Language of document : ECLI:EU:T:2019:93

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

14 février 2019 (*)

«  Fonction publique – Assistants parlementaires accrédités – Congé de maladie – Congé de maladie passé en dehors du lieu d’affectation – Absence irrégulière – Article 60 du statut – Devoir de diligence – Principe de bonne administration »

Dans l’affaire T‑91/17,

L, assistant parlementaire accrédité du Parlement européen, représenté par Me I. Coutant Peyre, avocat,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par Mmes M. Windisch et Í. Ní Riagáin Düro, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 270 TFUE et tendant à l’annulation de la décision du Parlement européen du 31 août 2016 concernant certaines absences non autorisées du requérant,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de M. S. Gervasoni, président, Mme K. Kowalik‑Bańczyk et M. C. Mac Eochaidh (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 22 mai 2014, le requérant, L, a été recruté par l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’« AHCC ») du Parlement européen en qualité d’assistant parlementaire accrédité (ci-après « APA ») placé auprès d’un membre de cette institution (ci-après le « député »), au titre d’un contrat expirant à la fin de la législature 2014/2019, avec Bruxelles (Belgique) en tant que lieu d’affectation.

2        Le 1er août 2016, le requérant a adressé au service de gestion des absences médicales du Parlement (ci-après le « service des absences médicales »), un certificat médical, établi à Bruxelles, pour la période allant du 30 juillet au 7 août 2016.

3        Le 8 août 2016, en fin d’après-midi, le requérant a adressé au service des absences médicales un nouveau certificat médical, établi le même jour en [confidentiel], pour la période allant du 8 au 12 août 2016.

4        Le même jour, quelques minutes après cet envoi, le service des absences médicales a fait parvenir au requérant, par courriel, un accusé de réception standard l’invitant à préciser l’adresse où il pouvait être contacté durant ce congé de maladie. Cette réponse standard était accompagnée d’une copie de la décision du secrétaire général du Parlement du 12 septembre 2014 portant règles internes relatives aux contrôles des absences au travail et aux contrôles périodiques de la persistance des invalidités (ci-après les « règles internes en matière d’absences médicales »).

5        Le même jour, quelques minutes après avoir reçu le courriel mentionné au point 4 ci-dessus, le requérant a indiqué, par courriel, au service des absences médicales son adresse en [confidentiel], son numéro de téléphone ainsi que la date prévue de son prochain contrôle médical.

6        Selon le Parlement, le 9 août 2016, le service des absences médicales a demandé, par courriel, au requérant s’il avait obtenu l’autorisation préalable de la part de l’AHCC de quitter son lieu d’affectation pour passer son congé de maladie à [confidentiel]. Le requérant conteste avoir reçu un tel courriel.

7        Deux autres certificats médicaux, établis en [confidentiel] et couvrant respectivement la période du 13 au 17 août 2016 et celle du 18 au 22 août 2016, ont ensuite été envoyés par le requérant au service des absences médicales.

8        Par décision en date du 26 août 2016 (ci-après la « décision du 26 août 2016 »), sur le fondement de l’article 60 du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), le Parlement a considéré que la période d’absences comprise entre le 8 et le 22 août 2016 était réputée injustifiée dans la mesure où le requérant n’avait pas obtenu l’autorisation préalable de l’AHCC de passer son congé de maladie dans un lieu autre que son lieu d’affectation. Par conséquent, en vertu de cette décision, la période d’absences comprise entre le 8 et le 22 août 2016 devait être imputée sur la durée du congé annuel du requérant ou, le cas échéant, être déduite de sa rémunération en cas d’épuisement de ce congé. Cette décision a été adressée au requérant par courriel et par lettre recommandée.

9        Le même jour, le requérant a contesté la décision du 26 août 2016 par le biais de deux courriels transmis au service des absences médicales.

10      Le requérant a adressé ensuite au service des absences médicales deux nouveaux certificats médicaux, établis en [confidentiel], couvrant ses absences du 23 au 27 août 2016 et du 28 août au 2 septembre 2016.

11      Le 30 août 2016, le requérant a adressé un nouveau certificat médical, établi à Bruxelles, pour la période allant du 28 août au 4 septembre 2016.

12      Par décision en date du 31 août 2016, le Parlement a considéré que l’absence du requérant au titre de la période allant du 28 août au 4 septembre 2016, attestée par le dernier certificat médical établi en Belgique, était justifiée. Le Parlement a en revanche considéré, dans le cadre de cette décision, que l’absence du requérant au titre de la période allant du 23 au 27 août 2016 était irrégulière au regard de l’article 60 du statut dans la mesure où le requérant n’avait pas obtenu l’autorisation préalable de l’AHCC de passer son congé de maladie dans un lieu autre que son lieu d’affectation.

13      Le 29 septembre 2016, le requérant a introduit une réclamation dirigée contre la décision du 31 août 2016 et celle du 26 août 2016, au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

14      Par décision du 8 février 2017, le secrétaire général du Parlement a rejeté cette réclamation comme non fondée.

 Procédure et conclusions des parties

15      Par demande enregistrée le 30 janvier 2017 au greffe du Tribunal, le requérant a demandé à bénéficier de l’aide juridictionnelle, aide qui lui a été accordée par ordonnance du président du Tribunal du 19 octobre 2017.

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 novembre 2017, le requérant a introduit le présent recours.

17      Saisi de la demande du requérant, sur le fondement de l’article 66 du règlement de procédure du Tribunal, tendant au bénéfice de l’anonymat et à l’omission de certaines données le concernant envers le public, le Tribunal a fait droit à cette demande.

18      Les parties n’ayant pas demandé la tenue d’une audience de plaidoiries au titre de l’article 106, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal (neuvième chambre), s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier de l’affaire, a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure.

19      Dans la requête, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision du 31 août 2016.

20      Dans la réplique, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de condamner le Parlement à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de réparation du préjudice moral subi du fait des violations du droit de l’Union européenne à son égard.

21       Le Parlement conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable et, en tout état de cause, non fondé ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

 Sur les conclusions en annulation

 Sur la fin de non-recevoir soulevée par le Parlement

22      Dans le cadre de son mémoire en défense, le Parlement soulève une fin de non-recevoir reposant sur trois motifs.

23      En premier lieu, le Parlement fait valoir que le requérant n’a pas précisé suffisamment clairement dans la requête si la décision du 26 août 2016 faisait ou non partie de l’objet du recours.

24      En deuxième lieu, le Parlement affirme que le requérant a probablement commis une erreur de frappe en précisant au point 1 de la requête que le congé de maladie portait sur la période allant du 23 juin 2016 au 27 juin 2016, alors qu’il souhaitait vraisemblablement évoquer la période allant du 23 août 2016 au 27 août 2016. Le Parlement précise que cette erreur a été reproduite dans plusieurs points de la requête ainsi que dans la réclamation. Dès lors, le Parlement fait valoir que le recours manque en clarté et en exhaustivité, en violation de l’article 76, paragraphe d), du règlement de procédure.

25      En troisième lieu, le Parlement affirme que la décision du 31 août 2016 ne ferait pas grief au requérant en ce qu’elle requalifie la période allant du 28 août 2016 au 4 septembre 2016 en congé de maladie justifié au regard du certificat médical établi en Belgique et que, par conséquent, le recours dirigé contre la décision du 31 août 2016 serait recevable uniquement en ce que cette décision qualifie d’injustifiée l’absence du requérant au titre de la période allant du 23 août 2016 au 27 août 2016.

26      Le requérant conteste l’argumentation du Parlement.

27      S’agissant, en premier lieu, de l’argument du Parlement portant sur l’absence de clarté de l’objet du recours, il est vrai qu’il ressort du point 53 de la requête que le requérant conclut que les décisions du 26 août 2016 et du 31 août 2016 devraient être annulées, ce qui pourrait signifier que le requérant entend attaquer ces deux décisions. Néanmoins, il ressort clairement de la présentation de l’objet du recours figurant sur la première page de la requête, du point 1 et de la partie intitulée « 3.Conclusion » de la requête que seule la décision du 31 août 2016 fait l’objet du recours.

28      S’agissant, en deuxième lieu, de l’argument du Parlement relatif aux erreurs de frappe portant sur les dates d’un congé de maladie, il apparaît que, bien qu’elles aient été réitérées à plusieurs reprises dans la requête, ces erreurs n’ont pas fait obstacle à une compréhension des arguments du requérant par le Parlement, car il peut être déduit des éléments factuels figurant dans la requête que, à chaque fois que le requérant mentionnait la période allant du 23 juin 2016 au 27 juin 2016, il entendait évoquer la période allant du 23 août 2016 au 27 août 2016. À cet égard, le fait même que le Parlement évoque des « erreurs de frappe » indique qu’il a identifié les erreurs en question.

29      S’agissant, en troisième lieu, de l’argument du Parlement relatif au fait qu’une partie de la décision du 31 août 2016 ne ferait pas grief au requérant et qu’il ne serait donc pas recevable à demander l’annulation de cette partie de la décision, il convient de rappeler que selon une jurisprudence constante, un recours en annulation n’est recevable que dans la mesure où le requérant a un intérêt à voir annuler l’acte attaqué. Un tel intérêt suppose que l’annulation de cet acte soit susceptible, par elle-même, d’avoir des conséquences juridiques pour l’intéressé ou, en d’autres termes, que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt du 24 avril 2017, HF/Parlement, T‑584/16, EU:T:2017:282, point 76 et jurisprudence citée). Or, il est vrai que le requérant n’a pas un intérêt à voir annuler la décision du 31 août 2016 en ce qu’elle qualifie de congé de maladie justifié la période allant du 28 août 2016 au 4 septembre 2016.

30      Il découle des considérations précédentes que le recours tendant à l’annulation de la décision du 31 août 2016 n’est recevable qu’en tant que cette décision qualifie d’absence injustifiée la période allant du 23 août 2016 au 27 août 2016 (ci-après la « décision attaquée »).

  Sur le fond

31      À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant soulève deux moyens, tirés, le premier, de la protection des lanceurs d’alerte et, le second, de la violation de l’obligation de diligence et du principe de bonne administration.

–       Sur le premier moyen, tiré de la protection des lanceurs d’alerte

32      Dans le cadre de son premier moyen, le requérant fait valoir que le député l’a menacé de mort dans la mesure où le requérant a collaboré, en tant que témoin, à plusieurs enquêtes pénales entreprises par les autorités [confidentiel] et par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), visant des faits de corruption et de détournement de fonds européens dans lesquels serait impliqué ledit député.

33      À cet égard, le requérant mentionne qu’il est tombé malade du fait du stress psychologique induit par ses relations difficiles avec le député et qu’il a dû précipitamment quitter Bruxelles, son lieu d’affectation, pour [confidentiel], le 7 août 2016, afin que le député ne puisse attenter à sa vie dans la mesure où celui-ci ne souhaitait pas revenir en [confidentiel], de peur d’y être arrêté et incarcéré.

34      Le requérant fait valoir que le Parlement a violé le droit de l’Union et le droit [confidentiel] relatifs à la protection des lanceurs d’alerte et des témoins dans les procédures pénales en déclarant injustifiée son absence allant du 23 août au 27 août 2016.

35      De plus, le requérant affirme, au stade de la réplique, que ses absences non justifiées seraient liées au fait que le Parlement n’aurait pas répondu à la demande d’assistance qu’il avait déposée concernant des faits de harcèlement moral du député à son égard.

36      Le Parlement conteste cette argumentation.

37      Selon l’article 60, premier alinéa, du statut, applicable par analogie aux APA en vertu de l’article 131, paragraphe 5, du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA »), sauf en cas de maladie ou d’accident, le fonctionnaire ne peut s’absenter sans y avoir été préalablement autorisé par son supérieur hiérarchique. De plus, en vertu de l’article 60, second alinéa, du statut, lorsqu’un fonctionnaire désire aller passer son congé de maladie dans un lieu autre que celui de son affectation, il est tenu d’obtenir préalablement l’autorisation de son supérieur hiérarchique. Aux termes de l’article 60, premier alinéa, du statut, toute absence irrégulière dûment constatée est imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé. En cas d’épuisement de ce congé, le fonctionnaire perd le bénéfice de sa rémunération pour la période correspondante.

38      Par ailleurs, selon l’article 2, paragraphe 9, second alinéa, des règles internes en matière d’absences médicales, applicable aux APA en vertu de l’article 1er desdites règles internes, le fonctionnaire qui souhaite quitter son lieu d’affectation pour passer son congé de maladie dans un autre endroit est tenu de demander l’autorisation préalable de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN »), conformément à l’article 60, second alinéa, du statut.

39      De même, selon l’article 3 des règles internes en matière d’absences médicales, intitulé « Absence irrégulière », applicable aux APA en vertu de l’article 1er des mêmes règles internes, l’absence est considérée comme étant irrégulière au sens de l’article 60, premier alinéa, du statut, lorsque notamment le fonctionnaire enfreint les dispositions de l’article 2 des règles internes en matière d’absences médicales. L’absence irrégulière est constatée par une décision de l’AIPN, notifiée au fonctionnaire.

40      En premier lieu, comme cela est exposé aux points 2 à 11 ci-dessus, il convient de constater que le requérant a bénéficié de congés de maladie couvrant la période allant du 30 juillet 2016 au 4 septembre 2016 et qu’il a passé ces congés de maladie tout d’abord à Bruxelles, son lieu d’affectation, du 30 juillet 2016 au 7 août 2016, puis à [confidentiel] du 7 août 2016 au 28 août 2016, puis à Bruxelles du 28 août 2016 au 4 septembre 2016.

41      En deuxième lieu, il apparaît que le requérant n’a pas reçu l’autorisation de l’AHCC, conformément à l’article 60, second alinéa, du statut et à l’article 2, paragraphe 9, des règles internes en matière d’absences médicales, de passer son congé de maladie dans un lieu autre que son lieu d’affectation, en l’occurrence Bruxelles, préalablement à son départ pour [confidentiel]. Cet élément factuel n’est pas contesté par le requérant.

42      En troisième lieu, le requérant reconnaît lui-même, au point 39 de la requête, qu’après être revenu à Bruxelles le 28 août 2016, il a demandé l’autorisation à l’AHCC de repartir en [confidentiel] afin d’y passer son congé de maladie. Il peut en être déduit que rien ne s’opposait à ce que le requérant obtienne cette autorisation préalable avant son premier départ pour la [confidentiel].

43      C’est donc à bon droit que, en application de l’article 60, premier alinéa, du statut et de l’article 3 des règles internes en matière d’absences médicales, le Parlement a considéré que l’absence pour raison médicale du requérant portant sur la période du 23 août 2016 au 27 août 2016 devait être considérée comme étant irrégulière et qu’elle devait être imputée sur la durée du congé annuel de l’intéressé ou, en cas d’épuisement de ce congé, que le requérant perde le bénéfice de sa rémunération pour la période correspondante.

44      Pareille conclusion n’est pas contredite par la circonstance que le requérant est susceptible d’être considéré comme un lanceur d’alerte ou un témoin dans les enquêtes mentionnées au point 32 ci-dessus.

45      Certes, il est vrai que, en vertu de l’article 22 bis, paragraphe 1, du statut, applicable par analogie aux APA en vertu de l’article 127 du RAA, tout fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, a connaissance de faits qui peuvent laisser présumer une activité illégale éventuelle, notamment une fraude ou une corruption préjudiciable aux intérêts de l’Union en informe immédiatement son supérieur hiérarchique direct ou son directeur général ou encore s’il le juge utile, le secrétaire général, ou toute personne de rang équivalent, ou directement l’OLAF, cette disposition s’appliquant par ailleurs en cas de manquement grave à une obligation similaire commis par un membre d’une institution. Il est également vrai que, en vertu de l’article 22 bis, paragraphe 3, le fonctionnaire ayant communiqué cette information ne subit aucun préjudice de la part de l’institution, pour autant qu’il ait agi de bonne foi.

46      Toutefois, il convient de souligner que ces dispositions statutaires visant à protéger les fonctionnaires qui sont témoins d’activités illégales préjudiciables aux intérêts de l’Union ne leur confèrent pas une immunité les autorisant à violer leurs obligations statutaires, telles que l’obligation d’obtenir une autorisation de l’AIPN avant de passer un congé de maladie dans un autre lieu que le lieu d’affectation.

47      L’argument du requérant tiré de la violation du droit de l’Union relatif à la protection des lanceurs d’alerte et des témoins doit donc être écarté.

48      De même, s’agissant de l’argument tiré de la violation de la législation [confidentiel], il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour statuer sur les litiges en matière de fonction publique pour lesquels il est compétent, le juge de l’Union applique uniquement le droit de la fonction publique de l’Union et non un quelconque droit national, de sorte que les références faites à un droit national sont dépourvues de toute pertinence (voir ordonnance du 3 juillet 2017, De Nicola/BEI, T‑666/16 P, non publiée, EU:T:2017:476, point 14 et jurisprudence citée).

49      L’argument du requérant tiré de la violation du droit [confidentiel] doit donc être écarté.

50      Enfin, s’agissant de l’argument du requérant, développé au stade de la réplique, selon lequel ses absences non justifiées seraient liées au fait que le Parlement n’aurait pas répondu à la demande d’assistance qu’il avait déposée concernant des faits de harcèlement moral du député à son égard, il convient de constater que, à supposer que le 9 mai 2016, le requérant ait effectivement, au titre de l’article 90, paragraphe 1, et de l’article 24 du statut, introduit auprès de l’AHCC une demande d’assistance, au motif qu’il aurait fait l’objet de la part du député d’un harcèlement moral, au sens de l’article 12 bis du statut, applicable par analogie aux APA en vertu de l’article 127 du RAA, l’éventuelle décision implicite de rejet qui serait intervenue ne faisant pas partie de l’objet du présent recours, délimité au stade de la requête et rappelé au point 27 ci-dessus, il n’appartient pas au Tribunal de statuer sur cette prétendue décision. En tout état de cause, ni le dépôt de la demande d’assistance mentionnée ci-dessus, ni la décision de rejet de cette demande, à supposer qu’elle soit intervenue, n’exonérait le requérant de son obligation de demander à l’AHCC l’autorisation préalable de passer son congé de maladie en [confidentiel], conformément à l’article 60, second alinéa, du statut. Cet argument doit donc être rejeté.

51      Il découle des considérations précédentes que le premier moyen doit être rejeté.

–       Sur le second moyen, tiré de la violation de l’obligation de diligence et du principe de bonne administration

52      Le requérant invoque, dans le cadre de son second moyen, une violation de l’obligation de diligence et du principe de bonne administration.

53      En premier lieu, le requérant affirme qu’il a passé le dimanche 7 août 2016 en [confidentiel] et qu’il aurait pu revenir à Bruxelles dès ce jour-là si son état de santé s’était amélioré et si le député et d’autres « criminels » avaient été arrêtés ou n’avaient pas été à Bruxelles dès ce soir-là.

54      En second lieu, le requérant reproche au Parlement de ne pas l’avoir prévenu qu’une autorisation était nécessaire pour passer son congé de maladie en [confidentiel]. Ainsi, selon le requérant, le Parlement aurait manqué de diligence à son égard, alors que le requérant estime avoir été prêt à « coopérer » avec le Parlement.

55      Le Parlement conteste cette argumentation.

56      Il résulte d’une jurisprudence constante que les fonctionnaires et les autres agents sont censés connaître le statut et les règles internes applicables au personnel de leur institution, organisme ou organe de l’Union, de sorte que leur prétendue ignorance des obligations leur incombant à ce titre ne saurait être constitutive de bonne foi (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 19 mai 1999, Connolly/Commission, T‑34/96 et T‑163/96, EU:T:1999:102, point 168 et jurisprudence citée).

57      À cet égard, il convient de constater que l’obligation d’obtenir une autorisation avant de passer un congé de maladie dans un lieu autre que le lieu d’affectation figure à l’article 60 du statut, ainsi qu’à l’article 2, paragraphe 9, des règles internes en matière d’absences médicales, comme cela est relevé aux points 37 à 38 ci-dessus. Nul manquement à son obligation de diligence et au principe de bonne administration ne peut, dès lors, être reproché au Parlement, ce constat étant d’autant plus pertinent que le requérant est juriste de formation et qu’il est donc, à ce titre, formé à lire et à comprendre les textes réglementaires.

58      En tout état de cause, force est de constater que, le 8 août 2016, le Parlement a transmis au requérant une copie des règles internes en matière d’absences médicales dans le cadre d’un courriel de réponse à l’envoi du certificat médical établi en [confidentiel], comme cela a été relevé au point 4 ci-dessus. Le requérant a, d’ailleurs, pris connaissance, le même jour, de ce courriel dans la mesure où il lui a apporté une réponse par le biais d’un autre courriel, comme cela a été relevé au point 5 ci-dessus.

59      Le second argument présenté par le requérant au soutien du moyen tiré de ce que le Parlement aurait violé son obligation de diligence et le principe de bonne administration doit donc être rejeté comme non fondé.

60      S’agissant de l’argument tiré du fait que le requérant serait revenu à Bruxelles dès le 7 août 2016 si son état de santé s’était amélioré ou si le député ou les « criminels » avaient été arrêtés ou s’étaient trouvés hors de Bruxelles, il suffit de constater que ces éléments, à les supposer établis, ne relèvent pas du comportement du Parlement et qu’il n’y a donc pas lieu de les lui reprocher.

61      Enfin, s’agissant de l’argument du requérant, selon lequel il aurait été fondé à consulter un médecin en [confidentiel], où il se trouvait déjà, dans le but d’obtenir un certificat médical, conformément à l’article 60, premier alinéa, du statut, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76, point d), du règlement de procédure, la requête doit contenir l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Or, force est de constater que cet argument, tiré d’une violation de l’article 60, premier alinéa, du statut, ne figure pas dans la requête, mais est avancé, pour la première fois, au stade de la réplique. En tout état de cause, comme cela a été décrit aux points 2, 33 et 37 ci-dessus, il n’est pas contesté que le requérant a obtenu un certificat médical, établi à Bruxelles, son lieu d’affectation, mentionnant que le congé de maladie en question couvrait la période du 30 juillet au 7 août 2016 et qu’il a quitté son lieu d’affectation le 7 août 2016, alors que, en vertu de l’article 60, second alinéa, du statut, il devait demander l’autorisation préalable à l’AHCC de quitter son lieu d’affectation pour effectuer son congé de maladie dans un autre lieu que son lieu d’affectation. À cet égard, l’argument selon lequel, étant en [confidentiel] le 7 août 2016, il était autorisé à se rendre chez un médecin en [confidentiel] le 8 août 2016 ne s’oppose pas au fait qu’il aurait dû demander l’autorisation préalable susmentionnée. Partant, l’argument doit être rejeté comme irrecevable, à titre principal, et comme inopérant, à titre surabondant.

62      Il convient, en conséquence, de rejeter le moyen tiré de la violation de l’obligation de diligence et du principe de bonne administration et, partant, les conclusions en annulation dans leur totalité.

 Sur les conclusions en indemnité

63      Dans le cadre de la réplique, le requérant demande l’octroi de dommages et intérêts évalués ex æquo et bono à la somme de 100 000 euros afin de réparer le préjudice moral que lui a occasionné le comportement fautif du Parlement. En particulier, le requérant souligne que les violations du droit de l’Union commises par le Parlement ont engendré des difficultés au plan psychologique.

64      En outre, le requérant se réfère à son licenciement et soutient que celui-ci a nui à sa réputation et que toutes ses tentatives pour trouver un nouvel emploi dans les institutions de l’Union ont échoué. En particulier, le requérant affirme que la note au sujet de son licenciement ainsi que toutes les circonstances s’y rapportant figurent dans son dossier personnel, ce qui le rendrait inemployable.

65      Le Parlement conteste cette argumentation.

66      L’ensemble des moyens invoqués au soutien des conclusions en annulation ayant été écarté, il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions en indemnité pour autant que le préjudice allégué résulterait de la décision attaquée (voir arrêt du 30 septembre 2003, Martínez Valls/Parlement, T‑214/02, EU:T:2003:254, point 43 et jurisprudence citée).

67      Il y a lieu de préciser que la présente affaire ne relève pas de l’hypothèse dans laquelle le Tribunal, tout en ayant constaté l’existence d’une faute de service, ne prononcerait pas l’annulation de la décision attaquée, mais, sur le fondement de sa compétence de pleine juridiction dans les litiges pécuniaires en matière de fonction publique, condamnerait néanmoins d’office la partie défenderesse au paiement d’une indemnité pour le préjudice causé par sa faute (arrêt du 5 juin 1980, Oberthür/Commission, 24/79, EU:C:1980:145, points 11 à 14 ; voir, également, arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C‑583/08 P, EU:C:2010:287, points 44 et 51 et jurisprudence citée).

68      S’agissant d’éventuels préjudices ne résultant pas de la décision attaquée, mais de fautes ou d’omissions prétendument commises par l’administration, le requérant n’indique pas qu’il aurait introduit à cet égard une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut. Ses conclusions doivent donc être rejetées comme irrecevables (arrêt du 31 mai 2005, Dionyssopoulou/Conseil, T‑284/02, EU:T:2005:188, point 72).

69      S’agissant enfin d’éventuels préjudices ne résultant pas de la décision attaquée, mais d’autres décisions dont le requérant n’a pas demandé l’annulation dans sa requête, notamment la décision de le licencier, à laquelle il fait référence dans la réplique, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 76 du règlement de procédure, la partie requérante a l’obligation de définir l’objet du litige et de présenter ses conclusions dans l’acte introductif d’instance. Si l’article 84, paragraphe 2, du même règlement permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à saisir le Tribunal de conclusions nouvelles et à modifier ainsi l’objet du litige (voir arrêt du 13 juillet 2018, PS/BEI, T‑612/16, non publié, EU:T:2018:483, point 38 et jurisprudence citée). Étant donné que les conclusions en indemnité ont été introduites au stade de la réplique et non au stade de la requête et qu’elles dépassent l’objet du litige, ainsi défini dans celle-ci, il y a lieu, à défaut d’éléments de droit et de fait révélés pendant la phase écrite de la procédure susceptibles de justifier une modification de cet objet, de les rejeter comme irrecevables.

70      Partant, il y a lieu de rejeter le recours dans sa totalité.

 Sur les dépens

71      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      L est condamné aux dépens.

Gervasoni

Kowalik-Bańczyk

Mac Eochaidh

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 février 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.