Language of document : ECLI:EU:T:2006:215

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

13 juillet 2006 (*)

« Fonctionnaires – Recours en annulation – Rapport d’évolution de carrière – Droits de la défense – Recours en indemnité – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑285/04,

Michel Andrieu, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Mes S. Rodrigues et Y. Minatchy, avocats,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. G. Berscheid et Mme L. Lozano Palacios, en qualité d’agents, assistés de Me M. Genton, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande d’annulation du rapport d’évaluation de carrière du requérant pour la période 2001/2002 et, d’autre part, une demande de dommages-intérêts,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (cinquième chambre),

composé de M. M. Vilaras, président, Mmes M. E. Martins Ribeiro et K. Jürimäe, juges,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 novembre 2005,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1       L’article 14 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable au présent litige (ci-après le « statut »), dispose :

« Tout fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, est amené à se prononcer sur une affaire au traitement ou à la solution de laquelle il a un intérêt personnel de nature à compromettre son indépendance doit en informer l’autorité investie du pouvoir de nomination. »

2       L’article 26 du statut dispose :

« Le dossier individuel du fonctionnaire doit contenir :

a)       toutes pièces intéressant sa situation administrative et tous rapports concernant sa compétence, son rendement ou son comportement ;

b)       les observations formulées par le fonctionnaire à l’égard desdites pièces.

Toute pièce doit être enregistrée, numérotée et classée sans discontinuité ; l’institution ne peut opposer à un fonctionnaire ni alléguer contre lui des pièces visées [sous] a), si elles ne lui ont pas été communiquées avant classement.

La communication de toute pièce est certifiée par la signature du fonctionnaire ou, à défaut, faite par lettre recommandée.

Aucune mention faisant état des opinions politiques, philosophiques ou religieuses d’un fonctionnaire ne peut figurer à ce dossier.

Il ne peut être ouvert qu’un dossier pour chaque fonctionnaire.

Tout fonctionnaire a le droit, même après cessation de ses fonctions, de prendre connaissance de l’ensemble des pièces figurant à son dossier.

Le dossier individuel a un caractère confidentiel et ne peut être consulté que dans les bureaux de l’administration. Il est toutefois transmis à la Cour de justice des Communautés européennes lorsqu’un recours intéressant le fonctionnaire est formé devant la Cour. »


3       L’article 43 du statut dispose :

« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire, à l’exception de ceux des grades A 1 et A 2, font l’objet d’un rapport périodique établi au moins tous les deux ans, dans les conditions fixées par chaque institution, conformément aux dispositions de l’article 110.

Ce rapport est communiqué au fonctionnaire. Celui-ci a la faculté d’y joindre toutes observations qu’il juge utiles. »

4       L’article 1er, paragraphe 1, des dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut, adoptées par la Commission le 26 avril 2002 (ci-après les « DGE »), dispose :

« Conformément à l’article 43 du statut […], un rapport périodique, appelé rapport d’évolution de carrière, est établi chaque année en ce qui concerne les compétences, le rendement et la conduite dans le service pour chaque membre du personnel permanent […] »

5       L’article 2, paragraphes 2 à 4, des DGE dispose :

« 2. L’évaluateur est le fonctionnaire chargé de réaliser l’évaluation et de rédiger le rapport. Le validateur est le supérieur hiérarchique de l’évaluateur. Il a pour rôle de contresigner le rapport et, en cas de désaccord avec l’évaluateur, c’est à lui que revient la responsabilité finale du rapport.

3. Le validateur est en particulier chargé de veiller à l’application cohérente des normes d’évaluation dans l’ensemble des rapports d’évolution de carrière qu’il contresigne.

4. L’évaluateur d’appel est le supérieur hiérarchique du validateur. Il décide du suivi à donner en ce qui concerne l’avis émis par le comité paritaire d’évaluation visé à l’article 8. »

6       L’article 4, paragraphe 1, des DGE dispose :

« La première période d’évaluation marquera la transition entre le système de notation précédent et le nouveau système. Elle s’étendra du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2002 […] »

7       En juillet 2002, la Commission a porté à la connaissance de son personnel, par le moyen de l’intranet, un document intitulé « Système d’évaluation du personnel centré sur l’évolution de carrière – Guide » (ci-après le « guide d’évaluation »).

8       Le 3 décembre 2002, la Commission a publié, dans les Informations administratives n° 99-2002, un document intitulé « Guide pour l’exercice d’évaluation du personnel 2001-2002 (transition) » (ci-après le « guide de transition »), contenant des informations quant au nouveau système de notation ainsi qu’aux règles de transition applicables.

9       Le 27 décembre 2002, la Commission a adopté les dispositions générales d’exécution des articles 43 et 45 du statut, portant modalités spécifiques concernant l’évaluation et la promotion du personnel travaillant au sein du service extérieur (ci-après les « DGE-SE »).

 Antécédents du litige

10     Le requérant, fonctionnaire de grade A 4 au moment des faits, travaille au service de la Commission. Pendant la période du 1er juillet 2001 au 31 décembre 2002 (ci-après la « période de référence »), il était affecté par la direction générale (DG) « Relations extérieures » à la délégation de la Commission auprès de la République arabe d’Égypte (ci-après la « délégation ») et occupait le poste de chef du secteur de la modernisation de l’économie.

11     Le 30 janvier 2003 est intervenu le dialogue entre le requérant et son évaluateur, à savoir le chef de délégation, dans le cadre de l’établissement du rapport d’évolution de carrière (ci-après le « REC ») pour la période d’évaluation 2001/2002.

12     Le 30 mars 2003, le REC a été porté à la connaissance du requérant par son évaluateur ainsi que par son coévaluateur, le directeur de la DG « Relations extérieures ». Le REC du requérant comprenait un nombre total de 11 points sur 20, à savoir 5 points sur 10 pour la rubrique « Rendement », 4 points sur 6 pour celle relative aux « [a]ptitudes » et 2 points sur 4 pour la rubrique « Conduite dans le service ».

13     Contestant ce résultat, le requérant a sollicité par courrier du 2 avril 2003 un dialogue avec son validateur, le directeur de la direction « Service extérieur » de la DG « Relations extérieures ». Ce dialogue a eu lieu par téléphone le 28 avril 2003. Le 13 mai 2003, le validateur a confirmé le nombre de points total du REC, c’est-à-dire 11 points.

14     Le 16 mai 2003, le requérant a marqué son désaccord et a demandé par une note motivée la saisine du comité paritaire d’évaluation du service extérieur (ci-après le « CPE-SE »). Le 3 juin 2003, après examen du REC et de la note motivée, le CPE-SE a estimé que les commentaires figurant dans la rubrique « Rendement » (section 6.1 du REC) ne reflétaient pas la notation chiffrée de 5 points sur 10, correspondant à l’appréciation « suffisant ». Le CPE-SE a, en conséquence, suggéré une augmentation d’un point sous cette rubrique, pour arriver à 6 points sur 10, notation correspondant à l’appréciation « bien », sans faire de suggestions pour que soient modifiés les commentaires compris dans les différentes rubriques du REC.

15     Le 2 juillet 2003, l’évaluateur d’appel du requérant, le directeur général de la DG « Relations extérieures », a suivi l’avis du CPE-SE, portant ainsi la notation du requérant sous la rubrique « Rendement » à 6 points sur 10, ce qui correspondait à l’appréciation « bien », augmentant ainsi la notation globale du requérant, celle-ci étant fixée à 12 points sur 20 au lieu de 11 points sur 20. L’évaluateur d’appel n’a toutefois pas apporté de modifications aux commentaires compris dans les différentes rubriques du REC.

16     Le 11 juillet 2003, une copie du REC incluant les commentaires du CPE-SE ainsi que la décision de l’évaluateur d’appel a été communiquée au requérant. D’une part, cette copie ne comportait pas les signatures des différents évaluateurs et, d’autre part, elle ne contenait pas les notes du requérant du 2 avril et du 16 mai 2003. S’agissant du défaut de signature, une note accompagnant la copie du REC informait le requérant comme suit : « Dès que le coévaluateur aura signé votre [REC], il sera envoyé à votre chef de délégation pour signature également. Une copie vous sera transmise par votre chef de délégation et l’original sera classé dans votre dossier personnel [détenu par la direction ‘Service extérieur’ de la DG ‘Relations extérieures’]. »

17     Le 1er septembre 2003, une copie du REC définitif, signé par chaque évaluateur, a été formellement communiquée au requérant. Cette copie ne contenait pas la note du requérant du 16 mai 2003.

18     Dans le même temps, le requérant a constaté que ses notes du 2 avril et du 16 mai 2003 n’étaient pas non plus classées dans le nouveau système informatique de gestion du personnel (appelé « Sysper 2 »).

19     Le 9 octobre 2003, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, enregistrée le même jour sous la référence R/602/03, par laquelle il demandait l’annulation de son REC pour la période 2001/2002.

20     Par décision du 31 mars 2004, communiquée au requérant le 19 avril 2004, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejeté cette réclamation.

 Procédure et conclusions des parties

21     Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 juillet 2004, le requérant a introduit le présent recours.

22     Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       déclarer le recours recevable ;

–       annuler la décision de l’AIPN du 31 mars 2004 ;

–       annuler le rapport d’évaluation de carrière dont il a fait l’objet pour la période de référence ;

–       établir la responsabilité extracontractuelle de la Communauté européenne engagée du fait des actes attaqués et de l’établissement tardif du REC dont il a fait l’objet ;

–       condamner la Commission à payer au requérant la somme de 64 468 euros à titre de préjudice professionnel, matériel et moral ;

–       condamner la Commission aux dépens.

23     La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       rejeter le recours ;

–       statuer sur les dépens comme de droit.

 Sur les conclusions en annulation

24     Au soutien de sa demande en annulation de la décision de l’AIPN du 31 mars 2004 ainsi que de son REC pour la période de référence, le requérant soulève cinq moyens, tirés, en premier lieu, de la violation des droits de la défense, en deuxième lieu, d’une violation des garanties de procédure, en troisième lieu, d’erreurs manifestes d’appréciation et d’une violation de l’obligation de motivation, en quatrième lieu, de la violation du devoir de sollicitude et, en cinquième lieu, de la violation du principe de bonne administration.

25     Il convient tout d’abord de constater que le requérant sollicite, dans le cadre du présent recours, l’annulation tant de la décision de l’AIPN que de son REC pour la période de référence. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, la réclamation administrative et son rejet, explicite ou implicite, par l’AIPN font partie intégrante d’une procédure complexe. Dans ces conditions, le recours au Tribunal, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a pour effet de saisir le Tribunal de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, c’est-à-dire, en l’espèce, du REC du requérant pour la période de référence (arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, Rec. p. I‑23, point 8, et du 7 février 1990, Culin/Commission, C‑343/87, Rec. p. I‑225, point 7 ; arrêts du Tribunal du 16 octobre 1996, Capitanio/Commission, T‑36/94, RecFP p. I‑A‑449 et II‑1279, point 33, et du 7 juin 2005, Cavallaro/Commission, T‑375/02, non encore publié au Recueil, point 59).

 Sur le premier moyen, tiré de la violation des droits de la défense

26     Le requérant estime que la Commission a violé le principe général du respect des droits de la défense, d’une part, au regard de l’absence de classement de certains éléments d’évaluation dans son dossier personnel et de leur transcription partielle dans le système informatique de gestion du personnel et, d’autre part, au regard de l’impossibilité d’identifier le REC de référence à prendre en compte.

 En ce qui concerne la première branche, relative à la transcription partielle de certains éléments d’évaluation dans le système informatique de gestion du personnel et à leur absence de classement dans le dossier personnel du requérant

–       Arguments des parties

27     S’agissant de la transcription partielle de certains éléments d’évaluation dans le système informatique de gestion du personnel et de leur absence de classement dans le dossier personnel du requérant, ce dernier fait valoir que le premier REC reçu par lui le 11 juillet 2003 ne comportait pas la signature du coévaluateur, ni celle de l’évaluateur d’appel. Par ailleurs, la première copie du REC n’aurait pas intégré les deux notes du requérant du 2 avril et du 16 mai 2003. De plus, aucun rapport ne figurerait dans le dossier personnel du requérant à la date du 7 octobre 2003 et seules les notes attribuées avant et après la saisine du CPE-SE auraient été retranscrites dans le système informatique de gestion du personnel. L’absence de classement de ces divers éléments constituerait une violation de l’article 26 du statut, qui aurait eu pour conséquence que l’évaluateur d’appel n’a pas été en mesure de présenter ses observations de manière objective.

28     La défenderesse prend tout d’abord position par rapport à l’argument du requérant selon lequel la version du REC qui lui a été communiquée le 11 juillet 2003 ne comportait pas les signatures du coévaluateur et de l’évaluateur d’appel et n’avait pas intégré ses notes du 2 avril et du 16 mai 2003. D’une part, il ressortirait de la note du 11 juillet 2003 accompagnant la copie du REC non signée que celle-ci n’a été communiquée au requérant qu’à titre provisoire, en attendant les signatures du coévaluateur et de l’évaluateur d’appel. D’autre part, et conformément à la procédure annoncée dans la note du 11 juillet 2003, le REC définitif, comportant les signatures de l’ensemble des évaluateurs, aurait été officiellement communiqué au requérant par l’évaluateur le 1er septembre 2003. La défenderesse ajoute que le REC définitif figure dans le dossier personnel du requérant. Il inclurait d’ailleurs l’ensemble des pièces concernant la procédure d’évaluation, y compris les notes du 2 avril et du 16 mai 2003. Les arguments du requérant développés sur la base de la copie du REC qu’il a reçue le 11 juillet 2003 seraient, par conséquent, sans objet.

29     La défenderesse conteste l’allégation du requérant selon laquelle aucun rapport ne figurait dans son dossier personnel à la date du 7 octobre 2003. Ainsi que le démontrerait le tampon d’entrée sur la première page du REC définitif, l’ensemble des éléments relatifs à l’évaluation du requérant aurait été versé à son dossier personnel le 7 octobre 2003. Le fait que deux cachets d’entrée soient apposés sur la première page du REC, l’un du 7 octobre 2003 et l’autre du 29 octobre 2003, s’expliquerait par le fait que la DG « Relations extérieures » aurait envoyé une première fois, le 7 octobre 2003, la copie du REC comportant la notation de 11 points sur 20. Par la suite, la DG « Relations extérieures » l’aurait envoyé une seconde fois, afin de modifier la notation du requérant à la suite de l’intervention de l’évaluateur d’appel, formalisant ainsi l’augmentation d’un point de la notation globale du requérant. La défenderesse fait observer que le seul fait que des pièces n’ont pas été versées au dossier individuel du fonctionnaire n’est pas de nature à justifier l’annulation d’une décision faisant grief si ces pièces ont été effectivement portées à la connaissance dudit fonctionnaire. À cet égard, il ne ferait aucun doute que le requérant a bien eu connaissance de l’ensemble des éléments d’évaluation.

30     Puisque aucune règle n’impose de délai précis dans lequel l’administration aurait été tenue de verser les éléments d’évaluation dans le dossier individuel du fonctionnaire, la défenderesse estime qu’en les versant, en l’espèce, dans un délai raisonnable elle a respecté les droits de la défense du requérant. La défenderesse relève, par ailleurs, que le délai entre la communication du REC et son insertion dans le dossier personnel du requérant n’a pas eu la moindre conséquence négative pour ce dernier, qui n’aurait d’ailleurs pas fait de demande formelle à la Commission pour faire verser le REC dans son dossier personnel.

31     S’agissant de l’observation selon laquelle seules les notes attribuées avant et après la saisine du CPE-SE auraient été retranscrites dans le système informatique de gestion du personnel, la défenderesse avance que de telles notes n’existent pas, puisqu’il n’incombe pas au CPE-SE d’attribuer des notes, mais de rendre un avis sur la base duquel l’évaluateur attribue une note.

32     En ce qui concerne les problèmes de transcription dans le système informatique de gestion du personnel, la défenderesse fait valoir que les délégations du service extérieur de la Commission n’ont pas été en mesure de l’utiliser, de sorte que les rapports ont été établis et finalisés sur papier. Les services des ressources humaines de la DG « Relations extérieures » auraient ensuite introduit dans le système informatique les points de mérite attribués dans le rapport définitif. En tout état de cause, la défenderesse estime que les seuls problèmes de transcription ne sauraient justifier l’annulation des actes attaqués.

33     En ce qui concerne la prétendue absence de communication des éléments d’évaluation à l’évaluateur d’appel et le fait que cette absence l’aurait empêché de présenter ses observations de manière objective, la défenderesse fait valoir, d’une part, qu’une éventuelle absence de ces éléments dans le dossier individuel du requérant ne permet pas de conclure automatiquement à l’absence de communication de ces éléments à l’évaluateur d’appel et, d’autre part, qu’aucune règle ne prévoit la communication formelle des éléments d’évaluation à l’évaluateur d’appel. Il appartiendrait, en effet, à ce dernier seul de juger s’il dispose ou non de l’ensemble des éléments nécessaires à son appréciation.

34     Par ailleurs, la défenderesse fait observer que l’évaluateur d’appel a parfaitement rempli le rôle qui lui était imparti par les DGE, puisqu’il a suivi l’avis du CPE-SE et, par conséquent, augmenté la notation du requérant d’un point au titre du rendement.

35     La défenderesse estime, par conséquent, que la première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

–       Appréciation du Tribunal

36     Selon le requérant, la violation de ses droits de la défense résulte de la transcription partielle de certains éléments d’évaluation dans le système informatique de gestion du personnel et de leur absence de classement dans le dossier personnel du requérant, en violation de l’article 26 du statut.

37     Il convient de relever, à cet égard, que la violation de l’article 26 du statut n’entraîne l’annulation d’un acte que s’il est établi que les éléments en cause ont pu avoir une incidence décisive sur la décision litigieuse (arrêts de la Cour du 27 janvier 1983, List/Commission, 263/81, Rec. p. 103, point 27 ; du 12 février 1987, Bonino/Commission, 233/85, Rec. p. 739, point 13, et du 12 novembre 1996, Ojha/Commission, C‑294/95 P, Rec. p. I‑5863, point 67 ; arrêts du Tribunal du 30 novembre 1993, Perakis/Parlement, T‑78/92, Rec. p. II‑1299, point 29, et du 20 septembre 2001, Recalde Langarica/Commission, T‑344/99, RecFP p. I‑A‑183 et II‑833, point 60).

38     En l’espèce, en premier lieu, le requérant l’absence de transcription de ses notes du 2 avril et du 16 mai 2003 dans le système informatique de gestion du personnel ainsi que l’absence de classement de ces mêmes notes dans son dossier personnel. Selon le requérant, ces absences n’ont pas permis à l’évaluateur d’appel de présenter ses observations de façon objective.

39     Les deux notes auxquelles le requérant se réfère sont deux documents qu’il a rédigés dans le cadre de la procédure d’évaluation. Dans sa note du 2 avril 2003, le requérant a indiqué, conformément à l’article 7, paragraphe 5, des DGE, les motifs de sa demande d’avoir un entretien avec le validateur. Il s’agit de la note séparée à laquelle le requérant fait référence dans son annotation figurant à la section 7.3 du REC. Dans sa note du 16 mai 2003, le requérant a indiqué, conformément à l’article 7, paragraphe 6, des DGE, les motifs de sa saisine du CPE. Il s’agit du courriel auquel le requérant fait référence dans son annotation figurant à la section 8.2 du REC.

40     Il s’ensuit que l’évaluateur d’appel, en consultant le REC lors de l’adoption de sa décision quant à la suite à donner à l’avis émis par le CPE, était en mesure de consulter les deux notes en cause sur la base des annotations figurant aux sections 7.3 et 8.2 du REC. Par conséquent, les informations contenues dans ces annotations permettaient à l’évaluateur d’appel de présenter ses observations de façon objective.

41     Par ailleurs, en ce qui concerne plus particulièrement la note du 16 mai 2003, il convient de noter que l’évaluateur d’appel a suivi les recommandations figurant dans l’avis du CPE-SE, en augmentant d’un point la notation du requérant relative au rendement, la portant ainsi à 6 points sur 10. Ce faisant, l’évaluateur d’appel a indirectement pris en compte la note du 16 mai 2003, étant donné que celle-ci constituait le fondement de l’avis émis par le CPE.

42     Il s’ensuit que l’absence de transcription et de classement desdites notes, en violation de l’article 26 du statut, n’a pas eu d’incidence décisive sur la décision finale de l’évaluateur d’appel et, par conséquent, sur le REC litigieux, de sorte que le présent argument doit être rejeté.

43     En deuxième lieu, en ce qui concerne l’argument du requérant selon lequel le REC reçu par lui le 11 juillet 2003 ne comportait pas la signature du coévaluateur ni celle de l’évaluateur d’appel, il y a lieu de relever que cet argument est dirigé à l’encontre d’un acte qui n’était pas encore devenu définitif. En effet, conformément à l’article 8, paragraphe 7, des DGE, faute d’être signé par l’évaluateur d’appel, l’acte en question ne pouvait être considéré comme définitif. Il s’ensuit que, d’une part, l’argument manque en fait, le REC définitif ayant été communiqué au requérant le 1er septembre 2003 (voir point 17 ci-dessus) et, d’autre part, il est sans objet en tant qu’il se rapporte à la version du REC reçue le 11 juillet 2003. Il y a donc lieu de le rejeter.

44     En troisième et dernier lieu, le requérant avance que seules les notes attribuées avant et après la saisine du CPE-SE ont été retranscrites dans le système informatique de gestion du personnel. Il convient de constater qu’il ne pouvait en aller autrement, étant donné qu’il n’entre pas dans la compétence du CPE-SE d’attribuer des notes. Comme la défenderesse l’a fait observer à bon droit, il incombe seulement au CPE‑SE de rendre un avis sur la base duquel l’évaluateur d’appel attribue une note.

45     Il en résulte que la première branche du premier moyen doit être rejetée comme non fondée.

 En ce qui concerne la seconde branche, relative à l’impossibilité d’identifier le REC de référence

–       Arguments des parties

46     S’agissant de l’impossibilité d’identifier le REC de référence, le requérant rappelle que ce serait violer un principe élémentaire du droit que de baser une décision sur des faits et documents dont les parties ou l’une d’entre elles n’ont pu prendre connaissance et sur lesquels elles n’ont donc pas été en mesure de prendre position (arrêt de la Cour du 22 mars 1961, Snupat/Haute Autorité, 42/59 et 49/59, Rec. p. 103).

47     Or, en l’espèce, l’identification exacte du REC à prendre en considération aurait été difficile dans la mesure où le requérant aurait reçu deux REC présentés chacun comme définitif, l’un en date du 11 juillet 2003 et l’autre en date du 1er septembre 2003.

48     Puisqu’une telle confusion porterait atteinte au contrôle objectif du déroulement normal de la procédure, elle entacherait d’irrégularité la procédure qui a conduit à l’adoption du REC et, ce faisant, le REC lui-même.

49     La défenderesse estime que la réception de deux copies du REC n’a pas pu induire le requérant en erreur quant à la détermination du REC à prendre en considération, puisque la note du 11 juillet 2003 accompagnant la première copie indiquait clairement qu’une copie du REC définitif lui serait communiquée ultérieurement.

50     La défenderesse estime, par conséquent, que la seconde branche du premier moyen doit être déclarée non fondée.

–       Appréciation du Tribunal

51     Il est constant que la version du REC contenant la décision de l’évaluateur d’appel du 2 juillet 2003 a été notifiée à deux reprises. Elle a été notifiée une première fois le 11 juillet 2003, sans toutefois contenir la signature du coévaluateur. Elle a été notifiée une seconde fois le 1er septembre 2003, contenant cette fois-ci la signature du coévaluateur.

52     Il convient tout d’abord de rappeler que seul le REC comportant les signatures requises confère à la notation un caractère définitif, c’est-à-dire susceptible de faire courir les délais pour introduire une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut, ce que le requérant, en sa qualité de fonctionnaire de la catégorie A, ne pouvait ignorer. L’identification du REC à prendre en considération ne devait donc lui poser aucune difficulté particulière.

53     Qui plus est, force est de constater que la Commission avait appelé de façon particulière l’attention du requérant sur ce point. Ainsi, la lettre du 11 juillet 2003 accompagnant la première copie du REC indiquait que, sitôt la signature du coévaluateur apposée sur le REC, ce dernier serait transmis au chef de délégation pour signature. Par conséquent, sur la base de la lettre du 11 juillet 2003, le requérant ne pouvait être induit en erreur concernant la nature provisoire de la première copie du REC, de sorte que la seconde branche du moyen manque en fait.

54     La seconde branche du premier moyen doit donc être rejetée comme non fondée.

55     Étant donné que les deux branches du premier moyen ne sont pas fondées, le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des garanties de procédure

 Arguments des parties

56     Le requérant estime que la Commission n’a pas respecté les garanties de procédure prévues pour la procédure d’évaluation, d’une part, du fait du conflit d’intérêts chef de l’évaluateur, du validateur et d’au moins un membre du CPE-SE et, d’autre part, du fait de la violation de l’article 3, paragraphe 1, des DGE-SE.

57     S’agissant du conflit d’intérêts de l’évaluateur et du validateur, le requérant fait référence à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1), ainsi qu’à l’article 14 du statut.

58     Le conflit d’intérêts du validateur résiderait dans le fait que ce dernier aurait joué un rôle majeur dans la conception, la promotion et la prolongation à deux reprises du programme de modernisation industrielle en Égypte. L’absence de résultat de ce programme, reprochée par la suite au requérant, serait la conséquence des objectifs irréalistes et des défauts de conception intrinsèques dudit programme. Le requérant estime que, dans ces conditions, le validateur aurait dû se récuser, puisque son impartialité et son objectivité dans l’appréciation du degré de responsabilité du requérant concernant l’avancement du programme ne pouvaient pas être parfaitement garanties.

59     L’évaluateur, chef de la délégation et, par conséquent, responsable du projet précité, se serait également trouvé en présence d’un conflit d’intérêts pour évaluer le travail du requérant en raison de son manque de neutralité et de son fort degré d’implication dans la mise en œuvre dudit projet.

60     Dans ce contexte, le requérant estime que le validateur et l’évaluateur ont fait porter sur lui la responsabilité de l’échec du programme de modernisation industrielle en Égypte, en dégradant l’évaluation de sa carrière et de sa notation.

61     Le requérant fait encore valoir qu’au moins un membre du CPE-SE était un fonctionnaire subordonné au validateur. De ce fait, ce membre aurait eu des intérêts incompatibles avec sa mission et aurait, par conséquent, dû se démettre et se faire remplacer par un suppléant, conformément à l’article 8, paragraphe 6, des DGE, qui serait applicable en l’espèce en vertu de l’article 6, paragraphe 2, des DGE-SE.

62     S’agissant de la violation de l’article 3, paragraphe 1, des DGE-SE, le requérant estime que l’obligation du coévaluateur de consulter les directeurs fonctionnels de l’intéressé, que cette disposition mettait à sa charge, n’a pas été respectée en l’espèce. À cet égard, il conteste l’affirmation de la défenderesse selon laquelle une telle consultation a bien eu lieu.

63     S’agissant, tout d’abord, du conflit d’intérêts supposé de l’évaluateur et du validateur, la défenderesse estime que n’était en cause aucun intérêt personnel de nature à compromettre, en violation de l’article 14 du statut, leur indépendance dans l’établissement du REC. À cet égard, ni les DGE ni les DGE-SE en vigueur au moment des faits n’auraient interdit aux supérieurs hiérarchiques du requérant impliqués dans les activités professionnelles de ce dernier d’exercer la fonction d’évaluateur ou de validateur. Selon la défenderesse, les évaluateurs ne peuvent pas être considérés comme partiaux et dépourvus d’objectivité du simple fait que, en leur qualité de supérieurs hiérarchiques, ils sont responsables du travail des fonctionnaires placés sous leur autorité et qu’ils sont, par conséquent, impliqués dans les activités professionnelles de ceux-ci. La thèse du requérant remettrait d’ailleurs en cause l’un des principes de base de la procédure d’évaluation, qui consiste en ce que les supérieurs hiérarchiques directs sont les personnes les mieux à même de porter une appréciation sur les aptitudes professionnelles des fonctionnaires placés sous leur autorité. Le fait que les évaluateurs sont à leur tour évalués dans leur travail, y compris quant à la gestion du personnel se trouvant sous leur autorité, constituerait une garantie de leur impartialité et de leur objectivité. Par ailleurs, le système de coévaluation prévu à l’article 3, paragraphe 1, des DGE-SE viserait à assurer que l’évaluation du personnel affecté au service extérieur ne dépende pas de la seule appréciation de l’évaluateur ou du validateur. La défenderesse note, à cet égard, que l’intervention du coévaluateur s’est traduite, dans le cas d’espèce, par l’augmentation d’un point de la notation du requérant au titre de la rubrique « Aptitudes (compétences) », la portant ainsi à 4 points sur 6, ce qui correspond à l’appréciation « bien ».

64     La défenderesse fait ensuite remarquer que le REC a pris en compte le caractère problématique du programme de modernisation industrielle en Égypte dans l’appréciation du rendement du requérant.

65     La défenderesse conteste la recevabilité de l’argument du requérant selon lequel au moins un membre du CPE-SE aurait eu des intérêts incompatibles avec sa mission, ce qui aurait dû l’obliger à se démettre et se faire remplacer par un suppléant. En effet, cet argument n’aurait pas été soulevé dans le cadre de la réclamation. En tout état de cause, l’incompatibilité édictée à l’article 8, paragraphe 6, des DGE ne concernerait pas les personnes se trouvant dans une relation de subordination par rapport au validateur. Par ailleurs, l’invocation par le requérant de l’article 3, paragraphe 5, du règlement intérieur des CPE ne serait pas pertinente, puisque ledit règlement n’aurait pas été applicable au moment des faits.

66     S’agissant de la violation de l’article 3, paragraphe 1, des DGE-SE, cette disposition se limiterait à prévoir un système de coévaluation entre, d’une part, le chef de délégation et, d’autre part, le directeur de la zone géographique concernée ou le directeur fonctionnel. En revanche, cette disposition ne prévoirait nullement l’obligation pour le coévaluateur de consulter les autres directeurs fonctionnels. La défenderesse précise que la possibilité d’une consultation a néanmoins été évoquée dans la note du 22 janvier 2003 du directeur général de la DG « Relations extérieures ». Or, en l’espèce, cette consultation aurait bien eu lieu, lors d’une réunion du 11 février 2003 à laquelle participaient le coévaluateur et les directeurs de la direction « Méditerranée du Sud, Proche-Orient et Moyen-Orient » de l’Office de coopération de la Commission (EuropAid) et de la direction « Accords de libre-échange ; questions commerciales agricoles ; ACP ; relations commerciales bilatérales II » de la DG « Commerce ». À cet égard, dans la mesure où ladite consultation n’était pas prévue par les DGE, le fait de ne pas l’avoir mentionnée dans le REC ne saurait nullement justifier l’annulation de ce dernier. En tout état de cause, la défenderesse rappelle, à titre subsidiaire, la jurisprudence constante du Tribunal selon laquelle une erreur formelle n’est pas pertinente si elle n’a aucun effet sur la décision attaquée (arrêts du Tribunal du 15 mars 1994, La Pietra/Commission, T‑100/92, RecFP p. I‑A‑83 et II‑275, points 20 à 22 ; du 18 décembre 1997, Angelini/Commission, T‑222/95, RecFP p. I‑A‑491 et II‑1277, points 30 et 31, et du 20 septembre 2001, Coget e.a./Cour des comptes, T‑95/01, RecFP p. I‑A-191 et II‑879, point 147).

 Appréciation du Tribunal

67     S’agissant de l’argument du requérant concernant l’existence d’un conflit d’intérêts de l’évaluateur et du validateur, il convient de constater tout d’abord que le requérant n’a pas démontré l’existence d’un intérêt personnel de l’évaluateur et du validateur de nature à compromettre, en violation de l’article 14 du statut, leur indépendance dans l’établissement du REC.

68     Par ailleurs, c’est à juste titre que la Commission a fait observer que ni les DGE ni les DGE-SE n’interdisaient aux supérieurs hiérarchiques du requérant impliqués dans les activités professionnelles de ce dernier d’exercer la fonction d’évaluateur ou de validateur. En effet, les évaluateurs ne sauraient être considérés comme partiaux et dépourvus d’objectivité du simple fait que, en leur qualité de supérieurs hiérarchiques, ils sont responsables du travail des fonctionnaires placés sous leur autorité et qu’ils sont, par conséquent, impliqués dans les activités professionnelles de ceux-ci, alors surtout que seule cette implication est de nature à leur permettre de porter l’appréciation la plus adéquate possible sur les activités des personnes exerçant sous leurs ordres.

69     Enfin, le requérant n’a nullement établi que l’évaluateur et/ou le validateur auraient détourné, dans le cadre de l’établissement du REC litigieux, le pouvoir qui leur était dévolu, afin de dissimuler leurs propres défaillances concernant les projets sur lesquels le requérant avait travaillé pendant la période de référence.

70     Il convient ensuite de noter que la défenderesse conteste la recevabilité de l’argument du requérant selon lequel au moins un membre du CPE-SE aurait eu des intérêts incompatibles avec sa mission, ce qui aurait dû l’obliger à se démettre et à se faire remplacer par un suppléant. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans les recours de fonctionnaires, les conclusions présentées devant le juge communautaire ne peuvent avoir que le même objet que celui des conclusions exposées dans la réclamation et ne peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle des chefs de contestation invoqués dans la réclamation. Ces chefs de contestation peuvent, devant le juge, être développés par la présentation de moyens et d’arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (arrêts de la Cour du 7 mai 1986, Rihoux e.a./Commission, 52/85, Rec. p. 1555, point 15, et du 20 mai 1987, Geist/Commission, 242/85, Rec. p. 2181, point 9). En l’espèce, il est constant que l’argument selon lequel au moins un membre du CPE-SE aurait eu des intérêts incompatibles avec sa mission n’a pas été énoncé par le requérant dans le cadre de la réclamation. En outre, cet argument ne se rattache pas étroitement aux moyens et arguments exposés dans la réclamation. Par conséquent, il y a lieu de faire droit à l’exception d’irrecevabilité soulevée par celle-ci.

71     S’agissant, enfin, de la violation de l’article 3, paragraphe 1, des DGE-SE, il convient de relever que cette disposition se borne à prévoir un système de coévaluation entre, d’une part, le chef de délégation et, d’autre part, le directeur de la zone géographique concernée ou le directeur fonctionnel. En l’occurrence, le coévaluateur était le directeur de la zone géographique comprenant l’Égypte. Contrairement à ce qu’allègue le requérant, l’article 3, paragraphe 1, des DGE ne prévoit pas d’obligation pour le coévaluateur de consulter les autres directeurs fonctionnels. Une telle démarche ne pouvait donc que revêtir un caractère facultatif. Par ailleurs, même si une consultation des directeurs fonctionnels était théoriquement possible, il y a lieu de constater que le requérant n’a pas apporté la preuve qu’il aurait fait une telle demande à l’évaluateur. C’est donc à tort que le requérant soutient que l’établissement du REC sans consultation des directeurs fonctionnels est intervenu en violation d’une obligation posée par les DGE. Les garanties procédurales dont a bénéficié le requérant n’ayant nullement été méconnues, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation et de la violation de l’obligation de motivation

 Arguments des parties

72     Le requérant avance que, dans le cas où une institution communautaire dispose d’un large pouvoir d’appréciation, comme en l’espèce, le respect de l’obligation de motivation revêt une importance fondamentale.

73     Le requérant estime que cette obligation a, tout d’abord, été violée par l’AIPN en ce qu’elle n’aurait pas tenu compte, en établissant le REC, non seulement des éléments essentiels de l’autoévaluation, mais aussi des explications analytiques et factuelles données par le requérant dans l’annexe à sa note du 16 mai 2003, et ce pour chacune des sections du point 6 du REC.

74     L’obligation de motivation aurait encore été violée du fait de l’incohérence entre certaines appréciations des évaluateurs et les mentions standard correspondantes. En particulier, la notation de 6 points sur 10 attribuée au requérant au titre de la rubrique « Rendement » à la suite de l’intervention de l’évaluateur d’appel, et correspondant à la mention standard « bien », n’aurait pas tenu compte de la réalité de la situation qui aurait dû être prise en considération pour son évaluation. À cet égard, le requérant met en avant, premièrement, le contexte difficile et les difficultés particulières auxquels il a été confronté dans son travail, deuxièmement, le caractère irréalisable des objectifs du programme de modernisation industrielle, troisièmement, le fait qu’il a dépassé ses objectifs en assurant, en sus de ses attributions, des tâches qui sont, dans certaines délégations, celle d’un conseiller scientifique et, quatrièmement, le fait qu’il n’a pas disposé du pouvoir de décision nécessaire afin de mener à bien le programme égyptien.

75     Afin d’étayer cette dernière assertion, le requérant invite le Tribunal à demander à la Commission de produire le rapport d’inspection, du moins dans ses éléments pertinents, se rapportant aux travaux de la délégation.

76     Le requérant en conclut que son rendement n’a pas été apprécié à sa juste valeur. La mention standard « bien », correspondant à l’appréciation « Bon niveau de performance. A atteint la totalité ou la grande majorité des objectifs », devrait être remplacée par la mention standard « très bien », correspondant respectivement à la notation de 7 ou 8 points sur 10 et à l’appréciation « Très bon niveau de performance. A dépassé certains objectifs, ou en a atteint un grand nombre (y compris les objectifs prioritaires) malgré des difficultés particulières sur le lieu de travail ». À cet égard, le requérant précise qu’il ne s’agit pas pour le Tribunal d’effectuer sa propre notation, mais de vérifier que les standards de notation ont été respectés.

77     Ensuite, s’agissant de la contradiction entre le REC en cause et le rapport de notation qui l’a précédé, le requérant fait observer que l’obligation de motiver le rapport de notation de façon suffisamment circonstanciée est d’autant plus importante lorsque la notation connaît une régression par rapport à la notation antérieure (arrêt de la Cour du 6 février 1986, Castille/Commission, 173/82, 157/83 et 186/84, Rec. p. 497, point 27 ; arrêts du Tribunal du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T‑1/91, Rec. p. II‑2145, points 30 et 32, et du 9 mars 1999, Hubert/Commission, T‑212/97, RecFP p. I‑A‑41 et II‑185, point 79). En l’espèce, il existerait plusieurs contradictions flagrantes entre, d’une part, les deux appréciations « normal » et les huit appréciations « supérieur » du rapport de notation portant sur la période du 1er juillet 1999 au 30 juin 2001 et, d’autre part, les appréciations du REC en cause.

78     De même, ces dernières appréciations seraient contredites par la note du 26 novembre 2003 qui a été adressée au requérant par le chef de l’unité « Politique de coopération scientifique internationale » de la DG « Recherche ». Dans cette note, il aurait indiqué que « [le requérant] a[vait] collaboré très harmonieusement avec [ses] services à [leur] entière satisfaction » et qu’il avait « assuré la tâche qui est en fait dans certaines délégations celle d’un conseiller scientifique et […] a[vait] consacré le temps nécessaire pour ce faire malgré ses autres attributions ». Le requérant soutient que cette note a été complètement occultée lors de l’établissement du REC par l’évaluateur, ce qui démontrerait que plusieurs actions positives à porter au crédit du requérant n’ont pas été prises en considération. Le requérant fait observer que la jurisprudence invoquée par la défenderesse (arrêt du Tribunal du 22 février 1990, Turner/Commission, T‑40/89, Rec. p. II‑55, publication sommaire) n’est pas pertinente, puisqu’il ne s’agit pas, en l’espèce, d’établir une correspondance entre des méthodes de notation, mais de procéder à des comparaisons entre périodes de notation. À cet égard, le requérant insiste sur la nécessité de procéder à des comparaisons entre appréciations analytiques qualitatives, par nature comparables, d’une part, du fait de leur objet identique et, d’autre part, du fait de la continuité et de la similarité des fonctions exercées au cours des périodes de notation considérées.

79     S’agissant du REC qui a fait suite à la notation contestée dans le cadre du présent litige, le requérant fait tout d’abord observer que le retrait par l’évaluateur d’appel de la première partie de ce REC, portant sur la période du 1er janvier au 30 juin 2003 et correspondant aux derniers mois passés par le requérant au sein de la délégation, témoigne de la présence d’incohérences et de contradictions qui entachent également d’irrégularité le REC dont la demande d’annulation fait l’objet du présent recours. À cet égard, étant donné que les fonctions du requérant pendant la période du 1er janvier au 30 juin 2003 et celles relatives à la période de référence étaient similaires, le REC présentement en cause devrait être annulé, puisque les appréciations de celui-ci reprennent presque mot pour mot les appréciations de la première partie du REC subséquent. Ensuite, la notation de 15 points sur 20 attribuée au requérant dans le cadre de la deuxième partie dudit REC, portant sur la période du 1er juillet au 31 décembre 2003, mettrait elle aussi en évidence les incohérences et les contradictions du REC présentement en cause. À la lumière des faits qu’elle démontre objectivement, tels que le caractère irréalisable des objectifs du programme de modernisation de l’industrie en Égypte, l’évaluation constituerait une confirmation a posteriori de la véracité des arguments du requérant.

80     Enfin, l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation serait encore prouvée par la teneur d’un courrier électronique du 27 février 2004, que M. W. aurait adressé au validateur dans le cadre de l’établissement du REC relatif à l’année 2003. Ce courrier indiquerait que le comportement personnel du requérant était étranger aux relations tendues entre la délégation et le ministère de l’Industrie égyptien.

81     La défenderesse estime, tout d’abord, que le requérant ne fait que reprendre, concernant ce moyen, les affirmations avancées dans le cadre du premier moyen. La défenderesse déclare se rapporter, par conséquent, aux commentaires qu’elle a exposés dans le cadre du premier moyen.

82     La défenderesse rappelle, ensuite, la jurisprudence selon laquelle les notateurs ont un très large pouvoir d’appréciation dans les jugements relatifs au travail des personnes qu’ils ont la charge de noter. Selon cette jurisprudence, il n’appartiendrait pas au juge communautaire, sauf en cas d’erreurs de fait manifestes ou de détournement de pouvoir, de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée sur les aptitudes professionnelles d’un fonctionnaire, lorsqu’elle comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective (arrêts du Tribunal du 12 juin 2002, Mellone/Commission, T‑187/01, RecFP p. I‑A‑81 et II‑389, point 51, et du 7 mai 2003, den Hamer/Commission, T‑278/01, RecFP p. I‑A‑139 et II‑665, point 58). Selon la défenderesse, cette jurisprudence implique qu’en matière de notation, à l’exception d’erreurs de fait manifestes et du détournement de pouvoir, les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires figurant dans les REC sont, en tant que tels, exclus de tout contrôle juridictionnel. La défenderesse conteste, à cet égard, qu’il y ait eu détournement de pouvoir ou erreur manifeste d’appréciation. Plus particulièrement, la conclusion de la requérante selon laquelle seule la mention « très bien » était appropriée dans son cas reviendrait à demander au Tribunal de substituer son appréciation à celle des évaluateurs. Concernant la rubrique « Rendement », il n’y aurait d’ailleurs aucune incohérence entre la notation finale de 6 points sur 10 et l’appréciation standard. En outre, en notant que le requérant « a[vait] dû gérer le projet de la Commission le plus problématique en Égypte », les évaluateurs auraient pris en considération la complexité des tâches confiées au requérant.

83     En ce qui concerne l’affirmation du requérant selon laquelle certaines de ses contributions, autres que celles se rapportant au projet de modernisation industrielle, auraient dû être mentionnées, la défenderesse rappelle la jurisprudence selon laquelle il n’est pas nécessaire que le rapport contienne des explications détaillées au point de permettre au noté l’ouverture d’un véritable dialogue écrit sur la valeur des différents travaux qu’il a accomplis durant la période de référence, un tel débat dépassant manifestement le cadre de la procédure de notation (arrêt den Hamer/Commission, précité, point 71). En tout état de cause, en mentionnant que, « concernant d’autres projets, du progrès a été accompli tant en clôturant d’anciens projets qu’en préparant de nouveaux projets pour approbation par la Commission », les évaluateurs auraient dûment pris en considération les autres contributions du requérant.

84     L’affirmation du requérant selon laquelle le service d’inspection des délégations aurait constaté en octobre 2002 que le requérant ne disposait pas du pouvoir de décision nécessaire afin de mener à bien le programme égyptien est, selon la défenderesse, inexacte et non pertinente, puisque ledit rapport ne ferait nullement référence au cas du requérant.

85     En ce qui concerne les contradictions entre le REC contesté et les rapports qui l’ont précédé, la défenderesse rappelle d’abord que ledit REC est le premier rapport établi dans le cadre du nouveau système d’évaluation, qui diffère sensiblement du système précédent. La défenderesse note, à cet égard, que, lorsqu’une institution poursuit l’objectif de différencier et de nuancer davantage les appréciations analytiques portées sur les fonctionnaires à l’occasion de leur notation en substituant une méthode d’appréciation à une autre méthode d’appréciation, un tel changement de méthode implique nécessairement que la correspondance entre l’ancienne et la nouvelle méthode de notation ne peut être effectuée par le biais d’un mécanisme corrélationnel fixe (voir, en ce sens, arrêt Turner/Commission, précité, point 23).

86     La défenderesse considère, enfin, que le raisonnement du requérant reposant sur des REC postérieurs à la période de référence n’est pas fondé, étant donné que les évaluateurs ne pouvaient, par définition, anticiper ce que serait la notation ultérieure du requérant. Par ailleurs, le fait que le REC litigieux contienne des appréciations presque identiques à celles contenues dans le REC intermédiaire portant sur l’année 2003 ne pourrait justifier son annulation, puisque les deux REC seraient deux actes distincts couvrant des périodes distinctes. Il s’ensuivrait que l’absence de confirmation par l’évaluateur d’appel du REC intermédiaire portant sur l’année 2003 ne pourrait établir en soi l’illégalité du REC litigieux.

87     Enfin, les meilleurs résultats obtenus par le requérant pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 ne pourraient pas remettre en cause la légalité du REC litigieux, puisque ces meilleurs résultats pourraient être la conséquence d’une amélioration des aptitudes professionnelles du requérant.

88     La défenderesse considère que le présent moyen n’est donc pas fondé et qu’il doit, par conséquent, être rejeté.

 Appréciation du Tribunal

89     À titre liminaire, il convient d’observer que le requérant n’a pas fait de distinction claire dans sa demande entre le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation et celui tiré de l’erreur manifeste d’appréciation.

90     Or, il y a lieu de rappeler qu’il s’agit de deux moyens distincts susceptibles d’être invoqués dans le cadre du recours en annulation. Le premier, qui vise un défaut ou une insuffisance de motivation, relève de la violation des formes substantielles, au sens de l’article 253 CE, et constitue un moyen d’ordre public qui doit être soulevé d’office par le juge communautaire (voir arrêt de la Cour du 20 février 1997, Commission/Daffix, C‑166/95 P, Rec. p. I‑983, point 24, et la jurisprudence citée). En revanche, le second, qui porte sur la légalité au fond de la décision litigieuse, ne peut être examiné par le juge communautaire que s’il est invoqué par le requérant.

91     Par conséquent, il convient de statuer sur les arguments soulevés dans le cadre du troisième moyen en examinant d’abord les arguments tirés de la violation de l’obligation de motivation et ensuite ceux tirés de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation.

–       Première branche : arguments tirés de la violation de l’obligation de motivation

92     S’agissant, en premier lieu, de ce que la Commission, d’une part, aurait ignoré ou omis de faire état d’éléments essentiels de l’autoévaluation du requérant, et, d’autre part, n’aurait pas établi avoir pris en compte convenablement les explications analytiques et factuelles de la note du 16 mai 2003, il convient de noter que la simple circonstance de ne pas avoir fait écho dans ses commentaires à toutes les composantes de l’autoévaluation ne saurait suffire, en tant que telle, à démontrer que la Commission n’a pas pris en considération toutes les données pertinentes du cas d’espèce, dès lors que les commentaires descriptifs figurant dans un REC ont seulement pour objet de justifier les appréciations analytiques (arrêt du Tribunal du 12 juillet 2005, De Bry/Commission, T‑157/04, non encore publié au Recueil, point 67 ; voir également, concernant le rapport de notation, arrêt du Tribunal du 21 octobre 1992, Maurissen/Cour des comptes, T‑23/91, Rec. p. II‑2377, point 41). Ces commentaires servent d’assise à l’établissement de la notation et permettent au fonctionnaire de comprendre la notation obtenue (arrêt De Bry/Commission, précité, point 67). Il importe en outre de rappeler qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 4, des DGE et du point 4.1 du guide d’évaluation que la fonction de l’autoévaluation consiste simplement à préparer le dialogue formel entre le fonctionnaire noté et l’évaluateur. Il est donc erroné de prétendre que toute appréciation de l’évaluateur ignorant tel ou tel aspect de l’autoévaluation ou s’en écartant aurait à être spécialement motivée. L’exercice d’évaluation même perdrait toute raison d’être si le fonctionnaire évalué y jouait un rôle prépondérant et s’il s’agissait simplement pour l’évaluateur de réfuter les affirmations dudit fonctionnaire (arrêt du Tribunal du 18 octobre 2005, Mateus/Commission, T‑51/04, non encore publié au Recueil, point 40). Par ailleurs, au cours de la procédure précontentieuse, l’AIPN n’est pas plus tenue de répondre à tous les éléments soulevés par le fonctionnaire (voir, en matière disciplinaire, arrêts du Tribunal du 19 mai 1999, Connolly/Commission, T‑34/96 et T‑163/96, RecFP p. I‑A‑87 et II‑463, point 93 ; du 30 mai 2002, Onidi/Commission, T‑197/00, RecFP p. I‑A‑69 et II‑325, point 156, et du 16 mars 2004, Afari/BCE, T‑11/03, non encore publié au Recueil, point 44).

93     S’agissant, en deuxième lieu, de la question de savoir si, en l’espèce, les évaluateurs ont satisfait ou non à leur obligation de motiver, au regard des appréciations analytiques du REC, la régression alléguée, il y a lieu de partir des constatations suivantes. Il ressort du rapport de notation pour la période allant du 1er juillet 1999 au 30 juin 2001 que le requérant avait obtenu deux appréciations « normal » et huit appréciations « supérieur », dans une échelle d’évaluation comptant les quatre mentions suivantes : « insuffisant », « normal », « supérieur » et « excellent ». Il est donc établi que les appréciations que le requérant avait ainsi reçues se situaient au milieu de l’échelle d’évaluation, puisqu’il n’avait pas reçu d’appréciation « insuffisant » ni d’appréciation « exceptionnel ». En ce qui concerne la période de référence, il convient de constater que la mention « suffisant » et les deux mentions « bien » que le requérant a obtenues se situent également au milieu de l’échelle d’évaluation, étant donné que le requérant n’a reçu ni la mention « insuffisant » ou « faible » ni la mention « très bien » ou « exceptionnel ».

94     Par ailleurs, en l’occurrence, la comparaison entre les appréciations du REC litigieux et celles du rapport de notation pour la période allant du 1er juillet 1999 au 30 juin 2001 est rendue plus difficile par le fait que la Commission a changé son système d’évaluation. En effet, il ressort de la jurisprudence que, lorsqu’une institution poursuit l’objectif de différencier et de nuancer davantage les appréciations analytiques portées sur les fonctionnaires à l’occasion de leur notation en substituant une méthode d’appréciation à une autre, un tel changement de méthode implique nécessairement que la correspondance entre l’ancienne et la nouvelle méthode de notation ne peut être effectuée par le biais d’un mécanisme corrélationnel fixe (arrêt Turner/Commission, précité, point 23).

95     Il résulte de ces considérations que les commentaires descriptifs ainsi que les appréciations analytiques portées par les évaluateurs sur le rendement, les aptitudes (compétences) et la conduite dans le service du requérant pour la période de référence ne permettent pas de conclure à l’existence de contradictions flagrantes par rapport aux appréciations qui lui avaient été accordées pour la période allant du 1er juillet 1999 au 30 juin 2001. En conséquence, en l’absence de baisse significative de la notation du requérant d’un rapport à l’autre, la Commission n’était pas soumise à une obligation de motivation accrue sur ce point.

96     Enfin, en ce qui concerne le reproche adressé par le requérant à la Commission d’avoir complètement occulté la note du chef de l’unité « Politique de coopération scientifique internationale » du 23 novembre 2003, il convient de constater que, dans la mesure où cette note est postérieure à l’établissement du REC litigieux, les évaluateurs ne pouvaient en tenir compte. L’eussent-ils pu qu’il conviendrait d’ajouter, en vertu de la jurisprudence citée au point 92 ci-dessus, que l’administration n’est nullement tenue de répondre à chacun des arguments soulevés par le fonctionnaire noté.

97     Partant, au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le grief tiré de la violation de l’obligation de motivation n’est pas fondé.

–       Sur la deuxième branche : arguments tirés de l’existence d’erreurs manifestes d’appréciation

98     En premier lieu, s’agissant du grief tiré des incohérences entre l’appréciation des évaluateurs portant sur le rendement du requérant et les mentions standard du REC, il convient de relever que le requérant vise en réalité à remettre en cause la validité des appréciations portées par les évaluateurs quant à son travail durant la période de référence.

99     Il importe tout d’abord de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation à celle des personnes chargées d’évaluer le travail de la personne notée. En effet, les institutions communautaires disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail de leurs fonctionnaires. Les jugements de valeur portés sur les fonctionnaires dans les REC sont exclus du contrôle juridictionnel, lequel ne s’exerce que sur les éventuelles irrégularités de forme, les erreurs de fait manifestes entachant les appréciations portées par l’administration ainsi que sur un éventuel détournement de pouvoir (voir, concernant le rapport de notation, arrêt du Tribunal du 9 décembre 1999, Progoulis/Commission, T‑53/99, RecFP p. I‑A‑255 et II‑1249, point 27).

100   En l’espèce, il y a lieu de noter que l’appréciation du rendement du requérant (section 6.1 du REC) a été améliorée par l’évaluateur d’appel (passant de « suffisant » à « bien »), à la suite de l’avis émis en ce sens par le CPE. Le requérant estime néanmoins qu’il a droit à l’appréciation « très bien ».

101   À cet égard, il convient de relever que le formulaire du REC pour la période de référence contient des appréciations correspondant aux différentes mentions standard du rendement. Dans ce contexte, la mention standard « suffisant » correspond à l’appréciation « niveau minimal acceptable », la mention standard « bien » à l’appréciation « Bon niveau de performance. A atteint la totalité ou la grande majorité des objectifs. » et la mention standard « très bien » à l’appréciation « Très bon niveau de performance. A dépassé certains objectifs, ou en a atteint un grand nombre (y compris les objectifs prioritaires) malgré des difficultés particulières sur le lieu de travail ».

102   Dans la rubrique « Rendement », la performance du requérant est commentée comme suit :

« [Le requérant] a été […] charg[é] pendant [la période de référence] du programme de […] modernisation industrielle, le projet le plus problématique de la Commission en Égypte. Dans ce contexte, il n’est en somme pas surprenant que le progrès ait été lent. Cependant, avec un nouveau ministre de l’Industrie et un nouveau directeur de projet, les conditions étaient remplies pour avoir un progrès considérable. Concernant d’autres projets, du progrès a été accompli tant en clôturant d’anciens projets qu’en préparant de nouveaux projets pour approbation par la Commission. »

103   Le Tribunal considère que le remplacement de la mention standard initiale « suffisant » par la nouvelle mention standard « bien » correspond correctement au commentaire précité. En effet, le commentaire ne souligne pas seulement le caractère problématique du programme de modernisation industrielle, mais aussi le fait que le requérant n’a pas su tirer profit de la nomination d’un nouveau ministre et d’un nouveau directeur de projet. Compte tenu de ces éléments nuancés, la mention standard « bien » reflète correctement ledit commentaire.

104   En second lieu, s’agissant de l’argument tiré de la différence existant entre le REC litigieux et le REC établi pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2003, il y a lieu de le rejeter comme inopérant, dès lors qu’il se réfère à une période d’évaluation différente.

105   Par ailleurs, à supposer que le requérant entende faire valoir que la différence existant entre le REC litigieux et le REC établi pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2003 révèle l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation, il n’en demeure pas moins, comme le fait observer à bon droit la défenderesse, que les meilleurs résultats obtenus par le requérant pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2003 peuvent simplement traduire l’amélioration des aptitudes professionnelles du requérant.

106   Étant donné que chacun des arguments formulés par le requérant dans le cadre du présent moyen doit être rejeté, il convient d’écarter le présent moyen dans son intégralité et de le rejeter comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du devoir de sollicitude

 Arguments des parties

107   Le requérant rappelle que le devoir de sollicitude reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l’autorité publique et les agents du service public. Ce devoir implique, notamment, que l’AIPN prenne en considération, lorsqu’elle se prononce sur la situation d’un fonctionnaire, l’ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné (arrêt du Tribunal du 6 juillet 1999, Séché/Commission, T‑112/96 et T‑115/96, RecFP p. I‑A‑115 et II‑623, points 147 et 148).

108   Le requérant prétend que le fait que sa note du 16 mai 2003, demandant la saisine du CPE-SE, n’a pas été jointe au REC ni à son dossier individuel aurait empêché l’évaluateur d’appel et le CPE-SE de prendre position sur les éléments de fond contenus dans cette note. Le requérant prétend, en outre, que l’évaluateur d’appel aurait dû s’interroger sur la réalité des avis sollicités. Enfin, le requérant prétend que le CPE-SE s’est limité à constater strictement l’incohérence entre les commentaires figurant à la section 6.1 du REC et la notation attribuée. Cet état de fait aurait empêché l’évaluateur d’appel et le CPE-SE de tenir compte de l’intérêt du requérant, de sorte que le devoir de sollicitude aurait été violé.

109   Pour autant que le présent moyen ne se confonde pas avec celui tiré de la violation des droits de la défense, la défenderesse estime que l’affirmation selon laquelle le CPE-SE et l’évaluateur d’appel n’ont pas pu prendre position par rapport à la note du 16 mai 2003 manque en fait. En effet, en application de l’article 7, paragraphe 6, des DGE, le validateur aurait bien transmis la note du 16 mai 2003 au CPE-SE.

110   En ce qui concerne le prétendu devoir de l’évaluateur d’appel de s’interroger sur la réalité des avis sollicités, la défenderesse fait valoir que cette argumentation se confond avec le moyen tiré de la violation des garanties de procédure.

111   Enfin, en ce qui concerne le fait que le CPE-SE se serait limité à constater l’incohérence entre les commentaires figurant à la section 6.1 du REC et la notation attribuée, la défenderesse rappelle que l’article 8, paragraphe 5, des DGE prévoit clairement que le CPE ne peut se substituer aux évaluateurs en ce qui concerne l’appréciation du travail du fonctionnaire noté, qu’il s’assure que le rapport a été établi équitablement, objectivement et conformément aux normes d’évaluation habituelles, vérifie également que les procédures ont été correctement suivies et, à cet effet, procède aux consultations utiles. En l’occurrence, le CPE-SE aurait été régulièrement saisi. Il aurait, par ailleurs, procédé à l’examen du REC du requérant et aurait vérifié la cohérence entre les commentaires des évaluateurs et les notations chiffrées correspondantes. Le fait qu’il a recommandé dans son avis d’augmenter la notation du requérant au titre de la rubrique « Rendement », afin de la mettre en conformité avec les commentaires, démontrerait qu’il a rempli le rôle lui incombant en vertu des DGE.

 Appréciation du Tribunal

112   Dans le cadre du présent moyen, le requérant soutient en substance que l’absence de classement dans son dossier personnel de la note du 16 mai 2003 n’a pas permis au CPE ni à l’évaluateur d’appel de prendre position par rapport aux éléments formulés dans cette note.

113   En ce qui concerne tout d’abord l’impossibilité pour l’évaluateur d’appel de tenir compte de ladite note, il convient de constater que cet argument se confond avec la première branche du premier moyen. Par conséquent, il suffit d’y renvoyer dans le cadre du présent moyen.

114   En revanche, dans la mesure où, par ce moyen, le requérant fait valoir que l’absence de classement dans son dossier personnel de la note du 16 mai 2003 n’a pas permis au CPE de prendre position sur les éléments formulés dans cette note, il convient de noter que l’affirmation du requérant manque en fait. En effet, le validateur a bien transmis au CPE-SE la note du 16 mai 2003 (voir point 14 ci-dessus). Au demeurant, sans cette note, le CPE-SE n’aurait pas pu être valablement saisi, dès lors que l’article 7, paragraphe 6, des DGE exige pour une telle saisine que les intéressés indiquent par écrit les motifs de leur requête.

115   Par conséquent, il convient d’écarter le présent moyen dans son intégralité et de le rejeter comme non fondé.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation du principe de bonne administration

 Arguments des parties

116   Se prévalant de la violation du principe de bonne administration, le requérant prétend qu’une synthèse des griefs formulés par la requête démontre, d’une manière générale, que la Commission a agi en méconnaissance de plusieurs règles et principes ayant pour elle force obligatoire, à savoir les droits de la défense du requérant, les principes d’impartialité et d’équité dans le traitement du dossier par les différentes instances de notation, l’obligation de motivation des décisions de l’AIPN et l’obligation de traiter ledit dossier dans des délais raisonnables.

117   Puisque la défenderesse estime que ce moyen se confond avec l’ensemble des arguments développés par le requérant dans le cadre des autres moyens, elle renvoie à ses commentaires développés dans le cadre de ces moyens.

 Appréciation du Tribunal

118   S’agissant des arguments tirés de la violation des droits de la défense du requérant, des principes d’impartialité et d’équité dans le traitement du dossier par les différentes instances de notation et de l’obligation de motivation des décisions de l’AIPN, le Tribunal relève que ces arguments se confondent avec les autres moyens invoqués, tel que le premier moyen, tiré de la violation des droits de la défense, le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation, et le quatrième moyen, tiré de la violation du devoir de sollicitude, lesquels ont déjà été rejetés.

119   S’agissant de l’obligation de traiter ledit dossier dans des délais raisonnables, le Tribunal rappelle qu’il est de jurisprudence constante qu’un rapport de notation ne peut être annulé, sauf circonstances exceptionnelles, pour la seule raison qu’il a été établi tardivement. Si le retard dans l’établissement d’un rapport de notation est susceptible d’ouvrir un droit à réparation au profit du fonctionnaire concerné, ce retard ne saurait affecter la validité du rapport de notation ni, par conséquent, en justifier l’annulation (voir arrêt den Hamer/Commission, précité, point 32, et la jurisprudence citée).

120   Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter les conclusions en annulation du requérant dans leur intégralité, sans qu’il soit besoin d’ordonner la production du rapport d’inspection demandée par le requérant, étant donné que le Tribunal a pu utilement statuer sur le recours sur la base des conclusions, moyens et arguments développés en cours d’instance et au vu des annexes déposées par les parties (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 septembre 2001, E/Commission, T‑152/00, RecFP p. I‑A‑179 et II‑813, point 86).

 Sur les conclusions en indemnité

 Arguments des parties

121   Le requérant prétend, en premier lieu, avoir subi un préjudice moral, qu’il évalue à 5 000 euros, du fait de l’établissement tardif de son REC. En effet, puisque l’évaluation aurait pris fin le 31 mars 2004 par la décision de l’AIPN rejetant la réclamation du requérant, elle aurait eu une durée de quinze mois. Une telle durée serait manifestement excessive, et ce d’autant plus qu’aucun des délais requis pour la procédure d’évaluation n’aurait été respecté en l’espèce.

122   Le requérant prétend, en deuxième lieu, avoir subi un préjudice moral, qu’il évalue à l’euro symbolique, à la suite de faits de harcèlement dont il aurait été la victime. Constitueraient des actes de harcèlement moral, premièrement, l’affectation à un emploi différent de celui pour lequel il a été nommé, deuxièmement, le placement sous les ordres d’un fonctionnaire de grade moins élevé et, troisièmement, la fixation d’objectifs impossibles à réaliser.

123   Le requérant prétend, en troisième lieu, que les actes attaqués lui ont occasionné un préjudice matériel. En effet, il prétend avoir subi ce préjudice à la suite de la renonciation à son affectation en Égypte et aux avantages s’y rapportant. Ce préjudice, évalué à 49 467 euros, s’établirait comme suit : d’une part, un manque à gagner de 27 975 euros représenté par la perte de la prime pour l’affectation en délégation, d’autre part, un manque à gagner de 21 492 euros correspondant à la perte de loyer résultant de la résiliation prématurée de la location de la maison individuelle du requérant à Bruxelles.

124   Le requérant prétend, en quatrième lieu, que les actes attaqués ont également engendré chez lui un préjudice professionnel. Il affirme avoir subi ce préjudice à la suite de l’attribution de la note de 11 points sur 20, compte tenu du fait que cette note restera toujours indiquée comme note initiale dans le système informatique de gestion du personnel. Par conséquent, compte tenu de la valeur moyenne fixée en matière de notation, le maintien de ladite note aurait constitué et constituerait toujours un élément de perte de chance objectif pour toute évolution de carrière du requérant. En effet, à l’occasion de ses postulations récentes, le requérant se serait vu notifier systématiquement une réponse négative, sans véritable perspective de promotion. Le REC litigieux rendrait toute perspective de promotion du requérant impossible, lui causant ainsi un préjudice professionnel sous forme d’une perte de chance dans l’évolution de sa carrière ainsi que d’une atteinte à son droit légitime à la promotion. Le préjudice est évalué de façon forfaitaire à 10 000 euros.

125   En premier lieu, en ce qui concerne le préjudice moral causé par le retard dans l’établissement du REC, la défenderesse estime que la procédure d’évaluation n’a pas été close par la décision de rejet du 31 mars 2004, mais par l’intervention de l’évaluateur d’appel le 2 juillet 2003. Après avoir rappelé les termes de l’arrêt de la Cour du 5 mai 1983, Ditterich/Commission (207/81, Rec. p. 1359, point 25), selon lesquels l’administration dispose d’un délai raisonnable pour la rédaction du rapport de notation et tout dépassement de ce délai doit être justifié par l’existence de circonstances particulières, la défenderesse affirme que, compte tenu des difficultés spécifiques de la première mise en œuvre du nouveau système d’évaluation dans le service extérieur, la clôture du 2 juillet 2003 est intervenue dans un délai raisonnable. En tout état de cause, dans la mesure où le requérant n’indique pas la nature du préjudice moral qu’il aurait subi du fait du retard dans l’établissement de son REC, la condition de la réalité du préjudice ferait défaut.

126   En deuxième lieu, en ce qui concerne le préjudice moral causé par un harcèlement moral, la défenderesse estime que la demande d’indemnité présentée au titre du prétendu harcèlement moral est irrecevable, en raison du fait que ce grief n’a pas été soulevé par le requérant dans le cadre de sa réclamation préalable, au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut. À titre subsidiaire, cette demande ne serait pas fondée, puisque les allégations du requérant ne seraient pas étayées par des éléments de preuve. Par ailleurs, les faits allégués n’établiraient pas que le requérant a subi un comportement qui aurait visé, objectivement, à le discréditer, ou à dégrader délibérément ses conditions de travail (arrêts du Tribunal du 23 février 2001, De Nicola/BEI, T‑7/98, T‑208/98 et T‑109/99, RecFP p. I‑A‑49 et II‑185, point 286, et du 8 juillet 2004, Schochaert/Conseil, T‑136/03, Rec. p. I‑A‑215 et II‑957, point 41). En tout état de cause, la demande ne serait pas fondée, puisque le requérant aurait omis de demander à l’administration de lui prêter assistance, ce qui serait prévu par l’article 24 du statut.

127   En troisième lieu, en ce qui concerne le préjudice matériel subi à la suite de la renonciation du requérant à son affectation en Égypte, la défenderesse rappelle, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante en matière de fonction publique, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées soit comme irrecevables, soit comme non fondées (arrêt du Tribunal du 30 septembre 2003, Martínez Valls/Parlement, T‑214/02, RecFP p. I‑A‑229 et II‑1117, point 43). En l’occurrence, la demande en indemnité devrait donc être rejetée en raison de son lien étroit avec la demande en annulation. À titre subsidiaire, la défenderesse relève qu’aucun lien de causalité n’existe entre les dommages allégués au titre du préjudice matériel et la prétendue illégalité de l’acte. En effet, la perte de la prime de délégation et la perte de loyer seraient dues au départ anticipé du requérant de la délégation, lequel serait intervenu de sa propre initiative. La défenderesse estime que la perte de la prime pour affectation en délégation ne peut en aucun cas lui être imputée, puisque cette prime est une indemnité destinée à compenser l’éloignement géographique. Il en irait de même pour la perte de loyer, puisque aucun fait n’obligeait le requérant à louer sa maison ou, par la suite, à rompre le contrat de bail.

128   En quatrième lieu, en ce qui concerne le préjudice professionnel prétendument occasionné par la sauvegarde, dans la version informatique du REC, de la note initiale de 11 points sur 20, la défenderesse estime, tout d’abord, que la demande en indemnité doit être rejetée en raison de son lien étroit avec la demande en annulation. La défenderesse fait ensuite remarquer que la notation globale du REC est de 12 points sur 20 et que, par conséquent, en faisant état d’une notation de 11 points sur 20, l’argument du requérant comporte une inexactitude. Par ailleurs, l’argument serait purement spéculatif, puisque dénué de preuve. Ensuite, même si le REC avait joué un rôle dans le cadre de ces refus, ceux-ci seraient tout à fait justifiés, puisque le REC est légal. Enfin, même si le REC était illégal, l’absence de promotion ne pourrait occasionner de préjudice indemnisable, étant donné que les possibilités d’avancement seraient trop incertaines et que, par conséquent, il serait impossible de déterminer de manière concrète les possibilités d’avancement du requérant.

 Appréciation du Tribunal

129   Les articles 90 et 91 du statut subordonnent la recevabilité du recours contentieux introduit par un fonctionnaire contre l’institution à laquelle il appartient à la condition de principe d’un déroulement régulier de la procédure administrative préalable qu’ils instituent. Ces règles sont d’ordre public et les parties ne peuvent s’y soustraire. Selon l’article 113 de son règlement de procédure, le Tribunal peut à tout moment examiner d’office les fins de non-recevoir d’ordre public (arrêt du Tribunal du 6 novembre 1997, Liao/Conseil, T‑15/96, RecFP p. I‑A‑329 et II‑897, point 54).

130   À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 91, paragraphe 2, du statut, un recours ne peut être introduit devant le Tribunal que si l’AIPN a été préalablement saisie d’une réclamation au sens de l’article 90, paragraphe 2, du statut, dans le délai qui y est prévu, et si cette réclamation a fait l’objet d’une décision explicite ou implicite de rejet. L’article 90, paragraphe 2, du statut prévoit que l’AIPN peut être saisie d’une réclamation dirigée contre un acte faisant grief au fonctionnaire, soit que l’AIPN ait pris une décision, soit qu’elle se soit abstenue de prendre une mesure imposée par le statut. Un acte faisant grief peut consister, entre autre, dans le rejet, implicite ou explicite, d’une demande préalable adressée par le fonctionnaire à l’AIPN conformément à l’article 90, paragraphe 1, du statut.

131   Il s’ensuit que la procédure précontentieuse exigée par le statut est différente selon que le dommage allégué par le fonctionnaire trouve ou non son origine dans un acte faisant grief au sens du statut.

132   Si le fonctionnaire veut contester un acte lui faisant grief, il peut saisir l’AIPN directement d’une réclamation et, ensuite, introduire un recours devant le Tribunal si sa réclamation est rejetée. Il est de jurisprudence constante que, à la suite du rejet d’une réclamation contre un acte faisant grief, un fonctionnaire peut introduire un recours dans lequel il demande l’annulation de l’acte faisant grief, le versement d’une indemnité, ou les deux (arrêt de la Cour du 22 octobre 1975, Meyer-Burckhardt/Commission, 9/75, Rec. p. 1171, points 10 et 11 ; arrêts du Tribunal du 8 octobre 1992, Meskens/Parlement, T-84/91, Rec. p. II‑2335, point 42, et du 1er décembre 1994, Schneider/Commission, T‑54/92, RecFP p. I‑A‑281 et II‑887, point 52). Dans certains cas, dont la contestation du contenu d’un rapport de notation ou d’une décision d’un jury de concours, aucune procédure précontentieuse n’est requise (arrêt du Tribunal du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T‑1/91, Rec. p. II‑2145, points 23 et 24).

133   En revanche, si le dommage allégué par le fonctionnaire ne résulte pas d’un acte faisant grief au sens du statut, il ne peut entamer la procédure qu’en introduisant auprès de l’AIPN une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, dont le rejet éventuel constituera une décision lui faisant grief contre laquelle il pourra introduire une réclamation, laquelle pourra, le cas échéant, faire l’objet d’un recours en annulation et/ou d’un recours en indemnité (ordonnances du Tribunal du 25 février 1992, Marcato/Commission, T‑64/91, Rec. p. II‑243, points 32 à 34, et du 22 mai 1992, Moat/Commission, T‑72/91, Rec. p. II‑1771, points 40 et 41 ; arrêts du Tribunal Della Pietra/Commission, précité, point 34 ; du 8 juin 1993, Fiorani/Parlement, T-50/92, Rec. p. II-555, points 40 à 41 et 45 à 46 ; du 15 juillet 1993, Camera-Lampitelli/Commission, T‑27/92, Rec. p. II‑873, point 26, et du 12 janvier 1994, White/Commission, T‑65/91, RecFP p.  I-A-9 et II‑23, point 137).

134   Il s’ensuit que, lorsqu’un fonctionnaire demande à être indemnisé à la suite d’un préjudice qu’il estime avoir subi en l’absence d’acte faisant grief, il doit, en principe, suivre une procédure précontentieuse en deux étapes, à savoir la présentation d’une demande et, ensuite, le cas échéant, l’introduction d’une réclamation, conformément à l’article 90, paragraphes 1 et 2, du statut.

135   Or, en l’espèce, force est de constater qu’aucun des trois premiers chefs des conclusions indemnitaires, fondés respectivement sur l’établissement tardif du REC, sur le harcèlement moral ainsi que sur le fait que le requérant a renoncé à son affectation en Égypte, ne trouve son origine dans un acte faisant grief pouvant faire l’objet du recours en annulation. En ce qui concerne plus particulièrement la demande indemnitaire pour le préjudice subi à la suite de l’établissement tardif du REC, il convient de noter qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le retard dans l’établissement d’un rapport de notation ne constitue pas un acte faisant grief, mais a toujours été caractérisé comme une faute de service (voir arrêts de la Cour du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, Rec. p. 1743, point 14, et Ditterich/Commission, précité, points 27 et 28 ; arrêt du Tribunal du 1er décembre 1994, Ditterich/Commission, T‑79/92, RecFP p. I‑A‑289 et II‑907, point 66, et la jurisprudence citée). Il résulte de ce qui précède que, s’agissant de ces trois chefs de conclusions, lesdites conclusions indemnitaires auraient dû être précédées d’une procédure précontentieuse en deux étapes.

136   Par conséquent, en l’absence de procédure précontentieuse en deux étapes, entamée préalablement à l’introduction desdites conclusions indemnitaires, ces dernières doivent être rejetées comme irrecevables.

137   En revanche, en ce qui concerne la demande indemnitaire visant à la réparation du préjudice professionnel prétendument occasionné par la sauvegarde, dans la version informatique du REC, de la note initiale de 11 points sur 20, il y a lieu de constater que cette demande, dans la mesure où elle met en cause la forme sous laquelle le REC se présente, se fonde sur une prétendue illégalité de l’acte faisant grief. Le recours en annulation et la présente demande indemnitaire étant dirigés contre le même acte faisant grief, le lien direct entre les deux actions a été établi à suffisance de droit. Il s’ensuit que la présente demande indemnitaire est recevable, même en l’absence de procédure précontentieuse particulière.

138   Quant au fond, il convient toutefois de relever que la seule circonstance que le REC litigieux fait apparaître la note initiale de 11 points sur 20 n’est pas en soi de nature à causer au requérant le préjudice professionnel allégué, dès lors qu’il ressort clairement du même REC que la note finale, qui est la seule à prendre en considération pour l’appréciation des mérites du requérant en vue de l’évolution de sa carrière, est de 12 points sur 20. Par conséquent, il y a lieu de déclarer la présente demande indemnitaire non fondée.

139   En conséquence, il convient de rejeter l’intégralité des conclusions en indemnité du requérant et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

140   Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de décider que chaque partie supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.


Vilaras

Martins Ribeiro

Jürimäe

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

      M. Vilaras


* Langue de procédure : le français.