Language of document : ECLI:EU:C:2007:505

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. POIARES MADURO


présentées le 12 septembre 2007 (1)


Affaire C-380/05

Centro Europa 7 Srl

contre

Ministero delle Comunicazioni e Autorità per le Garanzie nelle Comunicazioni

et

Direzione Generale Autorizzazioni e Concessioni Ministero delle Comunicazioni

[demande de décision préjudicielle introduite par le Consiglio di Stato (Italie)]





1.        Dans sa décision de renvoi rendue dans la présente affaire, le Consiglio di Stato (Italie) pose à la Cour toute une série de questions ayant pour objet la concurrence loyale, la libre prestation des services, la liberté d’expression, ainsi que le principe du pluralisme des médias. La procédure au principal concerne une société de télévision qui, plusieurs années après avoir obtenu des droits de radiodiffusion télévisuelle nationale dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres, n’a pas encore reçu les fréquences nécessaires à l’exercice de ces droits. Entre-temps, la législation nationale a autorisé des opérateurs historiques à continuer leurs activités de radiodiffusion télévisuelle et à utiliser les fréquences radio, prolongeant ainsi, en réalité, une situation en contradiction avec le résultat de la procédure d’appel d’offres. J’aborderai les problèmes soulevés par la juridiction de renvoi principalement sous l’angle des règles relatives à la libre prestation des services.

I –    Les faits, le cadre juridique national et la demande de décision préjudicielle

2.        Le cadre juridique national est composé d’un ensemble complexe de lois et de décrets-lois, mais trois mesures législatives ont constitué, successivement, la pierre angulaire des règles régissant la radiodiffusion télévisuelle nationale: la loi nº 223/1990 (2), (ci-après la «loi Mammì») la loi nº 249/1997 (3) (ci-après la «loi Maccanico) et la loi nº 112/2004 (4). (ci‑après la «loi Gasparri»)

3.        La loi Maccanico a été adoptée en juillet 1997, après que la Corte costituzionale (la Cour constitutionnelle) a jugé, dans un arrêt de décembre 1994 (5), que les dispositions antitrust de la loi Mammì étaient inadaptées pour prévenir les positions dominantes susceptibles de menacer le pluralisme des médias. La loi Maccanico a instauré l’Autorità per le garanzie nelle comunicazioni (autorité de régulation des télécommunications, «ART») et a introduit de nouvelles restrictions à la concentration sur le marché national de la radiodiffusion télévisuelle, dans l’objectif de garantir la concurrence et le respect du pluralisme. En vertu de la loi Maccanico, aucune entité n’était autorisée à émettre plus de 20 % des programmes télévisuels nationaux à compter du 30 avril 1998.

4.        La loi Maccanico prévoyait également un régime transitoire pour les opérateurs historiques dont les chaînes existantes dépassaient le plafond de 20 %. Selon ce régime transitoire, ces opérateurs pouvaient continuer leurs émissions, à titre provisoire, après le 30 avril 1998, à condition que les émissions soient diffusées en même temps sur les ondes hertziennes et sur le satellite ou sur le câble. La loi disposait que les chaînes de télévision qui violaient le plafond devaient cesser la diffusion par voie hertzienne après l’adoption d’un plan national de répartition des fréquences.

5.        Compte tenu des objectifs de la loi Maccanico, une procédure d’appel d’offres a été initiée en mars 1999 pour l’attribution des droits de radiodiffusion télévisuelle nationale sur les fréquences hertziennes. En raison de limitations techniques, le nombre de chaînes hertziennes ne pouvait pas dépasser onze. Trois canaux ont été réservés à la télévision publique et huit canaux au maximum étaient proposés aux opérateurs privés.

6.        Ayant participé avec succès à la procédure d’appel d’offres, Centro Europa 7 srl (ci-après «Europa 7») a obtenu des droits de radiodiffusion télévisuelle nationale. Ces droits ont été octroyés par le décret ministériel du 28 juillet 1999, publié le 28 octobre de la même année. En ce qui concernait les fréquences spécifiquement attribuées, le décret se référait au plan national d’attribution qui devait encore être mis en œuvre. En vertu du décret, l’ART et le ministère des Télécommunications devaient mettre en œuvre le plan national de répartition dans les 24 mois à compter de la notification du décret. En cas d’«empêchements objectifs», ce délai pouvait être prorogé de 12 mois.

7.        Le plan national de répartition des fréquences n’a pas été réalisé. Aucune fréquence n’a donc été attribuée à Europa 7 et, bien qu’elle ait obtenu les droits de radiodiffusion télévisuelle, elle n’a pas pu commencer à émettre. Entre-temps, une série de lois et de décisions de justice a autorisé les opérateurs historiques, y compris ceux qui avaient échoué dans le cadre de la procédure d’appel d’offres, à continuer à émettre.

8.        La loi nº 66/2001 (6), par exemple, qui réglementait le passage de la télévision analogique à la télévision numérique, autorisait ces opérateurs à continuer d’émettre sur des fréquences hertziennes jusqu’à la mise en œuvre d’un plan national de répartition des fréquences de diffusion numérique. Ce plan était censé entrer en application le 31 décembre 2002 au plus tard. Le délai est arrivé à échéance et aucun plan n’a été arrêté.

9.        Dans un arrêt du 20 novembre 2002, la Corte costituzionale a jugé que le transfert des ondes hertziennes au câble ou au satellite des chaînes qui dépassaient le plafond antitrust de 20 % devait avoir lieu au plus tard le 31 décembre 2003, quel que soit l’état de développement de la télévision numérique (7). Cependant, en dépit de cet arrêt, la possibilité pour les opérateurs historiques de continuer à utiliser les fréquences hertziennes pour les chaînes dépassant le plafond antitrust a été à nouveau étendue par le décret nº 352/2003 (8) (transformé par la suite en loi nº 43/2004 (9)) et par la loi Gasparri.

10.      La loi Gasparri a en effet autorisé les opérateurs historiques à utiliser les fréquences pour des chaînes dépassant le plafond antitrust, bloquant ainsi l’attribution de ces fréquences aux nouveaux opérateurs tels qu’Europa 7, jusqu’à la mise en œuvre d’un plan national d’attribution des fréquences de télévision numérique. De plus, en vertu de la loi Gasparri, seuls les opérateurs actifs pouvaient postuler pour l’octroi du droit d’utiliser des fréquences de télévision numérique. Enfin, la loi Gasparri a redéfini le plafond de 20 % introduit par la loi Maccanico.

11.      Par conséquent, à la date pertinente, certains opérateurs de radiodiffusion télévisuelle nationale n’avaient pas obtenu de droits de radiodiffusion, mais demeuraient néanmoins autorisés à continuer leurs activités de radiodiffusion télévisuelle, en dépit du dépassement du plafond antitrust. Bien qu’elle ait obtenu des droits de radiodiffusion, Europa 7 ne pouvait pas commencer à émettre faute d’avoir reçu les fréquences nécessaires. En outre, Europa 7 n’étant pas un opérateur actif, elle ne pouvait pas obtenir des droits de radiodiffusion numérique.

12.      À l’échéance du délai de 24 mois suivant la notification de l’expiration de sa licence de radiodiffusion, Europa 7 a saisi le Tribunale amministrativo regionale del Lazio (le tribunal administratif régional du Latium). Elle a demandé qu’il soit enjoint aux autorités administratives compétentes d’attribuer les fréquences nécessaires et que ces autorités soient condamnées à payer des dommages et intérêts pour le préjudice subi jusque-là. À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où l’attribution de fréquences se révélait impossible, Europa 7 demandait réparation du préjudice. Le Tribunale amministrativo regionale del Lazio a jugé que Europa 7 ne disposait pas d’un droit subjectif («diritto soggettivo») à l’attribution de fréquences spécifiques et il a rejeté le recours dans son intégralité. Europa 7 a ensuite interjeté appel devant le Consiglio di Stato.

13.      Au cours de la procédure nationale, les autorités italiennes ont invoqué pour leur défense le décret-loi nº 352/2003 et la loi Gasparri. Dans ce contexte, le Consiglio di Stato a adressé à la Cour une série de questions:

«1)       Est-ce que l’article 10 de la CEDH [convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales], auquel renvoie l’article 6 du traité sur l’Union européenne, garantit le pluralisme externe de l’information dans le secteur de la radiodiffusion télévisuelle, de sorte que les États membres sont tenus de garantir un pluralisme effectif et une concurrence effective dans ce secteur, fondée sur un système antitrust garantissant, en fonction du développement technologique, l’accès aux chaînes et la pluralité des opérateurs, sans qu’il soit possible de considérer comme licites des situations de duopole sur le marché?

2)      Les dispositions du traité CE garantissant la libre prestation de services et la concurrence, telles qu’interprétées par la Commission dans la communication interprétative du 29 avril 2000 sur les concessions en droit communautaire, exigent-elles que les concessions soient octroyées selon des principes susceptibles d’assurer un traitement non discriminatoire et égalitaire, la transparence, la proportionnalité et le respect des droits des particuliers? Les dispositions de droit italien de l’article 3, paragraphe 7, de la loi n° 249/1997, et de l’article 1 du décret-loi n° 352 du 24 décembre 2003, devenu la loi n° 112/2004 [(10)] (loi Gasparri), sont-elles contraires auxdites dispositions et auxdits principes du traité, en ce qu’elles ont permis a des personnes exploitant des chaînes de radiodiffusion télévisuelle ‘excédant’ les limites antitrust de continuer à exercer sans interruption leur activité en excluant les opérateurs, tels que la société appelante, qui, bien que titulaires de la concession correspondante, obtenue à la suite d’une procédure régulière d’appel d’offres, n’ont pas pu exercer l’activité objet de la concession faute de se voir attribuer des fréquences (en raison de l’insuffisance ou de la rareté de celles-ci, résultant de cette poursuite de l’exploitation par les titulaires de chaînes dites excédentaires)?

3)      L’article 17 de la directive 2002/20/CE (directive ‘autorisation’) entraînait-il l’efficacité directe de celle-ci dans l’ordre juridique interne, à compter du 25 juillet 2003, et imposait-il à l’État membre qui aurait octroyé des concessions pour l’activité de radiodiffusion télévisuelle (comportant le droit d’installer des réseaux, de fournir des services de communication électronique ou le droit d’utiliser des fréquences), de conformer ces concessions à la réglementation communautaire? Cette obligation comportait-elle la nécessité d’attribuer effectivement les fréquences nécessaires pour exercer l’activité?

4)       L’article 9 de la directive 2002/21/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques] (directive ‘cadre’) et l’article 5 de la directive ‘autorisation’, en prévoyant des procédures publiques, transparentes et non discriminatoires (article 5) se déroulant sur la base de critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnels (article 9), s’opposent-ils à un régime d’autorisation générale, prévu par le droit national (article 23, paragraphe 5 de la loi n° 112/2004), qui, en permettant le maintien de chaînes dites ‘excédentaires’ n’ayant pas fait l’objet d’une sélection par voie de marché public, finit par léser les droits dont jouissent d’autres entreprises en vertu de la réglementation communautaire (article 17, paragraphe 2, de la directive 2002/20/CE, du 7 mars 2002 […]), entreprises qui, bien qu’adjudicataires de marchés publics se voient empêcher d’exercer leur activité?

5)      L’article 9 de la directive 2002/21/CE […], les articles 5, paragraphe 2, deuxième alinéa, et 7, paragraphe 3, de la directive 2002/20/CE […] et l’article 4 de la directive 2002/77/CE [du 16 septembre 2002, relative à la concurrence dans les marchés de réseaux et des services de communications électroniques] imposaient-ils aux États membres de faire cesser, au moins à compter du 25 juillet 2003 (article 17 de la directive ‘autorisation’) une situation d’occupation de fait des fréquences (exploitation d’installations sans concessions ou autorisations octroyées à la suite d’une procédure de sélection) eu égard à l’activité de radiodiffusion télévisuelle telle qu’elle était exercée, de sorte à ne pas permettre que cette activité se déroule en l’absence de toute planification correcte de la diffusion hertzienne, en dépit de toute logique d’augmentation du pluralisme, et en contradiction avec ces mêmes concessions que l’État membre a octroyées à l’issue d’une procédure publique?

6)      La dérogation prévue à l’article 5, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2002/20/CE […] et à l’article 4 de la directive 2002/77/CE pouvait-elle et peut-elle être invoquée par l’État membre uniquement en faveur du pluralisme de l’information et pour garantir la protection de la diversité culturelle ou linguistique, et non au profit des exploitants de chaînes excédant les limites antitrust déjà prévues par la réglementation nationale?

7)      L’État membre doit-il indiquer, afin de se prévaloir de la dérogation de l’article 5 de la directive 2002/20/CE, quels sont les objectifs effectivement poursuivis par la disposition dérogatoire nationale?

8)      Cette dérogation peut-elle s’appliquer, outre le cas de la concessionnaire du service publique de radiodiffusion télévisuelle (RAI en Italie), également au profit d’opérateurs privés qui n’ont pas passé avec succès des procédures de sélection et aux dépens d’entreprises qui ont au contraire obtenu une concession à l’issue d’une procédure de marché public?

9)      L’ensemble des règles découlant du droit communautaire primaire et dérivé, tendant à garantir une concurrence effective (workable competition) également dans le secteur du marché de la radiodiffusion télévisuelle, n’aurait-il pas dû imposer au législateur national d’éviter la superposition de la prorogation de l’ancien régime transitoire [applicable à la diffusion analogique] ayant accompagné le début du système numérique hertzien, du moment que seul dans le cas de l’abandon des émissions analogiques hertziennes (et par conséquent le passage généralisé au numérique) il serait possible de réaffecter les fréquences libérées à divers usages, alors que dans le cas du simple passage au numérique hertzien on risque d’aggraver encore davantage le problème de la rareté des fréquences disponibles dû à la radiodiffusion analogique et numérique en mode simultané?

10)      Enfin, la protection du pluralisme des sources d’information et de la concurrence dans le secteur de la radiodiffusion télévisuelle garantie par le droit européen est-elle assurée par une législation nationale – telle la loi n° 112/2004 – qui prévoit une nouvelle limite de 20 % des ressources, calculée sur une nouvelle base [le SCI, voir article 2, sous g), et article 15 de la loi n° 112/2004] très large, comprenant également des activités qui n’ont aucun impact sur le pluralisme des sources d’information, alors que le ‘marché pertinent’ est normalement défini, en droit de la concurrence, en distinguant les marchés, dans le secteur de la télévision, et en distinguant même entre la télévision payante et la télévision non payante [voir entre autres décisions de la Commission du 21 mars 2000, déclarant la compatibilité avec le marché commun d’une concentration dans l’affaire COMP/JV.37 – BSkyB/KirchPayTV sur base du Règlement (CEE) N 4064/89 du Conseil, et du 2 avril 2003, déclarant une concentration compatible avec le marché commun et l’accord EEE, Affaire COMP/M.2876 — Newscorp/Telepiù]?»

II – Remarques préliminaires sur la compétence de la Cour pour examiner la conformité des actes nationaux aux droits fondamentaux

14.      Dans sa première question, la juridiction de renvoi sollicite une interprétation de l’article 10 de la CEDH et demande à la Cour de clarifier les obligations qui incombent aux États membres en vertu du droit à la liberté d’expression et de la notion corollaire de pluralisme des médias.

15.      Le respect de la liberté d’expression est un principe sur lequel repose l’Union européenne. Néanmoins, cela ne signifie pas nécessairement que la Cour soit compétente pour examiner si un État membre a violé le droit à la liberté d’expression. Comme la Cour l’a jugé à maintes occasions, elle est uniquement compétente pour contrôler la conformité aux droits fondamentaux des règles nationales qui relèvent du champ d’application du droit communautaire (11).

16.      Des arguments ont été avancés dans le passé pour étendre le contrôle des mesures des États membres exercé par la Cour à leur conformité aux droits fondamentaux. Dans ses conclusions présentées dans l’affaire Konstantinidis, l’avocat général Jacobs a indiqué que, en vertu du droit communautaire, tout ressortissant d’un État membre qui exerce une activité économique dans un autre État membre peut invoquer la protection de ses droits fondamentaux:

«À notre avis, un ressortissant communautaire qui se rend dans un autre État membre en qualité de travailleur salarié ou non salarié […] n’a pas seulement le droit de poursuivre son entreprise ou sa profession et de bénéficier des mêmes conditions de vie et de travail que les ressortissants de l’État d’accueil; il a droit, en outre, à l’assurance que, où qu’il se rende pour gagner sa vie dans la Communauté, il sera traité selon un code commun de valeurs fondamentales, en particulier celles inscrites dans la convention européenne des droits de l’homme. En d’autres termes, il a le droit d’affirmer ‘civis europeus sum’ et d’invoquer ce statut pour s’opposer à toute violation de ses droits fondamentaux» (12).

17.      La Cour n’a cependant pas suivi cette suggestion. En d’autres termes, la Cour n’a pas considéré que toute violation, par l’État membre d’accueil, d’un droit fondamental d’un ressortissant d’un autre État membre pouvait entraver l’exercice du droit à la libre circulation. Bien que je ne suggère pas que la Cour opère un revirement de sa jurisprudence établie depuis longtemps à cet égard, je pense que le temps est venu d’affiner cette jurisprudence.

18.      Depuis l’adoption du traité d’Amsterdam, le respect des droits fondamentaux est une condition juridique formelle à l’adhésion à l’Union européenne (13). L’article 6 UE, tel qu’amendé par ce traité, dispose maintenant, formellement, que l’Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l’État de droit, principes qui sont communs aux États membres. L’article 7 UE prévoit un mécanisme de sanctions d’un État membre lorsqu’il existe un risque clair de violation grave de ces principes, confirmant ainsi que le respect des droits fondamentaux constitue une condition indispensable de l’appartenance à l’Union européenne.

19.      Assurément, ces dispositions ne visent pas à étendre le champ d’application des droits fondamentaux à toute mesure d’un État membre en vertu du droit communautaire. Toutefois, il ne peut être nié qu’elles expriment l’intime conviction que le respect des droits fondamentaux est intrinsèque au système juridique communautaire et que, à défaut de ce respect, une action commune par et pour les peuples européens serait sans grand intérêt et irréalisable. En ce sens, l’existence même de l’Union européenne est basée sur le respect des droits fondamentaux. La protection du «code commun» de droits fondamentaux constitue par conséquent une condition existentielle de l’ordre juridique communautaire.

20.      Dans ce contexte, la Cour remplit sa fonction de veiller au respect, par les États membres, des droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit (14). À cet égard, il y a lieu d’établir une distinction entre, d’une part, la compétence pour contrôler une mesure nationale à la lumière des droits fondamentaux et, d’autre part, la compétence pour vérifier si les États membres assurent le niveau de protection nécessaire des droits fondamentaux pour remplir de manière satisfaisante les autres obligations qui leur incombent en tant que membres de l’Union. Le premier type de contrôle n’existe pas encore et ne relève pas des compétences actuelles de l’Union. Cependant, le second type de contrôle découle logiquement de la nature du processus d’intégration européenne. Il vise à s’assurer que les conditions de base du bon fonctionnement de l’ordre juridique communautaire et de l’exercice effectif des nombreux droits accordés aux citoyens de l’Union sont garanties. Bien que le degré de protection des droits fondamentaux au niveau national ne doit pas nécessairement être le même que le degré de protection des droits fondamentaux au niveau de l’Union européenne, il doit exister une certaine équivalence afin de garantir que le droit communautaire puisse s’appliquer efficacement dans l’ordre juridique national.

21.      Le scénario peut paraître improbable au premier abord, mais je n’écarte pas, a priori, l’idée qu’une violation grave et persistante des droits fondamentaux puisse se produire dans un État membre, rendant impossible pour cet État de se conformer à nombre de ses obligations communautaires, et limitant effectivement la possibilité pour les particuliers de jouir pleinement des droits que leur accorde le droit communautaire. Il serait par exemple difficile d’envisager que des citoyens de l’Union exercent leur droit à la libre circulation dans un État membre dans lequel la protection des droits fondamentaux présente des défauts de nature structurelle. De tels défauts équivaudraient, en fait, à une violation des règles sur la libre circulation.

22.      Je ne suggère pas que toute violation des droits fondamentaux au sens de l’article 6, paragraphe 2, UE constitue, en soi, une violation des règles sur la libre circulation. Seules des violations graves et persistantes qui soulignent un problème de nature systémique dans la protection des droits fondamentaux de l’État membre en cause constitueraient, selon moi, des violations des règles sur la libre circulation, en raison de la menace qu’elles feraient directement peser sur la dimension transnationale de la citoyenneté européenne et sur l’intégrité de l’ordre juridique communautaire. Toutefois, aussi longtemps que la protection des droits fondamentaux dans un État membre n’est pas gravement déficiente dans le sens des critères susmentionnés, je pense que la Cour ne devrait vérifier la conformité des mesures nationales aux droits fondamentaux que lorsque ces mesures relèvent du champ d’application de la compétence de la Cour, tel qu’il est défini par sa jurisprudence actuelle (15).

23.      En ce qui concerne la présente affaire, je propose que la Cour demeure fidèle à son approche conventionnelle. Cela ne signifie pas que la première question posée par la juridiction, concernant le droit à la liberté d’expression, soit dénuée de pertinence. Néanmoins, comme nous le verrons, sa pertinence est secondaire par rapport à la question de savoir s’il y a eu restriction à la libre circulation.

III – La reformulation des questions posées à titre préjudiciel

24.      Cela nous amène aux autres questions posées par la juridiction nationale. Malheureusement, la manière dont ces questions sont formulées est problématique à plusieurs égards. Tout d’abord, la juridiction de renvoi demande en substance à la Cour d’apprécier la compatibilité d’une législation nationale avec le droit communautaire. Cependant, il n’appartient pas à la Cour de le faire en vertu de la procédure de décision préjudicielle. Son rôle se limite à fournir une interprétation des dispositions pertinentes du droit communautaire. Il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer si le droit national est conforme à ces dispositions (16).

25.      En outre, il est nécessaire de limiter le champ de la demande de décision préjudicielle adressée par la juridiction de renvoi. Les questions posées par le Consiglio di Stato touchent à divers aspects de la législation italienne. Cependant, il serait inopportun pour la Cour d’aborder des questions de droit communautaire qui ne sont pas nécessaires pour résoudre le litige au principal. La Cour a jugé que de telles questions sont irrecevables (17). Conformément à cette jurisprudence, je n’examinerai pas les questions de la juridiction de renvoi relatives aux critères d’éligibilité pour obtenir des droits de radiodiffusion télévisuelle numérique et à la nouvelle définition, en vertu de la loi Gasparri, du marché de la radiodiffusion.

26.      Une autre partie de la demande de décision préjudicielle est irrecevable pour une raison différente. Dans le cadre de la procédure préjudicielle, il est important que la juridiction de renvoi définisse les circonstances de fait des questions qu’elle pose, afin que la Cour puisse donner une interprétation utile des dispositions pertinentes du droit communautaire (18). Ainsi que la Cour l’a jugé dans l’arrêt Telemarsicabruzzo, cela vaut «tout particulièrement dans le domaine de la concurrence qui est caractérisé par des situations de fait et de droit complexes» (19).

27.      Il semblerait que, en sollicitant une interprétation des règles du traité sur la concurrence dans sa deuxième question, la juridiction de renvoi avait essentiellement en vue l’article 86, paragraphe 1, CE, lu en combinaison avec l’article 82 CE. En vertu de la jurisprudence de la Cour, un État membre enfreint les interdictions édictées par ces deux dispositions lorsque l’entreprise en cause est amenée, «par le simple exercice des droits spéciaux ou exclusifs qui lui ont été conférés, à exploiter sa position dominante de façon abusive ou lorsque ces droits sont susceptibles de créer une situation dans laquelle cette entreprise est amenée à commettre de tels abus» (20). Toutefois, la décision de renvoi ne comporte aucune indication concernant, notamment, la définition du marché pertinent, le calcul des parts de marché détenues par les différentes entreprises opérant sur le marché, et l’abus de position dominante supposé. Dans ces circonstances, la demande de la juridiction de renvoi concernant les dispositions du traité relatives à la concurrence doit être considérée comme irrecevable (21).

28.      Dans la mesure où la demande de décision préjudicielle est recevable, elle porte pour l’essentiel sur la question globale suivante: «Le droit communautaire fait-il obstacle à une législation nationale qui permet aux fournisseurs historiques de services de radiodiffusion télévisuelle nationale de continuer à émettre sur des fréquences radio, bloquant ainsi la mise à disposition de ces fréquences aux nouveaux entrants qui ont obtenu le droit de fournir les mêmes services?» J’aborderai cette question sous l’angle de l’article 49 CE (22) et du cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (23).

29.      On pourrait alléguer que, reformulée de cette manière, la demande de décision préjudicielle se heurte à l’obstacle de l’irrecevabilité pour autant que l’article 49 CE est en cause, parce que les faits de l’affaire au principal relèvent d’une situation purement interne. Toutefois, cet argument n’est pas convaincant.

30.      Dans ses arrêts Guimont (24) et Anomar e.a. (25), la Cour a considéré comme recevables des questions posées par la juridiction nationale et ayant pour objet les règles du traité sur la libre circulation, bien qu’elles soient soulevées dans un cas qui ne présentait aucun élément transfrontalier. De même, dans l’affaire Cipolla e.a., dans laquelle les faits demeuraient limités à l’Italie, la Cour a jugé qu’«une réponse peut néanmoins être utile à la juridiction de renvoi, notamment dans l’hypothèse où le droit national imposerait, dans une procédure telle que celle de l’espèce, de faire bénéficier un ressortissant italien des mêmes droits que ceux qu’un ressortissant d’un État membre autre que la République italienne tirerait du droit communautaire dans la même situation» (26). Selon moi, cette approche se justifie à la lumière de l’esprit de coopération entre les juridictions nationales et la Cour, et eu égard à la nécessité d’éviter que l’application combinée du droit national et du droit communautaire n’entraîne un traitement défavorable de ses propres ressortissants par un État membre (27). Dans le cas présent, la Cour doit donc également fournir une interprétation de l’article 49 CE.

IV – Analyse

31.      Les États membres n’ont aucune obligation de privatiser certains secteurs du marché en vertu du traité. En principe, le traité leur permet de maintenir des monopoles d’État ou la propriété publique de certaines sociétés (28). Toutefois, cela ne les autorise pas à restreindre, de manière sélective, l’accès des opérateurs à certains secteurs du marché une fois ceux-ci privatisés (29).

32.      Par conséquent, le droit communautaire ne confère pas habituellement aux opérateurs un droit d’exercer leurs activités dans un secteur spécifique. Néanmoins, le traité interdit les limitations qui rendraient l’accès au marché national plus difficile pour les opérateurs des autres États membres que pour les opérateurs nationaux (30). En vertu des règles sur la libre circulation, toute mesure d’un État membre qui aurait, actuellement ou potentiellement, un tel effet ne peut être maintenue que si elle est appropriée et nécessaire à la poursuite d’un intérêt public légitime et si la différence de traitement entre les opérateurs nationaux et les opérateurs des autres États membres est proportionnée aux différences objectives existant entre ces opérateurs (31).

33.      Les mesures nationales qui limitent le nombre d’opérateurs dans un secteur particulier du marché sont susceptibles d’entraver la libre circulation, puisque ces mesures comportent le risque de figer les structures du marché national et de protéger la position des opérateurs qui ont conquis un bastion dans ce secteur. De tels opérateurs sont, en outre, susceptibles d’être des opérateurs nationaux. Les restrictions au nombre d’opérateurs dans un secteur du marché national doivent donc être justifiées.

34.      Comme l’illustre l’arrêt Placanica e.a., il est possible de justifier un régime de licences qui limite le nombre des opérateurs sur le territoire national à la lumière de considérations d’intérêt public (32). Par conséquent, une limitation nationale du nombre total d’opérateurs dans un secteur particulier du marché pourrait, en principe, être admise en vertu de l’article 49 CE. Toutefois, cela exigerait non seulement un motif légitime de limiter le nombre d’opérateurs, mais également une procédure de sélection qui exclut la discrimination arbitraire en fournissant des garanties suffisantes que le droit d’opérer est octroyé sur la base de critères objectifs. Pour cette raison, lorsqu’un État membre octroie un tel droit, il doit le faire en vertu d’une procédure transparente et non discriminatoire. L’objet de cette exigence est de garantir que les opérateurs de toute la Communauté ont les mêmes opportunités d’accéder à n’importe quelle partie du marché intérieur.

35.      Le même raisonnement sous-tend les règles communautaires relatives aux procédures des marchés publics et des concessions. Ces procédures sont régies par les principes de non-discrimination et de transparence. Dans certains domaines, la législation dérivée étoffe ces principes et fixe des règles spécifiques en matière de marchés publics (33). Cependant, même pour les contrats qui ne relèvent pas du champ d’application de ces règles harmonisées, la Cour a jugé que les États membres doivent respecter les principes de non-discrimination et de transparence en vertu du droit communautaire primaire (34).

36.      Il en va de même lorsqu’un État membre accorde à un nombre limité d’opérateurs privés le droit de fournir des services de radiodiffusion télévisuelle nationale par le biais de fréquences radio. Il est possible que les États veuillent restreindre l’accès à un marché spécifique, entravant ainsi la libre prestation des services. Cette restriction peut être justifiée par des motifs de politique publique, si elle est appropriée et nécessaire pour réduire le risque d’interférences radio préjudiciables, à moins qu’elle ne résulte d’une discrimination arbitraire. Par conséquent, en vertu de l’article 49 CE, la procédure d’appel d’offres visant à attribuer les droits de fournir des services de radiodiffusion télévisuelle nationale doit être conforme au principe de non-discrimination et à l’obligation de transparence qui en découle.

37.      Ces principes occupent également une position importante dans le cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communications électroniques (35). Le cadre commun, que les États membres étaient tenus d’avoir transposé en droit national au plus tard le 25 juillet 2003, prévoit des règles d’administration des fréquences radio et la procédure de limitation des droits d’usage de ces fréquences. L’article 9, paragraphe 1, de la directive «cadre» dispose que «les États membres veillent à la gestion efficace des radiofréquences […]. Ils veillent à ce que l’attribution et l’assignation de telles fréquences par les autorités réglementaires nationales soient fondées sur des critères objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés». De même, l’article 7, paragraphe 3, de la directive «autorisation» dispose que, «lorsque l’octroi des droits d’utilisation de radiofréquences doit être limité, les États membres accordent ces droits sur la base de critères de sélection objectifs, transparents, non discriminatoires et proportionnés […]». Par conséquent, le cadre réglementaire commun s’est développé à partir de principes qui découlent du traité.

38.      Le respect de ces principes implique naturellement que les États membres appliquent jusqu’au bout la décision d’accorder des licences d’exploitation aux opérateurs sélectionnés en vertu de procédures transparentes et non discriminatoires. Cela saperait l’objectif même de ces procédures si un État membre ne respectait pas la décision prise à l’issue de ces procédures et permettait, à la place, aux opérateurs historiques d’occuper indéfiniment le marché, neutralisant ainsi l’application des règles sur la libre circulation. Comme l’a indiqué à juste titre la Commission dans sa communication sur les concessions, «le respect du principe d’égalité de traitement exige non seulement la fixation de conditions d’accès non discriminatoires à une activité économique, mais également que les autorités publiques prennent toutes les mesures susceptibles d’assurer l’exercice de cette activité» (36). En conséquence, en ce qui concerne l’attribution de licences de radiodiffusion télévisuelle nationale à des opérateurs privés, le droit communautaire exige la mise en place de procédures de sélection transparentes et non discriminatoires et qu’il soit, en outre, donné plein effet aux résultats de ces procédures.

39.      Il est d’autant plus impératif qu’il soit satisfait à ces exigences dans une situation comme celle en cause dans la procédure au principal, dans laquelle la procédure d’appel d’offres pour l’attribution de droits de diffusion visait à garantir le pluralisme des médias. Le rôle d’éditeurs de la sphère publique (37), souvent joué par les médias, est vital pour la promotion et la protection d’une société ouverte et favorable à l’inclusion, dans laquelle sont présentées et discutées différentes idées d’intérêt commun. À cet égard, la Cour européenne des droits de l’homme a souligné le rôle fondamental de la liberté d’expression dans une société démocratique, notamment lorsqu’elle sert à diffuser l’information et les idées au public et que «pareille entreprise ne saurait réussir si elle ne se fonde sur le pluralisme, dont l’État est l’ultime garant» (38). En conséquence, l’application du droit communautaire dans le domaine des services de radiodiffusion télévisuelle nationale est guidée par le principe du pluralisme et suppose, en outre, une signification particulière lorsqu’il renforce la protection de ce principe (39).

40.      Il en découle que les juridictions nationales qui ont l’obligation de veiller à l’application effective du droit communautaire doivent examiner minutieusement les raisons invoquées par un État membre pour retarder l’attribution de fréquences à un opérateur qui a obtenu des droits de radiodiffusion télévisuelle nationale au terme d’une procédure d’appel d’offres et, si nécessaire, ordonner les voies de recours appropriées pour garantir que ces droits ne demeurent pas illusoires.

41.      Les règles et les conditions du droit à réparation devant les juridictions nationales sont, en principe, du ressort du droit national (40). Cependant, il convient de souligner que, lorsque les règles nationales n’offrent pas des voies de recours effectives, le droit communautaire exige des juridictions nationales qu’elles permettent une telle voie de recours, afin d’éviter que «la pleine efficacité des normes communautaires [ne soit] mise en cause et [que] la protection des droits qu’elles reconnaissent [ne soit] affaiblie» (41).

42.      Dans ses observations écrites, la Commission a indiqué qu’il y avait lieu de tenir compte de la confiance légitime et du droit de propriété des opérateurs historiques. Il n’est pas possible d’examiner en détail cette question sur la base des informations fournies à la Cour dans la présente affaire. Je partage l’avis selon lequel, en application du droit communautaire, le principe de la confiance légitime et le droit de propriété doivent être respectés en tant que principes généraux du droit. Toutefois, si le respect de ces principes pouvait exiger de l’État qu’il indemnise les opérateurs historiques, il ne justifie pas nécessairement le maintien d’une situation dans laquelle les droits des nouveaux entrants sont rendus inefficaces du fait des droits établis des opérateurs historiques (42).

V –    Conclusion

43.      Eu égard aux raisons qui précèdent, je considère qu’il convient de répondre aux questions posées par le Consiglio di Stato de la manière suivante:

«L’article 49 CE exige qu’il soit procédé à l’attribution d’un nombre limité de licences de radiodiffusion télévisuelle nationale à des opérateurs privés en vertu d’une procédure de sélection transparente et non discriminatoire, et qu’il soit, en outre, donné plein effet au résultat de cette procédure.

Les juridictions nationales doivent examiner minutieusement les raisons invoquées par un État membre pour retarder l’attribution de fréquences à un opérateur qui a obtenu des droits de radiodiffusion télévisuelle nationale et, si nécessaire, ordonner les voies de recours appropriées pour garantir que ces droits ne demeurent pas illusoires.»


1 – Langue originale: l’anglais.


2 – Supplément ordinaire nº 53 à la GURI n° 185, du 9 août 1990.


3 – Supplément ordinaire nº 154 à la GURI n° 177, du 31 juillet 1997.


4 – Supplément ordinaire nº 82 à la GURI n° 104, du 5 mai 2004.


5 – Arrêt des 5 et 7 décembre 1994, nº 420/1994.


6 – GURI n° 70, du 24 mars 2001.


7 – Arrêt nº 466/2002.


8 – GURI n° 300, du 29 décembre 2003.


9 – GURI n° 47, du 26 février 2004.


10 –      Il semble qu’il s’agisse d’une erreur: le décret-loi en question a été transformé en loi nº 43/2004, du 24 février 2004.


11 – Voir, par exemple, arrêts du 30 septembre 1987, Demirel (12/86, Rec. p. 3719); du 4 octobre 1991, Society for the Protection of Unborn Children Ireland (C-159/90, Rec. p. I-4685), et du 29 mai 1997, Kremzow (C-299/95, Rec. p. I-2629); et ordonnance du 6 octobre 2005, Vajnai (C-328/04, Rec. p. I-8577).


12 –      Arrêt du 30 mars 1993 (C-168/91, Rec. p. I-1191, point 46).


13 – Article 49 UE.


14 – Voir, par exemple, arrêts du 18 juin 1991, ERT (C-260/89, Rec. p. I-2925); du 11 juillet 2002, Carpenter (C-60/00, Rec. p. I-6279), et du 16 juin 2005, Pupino (C‑105/03, Rec. p. I-5285). La qualification par la Cour des droits fondamentaux comme «partie intégrante des principes généraux du droit dont la Cour assure le respect» remonte aux arrêts du 17 décembre 1970, Internationale Handelsgesellschaft (11/70, Rec. p. 1125, point 4); du 14 mai 1974, Nold/Commission (4/73, Rec. p. 491, point 13), et du 13 décembre 1979, Hauer (44/79, Rec. p. 3727, point 15). Pour être précis, il doit être noté que ces trois dernières affaires concernaient l’obligation des institutions communautaires de respecter les droits fondamentaux.


15 – Voir, en particulier, arrêts du 13 juillet 1989, Wachauf (5/88, Rec. p. 2609); ERT, précité note 14; du 25 mars 2004, Karner (C-71/02, Rec. p. I-3025), et Pupino, précité note 14.


16 – Voir, par exemple, arrêts du 9 septembre 2003, Jaeger (C‑151/02, Rec. p. I‑8389, point 43), et du 23 mars 2006, Enirisorse (C-237/04, Rec. p. I-2843, point 24).


17 – Voir, à cet égard, arrêts du 3 février 1983, Robards (149/82, Rec. p. 171, point 19); du 16 juillet 1992, Meilicke (C-83/91, Rec. p. I-4871, point 25), et du 21 mars 2002, Cura Anlagen (C‑451/99, Rec. p. I-3193, point 26).


18 – Voir, par exemple, arrêts du 13 juillet 2006, Manfredi e.a. (C-295/04 à C-298/04, Rec. p. I‑6619, point 27), et du 14 septembre 2006, Stichting Zuid-Hollandse Milieufederatie (C‑138/05, Rec. p. I-8339, point 30).


19 – Arrêt du 26 janvier 1993 (C-320/90 à C-322/90, Rec. p. I-393, point 7). Voir, également, arrêts du 13 mars 2001, PreussenElektra (C-379/98, Rec. p. I-2099, point 39); du 15 juin 2006, Acereda Herrera (C-466/04, Rec. p. I-5341, point 48), et du 5 décembre 2006, Cipolla e.a. (C‑94/04 et C-202/04, Rec. p. I-11421, point 25).


20 – Voir, par exemple, arrêts du 12 septembre 2000, Pavlov e.a. (C-180/98 à C-184/98, Rec. p. I‑6451, point 127); du 25 octobre 2001, Ambulanz Glöckner (C-475/99, Rec. p. I-8089, point 39), et du 30 mars 2006, Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti (C-451/03, Rec. p. I‑294, point 23).


21 – Voir également, par exemple, arrêt du 17 février 2005, Viacom Outdoor (C-134/03, Rec. p. I‑1167, points 25 à 29).


22 – On pourrait faire valoir que l’article 43 CE est également pertinent. Toutefois, je ne considère pas qu’il soit nécessaire d’examiner la présente affaire au regard de l’article 43 CE et de l’article 49 CE, puisque, selon moi, on parviendrait au même résultat dans les deux cas.


23 – Directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive «accès») (JO L 108, p. 7) et directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33). Voir, également, directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation») (JO L 108, p. 21).


24 – Arrêt du 5 décembre 2000 (C-448/98, Rec. p. I-10663, points 22 et 23).


25 – Arrêt du 11 septembre 2003 (C-6/01, Rec. p. I-8621, points 39 à 41).


26 – Affaire précitée note 19, point 30. Voir, également, arrêt Servizi Ausiliari Dottori Commercialisti, précité note 20, point 29. La Cour a eu essentiellement la même approche dans l’arrêt du 13 janvier 2000, TK-Heimdienst (C-254/98, Rec. p. I‑151).


27 – Voir, également, points 121 à 154 des conclusions présentées par l’avocat général Sharpston dans l’affaire Gouvernement de la Communauté française et Gouvernement wallon (C-212/06), actuellement pendante devant la Cour, ainsi que mes propres conclusions présentées dans l’affaire Carbonati Apuani (arrêt du 9 septembre 2004, C-72/03, Rec., p. I-8027, points 61 à 63).


28 – Voir articles 31 CE et 86, paragraphe 1, CE et, par exemple, arrêts du 23 octobre 1997, Franzén (C-189/95, Rec. p. I-5909); du 21 septembre 1999, Läärä e.a. (C‑124/97, Rec. p. I-6067), et du 5 juin 2007, Rosengren e.a. (C-170/04, Rec. p. I‑4071).


29 – Voir point 26 de mes conclusions présentées le 7 septembre 2006 dans l’affaire Federconsumatori e.a. (C-463/04 et C-464/04, actuellement pendante devant la Cour).


30 – Voir, par exemple, arrêt du 8 septembre 2005, Mobistar et Belgacom Mobile (C‑544/03 et C‑545/03, Rec. p. I-7723, points 31 à 33).


31 – Voir, par exemple, arrêts du 11 décembre 2003, Deutscher Apothekerverband (C‑322/01, Rec. p. I-14887), et du 28 septembre 2006, Ahokainen et Leppik (C‑434/04, Rec. p. I-9171).


32 – Arrêt du 6 mars 2007 (C-338/04, C-359/04 et C-360/04, Rec. p. I-1891, point 53). Voir, également, l’arrêt rendu par la Cour AELE le 30 mai 2007 dans l’affaire Ladbrokes, E-3/06, points 40 à 48.


33 – Directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (JO L 134, p. 1), modifiée en dernier lieu par la directive 2006/97 ; directive 2004/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services (JO L 134, p. 114), modifiée en dernier lieu par la directive 2006/97/CE du Conseil, du 20 novembre 2006, portant adaptation de certaines directives dans le domaine de la libre circulation des marchandises, en raison de l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie (JO L 363, p. 107);.


34 – Arrêts du 7 décembre 2000, Telaustria et Telefonadress (C-324/98, Rec. p. I-10745, point 62); du 13 octobre 2005, Parking Brixen (C-458/03, Rec. p. I-8585, points 48 et 49), et du 6 avril 2006, ANAV (C-410/04, Rec. p. I-3303, point 21). Voir, également, la communication interprétative de la Commission du 23 juin 2006, relative au droit communautaire applicable aux passations de marchés non soumises ou partiellement soumises aux directives marchés publics (JO C 179, p. 2).


35 – Voir note 22.



36 – Communication interprétative de la Commission sur les concessions en droit communautaire (JO 2000, C-121, p. 2).


37 – Voir Pettit, P., Republicanism, A Theory of Freedom and Government, Oxford University Press, Oxford, 1997, p. 168.



38 – Voir Cour européenne D. H., arrêt Informationsverein Lentia et autres c. Autriche du 24 novembre 1993, série A nº 276, § 38.


39 – À cet égard, la présente affaire se distingue nettement de l’affaire dans laquelle a été rendu l’arrêt du 25 juillet 1991, Commission/Pays-Bas (C-353/89, Rec. p. I‑4069), dans laquelle la protection du principe du pluralisme avait été avancée pour déroger aux règles sur la libre circulation, parce que, comme il était allégué, dans le cas contraire, l’application de ces règles aurait miné, et non renforcé, les efforts pour garantir le pluralisme des médias. Voir, également, arrêt du 26 juin 1997, Familiapress (C-368/95, Rec. p. I-3689).


40 – Arrêt du 14 décembre 1995, van Schijndel et van Veen (C-430/93 et C-431/93, Rec. p. I-4705, point 17).


41 – Arrêt du 19 novembre 1991, Francovich e.a. (C-6/90 et C-9/90, Rec. p. I-5357, point 33). Voir, également, arrêts du 19 juin 1990, Factortame e.a. (C-213/89, Rec. p. I-2433, point 21), et du 2 août 1993, Marshall (C-271/91, Rec. p. I-4367, points 22 et 30 à 31).


42 – Voir, dans le même sens, arrêt du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne (C‑503/04, Rec. p. I‑6153).