Language of document : ECLI:EU:C:2012:793

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. Niilo Jääskinen

présentées le 13 décembre 2012 (1)

Affaire C‑627/10

Commission européenne

contre

République de Slovénie

«Recours en manquement – Directive 91/440/CEE – Développement de chemins de fer communautaires – Directive 2001/14/CE – Répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire – Article 6, paragraphe 3, et annexe II de la directive 91/440 – Article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 – Gestionnaire de l’infrastructure – Participation d’un gestionnaire de l’infrastructure étant lui-même une entreprise ferroviaire dans l’exercice de l’établissement des horaires de service – Gestion du trafic – Article 6, paragraphes 2 à 5, de la directive 2001/14 – Absence de mesures destinées à encourager le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès – Articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 – Coût directement imposable à l’exploitation des services ferroviaires – Redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services – Prise en compte des redevances d’autres systèmes de trafic – Article 11 de la directive 2001/14 – Absence d’un système d’amélioration des performances visant à inciter les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les défaillances et à améliorer l’exploitation de l’infrastructure»





I –    Introduction

1.        Par le présent recours en manquement, la Commission européenne demande à la Cour de constater que la République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440/CEE (2), telle que modifiée par la directive 2001/12/CE (3) (ci-après la «directive 91/440»), de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14/CE (4), ainsi que des articles 6, paragraphes 2 à 5, 7, paragraphe 3, et 11 de la même directive (5). La République de Slovénie conclut au rejet du recours introduit par la Commission.

2.        La présente affaire s’inscrit dans une série de recours en manquement (6) introduits par la Commission en 2010 et en 2011 et portant sur l’application par les États membres des directives 91/440 et 2001/14, dont l’objet principal est d’assurer l’accès équitable et non discriminatoire des entreprises ferroviaires à l’infrastructure, à savoir au réseau ferroviaire. Ces recours sont inédits car ils offrent à la Cour la possibilité d’examiner pour la première fois la libéralisation des chemins de fer dans l’Union européenne et, notamment, d’interpréter ce qu’il est convenu d’appeler le «premier paquet ferroviaire».

3.        J’ai déjà présenté, le 6 septembre 2012, mes conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Portugal, précité, ainsi que dans les affaires précitées Commission/Hongrie; Commission/Espagne; Commission/Autriche, et Commission/Allemagne. En sus des présentes conclusions, je présente aujourd’hui mes conclusions dans les affaires précitées Commission/Pologne; Commission/République tchèque; Commission/France, et Commission/Luxembourg. Dans la mesure où la présente affaire porte sur des griefs analogues à ceux que j’ai déjà eu l’occasion d’analyser dans les conclusions susvisées, je me limiterai à faire référence aux points pertinents de celles-ci, sans, toutefois, reprendre dans son intégralité l’argumentation y figurant.

II – Le cadre juridique

A –    Le droit de l’Union

1.      La directive 91/440

4.        Aux termes de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440:

«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure, qui sont énumérées à l’annexe II, sont confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d’une manière probante.

Les États membres peuvent, toutefois, confier aux entreprises ferroviaires ou à toute autre entité la perception des redevances et la responsabilité de la gestion des infrastructures, par exemple, tels que l’entretien et le financement.»

5.        L’annexe II de la directive 91/440 énumère les «fonctions essentielles» visées à l’article 6, paragraphe 3, de celle-ci:

«[…]

–        adoption des décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels,

–        adoption des décisions concernant la tarification de l’infrastructure,

[…]»

2.      La directive 2001/14

6.        L’article 6, paragraphes 2 à 5, de la directive 2001/14 dispose:

«2.      Le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3.      Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

4.      Lorsqu’un contrat est conclu, ses modalités et la structure des versements destinés à procurer des moyens financiers au gestionnaire de l’infrastructure sont convenues à l’avance et couvrent toute la durée du contrat.

5.      Une méthode d’imputation des coûts est élaborée. Les États membres peuvent la soumettre à approbation préalable. Il convient de mettre à jour cette méthode de temps à autre en fonction des meilleures pratiques internationales.»

7.        Aux termes de l’article 7, paragraphe 3, de ladite directive:

«Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.»

8.        L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 dispose:

«Un État membre peut, afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure et, si le marché s’y prête, percevoir des majorations sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le système de tarification respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires.

Le niveau des redevances ne doit cependant pas exclure l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête.»

9.        Selon l’article 11, paragraphe 1, de ladite directive:

«Par l’établissement d’un système d’amélioration des performances, les systèmes de tarification de l’infrastructure encouragent les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l’infrastructure à réduire au minimum les défaillances et à améliorer les performances du réseau ferroviaire. Ce système peut comporter des sanctions en cas d’actes à l’origine de défaillances du réseau, des compensations pour les entreprises qui sont victimes de ces défaillances et des primes en cas de bonnes performances dépassant les prévisions.»

10.      L’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 prévoit:

«Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions visées au paragraphe 1 et décrites au présent chapitre sont assumées par un organisme de répartition qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

B –    La réglementation slovène

1.      La loi sur le transport ferroviaire

11.      L’article 21 de la loi sur le transport ferroviaire (Zakon o železniškem prometu) (7) dispose:

«1.      Aux fins de l’exercice des fonctions visées au présent article, le gouvernement crée une agence publique pour le transport ferroviaire [ci-après ʽagence pour le transport ferroviaire’ ou ‘agence’].

[…]

3.      L’agence exerce ses fonctions de manière à garantir un accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire, y compris:

–        la répartition des sillons;

[…]

–        l’adoption d’un horaire de service pour le réseau.»

12.      Aux termes de l’article 11 de ladite loi:

«1.      L’entretien de l’infrastructure ferroviaire publique et la gestion du transport ferroviaire sur cette infrastructure constituent des obligations de service public.

2.      Le gestionnaire s’acquitte des obligations de service public mentionnées au paragraphe précédent conformément au contrat de service public.

[…]

4.      La régulation du transport ferroviaire sur l’infrastructure ferroviaire publique comprend principalement:

–        la gestion de la circulation des trains;

–        l’établissement et l’application de l’horaire de service;

[…]»

2.      Le décret relatif à la répartition des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire publique

13.      Selon l’article 9 du décret du 18 avril 2008 relatif à la répartition des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire publique (Uredba o dodeljevanju vlakovnih poti in uporabnini na javni železniški infrastrukturi) (8):

«1.      L’agence, le gestionnaire et le candidat respectent, dans le cadre de la procédure de construction et de répartition des sillons, les délais et principes suivants:

[…]

–        le gestionnaire établit un projet de nouvel horaire de service et de nouveaux horaires de train au plus tard cinq mois avant la prise d’effet du nouvel horaire de service et les transmet à l’agence;

–        lors de l’établissement dudit projet, le gestionnaire consulte les parties intéressées et tous ceux qui souhaitent formuler des commentaires au sujet de l’incidence que l’horaire de service pourrait avoir sur leur aptitude à fournir des services ferroviaires durant la période de validité de l’horaire de service;

–        l’agence envoie le projet de nouvel horaire de service aux candidats qui ont demandé l’attribution d’un sillon et aux autres parties intéressées qui souhaitent formuler des commentaires au sujet de l’incidence que l’horaire de service pourrait avoir sur leur aptitude à fournir des services ferroviaires durant la période de validité de l’horaire de service, et leur impartit un délai d’au moins un mois pour lui communiquer leurs éventuels commentaires.»

14.      L’article 20, paragraphes 2 et 5, dudit décret dispose:

«2.      Le gestionnaire est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès. À cette fin, le contrat de trois ans conclu entre l’agence et le gestionnaire prévoit qu’une partie des excédents dégagés d’autres activités commerciales du gestionnaire au sens du paragraphe précédent n’est pas prise en compte dans le calcul des redevances, mais est laissée au gestionnaire à titre de mesure d’incitation.

[…]

5.      La méthode de calcul des redevances tient également compte de toutes les données relatives au système de tarification ainsi que d’informations suffisantes sur les prix des services visés aux articles 23 et 24 s’ils ne sont proposés que par un seul fournisseur. La méthode tient non seulement compte des informations sur le système de tarification en vigueur, mais aussi des indications relatives aux modifications probables des redevances pour les trois années suivantes. De même, elle tient compte des mesures visant à inciter les entreprises ferroviaires et le gestionnaire à réduire au minimum les défaillances et à améliorer l’exploitation de l’infrastructure.

Il peut s’agir de sanctions en cas d’actes à l’origine de défaillances du réseau, de compensations pour les entreprises ferroviaires qui sont victimes de ces défaillances et de primes en cas de bonnes performances dépassant les prévisions.»

15.      Aux termes de l’article 21 du même décret:

«1.      L’agence respecte les critères prévus par la loi pour fixer le montant des redevances.

2.      Pour évaluer les critères visés au paragraphe précédent, l’agence respecte les coûts d’exploitation du type de train déterminé, qui sont notamment attestés par les coûts d’entretien des voies, des infrastructures liées aux mouvements du train et de gestion du transport ferroviaire.

3.      L’agence s’assure que toutes les entreprises ferroviaires effectuant des prestations de services de nature équivalente sur une partie similaire du marché sont soumises à des redevances objectivement équivalentes et non discriminatoires.»

III – La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

16.      Le 10 mai 2007, les services de la Commission ont adressé un questionnaire aux autorités slovènes en vue de vérifier la transposition par la République de Slovénie des directives du premier paquet ferroviaire. Celles‑ci y ont répondu le 11 juillet 2007. Par courrier du 21 novembre 2007, la Commission a demandé des renseignements complémentaires à la République de Slovénie, laquelle a répondu par courrier du 16 janvier 2008.

17.      Le 26 juin 2008, la Commission a adressé à la République de Slovénie une lettre de mise en demeure indiquant que, sur la base des informations communiquées à la Commission, le premier paquet ferroviaire n’était pas dûment transposé dans son ordre juridique interne en ce qui concerne l’indépendance des fonctions essentielles du gestionnaire de l’infrastructure, la tarification de l’accès à l’infrastructure ferroviaire et l’organisme de contrôle ferroviaire.

18.      La République de Slovénie a répondu à la lettre de mise en demeure le 22 août 2008. Elle a, par la suite, communiqué à la Commission des informations complémentaires par lettres des 16 mars et 8 juillet 2009.

19.      Considérant que la République de Slovénie n’avait pas pris les mesures nécessaires pour dûment transposer les directives relatives au premier paquet ferroviaire, la Commission a adressé à cet État membre un avis motivé le 9 octobre 2009.

20.      Par courrier du 8 décembre 2009, la République de Slovénie a indiqué avoir pris conscience des infractions qui lui étaient reprochées dans l’avis motivé et fait part de sa volonté d’y remédier. Dans sa réponse à l’avis motivé datée du 8 mars 2010, la République de Slovénie a réitéré, à tout point de vue, les considérations qu’elle avait exposées dans sa lettre du 8 décembre 2009.

21.      Le 29 décembre 2010, la Commission a introduit le présent recours en manquement.

22.      Par ordonnance du président de la Cour du 14 juin 2011, la République tchèque et le Royaume d’Espagne ont été admis à intervenir au soutien des conclusions de la République de Slovénie.

23.      La Commission, la République de Slovénie, la République tchèque et le Royaume d’Espagne étaient représentés lors de l’audience qui s’est tenue le 20 septembre 2012.

IV – Analyse du recours en manquement

A –    Sur le premier grief, tiré du manque d’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure dans l’exercice des fonctions essentielles

1.      Argumentation des parties

24.      La Commission soutient que la République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440, ainsi que de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, dans la mesure où le gestionnaire de l’infrastructure, qui fournit lui-même des services de transport ferroviaire, d’une part, contribue à l’établissement de l’horaire de service et, d’autre part, régule la circulation des trains et, partant, participe à la fonction d’adoption des décisions concernant la répartition des sillons ou la répartition des capacités d’infrastructure.

25.      La Commission fait valoir à cet égard que, si l’article 21 de la loi sur le transport ferroviaire confie les tâches de répartition des sillons à l’agence pour le transport ferroviaire, le gestionnaire de l’infrastructure, à savoir les Chemins de fer slovènes, est associé à l’adoption des décisions concernant la répartition des sillons ou à la répartition des capacités d’infrastructure en vertu de l’article 11, paragraphe 4, de cette loi.

26.      La Commission relève en outre que les Chemins de fer slovènes continuent de participer à l’établissement de l’horaire de service dès lors que l’article 9 du décret du 18 avril 2008 prévoit que le gestionnaire de l’infrastructure établit un projet de nouvel horaire de service et consulte les parties intéressées à son sujet, avant de le transmettre à ladite agence qui envoie le projet de nouvel horaire de service aux candidats et arrête, ensuite, sa décision définitive de répartition.

27.      La Commission fait, par ailleurs, valoir que le gestionnaire de l’infrastructure est également chargé de la régulation de la circulation des trains, dans la mesure où l’article 11, paragraphe 4, de la loi sur le transport ferroviaire dispose que la gestion de la circulation des trains relève de la gestion du transport ferroviaire sur l’infrastructure ferroviaire publique.

28.      La République de Slovénie, quant à elle, soutient que les allégations de la Commission sont dénuées de fondement. Elle fait valoir en particulier que l’article 3 de la loi portant modification de la loi sur le transport ferroviaire (Zakon o spremembah in dopolnitvah Zakona o železniškem prometu) (9) (ci‑après «la loi du 27 décembre 2010»), a retiré toute compétence au gestionnaire de l’infrastructure pour l’établissement des horaires du réseau et que cette compétence a été entièrement transférée à l’agence pour le transport ferroviaire.

29.      La République de Slovénie soutient par ailleurs que la gestion de la circulation des trains ne figure pas parmi les «fonctions essentielles» énumérées à l’annexe II de la directive 91/440. L’État membre fait valoir que les horaires sont fixés par l’agence pour le transport ferroviaire, le gestionnaire de l’infrastructure n’ayant accès, en tant que gestionnaire du trafic, qu’au contrôle effectif du parcours et, ce faisant, il n’obtiendrait que des données que les autres entreprises ferroviaires peuvent également obtenir en consultant les horaires du réseau.

2.      Examen du premier grief

30.      La République de Slovénie conteste la première branche du premier grief de la Commission en invoquant des dispositions législatives et réglementaires adoptées après l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, à savoir la loi du 27 décembre 2010 et la loi sur la société des chemins de fer slovènes (10). L’État membre en cause a précisé à l’audience que, lors de la modification de la loi sur le transport ferroviaire intervenue en 2007, la fonction de l’attribution des sillons avait déjà été transférée à une agence indépendante, mais que l’établissement des horaires du réseau n’avait, quant à lui, été transféré à l’agence en question que lors de l’adoption d’un décret complémentaire en 2011.

31.      À cet égard, il suffit de rappeler que la Cour a itérativement jugé que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (11). C’est donc la réglementation en vigueur à l’expiration du délai de deux mois imparti par l’avis motivé du 9 octobre 2009 qui est déterminante aux fins de l’examen de la première branche du premier grief.

32.      En Slovénie, l’opérateur historique s’est vu confier, sous le contrôle de l’organe indépendant en charge des fonctions essentielles, la répartition des capacités et l’attribution des sillons individuels (12), consistant en l’élaboration du «projet de nouvel horaire de service et de nouveaux horaires de train» pour la République de Slovénie (13).

33.      Selon l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, les fonctions énumérées à l’annexe II de celle-ci ne peuvent être «confiées [qu’]à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire». Cette annexe II fait référence aux «décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels». Il résulte ainsi du texte de la directive que «la définition et l’évaluation de la disponibilité» font partie des attributions de l’organe en charge de la fonction essentielle de répartition des capacités et de l’attribution des sillons.

34.      Pour cette raison, je pense qu’il n’est pas possible au gestionnaire de l’infrastructure indépendant des entreprises ferroviaires, voire à un organisme de répartition, de confier à une telle entreprise l’intégralité des travaux préparatoires, en amont de la prise de décision. Ainsi, le fait que les Chemins de fer slovènes agissent pour le compte de l’agence pour le transport ferroviaire, laquelle garde l’entière compétence pour arrêter le plan d’horaires et l’attribution des sillons individuels, ne suffit pas à assurer la conformité de ce système aux exigences du droit de l’Union.

35.      De fait, c’est l’opérateur historique, à savoir les Chemins de fer slovènes, qui gère l’infrastructure ferroviaire. Certes, une nouvelle entité a été créée, à savoir l’agence pour le transport ferroviaire, et a été chargée de la répartition des capacités et de l’attribution individuelle des sillons. Toutefois, il ressort de l’article 9 du décret du 18 avril 2008 que c’est le gestionnaire de l’infrastructure, autrement dit les Chemins de fer slovènes, qui établit un projet de nouvel horaire de service et de nouveaux horaires de train et les transmet à ladite agence. Lors de l’établissement dudit projet, le gestionnaire de l’infrastructure est chargé de mener des consultations avec les parties intéressées et tous ceux qui souhaitent formuler des commentaires.

36.      Je rappelle également que, en vertu de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, lorsque le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant d’une entreprise ferroviaire, ce qui est le cas en Slovénie, la fonction de répartition des capacités de l’infrastructure est confiée à un organisme de répartition, qui est indépendant sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel de toute entreprise de transport. À cet égard, la Commission constate, à juste titre, que les Chemins de fer slovènes continuent de participer à l’établissement de l’horaire de service et, partant, à la fonction de répartition des sillons ou à la répartition des capacités d’infrastructure.

37.      Selon moi, l’organe en charge de la fonction essentielle de répartition des capacités et des sillons doit maîtriser l’ensemble du processus de répartition. Le manquement de l’État membre est donc constitué, dès lors que le gestionnaire de l’infrastructure, qui est une entreprise de transport ferroviaire, est associé à l’exercice d’une fonction essentielle.

38.      La seconde branche du premier grief de la Commission est tirée du fait que, en Slovénie, le gestionnaire de l’infrastructure, qui fournit lui‑même des services de transport ferroviaire, assurerait la gestion de la circulation des trains.

39.      Je relève d’emblée que cette branche est en substance identique au premier grief dans l’affaire Commission/Hongrie, précitée (voir points 49 à 70 de mes conclusions). Pour cette raison, il convient de se référer au raisonnement juridique développé dans les conclusions rendues dans ladite affaire. La mise en œuvre de la réglementation slovène présente toutefois des différences par rapport à la situation prévalant en Hongrie. Par conséquent, l’examen du point de savoir si le grief est fondé, ou non, doit tenir compte de la situation spécifique qui prévaut en Slovénie.

40.      La République de Slovénie soutient que la gestion de la circulation des trains ne figure pas parmi les «fonctions essentielles» énumérées à l’annexe II de la directive 91/440. C’est également la conclusion à laquelle je suis parvenu dans mes conclusions dans l’affaire Commission/Hongrie, précitée.

41.      À l’audience, il me semble que la Commission a admis cette analyse. Cette dernière affirme toutefois que, en Slovénie, l’attribution du sillon se fait dans le cadre de la gestion du trafic. Dans sa réplique, la Commission s’est référée au programme du réseau de la République de Slovénie au soutien de sa position selon laquelle, en cas de perturbation du trafic, seul le gestionnaire peut attribuer le sillon nécessaire. Selon ledit programme du réseau, en cas de besoin ou lorsque les infrastructures sont provisoirement hors d’usage, le gestionnaire peut provisoirement refuser l’application des sillons attribués aussi longtemps que nécessaire pour rétablir le système. De surcroît, en cas de circonstances exceptionnelles entraînant un écart par rapport aux sillons attribués, le gestionnaire a le droit, lors de la consultation préalable avec le transporteur, d’adapter les sillons d’une manière garantissant le mieux possible les communications déterminées à l’origine. La République de Slovénie n’a pas réfuté ces affirmations.

42.      Toutefois, dans la requête, la Commission a affirmé que la gestion de la circulation des trains devait être confiée à une instance qui n’est pas elle-même fournisseur de services de transport ferroviaire, sans aucunement se référer à la suppression ou à la réattribution des sillons en cas de perturbation du trafic.

43.      J’en conclus que, dans la réplique, la Commission a élargi l’objet de la requête ou, à tout le moins, introduit un nouvel élément de motivation du manquement allégué, pour autant qu’elle y vise la gestion du trafic en cas de perturbation du trafic. Dans la mesure où le recours de la Commission se fonde sur ce raisonnement, il doit donc être déclaré irrecevable. En revanche, la motivation du grief relatif aux modalités de gestion du trafic exposée dans la requête doit être considérée comme non fondée pour les raisons exposées dans mes conclusions dans l’affaire Commission/Hongrie, précitée.

44.      Néanmoins, si la Cour devait considérer comme recevables les éléments de motivation tirés des compétences du gestionnaire de l’infrastructure en cas de perturbation du trafic, je rappelle que, dans mes conclusions dans l’affaire Commission/Hongrie, précitée, j’étais parvenu à la conclusion qu’un gestionnaire non indépendant chargé de la gestion du trafic ferroviaire pouvait se voir reconnaître le pouvoir de supprimer des sillons en cas de perturbation du trafic, mais que leur réattribution devait être considérée comme faisant partie des fonctions essentielles réservées qui ne pouvaient être exercées que par un gestionnaire indépendant ou par un organisme de répartition.

45.      En Slovénie, à la différence de la Hongrie, le gestionnaire non indépendant peut décider d’adapter les sillons écartés. La seconde branche du grief, si elle était recevable, devrait donc être considérée comme fondée, dans la mesure où elle vise la possibilité ouverte au gestionnaire non indépendant de décider de la réattribution des sillons en cas de perturbation du trafic.

46.      Pour ces raisons, je propose que la première branche du premier grief de la Commission soit déclarée fondée, dans la mesure où elle est tirée de la participation du gestionnaire de l’infrastructure non indépendant dans la répartition des sillons. La seconde branche du premier grief doit être déclarée partiellement non fondée et partiellement irrecevable, dans la mesure où elle concerne la gestion du trafic par le gestionnaire. Cependant, si cette dernière branche devait être considérée comme recevable dans son intégralité, elle serait fondée dans la mesure où elle vise la possibilité ouverte au gestionnaire non indépendant de décider de la réattribution des sillons en cas de perturbation du trafic.

B –    Sur le deuxième grief, tiré de l’absence de régime d’incitation

1.      Argumentation des parties

47.      La Commission soutient que, en ne prévoyant pas de mécanisme destiné à encourager le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès, la République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphes 2 à 5, de la directive 2001/14.

48.      La République de Slovénie fait valoir que l’article 10 de la loi du 27 décembre 2010 prévoit que le gestionnaire de l’infrastructure est encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de garantie de l’infrastructure ainsi que le niveau de la redevance.

2.      Examen du deuxième grief

49.      Je constate d’emblée que, pour les raisons exposés ci-dessus, la défense de la République de Slovénie est inopérante dans la mesure où elle est basée sur les modifications législatives introduites par la loi du 27 décembre 2010. Or, le bien-fondé du grief doit être examiné sur la base des dispositions de l’article 20, paragraphe 2, du décret du 18 avril 2008.

50.      J’observe, en outre, que le deuxième grief de la Commission, tiré de l’absence de mesures d’incitation en vue de réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès, est en substance identique au troisième grief dans l’affaire Commission/Pologne, précitée (voir points 74 à 84 de mes conclusions), au deuxième grief dans l’affaire Commission/République tchèque, précitée (voir points 47 à 55 de mes conclusions), au troisième grief dans l’affaire Commission/Allemagne (voir points 93 à 104 de mes conclusions) ainsi qu’à la seconde branche du second grief dans l’affaire Commission/France (C‑625/10), précitée (voir points 63 à 69 de mes conclusions).

51.      Pour cette raison, il convient de se référer au raisonnement juridique développé dans les conclusions rendues dans lesdites affaires. La réglementation slovène et sa mise en œuvre présentent cependant des spécificités par rapport à la situation prévalant dans lesdits États membres. Par conséquent, l’examen du point de savoir si le grief est fondé ou non doit tenir compte de la situation spécifique qui prévaut en Slovénie.

52.      C’est à bon droit que la Commission a relevé que l’article 20, paragraphe 2, du décret du 18 avril 2008 se bornait à reproduire le libellé de l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 2001/14. Pour autant, si la réglementation slovène habilite les autorités à prendre les mesures prévues par le législateur de l’Union pour pouvoir inciter le gestionnaire de l’infrastructure à réduire des coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès, il n’en demeure pas moins que, à l’expiration du délai prévu dans l’avis motivé, aucun contrat pluriannuel ni aucune mesure réglementaire du type de celles visées à l’article 6, paragraphe 3, de cette directive n’avaient été adoptés. Par conséquent, en l’absence des mesures d’incitation prévues à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de ladite directive, il n’existe aucune disposition ou mesure assurant la transposition des paragraphes 4 et 5 dudit article.

53.      Pour ces raisons, le deuxième grief de la Commission doit être considéré comme fondé.

C –    Sur le troisième grief, tiré de l’absence de système d’amélioration des performances

1.      Argumentation des parties

54.      La Commission soutient que, en n’adoptant pas de système d’amélioration des performances visant à inciter les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les défaillances et à améliorer l’exploitation de l’infrastructure, la République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 11 de la directive 2001/14.

55.      La République de Slovénie rétorque que l’article 11 de la directive 2001/14 a été transposé dans la législation nationale par la loi du 27 décembre 2010 qui a ajouté deux nouveaux paragraphes à l’article 15 quinquies de la loi sur le transport ferroviaire, fournissant une base juridique pour l’adoption d’une disposition réglementaire qui permettra de fixer le système ultérieur d’amélioration des performances.

2.      Examen du troisième grief

56.      Force est à nouveau de constater que, pour les raisons exposées au point 49 des présentes conclusions, la défense de la République de Slovénie est inopérante, dans la mesure où elle vise des modifications législatives introduites par la loi du 27 décembre 2010. Il convient donc d’examiner le grief exclusivement à la lumière des dispositions de l’article 20, paragraphe 5, du décret du 18 avril 2008.

57.      Il convient de rappeler que le troisième grief de la Commission, tiré de l’absence de mesures encourageant les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l’infrastructure à réduire au minimum les défaillances et à améliorer les performances du réseau ferroviaire moyennant l’établissement d’un «système d’amélioration des performances», est en substance identique au deuxième grief dans l’affaire Commission/Espagne, précitée (voir points 67 à 72 de mes conclusions), au quatrième grief dans l’affaire Commission/République tchèque, précitée (voir points 90 à 93 de mes conclusions), ainsi qu’à la première branche du second grief dans l’affaire Commission/France (C‑625/10), précitée (voir points 61 et 62 de mes conclusions).

58.      Pour cette raison, il convient de se référer au raisonnement juridique développé dans les conclusions rendues dans lesdites affaires. La réglementation slovène et sa mise en œuvre présentent cependant des différences par rapport à la situation prévalant dans lesdits États membres. Par conséquent, l’examen du point de savoir si le grief est fondé ou non doit tenir compte de la situation spécifique qui prévaut en Slovénie.

59.      C’est à bon droit que la Commission a relevé que l’article 20, paragraphe 5, du décret du 18 avril 2008 reproduisait le libellé de l’article 11 de la directive 2001/14. Pour autant, si la réglementation slovène a, dès le mois de décembre 2009, habilité les autorités à prendre les mesures prévues par le législateur de l’Union en vue de définir et d’établir un système d’amélioration des performances au sens de l’article 11 de ladite directive, il n’en demeure pas moins que, à l’expiration du délai prévu dans l’avis motivé, aucune mesure ou disposition concrète mettant en œuvre cette habilitation n’avait été prise.

60.      Pour ces raisons, le troisième grief de la Commission doit être considéré comme fondé.

D –    Sur le quatrième grief, tiré du fait que la méthode de calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services ne tiendrait pas exclusivement compte du coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire

1.      Argumentation des parties

61.      La Commission fait valoir que, en ne prévoyant pas de méthode de calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services qui soit exclusivement fondée sur le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, la République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14.

62.      La Commission fait aussi grief à la République de Slovénie d’avoir manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 en ne prévoyant pas dans sa législation de règles sur la base desquelles il serait possible de vérifier que chacun des segments du marché se prête effectivement à des majorations aux fins du recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure.

63.      La République de Slovénie fait valoir, pour sa part, que l’article 15 quinquies, paragraphe 3, de la loi sur le transport ferroviaire a été complété par la loi du 27 décembre 2010 par une disposition en vertu de laquelle le montant de la redevance perçue pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services est égal aux coûts directement imputables à l’exploitation des services. En outre, le règlement relatif à la répartition des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire publique serait en cours de modification et il serait prévu d’y insérer une disposition relative à la manière dont il conviendra de vérifier qu’un segment de marché se prête effectivement à des majorations aux fins du recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure.

2.      Examen du quatrième grief

64.      Je constate d’emblée que, pour les raisons exposées au point 49 des présentes conclusions, la défense de la République de Slovénie est inopérante, dans la mesure où elle vise des modifications législatives introduites par la loi du 27 décembre 2010. Il en va de même pour le second acte invoqué par les autorités slovènes, à savoir le règlement relatif à la répartition des sillons et aux redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire publique (14). Dès lors, il convient d’examiner le grief exclusivement à la lumière des dispositions de l’article 21, paragraphe 2, du décret du 18 avril 2008.

65.      Je rappelle, tout d’abord, que j’ai analysé l’interprétation de la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire» dans mes conclusions dans l’affaire Commission/République tchèque, précitée (voir points 66 et suivants de ces conclusions), qui seront présentées en même temps que les présentes conclusions. Afin d’éviter les répétitions, je renvoie donc à l’analyse figurant dans lesdites conclusions (15).

66.      S’agissant de l’interprétation de la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire», j’ai proposé à la Cour, dans lesdites conclusions, de considérer que, eu égard, d’une part, à l’imprécision de la directive 2011/14 et, d’autre part, à l’absence de la définition précise de cette notion, ainsi qu’à une disposition de droit de l’Union énumérant précisément les coûts ne relevant pas de ladite notion, les États membres jouissent d’une certaine marge d’appréciation économique aux fins de la transposition et de l’application de la notion en cause. Pour autant, même s’il ne me paraît pas possible de définir, par une énumération limitative, ce qui vise, ou non, la notion de «coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire», il n’en demeure pas moins que les États membres peuvent, dans certains cas, inclure des coûts qui outrepassent manifestement les limites de la notion utilisée par la directive 2001/14. Dans le cadre d’une procédure en manquement, il convient donc de rechercher si la réglementation de l’État membre permet d’inclure dans le calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures ferroviaires des éléments qui ne sont manifestement pas directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire.

67.      Je considère que l’article 21, paragraphe 2, du décret du 18 avril 2008 permet, à lui seul, aux autorités slovènes de mettre en place un cadre de tarification répondant aux exigences des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

68.      Toutefois, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 27 décembre 2010, le deuxième paragraphe de l’article 15 quinquies de la loi sur le transport ferroviaire permettait de calculer la redevance d’accès à l’infrastructure en fonction d’un critère intitulé «redevance de l’infrastructure des transports dans d’autres sous-systèmes, notamment dans le transport routier» (16). Bien que l’État membre conteste avoir fait usage dudit critère, il n’en reste pas moins que sa législation permettait de prendre en compte de tels coûts en violation des dispositions pertinentes de la directive 2001/14.

69.      Cela me semble suffire pour pouvoir accueillir le quatrième grief de la Commission, malgré la confusion caractérisant les échanges des parties dans le cadre de ce grief.

V –    Sur les dépens

70.      En vertu de l’article 138, paragraphe 2, du règlement de procédure (17), si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens. La Commission et la République de Slovénie ayant respectivement succombé sur un ou plusieurs chefs, je propose que chaque partie supporte ses propres dépens.

71.      Conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, la République tchèque et le Royaume d’Espagne, qui ont été admises à intervenir au présent litige, supporteront leurs propres dépens.

VI – Conclusion

72.      Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit:

1)      La République de Slovénie a manqué aux obligations qui lui incombent:

–        en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires, telle que modifiée par la directive 2001/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, et de l’article 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité, en ce que le gestionnaire de l’infrastructure, qui fournit lui-même des services de transport ferroviaire contribue à l’établissement de l’horaire de service et, partant, participe à la fonction d’adoption des décisions concernant la répartition des sillons ou la répartition des capacités d’infrastructure;

–        en vertu de l’article 6, paragraphes 2 à 5, de la directive 2001/14, en ne prévoyant pas de mesures destinées à encourager le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès;

–        en vertu de l’article 11 de la directive 2001/14, en n’adoptant pas de système d’amélioration des performances visant à inciter les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les défaillances et à améliorer l’exploitation de l’infrastructure;

–        en vertu de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, dans la mesure où la législation slovène a permis de prendre en compte dans le calcul des redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services la redevance de l’infrastructure des transports dans d’autres sous‑systèmes, notamment dans le transport routier.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission européenne, la République de Slovénie, la République tchèque et le Royaume d’Espagne supportent leurs propres dépens.


1 –      Langue originale: le français.


2 – Directive du Conseil du 29 juillet 1991 relative au développement de chemins de fer communautaires (JO L 237, p. 25).


3 – Directive du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001 (JO L 75, p. 1).


4 – Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2001 concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire, la tarification de l’infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité (JO L 75, p. 29).


5 –      Par acte déposé au greffe de la Cour le 1er février 2012, la Commission a fait savoir à la Cour qu’elle se désistait du grief tiré du non‑respect de l’article 30, paragraphe 1, de la directive 2001/14.


6 – Il s’agit des arrêts du 25 octobre 2012, Commission/Portugal (C‑557/10), et du 8 novembre 2012, Commission/Grèce (C‑528/10), ainsi que des affaires Commission/Hongrie (C‑473/10); Commission/Espagne (C‑483/10); Commission/Pologne (C‑512/10); Commission/République tchèque (C‑545/10); Commission/Autriche (C‑555/10); Commission/Allemagne (C‑556/10); Commission/France (C‑625/10); Commission/Italie (C‑369/11), et Commission/Luxembourg (C‑412/11), pendantes devant la Cour.


7 – Uradni list RS, n° 44/2007, loi telle que modifiée (Uradni list RS, n° 58/2009, ci-après la «loi sur le transport ferroviaire»). S’agissant de la modification intervenue en 2010, soit postérieurement à l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.


8 – Uradni list RS, n° 38/08, ci-après le «décret du 18 avril 2008».


9 – Uradni list RS, n° 106/2010; voir note en bas de page 7 des présentes conclusions.


10 –      Voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.


11 –      Voir, notamment, arrêts du 19 juin 2008, Commission/Luxembourg (C‑319/06, Rec. p. I‑4323, point 72 et jurisprudence citée); du 4 mars 2010, Commission/France (C‑241/08, Rec. p. I‑1697, point 59 et jurisprudence citée), ainsi que du 3 mars 2011, Commission/Irlande, C‑50/09 (Rec. p. I‑873, point 102).


12 –      Un cas de figure analogue se présente aussi dans l’affaire Commission/France (C‑625/10), précitée (voir points 22 à 47 de mes conclusions).


13 –      Article 9 du décret du 18 avril 2008.


14 –      Uredba o dodeljevanju vlakovnih poti in uporabnini na javni železniški infrastrukturi, Uradni list RS, n° 113/2009.


15 –      Voir, en outre, points 92 à 102 de mes conclusions dans l’affaire Commission/Pologne, précitée, ainsi que points 73 à 86 de mes conclusions dans l’affaire Commission/Allemagne, précitée.


16 –      L’article 10 de la loi du 27 décembre de 2010 a abrogé le deuxième alinéa de l’article 15 quinquies de la loi sur le transport ferroviaire et ajouté une phrase à la fin du troisième paragraphe dudit article.


17 – Entré en vigueur le 1er novembre 2012.