Language of document : ECLI:EU:T:2021:523

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

1er septembre 2021 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative the DoubleF – Marque de l’Union européenne verbale antérieure THE DOUBLE – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Public pertinent – Similitude des produits – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑23/20,

FF IP Srl, établie à Mantoue (Italie), représentée par Me M. Locatelli, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme M. Capostagno, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Seven SpA, établie à Leinì (Italie), représentée par Mes D. Sindico et E. Tonello, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 31 octobre 2019 (affaire R 2588/2018-1), relative à une procédure d’opposition entre Seven et FF IP,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, Z. Csehi (rapporteur) et Mme G. Steinfatt, juges,

greffier : Mme A. Juhász-Tóth, administratrice,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 15 janvier 2020,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 6 avril 2020,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 2 avril 2020,

à la suite de l’audience du 18 mai 2021,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 25 août 2016, EFFEGI Srl a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1) tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 18 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies et parasols ; cannes ; fouets et sellerie ; habits pour animaux de compagnie ; anneaux pour parapluies ; arçons de selles ; articles de sellerie ; étuis à clés ; attaches de selles ; bandoulières en cuir ; bourrellerie ; bâtons d’alpinistes ; cannes ; cannes de parapluies ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette ; malles ; coffres de voyage ; sacs ; écharpes pour porter les bébés ; sacs de sport ; bourses de mailles ; sacoches à outils vides ; bourses ; sacs à main ; nécessaires de voyage en cuir ; rênes ; carnassières ; serviettes (maroquinerie) ; cartables ; carton-cuir ; caisses en cuir ou en carton-cuir ; têtière ; sangles de cuir ; colliers pour animaux ; colliers de chevaux ; couvertures en peaux ; couvertures de chevaux ; cordons en cuir ; lanières de cuir ; courroies de harnais ; lanières pour patins à roulettes ; cuir brut ou mi- ouvré ; fers à cheval ; fils en cuir ; similicuir ; fourreaux de parapluies ; fouets ; genouillères pour chevaux ; gaines de ressorts en cuir ; housses de selles d’équitation ; garnitures de cuir pour meubles ; garnitures de harnachement ; laisses ; similicuir ; poignées de cannes ; poignées de parapluies ; poignées de valises ; porte-bébés pour enfants ; sacs kangourou [porte-bébés] ; mors en cuir pour animaux ; muselières ; parasols ; œillères pour chevaux ; housses de pluie ; peaux d’animaux ; peaux corroyées ; peaux de chamois, autres que pour le nettoyage ; fourrures (peaux d’animaux) ; baudruche ; pièces en caoutchouc pour étriers ; portefeuilles ; longes de présentation ; filets à provisions ; revêtements de meubles en cuir ; havresacs ; sacs à porter ; sacs pour 1’emballage (en cuir) ; sacs de campeurs ; sacs de plage ; sacs de voyages ; sacs d’alpinistes ; sacs à provisions ; boîtes en cuir ou en carton-cuir ; boîtes en fibre vulcanisée ; boîtes à chapeaux en cuir ; croupons ; cannes-sièges ; selles pour chevaux ; étriers ; étrivières ; baleines pour parapluies ou parasols ; armatures de parapluies ou de parasols ; carcasses de sacs à main ; valises, mallettes, mallettes pour documents ; sacs-housses pour vêtements pour le voyage ; valves en cuir ; sacs à dos ».

–        classe 35 : « Services de commerce électronique via un site Web de commerce électronique d’articles de maroquinerie, de sacs, de malles, de valises, de parapluies, de produits et d’accessoires pour animaux et pour leur transport ; services comportant la sélection pour la vente, pour le compte de tiers, d’articles de maroquinerie, de sacs, de malles, de valises, de parapluies, de produits et d’accessoires pour animaux et pour leur transport ; services de vente par le biais de points de vente au détail et en gros d’articles de maroquinerie et de sacs ; catalogues de vente par correspondance ou par voies électroniques tels que des sites Web d’articles de maroquinerie et de sacs ».

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne no 18/2017, du 27 janvier 2017.

5        Le 27 avril 2017, l’intervenante, Seven SpA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 tel que modifié par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2015 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne verbale antérieure THE DOUBLE, déposée le 16 juillet 2008 et enregistrée le 28 janvier 2009 sous le numéro 7070981 pour les produits relevant de la classe 18 et correspondant à la description suivante : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes, peaux d’animaux ; malles et valises ; parapluies, parasols et cannes ; fouets et sellerie ; mallettes pour documents ; sacs à dos ; sacs de sport ; bandoulières en cuir ; sacs de plage ; porte-documents ; porte-cartes [portefeuilles] ; bourses de mailles ; habits pour animaux de compagnie ; colliers pour animaux ; couvertures pour animaux ; colliers pour chiens ; carnassières ; carcasses de sacs à main ; sacs à main ; havresacs ; bandoulières en cuir ; bandoulières en cuir ; porte-musique ; muselières ; filets à provisions ; portefeuilles ; bourses ; sacs à dos ; cartables ; cartables ; sacs pour faire les courses ; bandoulières [courroies] en cuir ; porte-bébés pour enfants; lanières pour patins à roulettes ; poignées de valises ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette dits “ vanity cases ” ; cabas à roulettes ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 tel que modifié [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

8        Le 19 juillet 2017, la demande de marque a été transférée à la requérante, FF IP Srl.

9        Le 19 janvier 2018, la requérante a demandé à ce que l’intervenante apporte la preuve de l’usage de la marque antérieure en application de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001.

10      Le 26 mars 2018, l’intervenante a présenté des preuves d’usage.

11      Le 29 octobre 2018, la division d’opposition a examiné les preuves de l’usage soumises et a conclu que l’usage sérieux de la marque antérieure avait été prouvé en ce qui concernait les produits suivants relevant de la classe 18 : « Sacs à dos, cartables, sacs, sacs à bandoulière ». Elle a alors accueilli partiellement l’opposition s’agissant de certains produits relevant de la classe 18 et de certains services relevant de la classe 35 et a accueilli la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les produits et services restants compris dans ces mêmes classes.

12      Le 28 décembre 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition.

13      Par décision du 31 octobre 2019 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a rejeté le recours.

14      La chambre de recours a, au préalable, indiqué que le recours était circonscrit aux produits et aux services pour lesquels l’opposition avait été déclarée fondée par la division d’opposition, soit les produits et les services relevant des classes 18 et 35 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Malles et valises, étuis à clés ; bandoulières en cuir ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette ; malles ; coffres de voyage ; sacs ; sacs de sport ; bourses de mailles ; sacoches à outils vides ; bourses ; sacs à main ; nécessaires de voyage en cuir ; carnassières ; serviettes (maroquinerie) ; cartables ; portefeuilles ; havresacs ; sacs à porter ; sacs pour l’emballage (en cuir) ; sacs de campeurs ; sacs de plage ; sacs de voyage ; sacs d’alpinistes ; sacs à provisions ; valises ; mallettes ; mallettes pour documents ; sacs-housses pour vêtements pour le voyage ; sacs à dos » ;

–        classe 35 : « Services de commerce électronique via un site Web de commerce électronique d’articles de maroquinerie, de sacs ; services comportant la sélection pour la vente, pour le compte de tiers, d’articles de maroquinerie, de sacs ; services de vente par le biais de points de vente au détail et en gros d’articles de maroquinerie et de sacs ; catalogues de vente par correspondance ou par voies électroniques tels que des sites Web d’articles de maroquinerie et de sacs ».

15      S’agissant de la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, la chambre de recours a confirmé la conclusion de la division d’opposition selon laquelle la marque antérieure avait été utilisée à l’égard d’une partie seulement des produits pour lesquels elle avait été enregistrée, à savoir les « sacs à dos, cartables, sacs, sacs à bandoulières », relevant de la classe 18.

16      S’agissant de l’appréciation relative au risque de confusion, premièrement, la chambre de recours a estimé que les produits et les services en cause étaient destinés à la fois au grand public doté d’un niveau d’attention moyen, et, en ce qui concerne les services de commercialisation en gros relevant de la classe 35, aux professionnels dotés d’un niveau d’attention plus élevé en raison de leur professionnalisme. Elle a également souligné que le territoire à prendre en considération était celui de l’Union européenne étant donné que la marque antérieure était une marque de l’Union européenne. Deuxièmement, les produits en cause ont été considérés comme étant soit identiques, soit très similaires, soit similaires à un moindre degré, aux produits pour lesquels la marque antérieure devait être considérée comme enregistrée. Les services en cause ont été considérés comme complémentaires des produits pour lesquels la marque antérieure devait être considérée comme enregistrée, et donc comme similaires auxdits produits. Troisièmement, les marques en conflit ont été considérées comme similaires à un degré élevé sur le plan visuel et similaires à un degré élevé, voire même supérieur, sur le plan phonétique. Sur le plan conceptuel, les marques en conflit ont été considérées comme similaires à un degré très élevé, atteignant presque l’identité. Quatrièmement, un degré de distinctivité allant de « moyen-faible » à moyen a été attribué à la marque antérieure. Cinquièmement, compte tenu des éléments énumérés ci-dessus, le niveau d’attention du public pertinent pouvant être défini comme moyen, la chambre de recours a estimé que les différences entre les signes, même remarquées par le public pertinent, n’étaient pas suffisantes pour exclure l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001.

 Conclusions des parties

17      Dans la requête, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        déclarer que la marque demandée peut être enregistrée comme marque de l’Union européenne pour tous les produits relevant des classes 18 et 35 tels qu’indiqués dans la demande d’enregistrement no 15780001 ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

18      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

19      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        confirmer la décision attaquée et, par conséquent, refuser l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 18 et les services relevant de la classe 35 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

20      Lors de l’audience, la requérante s’est désistée de son deuxième chef de conclusions et a renoncé aux annexes 9 et 10 de la requête, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience.

 En droit

  Sur ledeuxième chef de conclusions de l’intervenante

21      Dans son deuxième chef de conclusions, l’intervenante demande au Tribunal de confirmer la décision attaquée. Or, il convient de relever que le chef de conclusions visant à la confirmation de la décision attaquée équivaut à demander le rejet du recours et se confond avec ce dernier chef de conclusions [voir arrêt du 17 janvier 2018, Deichmann/EUIPO – Munich (Représentation d’une croix sur le côté d’une chaussure de sport), T‑68/16, EU:T:2018:7, point 21 et jurisprudence citée].

22      Dans ce deuxième chef de conclusions, l’intervenante demande également au Tribunal de refuser l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant de la classe 18 et les services relevant de la classe 35 visés dans la demande d’enregistrement.

23      Il convient de relever que, par cette demande, l’intervenante conclut à ce que le Tribunal réforme la décision attaquée en ce sens que la marque demandée ne soit pas enregistrée.

24      À cet égard, le Tribunal est, certes, compétent, en vertu de l’article 72, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, pour réformer la décision de la chambre de recours. Cela étant, ce pouvoir de réformation vise à ce que le Tribunal adopte la décision que la chambre de recours aurait dû prendre, conformément aux dispositions du règlement 2017/1001, ce qui implique que la recevabilité d’une demande en réformation doit être appréciée au regard des compétences qui sont conférées à ladite chambre de recours [voir arrêt du 18 octobre 2016, Raimund Schmitt Verpachtungsgesellschaft/EUIPO (Brauwelt), T‑56/15, EU:T:2016:618, point 12 et jurisprudence citée]. Or, il convient de relever que, dans le cadre d’un recours introduit à l’encontre d’une décision de l’examinateur ou de la division d’opposition, conformément à l’article 66, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, une chambre de recours ne peut être amenée à se prononcer, au regard des compétences qui lui sont conférées à l’article 71, paragraphe 1, du même règlement, que sur certaines des conditions d’enregistrement de la marque de l’Union européenne, à savoir soit sur la conformité de la demande d’enregistrement aux dispositions dudit règlement, soit sur le sort de l’opposition dont celle-ci peut faire l’objet [ordonnance du 30 juin 2009, Securvita/OHMI (Natur-Aktien-Index), T‑285/08, EU:T:2009:230, point 21].

25      Dès lors, la chambre de recours n’est pas compétente pour connaître d’une demande visant à ce qu’elle refuse l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne. Partant, il n’appartient pas davantage au Tribunal de connaître d’une demande de réformation visant à ce qu’il modifie la décision d’une chambre de recours en ce sens (voir, par analogie, s’agissant d’une demande d’enregistrement, arrêt du 18 octobre 2016, Brauwelt, T‑56/15, EU:T:2016:618, point 13 et jurisprudence citée).

26      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter cette demande de réformation de la décision de la chambre de recours comme étant portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

 Sur la détermination du droit applicable

27      Il convient de relever, premièrement, que la demande d’enregistrement est intervenue le 25 août 2016 sous l’empire du règlement no 207/2009, dans sa version modifiée par le règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement no 207/2009 et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21).

28      Deuxièmement, la décision de la division d’opposition et la décision attaquée, qui ont été rendues respectivement le 29 octobre 2018 et le 31 octobre 2019, sont intervenues sous l’empire du règlement 2017/1001. La chambre de recours, en tant qu’elle mentionne le « RMUE », et la requérante se réfèrent respectivement dans la décision attaquée et la requête aux dispositions du règlement 2017/1001 et notamment à l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement.

29      Or, d’une part, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur, à la différence des règles de fond qui sont habituellement interprétées comme ne visant des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur que dans la mesure où il ressort clairement de leurs termes, de leur finalité ou de leur économie qu’un tel effet doit leur être attribué [voir arrêt du 6 juin 2019, Torrefazione Caffe’ Michele Battista/EUIPO – Battista Nino Caffè (BATTISTINO), T‑221/18, non publié, EU:T:2019:382, point 19 et jurisprudence citée]. D’autre part, la date pertinente aux fins de la détermination du droit matériel applicable est la date d’introduction de la demande d’enregistrement (voir, en ce sens, arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory, C‑328/18 P, EU:C:2020:156, point 2).

30      En conséquence, dès lors qu’il ne ressort ni des termes, ni de la finalité, ni de l’économie des règles de fond pertinentes du règlement 2017/1001 qu’elles ont vocation à s’appliquer à des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur, le présent litige est régi, sur le fond, par les dispositions du règlement no 207/2009, dans sa version modifiée par le règlement 2015/2424.

31      Il est vrai que tant la chambre de recours, dans la décision attaquée, en tant qu’elle mentionne le « RMUE », que la requérante, dans ses écritures, semblent se référer aux dispositions du règlement 2017/1001. Néanmoins, d’une part, les références au règlement 2017/1001 peuvent être comprises comme renvoyant aux dispositions correspondantes du règlement no 207/2009, sans que cela n’affecte la légalité de la décision attaquée (voir, par analogie, arrêt du 6 juin 2019, BATTISTINO, T‑221/18, non publié, EU:T:2019:382, point 22), étant donné que le contenu de ces dernières dispositions n’a pas été affecté par l’entrée en vigueur du règlement 2017/1001. D’autre part, le Tribunal doit, selon la jurisprudence, interpréter les écritures des parties par leur substance plutôt que par leur qualification (voir, par analogie, arrêt du 6 juin 2019, BATTISTINO, T‑221/18, non publié, EU:T:2019:382, point 23 et jurisprudence citée).

32      Partant, il y a lieu de considérer que le moyen invoqué par la requérante est tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, dans sa version modifiée par le règlement 2015/2424.

 Sur le moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

33      À titre liminaire, il convient de souligner, à l’instar de l’EUIPO, que la requérante ne remet pas en cause l’appréciation de la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. Dès lors, le Tribunal examinera le présent recours en se fondant sur le constat de la division d’opposition et de la chambre de recours selon lequel la marque antérieure a été utilisée pour les produits suivants relevant de la classe 18 : « Sacs à dos, cartables, sacs, sacs à bandoulière ».

34      La requérante soulève, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 tel que modifié, qui se divise en quatre branches. En premier lieu, elle fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation du public pertinent. En deuxième lieu, elle fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur dans la comparaison des produits et des services couverts par les marques en conflit. En troisième lieu, elle prétend que la chambre de recours a erronément constaté un degré élevé de similitude visuelle et phonétique et un degré très élevé de similitude conceptuelle, voire une quasi-identité, entre les marques en conflit. En quatrième lieu, elle prétend que la chambre de recours aurait dû constater un caractère distinctif faible de la marque antérieure et exclure un risque de confusion.

35      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 tel que modifié, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

36      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

37      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 tel que modifié, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

38      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 tel que modifié existe dans une partie de l’Union [voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 76 et jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent et son niveau d’attention

39      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée]. Le public pertinent pour l’appréciation du risque de confusion est constitué des utilisateurs susceptibles d’utiliser tant les produits ou les services visés par la marque antérieure que ceux visés par la marque demandée [arrêt du 24 mai 2011, ancotel/OHMI – Acotel (ancotel.), T‑408/09, non publié, EU:T:2011:241, point 38].

40      Aux points 60 à 64 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que le territoire à examiner correspondait à celui de l’Union dans son ensemble étant donné que la marque antérieure était une marque de l’Union européenne, et que le public à prendre en considération était celui auquel les produits et les services couverts par les marques en conflit étaient destinés. Elle a également relevé que les produits et les services couverts par les marques en conflit étaient, en général, des objets à usage personnel, destinés à contenir et à transporter des objets, tels que des valises, des sacs, des porte-documents, des serviettes ainsi que les services liés à leur commercialisation.

41      La chambre de recours en a conclu que, ainsi que la division d’opposition l’avait affirmé, les services et les produits étaient destinés à la fois au grand public doté d’un niveau d’attention moyen et, en ce qui concerne les services de commercialisation en gros relevant de la classe 35, à une clientèle professionnelle doté d’un niveau d’attention plus élevé en raison de son professionnalisme.

42      La requérante fait valoir que le public pertinent est celui des produits et des services visés par la marque demandée, constitué de personnes ayant des connaissances et des compétences spécifiques dans le secteur de la haute couture et des marques de luxe, dont le niveau d’attention doit être considéré comme supérieur à celui du consommateur moyen.

43      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

44      En premier lieu, concernant les produits relevant de la classe 18, la requérante fait valoir que la référence au grand public est erronée, puisqu’il n’existerait pas, en réalité, de public commun aux produits visés par les marques en conflit. À cet égard, elle fait valoir que les produits couverts par la marque antérieure sont destinés à des enfants et à de très jeunes élèves, ainsi qu’en attesteraient les preuves de l’usage de la marque antérieure, et que leur prix n’est pas très élevé. À l’opposé, les produits couverts par la marque demandée seraient destinés à des adultes achetant des produits de luxe, possédant des connaissances et des compétences spécifiques dans le secteur de la haute couture et des marques de luxe, et donc particulièrement attentifs en raison desdites connaissances. Bien qu’elle estime peu probable que ces acheteurs de produits de luxe achètent également les produits couverts par la marque antérieure, elle considère qu’ils sont les seules personnes susceptibles d’acheter à la fois les produits visés par la marque demandée et ceux pour lesquels la marque antérieure est utilisée, et constituent donc le public pertinent à prendre en considération aux fins de l’appréciation du risque de confusion.

45      Premièrement, il y a lieu de rejeter l’allégation selon laquelle les produits de la marque antérieure ne seraient destinés qu’à des enfants et à de très jeunes élèves. En effet, dans le cadre de la procédure d’opposition, il y a lieu de prendre en compte le libellé des produits visés par les marques en conflit, et non les produits effectivement commercialisés sous ces marques [voir, en ce sens, arrêt du 7 avril 2016, Industrias Tomás Morcillo/EUIPO – Aucar Trailer (Polycart A Whole Cart Full of Benefits), T‑613/14, non publié, EU:T:2016:198, point 27 et jurisprudence citée]. En effet, les modalités particulières de commercialisation des produits ou des services en cause pouvant varier dans le temps et suivant la volonté du demandeur, elles ne sauraient être prises en compte aux fins de l’analyse prospective du risque de confusion. Ledit examen doit donc, en ce qui concerne les produits ou les services pour lesquels l’enregistrement d’une marque est demandé, être effectué au regard du libellé de la liste des produits ou des services pour lesquels l’enregistrement est demandé, tel qu’il figure dans la demande d’enregistrement ou, le cas échéant, tel qu’il a été limité dans la suite de la procédure (voir ordonnance du 14 avril 2016, KS Sports/EUIPO, C‑480/15 P, non publiée, EU:C:2016:266, point 57 et jurisprudence citée).

46      Selon l’analyse des preuves d’usage, qui n’est pas contestée, la marque antérieure a été utilisée pour une partie seulement des produits pour lesquels elle avait été enregistrée, à savoir pour des « sacs à dos, cartables, sacs, sacs à bandoulières ». Dès lors, le fait que les produits soient commercialisés principalement comme des articles scolaires ou le fait qu’ils soient bon marché relève des modalités particulières de commercialisation pouvant varier dans le temps et suivant la volonté de l’intervenante, et ne doit pas être pris en compte dans le cadre de l’analyse du risque de confusion.

47      Deuxièmement, s’agissant des produits visés par la demande d’enregistrement, tels que mentionnés au point 14 ci-dessus, eu égard à leur libellé large et à défaut d’autres précisions dans ledit libellé quant à leur gamme ou à leur prix, il y a lieu de constater qu’ils doivent être considérés comme des produits de consommation courante et comme s’adressant au grand public, qui n’est pas censé faire preuve d’un niveau d’attention particulièrement élevé à leur égard [voir arrêt du 14 décembre 2017, N & C Franchise/EUIPO – Eschenbach Optik (OJO sunglasses), T‑792/16, non publié, EU:T:2017:908, point 26 et jurisprudence citée]. Il ne ressort pas non plus de leur intitulé qu’ils présentent des caractéristiques objectives impliquant que le consommateur moyen n’en fasse l’acquisition au terme d’un examen particulièrement attentif (voir, en ce sens, arrêt du 12 janvier 2006, Ruiz-Picasso e.a./OHMI, C‑361/04 P, EU:C:2006:25, point 40).

48      L’argumentation selon laquelle les produits visés par la marque demandée ne s’adresseraient qu’à des amateurs de produits de luxe relève également des modalités particulières de commercialisation pouvant varier dans le temps et suivant la volonté de la requérante, et doit être rejetée en application de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus.

49      Troisièmement, il résulte de ce qui précède que l’argument selon lequel il n’existerait pas de public commun aux produits visés par les marques en conflit doit également être rejeté, étant donné que les produits visés par les marques en conflit s’adressent tous au grand public doté d’un niveau d’attention moyen, ainsi que l’a relevé la chambre de recours.

50      En second lieu, comme le relèvent à juste titre l’EUIPO et l’intervenante, la requérante ne conteste pas, dans la requête, l’analyse de la chambre de recours concernant le public pertinent des services relevant de la classe 35 visés par la marque demandée. En tout état de cause, il suffit de rappeler qu’en application de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus, un tel grief devrait être rejeté des lors qu’il ne ressort pas de la demande d’enregistrement que les services en cause sont liés à la haute couture et aux produits de luxe.

51      Lors de l’audience, la requérante a indiqué qu’elle contestait la définition du public pertinent des services relevant de la classe 35 au motif que celui-ci serait constitué le plus souvent de professionnels au niveau d’attention élevé.

52      Sans qu’il soit nécessaire d’examiner la recevabilité de cet argument, soulevé pour la première fois lors de l’audience, il y a lieu de constater qu’il est en tout état de cause inopérant, dès lors que la chambre de recours a considéré, à l’instar de la division d’opposition, en substance, que les services en cause étaient destinés à la fois au grand public doté d’un degré d’attention moyen et, en ce qui concerne certains services, à savoir les services de commercialisation en gros relevant de la classe 35, à une clientèle professionnelle dotée d’un niveau d’attention plus élevé en raison de son professionnalisme.

53      S’agissant des services de commerce électronique via un site Web de commerce électronique d’articles de maroquinerie, de sacs, de malles, de valises, de parapluies, de produits et d’accessoires pour animaux et pour leur transport ; des services comportant la sélection pour la vente, pour le compte de tiers, d’articles de maroquinerie, de sacs, de malles, de valises, de parapluies, de produits et d’accessoires pour animaux et pour leur transport ; des services de vente par le biais de points de vente au détail d’articles de maroquinerie et de sacs ; des catalogues de vente par correspondance ou par voies électroniques tels que des sites Web d’articles de maroquinerie et de sacs, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle les services de vente au détail s’adressent à la fois au consommateur final et au fabricant du produit ainsi qu’aux éventuels intermédiaires commerciaux agissant en amont de la vente au détail finale, en tant que services assurant à ces opérateurs économiques la partie ultime de la commercialisation dudit produit [arrêt du 26 juin 2014, Basic/OHMI – Repsol YPF (basic), T‑372/11, EU:T:2014:585, point 29 ; voir également, en ce sens, arrêt du 7 mars 2019, Laverana/EUIPO – Agroecopark (VERA GREEN), T‑106/18, non publié, EU:T:2019:143, point 30]. Or, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, s’agissant de l’appréciation du risque de confusion, le public ayant le niveau d’attention le moins élevé doit être pris en considération [voir arrêt du 20 mai 2014, Argo Group International Holdings/OHMI – Arisa Assurances (ARIS), T‑247/12, EU:T:2014:258, point 29 et jurisprudence citée]. S’agissant des services de vente en gros, la chambre de recours a expressément constaté que le public pertinent était constitué à la fois du grand public au niveau d’attention moyen et d’un public professionnel au niveau d’attention élevé.

54      Il ne peut donc pas être reproché à la chambre de recours d’avoir pris en compte le grand public au niveau d’attention moyen s’agissant des services relevant de la classe 35.

55      Il y a donc lieu de rejeter la première branche du moyen unique, relative au public pertinent.

 Sur la comparaison des produits

56      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 37 et jurisprudence citée].

57      Selon la jurisprudence, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, EU:T:2005:420, point 34 et jurisprudence citée].

58      La requérante considère en substance que les produits et les services en comparaison sont différents.

59      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

60      En premier lieu, il y a lieu de confirmer le constat d’identité s’agissant des « cartables », « sacs à dos » et « sacs » couverts par les marques en conflit, leurs intitulés étant identiques.

61      En deuxième lieu, il y a lieu de relever que, au point 66 de la décision attaquée, la chambre de recours a fait une application correcte de la jurisprudence évoquée au point 57 ci-dessus, en ce qu’ont été considérés comme identiques ou très similaires aux produits de la marque antérieure, notamment, les « sacs de sport ; bourses de mailles ; sacoches à outils vides ; bourses ; sacs à main ; bandoulières en cuir ; coffrets destinés à contenir des articles de toilette ; nécessaires de voyage en cuir ; serviettes (maroquinerie) ; carnassières ; havresacs ; sacs à porter ; sacs de campeurs ; sacs de plage ; sacs de voyage ; sacs d’alpinistes ; sacs à provisions ; mallettes pour documents » visés par la marque demandée. La chambre de recours a estimé que ces derniers produits correspondaient à des types de contenants compris dans les catégories plus vastes correspondant aux « sacs à dos, cartables, sacs, et sacs à bandoulières » pour lesquels la marque antérieure devait être considérée comme utilisée. Il y a lieu de constater que la requérante ne conteste pas spécifiquement ce raisonnement, au demeurant correct.

62      En troisième lieu, toujours au point 66 de la décision attaquée, la chambre de recours a ajouté que les produits mentionnés au point précédent avaient la même nature (contenants d’objets divers), la même taille approximative (moyenne ou petite), la même fonction (transporter des objets), le même mode d’usage (être tenus dans la main ou fixés sur le corps), et qu’il s’agissait donc de produits qui pouvaient intéresser les mêmes personnes. Au point 67 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté un degré de similitude moindre entre les produits pour lesquels la marque antérieure devait être considérée comme utilisée et les produits restants visés par la marque demandée, à savoir les « malles, mallettes, coffres de voyage », les « portefeuilles, étuis à clés », et les « sacs‑housses pour vêtements », au motif que, en raison de leur grande ou petite taille, ou de leur destination particulière, ces derniers produits étaient utilisés de manière légèrement différente.

63      Aucun des arguments de la requérante n’est de nature à infirmer ces constats, qui sont également corrects.

64      Premièrement, s’agissant de l’argument selon lequel la chambre de recours aurait erronément réduit tous les produits énumérés aux points 66 et 67 de la décision attaquée au seul dénominateur commun que constitue le fait qu’ils peuvent contenir des objets, il ressort desdits points que la chambre de recours ne s’est pas limitée à leur nature de contenants d’objets divers, mais au contraire, qu’elle a correctement examiné d’autres facteurs pertinents au sens de la jurisprudence citée au point 56 ci-dessus, à savoir leur destination, leur utilisation et leurs utilisateurs.

65      Deuxièmement, la requérante fait valoir une appréciation erronée de la nature, de la destination, ou de la relation de concurrence ou de complémentarité entre les produits en comparaison, au motif que les produits couverts par la marque antérieure auraient pour fonction de transporter des articles scolaires et seraient destinés à un public très jeune ; alors que, à l’inverse, la fonction naturelle des « bourses et portefeuilles » serait de contenir de l’argent, celle des « valises et malles » de transporter des vêtements et des objets, celle des « nécessaires de voyage en cuir » et de la « maroquinerie », de contenir de petits articles strictement nécessaires, et que ces articles seraient destinés à un public adulte presque exclusivement féminin.

66      Tout d’abord, il a déjà été rappelé dans le cadre de l’analyse du public pertinent ci-dessus, que les modalités de commercialisation particulières des produits et des services désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et, par nature subjectives, des titulaires des marques et qu’est sans pertinence dans ce contexte l’utilisation qu’entendent en faire les titulaires des marques en conflit (voir points 45 et 48 ci-dessus). Dès lors, il y a lieu de rejeter les arguments selon lesquels, d’une part, les produits de la marque demandée ne seraient destinés qu’à un public adulte presque exclusivement féminin, et, d’autre part, les produits pour lesquels la marque antérieure a été utilisée auraient pour fonction de transporter uniquement des articles scolaires et seraient seulement destinés à un public très jeune.

67      Ensuite, il y a lieu de relever qu’une telle argumentation visant des différences de nature et destination critique un raisonnement surabondant, à la fin du point 66 de la décision attaquée, et est donc inopérante, à tout le moins s’agissant des produits énumérés au point 66 de la décision attaquée. En effet, il convient de relever que, en tout état de cause, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au début dudit point 66 de la décision attaquée, que, notamment, les bourses, les nécessaires de voyage en cuir et les serviettes s’inséraient dans les catégories plus large des produits couverts par la marque antérieure.

68      Enfin, la chambre de recours a précisément estimé, au point 67 de la décision attaquée, que les malles, valises, coffres de voyages, portefeuilles, étuis à clés et sacs-housses pour vêtements présentaient un degré de similitude moindre avec les produits de la marque antérieure, au motif que, soit en raison de leur grande taille, soit de leur petite taille, soit de leur destination particulière, ils seront utilisés de manière légèrement différente. La chambre de recours a ajouté, au point 68 de la décision attaquée, que la différence de taille desdits produits, ou celle existant entre les objets transportés, pouvait affecter le degré de similitude, en ce qu’elle modifiait, par exemple, le mode d’usage, mais que de telles différences ne généraient pas, contrairement à ce que prétendait la requérante devant elle, une dissimilitude, dès lors que les autres facteurs pertinents, à savoir la nature, la destination, les canaux de distribution, restaient communs. Dès lors, elle a correctement pris en compte les différences dans le type d’objets transportés, notamment pour les portefeuilles, les valises, les malles et les malles de voyage, dans les modalités d’utilisation, ainsi que les spécificités de taille, tout en considérant à juste titre que ces légères différences n’étaient pas suffisantes pour infirmer le constat de similitude fondé sur la nature, la destination et les canaux de distribution. Ces deux points 67 et 68 de la décision attaquée se concilient donc pleinement.

69      Troisièmement, quant à l’argumentation de la requérante selon laquelle, d’une part, la classification des produits et des services au sens de l’arrangement de Nice est destinée uniquement à des fins administratives, et, d’autre part, des produits appartenant à des classes différentes peuvent être considérés comme similaires et des produits appartenant à une même classe peuvent être considérés comme différents, il y a lieu de la rejeter, dans la mesure où ce n’est pas en raison de leur insertion dans la même classe que les produits ont été considérés comme similaires par la chambre de recours. Cet argument relève donc d’une lecture erronée de la décision attaquée.

70      Quatrièmement, la requérante souligne que le Tribunal a affirmé, dans son arrêt du 4 octobre 2018, Asolo/EUIPO – Red Bull (FLÜGEL) (T‑150/17, EU:T:2018:641, point 81), qu’il ne saurait être considéré qu’une boisson alcoolique et une boisson énergisante sont similaires du seul fait qu’elles sont susceptibles d’être mélangées, consommées ou commercialisées ensemble, étant donné que la nature, la destination et l’utilisation de ces produits diffèrent. Force est toutefois de constater qu’il s’agissait, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, de produits différents de la présente espèce, et que la chambre de recours avait fondé son constat de similitude entre lesdites boissons sur la circonstance que celles-ci étaient souvent mélangées ou consommées ensemble, ce qui n’est pas transposable au cas d’espèce.

71      Cinquièmement, la requérante fait valoir que les canaux de distribution des produits en comparaison sont différents, au motif que les produits de la marque antérieure peuvent être achetés dans la grande distribution tandis que les produits visés par la marque demandée seraient vendus dans des magasins spécialisés du secteur de la haute couture.

72      Il convient de relever que cette argumentation découle de celle relative aux prétendues différences de public pertinent, qui a déjà été rejetée aux points 45 à 49 ci-dessus. Il y a donc lieu de la rejeter pour les mêmes motifs.

73      Sixièmement, ainsi que le souligne l’EUIPO, la référence de la requérante à une prétendue erreur relative à la complémentarité des produits énumérés est dénuée de pertinence, dans la mesure où la chambre de recours n’a fait application de ce critère, au point 69 de la décision attaquée, qu’en ce qui concerne la comparaison entre les services désignés par la marque demandée et les produits de la marque antérieure.

74      Dès lors, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la requérante et de confirmer la comparaison des produits effectuée par la chambre de recours.

75      En quatrième lieu, s’agissant des services, il convient de relever, à l’instar de l’EUIPO, que, dans son argumentation relative à une comparaison erronée des produits « et services » la requérante ne développe pas d’argumentation spécifique aux services visés par la marque demandée. Dès lors, même dans l’hypothèse où la requérante viserait également les services dans son argumentation, il conviendrait de la déclarer irrecevable, en ce qu’elle n’est pas suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours [voir, en ce sens, arrêt du 6 juin 2019, Rietze/EUIPO – Volkswagen (Véhicule VW Caddy), T‑192/18, EU:T:2019:379, point 53 et jurisprudence citée].

76      En tout état de cause, même si l’on devait comprendre le point 5.6 de la requête comme contestant la complémentarité entre les services de la marque demandée et les produits de la marque antérieure au motif qu’ils sont destinés à des publics différents, il conviendrait de rejeter cette argumentation. En effet, il ressort des points 50, 52, 54 et 55 ci-dessus que cette argumentation est erronée.

77      Il y a donc lieu de rejeter la deuxième branche du moyen unique, relative à la comparaison des produits et des services.

 Sur la comparaison des signes

78      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

79      Selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, EU:T:2007:264, point 98].

80      En l’espèce, sont en conflit, d’une part, la marque de l’Union européenne verbale antérieure THE DOUBLE et, d’autre part, la marque de l’Union européenne figurative demandée représentée au point 2 ci-dessus.

81      La requérante fait valoir, en substance, que les signes en conflit seraient différents sur les plans visuel, phonétique, et conceptuel.

82      L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

–       Sur le plan visuel

83      En l’espèce, sur le plan visuel, la chambre de recours a constaté que la marque demandée présentait un degré élevé de similitude avec la marque antérieure.

84      À cet égard, la requérante reproche en particulier à la chambre de recours d’avoir excessivement centré son examen sur l’élément verbal « double » ou « the double » et rappelle que, selon la jurisprudence, pour apprécier la similitude entre deux signes, il ne suffit pas d’examiner un seul élément d’une marque complexe, quand bien même il serait dominant, l’analyse devant porter sur la marque dans son ensemble. Elle fait également valoir que la marque demandée a une connotation graphique particulière car elle est constituée d’une structure à deux niveaux. Dans sa partie supérieure, en italiques et dans une police de petite taille, se trouve le mot « the » surmontant la lettre « o », et dans sa partie inférieure, figure le terme « doublef » dans lequel les lettres « d » et « f » sont en majuscules. La police de la marque demandée serait une police élégante avec empattement tandis que la marque antérieure serait écrite, dans les faits, dans une police linéale en lettres majuscules. Ainsi, l’impression d’ensemble laissée par la marque demandée dans la mémoire du public pertinent serait caractérisée par l’élégance et une structure à deux niveaux dont le cœur serait « doublef », qui apparaîtrait comme un élément unique, étant donné qu’il n’existe pas d’espace entre la lettre « f » et le terme « double ».

85      Premièrement, il y a lieu de rappeler que la circonstance selon laquelle une marque est composée exclusivement par la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé constitue une indication de la similitude entre ces deux marques [voir arrêt du 12 juillet 2019, Audimas/EUIPO – Audi (AUDIMAS), T‑467/18, non publié, EU:T:2019:513, point 50 et jurisprudence citée].

86      Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a fondé son appréciation de similitude élevée sur le plan visuel entre les marques, au point 70 de la décision attaquée, sur le fait que la marque demandée reproduisait la marque antérieure dans son intégralité, bien qu’avec un graphisme légèrement modifié et un élément supplémentaire constitué de la lettre « f ». La chambre de recours a constaté à juste titre, au point 71 de la décision attaquée, que le fait que la marque demandée reprenne l’inscription « the double », soit l’unique élément de la marque antérieure, suffisait pour générer une forte similitude, d’autant plus que les modifications apportées généraient un impact visuel limité.

87      Deuxièmement, il est vrai que l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

88      Toutefois, il y a lieu de relever que la chambre de recours ne s’est pas limitée à prendre en compte le seul élément « double » ou « the double », car elle a également pris en compte, au point 71 de la décision attaquée, les autres éléments de différences cités par la requérante. Elle a toutefois constaté qu’ils n’avaient qu’un impact visuel limité.

89      D’abord, la chambre de recours a noté que le principal changement résidait dans l’ajout de la lettre « f », mais que le fait d’être à la fin de l’élément verbal limitait son effet visuel. Ceci doit être confirmé au regard de la jurisprudence constante selon laquelle, en général, l’attention du consommateur est portée surtout sur le début du mot [voir, en ce sens, arrêts du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, EU:T:2004:79, point 83, et du 13 mai 2020, Pontinova/EUIPO – Ponti & Partners (pontinova), T‑76/19, non publié, EU:T:2020:198, point 51].

90      Ensuite, la chambre de recours a noté que l’autre modification consistait dans l’écriture de l’élément « the » en petites lettres au-dessus du mot « double ». Toutefois, la chambre de recours a estimé, à juste titre, qu’il s’agissait d’une différence mineure, car elle contribuait à faire ressortir le mot « double » qui représentait, en raison de sa taille, l’élément dominant de la marque antérieure. Après avoir détaillé ces différences, la chambre de recours a conclu à bon droit que ce qui attirait l’attention du public pertinent dans les deux marques en conflit était le mot « double » et que cette coïncidence déterminait l’existence d’un degré élevé de similitude visuelle.

91      Dès lors, il y a lieu de constater que la structure à deux niveaux, la police et la taille de caractères de la marque demandée ont également été prises en compte.

92      Troisièmement, le fait que l’impression d’ensemble émanant de la marque demandée serait caractérisée par une impression d’élégance n’est pas de nature à contrebalancer les similitudes entres les marques en conflit constituées de l’élément verbal commun « the double ».

93      À l’appui de son argumentation, la requérante cite deux arrêts dans lesquels il aurait été jugé que le fait que les signes en conflit contiennent des éléments verbaux similaires ne permettrait pas de conclure à une similitude visuelle entre les signes dès lors qu’existent, dans l’un d’eux, des éléments figuratifs ayant une configuration particulière et originale, de sorte que l’impression globale fournie par chaque signe soit différente. Elle cite, à cet égard, les arrêts du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO AIRE) (T‑156/01, EU:T:2003:198, point 74), et du 24 novembre 2005, Simonds Farsons Cisk/OHMI – Spa Monopole (KINJI by SPA) (T‑3/04, EU:T:2005:418, point 48). Toutefois, le raisonnement de ces arrêts n’est pas applicable aux faits de la présente espèce, dans la mesure où les éléments figuratifs de la marque demandée en l’espèce sont différents, où leur configuration ne saurait être qualifiée de « particulière et originale », et où cette configuration n’est pas susceptible d’aboutir à ce que l’impression visuelle globale émanant de chaque signe soit différente.

94      Quatrièmement, s’agissant de l’argument selon lequel l’élément verbal « doublef » de la marque demandée apparaîtrait au cœur de ladite marque comme un élément unique qui permettrait au public pertinent d’associer la marque demandée au titulaire de la marque ou à la raison sociale « FOLLI FOLLIE », il convient de le rejeter comme non pertinent aux fins de la comparaison visuelle des signes.

95      Enfin, la marque antérieure en question étant verbale, elle est susceptible d’être utilisée par son titulaire sous des représentations graphiques différentes. Rien ne s’oppose notamment à ce qu’elle soit présentée avec les mêmes caractères d’écriture que la marque demandée [voir arrêt du 29 janvier 2013, Müller/OHMI – Loncar (Sunless), T‑662/11, non publié, EU:T:2013:43, point 61 et jurisprudence citée].

96      Il résulte de ce qui précède que l’analyse de la chambre de recours a correctement pris en compte la marque demandée dans son ensemble et a conclu à bon droit à un degré élevé de similitude visuelle entre les signes en conflit.

–       Sur le plan phonétique

97      Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré que la similitude entre les signes en conflit était tout aussi élevée que la similitude sur le plan visuel, voire supérieure, puisque les différences graphiques ne pouvaient pas être prises en considération. Selon elle, la seule variation résidait dans la présence de la lettre « f » dans la marque demandée.

98      La requérante fait valoir, premièrement, que, indépendamment des différences de prononciation au sein de l’Union, les marques en cause seront prononcées de manière à ce que, s’agissant de la marque demandée, une désinence en « ɛf » soit marquée, en fin de mot, faisant entendre nettement la lettre « e », laquelle serait, à l’inverse, presque imperceptible dans la prononciation de la marque antérieure, de sorte qu’elle produira une impression complètement différente de celle produite par cette dernière.

99      L’argumentation qui précède doit être rejetée, dans la mesure où il s’agit d’une affirmation non étayée. En tout état de cause, une telle prononciation en fin de mot serait seulement de nature à, éventuellement, diminuer légèrement le degré de similitude phonétique entre les marques en conflit, mais en aucun cas à les rendre complètement différentes. En effet, il y a également lieu de prendre en compte le fait que le reste des marques en comparaison, et notamment leurs premières syllabes, seront prononcées de la même manière.

100    Deuxièmement, la requérante estime qu’il n’y a pas lieu d’accorder une grande importance à la similitude phonétique entre les deux marques dans la mesure où les produits qu’elles couvrent sont commercialisés de telle manière que, au moment de l’achat, le public pertinent perçoit les marques de manière visuelle. Dès lors, la chambre de recours aurait commis une erreur, au point 73 de la décision attaquée.

101    Au point 73 de la décision attaquée, la chambre de recours a seulement indiqué que, sur le plan phonétique, la similitude était tout aussi élevée, voire supérieure, à la similitude visuelle, puisqu’il ne fallait pas tenir compte des différences graphiques aux fins de la comparaison phonétique. Ce faisant, la chambre de recours n’a commis aucune erreur d’appréciation.

102    En tout état de cause, il convient de rappeler que la Cour a jugé que, afin d’apprécier le degré de similitude existant entre les signes en conflit, il y a lieu de déterminer leur degré de similitude visuelle, phonétique et conceptuelle et, le cas échéant, d’évaluer l’importance qu’il convient d’accorder à ces différents éléments, en tenant compte de la catégorie de produits ou de services en cause ou des conditions dans lesquelles ils sont commercialisés (arrêts du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 27, et du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 36). Toutefois, il y a lieu de préciser que, si les conditions de commercialisation constituent un facteur pertinent dans l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, leur prise en compte relève de l’étape de l’appréciation globale du risque de confusion et non de celle de l’appréciation de la similitude des signes en conflit (arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory, C‑328/18 P, EU:C:2020:156, point 70). Il s’agit donc d’une question non pertinente au stade de l’appréciation des similitudes entre les marques.

103    Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de confirmer le degré élevé de similitude phonétique entre les marques.

–       Sur le plan conceptuel

104    Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé, au point 74 de la décision attaquée, que la similitude était très élevée, atteignant presque l’identité, dès lors que le concept de dualité exprimé par le mot anglais « double » était présent dans les deux marques et, surtout, que ce concept devenait un substantif dans les deux signes, grâce à l’article anglais « the ». À cet égard, elle a considéré comme acquis que le mot « double » et l’article « the » appartenaient tous deux au vocabulaire anglais de base et étaient donc compréhensibles par de larges fractions du public de l’Union, même non anglophone. La chambre de recours a estimé que la présence de la lettre « f » dans la marque demandée modifiait légèrement l’appréciation de quasi-identité, en ce qu’elle n’éliminait pas le concept exprimé par les mots « double » et « the », c’est-à-dire le ou la double.

105    Premièrement, la requérante fait valoir que les signes en conflit ont des significations complètement différentes pour le public pertinent : la marque antérieure sera comprise comme désignant une ligne de sacs à dos dont la particularité réside dans le fait qu’ils sont réversibles, que leur tissu est « doublé » et qu’ils sont donc « double face » ; tandis que la marque demandée fera référence à l’idée d’un « double f », c’est‑à‑dire au groupe de lettres « ff », qui correspond, d’une part, aux initiales de FOLLI FOLLIE, marque déposée qui distinguerait la chaîne de boutiques propriété du groupe d’entreprises dont fait partie la requérante, et, d’autre part, aux premières lettres du nom de la société requérante titulaire de la marque demandée, soit FF IP s.r.l, et de celui de la société propriétaire du site Internet, soit FF NET s.r.l. À cet égard, elle fait aussi valoir que le fait que la chambre de recours ait exclu le lien conceptuel entre la marque antérieure et la réversibilité des produits démontrerait qu’elle n’a pas correctement étudié les documents produits par l’intervenante au titre de la preuve d’usage.

106    Il convient de rappeler que des marques sont similaires sur le plan conceptuel, lorsqu’elles concordent dans leur contenu sémantique (voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 24). En outre, en percevant un signe verbal, le public pertinent décomposera celui-ci en des éléments verbaux qui, pour lui, suggèrent une signification concrète ou qui ressemblent à des mots qu’il connaît (arrêt du 13 février 2007, RESPICUR, T‑256/04, EU:T:2007:46, point 57).

107    Ainsi que la chambre de recours l’a correctement relevé, la marque demandée évoquera automatiquement la notion de dualité, ou encore du double, émanant de l’élément verbal « the double ». Dès lors que le même élément verbal « the double » est commun aux deux marques, et constitue même l’intégralité de la marque antérieure, une similitude conceptuelle élevée entre la marque demandée et la marque antérieure ne peut qu’être constatée, sauf à ce qu’il soit démontré que l’ajout de la lettre « f » à la fin de cet élément verbal, dans la marque demandée, exclurait à lui seul toute notion de dualité ou du double. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce.

108    À cet égard, force est de constater que la signification de la marque demandée revendiquée par la requérante, de « ff » ou « double f », même dans l’hypothèse où elle serait correcte, n’est pas de nature à exclure toute idée de dualité ou de « double », ainsi que l’a relevé la chambre de recours.

109    Quant à l’idée de réversibilité émanant de la marque antérieure, la chambre de recours a expliqué, au point 76 de la décision attaquée, qu’un tel lien n’était pas évident, au motif que le concept de réversibilité n’est généralement pas exprimé par le concept de dualité traduit par un substantif comme le double ou « the double », mais à travers des expressions moins ambiguës telles que « double-face », « inside out », « reverse », etc.

110    À cet égard, d’une part, il convient de relever que l’analyse conceptuelle de la marque antérieure doit se limiter à la marque en tant que telle et ne saurait découler de l’analyse des preuves d’usage ; d’autre part, force est de constater que la requérante se contente d’affirmer que l’analyse des documents produits à l’appui de la preuve d’usage n’a pas été correcte et que cette signification de réversibilité ressortirait « clairement » des preuves d’usage dans lesquelles la marque antérieure serait toujours associée à l’adjectif « réversible ». Force est toutefois de constater, en tout état de cause, que cette dernière argumentation n’est pas étayée et ne vise pas de preuves d’usages spécifiques. Or, il n’appartient pas au Tribunal de rechercher et d’identifier, dans les annexes, voire dans le dossier administratif de l’EUIPO, les moyens qu’il pourrait considérer comme constituant le fondement du recours. Des exigences analogues sont requises lorsqu’un argument est invoqué au soutien d’un moyen [arrêt du 9 mars 2018, Recordati Orphan Drugs/EUIPO – Laboratorios Normon (NORMOSANG), T‑103/17, non publié, EU:T:2018:126, point 24].

111    Deuxièmement, la requérante invoque une erreur en ce que la chambre de recours a affirmé, au point 76 de la décision attaquée, que « la signification du double F […] ne ressort pas du signe en tant que tel et ne sera pas comprise par le grand public ». Elle estime, au contraire, que le public pertinent serait capable d’associer ledit signe à l’origine entrepreneuriale « FOLLI FOLLIE », cette signification du signe litigieux étant expressément portée à la connaissance du public sur la page d’accueil du site Internet « www.thedoublef.it », dont une copie d’écran est jointe en annexe 8 de la requête.

112    À cet égard, s’il n’est pas exclu que la marque demandée puisse également évoquer, dans l’esprit du public pertinent, l’idée de « ff », évocatrice par exemple d’initiales d’un nom, force est de constater que l’argument selon laquelle le public associerait « ff » spécifiquement au nom de « FOLLI FOLLIE » n’est qu’une affirmation non étayée de la requérante.

113    En outre, la comparaison conceptuelle des marques doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci sur le public pertinent et non sur des indications supplémentaires quant à la signification de la marque telle qu’interprétée par son seul titulaire et contenues sur le site Internet ou le lieu de commercialisation des produits concernés. En effet, il ressort de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus que les modalités particulières de commercialisation des produits ou des services ne sauraient être prises en compte aux fins de l’analyse prospective du risque de confusion.

114    Dès lors, il y a lieu de confirmer le degré très élevé de similitude conceptuelle entre les marques.

115    Il y a donc lieu de rejeter la troisième branche du moyen unique, relative à la comparaison des marques.

 Sur le risque de confusion

116    L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, VENADO avec cadre e.a., T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74).

117    La chambre de recours a considéré, aux points 77 à 90 de la décision attaquée, qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit aux motifs, en substance, que la marque antérieure devait se voir attribuer un caractère distinctif moyen ou « moyen-faible », que certains produits concernés étaient identiques, que les autres produits et les services concernés étaient similaires, que les marques en conflit présentaient globalement un degré élevé de similitude et que le niveau d’attention du public pertinent était moyen.

118    La requérante conteste l’existence d’un risque de confusion en énumérant quatre arguments relatifs au caractère distinctif de la marque antérieure, au public pertinent, à la comparaison des produits et des services concernés, et à la comparaison des marques.

119    L’EUIPO et l’intervenante contestent cette argumentation.

120    En premier lieu, la requérante estime que la chambre de recours aurait dû considérer que le caractère distinctif de la marque antérieure est faible et non pas « moyen ou moyen‑faible ». Selon la requérante, le mot « double » serait un terme d’usage courant auquel ne saurait être attribué un caractère distinctif moyen, et l’ajout de l’article « the », également d’usage courant, ne saurait accroître le caractère distinctif de la marque antérieure. Le faible caractère distinctif de la marque antérieure aurait même été reconnu aux points 82 et 87 de la décision attaquée.

121    En l’espèce, la chambre de recours a, aux points 77 à 82 de la décision attaquée, rejeté l’argument de la requérante selon lequel la marque antérieure aurait un caractère distinctif limité. Au point 82 de la décision attaquée, elle a estimé qu’un caractère distinctif moyen ou « moyen-faible » devait être attribué à la marque antérieure au motif que la faiblesse de l’élément « double » était compensée par la présence de l’article défini « the », lequel créait une ambiguïté conceptuelle suffisante pour écarter la valeur descriptive de la marque dans son ensemble. C’est en se fondant sur ce caractère distinctif, au minimum, « moyen-faible », au point 87 de la décision attaquée, que la chambre de recours a procédé à son analyse du risque global de confusion. Il y a donc lieu de rejeter l’argument selon lequel la chambre de recours aurait elle-même reconnu que le caractère distinctif de la marque antérieure serait seulement faible. Ceci résulte d’une lecture erronée de la décision attaquée.

122    Le raisonnement rappelé au point 121 ci-dessus n’est pas entaché d’erreurs. L’argument de la requérante selon lequel le terme « the » serait d’usage courant n’est pas de nature à infirmer le constat selon lequel ce terme suffisait pour introduire une ambiguïté conceptuelle et écarter un éventuel caractère descriptif de la marque antérieure dans son ensemble. À titre surabondant, l’EUIPO souligne correctement que ce n’est pas parce qu’un signe est composé de mots d’usage courant qu’il faut automatiquement conclure à un caractère distinctif faible de ladite marque.

123    Dès lors, il y a lieu de confirmer le caractère distinctif de la marque antérieure comme étant, au minimum, « moyen-faible ».

124    En deuxième lieu, la requérante fait valoir que le public pertinent est constitué de personnes possédant des connaissances et compétences spécifiques dans le domaine de la haute couture et des marques de luxe, dont le niveau d’attention doit être considéré comme supérieur à celui du consommateur moyen.

125    Il suffira de rappeler que cet argument a déjà été rejeté notamment au point 48 ci-dessus.

126    En troisième et quatrième lieu, la requérante souligne qu’il n’existe pas entre les produits et services concernés d’identité ou de similitude propre à entraîner un risque de confusion, et que les marques en conflit diffèrent sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. À ce dernier égard elle insiste sur le fait qu’il conviendrait de reconnaître à la dimension visuelle des signes une plus grande importance aux motifs que la marque demandée est figurative et que les produits visés par les marques en conflit ne seront pas proposés à la vente verbalement. La chambre de recours aurait négligé de prendre en compte le fait que « l’importance des éléments de similitude ou de différence entre les signes en conflit peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux-ci ou des conditions de commercialisation des produits ou des services que ceux-ci désignent ».

127    Les arguments fondés sur une prétendue différence des produits et des services ont déjà été rejetés aux points 74 et 76 ci-dessus. Quant aux arguments fondés sur une prétendue différence entre les marques en conflit, ils ont été rejetés aux points 96, 103, et 114 ci-dessus.

128    Concernant le fait qu’il conviendrait éventuellement de reconnaître à la dimension visuelle des signes une plus grande importance en raison des conditions de commercialisation des produits et des services concernés, il suffira de constater qu’une telle éventualité n’est pas susceptible de modifier l’appréciation du risque de confusion dans la mesure où, en l’espèce, la similitude visuelle entre les marques en conflit a été considérée à juste titre comme élevée.

129    Il résulte de ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion et qu’il convient de rejeter la quatrième branche du moyen unique, relative au risque de confusion.

130    Dès lors, il convient de rejeter le moyen unique de la requérante, et, partant, le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

131    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La demande de Seven SpA tendant à refuser l’enregistrement de la marque de l’Union européenne figurative the DoubleF pour les produits relevant de la classe 18 et les services relevant de la classe 35 est rejetée.

3)      FF IP Srl est condamnée aux dépens.

Collins

Csehi

Steinfatt

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 1er septembre 2021.

Signatures


*      Langue de procédure : l’italien.