dernières.

109    Les requérantes invoquent à cet égard le principe pacta sunt servanda, qui figure effectivement au nombre des règles de droit dont le respect s’impose aux institutions communautaires dans l’exercice de leurs attributions, en tant que principe fondamental de tout ordre juridique et, en particulier, de l’ordre juridique international (arrêt de la Cour du 16 juin 1998, Racke, C‑162/96, Rec. p. I‑3655, point 49).

110    Toutefois, le principe pacta sunt servanda ne peut être, en l’espèce, utilement opposé aux institutions défenderesses, étant donné que, selon une jurisprudence constante, les accords OMC ne figurent pas, en principe, compte tenu de leur nature et de leur économie, au nombre des normes au regard desquelles le juge communautaire contrôle la légalité de l’action des institutions communautaires (arrêt de la Cour du 23 novembre 1999, Portugal/Conseil, C‑149/96, Rec. p. I‑8395, point 47 ; ordonnance de la Cour du 2 mai 2001, OGT Fruchthandelsgesellschaft, C‑307/99, Rec. p. I‑3159, point 24 ; arrêts de la Cour du 12 mars 2002, Omega Air e.a., C‑27/00 et C‑122/00, Rec. p. I‑2569, point 93 ; du 9 janvier 2003, Petrotub et Republica/Conseil, C‑76/00 P, Rec. p. I‑79, point 53, et du 30 septembre 2003, Biret International/Conseil, C‑93/02 P, Rec. p. I‑10497, point 52).

111    En effet, d’une part, l’accord instituant l’OMC est fondé sur une base de réciprocité et d’avantages mutuels qui le distingue des accords conclus par la Communauté avec des États tiers qui instaurent une certaine asymétrie des obligations. Or, il est constant que certains des partenaires commerciaux les plus importants de la Communauté ne font pas figurer les accords OMC au rang des normes au regard desquelles leurs organes juridictionnels contrôlent la légalité de leurs règles de droit interne. Un contrôle de la légalité de l’action des institutions communautaires au regard de ces normes risquerait donc d’aboutir à un déséquilibre dans l’application des règles de l’OMC privant les organes législatifs ou exécutifs de la Communauté de la marge de manoeuvre dont jouissent les organes similaires des partenaires commerciaux de la Communauté (arrêt Portugal/Conseil, point 110 supra, points 42 à 46).

112    D’autre part, imposer aux organes juridictionnels l’obligation d’écarter l’application des règles de droit interne qui seraient incompatibles avec les accords OMC aurait pour conséquence de priver les organes législatifs ou exécutifs des parties contractantes de la possibilité, offerte par l’article 22 du MRD, de trouver, fût-ce à titre temporaire, des solutions négociées en vue de parvenir à une compensation mutuellement acceptable (arrêt Portugal/Conseil, point 110 supra, points 39 et 40).

113    Il s’ensuit que la violation éventuelle des règles de l’OMC par les institutions défenderesses n’est pas, en principe, susceptible d’engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté (arrêts du Tribunal du 20 mars 2001, Cordis/Commission, T‑18/99, Rec. p. II‑913, point 51 ; Bocchi Food Trade International/Commission, T‑30/99, Rec. p. II‑943, point 56, et T. Port/Commission, T‑52/99, Rec. p. II‑981, point 51).

114    Ce n’est que dans l’hypothèse où la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC ou dans l’occurrence où l’acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC qu’il appartiendrait au Tribunal de contrôler la légalité du comportement des institutions défenderesses au regard des règles de l’OMC (voir, pour ce qui concerne le GATT de 1947, arrêts de la Cour du 22 juin 1989, Fediol/Commission, 70/87, Rec. p. 1781, points 19 à 22, et du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C‑69/89, Rec. p. I‑2069, point 31, ainsi que, pour ce qui concerne les accords OMC, arrêts Portugal/Conseil, point 110 supra, point 49, et Biret International/Conseil, point 110 supra, point 53).

115    Or, même en présence d’une décision de l’ORD constatant l’incompatibilité des mesures prises par un membre avec les règles de l’OMC, aucune de ces deux exceptions ne trouve application en l’espèce.

–       Sur l’exception tirée de l’intention de donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC

116    En prenant l’engagement, après l’adoption de la décision de l’ORD du 25 septembre 1997, de se conformer aux règles de l’OMC, la Communauté n’a pas entendu assumer une obligation particulière dans le cadre de l’OMC, susceptible de justifier une exception à l’impossibilité d’invoquer les règles de l’OMC devant le juge communautaire et de permettre l’exercice par ce dernier du contrôle de la légalité du comportement des institutions communautaires au regard de ces règles.

117    Il est vrai que, par rapport au GATT de 1947, le MRD a renforcé le mécanisme de règlement des différends, en particulier s’agissant de l’adoption des rapports des groupes spéciaux.

118    Ainsi, l’article 3, paragraphe 7, du MRD souligne que le mécanisme de règlement des différends a habituellement pour objectif premier le retrait des mesures dont l’incompatibilité a été constatée avec les dispositions des accords OMC. De même, l’article 22, paragraphe 1, du MRD privilégie la mise en œuvre intégrale d’une recommandation de mettre une mesure en conformité avec les accords OMC.

119    En outre, aux termes de l’article 17, paragraphe 14, du MRD, un rapport de l’organe d’appel adopté, comme en l’espèce, par l’ORD est accepté sans condition par les parties au différend. Enfin, l’article 22, paragraphe 7, spécifie que celles-ci admettent le caractère définitif de la décision de l’arbitre déterminant le niveau de la suspension des concessions.

120    Il n’en demeure pas moins que le MRD réserve en tout état de cause une place importante à la négociation entre les membres de l’OMC parties à un différend (arrêt Portugal/Conseil, point 110 supra, points 36 à 40).

121    Le MRD ouvre ainsi au membre de l’OMC impliqué plusieurs modalités de mise en œuvre d’une recommandation ou d’une décision de l’ORD retenant l’incompatibilité d’une mesure avec les règles de l’OMC.

122    Lorsque le retrait immédiat de la mesure incompatible est irréalisable, le MRD envisage, en son article 3, paragraphe 7, la possibilité d’octroyer au membre lésé une compensation ou de l’autoriser à suspendre l’application de concessions ou l’exécution d’autres obligations à titre temporaire et en attendant le retrait de la mesure incompatible (voir arrêt Portugal/Conseil, point 110 supra, point 37).

123    Aux termes de l’article 22, paragraphe 2, du MRD, s’il manque à son obligation d’exécuter les recommandations et décisions de l’ORD dans le délai qui lui a été imparti, le membre de l’OMC mis en cause se prête, si la demande lui en est faite et au plus tard à l’expiration du délai, à des négociations avec le membre plaignant, en vue de trouver une compensation mutuellement acceptable.

124    Si aucune compensation satisfaisante n’a été convenue dans un délai de 20 jours suivant l’expiration du délai raisonnable prévu à l’article 21, paragraphe 3, du MRD pour la mise en conformité avec les règles de l’OMC, la partie plaignante peut demander à l’ORD l’autorisation de suspendre, à l’égard dudit membre, l’application de concessions ou d’autres obligations au titre des accords OMC.

125    Même à l’expiration du délai imparti pour mettre en conformité avec les règles de l’OMC la mesure déclarée incompatible et après l’autorisation et l’adoption de mesures de compensation ou de suspension de concessions en vertu de l’article 22, paragraphe 6, du MRD, une place importante reste réservée en tout état de cause à la négociation entre les parties au différend.

126    L’article 22, paragraphe 8, du MRD souligne ainsi le caractère temporaire de la suspension de concessions ou d’autres obligations et en limite la durée « jusqu’à ce que la mesure jugée incompatible avec un accord visé ait été éliminée ou que le membre devant mettre en œuvre les recommandations ou les décisions ait trouvé une solution à l’annulation ou à la réduction d’avantages ou qu’une solution mutuellement satisfaisante soit intervenue ».

127    Cette même disposition prévoit encore que, conformément à l’article 21, paragraphe 6, l’ORD continue de tenir sous surveillance la mise en œuvre des recommandations ou des décisions adoptées.

128    En cas de désaccord sur la compatibilité de mesures prises pour se conformer aux recommandations et aux décisions de l’ORD, l’article 21, paragraphe 5, du MRD prévoit que le différend sera réglé « suivant les présentes procédures de règlement des différends », ce qui inclut la recherche par les parties d’une solution négociée.

129    Ni l’expiration du délai imparti par l’ORD à la Communauté pour mettre son régime d’importation des bananes en conformité avec la décision de l’ORD du 25 septembre 1997 ni la décision du 9 avril 1999 par laquelle les arbitres de l’ORD ont expressément constaté l’incompatibilité du nouveau dispositif d’importation des bananes établi par les règlements n° 1637/98 et n° 2362/98 n’ont emporté épuisement des modalités de règlement des différends ouvertes par le MRD.

130    Dans cette mesure, un contrôle par le juge communautaire de la légalité du comportement des institutions défenderesses au regard des règles de l’OMC pourrait avoir pour effet de fragiliser la position des négociateurs communautaires dans la recherche d’une solution mutuellement acceptable du différend et en conformité avec les règles de l’OMC.

131    Dans ces conditions, imposer aux organes juridictionnels l’obligation d’écarter l’application des règles de droit interne qui seraient incompatibles avec les accords OMC aurait pour conséquence de priver les organes législatifs ou exécutifs des parties contractantes de la possibilité, offerte notamment par l’article  22 du MRD, de trouver, fût-ce à titre temporaire, une solution négociée (arrêt Portugal/Conseil, point 110 supra, point 40).

132    C’est donc à tort que les requérantes infèrent des articles 21 et 22 du MRD une obligation à la charge du membre de l’OMC de se conformer, dans un délai déterminé, aux recommandations et aux décisions des organes de l’OMC et qu’elles soutiennent que les décisions de l’ORD sont exécutoires à moins que les parties contractantes à l’unanimité s’y opposent.

133    D’ailleurs, en amendant à nouveau, par son règlement n° 216/2001, le régime d’importation des bananes, le Conseil a poursuivi la mise en œuvre de la conciliation de divers objectifs divergents. Le préambule du règlement n° 216/2001 relève ainsi, en son considérant 1, que des contacts nombreux et intenses ont été établis afin, notamment, de « tenir compte des conclusions du groupe spécial » et, en son considérant 2, que le nouveau régime d’importation envisagé présente les meilleures garanties aussi bien « pour réaliser les objectifs de l’[OCM bananes] en ce qui concerne la production communautaire et la demande des consommateurs » que pour « respecter les règles du commerce international ».

134    C’est, en définitive, en contrepartie de l’engagement de la Communauté d’établir un régime uniquement tarifaire pour les importations de bananes avant le 1er janvier 2006 que les États-Unis d’Amérique ont accepté, aux termes du mémorandum d’accord intervenu le 11 avril 2001, de suspendre provisoirement l’imposition de leur surtaxe douanière.

135    Or, un tel résultat aurait pu être compromis par une intervention du juge communautaire consistant à contrôler, aux fins de l’indemnisation du préjudice subi par les requérantes, la légalité au regard des règles de l’OMC du comportement adopté en l’occurrence par les institutions défenderesses.

136    Il convient de relever à cet égard que, comme les États-Unis d’Amérique l’ont expressément souligné, le mémorandum d’accord du 11 avril 2001 ne constitue pas en lui-même une solution convenue d’un commun accord au sens de l’article 3, paragraphe 6, du MRD et que la question de la mise en œuvre par la Communauté des recommandations et des décisions de l’ORD demeurait inscrite, le 12 juillet 2001, soit postérieurement à l’introduction du présent recours, à l’ordre du jour de la réunion de l’ORD.

137    Il s’ensuit que les institutions défenderesses n’ont pas entendu, en modifiant le régime communautaire d’importation des bananes litigieux, donner exécution à des obligations particulières découlant des règles de l’OMC au regard desquelles l’ORD avait constaté l’incompatibilité dudit régime.

138    Au demeurant, il convient de relever à cet égard que, comme il ressort des considérants du règlement n° 1637/98, le Conseil a entendu en l’occurrence concilier, en tirant partie des diverses modalités de règlement des différends définies par le MRD, les engagements internationaux souscrits par la Communauté aussi bien dans le cadre de l’OMC que vis-à-vis des autres signataires de la quatrième convention de Lomé, tout en sauvegardant par ailleurs les objectifs de l’OCM bananes.

139    Cette intention est confirmée par l’article 20, sous e), du règlement n° 404/93, modifié par le règlement n° 1637/98. En tant qu’elle précise que les modalités que la Commission est habilitée à arrêter aux fins de l’application du titre IV du règlement n° 404/93, relatif au régime des échanges de bananes avec les pays tiers, comportent les mesures nécessaires pour respecter les obligations découlant des accords conclus par la Communauté en conformité avec l’article 300 CE, cette disposition englobe l’ensemble des engagements conventionnels souscrits, sans privilégier les obligations assumées par la Communauté dans le cadre des accords OMC.

140    En outre, le législateur communautaire s’est expressément réservé, au considérant 9 du règlement n° 1637/98, la possibilité d’étudier le fonctionnement de ce texte au terme d’une période d’expérimentation suffisante.

–       Sur l’exception fondée sur le renvoi exprès à des dispositions précises des accords OMC

141     L’OCM bananes, telle qu’elle a été instaurée par le règlement n° 404/93 et modifiée par la suite, ne peut être considérée comme renvoyant expressément à des dispositions précises des accords OMC (voir, en ce sens, ordonnance OGT Fruchthandelsgesellschaft, point 110 supra, point 28).

142    En particulier, il ne ressort pas du préambule des différents règlements modifiant le régime d’importation des bananes que le législateur communautaire se soit référé à des dispositions spécifiques des accords OMC, lorsqu’il a entendu mettre ce régime en conformité avec ces mêmes accords.

143    Ainsi, le règlement n° 2362/98 ne contient aucune référence expresse à des dispositions précises des accords OMC (arrêts Cordis/Commission, point 113 supra, point 59 ; Bocchi Food Trade International/Commission, point 113 supra, point 64, et T. Port/Commission, point 113 supra, point 59).

144    Il s’ensuit que, nonobstant l’intervention d’une constatation d’incompatibilité émanant de l’ORD, les règles de l’OMC ne constituent pas, en l’espèce, ni en raison d’obligations particulières auxquelles la Communauté aurait entendu donner exécution ni en raison d’un renvoi exprès à des dispositions précises, des normes au regard desquelles la légalité du comportement des institutions peut être appréciée.

145    Il résulte des développements qui précèdent que les requérantes ne sauraient utilement alléguer, aux fins de leur demande indemnitaire, que le comportement reproché au Conseil et à la Commission est contraire aux règles de l’OMC.

146    Les griefs tirés par les requérantes de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique, de la méconnaissance du droit de propriété et d’initiative économique et, enfin, du non-respect du principe de bonne administration reposent tous sur la prémisse de la contrariété aux règles de l’OMC du comportement reproché aux institutions défenderesses.

147    Dès lors que ces règles ne figurent pas au nombre de celles au regard desquelles le juge communautaire contrôle la légalité du comportement des institutions communautaires, ces griefs doivent être, par voie de conséquence, également rejetés.

148    Il s’ensuit que le comportement des institutions défenderesses ne peut être regardé comme entaché d’illégalité, sans qu’il y ait lieu d’examiner l’argumentation des requérantes relative à la nature juridique des normes et des principes prétendument méconnus et à la gravité supposée de leurs violations.

149    Dès lors que l’illégalité du comportement reproché aux institutions défenderesses ne peut être établie, l’une des trois conditions cumulatives de l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté pour comportement illicite de ses organes n’est pas remplie.

150    Dans ces conditions, l’action indemnitaire des requérantes fondée sur ce régime de responsabilité doit être rejetée, sans qu’il soit besoin, dans ce cadre, d’examiner si sont réunies les deux autres conditions, relatives, respectivement, à la réalité du dommage et à l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué (arrêt de la Cour du 9 septembre 1999, Lucaccioni/Commission, C‑257/98 P, Rec. p. I‑5251, point 14, et arrêt du Tribunal du 24 avril 2002, EVO/Conseil et Commission, T‑220/96, Rec. p. II‑2265, point 39).

 Sur l’application par analogie du régime de la responsabilité non contractuelle des États membres

151    Les requérantes soutiennent en substance que la décision des arbitres du 9 avril 1999 autorisant les mesures de rétorsion à l’encontre des exportations communautaires est comparable à un arrêt de la Cour constatant, sur le fondement de l’article 226 CE, le manquement d’un État membre à ses obligations communautaires. Le juge communautaire serait donc conduit à reconnaître aux requérantes un droit à réparation du dommage découlant du comportement illégal des défenderesses (arrêts de la Cour du 19 novembre 1991, Francovich e.a., C‑6/90 et C‑9/90, Rec. p. I‑5357, et du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame, C‑46/93 et C‑48/93, Rec. p. I‑1029).

152    Les institutions défenderesses estiment inapplicable en l’espèce la jurisprudence de la Cour relative à la responsabilité non contractuelle des États membres pour violation de leurs obligations communautaires.

153    Il suffit pour le Tribunal de constater que, à supposer même que les recommandations et les décisions de l’ORD puissent être assimilées à des arrêts de la Cour, la demande indemnitaire des requérantes est fondée sur l’application par analogie à la Communauté d’un régime de responsabilité reposant sur la prémisse d’un comportement illégal des institutions défenderesses.

154    En l’absence d’une démonstration de l’illégalité du comportement reproché en l’espèce aux intéressées, une telle demande ne peut donc qu’être rejetée comme non fondée.

 Sur la responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes

 Sur le principe de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes

–       Arguments des parties

155    Les requérantes estiment que, à supposer que les défenderesses aient pu licitement écarter les décisions de l’OMC, les conditions auxquelles la jurisprudence communautaire subordonne la responsabilité non contractuelle de la Communauté pour les dommages causés par ses organes même en l’absence d’action illicite de ceux-ci sont en tout état de cause réunies, à savoir la réalité du préjudice subi, le lien de causalité entre celui-ci et le comportement adopté par les institutions communautaires, ainsi que le caractère anormal et spécial de ce préjudice (arrêt du Tribunal du 28 avril 1998, Dorsch Consult/Conseil et Commission, T‑184/95, Rec. p. II‑667, point 59, confirmé, sur pourvoi, par arrêt de la Cour du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, C‑237/98 P, Rec. p. I‑4549).

156    Les défenderesses objectent que le principe de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes ne saurait être considéré comme un principe général commun aux droits des États membres au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE. En toute hypothèse, un tel principe n’aurait encore jamais été consacré par la jurisprudence communautaire et les requérantes ne rempliraient pas les conditions strictes de ce régime de responsabilité imposées par les ordres juridiques nationaux qui l’ont reconnu.

–       Appréciation du Tribunal

157    Lorsque, comme en l’espèce, l’illégalité du comportement imputé aux institutions communautaires n’est pas établie, il n’en résulte pas que les entreprises devant, en tant que catégorie d’opérateurs économiques, supporter une part disproportionnée des charges résultant d’une restriction de l’accès à des marchés d’exportation ne peuvent en aucun cas obtenir une compensation en engageant la responsabilité non contractuelle de la Communauté (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 septembre 1987, De Boer Buizen/Conseil et Commission, 81/86, Rec. p. 3677, point 17).

158    En effet, l’article 288, deuxième alinéa, CE fonde l’obligation qu’il impose à la Communauté de réparer les dommages causés par ses institutions sur les « principes généraux communs aux droits des États membres », sans restreindre, par conséquent, la portée de ces principes au seul régime de la responsabilité non contractuelle de la Communauté pour comportement illicite desdites institutions.

159    Or, les droits nationaux de la responsabilité non contractuelle permettent aux particuliers, bien qu’à des degrés variables, dans des domaines spécifiques et selon des modalités différentes, d’obtenir en justice l’indemnisation de certains dommages, même en l’absence d’action illicite de l’auteur du dommage.

160    Dans l’hypothèse d’un dommage engendré par un comportement des institutions de la Communauté dont le caractère illégal n’est pas démontré, la responsabilité non contractuelle de la Communauté peut être engagée, dès lors que sont cumulativement remplies les conditions relatives à la réalité du préjudice, au lien de causalité entre celui-ci et le comportement des institutions communautaires, ainsi qu’au caractère anormal et spécial du préjudice en question (arrêt du 15 juin 2000, Dorsch Consult/Conseil et Commission, point 155 supra, point 19).

161    Il convient donc d’examiner si ces trois conditions sont réunies en l’espèce.

 Sur l’existence d’un préjudice réel et certain

–       Arguments des parties

162    Les requérantes font valoir que leur préjudice se compose, d’une part, de la majoration de 96,5 % des droits à l’importation prélevés par l’administration américaine sur leurs importations d’accumulateurs aux États-Unis et, d’autre part, des coûts exposés au titre de l’établissement et de la délocalisation d’unités de production de ces produits qu’elles ont été contraintes d’entreprendre à la suite de cette mesure de rétorsion commerciale. S’y ajouteraient les pertes de chiffres d’affaires consécutives à la reconversion des unités de production en cause.

163    En cours d’instance, les requérantes ont précisé que l’accélération de la réalisation d’une unité de production d’accumulateurs aux États-Unis et la conversion en une usine de fabrication de ces produits d’un site installé dans un autre État tiers leur avaient permis de réduire au maximum l’impact négatif de la surtaxe douanière et de sauver leur part du marché américain. Les requérantes n’auraient donc pas perdu des volumes de ventes mais auraient seulement subi un préjudice pécuniaire.

164    Les défenderesses rétorquent que les contrats de vente liant les requérantes à leurs clients américains prévoient une révision des prix de leurs produits et qu’il n’est pas établi que les intéressées aient ouvert des négociations à cette fin. En souscrivant à des clauses limitant l’augmentation de leurs prix, les requérantes se seraient rendues elles-mêmes responsables des désavantages financiers censés procéder de la surtaxe douanière. Les défenderesses ajoutent que l’accord de distribution des requérantes, qui assoit les prix convenus avec l’acheteur sur la clause fob (franco à bord), met à la charge exclusive de l’acheteur le risque de la variation des droits de douane à l’importation. En effet, le montant des droits à l’importation aux États-Unis serait naturellement ajouté, avec ceux du transport et des assurances, au prix fob initialement convenu.

165    Les requérantes n’auraient pas non plus démontré leur incapacité à exporter leurs accumulateurs dans d’autres pays et à éviter ainsi toute diminution de bénéfices. Enfin, loin d’engendrer un préjudice, leurs mesures de délocalisation constitueraient au contraire l’accès à une production à haute technologie plus profitable.

–       Appréciation du Tribunal

166    Il ressort de leur argumentation que les institutions défenderesses se limitent en substance à dénier l’existence d’une perte patrimoniale subie par les requérantes qui ne soit pas le fait des propres décisions de celles-ci.

167    Il s’ensuit que le Conseil et la Commission ne contestent pas dans son principe le caractère réel et certain du dommage subi par les requérantes à la suite de l’instauration de la surtaxe douanière américaine sur les importations d’accumulateurs originaires de la Communauté.

168    En particulier, du fait même qu’elles admettent que le contrat de distribution conclu par les requérantes a pour effet de mettre à la charge exclusive de l’acheteur le risque de la variation des droits de douane à l’importation, les défenderesses ne peuvent nier que les requérantes ont dû, à tout le moins, nécessairement supporter un préjudice commercial en raison du renchérissement incontestable de leurs produits provoqué sur le marché des États-Unis par la majoration soudaine à 100 % des droits à l’importation ad valorem américains.

169    D’ailleurs, les statistiques produites par la Commission corroborent les allégations des requérantes, puisqu’elles démontrent incontestablement une chute sensible de la valeur totale des importations aux États-Unis d’accumulateurs plomb‑acide d’origine communautaire.

170    Dans cette mesure, le Tribunal considère que la condition relative au caractère réel et certain du préjudice souffert par les requérantes est remplie.

 Sur le lien de causalité entre le préjudice subi et le comportement des institutions défenderesses

–       Arguments des parties

171    Les requérantes considèrent qu’il suffit que le dommage subi provienne de manière suffisamment directe du comportement des institutions communautaires, sans que soit exigé à cet égard un lien de causalité absolument immédiat. En l’occurrence, la surtaxe douanière américaine procéderait en définitive du maintien d’un régime communautaire d’importation des bananes incompatible avec les règles de l’OMC.

172    L’intention des autorités américaines d’adopter des mesures de représailles et la liste des produits concernés auraient été parfaitement connues. Peu importerait que tout opérateur communautaire puisse être affecté et que les États-Unis d’Amérique aient disposé du droit de désigner les secteurs en cause ou de réagir par d’autres options prévues ou tolérées par les règles de l’OMC.

173    Les défenderesses dénient tout lien de causalité entre le dommage allégué et leur comportement. La surtaxe douanière ne procéderait pas de leur action mais d’un acte unilatéral des États-Unis d’Amérique, dont découlerait la délimitation du cercle des opérateurs communautaires affectés. Les autorités américaines auraient pu choisir d’autres produits que les accumulateurs et elles auraient par ailleurs exempté de leur surtaxe douanière les produits originaires de certains États membres de la Communauté. De même, le niveau du relèvement tarifaire aurait été fixé en toute liberté par le gouvernement américain.

174    On ne pourrait donc imputer à la Communauté l’imposition d’une charge disproportionnée aux opérateurs concernés. D’ailleurs, les observations des requérantes relatives à la discrimination dont elles se prétendent victimes démontreraient l’absence d’un lien de causalité entre le comportement des défenderesses et le préjudice allégué.

175    Un retrait de concessions par un membre de l’OMC ne serait ni automatique ni obligatoire. Ainsi, la procédure prévue à l’article 22, paragraphes 1 et 2, du MRD envisagerait la négociation de compensations sous forme de concessions concernant l’accès au marché, lorsque les recommandations ou les décisions de l’ORD ne sont pas mises en oeuvre dans un délai raisonnable.

176    De plus, il n’existerait aucune relation, même indirecte, entre l’OCM bananes et les décisions des requérantes de payer les droits de douane majorés. Aucun acte de la Communauté ne leur aurait imposé l’obligation d’exporter vers les États-Unis ou de continuer à exporter dans les circonstances nouvelles ni n’aurait exclu la possibilité d’une renégociation du prix d’importation ou la possibilité d’exporter ailleurs leurs produits.

–       Appréciation du Tribunal

177    Les principes communs aux droits des États membres auxquels renvoie l’article 288, deuxième alinéa, CE ne sauraient être invoqués au soutien de l’existence d’une obligation incombant à la Communauté de réparer toute conséquence préjudiciable, même éloignée, de comportements de ses organes (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 4 octobre 1979, Dumortier e.a./Conseil, 64/76 et 113/76, 167/78 et 239/78, 27/79, 28/79 et 45/79, Rec. p. 3091, point 21, et du 30 janvier 1992, Finsider e.a./Commission, C‑363/88 et C‑364/88, Rec. p. I‑359, point 25 ; ordonnance du Tribunal du 12 décembre 2000, Royal Olympic Cruises e.a./Conseil et Commission, T‑201/99, Rec p. II‑4005, point 26).

178    En effet, la condition relative au lien de causalité exigée par l’article 288, deuxième alinéa, CE suppose l’existence d’un lien suffisamment direct de cause à effet entre le comportement des institutions communautaires et le dommage (arrêt Dumortier e.a./Conseil, point 177 supra, point 21, et arrêt du Tribunal du 24 octobre 2000, Fresh Marine/Commission, T‑178/98, Rec. p. II‑3331, point 118, confirmé sur pourvoi par arrêt de la Cour du 10 juillet 2003, Commission/Fresh Marine, C‑472/00 P, Rec. p. I‑7541).

179    Il est certes vrai que les États-Unis d’Amérique ont été, à leur demande, simplement autorisés par l’ORD, sans y être tenus, à procéder au retrait de concessions sous la forme du relèvement de leurs droits grevant les importations de produits originaires de la Communauté. Même après avoir obtenu cette autorisation, le gouvernement américain conservait la faculté de poursuivre le règlement du différend l’opposant à la Communauté sans arrêter de mesures de rétorsion à l’encontre de celle-ci.

180    C’est également dans l’exercice d’une faculté de choix discrétionnaire que l’administration américaine a, d’une part, décidé de frapper les accumulateurs de sa mesure de rétorsion, dont elle a elle-même exonéré les accumulateurs originaires de certains États membres de la Communauté, et, d’autre part, fixé à 96,5 % le taux de majoration des droits à l’importation grevant les produits concernés.

181    Il n’en demeure pas moins que, en l’absence du régime communautaire d’importation des bananes litigieux et d’une constatation préalable par l’ORD de son incompatibilité avec les règles de l’OMC, les États-Unis d’Amérique n’auraient pu ni solliciter ni obtenir de l’ORD l’autorisation de suspendre leurs concessions tarifaires sur des produits originaires de la Communauté à concurrence du niveau de l’annulation ou de la réduction d’avantages procédant du maintien du régime communautaire litigieux.

182    C’est, en effet, en fonction du montant du préjudice subi par l’économie américaine du fait du régime communautaire d’importation des bananes jugé incompatible avec les règles de l’OMC que l’ORD a déterminé le montant d’échanges à concurrence duquel l’administration américaine a été autorisée à suspendre ses concessions tarifaires à l’égard de la Communauté.

183    Dans ces conditions, le retrait des concessions à l’égard de la Communauté prenant la forme de la surtaxe douanière à l’importation est à regarder comme une conséquence découlant objectivement, selon le déroulement normal et prévisible du système de règlement des différends de l’OMC accepté par la Communauté, du maintien en vigueur par les institutions défenderesses d’un régime d’importation des bananes incompatible avec les accords OMC.

184    La décision unilatérale des États-Unis d’Amérique d’instaurer une surtaxe douanière sur les importations d’accumulateurs originaires de la Communauté n’est donc pas de nature à rompre le lien de causalité existant entre le préjudice que l’instauration de cette surtaxe a causé aux requérantes et le maintien par les défenderesses du régime d’importation de bananes litigieux.

185    Le comportement des institutions défenderesses a, en effet, nécessairement induit l’adoption de la mesure de rétorsion par l’administration américaine dans le respect des procédures instituées par le MRD et acceptées par la Communauté, de sorte que ce comportement doit être regardé comme la cause déterminante du préjudice subi par les requérantes à la suite de l’instauration de la surtaxe douanière américaine.

186    Avant même que l’ORD n’autorise, le 19 avril 1999, les États-Unis d’Amérique à prélever leur surtaxe à l’importation, les institutions défenderesses n’ignoraient pas l’imminence des mesures de rétorsion américaines.

187    Dès le 10 novembre 1998, les États-Unis d’Amérique avaient publié la liste provisoire des produits d’origine communautaire qu’ils envisageaient de grever d’une surtaxe à l’importation, dont ils ont confirmé, le 21 décembre 1998, l’application prochaine à raison d’un taux de 100 %.

188    Dès le 3 mars 1999, date de l’institution à la charge des exportateurs communautaires de l’obligation de constituer une caution bancaire à raison de 100 % de la valeur des produits d’importation visés, les défenderesses ne pouvaient plus ignorer la ferme intention des États-Unis d’Amérique d’instaurer une surtaxe douanière. Aucun doute ne pouvait subsister après le communiqué de presse du 9 avril 1999 du représentant spécial annonçant la liste des produits grevés de la surtaxe douanière.

189    Sont dépourvues de pertinence au regard du lien de causalité les objections tirées par les défenderesses de l’absence de toute relation entre le régime d’importation de bananes litigieux et la décision qu’elles attribuent aux requérantes d’acquitter la surtaxe douanière, de l’inexistence prétendue d’une obligation leur incombant de poursuivre la commercialisation de leurs accumulateurs sur le marché américain et, enfin, de la possibilité supposée de renégocier le prix de leurs produits ou d’exporter ceux-ci vers d’autres marchés.

190    De telles considérations, qui concernent uniquement les mesures que les requérantes auraient pu être conduites à adopter pour se soustraire au paiement de la surtaxe douanière et réduire leur préjudice commercial, ne sauraient remettre en cause l’existence du lien de causalité suffisamment direct retenu entre le comportement des défenderesses et le préjudice subi par les requérantes à la suite de l’instauration de la surtaxe.

191    Il y a donc lieu d’admettre l’existence du lien de causalité direct exigé entre, d’une part, le comportement adopté par les institutions défenderesses au regard des importations de bananes dans la Communauté et, d’autre part, le préjudice subi par les requérantes du fait de l’instauration de la surtaxe douanière américaine.

 Sur le caractère anormal et spécial du préjudice subi

–       Arguments des parties

192    Les requérantes estiment que le caractère anormal et spécial du dommage subi procède de la double discrimination induite par le comportement des institutions défenderesses.

193    En premier lieu, la surtaxe douanière frapperait la catégorie très particulière des opérateurs économiques figurant sur la liste spéciale établie par l’administration américaine.

194    Les requérantes auraient fait l’objet d’une discrimination par rapport aux autres entreprises pénalisées par les mesures de rétorsion, dans la mesure où elles supportent, à elles seules, près de 6 % du montant total de 191,4 millions de USD indiqué dans la décision du gouvernement américain instaurant les mesures de rétorsion.

195    Les requérantes s’estiment en tout état de cause victimes d’une discrimination non seulement par rapport aux entreprises produisant des accumulateurs industriels, mais également au regard de l’ensemble des entreprises communautaires, dans la mesure où toutes faisaient potentiellement l’objet de sanctions.

196    En second lieu, les requérantes soulignent que ne peut être considéré comme un risque normal pour une entreprise l’aléa auquel est exposé l’opérateur tenu d’acquitter soudainement des droits prohibitifs sur ses exportations à la suite d’un différend commercial surgi dans un secteur différent de son domaine d’activité.

197    Les requérantes ajoutent que l’intérêt au maintien de certaines règles de l’OCM bananes ne saurait être valablement qualifié d’objectif d’intérêt général fondamental de la Communauté, dont l’importance justifierait des conséquences négatives pour certains opérateurs. Serait en cause non pas le démantèlement, mais l’adaptation de l’OCM bananes à l’ordre juridique de l’OMC.

198    Les institutions défenderesses répondent que les conditions relatives au préjudice anormal et spécial ne sont pas réunies en l’espèce. D’une part, la situation des requérantes sur le marché américain aurait pu être modifiée à tout moment du fait d’actes unilatéraux des États membres ou à la suite d’accords entre la Communauté et les États-Unis d’Amérique. D’autre part, le cercle des opérateurs touchés par les mesures américaines ne serait pas restreint au point de permettre de considérer leur dommage comme anormal et spécial.

199    Un particulier ne subirait un préjudice anormal et spécial que s’il se trouvait lésé plus particulièrement ou de façon différente et bien plus gravement que l’ensemble des opérateurs économiques (arrêt de la Cour du 6 décembre 1984, Biovilac/CEE, 59/83, Rec. p. 4057, point 28). Or, la surtaxe américaine aurait au contraire frappé dans la même mesure tous les exportateurs d’accumulateurs originaires de la Communauté à destination des États-Unis.

200    Si la Cour a fait état d’une certaine responsabilité en raison de pertes disproportionnées que certains opérateurs avaient eu à supporter à la suite d’actes légalement adoptés (arrêt De Boer Buizen/Conseil et Commission, point 157 supra, point 17), il se serait toutefois agi, à la différence de l’affaire sous examen, d’un acte limitant le commerce et adopté par la Communauté. Les entreprises en question n’auraient pu être indemnisées qu’à condition d’avoir subi un préjudice patrimonial disproportionné par rapport aux autres distributeurs des mêmes produits.

201    La majoration des droits à l’importation américains intervenue après cinq mois de préavis ne constituerait pas un événement susceptible d’être qualifié d’anormal non seulement parce que les accords de l’OMC et, même, dès depuis 1947, le GATT ouvrent la possibilité de modifier les droits au titre de l’article XXVIII du GATT, mais aussi en raison du fait que divers instruments de défense commerciale agissent de façon équivalente par le biais de l’augmentation des droits.

–       Appréciation du Tribunal

202    S’agissant des dommages que peuvent subir les opérateurs économiques du fait des activités des institutions communautaires, un préjudice est, d’une part, anormal lorsqu’il dépasse les limites des risques économiques inhérents aux activités dans le secteur concerné et, d’autre part, spécial lorsqu’il affecte une catégorie particulière d’opérateurs économiques d’une façon disproportionnée par rapport aux autres opérateurs (arrêt du 28 avril 1998, Dorsch Consult/Conseil et Commission, point 155 supra, point 80, et arrêt Afrikanische Frucht-Compagnie et Internationale Fruchtimport Gesellchaft Weichert/Conseil et Commission, point 89 supra, point 151).

203    Il n’est en l’espèce pas établi que les requérantes aient subi, du fait de l’incompatibilité avec les accords OMC du régime communautaire d’importation des bananes, un préjudice excédant les limites des risques inhérents à leur activité exportatrice.

204    Il est vrai que, comme le relève son préambule, l’accord instituant l’OMC a pour objet l’instauration d’un système commercial multilatéral intégré qui incorpore les résultats des efforts de libéralisation du commerce entrepris antérieurement.

205    Il convient néanmoins de constater que l’éventualité d’une suspension des concessions tarifaires, mesure prévue par les accords OMC et cas de figure qui s’est présenté en l’espèce, est l’une des vicissitudes inhérentes au système actuel du commerce international. Dès lors, cette vicissitude est obligatoirement supportée par tout opérateur qui décide de commercialiser sa production sur le marché de l’un des membres de l’OMC.

206    Comme les requérantes l’ont elles-mêmes relevé, la décision des arbitres du 9 avril 1999 a souligné que la nature temporaire que l’article 22, paragraphe 1, du MRD attache à la suspension des concessions indique que celle-ci a pour objet d’inciter le membre de l’OMC mis en cause à respecter les recommandations et les décisions de l’ORD.

207    En outre, il résulte de l’article 22, paragraphe 3, sous b) et c), du MRD, instrument international ayant fait l’objet des mesures de publicité propres à en assurer la connaissance auprès des opérateurs communautaires, que le membre plaignant de l’OMC peut chercher à suspendre des concessions ou d’autres obligations dans d’autres secteurs que celui dans lequel le groupe spécial ou l’organe d’appel a constaté une violation par le membre visé, que ce soit au titre du même accord ou d’un autre accord OMC.

208    C’est donc à tort que les requérantes soutiennent que ne peut être considérée comme un risque normal l’éventualité de l’application des mesures de rétorsion de la part d’un États tiers résultant d’un contentieux survenu dans un secteur tout différent du leur.

209    Il s’ensuit que les risques auxquels pouvait être exposée de ce fait la commercialisation par les requérantes de leurs accumulateurs sur le marché américain ne sont pas à regarder comme étrangers aux aléas normaux du commerce international, en l’état actuel de son organisation.

210    D’ailleurs, les requérantes ont elles-mêmes relevé dans leurs écritures que les concessions tarifaires qui avaient été négociées avec les États-Unis d’Amérique sous la forme du droit à l’importation originaire au taux réduit de 3,5 % ne présentaient pas un caractère immuable.

211    Il n’y a donc pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de qualifier d’anormal le préjudice subi par les requérantes.

212    Une telle constatation suffit à exclure tout droit à indemnité de ce chef. Il n’est donc pas nécessaire que le Tribunal se prononce sur la condition de spécialité du préjudice.

213    Il s’ensuit que doit être rejetée la demande indemnitaire des requérantes fondée sur le régime de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes.

214    Il résulte de l’ensemble des développements précédents que le recours doit être rejeté dans son intégralité comme non fondé.

 Sur les dépens

215    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

216    Les requérantes ayant succombé en leurs conclusions, elles doivent être condamnées à supporter, outre leurs propres dépens, les dépens exposés par le Conseil et par la Commission, conformément aux conclusions que les deux institutions défenderesses ont présentées en ce sens.

217    En vertu de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus à un litige supportent leurs dépens.

218    Il s’ensuit que le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (grande chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Les requérantes sont condamnées à supporter, outre leurs propres dépens, les dépens exposés par le Conseil et par la Commission.

3)      Le Royaume d’Espagne supportera ses propres dépens.


Vesterdorf

Lindh

Azizi

Pirrung

Legal

García-Valdecasas

Tiili

Cooke

Meij

Vilaras

 

      Forwood


Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 décembre 2005.                                     

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

      B. Vesterdorf


Table des matières

Cadre juridique

Faits à l’origine du litige

Procédure

Conclusions des parties

Sur la recevabilité

Sur le défaut de conformité de la requête aux prescriptions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la compétence du Tribunal

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur le fond

Sur la responsabilité de la Communauté pour comportement illicite de ses organes

Arguments des parties

– Sur les illégalités reprochées aux institutions défenderesses

– Sur la nature juridique des normes prétendument méconnues par les défenderesses

– Sur la gravité des violations alléguées

Appréciation du Tribunal

– Sur la question préalable de l’invocabilité des règles de l’OMC

– Sur l’exception tirée de l’intention de donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC

– Sur l’exception fondée sur le renvoi exprès à des dispositions précises des accords OMC

Sur l’application par analogie du régime de la responsabilité non contractuelle des États membres

Sur la responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes

Sur le principe de la responsabilité non contractuelle de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur l’existence d’un préjudice réel et certain

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le lien de causalité entre le préjudice subi et le comportement des institutions défenderesses

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le caractère anormal et spécial du préjudice subi

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.