Language of document : ECLI:EU:T:2013:117



DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

8 mars 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire figurative David Mayer – Marque nationale verbale antérieure DANIEL & MAYER MADE IN ITALY – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b) et article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 207/2009 – Demande de preuve de l’usage sérieux formée pour la première fois devant la chambre de recours – Tardiveté – Article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑498/10,

David Mayer Naman, demeurant à Rome (Italie), représenté initialement par Mes S. Sutti, S. Cazzaniga et V. Fedele, puis par Mes Fedele et M. Spolidoro, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Bullock, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Daniel e Mayer Srl, établie à Milan (Italie), représentée par Mes M. Andreolini et A. Parini, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 26 juillet 2010 (affaire R 413/2009-1), relative à une procédure de nullité entre Daniel e Mayer Srl et M. David Mayer Naman,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de MM. J. Azizi, président, S. Frimodt-Nielsen et Mme M. Kancheva (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 octobre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 2 février 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 20 janvier 2011,

à la suite de l’audience du 10 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 février 2000, le requérant, M. David Mayer Naman, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant, lequel est représenté en caractères d’imprimerie « futura », traités et modifiés graphiquement :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles ; valises ; parapluies ; parasols ; cannes ; fouets et sellerie » ;

–        Classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ».

4        Le 2 octobre 2000, la demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 79/2000.

5        Le 18 avril 2001, le signe a été enregistré en tant que marque communautaire sous le numéro 1518950.

6        Le 24 octobre 2007, l’intervenante, Daniel e Mayer Srl, a introduit auprès de l’OHMI une demande en nullité de cette marque communautaire (ci-après la « marque contestée ») pour des produits incluant ceux visés au point 3 ci-dessus.

7        La demande en nullité était fondée sur la marque nationale verbale antérieure DANIEL & MAYER MADE IN ITALY (ci-après la « marque antérieure »), enregistrée en Italie sous le numéro 472351, désignant des produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Sous-vêtements et vêtements en maille, prêt-à-porter pour homme, femme et enfants, chemiserie ».

8        Les motifs de nullité invoqués à l’appui de la demande étaient ceux visés à l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94 [devenu article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009] lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009], ainsi qu’à l’article 52, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [devenu article 53, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009] lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 40/94 (devenu article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009).

9        Le 2 mars 2009, la division d’annulation de l’OHMI a, sur la base du motif de nullité prévu à l’article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, partiellement accueilli la demande de l’intervenante et a, par conséquent, déclaré nul l’enregistrement de la marque contestée pour ce qui concerne les « articles en cuir et leurs imitations non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18 et les « vêtements, chaussures, chapellerie » relevant de la classe 25.

10      Le 8 avril 2009, le requérant a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’annulation.

11      Par décision du 26 juillet 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a ainsi confirmé la nullité partielle, pour les produits concernés, de la marque contestée.

12      En premier lieu, la chambre de recours a, dans la décision attaquée, rejeté comme tardive la demande du requérant, formée pour la première fois lors du recours contre la décision de la division d’annulation, tendant à ce qu’il soit ordonné à l’intervenante de produire la preuve de l’usage sérieux et effectif de la marque antérieure, notamment pour les vêtements masculins. Elle en a déduit qu’il convenait de se référer aux descriptions officielles des produits telles qu’elles ressortaient des enregistrements respectifs des marques en conflit et non, comme le prétendait le requérant, à l’activité commerciale réellement déployée par les deux entreprises.

13      En deuxième lieu, quant à la comparaison des produits, la chambre de recours a intégralement fait sienne la conclusion de la division d’annulation selon laquelle les produits concernés appartenant à la classe 25 étaient identiques et ceux appartenant à la classe 18 étaient similaires.

14      En troisième lieu, quant à la comparaison des marques en conflit, la chambre de recours a conclu que les coïncidences entre celles-ci étaient tellement évidentes sur les plans visuel et phonétique, voire conceptuel, qu’elles transmettaient une impression globale de ressemblance dans l’esprit du public concerné, un acheteur moyen de vêtements en Italie. Selon elle, les éléments dominants dans les deux signes étaient les noms et les deux coïncidences les plus significatives consistaient en la présence dans chacun desdits signes du nom Mayer, de surcroît placé en seconde position dans les deux cas, ainsi que l’utilisation, en première position, de deux prénoms similaires, à savoir David et Daniel.

15      En quatrième lieu, quant au risque de confusion entre les marques en conflit, la chambre de recours a déduit la présence d’un tel risque du fait que les marques étaient similaires et qu’elles couvraient des produits identiques ou similaires. Elle a ainsi rejeté les arguments du requérant tirés de la notoriété de la marque contestée, du positionnement des marques en conflit sur des segments de marché différents (vêtements bas de gamme pour femme, d’une part, vêtements à la mode pour homme, d’autre part) et de leur coexistence paisible pendant des décennies. À cet égard, elle a relevé que, si la coexistence paisible était avérée, le requérant n’aurait pas manqué de soulever, à l’encontre de la demande en nullité de sa marque, la forclusion par tolérance prévue à l’article 54, paragraphe 2, du règlement nº 207/2009.

 Procédure et conclusions des parties

16      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        réformer intégralement la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

17      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

18      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée ;

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

19      À l’appui du recours, le requérant invoque, en substance, trois moyens. Ceux-ci sont tirés, premièrement, de la violation de l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, deuxièmement, de la violation de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, et, troisièmement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

20      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments du requérant.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009

21      Le requérant a soulevé, pour la première fois lors de l’audience devant le Tribunal, un moyen fondé sur la forclusion par tolérance prévue à l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, en ce que la demande en nullité fondée sur la marque antérieure a été introduite le 24 octobre 2007, plus de cinq ans après l’enregistrement de la marque contestée, le 18 octobre 2001. Ledit article énonce, en substance, que le titulaire d’une marque nationale antérieure qui a toléré pendant cinq années consécutives l’usage d’une marque communautaire postérieure dans l’État membre où cette marque antérieure est protégée, en connaissance de cet usage, ne peut plus demander la nullité ni s’opposer à l’usage de la marque postérieure.

22      L’OHMI soutient que le présent moyen est irrecevable, dès lors qu’il a été soulevé pour la première fois à l’audience.

23      Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’absence d’un moyen dans la requête ne peut être palliée par sa présentation lors de l’audience, dans la mesure où cela aurait pour effet d’élargir l’objet du litige tel qu’il a été défini dans la requête. En vertu de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 18 juillet 2006, Rossi/OHMI, C‑214/05 P, Rec. p. I‑7057, points 37 et 40, et arrêt du Tribunal du 6 mai 2008, Redcats/OHMI – Revert & Cía (REVERIE), T‑246/06, non publié au Recueil, point 24].

24      En l’espèce, force est de constater l’absence dans la requête du moyen tiré de la violation de l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009. De plus, il n’est ni établi ni même allégué que ce moyen serait fondé sur des éléments de droit et de fait qui se seraient révélés pendant la procédure.

25      Au surplus, et en tout état de cause, l’absence de présentation d’un moyen devant la chambre de recours ne peut être palliée par son invocation devant le Tribunal. En effet, aux termes de l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure, les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours. Selon une jurisprudence constante, un recours porté devant le Tribunal en vertu de l’article 65, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours. Dans le cadre dudit règlement, en application de son article 76, ce contrôle doit se faire au regard du cadre factuel et juridique du litige tel qu’il a été porté devant la chambre de recours [voir arrêts du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, point 17, et la jurisprudence citée, et du 31 janvier 2012, Spar/OHMI – Spa Group Europe (SPA GROUP), T‑378/09, non publié au Recueil, point 83].

26      Or, le moyen tiré de la violation de l’article 54, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 n’a pas été invoqué devant la chambre de recours, ainsi que l’a relevé celle-ci au point 40 de la décision attaquée. Ce moyen ne pouvait donc, en tout état de cause, être invoqué pour la première fois devant le Tribunal.

27      Partant, il y a lieu d’écarter le premier moyen comme étant irrecevable.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009

28      Le requérant allègue, en substance, que la chambre de recours a violé l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, lorsqu’elle a constaté, aux points 13 à 19 de la décision attaquée, que le requérant avait formé une demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, en particulier concernant les vêtements masculins, pour la première fois devant elle et non devant la division d’annulation, et en a conclu à la tardiveté de cette demande du requérant. Il fait valoir que, même à supposer que la demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure doive être invoquée pour la première fois devant la division d’annulation et ne puisse plus être formée devant la chambre de recours, cet argument pourrait être soulevé devant la chambre de recours, à titre incident et par voie d’exception de déchéance partielle. Selon lui, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la différence de finalités entre une demande de déchéance partielle erga omnes et une exception de déchéance partielle inter partes, pertinente aux seules fins d’exclure le risque de confusion entre les marques en conflit et de permettre leur coexistence paisible.

29      L’OHMI et l’intervenante contestent le bien-fondé de ce deuxième moyen.

30      Il convient de rappeler que l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, figurant sous l’intitulé « Examen de la demande », dispose :

« 2. Sur requête du titulaire de la marque communautaire, le titulaire d’une marque communautaire antérieure, partie à la procédure de nullité, apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de la demande en nullité, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels la demande en nullité est fondée, ou qu’il existe des justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque communautaire antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins […]

3. Le paragraphe 2 s’applique aux marques nationales antérieures visées à l’article 8, paragraphe 2, point a), étant entendu que l’usage dans la Communauté est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée. »

31      La règle 40, paragraphe 6, du règlement (CE) n° 2868/95, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 du Conseil sur la marque communautaire (JO L 303, p. 1), tel que modifié, figurant sous l’intitulé « Examen de la demande en déchéance ou en nullité », énonce :

« Si le demandeur [en nullité] doit apporter la preuve de l'usage ou de l'existence de justes motifs pour le non-usage au titre de l'article 56, paragraphes 2 ou 3, du règlement [devenu l’article 57, paragraphes 2 ou 3, du règlement n° 207/2009], l’[OHMI] invite le demandeur à prouver l'usage de la marque au cours d'une période qu'il précise. Si la preuve n'est pas apportée dans le délai imparti, la demande en nullité est rejetée. La règle 22, paragraphes 2, 3 et 4 s’applique mutatis mutandis. »

32      La règle 22, paragraphe 1, du règlement n° 2868/95, tel que modifié, sous l’intitulé « Preuve de l’usage », porte :

« Une demande de preuve de l’usage conformément à l’article 43, paragraphes 2 ou 3, du règlement [ou, mutatis mutandis, l’article 57, paragraphes 2 ou 3, du règlement] n’est recevable que si le demandeur présente une telle demande pendant le délai précisé par l’[OHMI] conformément à la règle 20, paragraphe 2. »

33      La règle 20, paragraphe 2, du règlement n° 2868/95, tel que modifié, précise :

« Si l’opposition n’est pas rejetée conformément au paragraphe 1, l’[OHMI] communique au demandeur [de la preuve de l’usage] les observations de l’opposant [ou, mutatis mutandis, du demandeur en nullité] et l’invite à présenter ses observations dans le délai qu’il lui précise. »

34      Selon la jurisprudence, la marque antérieure est présumée avoir fait l’objet d’un usage sérieux aussi longtemps qu’une requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure n’est pas présentée, et une telle requête doit être formulée expressément et en temps utile devant l’OHMI. L’expression « en temps utile », en l’occurrence, ne concerne pas seulement le respect d’un éventuel délai imparti, mais implique également l’exigence de présenter cette requête devant la division d’opposition ou d’annulation, le cas échéant, et non pour la première fois devant la chambre de recours [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, Rec. p. II‑757, points 32 à 36, et la jurisprudence citée].

35      Cette jurisprudence se justifie par le fait que l’existence ou l’absence de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, étant susceptible de modifier le contenu de la procédure de nullité, constitue une question préalable qui doit être vidée avant que soit tranchée la demande en nullité proprement dite. En effet, la requête d’une telle preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure fait peser sur le demandeur en nullité la charge de prouver l’usage sérieux de sa marque – ou l’existence de justes motifs pour le non-usage – sous peine du rejet de sa demande en nullité. Or, c’est à la division d’annulation qu’il appartient de statuer, en premier ressort, sur la demande en nullité, telle que définie par les prétentions des parties, y compris, le cas échéant, la requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure. Quant à la chambre de recours, elle est, en vertu de l’article 135, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, compétente pour statuer sur le recours formé contre la décision de la division d’annulation, et non pour statuer elle-même, en première instance, sur une nouvelle demande en nullité. Ainsi, étant donné qu’une requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure impliquerait l’examen, par la chambre de recours, d’une question nouvelle, sortant du cadre de la procédure de nullité telle que soumise à la division d’annulation, une telle requête ne peut être formée pour la première fois devant la chambre de recours (voir, par analogie, arrêt PAM PLUVIAL, point 34 supra, points 37 à 39, et la jurisprudence citée).

36      Par ailleurs, cette jurisprudence n’est pas contraire au principe de la continuité fonctionnelle existant entre les différentes instances de l’OHMI, telle qu’évoquée dans la jurisprudence de la Cour et du Tribunal. En effet, il ne s’agit pas, en l’occurrence, d’éléments de fait ou de droit qui n’auraient pas été invoqués par le requérant devant la division d’annulation, mais d’une requête de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure, c’est-à-dire d’une nouvelle demande procédurale qui modifie le contenu de la procédure de nullité et qui constitue logiquement une question préalable à l’examen de la nullité, en sorte qu’elle aurait dû être formée en temps utile devant la division d’annulation [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 18 octobre 2007, AMS/OHMI – American Medical Systems (AMS Advanced Medical Services), T‑425/03, Rec. p. II‑4265, points 111 et 112, et la jurisprudence citée, et arrêt PAM PLUVIAL, point 34 supra, point 40].

37      Des dispositions citées aux points 30 à 33 ci-dessus, interprétées à la lumière de la jurisprudence, il ressort, tout d’abord, que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure n’est recevable que si elle est présentée dans le délai imparti au demandeur par la division d’opposition ou d’annulation et non par la chambre de recours (voir, en ce sens, arrêt PAM PLUVIAL, point 34 supra, points 36 et 39). Il en résulte, ensuite, que cette preuve ne peut être exigée que sur requête expresse du titulaire de la marque contestée.

38      En l’espèce, il est constant, tout d’abord, que la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure a été présentée par le requérant pour la première fois devant la chambre de recours, et non en temps utile devant la division d’annulation, contrairement au prescrit des règles 20 et 22 du règlement n° 2868/95. C’est, dès lors, à bon droit que la chambre de recours a conclu à la tardiveté de cette demande et l’a rejetée.

39      S’agissant, ensuite, de l’argument du requérant selon lequel la question de la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pourrait être soulevée par le biais d’une exception de déchéance partielle devant la chambre de recours, force est de constater l’inexistence, au sein du règlement n° 207/2009 et du règlement n° 2868/95, tel que modifié, d’une exception de déchéance partielle qui permettrait de demander la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure à un stade quelconque de la procédure en nullité, et, en particulier, pour la première fois devant la chambre de recours. La déchéance partielle d’une marque antérieure ne saurait être prononcée, dans le cadre d’une procédure en nullité, que sur requête expresse du titulaire, formée en temps utile devant la division d’annulation, dans les conditions de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, et non selon une prétendue exception.

40      Partant, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen comme étant non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

41      Le requérant allègue que la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, en concluant à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. Le requérant fait valoir, en substance, que, au vu de l’absence de similitude entre, d’une part, les produits effectivement commercialisés sous les marques en conflit et, d’autre part, entre les marques en conflit, il n’existerait pas de risque de confusion entre celles-ci.

42      L’OHMI et l’intervenante contestent le bien-fondé de ce troisième moyen.

43      D’emblée, il convient de préciser que, bien que la demande en nullité formée par l’intervenante ait été fondée sur l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et sur l’article 53, paragraphe 1, sous c), de ce même règlement, la chambre de recours n’a procédé à l’analyse du recours formé devant elle qu’en ce qui concerne la première de ces dispositions.

44      Ensuite, il y a lieu de relever que la chambre de recours a fondé la décision attaquée sur l’existence des conditions d’application des dispositions combinées de l’article 53, paragraphe 1, sous a), et de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. En vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, une marque communautaire est déclarée nulle sur demande présentée auprès de l’OHMI lorsqu’il existe une marque antérieure visée à l’article 8, paragraphe 2, du même règlement et que les conditions énoncées à l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement sont remplies. En vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i) et ii), du règlement n° 207/2009, on entend par marques antérieures, notamment les marques communautaires, ainsi que les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la marque communautaire contestée.

45      Or, la cause de nullité relative résultant de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, combiné avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, correspond au motif relatif de refus d’enregistrement consacré par cette dernière disposition. Partant, la jurisprudence relative au risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, est également pertinente dans le présent contexte [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 avril 2010, Cabel Hall Citrus/OHMI – Casur (EGLÉFRUIT), T‑488/07, non publié au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée].

46      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée, et arrêt EGLÉFRUIT, point 45 supra, points 26 et 27].

47      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C‑234/06 P, Rec. p. I‑7333, point 48, et arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

48      L’appréciation du risque de confusion dans l’esprit du public pertinent dépend de nombreux facteurs et doit se faire globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte en particulier de leurs éléments distinctifs et dominants (voir arrêts de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, points 34 et 35, et du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec. p. I‑7371, points 59 et 60, et la jurisprudence citée). En outre, elle implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte, de sorte qu’un faible degré de similitude entre les produits ou les services couverts peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement (arrêt de la Cour du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié au Recueil, points 44 et 45, et arrêt easyHotel, point 47 supra, point 41).

49      C’est à la lumière de ces observations liminaires qu’il convient d’examiner la comparaison effectuée par la chambre de recours entre, d’une part, les produits concernés, et, d’autre part, les marques en conflit, du point de vue du public pertinent.

 Sur le public pertinent

50      La chambre de recours a estimé, au point 26 de la décision attaquée, qu’il y avait lieu de prendre en considération le point de vue de l’acheteur moyen de vêtements en Italie.

51      Premièrement, le requérant allègue qu’il eût fallu distinguer un public exclusivement masculin, pertinent pour ses propres produits, et un public exclusivement féminin, pertinent pour les produits de l’intervenante, au motif qu’il se consacre uniquement aux vêtements pour homme, en particulier « gay friendly », alors que l’intervenante s’adresserait uniquement à une clientèle féminine. À cet égard, il suffit de relever, d’une part, que les produits couverts par chacune des marques en conflit concernent un public tant masculin que féminin [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p.  II‑4891, point 29] et, d’autre part, que cette allégation, étant fondée sur la demande tardive de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits masculins, doit être rejetée tout comme cette demande.

52      Deuxièmement, le requérant soutient que le niveau d’attention dont le public pertinent fait preuve dans l’achat des produits concernés n’est certainement pas faible, dès lors que ces produits sont durables et susceptibles de caractériser de manière forte l’aspect extérieur et la personnalité de l’acquéreur. Or, il convient de constater que cette circonstance ne remet nullement en cause le bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours quant à la définition du public pertinent ainsi qu’au degré d’attention raisonnablement élevé dont celui-ci fait preuve dans l’achat des produits considérés. En effet, si le grand public est susceptible de porter une attention accrue à certaines marques dans ce secteur, il en est ainsi en raison de l’image positive et de la notoriété que de telles marques ont acquises à la suite d’efforts publicitaires considérables et non en raison de la nature des produits en cause [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 septembre 2011, Ruiz de la Prada de Sentmenat/OHMI – Quant (AGATHA RUIZ DE LA PRADA), T‑522/08, non publié au Recueil, point 27].

53      En conclusion sur le public pertinent, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que l’appréciation du risque de confusion entre les marques en conflit devait être effectuée du point de vue du consommateur moyen de vêtements en Italie.

 Sur la comparaison des produits

54      La chambre de recours, au point 21 de la décision attaquée, a intégralement fait siennes l’appréciation « circonstanciée » effectuée par la division d’annulation, aux points 16 à 18 de sa propre décision, sur la comparaison des produits désignés par les marques en conflit ainsi que la conclusion selon laquelle les produits couverts par la marque contestée et relevant de la classe 25 sont identiques aux produits couverts par la marque antérieure et certains produits couverts par la marque contestée et relevant de la classe 18 sont semblables aux produits couverts par la marque antérieure. Par ailleurs, aux points 22 et 23 de la décision attaquée, elle a précisé qu’il convenait de se référer aux descriptions officielles des produits telles qu’elles ressortaient des enregistrements respectifs des deux marques en conflit et non, comme le prétendait le requérant, à l’activité commerciale réellement déployée par les deux entreprises.

55      À cet égard, le requérant formule, en substance, trois griefs. Premièrement, il reproche à la chambre de recours la motivation exagérément succincte de son appréciation quant à l’identité ou la similitude des produits concernés. Deuxièmement, quant à la comparaison entre les produits visés par les marques en conflit et relevant de la classe 25, le requérant soutient que ces produits ne sont pas identiques, au motif que les produits couverts par la marque antérieure sont destinés à un public exclusivement féminin, alors que ceux désignés par la marque contestée s’adressent à un public exclusivement masculin, d’ailleurs jeune et stylé. Troisièmement, quant à la comparaison entre les produits relevant de la classe 18 visés par la marque contestée et ceux relevant de la classe 25 visés par la marque antérieure, le requérant reproche à la chambre de recours, qui a fait siens les motifs de la décision de la division d’annulation, d’avoir effectué la comparaison des produits sans tenir compte de leur nature, de leur destination, de leurs conditions d’utilisation, et de leur éventuelle interchangeabilité ou complémentarité, selon leur origine ou leurs réseaux de distribution et de vente.

–       Sur le défaut de motivation

56      Sur le premier grief tiré du défaut de motivation quant à l’identité ou la similitude des produits concernés, il convient de rappeler, à titre liminaire, que, en vertu de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Par ailleurs, la règle 50, paragraphe 2, sous h), du règlement n° 2868/95 dispose que la décision de la chambre de recours doit contenir les motifs de la décision. Cette obligation a la même portée que celle consacrée par l’article 296 TFUE. Or, il est de jurisprudence constante, que la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. La question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte, ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 28 avril 2004, Sunrider/OHMI – Vitakraft-Werke Wührmann et Friesland Brands (VITATASTE et METABALANCE 44), T‑124/02 et T‑156/02, Rec. p. II‑1149, points 72 et 73, et la jurisprudence citée, et du 21 novembre 2007, Wesergold Getränkeindustrie/OHMI – Lidl Stiftung (VITAL&FIT), T‑111/06, non publié au Recueil, point 62].

57      Il convient ensuite de rappeler, dans le contexte de la présente procédure en matière de marque communautaire, la jurisprudence selon laquelle, étant donné que la chambre de recours a entériné la décision de la division d’annulation dans son intégralité, et compte tenu de la continuité fonctionnelle entre division d’annulation et chambre de recours, dont atteste l’article 64, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 [arrêt de la Cour du 13 mars 2007, OHMI/Kaul, C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 30, et arrêt du Tribunal du 10 juillet 2006, La Baronia de Turis/OHMI – Baron Philippe de Rothschild (LA BARONNIE), T‑323/03, Rec. p. II‑2085, points 57 et 58], cette décision ainsi que sa motivation font partie du contexte dans lequel la décision attaquée a été adoptée, contexte qui est connu par le requérant et qui permet au juge d’exercer pleinement son contrôle de légalité quant au bien-fondé de l’appréciation du risque de confusion (voir, en ce sens, arrêt VITAL&FIT, point 56 supra, point 64, et la jurisprudence citée).

58      À la lumière de la continuité fonctionnelle entre division d’annulation et chambre de recours, il y a lieu, bien que la motivation de la chambre de recours au point 21 de la décision attaquée soit assez succincte, de tenir compte de la motivation plus détaillée figurant aux points 16 à 19 de la décision de la division d’annulation. En particulier, celle-ci a relevé, quant aux produits concernés relevant de la classe 25, que les vêtements couverts par la marque contestée sont identiques aux produits visés par la marque antérieure, et que les chaussures et la chapellerie y sont clairement similaires, au motif qu’ils poursuivent la même finalité que les vêtements, à savoir celle de couvrir le corps humain pour des raisons tant esthétiques que pratiques. Quant aux produits concernés relevant de la classe 18, la division d’annulation a opéré une distinction entre, d’une part, les « articles en cuir et imitations du cuir non compris dans d’autres classes » et, d’autre part, les « articles en cuir et imitations du cuir ; peaux d’animaux ; malles ; valises ; parapluies ; parasols ; cannes ; fouets et sellerie ». Les premiers, qui sont des accessoires vestimentaires, présentent une fonction esthétique commune et un degré de similitude, qui ne peut être qualifié de faible, avec les vêtements relevant de la classe 25 visés par la marque antérieure. Les seconds poursuivent une finalité différente de celle des vêtements, à savoir la couverture du corps humain, et ne peuvent leur être considérés comme similaires.

59      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la chambre de recours, en faisant siens les motifs de la décision de la division d’annulation, n’a pas procédé à une analyse abstraite de la comparaison des produits concernés. Au contraire, la chambre de recours a, par substitution des motifs de la division d’annulation dans la continuité fonctionnelle de laquelle elle s’inscrit, effectué une analyse circonstanciée à cet égard. Dès lors, la chambre de recours a permis, d’une part, au requérant de connaître les justifications de la décision attaquée afin qu’il pût en vérifier le bien-fondé et défendre ses droits, et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité.

60      Partant, le premier grief du requérant ne saurait prospérer.

–       Sur la comparaison des produits relevant de la classe 25

61      Sur le deuxième grief concernant la comparaison entre les produits visés par les marques en conflit et relevant de la classe 25, et en particulier l’argument du requérant selon lequel les produits couverts par la marque antérieure sont destinés à un public exclusivement féminin, alors que ceux désignés par la marque contestée s’adressent à un public exclusivement masculin, il convient de rappeler, d’emblée, que, selon la jurisprudence, la comparaison des produits doit porter sur ceux visés par l’enregistrement des marques en question et non sur ceux pour lesquels la marque a effectivement été utilisée, à moins que, à la suite d’une demande présentée dans le cadre de l’article 57, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009, il s’avère que la marque antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits pour lesquels elle a été enregistrée (voir, en ce sens, arrêt ARTHUR ET FELICIE, point 51 supra, point 35). Or, en l’espèce, comme indiqué au point 38 ci-dessus, c’est à bon droit que la chambre de recours a rejeté comme tardive la demande du requérant concernant l’usage sérieux de la marque antérieure. Partant, c’est à juste titre que la chambre de recours a, au point 19 de la décision attaquée, conclu que la description des produits à laquelle il convenait de se référer était celle indiquée dans le certificat d’enregistrement de la marque antérieure.

62      Ainsi, aux fins de la comparaison des produits concernés, il convient de se référer, d’une part, aux produits pour lesquels la marque antérieure a été enregistrée, à savoir les « sous-vêtements et vêtements en maille, prêt-à-porter pour homme, femme et enfants, chemiserie » relevant de la classe 25 et, d’autre part, aux produits couverts par la marque contestée, à savoir les « cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; peaux d’animaux ; malles ; valises ; parapluies ; parasols ; cannes ; fouets et sellerie » relevant de la classe 18 ainsi que les « vêtements, chaussures, chapellerie » relevant de la classe 25.

63      Au vu des descriptions des produits concernés, il y a lieu d’observer que les produits visés par la marque contestée incluent ceux visés par la marque antérieure. À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, lorsque les produits visés par la marque antérieure incluent les produits visés par la demande de marque, ces produits sont considérés comme identiques [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, points 32 et 33 ; du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, Rec. p. II‑5309, point 51, et du 21 septembre 2010, Villa Almè/OHMI – Marqués de Murrieta (i GAI), T‑546/08, non publié au Recueil, point 42]. Cette jurisprudence s’applique mutatis mutandis lorsque, comme en l’espèce, les produits visés par la demande de marque incluent les produits visés par la marque antérieure, l’inversion des termes n’affectant pas le rapport d’identité entre eux.

64      C’est, dès lors, à bon droit que la chambre de recours a constaté, au point 21 de la décision attaquée, que les produits visés par la marque contestée et relevant de la classe 25 étaient identiques à ceux visés par la marque antérieure et relevant de la même classe.

65      Partant, le deuxième grief du requérant doit être rejeté.

–       Sur la comparaison des produits relevant de la classe 18

66      Sur le troisième grief concernant la comparaison entre les produits relevant de la classe 18 visés par la marque contestée et ceux de la classe 25 visés par la marque antérieure, et en particulier l’argument du requérant selon lequel la chambre de recours aurait dû tenir compte de différents facteurs pertinents, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (voir, en ce sens, arrêt ARTHUR ET FELICIE, point 51 supra, point 33, et la jurisprudence citée). D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

67      Quant à la destination et aux conditions d’utilisation des produits, il convient d’observer, d’une part, que les produits visés par la marque contestée sont susceptibles d’être destinés aux hommes, aux femmes et aux enfants, dès lors que la marque contestée a été enregistrée pour des produits relevant notamment des classes 18 et 25, sans aucune limitation. D’autre part, les produits visés par la marque antérieure sont également susceptibles d’être destinés aux hommes, aux femmes et aux enfants, dès lors que, comme il a été rappelé au point 61 ci-dessus, la description des produits à laquelle il convient de se référer concernant la marque antérieure est celle indiquée dans le certificat d’enregistrement.

68      Quant à l’éventuelle complémentarité des « vêtements, chaussures, chapellerie » relevant de la classe 25 et des « produits en cuir et imitations du cuir non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, les produits complémentaires sont ceux entre lesquels existe un lien étroit, en ce sens que l’un est indispensable ou important pour l’usage de l’autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fabrication de ces produits incombe à la même entreprise. Or, des produits tels que des chaussures, des vêtements, des chapeaux ou des sacs à main peuvent remplir, au-delà de leur fonction première, une fonction esthétique commune en contribuant, ensemble, à l’image extérieure du consommateur concerné (voir, en ce sens, arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 66 supra, points 48 et 49, et la jurisprudence citée).

69      La perception des liens unissant les produits concernés doit donc être appréciée en tenant compte de la recherche éventuelle d’une coordination dans la présentation de cette image extérieure, qui implique une coordination de ses différentes composantes entre elles à l’occasion de leur création ou acquisition. Cette coordination peut notamment jouer entre les vêtements, les chaussures et la chapellerie, relevant de la classe 25, et les différents accessoires vestimentaires qui les complètent, comme les sacs à main, relevant de la classe 18. Cette éventuelle coordination dépend du consommateur concerné, du type d’activité pour laquelle cette image extérieure est constituée (travail, sport ou loisir notamment) ou des efforts de marketing des acteurs économiques du secteur. En outre, la circonstance que ces produits sont fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre eux et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise (arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 66 supra, point 50).

70      Il en résulte que certains consommateurs perçoivent l’existence d’un lien étroit entre les vêtements, les chaussures et la chapellerie, relevant de la classe 25, et les accessoires vestimentaires que sont certains « produits en cuir et imitations du cuir non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 18, et qu’ils peuvent donc être amenés à penser que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise (arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 66 supra, point 51).

71      En l’espèce, les articles en « cuir et imitations du cuir non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18 et désignés par la marque contestée présentent, avec les accessoires vestimentaires inclus dans la classe 25 et couverts par la marque antérieure, un degré de similitude qui, comme l’ont estimé à juste titre la division d’annulation et la chambre de recours, ne peut être qualifié de faible.

72      Partant, le troisième grief du requérant doit être rejeté.

73      En conclusion sur la comparaison des produits, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, au point 21 de la décision attaquée, que les produits couverts par la marque contestée et relevant de la classe 25 étaient identiques aux produits couverts par la marque antérieure et que les produits couverts par la marque contestée et relevant de la classe 18 étaient similaires aux produits couverts par la marque antérieure.

 Sur la comparaison des signes

74      La chambre de recours a estimé, au point 26 de la décision attaquée, que les coïncidences entre les marques en conflit étaient « tellement évidentes, incontestablement sur le[s] plan[s] visuel et phonétique, mais aussi, dans un certain sens, [sur le plan] conceptuel, qu’elles [transmettaient] une impression globale de ressemblance ». Selon elle, les éléments dominants dans les deux signes étaient les noms et les deux coïncidences les plus significatives consistaient précisément en la présence commune du nom Mayer, de surcroît placé en seconde position dans les deux cas, ainsi que l’utilisation, en première position, de deux prénoms similaires, à savoir David et Daniel (voir points 29 et 30 de la décision attaquée).

75      Le requérant affirme, en substance, que la chambre de recours a procédé à la comparaison des signes de manière abstraite, sans prendre en considération des différences visuelles, phonétiques et conceptuelles. En outre, il excipe du caractère répandu du nom Mayer en Italie.

–       Sur le caractère répandu du nom Mayer en Italie

76      Le requérant allègue, en substance, que le caractère répandu du nom Mayer en Italie s’oppose à la conclusion de la chambre de recours, figurant au point 36 de la décision attaquée, relative au caractère intrinsèquement distinctif de cet élément et, partant, à sa pertinence aux fins de la comparaison des signes dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion. À l’appui de cette allégation, il annexe à la requête un certain nombre de preuves documentaires.

77      Quant à l’extrait d’une banque de données dont il ressortirait que l’élément « mayer » serait enregistré en Italie pour huit marques, il convient de relever que, même à supposer que ces huit marques soient effectivement utilisées sur le marché italien, il ne saurait en être déduit que cet élément présente un caractère répandu en Italie, le nombre huit demeurant peu élevé par rapport à la taille dudit marché. En outre, il y a lieu de rappeler, à l’instar de la chambre de recours au point 36 de la décision attaquée, que le facteur pertinent aux fins de contester le caractère distinctif d’un élément consiste dans sa présence effective sur le marché et non dans des registres ou des bases de données. Or, le requérant n’a attesté la présence effective, dans le secteur de la mode en Italie, que d’une seule marque contenant l’élément « mayer », à savoir Christine Mayer.

78      Quant à l’extrait du site Internet selon lequel l’élément « mayer » figurerait dans la raison sociale ou l’enseigne de douze entreprises actives dans le secteur de l’habillement en Italie, ainsi qu’à l’extrait du site Internet selon lequel le nom patronymique Mayer serait présent dans 179 communes en Italie, il y a lieu d’observer que la raison sociale, l’enseigne ou le nom patronymique sont dénués de pertinence, vu la différence substantielle entre l’utilisation d’un terme en tant que marque et son utilisation en tant que raison sociale, enseigne ou nom patronymique, ces derniers signes ne visant pas à indiquer l’origine commerciale des produits. Au surplus, force est de constater que de tels nombres d’enseignes et de communes, considérés par rapport à la taille du marché italien, ne sont pas suffisants pour établir, en l’espèce, le caractère répandu et, partant, l’absence de caractère distinctif de l’élément « mayer ».

79      Il en découle que la chambre de recours pouvait sans erreur conclure, au point 36 de la décision attaquée, au caractère intrinsèquement distinctif de l’élément « mayer » et, partant, à sa pertinence aux fins de la comparaison des signes dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion.

80      Partant, le présent grief du requérant ne saurait prospérer.

–       Sur la comparaison visuelle

81      Le requérant fait grief à la chambre de recours de n’avoir pas pris dûment en considération des différences de libellé, notamment le contraste entre les prénoms David et Daniel, et la présence d’« éléments graphiques de diversification », tels que l’esperluette et la mention « made in Italy » dans la marque antérieure.

82      À cet égard, il y a lieu d’observer, d’une part, que la marque contestée est une marque figurative, composée des éléments distinctifs et dominants « david » et « mayer », écrits en lettres minuscules, à l’exception des initiales, écrites en lettres majuscules. D’autre part, la marque antérieure est une marque verbale composée de deux éléments distinctifs et dominants, à savoir « daniel » et « mayer », écrits en lettres majuscules. La marque antérieure comporte également deux éléments secondaires : l’esperluette, figurant entre les deux éléments distinctifs et dominants, et la mention « made in Italy », apposée à côté du terme « mayer ».

83      Il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours au point 32 de la décision attaquée, que le deuxième élément commun aux deux marques en conflit, à savoir « mayer », est strictement identique. Cette coïncidence est d’autant plus notable que des variantes orthographiques du nom Mayer, tels que les noms Maier, Meier, Meyer, Mayr et Meir, sont concevables, comme l’a souligné le requérant dans ses écritures devant elle. Ensuite, les premiers mots composant ces signes, à savoir les prénoms David et Daniel, commencent chacun par la combinaison de lettres « da ». Certes, le premier mot composant la marque contestée se termine par la combinaison de lettres « vid », alors que celui de la marque antérieure finit par la combinaison de lettres « niel », et le premier mot de la marque contestée est légèrement plus court que celui de la marque antérieure, vu leurs compositions respectives de cinq et de six lettres, mais ces différences ne suffisent pas à écarter une similitude des marques en conflit sur le plan visuel.

84      Cette constatation est conforme à la jurisprudence selon laquelle, même si le conflit oppose un signe verbal et un signe figuratif, et même si le premier élément de chacun des signes en conflit est différent, il y a lieu de considérer que la présence de l’élément commun ne permet pas de nier l’existence d’un certain degré de similitude sur le plan visuel entre les marques en cause [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 14 avril 2011, TTNB/OHMI – March Juan (Tila March), T‑433/09, non publié au Recueil, point 40].

85      Par ailleurs, cette constatation ne saurait être remise en cause par les allégations du requérant selon lesquelles les marques en conflit ne sont pas similaires en raison de la présence, dans la marque antérieure, de l’esperluette et de la mention « made in Italy ». Tout d’abord, il y a lieu de relever que cette mention, en désignant l’origine géographique des produits désignés par la marque antérieure en cause, revêt un caractère descriptif et, partant, constitue un élément négligeable. Ensuite, il convient d’observer que l’esperluette constitue un signe typographique courant et, partant, un élément secondaire dans la perception du consommateur moyen, sauf circonstance particulière, absente en l’espèce. Ainsi, au vu des identités ou similitudes visuelles entre les éléments dominants des marques en conflit, il y a lieu de considérer, à l’instar de la chambre de recours, que la différence entre les marques résultant de la simple présence de l’esperluette n’est pas suffisante pour conclure que les marques en conflit ne sont pas similaires sur le plan visuel [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 février 2010, Özdemir/OHMI – Aktieselskabet af 21. november 2001 (James Jones), T‑11/09, non publié au Recueil, point 28].

86      Eu égard à l’identité du deuxième élément de chacune des marques en conflit, à savoir l’élément « mayer », lequel est distinctif et dominant dans les deux signes, ainsi qu’à l’identité des deux lettres initiales de leur premier élément, à savoir la combinaison de lettres « da », dans un mot court composé respectivement de cinq ou de six lettres, c’est à bon droit que la chambre de recours a constaté que les marques en conflit présentaient des similitudes visuelles.

87      Partant, le présent grief du requérant doit être rejeté.

–       Sur la comparaison phonétique

88      Le requérant fait grief à la chambre de recours de n’avoir pas pris dûment en considération des différences de prononciation des prénoms David et Daniel, ni celles dues à la présence de l’esperluette et de la mention « made in Italy » dans la marque antérieure.

89      À cet égard, il y a lieu de constater que les marques en conflit sont, dans leurs éléments distinctifs et dominants, composées de deux mots de deux syllabes. Le second mot « mayer », élément distinctif et dominant dans chacune des marques en conflit, se prononce de manière identique. Le premier mot desdites marques, à savoir « david » ou « daniel », se prononce de manière relativement similaire, vu l’identité de la syllabe initiale « da ». Cette syllabe est d’ailleurs accentuée dans la prononciation par le public italien, des prénoms anglais David et Daniel, alors que ladite syllabe n’est accentuée que pour la prononciation du prénom italien Davide et non pour le prénom italien Daniele.

90      Cette constatation ne saurait être infirmée par la présence, dans la marque antérieure, de l’esperluette et de la mention « made in Italy ». En effet, l’esperluette est prononcée « e » par le public pertinent de langue italienne. Le son « e » n’attire guère l’attention du public pertinent et ne suffit pas à écarter une similitude des marques en conflit sur le plan phonétique. Par ailleurs, il convient de rappeler que la mention « made in Italy » ne constitue qu’un élément descriptif et négligeable de la marque antérieure.

91      Eu égard aux points communs entre les marques en conflit, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les marques en conflit étaient similaires sur le plan phonétique.

92      Partant, le présent grief du requérant doit être rejeté.

–       Sur la comparaison conceptuelle

93      Le requérant fait grief à la chambre de recours de n’avoir pas pris en considération la différence conceptuelle entre, d’une part, la marque antérieure, qui désignerait deux personnes associées dans la vente de marchandises fabriquées en Italie et unies par la conjonction italienne « e » signifiant « et », et, d’autre part, la marque contestée, laquelle ne viserait qu’une seule personne physique.

94      À cet égard, il y a lieu de relever que chacune des marques en conflit est composée, dans l’esprit du public pertinent, à savoir l’acheteur moyen de vêtements en Italie, d’un prénom suivi d’un nom patronymique.

95      En effet, comme l’a souligné à juste titre la chambre de recours aux points 33 et 34 de la décision attaquée, l’élément « mayer » est compris par le public de référence comme constituant un nom patronymique d’origine germanique assez répandu en Italie, surtout dans certaines zones du Nord. Cette perception dans l’esprit du public pertinent est validée par la seconde position dudit élément dans chacune des marques en conflit. Elle n’est pas infirmée par le fait, constant entre les parties et rappelé par la chambre de recours, que cet élément est en réalité, dans les deux marques en conflit, un prénom hébreu, plus précisément une altération ashkénaze du nom hébreu Meïr. Plus précisément, « le nom Mayer est un nom très ancien (remontant à l’époque talmudique, de Maïr) et signifie ‘celui qui illumine’ [car le personnage à qui il fut conféré enseigna la Loi aux sages] ; ce prénom est très commun au sein de la communauté juive de Tripoli [Libye] et est utilisé comme nom propre de personnes » [selon la page 89 des annexes du mémoire en intervention, reproduisant un jugement du 8 juin 2007 du Tribunale di Milano (Tribunal de Milan)]. Force est toutefois de constater que les arcanes de l’origine talmudique et de l’altération ashkénaze du nom hébreu Meïr ou Maïr demeurent ignorés de l’acheteur moyen de vêtements en Italie, qui perçoit l’élément « mayer » comme un nom patronymique d’origine germanique.

96      Au demeurant, il ressort de la requête que le requérant ne conteste pas cette perception du public pertinent et même qu’il admet que l’élément « mayer » puisse être perçu comme un nom patronymique, puisqu’il s’évertue à prouver le caractère répandu en Italie dudit élément, non en tant que prénom, mais en tant que nom patronymique.

97      Quant aux éléments « david » et « daniel », ils seront compris par le public pertinent comme se référant à des prénoms, eu égard à leur forte ressemblance avec les prénoms italiens correspondants, à savoir Davide et Daniele. Par ailleurs, comme l’a relevé la chambre de recours au point 31 de la décision attaquée, les prénoms David et Daniel se caractérisent tous deux par un fort lien avec la tradition judaïque.

98      Étant donné que chacune des marques en conflit est composée, pour le public pertinent, d’un prénom suivi d’un nom patronymique, la simple présence d’une esperluette dans la marque antérieure ne saurait suffire à exclure toute similitude conceptuelle avec la marque contestée, mais peut tout au plus relativiser cette similitude conceptuelle. À cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence du Tribunal selon laquelle c’est à juste titre que la chambre de recours avait conclu à l’existence d’une similitude visuelle, d’une similitude phonétique et d’une relative similitude conceptuelle entre la marque James Jones dont l’enregistrement était demandé et la marque antérieure JACK & JONES (arrêt James Jones, point 85 supra, points 34 à 37). Cette jurisprudence est applicable par analogie, vu la symétrie évidente entre la structure desdites marques, d’une part, et celle des éléments distinctifs et dominants des marques David Mayer et DANIEL & MAYER (made in Italy), d’autre part. Par ailleurs, la mention « made in Italy » est conceptuellement descriptive et négligeable.

99      Eu égard aux considérations qui précèdent, c’est sans erreur que la chambre de recours a considéré que chacune des marques en conflit évoquait, dans l’esprit du public pertinent, la référence à une seule personne physique, désignée par un prénom judaïque et un nom patronymique germanique.

100    Partant, le présent grief du requérant doit être rejeté.

101    En conclusion sur l’appréciation globale de la similitude entre les signes, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu, au point 37 de la décision attaquée, à l’existence d’une similitude globale, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, entre les marques en conflit.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

102    La chambre de recours a estimé, aux points 38 à 40 de la décision attaquée, que, compte tenu de l’identité ou de la similitude des produits concernés, ainsi que de la similitude des marques en conflit, il existait entre celles-ci un risque de confusion.

103    Sur l’appréciation globale du risque de confusion, il y a lieu d’observer que, compte tenu de l’identité ou de la similitude des produits concernés, selon qu’ils relèvent de la classe 18 ou 25, ainsi que de la similitude globale, sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, des signes, considérés principalement dans leurs éléments distinctifs et dominants que sont l’élément « mayer », perçu par le public pertinent comme un nom patronymique, et les prénoms David ou Daniel, et accessoirement dans l’élément secondaire, au regard des éléments distinctifs et dominants précités, que constitue l’esperluette « & », alors que la mention « made in Italy » s’avère descriptive et négligeable, il existe entre les marques en conflit un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

104    Cette appréciation n’est pas remise en cause par les allégations du requérant à cet égard, desquelles peuvent être dégagés six griefs. Le requérant excipe notamment de la prétendue notoriété de la marque contestée, des modalités de vente des produits concernés et de la prétendue coexistence paisible des marques en conflit.

105    S’agissant du premier grief selon lequel, depuis des décennies, le public pertinent est visé par une vaste campagne médiatique et publicitaire ayant trait à la marque contestée, à telle enseigne que celle-ci jouirait d’une notoriété dans le secteur de l’habillement pour homme, il suffit de relever que, d’après une jurisprudence constante, seule la renommée de la marque antérieure, et non celle de la marque postérieure, doit être prise en compte pour apprécier si la similitude entre les produits désignés par deux marques est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion (voir, en ce sens, arrêts Aceites del Sur-Coosur/Koipe, point 48 supra, point 84, et AGATHA RUIZ DE LA PRADA, point 52 supra, point 64, et jurisprudence citée). Cette jurisprudence est conforme à l’objectif de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, qui est de fournir une protection adéquate aux titulaires de droits antérieurs contre des demandes postérieures de marques communautaires identiques ou similaires.

106    S’agissant du deuxième grief selon lequel les produits désignés par chacune des marques en conflit seraient vendus dans des points de vente « monomarques », de sorte que le public respectif accéderait de façon exclusive à l’un ou l’autre signe, il convient de rappeler que l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit ne saurait être rendue dépendante des modalités que les titulaires des marques en cause ont choisies aux fins de la commercialisation de leurs produits, le droit d’exclusivité que confère la marque communautaire n’étant pas susceptible de varier selon le mode de distribution retenu (voir, en ce sens, arrêt AGATHA RUIZ DE LA PRADA, point 52 supra, point 37).

107    En effet, les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques. À cet égard, force est de constater que les modalités d’utilisation des marques en conflit pour les produits en cause, telles que le marché visé, la concurrence et les canaux de distribution, dépendent des intentions commerciales subjectives des titulaires respectifs de ces marques et ne sauraient donc être prises en considération aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion entre elles [voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 59 ; du Tribunal du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, Rec. p. II‑2217, point 63, et du 15 décembre 2010, Bianchin/OHMI – Grotto (GASOLINE), T‑380/09, non publié au Recueil, point 51]. En l’espèce, l’existence d’un risque de confusion ne saurait dès lors être écartée au seul motif que les produits respectivement concernés par les marques en conflit seraient vendus dans des points de vente « monomarques » exclusifs et différents les uns des autres.

108    S’agissant du troisième grief selon lequel les marques en conflit coexisteraient paisiblement, sans le moindre « épisode de confusion », sur le marché italien depuis des décennies, il importe de souligner, d’emblée, que la constatation d’un risque de confusion entre les marques en conflit ne requiert pas que les marques en conflit aient été effectivement confondues. Ensuite, il convient de rappeler que, s’il ne saurait être exclu que la coexistence paisible sur le marché de deux marques en conflit puisse éventuellement contribuer, conjointement à d’autres éléments, à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent, une telle éventualité ne peut toutefois être envisagée que si, au cours de la procédure devant l’OHMI, le requérant d’une marque communautaire a dûment prouvé cette coexistence paisible et l’amoindrissement du risque de confusion qu’elle produit dans l’esprit du public pertinent (voir, en ce sens, arrêt Aceites del Sur-Coosur/Koipe, point 48 supra, point 82).

109    Or, en l’espèce, force est de constater que les marques en conflit ne jouissent guère d’une coexistence paisible. En effet, il est constant entre les parties que celles-ci sont opposées dans plusieurs litiges judiciaires toujours pendants en Italie et portant sur les mêmes marques. En outre, il ressort du dossier, en particulier des annexes du mémoire en intervention, que les juridictions italiennes ont rendu plusieurs décisions sur la contrefaçon alléguée de la marque DANIEL & MAYER de l’intervenante par la marque DAVID MAYER du requérant. Dans ce contexte, il convient de préciser que l’autonomie du système de la marque communautaire par rapport aux systèmes nationaux n’affecte pas la valeur probante de décisions nationales en tant que preuves factuelles de l’absence de coexistence paisible entre les marques en conflit ou d’autres marques similaires.

110    S’agissant du quatrième grief tiré de la jurisprudence du Tribunal selon laquelle, dans un secteur tel que celui de l’habillement ou de la mode, où l’usage de signes constitués de patronymes est courant, il peut être supposé que, en règle générale, un nom très répandu apparaîtra plus fréquemment dans le commerce qu’un nom rare, que, pour cette raison, le consommateur ne croira pas à l’existence d’un lien économique entre tous les titulaires des marques comprenant le nom de famille « Rossi », et que, partant, il ne pensera pas que les entreprises commercialisant des sacs sous la marque SISSI ROSSI sont économiquement liées ou identiques à celles commercialisant des chaussures sous la marque MISS ROSSI [arrêt du Tribunal du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, Rec. p. II‑685, point 83], il suffit de relever que cette jurisprudence n’est guère pertinente en l’espèce, faute pour le nom Mayer de constituer un nom patronymique extrêmement répandu à l’égard du public pertinent en Italie, comme peut l’être le nom Rossi.

111    En revanche, il convient de rappeler la jurisprudence relative à un nom patronymique moins répandu en Italie. Ainsi, le Tribunal a considéré que le consommateur italien, en raison du fait qu’il attribue généralement plus de caractère distinctif au nom de famille qu’au prénom, gardera en mémoire l’élément Fusco plutôt que les prénoms Antonio ou Enzo, et que, dans ces circonstances, la chambre de recours a pu considérer sans erreur de droit qu’un consommateur confronté à un produit pourvu de la marque demandée ENZO FUSCO pourrait confondre celle-ci avec la marque antérieure ANTONIO FUSCO, de sorte qu’il existe un risque de confusion [arrêt du Tribunal du 1er mars 2005, Fusco/OHMI – Fusco International (ENZO FUSCO), T‑185/03, Rec. p. II‑715, point 67].

112    Force est de constater que la fréquence du nom Mayer en Italie s’avère davantage comparable à celle du nom Fusco qu’à celle d’un nom italien par excellence comme le nom Rossi. En outre, les prénoms David et Daniel sont beaucoup plus similaires que les prénoms Antonio et Enzo. Le risque de confusion n’en est donc que plus élevé en l’espèce.

113    S’agissant du cinquième grief selon lequel la nature même des noms à consonance étrangère réduirait le risque de confusion, au motif que le consommateur moyen serait plus attentif à ces noms qu’à ceux dans sa langue maternelle, le nom Mayer revêtant d’ailleurs en Italie une consonance germanique, en dépit de son origine hébraïque, il y a lieu d’observer, au contraire, que le consommateur moyen, étant plus familier avec les noms de sa langue maternelle, y sera plus attentif et percevra éventuellement des différences mêmes minimes entre eux, alors qu’il confondra plus aisément des noms à consonance étrangère, malgré des différences significatives qui seraient perceptibles par le public dont cette langue étrangère est la langue maternelle.

114    S’agissant du sixième grief excipé de l’utilisation, par l’intervenante, de la marque antérieure dans les graphismes les plus divers, y compris en caractères blancs sur fond noir ou en caractères noirs sur fond rose, il suffit de rappeler que la marque antérieure constitue une marque verbale, susceptible de toutes les figurations, au contraire de la marque contestée, laquelle a été déposée en tant que marque figurative.

115    En conclusion sur l’appréciation globale du risque de confusion, il y a lieu de considérer que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

116    C’est dès lors à bon droit que la chambre de recours a rejeté le recours du requérant contre la décision de la division d’annulation, laquelle avait conclu à l’existence d’un risque de confusion et avait partiellement annulé la marque contestée.

117    Partant, le troisième moyen du requérant, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, est dénué de fondement et voué au rejet.

118    Au vu de l’irrecevabilité du premier moyen et de l’absence de fondement des deuxième et troisième moyens, il y a lieu de rejeter le recours du requérant dans son intégralité.

 Sur les dépens

119    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

120    Le requérant ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      M. David Mayer Naman est condamné aux dépens.

Azizi

Frimodt Nielsen

Kancheva

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 mars 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.