Language of document : ECLI:EU:T:2024:3

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

10 janvier 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne figurative LUXURY BAHIA PRINCIPE FANTASIA Don Pablo Collection – Nom commercial national antérieur FANTASIA HOTELES – Cause de nullité relative – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 4, et article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) no 207/2009 [devenus article 8, paragraphe 4, et article 60, paragraphe 1, sous c), du règlement (UE) 2017/1001] – Éléments de preuve produits pour la première fois devant la chambre de recours – Article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 »

Dans l’affaire T‑505/22,

Levantur, SA, établie à Murcie (Espagne), représentée par Mes G. Marín Raigal, E. Armero Lavie, C. Caballero Pastor et J. Oria Sousa-Montes, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme S. Palmero Cabezas, MM. J. Ivanauskas et J. Crespo Carrillo, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Fantasia Hotels & Resorts, SL, établie à Saragosse (Espagne), représentée par Mes J. Vicente Martínez et J. Erdozain López, avocats,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović (rapporteure) et M. R. Norkus, juges,

greffier : Mme P. Núñez Ruiz, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 29 juin 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Levantur, SA, demande l’annulation de la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 20 mai 2022 (affaire R 1973/2020-1) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 10 novembre 2016, la requérante a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

3        La marque demandée était le signe figuratif suivant :

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4        L’enregistrement a été demandé pour des services qui relevaient de la classe 43 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient à la description suivante : « services d’agences de voyages pour la réservation de logements ; services d’hôtellerie et de restauration ; services de réservation de logement pour voyageurs ; hôtels, auberges et pensions, logements de vacances et pour touristes ; hébergement temporaire ; services de réservation de logement pour voyageurs ; services de restauration fournis par des hôtels ; services de travaux de bureaux d’agences de tourisme pour la réservation de logements ; restauration ; préparation de repas dans des hôtels ; services de réservation de chambres ; restauration ; services de réservation hôtelière ; services d’hôtellerie et de restauration ; services d’hôtellerie et de restauration ; services de restauration pour réceptions d’entreprises ».

5        La marque demandée a été enregistrée le 2 mars 2017.

6        Le 5 juillet 2019, l’intervenante, Fantasia Hotels & Resorts, SL, a introduit auprès de l’EUIPO une demande en nullité de la marque de la marque de l’Union européenne mentionnée ci-dessus pour l’ensemble des services visés au point 4 ci-dessus.

7        La demande en nullité était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque espagnole no 3043582 pour les services relevant de la classe 43 et correspondant à la description suivante : « services typiques d’un hôtel ; services de restauration (alimentation) ; hébergement temporaire », reproduite ci-après :

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–        le nom commercial no 218885 FANTASIA HOTELES pour les services relevant de la classe 43 et correspondant à la description suivante : « services hôteliers ».

8        La cause invoquée à l’appui de la demande en nullité était notamment celle visée à l’article 60, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement.

9        Le 12 août 2020, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité.

10      Le 9 octobre 2020, l’intervenante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’annulation.

11      Par la décision attaquée, la chambre de recours a annulé, sur le seul fondement du nom commercial national antérieur invoqué par l’intervenante, la décision de la division d’annulation et a fait droit à la demande en nullité. Tout d’abord, elle a déclaré recevables les éléments de preuve présentés par l’intervenante pour la première fois devant elle. Ensuite, elle a considéré que l’ensemble des preuves produites par l’intervenante démontrait l’usage du nom commercial antérieur en tant que signe utilisé dans la vie des affaires, dont la portée n’était pas seulement locale. Les conditions relatives à l’usage du nom commercial antérieur, prévues par l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, étant remplies, de même que celles relatives au droit national protégeant ce signe, la chambre de recours a procédé à l’examen du risque de confusion. Enfin, elle a conclu à l’existence d’un tel risque, y compris un risque d’association, compte tenu du caractère identique ou similaire des services concernés ainsi que de la similitude partielle entre les signes en conflit.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens ;

–        condamner l’intervenante aux dépens afférents aux procédures de nullité et de recours devant l’EUIPO.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens exposés par l’EUIPO en cas de tenue d’une audience.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

15      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement en cause, à savoir le 10 novembre 2016, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement no 207/2009 (voir, en ce sens, ordonnance du 5 octobre 2004, Alcon/OHMI, C‑192/03 P, EU:C:2004:587, points 39 et 40, et arrêt du 23 avril 2020, Gugler France/Gugler et EUIPO, C‑736/18 P, non publié, EU:C:2020:308, point 3 et jurisprudence citée).

16      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001 ainsi que par celles du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1).

17      Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références à l’article 60, paragraphe 1, sous c), et à l’article 8, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties à l’instance, comme visant respectivement l’article 53, paragraphe 1, sous c), et l’article 8, paragraphe 4, d’une teneur identique, du règlement no 207/2009.

18      À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré de l’appréciation erronée de la recevabilité des preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours et de la violation de l’obligation de motivation et des principes de sécurité juridique et de bonne administration. Le deuxième moyen est tiré de l’appréciation erronée des preuves produites par l’intervenante dans le cadre de la démonstration de l’usage du nom commercial antérieur. Le troisième moyen est tiré de l’erreur d’appréciation quant à l’existence d’un risque de confusion.

 Sur le premier moyen, tiré de l’appréciation erronée de la recevabilité des preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours et de la violation de l’obligation de motivation et des principes de sécurité juridique et de bonne administration

19      La requérante soutient que la chambre de recours, en acceptant les preuves nouvelles de l’usage du nom commercial antérieur, produites pour la première fois devant elle par l’intervenante, a violé l’article 16, paragraphe 1, sous b), l’article 7, paragraphe 2, sous d), l’article 8, paragraphe 5, et l’article 27, paragraphe 4 du règlement délégué 2018/625 ainsi que l’obligation de motivation et les principes de sécurité juridique et de bonne administration. La requérante considère que les preuves produites initialement devant la division d’annulation par l’intervenante étaient insuffisantes et que cette dernière aurait dû se montrer plus diligente et réactive en produisant, en temps utile, les éléments de preuve devant la division d’annulation. La requérante ajoute que la production tardive de ces éléments de preuve a été faite sans aucune circonstance justifiant un retard, hormis la volonté de l’intervenante de compléter et d’améliorer son dossier. La requérante estime que cela a prolongé la procédure et lui a causé une grande insécurité juridique. Elle précise également que la chambre de recours n’a pas suffisamment motivé la décision attaquée en ce qui concerne la recevabilité des nouveaux éléments de preuve.

20      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

21      Aux termes de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, l’EUIPO peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.

22      Il découle du libellé de cette disposition que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation en application des dispositions du règlement 2017/1001 et qu’il n’est nullement interdit à l’EUIPO de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits [arrêts du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/OHMI et centrotherm Clean Solutions, C‑610/11 P, EU:C:2013:593, point 77, et du 27 octobre 2021, Jiruš/EUIPO – Nile Clothing (Racing Syndicate), T‑356/20, non publié, EU:T:2021:736, point 23].

23      En précisant que l’EUIPO « peut », en pareil cas, décider de ne pas tenir compte de telles preuves, l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 l’investit en effet d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre celles-ci en compte [voir, en ce sens, arrêts du 28 février 2018, mobile.de/EUIPO, C‑418/16 P, EU:C:2018:128, point 49 et jurisprudence citée, et du 21 mars 2019, Pan/EUIPO – Entertainment One UK (TOBBIA), T‑777/17, non publié, EU:T:2019:180, point 22 et jurisprudence citée].

24      De plus, l’article 16, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 prévoit que le demandeur peut présenter les faits, preuves et arguments à l’appui de sa demande jusqu’à la clôture de la phase contradictoire de la procédure de nullité. La raison d’être de cette disposition est de laisser plus de souplesse, par rapport à une procédure d’opposition, pour compléter les faits, preuves et arguments à l’appui de la demande, en réponse notamment aux arguments du titulaire de la marque contestée, étant donné que la procédure en annulation est le dernier recours permettant de contester la validité d’une marque de l’Union européenne [arrêt du 8 septembre 2021, Qx World/EUIPO – Mandelay (EDUCTOR), T‑85/20, non publié, EU:T:2021:556, point 67].

25      Par ailleurs, l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 encadre l’exercice du pouvoir d’appréciation, prévu à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, en ce qui concerne les faits invoqués et les preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours [voir, en ce sens, arrêt du 2 juin 2021, Franz Schröder/EUIPO – RDS Design (MONTANA), T‑855/19, non publié, EU:T:2021:310, point 26]. Aux termes de cette disposition, la chambre de recours peut accepter des faits invoqués ou des preuves produites pour la première fois devant elle uniquement si ces faits ou ces preuves semblent, à première vue, pertinents pour l’issue de l’affaire et s’ils n’ont pas été présentés en temps utile pour des raisons valables, en particulier lorsqu’ils viennent uniquement compléter des faits et des preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile, ou sont déposés pour contester les conclusions tirées ou examinées d’office par la première instance dans la décision objet du recours.

26      Partant, l’éventuelle prise en compte d’éléments de preuve supplémentaires ne constitue en aucune manière une « faveur » accordée à l’une ou à l’autre partie, mais doit incarner le résultat d’un exercice objectif et motivé du pouvoir d’appréciation, dont l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 investit l’EUIPO (voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2018, EUIPO/European Food, C‑634/16 P, EU:C:2018:30, point 58 et jurisprudence citée).

27      À cet égard, le Tribunal a déjà précisé que la preuve nouvelle se caractérise par l’absence de lien avec un autre document préalablement présenté ainsi que par sa production tardive, alors que la preuve complémentaire ou supplémentaire est, à l’inverse, celle qui vient s’ajouter à d’autres preuves déjà présentées au préalable, dans le délai imparti [voir arrêt du 9 septembre 2020, Kludi/EUIPO – Adlon Brand (ADLON), T‑144/19, non publié, EU:T:2020:404, point 56 et jurisprudence citée].

28      En premier lieu, la requérante soutient que les preuves produites initialement devant la division d’annulation étaient manifestement insuffisantes pour établir le lieu, la durée, la nature et l’importance de l’usage, de sorte que la chambre de recours ne pouvait pas valablement considérer que les preuves nouvelles qui lui étaient présentées visaient à « compléter » ces preuves initiales.

29      S’il est vrai que la division d’annulation a considéré que les preuves de l’usage qui lui avaient été soumises étaient insuffisantes pour satisfaire aux exigences de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, il n’en demeure pas moins que ces preuves comportaient des indications relatives au lieu, à la durée, à la nature et à l’importance de l’usage du nom commercial antérieur. Ainsi, elles incluaient les documents suivants :

–        des extraits de sites Internet hôteliers ;

–        des factures adressées à l’intervenante, datées de 2011 à 2018, pour des services publicitaires ou la fabrication de produits destinés à être offerts gratuitement aux clients des services hôteliers proposés par celle-ci ;

–        des contrats entre l’intervenante et des promoteurs touristiques, datés de 2017 et de 2018 ;

–        un tableau des tarifs de 2019 pour les services proposés par l’intervenante ;

–        un tableau de données relatives aux personnes ayant séjourné dans les hôtels identifiés sous l’expression « fantasia hoteles » de 2012 à 2019 ;

–        des photographies d’une façade, de parasols, d’une piscine, d’un véhicule et d’une salle de réunion portant le nom commercial antérieur ;

–        des documents publicitaires datés de 2008, 2010, 2013 et 2017.

30      Partant, contrairement à ce que prétend la requérante, les preuves initialement produites devant la division d’annulation n’étaient pas « manifestement » insuffisantes pour établir l’usage du nom commercial antérieur.

31      En outre, pour autant que l’allégation de la requérante selon laquelle la production des preuves a entraîné un allongement de la procédure et un climat d’insécurité juridique concerne la procédure devant la division d’annulation, il y a lieu de relever, à l’instar de l’EUIPO, que, conformément à l’article 16, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625 et à la jurisprudence rappelée au point 24 ci-dessus, l’intervenante pouvait apporter des preuves de l’usage du nom commercial antérieur jusqu’à la clôture de la phase contradictoire de la procédure, soit le 14 juillet 2020. Par conséquent, l’ensemble des preuves produites devant la division d’annulation, y compris celles apportées en réponse aux arguments de la requérante, l’ont été conformément au règlement délégué 2018/625 et n’ont donc pas prolongé la procédure en méconnaissance des principes de sécurité juridique et de bonne administration.

32      En second lieu, s’agissant de la procédure devant la chambre de recours, il convient de répondre, tout d’abord, à l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas suffisamment motivé sa décision de déclarer recevables les preuves nouvelles produites devant elle.

33      Ces preuves nouvelles sont les suivantes :

–        un lot de 29 déclarations signées par des fournisseurs et des promoteurs touristiques attestant de transactions commerciales avec l’intervenante entre 2012 et 2017, dont le montant varie de quelques milliers à plusieurs millions d’euros ;

–        des photographies d’installations hôtelières sur lesquelles apparaît l’expression « fantasia hoteles », y compris une photographie sur laquelle figure cette expression et le nom de l’établissement hôtelier « Gran Hotel Las Fuentes » ;

–        des extraits de catalogues datés de 2016 à 2019, dont certains comportent, sur la même page, l’expression « fantasia hoteles » et le nom de l’établissement hôtelier « Gran Hotel Las Fuentes » ;

–        des captures d’écran de sites Internet de réservation d’hôtels montrant l’expression « fantasia hoteles » qui accompagne le nom de l’établissement hôtelier « Gran Hotel Las Fuentes ».

34      La chambre de recours a constaté que ces preuves étaient, à première vue, pertinentes et qu’il existait des raisons valables justifiant leur présentation à ce stade de la procédure devant l’EUIPO, étant donné que, selon elle, lesdites preuves visaient à compléter les preuves de l’usage déjà présentées dans le délai imparti devant la division d’annulation, qu’elles étaient liées aux preuves initiales et qu’elles avaient été déposées pour répondre aux critiques de la division d’annulation. La chambre de recours a également noté que la requérante avait pu formuler des observations sur les nouveaux documents.

35      Partant, le grief tiré du caractère insuffisant de la motivation de la décision attaquée doit être écarté en ce qui concerne la recevabilité des preuves présentées pour la première fois devant la chambre de recours.

36      Par ailleurs, s’agissant de la condition énoncée à l’article 27, paragraphe 4, sous a), du règlement délégué 2018/625, relative à la pertinence des éléments de preuve pour l’issue de l’affaire, il y a lieu de relever que les preuves mentionnées au point 33 ci-dessus semblent, à première vue, pertinentes pour répondre à la question de savoir si l’usage du nom commercial antérieur satisfait aux exigences de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 et qu’elles sont donc pertinentes pour l’issue du litige, ce que la requérante ne conteste pas.

37      En ce qui concerne la condition énoncée à l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625, relative à l’existence de raisons valables à l’absence de présentation en temps utile des éléments de preuve, il y a lieu de relever que les preuves décrites au point 33 ci-dessus et produites pour la première fois devant la chambre de recours comportent des indications relatives au lieu, à la durée, à la nature et à l’importance de l’usage du nom commercial antérieur, tout comme les preuves décrites au point 29 ci-dessus et présentées initialement à la division d’annulation. Ces preuves nouvelles devant la chambre de recours contribuent donc, elles aussi, à répondre à la question de savoir si l’usage du nom commercial antérieur satisfait aux exigences de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009. Il en résulte qu’elles doivent être regardées comme venant s’ajouter aux autres preuves de l’usage déjà présentées au préalable, dans le délai imparti, devant la division d’annulation, et qu’elles complètent ces preuves initiales.

38      En outre, la division d’annulation ayant critiqué les preuves produites devant elle notamment au motif de leur insuffisance concernant l’étendue de l’usage du nom commercial antérieur, l’intervenante était en droit de présenter des preuves complémentaires devant la chambre de recours pour répondre à ces critiques, ainsi que cette dernière l’a constaté à juste titre.

39      Il découle des considérations formulées aux points 37 et 38 ci-dessus que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la chambre de recours a conclu que la condition énoncée à l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625 était remplie.

40      Au vu de l’ensemble de ce qui précède, la chambre de recours a pu considérer à juste titre que les éléments de preuve présentés pour la première fois devant elle étaient recevables, sans violer l’obligation de motivation et les principes de sécurité juridique et de bonne administration. Il y a donc lieu de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de l’appréciation erronée des preuves dans le cadre de l’examen du critère selon lequel le nom commercial antérieur doit avoir été utilisé dans la vie des affaires et ne pas avoir une portée seulement locale

41      Par son deuxième moyen, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir fait une appréciation erronée des preuves produites par l’intervenante en considérant que celles-ci démontraient un usage du nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES conforme aux exigences de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009. Selon la requérante, la chambre de recours a considéré à tort que ces preuves démontraient que le nom commercial antérieur était un signe utilisé dans la vie des affaires dont la portée n’était pas seulement locale.

42      La requérante soutient que les éléments de preuve produits par l’intervenante ne fournissent pas d’informations objectives concrètes permettant de situer le nom commercial antérieur dans la vie des affaires, tant au regard de sa portée ou de son intensité concrète que d’un point de vue économique ou territorial. Elle ajoute qu’ils ne permettent pas de déterminer s’il a été utilisé conformément à sa fonction de nom commercial pour se distinguer d’autres entreprises dans la vie des affaires ou si, au contraire, il correspond plutôt à la raison sociale ou la dénomination sociale sous lesquelles l’intervenante opère légalement. Selon elle, les documents produits sont insuffisants pour pouvoir conclure à un usage sérieux du nom commercial antérieur vers l’extérieur lui permettant d’être identifié par les clients, les fournisseurs ou une partie significative du public pertinent dans le cadre de son activité commerciale.

43      De l’avis de la requérante, il ressort des éléments de preuve produits par l’intervenante, dont certains seraient postérieurs à la période pertinente, que l’intervenante exerce son activité économique sous le signe GRAN HOTEL LAS FUENTES et que l’usage du nom commercial FANTASIA HOTELES s’avère résiduel et accessoire et n’est donc pas celui sous lequel elle est connue et se distingue dans le cadre de son activité économique. Dans lesdits éléments de preuve, les références au nom commercial invoqué par l’intervenante seraient « isolées, marginales, décontextualisées et d’une véracité douteuse ». Par exemple, les photographies produites ne seraient pas probantes, car elles ne comporteraient aucune indication de date ou de lieu. Quant aux déclarations présentées par l’intervenante, elles n’auraient pas été corroborées par d’autres éléments et ne seraient pas crédibles. L’intervenante n’aurait même pas été en mesure de produire des factures établies pour des services hôteliers et comportant le nom commercial invoqué.

44      De plus, la requérante fait valoir que c’est à tort que la chambre de recours s’est fondée sur les lieux où se trouvaient les destinataires des services de l’intervenante et les opérateurs avec lesquels celle-ci avait conclu des contrats pour constater que les éléments de preuve attestaient que l’usage du nom commercial antérieur n’avait pas été simplement local. La chambre de recours aurait commis l’erreur de ne pas se limiter au territoire espagnol, dans lequel l’usage du nom commercial antérieur n’aurait pas dépassé l’échelle locale.

45      La requérante conclut qu’au moins une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 n’est pas remplie et que la chambre de recours a donc accueilli à tort la demande en nullité de l’intervenante.

46      L’EUIPO et l’intervenante réfutent ces arguments.

47      Il convient de rappeler que, conformément à l’article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009, une marque de l’Union européenne est déclarée nulle sur demande présentée auprès de l’EUIPO lorsqu’il existe un droit antérieur visé à l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement et que les conditions énoncées audit paragraphe sont remplies.

48      En vertu de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, le titulaire d’un signe autre qu’une marque peut s’opposer à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne si celui-ci remplit cumulativement quatre conditions : ce signe doit être utilisé dans la vie des affaires ; il doit avoir une portée qui n’est pas seulement locale ; le droit à ce signe doit avoir été acquis conformément au droit de l’État membre où ledit signe était utilisé avant la date de dépôt de la demande de marque de l’Union européenne ; enfin, ce signe doit reconnaître à son titulaire la faculté d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente [voir, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2014, Construcción, Promociones e Instalaciones/OHMI – Copisa Proyectos y Mantenimientos Industriales (CPI COPISA INDUSTRIAL), T‑345/13, non publié, EU:T:2014:614, point 40 et jurisprudence citée].

49      Aucune des parties ne contestant que les troisième et quatrième conditions d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 sont remplies, il y a lieu de vérifier uniquement l’application correcte des deux premières conditions.

50      Ces deux premières conditions, c’est-à-dire celles relatives à l’usage et à la portée du signe invoqué, cette dernière ne devant pas être seulement locale, résultent du libellé même de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 et doivent donc être interprétées à la lumière du droit de l’Union européenne [voir, en ce sens, arrêt du 7 mai 2013, macros consult/OHMI – MIP Metro (makro), T‑579/10, EU:T:2013:232, point 55].

51      En ce qui concerne la condition relative à l’usage du signe invoqué dans la vie des affaires, il ressort de la jurisprudence de la Cour que l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 ne vise pas l’utilisation « sérieuse » dudit signe au soutien de la demande en nullité et rien dans le libellé de l’article 42, paragraphes 2 et 3, de ce règlement n’indique que l’exigence de la preuve de l’usage sérieux s’applique à un tel signe (arrêt du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, EU:C:2011:189, point 143).

52      Un signe est utilisé dans la vie des affaires lorsque son usage se situe dans le contexte d’une activité commerciale visant un avantage économique et non dans le domaine privé (voir arrêt du 4 juillet 2014, CPI COPISA INDUSTRIAL, T‑345/13, non publié, EU:T:2014:614, point 44 et jurisprudence citée).

53      Il résulte par ailleurs de la jurisprudence que pour pouvoir faire obstacle à l’enregistrement d’un nouveau signe sur le fondement de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, le signe qui est invoqué doit être effectivement utilisé d’une manière suffisamment significative dans la vie des affaires et avoir une étendue géographique qui ne soit pas purement locale, ce qui implique, lorsque le territoire de protection de ce signe peut être considéré comme autre que local, que cette utilisation ait lieu sur une partie importante de ce territoire (voir arrêt du 4 juillet 2014, CPI COPISA INDUSTRIAL, T‑345/13, non publié, EU:T:2014:614, point 45 et jurisprudence citée).

54      Afin de déterminer si tel est le cas, il doit être tenu compte de la durée et de l’intensité de l’utilisation de ce signe en tant qu’élément distinctif pour ses destinataires que sont tant les acheteurs et les consommateurs que les fournisseurs et les concurrents (voir arrêt du 4 juillet 2014, CPI COPISA INDUSTRIAL, T‑345/13, non publié, EU:T:2014:614, point 46 et jurisprudence citée).

55      En ce qui concerne la condition relative au fait que la portée du signe invoqué ne soit pas seulement locale, il convient de rappeler qu’une telle exigence a pour objet de limiter les conflits entre les signes en empêchant qu’un droit antérieur qui n’est pas suffisamment caractérisé, c’est-à-dire important et significatif dans la vie des affaires, puisse faire obstacle à l’enregistrement d’une nouvelle marque de l’Union européenne. Une telle faculté d’opposition doit être réservée aux signes qui sont effectivement et réellement présents sur leur marché pertinent (voir arrêt du 19 avril 2018, Fiesta Hotels & Resorts/EUIPO, C‑75/17 P, non publié, EU:C:2018:269, point 35 et jurisprudence citée).

56      En l’espèce, s’agissant de la première condition d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, la chambre de recours a procédé à une appréciation globale des éléments de preuve produits, tant devant elle que devant la division d’annulation. Elle a constaté qu’ils démontraient, avant le dépôt de la marque contestée, la promotion des services de l’hôtel « Gran Hotel Las Fuentes » de l’intervenante sur un site Internet, sur des réseaux sociaux ainsi que dans du matériel publicitaire, et qu’ils faisaient référence au nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES, dans la mesure où la dénomination sociale de l’intervenante, à savoir « Fantasia Hotels & Resorts, SL », ou la marque espagnole invoquée par cette dernière à l’appui de sa demande en nullité apparaissaient dans ces éléments de preuve et où ledit nom commercial était inclus dans cette dénomination sociale et cette marque. Selon la chambre de recours, lesdits éléments de preuve révélaient que le public pertinent avait pu percevoir le nom de l’hôtel de l’intervenante en association avec le nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES. Ce nom commercial apparaîtrait également dans des documents de nature financière, tels que des factures pour du matériel publicitaire.

57      La chambre de recours a déduit des considérations qui précèdent qu’il existait une activité commerciale en relation avec des services hôteliers fournis sous le nom commercial antérieur et que celui-ci avait donc fait l’objet d’un usage dans la vie des affaires, au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.

58      La chambre de recours a ajouté que les déclarations qui lui ont été présentées pour la première fois, notamment celles de promoteurs touristiques, donnaient suffisamment d’indications sur le volume économique des services hôteliers proposés par l’intervenante sous le nom commercial FANTASIA HOTELES avant le dépôt de la marque contestée. Elle a souligné que ces déclarations étaient corroborées par des catalogues de voyage sur lesquels figurait le nom commercial antérieur et par des factures adressées à l’intervenante pour promouvoir ses services hôteliers. En outre, elle a relevé que les entités commerciales qui avaient établi ces déclarations étaient distinctes de l’intervenante.

59      Par ailleurs, la chambre de recours a considéré que les données concernant les personnes hébergées de 2012 à 2019, les contrats conclus avec des promoteurs touristiques et les tarifs pour l’année 2019 confirmaient également l’usage du nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES dans la vie des affaires.

60      Quant à la deuxième condition d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, celle concernant la portée non locale du nom commercial antérieur, la chambre de recours a constaté que les éléments de preuve produits par l’intervenante, notamment des contrats avec des promoteurs touristiques et les déclarations de ces derniers, démontraient que l’activité économique sous ledit nom avait été exercée avant le dépôt de la marque contestée dans plusieurs provinces d’Espagne. Selon la chambre de recours, il pouvait aussi être déduit de ces éléments que le public ciblé par les services hôteliers de l’intervenante était non seulement originaire de différentes régions espagnoles, mais aussi d’autres pays, comme la Belgique.

61      Partant, la chambre de recours a considéré que l’intervenante avait également prouvé que son nom commercial antérieur avait fait l’objet d’un usage dont la portée n’était pas seulement locale.

62      Il y a lieu de constater que, comme la jurisprudence l’exige [voir, par analogie, arrêt du 14 juillet 2016, Modas Cristal/EUIPO – Zorlu Tekstil Ürünleri Pazarlama (KRISTAL), T‑345/15, non publié, EU:T:2016:405, point 23 et jurisprudence citée], la chambre de recours a évalué de manière globale tous les éléments à sa disposition, y compris ceux décrits aux points 29 et 33 ci-dessus, à savoir du matériel publicitaire, des photographies, des preuves en ligne, des factures pour des services publicitaires destinés à l’intervenante, des contrats entre celle-ci et des promoteurs touristiques, des données quantitatives relatives aux tarifs et aux clients des services hôteliers proposés par l’intervenante et des déclarations de ses fournisseurs et de promoteurs touristiques.

63      En premier lieu, en ce qui concerne la question de l’usage du signe antérieur dans la vie des affaires, il ressort des documents examinés par la chambre de recours et décrits aux points 29 et 33 ci-dessus que, dans l’exploitation commerciale de son hôtel dénommé « Gran Hotel Las Fuentes », l’intervenante associe de manière suffisamment visible et constante le nom de cet établissement avec le nom commercial FANTASIA HOTELES. Contrairement à ce qu’allègue la requérante, une telle association n’est pas accessoire, dès lors qu’elle apparaît notamment à de nombreuses reprises sur les extraits de catalogues datés de plusieurs des années précédant la demande de marque contestée. L’association entre le nom de l’hôtel et le nom commercial apparaît également sur plusieurs sites de réservation d’hôtels où le nom de l’hôtel « Gran Hotel Las Fuentes » est accolé au nom commercial de la façon suivante « Grand Hotel Las Fuentes de Fantasia Hoteles ». Cette association est aussi établie par des photographies de certaines parties de l’hôtel, par exemple de son entrée.

64      De plus, le nom commercial antérieur est apposé sur les produits couramment utilisés dans le fonctionnement de l’hôtel, tels que les formulaires présentés aux clients ou les produits d’hygiène (par exemple, des peignes, des chaussons, du cirage noir, du shampoing, du gel douche, des sacs, des kits de couture et différents kits d’hygiène) qui leur sont proposés gratuitement et pour lesquels un certain nombre de factures, dont les dates sont antérieures au dépôt de la marque contestée, ont été fournies à l’EUIPO, notamment pour les années 2012 à 2018 pour des quantités s’élevant, par exemple en 2014 à 78 740 unités ou en 2018 à 198 025 unités. En outre, l’activité commerciale liée au nom commercial antérieur transparaît dans les factures portant sur des services publicitaires, qui ont été établies pour les années 2012 à 2018, notamment pour des cartes de visite, les cartes des menus ou des cocktails, des enveloppes, des enquêtes de satisfaction, ainsi que dans des factures établies de 2012 à 2016 par un fournisseur privé et désignant l’intervenante par le nom commercial « Fantasia Hoteles & Resorts ».

65      Par ailleurs, l’activité hôtelière sous le nom commercial antérieur est confirmée par le fait que l’intervenante a diffusé de la publicité par voie radiophonique, ce qui est corroboré par des factures datées d’avant le dépôt de la marque contestée, à savoir de 2011 et de 2012 dans les villes de Valence, de Madrid et de Barcelone, et par le fait qu’elle a conclu 19 contrats avec des promoteurs touristiques dans plusieurs villes espagnoles, notamment Barcelone, Alicante, Malaga, Madrid ou Palma de Majorque. Même si ces contrats sont postérieurs au dépôt de la marque contestée, ils tendent à confirmer la réalité de l’activité économique de l’intervenante, déjà établie par des éléments de preuve antérieurs à ce dépôt [voir, par analogie, ordonnance du 27 janvier 2004, La Mer Technology, C‑259/02, EU:C:2004:50, point 31, et arrêt du 23 septembre 2020, Polfarmex/EUIPO – Kaminski (SYRENA), T‑677/19, non publié, EU:T:2020:424, point 98 et jurisprudence citée].

66      Les 29 déclarations de fournisseurs et de promoteurs touristiques, présentées par l’intervenante pour la première fois devant la chambre de recours, font état d’une activité économique s’élevant au total à plusieurs millions d’euros, pour une période couvrant les années 2012 à 2017. Comme l’EUIPO le fait observer, trois de ces déclarations, à savoir celles des fournisseurs Amenities Pack, S.A., Gráficas Pellicer, S.L. et Gráficas Samuel, S.L., sont corroborées par des factures adressées à l’intervenante et, une quatrième déclaration, celle du promoteur touristique IrisTour Vacances, S.L., peut être rattachée à un contrat avec l’intervenante. De plus, prises dans leur ensemble, les 29 déclarations tendent à étayer les autres preuves de l’usage du nom commercial antérieur dans la vie des affaires. En effet, comme la chambre de recours l’a considéré, ces déclarations précisent l’ampleur économique de l’activité hôtelière de l’intervenante et, combinées avec les autres éléments de preuve, elles montrent que cet usage est significatif. Leur valeur probante est d’autant plus incontestable qu’elles émanent de tiers, qui sont certes dans une relation d’affaires avec l’intervenante, mais qui n’en demeurent pas moins indépendants par rapport à celle-ci.

67      Par conséquent, la chambre de recours a constaté à juste titre que la première condition d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, à savoir celle relative à l’usage du nom commercial antérieur dans la vie des affaires, était remplie.

68      Aucun des autres arguments de la requérante ne saurait remettre en question cette constatation.

69      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel les éléments de preuve produits devant la chambre de recours ne permettaient pas de déterminer si le nom commercial antérieur avait été utilisé pour distinguer l’intervenante d’autres entreprises, il y a lieu de relever tout d’abord que, même en limitant l’analyse au fait que l’expression « fantasia hoteles » est incluse dans l’expression « fantasia hotels & resorts, sl » désignant l’entité commerciale de l’intervenante, cette expression se distingue, en elle-même, de celle désignant d’autres entités commerciales correspondant à d’autres entreprises. De plus, il découle des considérations formulées aux points 63 à 65 ci-dessus que le nom commercial FANTASIA HOTELES a été utilisé de manière suffisamment variée et sur des supports assez divers, pour qu’il puisse être conclu qu’il n’était pas uniquement utilisé en tant qu’expression désignant l’entité commerciale de l’intervenante.

70      Quant à la critique de la requérante selon laquelle l’intervenante n’a pas été en mesure de produire des factures établies pour des services hôteliers et comportant le nom commercial antérieur invoqué, il convient d’indiquer que, même en l’absence de telles factures, l’ensemble des éléments de preuve appréciés globalement par la chambre de recours permettait à celle-ci de conclure à l’existence d’un usage du nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES dans la vie des affaires, comme cela a été exposé aux points 63 à 66 ci-dessus.

71      En second lieu, en ce qui concerne la question de la portée du nom commercial antérieur, contrairement à ce que prétend la requérante, les éléments de preuve qui ont été présentés à l’EUIPO, notamment les contrats entre l’intervenante et des promoteurs touristiques, indiquent que celle-ci recherchait des clients pour son activité hôtelière dans plusieurs parties de l’Espagne, notamment à Barcelone, à Madrid, dans la région de Valence, aux îles Baléares ou à Tenerife et même hors de ce pays, par exemple en Belgique. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que la portée du nom commercial antérieur n’était pas seulement locale.

72      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent en ce qui concerne le deuxième moyen soulevé par la requérante, la chambre de recours a considéré, à juste titre, que les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 étaient réunies.

73      Le deuxième moyen doit donc être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de l’appréciation erronée du risque de confusion

74      Il est constant entre les parties que c’est à bon droit que, conformément au renvoi opéré par l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, la chambre de recours s’est référée à la législation espagnole en matière de marques pour apprécier l’existence d’un risque de confusion et qu’elle a appliqué des critères analogues à ceux découlant dudit règlement dans le cadre de cette appréciation.

75      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [arrêts du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33, et du 15 mars 2018, Marriott Worldwide/EUIPO – Graf (Représentation d’un taureau ailé), T‑151/17, non publié, EU:T:2018:144, point 30].

76      Un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, en ce sens, arrêts du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, EU:C:2007:514, point 48, et du 8 mars 2013, Mayer Naman/OHMI – Daniel e Mayer (David Mayer), T‑498/10, non publié, EU:T:2013:117, point 47].

 Sur le public pertinent

77      La requérante fait observer que, à supposer que l’usage du nom commercial antérieur soit démontré, il doit être pris en considération pour déterminer le public auquel s’adressent les services hôteliers concernés, ce public étant, selon elle, principalement un public spécialisé et non le grand public.

78      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

79      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les services hôteliers concernés s’adressaient principalement au grand public, qui ferait preuve d’un niveau d’attention moyen. Elle a retenu l’Espagne comme étant le territoire pertinent, puisque le nom commercial antérieur avait été enregistré dans ce pays.

80      Premièrement, il convient de rappeler que, afin d’apprécier la similitude des services en cause, il y a lieu de prendre en compte le groupe de services protégé par les signes en conflit et non les services effectivement commercialisés sous ces signes [voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2019, McDreams Hotel/EUIPO – McDonald’s International Property (mc dreams hotels Träumen zum kleinen Preis!), T‑428/18, non publié, EU:T:2019:738, point 83 et jurisprudence citée].

81      Deuxièmement, la requérante n’a pas véritablement remis en question les constatations de la chambre de recours concernant le public pertinent, puisqu’elle n’a pas exclu le grand public du public pertinent. Compte tenu de la jurisprudence constante selon laquelle, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir, en ce sens, arrêt du 1er février 2017, Gómez Echevarría/EUIPO – M and M Direct (wax by Yuli’s), T‑19/15, non publié, EU:T:2017:46, point 50 et jurisprudence citée ], l’argument de la requérante est, en tout état de cause, inopérant.

82      Les constatations de la chambre de recours relatives au public pertinent doivent donc être approuvées.

 Sur la comparaison des services

83      La chambre de recours a considéré que les services concernés étaient partiellement identiques et partiellement similaires.

84      Il n’y a pas lieu d’infirmer cette conclusion de la chambre de recours, au demeurant non contestée par la requérante.

 Sur la comparaison des signes

85      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 23).

86      Les signes à comparer sont les suivants :

Signe contesté

Nom commercial antérieur

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FANTASIA HOTELES

–       Sur les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit

87      La requérante soutient que le nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES sera perçu comme signifiant « un complexe hôtelier de rêve où passer des vacances fabuleuses » et donc comme étant laudatif. Cette signification serait confirmée par des décisions antérieures de l’EUIPO concernant le terme « fantasia », qui n’aurait qu’un caractère distinctif faible.

88      En outre, la requérante fait valoir que la chambre de recours interprète, de manière erronée, la signification de l’élément « bahia principe » du signe contesté en lui attribuant un caractère descriptif et en concluant qu’il sera perçu par une partie significative du public pertinent comme une indication de l’endroit où les services en cause sont fournis. Selon la requérante, la chambre de recours néglige le fait que, dans le secteur hôtelier, des noms de lieux sont couramment utilisés sans être perçus comme étant descriptifs de l’endroit où l’hôtel est situé. Cette pratique serait d’ailleurs reconnue dans les directives de l’EUIPO relatives à l’examen des marques de l’Union européenne.

89      Quant aux éléments « luxury » et « don pablo collection » de la marque contestée, la requérante soutient que la chambre de recours ne leur a pas accordé suffisamment de caractère distinctif. À cet égard, elle relève que le premier est un terme anglais, alors que le public pertinent en l’espèce est espagnol, et que le second est doté d’un fort caractère distinctif qui serait perçu et gardé en mémoire par le consommateur.

90      En ce qui concerne les éléments figuratifs de la marque contestée, la requérante estime que c’est à tort que la chambre de recours leur a attribué une fonction purement ornementale. Par exemple, selon la requérante, l’élément représentant un soleil aurait « une valeur propre qui n’est pas uniquement décorative, mais parfaitement individualisée et identifiable ». De plus, quoique dans une moindre mesure, les couleurs dorées ainsi que la disposition des lettres et le grand nombre de termes dans le signe contesté permettraient de le distinguer du nom commercial antérieur.

91      S’agissant des éléments dominants de la marque contestée, la requérante conteste la conclusion de la chambre de recours selon laquelle cette marque ne possède pas d’éléments plus dominants que d’autres. Elle estime que les éléments qui attirent davantage l’attention et qui sont donc dominants sont la représentation d’un soleil et les éléments verbaux « luxury bahia principe » et « don pablo collection ». L’élément « fantasia » serait au contraire faiblement distinctif et « dilué » parmi les autres éléments qui occupent la partie centrale du signe contesté.

92      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

93      S’agissant de l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre, et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe (arrêt du 1er février 2017, wax by Yuli’s, T‑19/15, non publié, EU:T:2017:46, point 64).

94      De plus, lorsque certains éléments d’une marque revêtent un caractère descriptif des produits et des services pour lesquels la marque est enregistrée, ces éléments ne se voient reconnaître qu’un caractère distinctif faible, voire très faible. Ce caractère distinctif ne pourra, le plus souvent, leur être reconnu qu’en raison de la combinaison qu’ils forment avec les autres éléments de la marque. Du fait de leur faible, voire très faible caractère distinctif, les éléments descriptifs d’une marque ne seront généralement pas considérés par le public comme étant dominants dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci, sauf lorsque, en raison notamment de leur position ou de leur dimension, ils apparaissent comme susceptibles de s’imposer à la perception du public et d’être gardés en mémoire par celui-ci [voir, en ce sens, arrêt du 27 janvier 2021, Olimp Laboratories/EUIPO – OmniVision (Hydrovision), T‑817/19, non publié, EU:T:2021:41, point 52].

95      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que l’élément verbal « fantasia », présent dans les signes en conflit, était distinctif dès lors qu’il n’avait pas de lien avec les services concernés. Elle a également constaté que les autres éléments de la marque contestée, à l’exception des termes « don » et « pablo », étaient faibles. En effet, selon la chambre de recours, d’une part, les éléments verbaux « bahia principe » seraient perçus par une partie significative du public pertinent comme une indication du lieu où les services en cause étaient fournis et, d’autre part, l’élément verbal « luxury » était descriptif. Par ailleurs, les éléments figuratifs de la marque contestée ne joueraient qu’un rôle ornemental ou descriptif. Enfin, il n’y aurait pas d’élément visuellement dominant ni dans la marque contestée ni dans le nom commercial antérieur.

96      Il convient de relever, ainsi que la chambre de recours l’a décrite, que la marque contestée est une marque complexe composée d’éléments verbaux superposés de haut en bas, dans l’ordre suivant : « luxury », « bahia » et « principe », en lettres majuscules, puis « fantasia », également en lettres majuscules, et « don », « pablo » et « collection », en écriture cursive et italique, de taille plus petite que les autres éléments verbaux. Un élément figuratif, consistant en la représentation stylisée d’un soleil doré, est placé au-dessus des éléments verbaux « luxury », « bahia » et « principe » et cinq étoiles sont ajoutées horizontalement, à droite de l’élément verbal « fantasia ». Le signe contesté est de couleur dorée.

97      Quant au nom commercial antérieur, il est verbal et se compose de l’expression « fantasia hoteles », en lettres majuscules.

98      Premièrement, s’agissant de l’élément verbal « fantasia », présent dans la marque contestée et dans le nom commercial antérieur, c’est à juste titre que la chambre de recours lui a attribué un caractère distinctif au motif qu’il ne présentait pas de lien direct avec les services hôteliers. L’absence d’un tel lien apparaît à la lecture des différentes définitions de ce terme dans le dictionnaire établi par la Real Academia Española (Académie royale espagnole). Il ressort, en effet, de ces définitions que ledit terme a une relation fondamentale avec la notion d’imagination, comme la chambre de recours l’a constaté à juste titre, de sorte que par rapport aux services hôteliers concernés, il ne saurait avoir de caractère descriptif.

99      À cet égard, l’argument de la requérante, selon lequel le nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES aurait une nature laudative, au motif qu’il serait perçu comme signifiant « un complexe hôtelier de rêve où passer des vacances fabuleuses », ne saurait prospérer. En effet, comme la chambre de recours l’a à juste titre considéré, il suppose plusieurs étapes mentales entre les significations possibles du terme « fantasia » en espagnol et la signification que la requérante entend conférer à celui-ci dans le nom commercial antérieur. En d’autres termes, ce dernier ne présente pas avec les services hôteliers en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces services ou de l’une de leurs caractéristiques [voir, en ce sens, ordonnance du 7 février 2020, Fleximed/EUIPO – docPrice (Fleximed), T‑214/19, non publiée, EU:T:2020:40, point 30].

100    Quant aux décisions antérieures de l’EUIPO invoquées par la requérante, il suffit de rappeler que, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal n’est pas lié par la pratique décisionnelle de l’EUIPO [arrêt du 30 novembre 2017, Koton Mağazacilik Tekstil Sanayi ve Ticaret/EUIPO – Nadal Esteban (STYLO & KOTON), T‑687/16, non publié, EU:T:2017:853, point 59].

101    Il s’ensuit que la chambre de recours a correctement constaté que l’élément verbal « fantasia », présent dans la marque contestée et dans le nom commercial antérieur, avait un caractère distinctif au motif qu’il n’avait pas de lien direct avec les services concernés.

102    Deuxièmement, s’agissant de l’élément verbal additionnel « bahia principe » du signe contesté, ainsi que l’a souligné à juste titre la chambre de recours, il sera perçu par une partie significative du public pertinent comme une indication du lieu où les services hôteliers sont fournis, ce qui rend son caractère faiblement distinctif.

103    Cette constatation n’est pas infirmée par l’argument de la requérante selon lequel, dans le secteur hôtelier, des noms de lieux sont couramment utilisés sans être perçus comme étant descriptifs de l’endroit où l’hôtel est situé. En effet, même si la chambre de recours n’a pas précisément mentionné cet exemple, il est notoire que le terme « bahia » est le nom de l’un des États fédérés du Brésil et la pratique de l’EUIPO invoquée par la requérante, certes reconnue dans les directives de celui-ci, ne fait pas obstacle à ce qu’une partie significative du public pertinent perçoive cet élément verbal comme une indication du lieu où les services concernés sont fournis.

104    En ce qui concerne le terme « luxury », la chambre de recours a correctement conclu qu’il avait un caractère descriptif. En effet, même si le territoire pertinent est l’Espagne, il sera compris par au moins une partie du public pertinent comme un terme anglais de base, fréquemment utilisé pour les services hôteliers pour indiquer que ce sont des services de luxe. La requérante n’a apporté aucun élément de nature à infirmer cette conclusion.

105    Enfin, l’expression « don pablo collection » a été scindée en deux par la chambre de recours, celle-ci considérant la partie « collection » comme étant descriptive et la partie « don pablo » comment étant distinctive. Il convient d’approuver ces constatations. À cet égard, le terme « collection » ne fait que décrire le fait que les services hôteliers concernés proviennent d’un groupe déterminé d’établissements. Quant à l’expression « don pablo », elle a un caractère distinctif, la requérante n’ayant toutefois pas étayé son argument selon lequel celui-ci serait fort.

106    Troisièmement, s’agissant des éléments figuratifs de la marque contestée, il convient de rappeler que selon une jurisprudence constante, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers devraient, en principe, être considérés comme étant plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque. Il n’en demeure pas moins que, dans certains cas, l’élément figuratif d’une marque mixte peut, notamment en raison de sa forme, de sa taille, de sa couleur ou de sa position dans le signe, détenir une place équivalente à celle de l’élément verbal [voir ordonnance du 21 décembre 2021, Luna Italia/EUIPO – Luna (LUNA SPLENDIDA), T‑571/20, non publiée, EU:T:2021:956, point 66 et jurisprudence citée].

107    S’agissant de l’élément figuratif représentant un soleil de couleur dorée, il ne s’écarte pas des représentations habituelles de cet astre. De plus, la chambre de recours a correctement constaté que cet élément jouait « un rôle décoratif » et qu’il était donc un élément faiblement distinctif.

108    En ce qui concerne la couleur dorée, la chambre de recours a correctement apprécié son caractère décoratif. En effet, comme le fait valoir l’EUIPO, cette couleur a tout au plus pour fonction d’indiquer la haute qualité des services proposés, de même que la représentation des cinq étoiles et l’élément verbal « luxury ».

109    Quatrièmement, s’agissant du caractère dominant des éléments figuratifs et verbaux de la marque contestée, il y a lieu de constater, à l’instar de la chambre de recours, qu’aucun desdits éléments ne domine dans l’impression d’ensemble suscitée par cette marque. En effet, les éléments verbaux « luxury », « bahia », « principe » et « fantasia » sont tous en majuscules et ont la même taille et l’élément verbal « don pablo collection » est de taille plus réduite, mais en caractères italiques. Les éléments figuratifs constitués de la représentation d’un soleil, de cinq étoiles et de la couleur dorée s’équilibrent sans que l’un d’entre eux domine les autres.

110    Il résulte de ce qui précède que, s’agissant de la marque contestée, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en constatant, d’une part, que les éléments verbaux « fantasia » et « don pablo » présentaient un caractère distinctif et que les autres éléments figuratifs et verbaux étaient faiblement distinctifs ou étaient descriptifs et, d’autre part, qu’aucun des éléments de cette marque ne dominait dans l’impression d’ensemble produite par cette dernière.

–       Sur la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle

111    La requérante fait observer que les erreurs commises par la chambre de recours, en ce qui concerne les éléments distinctifs et dominants des signes en conflit, ont vicié, dans la décision attaquée, la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle de ces signes. Elle soutient qu’une telle comparaison, menée correctement, aurait permis de conclure à l’absence de risque de confusion.

112    L’EUIPO estime que la chambre de recours a correctement analysé le caractère distinctif et dominant des éléments, dont les signes en conflit étaient composés, et les a correctement comparés.

113    En l’espèce, la chambre de recours a conclu que les signes en conflit étaient faiblement similaires sur le plan visuel et qu’il y avait une similitude inférieure à la moyenne sur le plan phonétique et un degré moyen de similitude conceptuelle entre eux.

114    En ce qui concerne la similitude visuelle, la chambre de recours a constaté que les signes en conflit avaient en commun l’élément « fantasia », mais qu’ils différaient par tous les autres éléments verbaux et figuratifs. Selon elle, la différence résultant de la présence dans le signe contesté de l’expression « don pablo collection » est d’une importance limitée, eu égard au fait qu’elle se trouve à la fin dudit signe et qu’elle est plus petite que les autres éléments verbaux. Compte tenu de la faiblesse des éléments figuratifs du signe contesté et de la structure clairement différente des signes en conflit, la chambre de recours a conclu à une similitude visuelle faible entre eux.

115    Il y a lieu de constater que les signes en conflit présentent des différences portant sur la forme, les couleurs et les caractères utilisés ainsi que les éléments verbaux les composant et leur position dans les signes en conflit. Néanmoins, malgré ces différences, la comparaison entre lesdits signes révèle une similitude par la présence dans chacun d’eux de l’élément verbal « fantasia ». En revanche, les éléments verbaux « luxury », « bahia principe » et « don pablo collection » ne sont présents que dans la seule marque contestée. Les deux premiers sont écrits en lettres majuscules, tout comme le terme « fantasia », et ont la même taille que lui. L’élément verbal « don pablo » est distinctif, mais écrit en caractères plus petits, et l’élément verbal « collection » est descriptif.

116    Ainsi, étant donné la présence, dans la marque contestée, des éléments figuratifs, dont il y a lieu de tenir compte lors de la comparaison visuelle des signes en conflit, ainsi que des éléments verbaux « luxury », « bahia principe » et « don pablo collection », présents dans cette seule marque, et eu égard, par ailleurs, à la présence de l’élément verbal « fantasia » dans les deux signes en conflit, il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que lesdits signes présentent un faible degré de similitude visuelle.

117    En ce qui concerne la comparaison phonétique, la chambre de recours a considéré, en substance, que la marque contestée était trop longue pour que tous ses éléments verbaux soient prononcés par le consommateur. Il en résulterait notamment que l’élément verbal « don pablo collection » pourrait ne pas être prononcé, compte tenu de sa position à la fin du signe contesté et eu égard à sa taille plus petite que celle des autres éléments verbaux. Étant donné que les éléments figuratifs ne seraient pas prononcés, la chambre de recours a conclu à une similitude phonétique inférieure à la moyenne, fondée sur la présence du terme « fantasia » dans les deux signes en conflit.

118    Il ne peut être contesté que la combinaison verbale « luxury bahia principe fantasia » de la marque contestée et le nom commercial antérieur FANTASIA HOTELES présentent un certain degré de similitude phonétique. En effet, ils ont en commun le terme « fantasia », qui se prononce de manière identique dans les deux signes.

119    De plus, les constatations de la chambre de recours sont confirmées par plusieurs principes jurisprudentiels. Ainsi, l’absence de prise en compte des éléments figuratifs lors de la comparaison phonétique des signes rend les ressemblances entre ceux-ci plus évidentes que dans la comparaison visuelle [voir, en ce sens, arrêt du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, EU:T:2002:262, point 40]. Il a aussi été jugé que, par simple économie de langage, le public pertinent aura tendance à ne pas prononcer les éléments ayant un caractère distinctif faible, d’autant plus s’ils se trouvent à la fin de la marque concernée [voir, en ce sens, arrêts du 7 février 2013, AMC-Representações Têxteis/OHMI – MIP Metro (METRO KIDS COMPANY), T‑50/12, non publié, EU:T:2013:68, point 41, et du 12 juin 2019, EOS Deutscher Inkasso-Dienst/EUIPO – IOS Finance EFC (IOS FINANCE), T‑583/17, non publié, EU:T:2019:403, point 76].

120    Partant, le fait que l’élément verbal distinctif « fantasia » soit présent dans les signes en conflit, que l’expression « don pablo » soit distinctive, bien qu’elle se trouve à la fin du signe contesté et ait une taille plus petite, et que les autres éléments verbaux dudit signe soient faibles permet de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que lesdits signes présentent un degré de similitude phonétique inférieur à la moyenne.

121    Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a retenu un degré moyen de similitude conceptuelle, en raison du concept véhiculé par le terme commun et distinctif « fantasia », comparé aux différences résultant des concepts véhiculés par tous les autres éléments, notamment l’élément distinctif « don pablo ».

122    En l’espèce, eu égard au terme « fantasia », commun aux signes en conflit, et aux éléments les différenciant, y compris les éléments figuratifs pour lesquels il a été conclu au point 110 ci-dessus qu’ils étaient faiblement distinctifs, ainsi que l’élément distinctif « don pablo » de la marque contestée, il y a lieu de constater que la chambre de recours a considéré à juste titre qu’il existait un degré moyen de similitude conceptuelle entre lesdits signes.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

123    Le risque de confusion doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 22). La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêt du 15 mars 2018, Représentation d’un taureau ailé, T‑151/17, non publié, EU:T:2018:144, point 34).

124    Selon la jurisprudence, l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt du 3 octobre 2017, BMB/EUIPO – Ferrero (Récipient pour sucreries), T‑695/15, non publié, EU:T:2017:684, point 60].

125    La chambre de recours a pris en considération, d’une part, le fait que le nom commercial antérieur possédait un caractère distinctif normal et, d’autre part, l’identité ou la similitude des services concernés ainsi que la similitude partielle des signes en conflit, notamment du fait du terme commun « fantasia », qui a un caractère distinctif et qui, dans la marque contestée, se trouve être le seul élément verbal ne partageant pas une ligne avec un autre élément verbal. Elle a aussi tenu compte de l’incidence limitée des différences entre lesdits signes qui concernaient des éléments qui n’avaient pas de caractère distinctif ou présentaient un faible caractère distinctif. S’agissant de l’élément « don pablo collection », dont le poids était diminué par sa position à la fin de la marque contestée et par sa taille plus petite que celle des autres éléments verbaux, la chambre de recours a relevé que le public pertinent percevrait cet élément comme désignant un ensemble d’hôtels appartenant au groupe réunis sous le terme « fantasia ». Elle a déduit de l’ensemble de ces circonstances qu’il y avait un risque de confusion, y compris un risque d’association entre les signes en conflit, justifiant la nullité de la marque contestée.

126    Il y a lieu de constater que la chambre de recours a pris en compte tous les facteurs pertinents et qu’elle a conclu, sans commettre d’erreur d’appréciation à cet égard, que l’existence d’un risque de confusion, y compris un risque d’association entre les signes en conflit, était établie par la combinaison de ces facteurs, à savoir le fait que les services concernés étaient identiques ou similaires, la similitude partielle desdits signes ainsi que l’équilibre général entre les divers éléments constitutifs des marques en conflit.

127    Il résulte des considérations qui précèdent que le troisième moyen doit être rejeté.

128    Aucun des trois moyens soulevés par la requérante n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

129    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

130    En l’espèce, l’intervenante a conclu à la condamnation de la requérante aux dépens. L’EUIPO a également conclu en ce sens, mais seulement en cas d’organisation d’une audience.

131    La requérante ayant succombé et une audience ayant été organisée, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’EUIPO et par l’intervenante, conformément à leurs conclusions.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Levantur, SA supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par Fantasia Hotels & Resorts, SL.

Marcoulli

Tomljenović

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 10 janvier 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’espagnol.