Language of document : ECLI:EU:T:2021:343

ARRÊT DU TRIBUNAL (dixième chambre)

9 juin 2021 (*) (1)

« Clause compromissoire – Conventions de subvention conclues dans le cadre du programme d’appui stratégique en matière de technologie de l’information et de la communication (TIC) – Rapport d’audit – Notes de débit émises par la Commission – Enquête de l’OLAF – Recours en annulation – Demande reconventionnelle – Remboursement intégral des subventions – Dommages et intérêts »

Dans l’affaire T‑235/19,

Health Information Management (HIM) , établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Me P. Zeegers, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. J. Estrada de Solà et Mme M. Ilkova, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, d’une part, une demande principale fondée sur l’article 272 TFUE et tendant à faire constater que les notes de débit no 3241901815 et no 3241901886, du 4 février 2019, visant au remboursement des sommes respectives de 94 445 euros et de 121 517 euros, au titre des conventions de subvention no 225023, relative au projet « ElDeRly-friEndly Alarm handling and monitorING (Dreaming) », et no 250449, relative au projet « Health monitoring and sOcial integration environMEnt for Supporting WidE ExTension of independent life at HOME (HOME SWEET HOME) », conclues dans le cadre du programme d’appui stratégique en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC) prévu par le programme-cadre établi par la décision 1639/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 2006, établissant un programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013), ont été émises par la Commission en violation de ses obligations contractuelles et que, partant, lesdites sommes ne sont pas dues et, pour autant que nécessaire, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de ces notes de débit et, d’autre part, une demande reconventionnelle de la Commission tendant à la condamnation de HIM au remboursement intégral des subventions perçues au titre des conventions susvisées et au paiement de la somme de 58 876,50 euros à titre de dommages et intérêts,

LE TRIBUNAL (dixième chambre),

composé de MM. A. Kornezov, président, E. Buttigieg et G. Hesse (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt 

 Antécédents du litige

1        La requérante, Health Information Management (HIM), est une société anonyme de droit belge qui exerce essentiellement son activité dans le domaine médical et dans le secteur de l’inclusion sociale de personnes âgées par le recours aux technologies de la communication et de l’information.

2        La requérante fait partie de deux consortiums composés des bénéficiaires de deux conventions de subvention conclues dans le cadre du programme d’appui stratégique en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC) prévu par le programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (2007-2013), établi par la décision 1639/2006/CE du Parlement européen et du Conseil, du 24 octobre 2006 (JO L 310, p. 15, ci-après le « programme-cadre IC »).

3        La première convention, portant le numéro 225023, a été conclue le 10 octobre 2008 entre la Communauté européenne, représentée par la Commission européenne, et Tesan Televita Srl, agissant en qualité de coordinateur du projet « ElDeRly-friEndly Alarm handling and MonitorING (Dreaming) » (ci-après, respectivement, la « convention Dreaming » et le « projet Dreaming »). La seconde convention, portant le numéro 250449, a été conclue le 31 mai 2010, entre la Communauté, représentée par la Commission, et Digipolis SCRL, agissant en qualité de coordinateur du projet « HOME SWEET HOME : Health monitoring and sOcial integration environMEnt for Supporting WidE ExTension of independent life at HOME » (ci-après, respectivement, la « convention HOME SWEET HOME » et le « projet HOME SWEET HOME »).

4        Les projets Dreaming et HOME SWEET HOME avaient pour objectif de permettre aux personnes âgées en perte d’autonomie de rester dans leur foyer grâce à une combinaison d’appareils et de systèmes technologiques, dont un téléphone portable adapté et un système de vidéo-conférence facile à utiliser, reliés à des centres d’assistance socio-médicale.

5        Les conventions HOME SWEET HOME et Dreaming (ci-après, prises ensemble, les « conventions litigieuses ») comportent un texte contractuel principal (type) et une série d’annexes, dont la première (annexe Ι) contient la « Description des travaux » et, la deuxième (annexe II), les « Conditions générales ».

6        Il résulte de l’article 1er, paragraphe 2, des conventions litigieuses que la requérante a accédé à celles-ci en tant que cocontractant et bénéficiaire.

7        Conformément à l’article 3, paragraphe 2, de la convention Dreaming, amendé par l’avenant no 1 à cette convention, le projet Dreaming devait durer du 1er mai 2008 au 30 avril 2012. Conformément à l’article 3, paragraphe 2, de la convention HOME SWEET HOME, le projet HOME SWEET HOME devait courir du 1er mars 2010 au 28 février 2013.

8        L’article 5, paragraphe 1, de la convention Dreaming stipule que la contribution financière maximale de l’Union est de 2 769 998 euros. La disposition équivalente de la convention HOME SWEET HOME fixe la contribution maximale de l’Union à 2 439 000 euros. Il est précisé, dans les deux conventions, que la contribution financière de l’Union est limitée à 50 % des coûts éligibles.

9        L’article 10, premier alinéa, de chacune des conventions litigieuses stipule qu’elles sont régies par leurs dispositions, par « les actes pertinents [de l’Union] relatifs au programme-cadre [IC], par le règlement financier applicable au budget général de [l’Union] ainsi que ses règles d’exécution, par les autres dispositions du droit de [l’Union] et, à titre subsidiaire, par le droit belge ». L’article 10, troisième alinéa, de chacune des conventions litigieuses prévoit que « le Tribunal ou, sur pourvoi, la Cour seront exclusivement compétents pour trancher tout litige entre l’Union et un bénéficiaire en ce qui concerne l’interprétation, l’application ou la validité [des conventions litigieuses] et des décisions de la Commission qui imposent des obligations pécuniaires ».

10      Conformément au point II.1 des conditions générales des conventions litigieuses, on entend par « irrégularité » « toute violation d’une disposition du droit [de l’Union] ou toute méconnaissance d’une disposition de cette convention de subvention résultant d’un acte ou d’une omission d’un ou des contractants qui porte ou qui pourrait porter préjudice au budget [de l’Union] ».

11      Le point II.3, sous g), des conditions générales des conventions litigieuses stipule que le bénéficiaire est tenu de prendre les mesures nécessaires pour éviter tout risque de conflit d’intérêts susceptible de compromettre l’exécution impartiale et objective des conventions. Selon ledit point, de tels conflits pourraient résulter, notamment, d’un intérêt économique pour le bénéficiaire.

12      Le point II.3, sous i), desdites conditions générales énonce que le bénéficiaire est tenu de mettre en œuvre les projets conformément aux principes éthiques fondamentaux.

13      Le point II.5, paragraphe 3, sous d), quatrième tiret, des conditions générales des conventions litigieuses prévoit que la Commission peut suspendre, à tout moment, le paiement, pour tout ou partie du montant destiné au bénéficiaire concerné, en cas de suspicion d’une irrégularité commise par un ou plusieurs bénéficiaires.

14      Il résulte du point II.10, paragraphe 3, sous f), des conditions générales de la convention Dreaming et du point II.10, paragraphe 2, sous f), des conditions générales de la convention HOME SWEET HOME que le fait de commettre une irrégularité ou une fraude peut justifier la résiliation de la participation du bénéficiaire concerné à la convention en cause avec effet immédiat.

15      Le point II.20, paragraphe 1, des conditions générales des conventions litigieuses stipule, notamment, que les coûts, pour être considérés comme éligibles, doivent être réellement exposés par le bénéficiaire, et ce pendant la durée du projet.

16      Selon le point II.21, paragraphe 1, desdites conditions générales, les coûts directs sont tous les coûts éligibles qui peuvent être attribués directement au projet en cause et sont définis en tant que tels par le bénéficiaire, conformément à ses principes comptables et à ses règles internes habituelles.

17      Conformément au point II.22, paragraphe 1, des conditions générales des conventions litigieuses, les coûts indirects sont tous les coûts éligibles que le bénéficiaire ne peut pas identifier comme directement attribuables au projet en cause, mais qui peuvent être identifiés et justifiés par son système de comptabilité comme étant engagés en relation directe avec les coûts directs éligibles attribués audit projet.

18      Le point II.26, paragraphe 6, desdites conditions générales dispose que chaque paiement peut faire l’objet d’un audit ou d’un contrôle et peut être modifié ou recouvré sur le fondement des résultats de cet audit ou de ce contrôle.

19      Selon le point II.28, paragraphe 1, des conditions générales des conventions litigieuses, la Commission peut, jusqu’à cinq ans après la date du paiement final, faire réaliser un audit soit par des auditeurs externes, soit par ses propres services, soit par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF).

20      Le point II.28, paragraphe 4, desdites conditions générales stipule qu’un rapport d’audit provisoire est établi sur la base des constatations effectuées lors de l’audit financier. Il est envoyé par la Commission ou par son représentant au bénéficiaire concerné, qui peut formuler ses observations dans un délai d’un mois à compter de sa réception. La Commission peut décider de ne pas tenir compte des observations ou documents communiqués après l’expiration de ce délai. Le rapport final est envoyé au bénéficiaire concerné.

21      Le point II.28, paragraphe 5, des conditions générales des conventions litigieuses prévoit que la Commission prend toutes les mesures appropriées qu’elle considère comme nécessaires sur le fondement des conclusions de l’audit, y compris l’émission d’un ordre de recouvrement concernant tout ou partie des paiements effectués et l’application de sanctions.

22      Le 12 février 2013, après avoir effectué ses prestations dans le cadre du projet Dreaming, la requérante a déposé auprès du coordinateur de ce projet des demandes visant au paiement d’un montant total de 231 125 euros. La Commission a accepté cette demande de contribution de l’Union. La requérante allègue avoir perçu la somme de 231 126 euros. Selon la Commission, qui se fonde sur le rapport de distribution émis par le coordinateur du projet, elle a reçu une somme de 230 348 euros. La différence entre le montant de contribution accepté par la Commission et le montant effectivement perçu par la requérante s’expliquerait par la distribution de la contribution entre les partenaires du projet effectuée par le coordinateur.

23      Le 16 septembre 2014, après avoir effectué ses prestations dans le cadre du projet HOME SWEET HOME, la requérante a déposé auprès du coordinateur de ce projet des demandes visant au paiement d’un montant total de 287 662 euros. La Commission a accepté cette demande de contribution de l’Union. La requérante allègue avoir perçu un montant de 282 453 euros. La Commission mentionne une somme de 282 451 euros.

24      Dans le cadre de l’exécution de ces deux projets, un audit a été demandé par la Commission à un cabinet d’auditeurs, PKF Littlejohn LLP, qui a été effectué entre le 18 avril 2014 et le 27 mai 2015.

25      Entre-temps, le 30 avril 2015, l’OLAF avait ouvert une enquête concernant notamment des allégations d’actes frauduleux commis par la requérante dans l’exécution des conventions litigieuses.

26      La requérante a reçu notification de l’ouverture de l’enquête relative aux deux projets en cause au cours d’un contrôle effectué sur place, à son siège social, le 4 octobre 2016 par les services de l’OLAF.

27      Par lettre du 7 mars 2018, l’OLAF a adressé à la requérante un courrier l’informant des faits au regard desquels elle était considérée comme étant concernée par l’enquête relative aux projets en cause. La requérante a présenté ses observations en réponse à ladite lettre par courrier du 20 mars 2018.

28      Par une lettre du 12 mars 2018, la Commission a informé la requérante de l’achèvement de l’audit et a approuvé les conclusions du rapport d’audit final 13-NR02-002 (ci-après le « rapport d’audit »), lequel était joint en tant qu’annexe. Le même courrier indiquait que les conclusions du projet de rapport d’audit avaient été maintenues et qu’un montant de 190 444 euros versé dans le cadre du projet Dreaming et un montant de 243 033 euros versé dans le cadre du projet HOME SWEET HOME étaient considérés comme non éligibles.

29      Parmi les coûts non éligibles mentionnés dans le rapport d’audit figuraient des coûts de personnel à hauteur de 94 937,15 euros pour le projet Dreaming et de 177 824,46 euros pour le projet HOME SWEET HOME. Selon ledit rapport, les montants réclamés pour les consultants dans le cadre de ces projets ne pouvaient pas être considérés comme des coûts de personnel éligibles du fait que les critères relatifs aux coûts de personnel figurant dans le guide des questions financières en rapport avec les conventions de subvention dans le cadre du programme d’appui stratégique TIC n’avaient pas été satisfaits.

30      En outre, s’agissant des frais de voyage ou de séjour, le rapport d’audit considérait qu’une somme de 4 942,70 euros n’était pas éligible concernant le projet Dreaming ainsi qu’une somme de 6 736,33 euros concernant le projet HOME SWEET HOME. S’agissant des frais divers, un montant de 940,80 euros n’a pas été considéré comme éligible pour le projet Dreaming, de même qu’une somme de 5 125 euros pour le projet HOME SWEET HOME.

31      Au sujet du poste budgétaire « coûts indirects », s’agissant du projet Dreaming, une somme de 89 623,76 euros a été rejetée par les auditeurs, notamment aux motifs que les frais de voyage et de séjour étaient des coûts directs et que les montants des salaires et des charges des salariés réclamés ne correspondaient pas aux montants découlant des comptes annuels de la requérante, et devaient être revus. S’agissant du projet HOME SWEET HOME, étant donné qu’une partie des coûts de personnel n’avait pas été approuvée par les auditeurs, il y avait lieu, selon le rapport d’audit, de revoir à la baisse les coûts indirects, de sorte qu’une somme de 53 347,14 euros a été rejetée.

32      La requérante a contesté les conclusions du rapport d’audit par lettre du 23 avril 2018.

33      La Commission a répondu par lettre du 8 mai 2018, par laquelle elle a maintenu le contenu de sa lettre du 12 mars 2018.

34      Par lettre du 31 mai 2018, la requérante a réitéré en substance les griefs présentés dans sa lettre du 23 avril 2018, qui portaient notamment sur le rejet des coûts exposés pour des consultants.

35      Par une lettre de préinformation du 20 septembre 2018, la Commission a indiqué que, pour mettre en œuvre les conclusions du rapport d’audit, il y avait lieu de procéder au recouvrement des sommes de 94 445 euros pour le projet Dreaming et de 121 517 euros pour le projet HOME SWEET HOME, correspondant aux coûts non éligibles dans la mesure où ceux-ci avaient été financés par la Commission et versés par celle-ci à la requérante. Elle a invité la requérante à prendre position dans un délai de 30 jours à compter de la réception de ladite lettre, à défaut de quoi elle émettrait des notes de débit afin de commencer le processus de recouvrement desdites sommes.

36      La requérante a répondu par lettre du 12 octobre 2018. Elle s’est, en substance, opposée à l’intention de la Commission de recouvrer les sommes susmentionnées.

37      Le rapport de l’OLAF a été finalisé le 13 novembre 2018. Dans les conclusions de ce rapport, l’OLAF estimait, en substance, que, entre l’année 2008 et l’année 2014, plusieurs irrégularités avaient été commises par la requérante, notamment dans le cadre des projets Dreaming et HOME SWEET HOME. Trois types d’irrégularités ont été constatés. Le premier portait, en substance, sur un conflit d’intérêts à l’égard de la requérante, en ce qu’elle aurait influencé ses partenaires des consortiums chargés de la mise en œuvre desdits projets (ci-après les « partenaires de consortium ») afin de choisir une société qui lui était liée en tant que fournisseur et qu’elle aurait perçu des commissions sur les ventes de cette dernière. Le deuxième qui figurait dans le rapport reprochait à la requérante d’avoir surfacturé les coûts de personnel. Le troisième type d’irrégularités consisterait, en substance, en une surfacturation du prix de certains produits nécessaires pour la mise en œuvre des projets en cause.

38      Par lettre du 21 décembre 2018, la Commission a informé la requérante qu’elle maintenait ses conclusions concernant les mesures fondées sur le rapport d’audit et qu’elle allait procéder à l’établissement des notes de débit.

39      Le 4 février 2019, la Commission a notifié à la requérante deux notes de débit visant à la récupération de la partie de la contribution financière de l’Union considérée comme injustifiée en ce qui concerne le projet Dreaming et le projet HOME SWEET HOME, à savoir, respectivement, la note de débit no 3241901815, d’un montant de 94 445 euros, et la note de débit no 3241901886, d’un montant de 121 517 euros. Dans les deux notes de débit, la Commission a fixé comme date ultime de paiement le 18 mars 2019.

 Procédure et conclusions des parties

40      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 avril 2019, la requérante a introduit le présent recours.

41      Le 12 juillet 2019, la Commission a déposé au greffe du Tribunal un mémoire en défense contenant une demande reconventionnelle.

42      La requérante a déposé la réplique le 5 septembre 2019.

43      Le 7 novembre 2019, la requérante a déposé un mémoire complémentaire contenant une demande nouvelle visant à ce qu’il soit ordonné à la Commission de retirer le nom de la requérante du système de détection rapide et d’exclusion (EDES).

44      Le 6 janvier 2020, la Commission a déposé la duplique, laquelle contenait ses observations sur le mémoire complémentaire de la requérante.

45      Dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure adoptées les 9 juin et 4 août 2020 sur le fondement de l’article 89, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a posé des questions aux parties, qui y ont répondu dans les délais impartis.

46      Un membre de la dixième chambre ayant été empêché de siéger, le président du Tribunal a, le 10 août 2020, désigné un autre juge pour compléter la chambre, en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement de procédure.

47      En l’absence de demande en ce sens formulée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, a, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, décidé de statuer sans phase orale de la procédure

48      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        dire pour droit qu’elle n’est pas redevable des notes de débit nos 3241901815 et 3241901886, émises le 4 février 2019 ;

–        pour autant que nécessaire, prononcer la nullité de ces notes de débit ;

–        ordonner à la Commission de retirer son nom de la base de données de l’EDES;

–        rejeter la demande reconventionnelle comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

49      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter comme non fondée la demande principale de la requérante, visant à faire constater l’inexistence des créances à son égard ;

–        rejeter comme irrecevable la demande complémentaire de la requérante, visant à entendre déclarer nulles les notes de débit nos 3241901815 et 3241901886, émises le 4 février 2019 ;

–        rejeter comme irrecevable la demande de la requérante formulée dans son mémoire complémentaire du 7 novembre 2019, visant à lui ordonner le retrait de son nom de la base de données de l’EDES;

–        dire pour droit que les violations contractuelles imputées à la requérante dans la demande reconventionnelle ont le caractère d’irrégularités ;

–        condamner la requérante à lui rembourser l’intégralité des subventions perçues à hauteur de 230 348 euros, pour le projet Dreaming, et de 282 451 euros, pour le projet HOME SWEET HOME ;

–        condamner la requérante au paiement d’un montant de 58 876,50 euros à titre de dommages et intérêts ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la compétence du Tribunal et sur la recevabilité du recours et de la demande reconventionnelle

  Sur la compétence du Tribunal

50      Il y a lieu de constater que le Tribunal est compétent pour connaître du présent recours, introduit au titre de l’article 272 TFUE, en vertu de la clause compromissoire figurant à l’article 10, troisième alinéa, de chacune des conventions litigieuses, laquelle attribue au Tribunal compétence pour statuer sur tout litige portant sur l’interprétation, l’exécution ou la validité de ces conventions.

51      Le Tribunal est également compétent, au même titre, pour statuer sur la demande reconventionnelle formulée par la Commission. En effet, selon la jurisprudence, la compétence du Tribunal, au jour de l’introduction du recours, pour connaître d’un recours introduit sur le fondement d’une clause compromissoire implique nécessairement celle de connaître d’une demande reconventionnelle formulée par une institution dans le cadre de ce même recours et qui dérive du lien contractuel ou du fait sur lequel est fondée la demande principale ou a un rapport direct avec les obligations qui en découlent (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2014, Isotis/Commission, T‑59/11, EU:T:2014:679, point 265 et jurisprudence citée). Or, de même que le recours de la requérante, la demande reconventionnelle formulée par la Commission dérive du lien contractuel établi entre les parties par les conventions litigieuses. Par ailleurs, cette demande reconventionnelle concerne le remboursement de l’intégralité des sommes versées à la requérante au titre des conventions litigieuses, de sorte qu’elle recouvre les montants qui font l’objet des notes de débit visées par le recours formé par la requérante.

 Sur la recevabilité des conclusions en annulation au regard des dispositions de l’article 263 TFUE

52      La requérante demande à titre complémentaire, « pour autant que nécessaire », l’annulation des notes de débit litigieuses sur le fondement de l’article 263 TFUE. La Commission excipe de l’irrecevabilité de ce chef de conclusions.

53      Selon la jurisprudence, en présence d’une convention liant le requérant à l’une des institutions, les juridictions de l’Union ne peuvent être saisies d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle liant les parties et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative (arrêt du 9 septembre 2015, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, C‑506/13 P, EU:C:2015:562, point 20 et, en ce sens, arrêts du 24 octobre 2014, Technische Universität Dresden/Commission, T‑29/11, EU:T:2014:912, point 29 et du 20 juin 2018, KV/EACEA, T‑306/15 et T‑484/15, non publié, EU:T:2018:359).

54      Or, ainsi que l’a relevé la Commission, les notes de débit sont fondées uniquement sur les prétendues violations par la requérante des dispositions des conventions de subvention en cause, notamment sur l’absence de justification de certains coûts. Il est, dès lors, manifeste que les effets de ces actes ne se trouvent pas en dehors de la relation contractuelle. Dans ces circonstances, il y a lieu de déclarer irrecevable le recours pour autant que celui-ci est fondé sur l’article 263 TFUE.

 Sur la recevabilité du mémoire en défense et de la demande reconventionnelle

55      La requérante soutient que, dès lors que la requête a été signifiée à la Commission le 30 avril 2019, le mémoire en défense, ayant été déposé le 12 juillet 2019, est tardif. Elle en conclut que ce mémoire ainsi que la demande reconventionnelle qu’il contient doivent être déclarés irrecevables.

56      La Commission conteste cette fin de non-recevoir.

57      Il y a lieu de rappeler que le délai de deux mois prévu à l’article 81, paragraphe 1, du règlement de procédure pour le dépôt du mémoire en défense ne commence à courir qu’à partir de la date de réception de la requête par la partie défenderesse. Conformément au point 23 des conditions d’utilisation de l’application e-Curia, la date et l’heure de la signification correspondent au moment auquel l’utilisateur demande accès à l’acte de procédure.

58      En l’espèce, la date de la signification de la requête est, comme le soutient la Commission dans la duplique, le 2 mai 2019. Le mémoire en défense ayant été reçu par le greffe du Tribunal le 12 juillet 2019, il a été déposé dans le délai de deux mois augmenté du délai de distance de dix jours prévu à l’article 60 du règlement de procédure.

59      Partant, le mémoire en défense n’est pas tardif et il convient, dès lors, de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la requérante.

 Sur la recevabilité de la nouvelle demande de la requérante

60      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 novembre 2019, la requérante a introduit une « nouvelle demande » concluant à ce qu’il plaise au Tribunal d’« ordonner à la Commission de retirer [son] nom [...] [de l’EDES] ».

61      En premier lieu, d’une part, force est de constater que le recours introduit par la requérante est fondé, à titre principal, sur l’article 272 TFUE, qui dispose que le juge de l’Union est compétent pour statuer en vertu d’une clause compromissoire contenue dans un contrat de droit public ou de droit privé passé par l’Union ou pour son compte.

62      D’autre part, le chef de conclusions en cause renferme, en réalité, une demande tendant à ce que le Tribunal annule la décision Ares(2019) 4818377 de la Commission, du 24 juillet 2019, inscrivant la requérante dans la base de données de l’EDES.

63      À cet égard, ainsi que le souligne la Commission au point 94 de la duplique, la mesure contestée par la requérante est de nature administrative. Or, la validité d’un acte administratif ne peut pas être mise en cause dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 272 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission, T‑831/14, non publié, EU:T:2017:804, points 40 et 196 et jurisprudence citée).

64      Par ailleurs, si l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure permet, dans certaines circonstances, la production de moyens nouveaux en cours d’instance, cette disposition ne peut, en aucun cas, être interprétée comme autorisant la partie requérante à modifier en cours d’instance la nature du recours dont elle a saisi le Tribunal (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission, T‑831/14, non publié, EU:T:2017:804, point 198 et jurisprudence citée).

65      Cette considération n’est pas remise en cause par l’article 86, paragraphe 1, du règlement de procédure, qui, lorsqu’un acte dont l’annulation est demandée est remplacé ou modifié par un autre acte ayant le même objet, permet au requérant, avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, d’adapter la requête pour tenir compte de cet élément nouveau (voir, en ce sens, arrêt du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission, T‑831/14, non publié, EU:T:2017:804, point 199 et jurisprudence citée).

66      En effet, une telle adaptation des conclusions et des moyens de la requête n’a pas pour effet de modifier la nature du recours (voir arrêt du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission, T‑831/14, non publié, EU:T:2017:804, point 200 et jurisprudence citée).

67      Dès lors, pour qu’une partie requérante soit recevable à adapter en cours d’instance ses conclusions initiales, il faut, en tout état de cause, que, ce faisant, elle ne modifie pas la nature du recours (voir arrêt du 14 novembre 2017, Alfamicro/Commission, T‑831/14, non publié, EU:T:2017:804, point 201 et jurisprudence citée).

68      Or, en l’espèce, admettre la demande nouvelle impliquerait une modification de la nature du recours en cours d’instance, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort de la requête, ledit recours est fondé, à titre principal, sur l’article 272 TFUE et vise à la résolution d’un litige de nature contractuelle, tandis que le nouveau chef de conclusions en cause vise, en substance, à l’annulation d’un acte administratif se situant en dehors de la relation contractuelle en question.

69      En deuxième lieu et en tout état de cause, la décision Ares(2019) 4818377 n’a pas le même objet que les notes de débit litigieuses au sens de la jurisprudence citée au point 65 ci-dessus.

70      En troisième lieu, même à admettre que la nouvelle demande de la requérante constitue une adaptation de la requête, force serait de constater que celle-ci serait tardive. En effet, conformément à l’article 86, paragraphe 2, du règlement de procédure, une telle adaptation doit être effectuée dans le délai, prévu à l’article 263, sixième alinéa, TFUE, dans lequel l’annulation de l’acte justifiant l’adaptation de la requête peut être demandée, c’est-à-dire dans un délai de deux mois à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification à la partie requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance. En outre, l’article 60 du règlement de procédure prévoit que les délais de procédure sont augmentés d’un délai de distance forfaitaire de dix jours. En l’occurrence, la nouvelle demande a été déposée au greffe du Tribunal le 7 novembre 2019, tandis que la décision Ares(2019) 4818377 avait été notifiée à la requérante le 24 juillet 2019, de sorte que le délai de recours contre cette décision n’a pas été respecté.

71      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le chef de conclusions en cause comme irrecevable.

 Sur le droit applicable

72      Saisi dans le cadre d’une clause compromissoire en vertu de l’article 272 TFUE, le Tribunal doit trancher le litige sur la base du droit matériel applicable au contrat. En l’espèce, conformément à l’article 10, premier alinéa, de chacune des conventions litigieuses, celles-ci sont régies par leurs propres dispositions, par les « actes pertinents [de l’Union] relatifs au programme-cadre [IC], par le règlement financier applicable au budget général de [l’Union] ainsi que ses règles d’exécution, par les autres dispositions du droit de [l’Union] et, à titre subsidiaire, par le droit belge ».

73      En premier lieu, pour ce qui concerne le règlement financier applicable, il convient de relever que, ratione temporis, il s’agit du règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO 2002, L 248, p. 1, ci-après le « règlement financier »). En effet, le programme-cadre IC a été établi par la décision no 1639/2006, du 24 octobre 2006, et les conventions litigieuses ont été conclues le 10 octobre 2008 et le 31 mai 2010. Or, conformément à l’article 187, deuxième alinéa, du règlement financier, celui-ci s’est appliqué à compter du 1er janvier 2003 et est resté en vigueur jusqu’à son abrogation par le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union (JO 2012, L 298, p. 1), dont aucune disposition ne spécifie qu’il s’applique rétroactivement à des conventions de subvention conclues à une date antérieure à celle de son entrée en vigueur.

74      En second lieu, s’agissant des règles régissant l’exécution et l’interprétation des contrats en droit belge, il convient de préciser que l’article 1134, troisième alinéa, du code civil prévoit que les conventions doivent être exécutées de bonne foi.

75      L’article 1135 du même code dispose que « [l]es conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature » et exprime donc également le principe d’exécution de bonne foi des contrats (arrêt du 22 octobre 2020, EKETA/Commission, C‑274/19 P, non publié, EU:C:2020:853, point 16).

 Sur le fond

 Sur la demande reconventionnelle

76      Il convient d’examiner en premier lieu la demande reconventionnelle, étant donné qu’elle tend au remboursement de l’intégralité des sommes versées à la requérante au titre des conventions litigieuses, de sorte qu’elle recouvre les montants qui font l’objet des notes de débit visées par le recours formé par la requérante.

77      La demande reconventionnelle a pour objet d’entendre condamner la requérante au paiement de la somme de 571 675,5 euros au titre des conventions litigieuses. Cette demande est fondée sur les conclusions du rapport de l’OLAF.

78      S’agissant dudit rapport, la Commission fait valoir que des irrégularités ont été constatées à l’égard de la requérante dans le cadre de l’exécution des projets Dreaming et HOME SWEET HOME. La Commission met en exergue les deux irrégularités selon elle les plus fragrantes, à savoir, premièrement, l’existence d’un conflit d’intérêts et, deuxièmement, une surfacturation des prix des équipements et la perception de commissions de vente.

79      S’agissant de la première irrégularité alléguée, la Commission relève que la requérante détient 25 % des actions de la société XJ. Dans ce contexte, la Commission fait grief à la requérante d’avoir incité ses partenaires de consortium dans le cadre desdits projets à acquérir des équipements nécessaires pour la mise en œuvre de ceux-ci auprès de XJ. En outre, elle reproche à la requérante de ne pas avoir déclaré le risque de conflit d’intérêts, ni à la Commission ni à ses partenaires de consortium. Bien plus, la requérante aurait produit deux fausses déclarations mentionnant l’absence de conflit d’intérêt avant qu’elle n’ait été acceptée comme bénéficiaire de subventions dans le cadre des deux projets en cause.

80      Pour ce qui concerne la seconde irrégularité reprochée, la Commission fait valoir, notamment, que la requérante a perçu de XJ des commissions de vente de 5 à 10 % en contrepartie de la vente à ses partenaires de consortium, par l’intermédiaire de la requérante, des équipements dans le cadre desdits projets. En outre, la requérante aurait contribué à augmenter artificiellement le prix de certains équipements. À cet égard, la Commission fait état du fait que, pour ces projets, l’achat du modèle de téléphone portable Z était prévu, pour un prix unitaire de 1 018 euros. Toutefois, ultérieurement, ce modèle aurait été remplacé par un modèle moins cher, à savoir le modèle Y au prix unitaire de 616 euros. La Commission cite une correspondance dont il ressortirait que, dans ce contexte, la requérante, XJ et une société tierce avaient décidé d’augmenter de manière artificielle le prix d’autres équipements prévus pour les projets en cause, afin de se répartir la différence de coûts de 70 350 euros. Ainsi, le prix d’une console aurait été augmenté en passant de 438,5 à 577 euros et le prix d’un logiciel pour téléconférence de 200 à 422 euros.

 Sur les griefs de la requérante relatifs à certains vices de forme ou de procédure

81      La requérante fait valoir que la production du rapport de l’OLAF, sur lequel la demande reconventionnelle est fondée, est entachée de vices de forme et de procédure. Premièrement, elle fait valoir qu’il n’a pas été traduit dans la langue de procédure, à savoir le français. Deuxièmement, elle soulève quatre objections de nature procédurale, à savoir, en substance, la non-communication de la version intégrale dudit rapport, la communication de ce rapport et des annexes pour la première fois devant le Tribunal, le fait que le nom de l’auteur des allégations qui ont mené à l’ouverture de l’enquête de l’OLAF n’ait pas été révélé et l’impossibilité de vérifier l’authenticité du rapport.

–       Sur la langue du rapport de l’OLAF

82      Tout d’abord, dans la réplique, la requérante souligne que la Commission a produit, à l’appui du mémoire en défense, un dossier de 1 334 pages dont aucune n’a été traduite dans la langue de procédure, à savoir le français. Dès lors, la Commission n’aurait pas respecté le principe d’exécution de bonne foi des contrats.

83      La Commission conteste cet argument.

84      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 46, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute pièce produite ou annexée et rédigée dans une langue autre que la langue de procédure doit être accompagnée d’une traduction dans la langue de procédure. Le paragraphe 3 de ce même article prévoit toutefois que, dans le cas de pièces volumineuses, des traductions en extraits peuvent être présentées.

85      Il ressort du point 99 des dispositions pratiques d’exécution du règlement de procédure que, lorsque les pièces annexées à un acte de procédure ne sont pas accompagnées d’une traduction dans la langue de procédure, le greffier en demande la régularisation à la partie concernée, si cette traduction apparaît nécessaire au bon déroulement de la procédure.

86      En l’espèce, le greffier a estimé, à bon droit, qu’une telle traduction n’était pas nécessaire au bon déroulement de la procédure.

87      En effet, d’une part, comme le soutient à juste titre la Commission dans la duplique, la cinquième partie du mémoire en défense, intitulée « L’enquête de l’OLAF », détaille les irrégularités reprochées à la requérante dans le rapport de l’OLAF, annexé au mémoire en défense, et renvoie à des passages précis dudit document. Ainsi, les arguments et les éléments contenus dans ledit rapport sur lesquels la Commission appuie sa demande reconventionnelle ont été suffisamment explicités en français. Force est de constater, dès lors, que des traductions des extraits pertinents de cette pièce volumineuse ont été présentées, conformément à l’article 46, paragraphe 3, du règlement de procédure.

88      D’autre part, la langue dans laquelle le document en cause est rédigé correspond à celle dans laquelle la requérante communiquait, par exemple, avec ses partenaires de consortium, à savoir l’anglais. Ainsi, il peut être considéré que la requérante maîtrise cette langue à un niveau à tout le moins suffisant pour comprendre le contenu du rapport en cause.

89      Dès lors, il y a lieu d’écarter l’argumentation de la requérante.

–       Sur les questions procédurales soulevées par la requérante à l’égard du rapport de l’OLAF

90      La requérante fait valoir que, en fondant sa demande reconventionnelle sur un rapport volumineux qui, d’une part, ne lui a pas été communiqué avant la présente procédure et dont, d’autre part, plusieurs passages ont été occultés, la Commission la prive d’un procès équitable. Il y aurait donc lieu, selon elle, d’écarter le rapport de l’OLAF et les pièces qui l’accompagnent. À titre subsidiaire, elle demande qu’il soit ordonné à la Commission de produire la version intégrale de ce rapport, traduit dans la langue de la procédure. Ensuite, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir précisé qui était l’auteur des allégations ayant conduit à l’ouverture d’une enquête par l’OLAF. Enfin, la requérante allègue qu’il est impossible de vérifier l’authenticité de la copie du rapport de l’OLAF produite par la Commission dans la mesure où les signatures et les identités des signataires de ce rapport ont été masquées. Elle en conclut que la demande reconventionnelle n’est pas fondée sur des documents ayant force probante.

91      La Commission conteste cette argumentation.

92      En premier lieu, il convient de rappeler que, selon le point II.28, paragraphe 1, des conditions générales de chacune des conventions litigieuses, la Commission peut, jusqu’à cinq ans après la fin des projets en cause, faire réaliser un audit soit par des auditeurs externes, soit par ses propres services, soit par l’OLAF.

93      Ensuite, étant donné que la demande fondée sur le rapport de l’OLAF et tendant à recouvrer les subventions et à réparer le préjudice allégué a été présentée pour la première fois devant le Tribunal, le principe du contradictoire, qui fait partie des droits de la défense, implique, en l’occurrence, le droit pour la requérante de prendre connaissance des preuves et des observations présentées devant le juge et d’en débattre (voir, en ce sens, arrêts du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 52 et jurisprudence citée, et du 4 décembre 2019, H/Conseil, C‑413/18 P, non publié, EU:C:2019:1044, point 103). En effet, les juridictions de l’Union veillent à faire respecter devant elles et à respecter elles-mêmes le principe du contradictoire (arrêts du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 51).

94      À cet égard, force est de constater que la requérante a pu prendre connaissance dans le cadre de la procédure devant le Tribunal des éléments de preuve et des observations présentées par la Commission en vue d’étayer sa demande reconventionnelle. Il est constant que, ensuite, la requérante a été en mesure de présenter ses observations au sujet de ces éléments et observations dans la réplique.

95      En outre, le Tribunal a, le 9 juin 2020, adopté trois mesures d’organisation de la procédure en vertu de l’article 89, paragraphe 3, du règlement de procédure. La troisième mesure portait sur la question, posée aux deux parties, de savoir si et comment les sommes inéligibles relatives à chacune des irrégularités alléguées sur lesquelles était fondée la demande reconventionnelle devaient être déterminées. La Commission et la requérante y ont répondu. Par ailleurs, dans le cadre de la première mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a demandé à la Commission, premièrement, de transmettre les noms de l’enquêteur ayant signé le rapport de l’OLAF ainsi que de ses supérieurs hiérarchiques cosignataires dudit rapport, deuxièmement, de produire des témoignages des partenaires de consortium ou d’autres documents étayant l’affirmation de l’OLAF selon laquelle ces partenaires n’avaient pas été informés au préalable de la nature des liens existant entre la requérante et XJ et, troisièmement, d’étayer son affirmation selon laquelle il n’était pas établi que les équipements vendus par XJ étaient les seuls produits appropriés pour la mise en œuvre des projets Dreaming et HOME SWEET HOME. Ensuite, par mesure d’organisation de la procédure adoptée le 4 août 2020, la requérante a été mise en mesure de réagir par écrit aux réponses de la Commission et aux éléments de preuve produits.

96      De surcroît, le Tribunal a informé la requérante que, si elle souhaitait être entendue dans le cadre d’une audience de plaidoiries, elle pouvait présenter une demande motivée en ce sens sur le fondement de l’article 106 du règlement de procédure. Or, la requérante n’a pas présenté une telle demande.

97      Il s’ensuit que le principe du contradictoire a été pleinement respecté à l’égard de la requérante.

98      Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel, eu égard au volume du dossier présenté par la Commission, elle n’a pas eu suffisamment de temps pour préparer sa défense.

99      En effet, s’il est vrai que le dossier soumis par la Commission compte plus de mille pages, il n’en reste pas moins que le texte du rapport même de l’OLAF, qui comporte l’essentiel des allégations relatives à la requérante sur lesquelles la Commission a fondé sa demande reconventionnelle, n’est pas volumineux, puisqu’il ne compte que 18 pages. En outre, les preuves présentées à l’appui de ce rapport sont, au moins partiellement, connues de la requérante. En effet, elles comportent, par exemple, des présentations écrites établies par la requérante, des échanges de lettres ou de courriels entre la requérante et des tiers dans le cadre des projets en cause, des documents provenant de XJ, dont la requérante était actionnaire et commissionnaire, destinés à la requérante ainsi que des informations présentées par la requérante et ses partenaires de consortium dans le cadre de ses demandes de subvention. L’argument suivant lequel la requérante n’aurait pas eu suffisamment de temps pour préparer sa défense ne saurait donc prospérer.

100    Au demeurant, ainsi qu’il résulte des points 94 et 95 ci-dessus, la requérante a disposé non seulement d’un délai pour préparer le mémoire en réplique, mais également de deux délais supplémentaires pour déposer des observations dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure adoptées par le Tribunal. De surcroît, ainsi qu’il a été relevé au point 96 ci-dessus, la requérante aurait pu déposer une demande motivée d’audience de plaidoiries si elle avait estimé qu’elle n’avait pas encore été suffisamment en mesure de faire valoir ses arguments concernant la demande reconventionnelle.

101    En deuxième lieu, pour ce qui est de l’auteur des allégations ayant conduit à l’ouverture d’une enquête par l’OLAF, force est de constater que la requérante n’a pas précisé de quelle manière elle aurait pu mieux étayer ses arguments concernant la demande reconventionnelle si elle avait eu connaissance de l’identité de cet auteur. Or, celle-ci ne constitue pas un élément pertinent sur lequel se fonde cette demande. Au contraire, elle est fondée sur le contenu des documents, des courriels, des factures et d’autres éléments de preuve collectés au cours de l’enquête de l’OLAF.

102    En troisième lieu, s’agissant de l’authenticité du rapport de l’OLAF, il convient de constater d’emblée que celle-ci ne saurait être remise en cause du seul fait que la Commission a décidé d’occulter les noms de l’enquêteur et de ses responsables hiérarchiques.

103    La Commission a expliqué, à cet égard, que lesdits noms avaient été masqués pour des raisons de protection de données personnelles. En outre, la Commission fait observer que l’identité de l’enquêteur, qui était dûment mandaté par l’OLAF et présent lors du contrôle effectué sur place, est connue de la requérante.

104    Cela étant, dans le cadre de la première mesure d’organisation de la procédure du 9 juin 2020, la Commission a communiqué les noms des signataires du rapport de l’OLAF et la requérante, qui a pu en prendre connaissance, a été mise en mesure de présenter ses observations à la suite de cette divulgation, ce qu’elle s’est cependant abstenue de faire.

105    Il découle de l’ensemble des ces considérations que les griefs de la requérante relatifs à la production du rapport de l’OLAF doivent être rejetés comme non fondés.

 Sur les griefs de la requérante relatifs à la véracité du rapport de l’OLAF

106    En premier lieu, la requérante conteste la véracité de l’affirmation contenue dans le rapport de l’OLAF selon laquelle les partenaires des consortiums dont elle faisait partie qui ont été interrogés dans le cadre de l’enquête n’avaient pas connaissance du lien existant entre un des fournisseurs d’équipements acquis dans le cadre des projets, à savoir XJ, dont la requérante était actionnaire, et celle-ci. Elle reproche à la Commission de ne pas avoir produit de document étayant cette affirmation.

107    Dans la duplique, la Commission affirme que, « [d]e tous les partenaires concernés, uniquement un seul a déclaré être informé que la requérante “connaissait” la société fournisseur ». En outre, en réponse à une question posée par le Tribunal, la Commission a produit cinq déclarations de partenaires de consortium de la requérante, à savoir un partenaire du consortium formé dans le cadre du projet HOME SWEET HOME et quatre partenaires du consortium formé dans le cadre du projet Dreaming.

108    Il ressort de ces déclarations que lesdits partenaires de consortium ignoraient effectivement l’existence d’un conflit d’intérêts concernant la requérante et les liens d’actionnariat entre celle-ci et XJ. Les autres partenaires n’ont pas fait de commentaires sur ce point.

109    Partant, la Commission a démontré à suffisance de droit la véracité de l’allégation figurant dans le rapport de l’OLAF selon laquelle des partenaires des consortiums dont faisait partie la requérante en vue de l’exécution des projets en cause avaient répondu qu’ils n’avaient pas connaissance du lien existant entre la requérante et XJ. Les arguments et les éléments de preuve présentés par la requérante, notamment dans le cadre de ses réponses à la mesure d’organisation de la procédure adoptée par le Tribunal le 4 août 2020, ne sont pas de nature à remettre en cause ce constat.

110    Tel est le cas de l’allégation de la requérante selon laquelle l’un des partenaires du consortium chargés de l’exécution du projet Dreaming était au courant des liens existant entre elle et XJ. En effet, la requérante se borne à faire référence à cet égard, dans la réplique, à une lettre du directeur de XK (voir annexe C10) dans laquelle celui-ci indiquait que XK était au courant du fait que la requérante et XJ « se connaissaient ». Or, il ne ressort pas pour autant de cette déclaration que XK ait été informée du fait que la requérante était actionnaire de XJ ni que la requérante bénéficiait de commissions de vente de la part de cette société.

111    S’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle les questions posées par l’OLAF aux partenaires de consortium n’étaient pas neutres et objectives, celle-ci n’a pas été étayée. De même, l’affirmation de l’absence de fiabilité des réponses des partenaires de consortium selon lesquelles ceux-ci n’avaient pas été informés au préalable de l’existence d’un lien entre la requérante et XJ, au motif qu’ils auraient un intérêt à ne pas avouer leur connaissance dudit lien, n’a pas été appuyée par des éléments de preuve, comme des lettres adressées à ceux-ci ou d’autres circonstances factuelles remettant en cause les déclarations desdits partenaires. Par ailleurs, l’allégation non étayée de la requérante selon laquelle les personnes ayant fait des déclarations au nom des partenaires de consortium dans le cadre de l’enquête de l’OLAF n’étaient probablement pas encore au service de ces partenaires à l’époque où les projets en cause ont été exécutés ne saurait non plus infirmer le constat de l’OLAF relatif à l’ignorance desdits partenaires concernant les liens existant entre la requérante et XJ. Il en est de même pour quatre des cinq déclarations produites par la Commission en ce qui concerne le grief de la requérante selon lequel lesdites déclarations n’ont pas été traduites dans la langue de procédure, étant donné que la Commission a fourni une traduction en anglais, langue maîtrisée par la requérante, de ces quatre déclarations.

112    En tout état de cause, le compte rendu d’une réunion de négociations ayant eu lieu dans le courant du mois de février 2008, relatant qu’« aucune filiale de partenaires [de consortium] ne contribu[ait] au projet Dreaming » ([t]here are no affiliates of partners providing contributions in Dreaming), conforte la thèse de la Commission selon laquelle les membres du consortium chargés dudit projet ignoraient que la requérante faisait partie de l’actionnariat de XJ.

113    En second lieu, d’une part, la requérante conteste l’affirmation de l’OLAF selon laquelle elle a perçu des commissions de vente à hauteur de 100 000 euros pour les deux projets en cause, tandis que seule la perception d’une somme de 45 991 euros dans le cadre du projet Dreaming serait étayée par les preuves contenues dans le dossier produit par la Commission.

114    D’autre part, elle conteste l’affirmation figurant dans le rapport de l’OLAF selon laquelle elle aurait fait un bénéfice de 100 000 euros sur la vente au XL de téléphones de type Y, qui serait inexacte et, d’ailleurs, non étayée par les preuves produites. Selon la requérante, elle a, certes, adressé au XL la facture 2009-030 portant sur 113 appareils de type Y, mais cette facture aurait fait l’objet de la note de crédit 2009‑01. Il en irait de même pour les 27 appareils de type Y repris dans la facture 2010-026, qui auraient tous été crédités par la note de crédit 2011-003. Les allégations de l’OLAF selon lesquelles la requérante aurait réalisé un bénéfice par la vente desdits appareils ne seraient donc pas justifiées.

115    À cet égard, il convient de relever que les constatations de l’OLAF selon lesquelles la requérante aurait bénéficié d’un montant de 100 000 euros de commissions de vente et aurait réalisé un bénéfice de 100 000 euros dans le cadre de ventes portant sur des appareils de type Y sont fondées sur les informations contenues dans une présentation écrite établie par XJ et revue par la requérante, qui constitue l’annexe B21, dont l’authenticité n’a pas été mise en cause par la requérante. Lesdites informations sont donc objectivement de nature à conforter la véracité du rapport de l’OLAF. Toutefois, et en tout état de cause, du fait qu’il n’y avait pas de factures couvrant la totalité du montant de 100 000 euros perçu par la requérante en commissions de vente, la Commission a considéré comme prouvé à suffisance de droit, en vue d’étayer sa demande reconventionnelle, le paiement de commissions de vente dans le cadre du projet Dreaming à hauteur de 45 991 euros. En outre, la Commission a tenu compte des notes de crédits citées au point 114 ci‑dessus, à l’avantage de la requérante, de sorte que l’argument de celle-ci à cet égard manque en fait.

116    Dans ces circonstances, les arguments de la requérante visant à remettre en cause la véracité du rapport de l’OLAF ainsi que l’impartialité de celui-ci ne sauraient être accueillis.

 Sur les irrégularités alléguées

117    La Commission fait grief à la requérante d’avoir violé, en particulier, ses obligations contractuelles prévues au point II.3, sous g) et i), des conditions générales de chacune des conventions litigieuses ainsi que le principe d’exécution de bonne foi des contrats prévu par le droit belge, applicable à titre subsidiaire aux conventions litigieuses. À cette fin, elle allègue l’existence d’un conflit d’intérêts lié à la participation à l’actionnariat d’un fournisseur de certains équipements ainsi qu’à la perception de commissions de vente et à des surfacturations.

118    La Commission relève que XJ a été choisie par les consortiums chargés de la mise en œuvre des projets en cause pour fournir des appareils devant être distribués aux personnes âgées dans le cadre de ces projets. Or, la requérante aurait détenu 25 % des actions de XJ, alors qu’elle aurait déclaré qu’il n’y avait pas de risque de conflit d’intérêts susceptible d’empêcher une mise en œuvre objective et impartiale desdits projets. En outre, il résulterait de l’enquête menée par l’OLAF que la requérante avait conclu avec XJ un accord prévoyant que celle-ci lui payerait des commissions de vente en contrepartie de la réalisation de ventes d’équipements par son intermédiaire.

119    À cet égard, la Commission fait siennes les conclusions de l’OLAF selon lesquelles la requérante a agi de telle sorte que les participants impliqués dans les projets en cause achètent des appareils nécessaires à l’exécution de ceux-ci auprès de XJ. La requérante aurait délibérément inséré la solution technologique proposée par cette société dans la description desdits projets. La Commission met en relief la présence dans le dossier de l’OLAF d’un courriel du 10 aout 2010, postérieur à l’octroi des subventions, dans lequel la requérante aurait enjoint aux partenaires sociomédicaux responsables de l’achat du matériel d’effectuer des procédures d’achat devant impérativement aboutir à l’achat des produits de XJ, aux conditions imposées par celle-ci. La Commission soutient que, à la suite de ce courriel, les partenaires de consortium qui étaient soumis aux règles relatives aux marchés publics ont exprimé des doutes quant à l’achat desdits produits sans recourir à une procédure d’adjudication. En réponse, la requérante aurait justifié ce choix non pas par ses intérêts commerciaux, mais par le fait qu’il s’agirait du seul produit disponible sur le marché. Toutefois, selon la Commission, l’inexactitude de cette exclusivité prétendue du produit concerné serait démontrée par la présentation d’offres relatives à de tels équipements par d’autres fournisseurs dans le cadre de l’appel d’offres organisé par XL.

120    La Commission ajoute que, même si les produits fournis par XJ avaient été les seuls disponibles sur le marché qui répondaient aux exigences fixées, il serait impossible de savoir si de meilleures conditions auraient pu être obtenues lors d’une procédure négociée engagée directement avec ce fournisseur, sans intervention de la requérante.

121    Ensuite, selon la Commission, s’il est vrai que le formulaire de demande de subvention ne mentionnait que l’obligation d’indiquer une éventuelle relation entre le bénéficiaire et un autre partenaire de consortium, ce que XJ n’était pas, il n’en demeure pas moins que la requérante a produit de fausses déclarations d’absence de conflit d’intérêts en signant le formulaire type annexé à la demande indiquant qu’il n’y avait pas de risque de conflit d’intérêts susceptible d’empêcher une mise en œuvre objective et impartiale des projets en cause.

122    La requérante fait valoir qu’elle a toujours été transparente en ce qui concerne ses liens avec XJ. Le choix de celle-ci en tant que fournisseur du matériel concerné aurait été un choix commun des partenaires de consortium responsables de l’exécution des projets en cause, qui auraient tous estimé que la technologie proposée par XJ était la meilleure, voire la seule permettant de répondre aux exigences posées par eux, qui étaient chargés de l’assistance aux personnes âgées. Contrairement à ce que la Commission a avancé, le fait que d’autres sociétés aient présenté des offres fondées sur leurs propres équipements dans le cadre de l’appel d’offres effectué par XL ne démontrerait pas que leurs solutions étaient équivalentes aux produits fournis par XJ. Par ailleurs, cette dernière ne serait pas un sous-traitant, contrairement à ce qu’a affirmé l’OLAF, mais un fournisseur. Or, le fait de détenir une participation minoritaire dans le capital d’un fournisseur ne constituerait pas un conflit d’intérêts dont la Commission aurait dû être informée dans la demande de subvention.

123    Enfin, la requérante fait valoir que, même si l’existence d’un conflit d’intérêts venait à être établie, celui-ci n’aurait pas eu de suite négative pour le budget des projets en cause. En effet, les produits de XJ auraient été considérés comme les plus aptes par tous les autres partenaires de consortium, dont aucun n’avait de lien avec XJ.

124    Il y a lieu de rappeler, d’emblée, que, dans le cadre d’un contrat qui contient une clause compromissoire au sens de l’article 272 TFUE, il incombe à la partie qui a déclaré des coûts à la Commission pour l’attribution d’une contribution financière de l’Union d’apporter la preuve que lesdits coûts étaient des coûts réels qui avaient effectivement été nécessaires et encourus pour l’exécution du projet pendant la durée de celui-ci. Toutefois, dans l’hypothèse où la Commission demande le remboursement d’une créance à la suite d’un audit financier, il lui incombe de prouver que, à condition que le bénéficiaire ait produit les relevés de frais et autres renseignements pertinents, la prestation contractuelle est défectueuse ou que les relevés de frais ne sont pas exacts ou crédibles (voir arrêt du 13 juillet 2017, Talanton/Commission, T‑65/15, non publié, EU:T:2017:491, point 54 et jurisprudence citée).

125    En l’occurrence, dès lors que la requérante a produit les relevés de frais et autres renseignements pertinents, il incombe à la Commission de présenter des preuves concrètes que les prestations contractuelles de la requérante ont été défectueuses au regard des obligations qu’elle a contractées dans le cadre des conventions litigeuses.

126    Il convient de relever, tout d’abord, qu’il résulte du point II.3, sous g), des conditions générales des conventions litigieuses qu’un risque de conflit d’intérêts suppose l’existence d’une convergence d’intérêts économiques, d’affinités politiques ou nationales, de liens familiaux ou affectifs ou de tout autre type d’intérêt. Cette convergence, ces affinités ou ces liens doivent donc être effectivement constatés à la suite d’une appréciation concrète de l’objet du contrat et de la situation des parties concernées (voir, par analogie, arrêt du 22 janvier 2019, EKETA/Commission, T‑166/17, non publié, EU:T:2019:26, point 100 et jurisprudence citée)

127    En revanche, dans la mesure où ledit point des conditions générales vise un « risque » de conflit d’intérêts « susceptible » de compromettre l’exécution impartiale et objective du projet, il n’exige pas que soit apportée la preuve que ce conflit a ou a eu, de manière avérée, une influence sur l’exécution du contrat ou sur ses coûts (voir par analogie arrêt du 22 janvier 2019, EKETA/Commission, T‑166/17, non publié, EU:T:2019:26, point 100 et jurisprudence citée).

128    En l’espèce, la situation de conflit d’intérêts alléguée repose sur deux éléments, à savoir le fait que la requérante percevait des commissions de vente de la part de XJ et le fait que la requérante était actionnaire minoritaire de cette société.

–       Sur les allégations de conflit d’intérêts liées à la participation de la requérante à l’actionnariat d’un fournisseur

129    Tout d’abord, il est constant que la requérante détenait 25 % des actions de XJ et qu’elle ne l’avait pas déclaré à la Commission.

130    Ensuite, la Commission a démontré que les agissements concrets de la requérante dans le cadre de l’exécution des deux projets en cause étaient de nature à compromettre l’exécution impartiale et objective de ceux-ci au sens du point II.3, sous g), des conditions générales des conventions litigeuses.

131    À cet égard, il y a lieu de constater que le choix des produits et des solutions proposés par XJ avait déjà été fait avant la signature de la convention Dreaming, à l’initiative de la requérante, ainsi qu’il ressort de la description du projet qui figure en annexe I de ladite convention. Ainsi que l’a fait valoir la Commission au point 72 du mémoire en défense, le projet HOME SWEET HOME étant une continuation du projet Dreaming, les mêmes produits ont été retenus.

132    En outre, il y a lieu de relever le manque de transparence de la requérante quant à ses liens avec XJ. Ainsi qu’il a été relevé aux point 108 et 109 ci‑dessus, il est établi qu’au moins certains partenaires de consortium n’étaient pas informés de la nature de ces liens. En outre, la requérante a omis d’informer la Commission quant à ses liens avec le fournisseur des équipements déjà visés dans la description du projet Dreaming et a même produit de fausses déclarations d’absence de conflit d’intérêts, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 121 ci-dessus.

133    Enfin, la requérante a demandé de façon pressante à ses partenaires de consortium d’acquérir les équipements auprès de XJ au motif, notamment, qu’il n’y avait pas d’autres équipements appropriés sur le marché pour la mise en œuvre des projets. En effet, il ressort des échanges de courriels figurant dans l’annexe B.20, notamment du courriel du 10 août 2010 adressé par la requérante à ses partenaires du consortium chargés du projet HOME SWEET HOME, que la requérante s’est efforcée, en concertation avec XJ, de recueillir les commandes desdits partenaires pour l’achat des produits de cette société, notamment en leur envoyant des formulaires de commande préimprimés.

134    Partant, il y a lieu de constater que la Commission a présenté des preuves concrètes que la requérante était impliquée dans un conflit d’intérêts susceptible de compromettre l’exécution impartiale et objective des conventions, en violation du point II.3, sous g), des conditions générales de chacune des conventions litigieuses, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 124 à 127 ci-dessus.

135    Les affirmations de la requérante ne sauraient remettre en cause ce qui précède.

136    La requérante fait valoir, en substance, que les liens entre elle-même et XJ n’auraient pas porté préjudice au budget des projets et que, dès lors, elle n’aurait pas manqué à ses obligations contractuelles relatives à l’existence d’un conflit d’intérêts. Elle fait valoir, notamment, que les équipements fournis par XJ étaient les seuls produits permettant l’exécution des projets.

137    Il convient de relever que la prétendue pertinence exclusive des équipements de XJ n’a pas été prouvée à suffisance de droit, eu égard, notamment, au fait que, ainsi qu’il ressort du point 76 du mémoire en défense de la Commission et de l’annexe B.25, l’appel d’offres organisé par XL a donné lieu à la présentation d’au moins quatre soumissions présentant un produit concurrent de celui de XJ pour le projet HOME SWEET HOME. En outre, ainsi que l’a relevé à bon droit la Commission, la requérante a remplacé le modèle de téléphone initialement prévu par un autre modèle, ce qui indique qu’au moins certains appareils utilisés dans le cadre des deux projets étaient interchangeables. Par ailleurs, à supposer que la solution de XJ ait effectivement été la seule possible, la requérante n’explique pas la raison pour laquelle elle a adressé des lettres aux partenaires sociomédicaux responsables de l’achat du matériel en leur demandant de façon pressante d’engager des procédures devant aboutir à l’achat des produits de cette société (voir point 133 ci-dessus). En effet, l’inexistence de solution technique concurrente de celle de XJ aurait dû avoir pour effet de placer cette dernière dans une position de négociation privilégiée. L’ingérence de la requérante dans ces procédures d’achat ne correspond donc à aucune explication autre que celle avancée par la Commission.

138    Les autres arguments avancés par la requérante ne sont pas non plus de nature à infirmer les preuves concrètes présentées par la Commission.

139    Ainsi, s’il est vrai que la Commission avait connaissance de l’intention d’acquérir les équipements auprès de XJ avant de s’engager dans le financement des projets, ainsi que le fait valoir la requérante, il n’en reste pas moins que la Commission n’était pas au courant des liens de la requérante avec XJ avant l’enquête de l’OLAF.

140    En outre, l’argument de la requérante selon lequel le fait qu’elle était actionnaire minoritaire d’un des fournisseurs dans le cadre des deux projets en cause ne présente pas de risque de conflit d’intérêts ne saurait non plus prospérer. En effet, le fait d’être actionnaire, fût-ce minoritaire, du principal fournisseur d’équipements dans le cadre desdits projets implique un risque de convergence d’intérêts économiques rentrant dans les prévisions du point II.3, sous g), des conditions générales des conventions litigieuses.

141    Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la requérante n’a pas réfuté à suffisance de droit les éléments de preuve présentés par la Commission quant à l’existence d’un conflit d’intérêts en ce qui la concernait, qui était de nature à influer sur l’exécution des projets en cause et sur le montant des subventions à charge du budget géré par l’Union, étant donné que, eu égard à la participation de la requérante à l’actionnariat de XJ, celle-ci n’a pas prouvé que l’acquisition des équipements commercialisés par cette société était la seule possibilité et que, si tel n’était pas le cas, ce choix était uniquement fondé sur le rapport qualité-prix de ces produits.

142    Partant, il résulte de toutes ces considérations que sont établies les allégations de la Commission relatives à l’existence d’un conflit d’intérêts non déclaré en ce qui concerne la participation de la requérante à l’actionnariat d’un fournisseur.

–       Sur les allégations de conflit d’intérêts liées à la perception par la requérante de commissions sur les ventes réalisées par un fournisseur et sur les surfacturations alléguées

143    S’agissant, en premier lieu, des commissions de vente que la requérante aurait perçues, il convient de constater qu’il n’est pas contesté que cette dernière a établi une facture destinée à XJ pour une commission de vente de 45 991 euros dans le cadre du projet Dreaming pour les années 2008 et 2009. À cet égard, XJ a confirmé qu’elle payait des commissions de vente de 5 à 10 % pour les ventes réalisées avec l’intervention de la requérante. La Commission se réfère à une lettre de cette dernière dont il ressortirait qu’elle reconnaît avoir reçu des commissions de vente notamment pour les ventes réalisées dans le cadre du projet Dreaming et qu’elle aurait dû déclarer ces revenus.

144    La Commission fait valoir que le fait de percevoir une commission de vente constitue une violation de plusieurs règles applicables en l’espèce, à savoir le point II.3, sous g) et i), des conditions générales des conventions litigieuses et du principe d’exécution de bonne foi des contrats, et donc de l’article 1134 du code civil belge. Les agissements en cause devraient également être qualifiés d’irrégularités au sens du point II.1 desdites conditions générales.

145    La requérante rétorque qu’aucune règle légale, réglementaire ou contractuelle n’a été violée par le fait qu’elle a perçu des commissions de vente dans le cadre du projet Dreaming. Ce serait une pratique commerciale courante. En tout état de cause, il ne serait pas établi que le fait de recevoir de telles commissions ait causé une augmentation des prix des produits acquis pour l’exécution de ce projet.

146    Il convient de rappeler que le fait que la requérante a reçu des commissions de vente s’inscrit dans le contexte de l’existence d’un conflit d’intérêts en ce qui la concerne résultant de ses liens avec XJ, constaté aux points 126 à 140 ci-dessus. D’une part, ainsi qu’il a été exposé au point 137 ci-dessus, la requérante n’a pas démontré que le choix des équipements commercialisés par cette société ait été fondé sur le rapport qualité-prix des équipements concernés, et non pas uniquement sur ses intérêts économiques. Ainsi, la perception de commissions de vente par la requérante était à tout le moins susceptible d’influer sur le choix desdits équipements. D’autre part, le versement de commissions de vente par XJ à la requérante était de nature à faire augmenter le coût total des équipements et, de ce fait, à porter préjudice aux budgets alloués aux projets en cause.

147    Or, la requérante se borne à arguer que le fait que XJ a pu vendre un certain nombre de produits grâce à son intervention a entraîné une baisse des prix unitaires. Toutefois, cette allégation n’est fondée sur aucun élément de preuve concret. En particulier, il n’a aucunement été établi que la perception de commissions de vente aurait eu un effet positif pour les budgets alloués aux projets en cause.

148    Il s’ensuit que la requérante n’est pas parvenue à infirmer la conclusion que la perception de commissions de vente était de nature à compromettre l’exécution impartiale et objective des projets en cause.

149    S’agissant, en second lieu, de la surfacturation alléguée, la Commission expose que le projet Dreaming comportait initialement l’installation du modèle de téléphone portable Z dans les domiciles des personnes âgées, cet appareil étant vendu au prix unitaire de 1 018 euros. En cours d’exécution dudit projet, ce modèle aurait été remplacé par un modèle de téléphone portable moins cher, à savoir le modèle Y vendu au prix unitaire de 616 euros.

150    La Commission reproche à la requérante de ne pas avoir répercuté cette réduction de coûts sur le projet en diminuant le coût des équipements technologiques pour chacun des participants, mais, au contraire, avec la complicité de XJ et de la société XM, d’avoir conservé le bénéfice résultant de la différence de coûts, qualifié d’inattendu, qui aurait été réparti à parts égales entre la requérante et ces deux sociétés. La Commission invoque notamment à cet égard un courriel du 17 novembre 2008 adressé par XJ à la requérante et à XM. 

151    À cette fin, la requérante et les deux sociétés susmentionnées auraient artificiellement augmenté les prix d’autres équipements nécessaires pour la réalisation du projet, ainsi que le démontrerait le tableau repris au point 90 du mémoire en défense. Ainsi, sans raison objective, le prix d’une console serait passé de 438,50 à 577 euros et le prix d’un logiciel pour téléconférence de 200 à 400 euros.

152    Afin de calculer le montant de la surfacturation alléguée, la Commission a calculé le nombre d’unités surfacturées en se fondant sur une analyse des factures figurant dans le dossier produit par la Commission. La surfacturation porterait sur un montant de 45 697,50 euros pour le projet Dreaming et de 26 064,50 euros pour le projet HOME SWEET HOME, soit au total 71 762 euros.

153    Selon la requérante, les allégations de la Commission ne sont pas conformes aux faits. Au cours de la mise en œuvre du projet Dreaming, il serait apparu que le téléphone Z n’était plus commercialisé. En sa qualité de fournisseur du matériel technique, XJ aurait dès lors proposé d’utiliser un autre produit, soit le téléphone Y, vendu au prix de 616 euros. Entre-temps, le coût d’autres équipements aurait augmenté. En tout état de cause, l’opération aurait été globalement largement déficitaire pour XJ.

154    Par ailleurs, la requérante admet que les modifications de prix ont été discutées avec XM, également bénéficiaire de subvention dans le cadre du projet Dreaming, et XJ, notamment dans un courriel du 16 décembre 2008. Toutefois, les propositions exprimées dans ce courriel de compenser la baisse du prix d’un produit par une augmentation des prix des autres produits n’auraient pas été mises en œuvre. En outre, l’objectif de la requérante n’aurait pas été de réaliser des bénéfices. Selon elle, aucune règle contractuelle, légale ou réglementaire, pas plus que les usages honnêtes en matière commerciale ou encore l’exécution de bonne foi des conventions, n’impose à un fournisseur de réduire le coût de son offre en cas de baisse du prix d’un des éléments à fournir. Il en serait d’autant plus ainsi quand le prix d’autres produits, quant à eux, augmentent et que le coût global reste le même.

155    Le Tribunal considère que la Commission a prouvé à suffisance de droit que la requérante, en concertation étroite avec XJ et XM, a augmenté de manière artificielle les prix de la console et du logiciel à la suite du remplacement du modèle de téléphone Z par le modèle Y, d’un prix inférieur, par les pièces produites, notamment sur le fondement de la correspondance échangée entre les dirigeants des trois sociétés concernées, constituant l’annexe B.21. En effet, il ressort notamment de cette correspondance que, « lorsque le modèle Z a été remplacé par le Y, la différence de prix de 402 euros a été transférée aux budgets de la société XM pour le logiciel et la console » et qu’« il est correct de partager le solde de 402 euros à parts égales entre [XJ, XM et la requérante] ».

156    L’allégation de la requérante selon laquelle cette proposition de répartition du solde n’a jamais été mise en œuvre ne peut pas être admise, au regard des preuves produites par la Commission. Ainsi, il ressort du tableau annexé à l’un des courriels échangés entre la requérante, XM et XJ (annexe B.21, p 1124) que le prix des consoles et du logiciel pour téléconférence ont augmenté. Ensuite, il ressort des factures nos 151, 157, 158, 165 et 179 envoyées par XJ aux acheteurs des équipements concernés que les prix augmentés ont effectivement été facturés. Quant à la thèse de la requérante selon laquelle l’augmentation des prix du logiciel et de la console correspond à une augmentation réelle des prix de ces produits sur le marché, celle-ci n’est étayée par aucun élément de preuve.

157    C’est donc à bon droit que la Commission reproche à la requérante d’avoir violé le point II.3, sous g) et i), des conditions générales ainsi que le principe d’exécution de bonne foi des contrats.

 Sur la qualification des violations des obligations contractuelles d’irrégularités au sens du point II.1 des conditions générales des conventions litigieuses

158    Par son troisième chef de conclusions, la Commission demande au Tribunal de dire pour droit que les violations des obligations contractuelles imputées à la requérante ont le caractère d’irrégularités au sens du point II.1 des conditions générales des conventions litigieuses.

159    La notion d’irrégularité correspond, selon ledit point II. 1, à la définition suivante :

« Irrégularité : désigne toute violation d’une disposition du droit [de l’Union] ou toute méconnaissance d’une disposition de cette convention de subvention résultant d’un acte ou d’une omission d’un ou des contractants qui porte ou qui pourrait porter préjudice au budget [de l’Union]. »

160    Force est de constater que la notion d’irrégularité est ainsi définie par deux critères cumulatifs : une violation d’une règle de droit ou d’une stipulation contractuelle et le fait pour celle-ci d’entraîner ou d’être susceptible d’entraîner des conséquences financières en mettant à la charge des budgets gérés par l’Union des dépenses injustifiées. Une telle définition ne comporte, en revanche, aucun seuil de gravité (voir, par analogie, arrêt du 2 octobre 2012, ELE.SI.A/Commission, T‑312/10, non publié, EU:T:2012:512, point 107).

161    À cet égard, la Commission a prouvé à suffisance de droit que les agissements reprochés à la requérante pouvaient entraîner des conséquences négatives pour les budgets gérés par l’Union. En effet, en raison du conflit d’intérêts concernant la requérante et de la perception de commissions sur les ventes de certains équipements acquis par des partenaires de consortium dans le cadre de la mise en œuvre des projets en cause, il y avait un risque sérieux que le rapport qualité-prix desdits équipements ne soit pas équivalent à celui pouvant résulter d’une procédure transparente de négociation. Pour ce qui concerne, ensuite, la surfacturation du logiciel et de la console, il est manifeste qu’elle a généré des dépenses injustifiées, étant donné qu’elle a eu pour conséquence que la baisse du prix des téléphones n’a pas été répercutée au profit du budget du projet.

162    Partant, le Tribunal constate que, par ses agissements, la requérante a méconnu ses obligations contractuelles d’une façon susceptible d’entraîner des conséquences financières pour les budgets gérés par l’Union. En conséquence, les agissements concernés doivent être qualifiés d’irrégularités au sens du point II. 1 des conditions générales de chacune des conventions litigieuses.

163    Il y a lieu, dès lors, de dire pour droit que les violations contractuelles imputées à la requérante relatives à l’existence d’un conflit d’intérêts, à la perception de commissions de vente et à une surfacturation constituent des irrégularités au sens de ladite stipulation contractuelle.

 Sur le remboursement intégral des sommes versées

164    La Commission demande, en premier lieu, le remboursement intégral des sommes versées à la requérante, notamment sur le fondement de l’article 119 du règlement financier et de l’article 183 du règlement (CE, Euratom) no 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement no 1605/2002 (JO 2002, L 357, p. 1), lus conjointement avec le point II.26, paragraphe 6, et le point II.28, paragraphe 5, des conditions générales des conventions litigieuses ainsi qu’avec l’article 9, paragraphe 1, de la décision no 1639/2006.

165    Ladite demande porte sur les sommes de 230 348 euros pour le projet Dreaming et de 282 451 euros pour le projet HOME SWEET HOME, soit un montant total de 512 799 euros.

166    La requérante soutient, en substance, que, à supposer que l’existence d’un conflit d’intérêts soit établie, ce fait ne justifie pas le recouvrement de l’intégralité des subventions, d’autant que, selon elle, cette situation n’a pas eu de répercussion négative pour le budget des projets en cause. Elle fait valoir également que ces projets ont été achevés et que les résultats atteints auraient été qualifiés de suffisants. Par ailleurs, elle souligne que le recouvrement des subventions mènerait à sa faillite.

167    Tout d’abord, il convient de rappeler que, conformément à l’article 10, premier alinéa, de chacune des conventions litigieuses, celles-ci, et donc l’octroi de la subvention en faisant l’objet, étaient régis par les stipulations de ces conventions, par les actes de l’Union concernant le programme-cadre IC, par le règlement financier et ses règles d’exécution ainsi que par d’autres dispositions du droit de l’Union et, à titre subsidiaire, par le droit belge.

168    En premier lieu, s’agissant des stipulations contractuelles pertinentes, il convient de relever que, conformément au point II.26, paragraphe 6, des conditions générales des conventions litigieuses, chaque paiement peut faire l’objet d’un audit ou d’un contrôle et peut être modifié ou recouvré sur le fondement des résultats de cet audit ou de ce contrôle. Selon le point II.28, paragraphe 5, desdites conditions générales, la Commission prend des mesures appropriées sur le fondement des conclusions de l’audit, y compris l’émission d’un ordre de recouvrement concernant tout ou une partie des paiements effectués et l’application de sanctions.

169    Ces stipulations n’excluent donc pas la possibilité pour la Commission de procéder au recouvrement intégral des sommes versées au titre desdites conventions. Au contraire, il en résulte explicitement que tous les paiements peuvent être recouvrés.

170    En deuxième lieu, le règlement financier dispose, à son article 119 :

«1.      Le montant de la subvention ne devient définitif qu’après l’acceptation par l’institution des rapports et des comptes finaux, sans préjudice des contrôles ultérieurs effectués par l’institution.

2.      En cas de non-respect par le bénéficiaire de ses obligations, la subvention est suspendue, réduite ou supprimée dans les cas prévus par les modalités d’exécution après que le bénéficiaire a été mis en mesure de formuler ses observations. »

171    L’emploi du terme « supprimée » audit article 119, paragraphe 2, vise ainsi l’hypothèse d’un recouvrement de l’intégralité des sommes perçues.

172    Cette conclusion est également conforme au principe de bonne et saine gestion financière des ressources de l’Union prévu à l’article 317 TFUE. Ainsi, en cas de non-respect des conditions fixées par une convention de subvention, l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union est tenu de récupérer la subvention versée à concurrence des montants considérés comme non fiables ou non vérifiables.

173    De surcroît, le juge de l’Union a déjà jugé que, dans le système d’octroi des concours financiers de l’Union, l’utilisation de ces concours est soumise à des règles qui peuvent aboutir à la restitution partielle ou totale d’un concours déjà octroyé (arrêts du 7 juillet 2010, Commission/Hellenic Ventures e.a., T‑44/06, non publié, EU:T:2010:284, point 85, et du 16 décembre 2010, Commission/Arci Nuova associazione comitato di Cagliari et Gessa, T‑259/09, non publié, EU:T:2010:536, point 61).

174    Il ressort également de la jurisprudence que le bénéficiaire d’une subvention n’acquiert aucun droit définitif au paiement intégral de cette subvention s’il ne respecte pas les conditions auxquelles le soutien était subordonné (voir arrêt du 10 octobre 2019, Help – Hilfe zur Selbsthilfe/Commission, T‑335/17, non publié, EU:T:2019:736, point 200 et jurisprudence citée).

175    Il s’ensuit que les stipulations contractuelles et les dispositions pertinentes du règlement financier n’empêchent pas la Commission de procéder à un recouvrement de l’intégralité des sommes versées à la requérante au titre des conventions litigeuses.

176    Ensuite, il convient de vérifier si, dans les circonstances de l’espèce, la Commission est fondée à obtenir le remboursement intégral desdites sommes.

177    À cet égard, il importe de relever, ainsi qu’il a été établi au point 162 ci-dessus, que les reproches faits à la requérante peuvent être qualifiés d’« irrégularités » au sens du point II.1 des conditions générales des conventions litigieuses.

178    Par ailleurs, s’agissant du contexte dans lequel s’inscrit cette stipulation contractuelle, il convient de relever qu’il résulte du point II.10, paragraphe 3, sous f), desdites conditions générales que le fait de commettre une irrégularité est un acte ou une omission d’une gravité telle qu’il peut justifier la résiliation de la convention en question avec effet immédiat. En outre, le point II.5, paragraphe 3, sous d), quatrième tiret, de ces conditions générales prévoit que la Commission peut suspendre, à tout moment, le paiement, pour tout ou partie du montant destiné au bénéficiaire concerné, en cas de suspicion d’une irrégularité commise par un ou plusieurs bénéficiaires.

179    En l’occurrence, il y a lieu de considérer que la requérante, en ne déclarant pas le risque de conflit d’intérêts, en ayant perçu des commissions de vente et en ayant participé à la surfacturation de certains équipements n’a pas respecté le principe d’exécution de bonne foi des contrats, tel qu’établi, en droit belge, par l’article 1134, troisième alinéa, et l’article 1135 du code civil.

180    En effet, il a été établi aux points 128 et 129 ci-dessus que la requérante se trouvait dans une situation de conflit d’intérêts par rapport à XJ, qui a été à la base du choix de cette dernière pour la fourniture d’équipements. Ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre, il est impossible de chiffrer les répercussions de ce conflit d’intérêts sur le budget des projets en cause, du fait que le prix voire même la nécessité de l’achat de ces équipements en l’absence de ce conflit d’intérêt ne sauraient être déterminés. Il résulte, ensuite, du point 141 ci-dessus que la requérante n’a pas démontré que ses agissements n’avaient pas entraîné de répercussions négatives sur le budget desdits projets. Ainsi, elle n’a pas prouvé que les produits de XJ étaient les seuls permettant la réalisation de ces projets et que, dès lors, le choix de ces produits avait été fondé sur des considérations objectives. De même, elle n’a pas démontré que le fait qu’elle avait perçu des commissions de vente n’avait pas influé sur le prix des produits en cause. Compte tenu dudit conflit d’intérêts, il n’est pas établi que les équipements acquis présentaient le meilleur rapport qualité-prix. Dans ces conditions, il convient de constater que ce conflit d’intérêts a eu une influence sur l’ensemble de la relation contractuelle entre la requérante et la Commission.

181    En outre, il importe de souligner que les violations d’obligations contractuelles commises par la requérante ont été d’une gravité telle qu’elle justifie le remboursement intégral des subventions. En effet, la requérante a porté gravement atteinte à sa relation contractuelle avec la Commission en ne déclarant pas l’existence d’un conflit d’intérêts ainsi que la perception de commissions de vente et en procédant à une surfacturation des prix de certains produits.

182    Dans ces conditions, le recouvrement intégral des sommes versées au titre des conventions litigieuses n’est pas disproportionné.

183    Cette conclusion n’est pas affectée par le fait que les projets en cause ont été effectivement réalisés par la requérante ni par les résultats obtenus.

184    En effet, il ne suffit pas de démontrer qu’un projet a été réalisé pour justifier l’attribution d’une subvention spécifique. Le bénéficiaire de l’aide doit, de surcroît, apporter la preuve qu’il a exposé les frais déclarés conformément aux conditions fixées pour l’octroi de la subvention concernée. Son obligation de respecter les conditions financières fixées constitue un engagement essentiel et, de ce fait, conditionne l’attribution de la subvention de l’Union (arrêt du 10 octobre 2019, Help – Hilfe zur Selbsthilfe/Commission, T‑335/17, non publié, EU:T:2019:736, point 201).

185    Partant, la demande de remboursement de l’intégralité des sommes versées dans le cadre des conventions litigieuses est fondée, de sorte qu’il y a lieu de faire droit à ce chef de conclusions de la demande reconventionnelle de la Commission.

 Sur la demande de dommages et intérêts

186    En sus du remboursement des subventions, la Commission demande le paiement de dommages et intérêts à hauteur de 58 876,50 euros.

187    Selon la Commission, les trois conditions pour engager la responsabilité contractuelle de la requérante sont remplies, à savoir la violation d’une ou de plusieurs stipulations contractuelles, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement mis en cause et le préjudice invoqué.

188    La Commission fait valoir que la perception, par la requérante, de commissions de vente pour 45 991 euros a été prouvée. Elle part de la prémisse selon laquelle XJ aurait réduit ses prix au moins de ce montant si ces commissions n’avaient pas été dues. En tout état de cause, une exécution correcte et loyale du contrat aurait dû amener la requérante à déclarer et à rétrocéder cette ristourne au profit des partenaires de consortium chargés de l’exécution du projet concerné.

189    S’agissant de la surfacturation de la console et du logiciel, la Commission déduit des éléments figurant dans le rapport de l’OLAF que, dans le cadre du projet Dreaming, 135 unités de la console et du logiciel ont été vendues. Un montant de 338,50 euros par unité aurait été surfacturé, soit donc un montant total de 45 697,50 euros. Dans le cadre du projet HOME SWEET HOME, 77 unités auraient été vendues, ce qui aurait entraîné un surcoût de 26 064,50 euros.

190    Du fait que la Commission n’a financé que la moitié de ces projets, elle aurait subi un dommage total de 58 876,50 euros.

191    Selon la requérante, à supposer qu’elle ait commis les violations de règles légales ou contractuelles qui lui sont reprochées, ce qu’elle conteste, la réalité du dommage et le lien de causalité entre ses agissements et ce prétendu dommage n’ont pas été prouvés. À cet égard, elle fait valoir que le prix des produits concernés n’aurait pas été inférieur si elle n’avait pas fait fonction d’intermédiaire, étant donné que ce serait grâce à elle que XJ a pu vendre un nombre plus important de produits à un prix unitaire moins élevé. Pour ce qui est de l’augmentation du prix de la console et du logiciel, le prix de ces équipements sur le marché aurait réellement augmenté, de sorte qu’il n’y aurait pas eu de surfacturation.

192    Il y a lieu de relever, tout d’abord, que la demande en cause a pour objet l’engagement de la responsabilité contractuelle de la requérante. En effet, la Commission fait valoir que les dommages dont l’indemnisation est réclamée ont été causés par la violation, par la requérante, de ses obligations contractuelles. Dès lors, le Tribunal est compétent, sur le fondement de l’article 272 TFUE, pour connaître de cette demande, qui dérive du même lien contractuel que celui sur lequel est fondée la demande reconventionnelle.

193    Ensuite, il importe de constater que, saisi dans le cadre d’une clause compromissoire en vertu de l’article 272 TFUE, le Tribunal doit trancher le litige sur la base du droit matériel applicable au contrat (voir arrêts du 29 novembre 2016, ANKO/REA, T‑270/15, non publié, EU:T:2016:681, point 43 et jurisprudence citée, et du 1er mars 2017, Universiteit Antwerpen/REA, T‑208/15, non publié, EU:T:2017:136, point 53 et jurisprudence citée). Le droit applicable au contrat est celui qui est expressément prévu dans celui-ci, les stipulations contractuelles exprimant la commune volonté des parties devant primer sur tout autre critère, utilisable seulement dans le silence du contrat (voir arrêt du 8 septembre 2015, Amitié/Commission, T‑234/12, non publié, EU:T:2015:601, point 74 et jurisprudence citée).

194    Il convient de rappeler que, conformément à l’article 10 de chacune des conventions litigieuses, celles-ci sont régies par leurs propres dispositions, par les dispositions pertinentes du droit de l’Union et, à titre subsidiaire, par le droit belge.

195    Or, force est de constater que la Commission ne cite aucune clause desdits contrats qui prévoirait la responsabilité contractuelle de la requérante.

196    En outre, il y a lieu de relever que le droit de l’Union ne comporte pas de disposition matérielle régissant la responsabilité contractuelle pour les dommages causés par un cocontractant de l’Union.

197    À cet égard, la Commission se réfère, au point 99 du mémoire en défense, à l’arrêt du 12 avril 2018, PY/EUCAP Sahel Niger (T‑763/16, EU:T:2018:181), qui concerne la responsabilité contractuelle de l’Union en vertu de l’article 340 TFUE et le droit applicable dans une telle situation. Au point 66 dudit arrêt, le Tribunal a considéré que la responsabilité contractuelle pouvait être examinée « sur le seul fondement des contrats d’emploi en cause […] à la lumière des principes généraux du droit de l’Union en matière d’engagement de la responsabilité contractuelle » et que, « selon ces principes, trois conditions doivent être remplies pour qu’une action en responsabilité contractuelle puisse aboutir, à savoir, tout d’abord, que l’institution en cause n’ait pas rempli ses obligations contractuelles, ensuite, que la partie requérante ait subi un dommage et, enfin, qu’il existe un lien de causalité entre le comportement de ladite institution et ce dommage ».

198    La Commission part du principe que cette jurisprudence est applicable par analogie à la responsabilité contractuelle du cocontractant d’une institution de l’Union, en l’occurrence la requérante. Toutefois, la situation dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 avril 2018, PY/EUCAP Sahel Niger (T‑763/16, EU:T:2018:181), est différente de la situation ici en cause. En effet, il ressort du point 62 dudit arrêt que les contrats d’emploi en cause dans cette affaire ne spécifiaient pas le droit applicable à ceux-ci, tandis que, en l’espèce, les conventions litigieuses comportent une stipulation relative au droit applicable.

199    Cela étant, en l’espèce, les conditions pour l’engagement de la responsabilité contractuelle de la requérante doivent être recherchées dans le droit belge, applicable à titre subsidiaire aux conventions litigieuses.

200    En matière de responsabilité contractuelle, l’article 1142 du code civil belge, qui s’insère dans le titre III du livre III, intitulé « Des contrats ou des obligations conventionnelles en général », dispose que « [t]oute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur ».

201    En outre, selon l’article 1147 du code civil belge, « [l]e débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part ».

202    Il résulte de l’article 1147 du code civil belge que trois conditions doivent être réunies pour qu’un dommage d’origine contractuelle soit indemnisé, à savoir l’inexécution totale ou partielle du contrat, un préjudice et un lien de causalité entre l’inexécution et le préjudice (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Meta Group/Commission, T‑744/14, non publié, EU:T:2017:304, point 271 et jurisprudence citée).

203    Le Tribunal considère que, en l’espèce, la Commission n’a pas établi à suffisance de droit l’existence d’un lien suffisamment direct de cause à effet entre l’inexécution des obligations contractuelles imputée à la requérante et le préjudice allégué, à supposer que ce dernier soit avéré.

204    En premier lieu, il est constant que la requérante n’a pas vendu d’équipement aux partenaires de consortium concernés dans le cadre des conventions litigieuses, ni demandé le remboursement de dépenses relatives à l’achat d’équipements. En effet, les équipements ayant fait l’objet de surfacturation ou de commissions de vente ont été achetés non pas par la requérante, mais par d’autres entités, non liées à celle-ci, auxquelles la Commission a remboursé les dépenses encourues à l’occasion desdits achats.

205    En second lieu, il est également constant que la responsabilité des achats des équipements ayant fait l’objet de surfacturation et de commissions de vente revenait non pas à la requérante, mais aux membres des consortiums ayant effectué lesdits achats. Cela est confirmé par la réponse de la Commission à une question posée par le Tribunal dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, dans laquelle elle a affirmé que « le choix des produits ou [des] matériaux utilisés dans les projets du bénéficiaire sont de l’entière responsabilité de celui‑ci, même si la description d’un équipement se trouve dans l’annexe I de la convention ».

206    Or, la Commission, à qui il incombe, conformément au principe actori incumbit probatio, de prouver que les trois conditions mentionnées au point 202 ci-dessus sont remplies, reste en défaut de démontrer l’existence d’un lien de causalité direct. En effet, elle se borne à affirmer à cet égard, dans une seule phrase et sans aucune démonstration concrète, que le lien de causalité serait « évident », car la requérante aurait participé « activement » aux violations contractuelles en cause, sans lesquelles le préjudice réclamé n’aurait pas eu lieu.

207    Toutefois, de telles affirmations générales ne suffisent pas pour démontrer à suffisance de droit l’existence d’un lien de causalité direct entre le préjudice allégué et les violations contractuelles en cause dans une situation se caractérisant par l’interposition de plusieurs personnes tierces, telle que celle décrite aux points 204 et 205 ci-dessus.

208    En outre, et en tout état de cause, il y a lieu de relever que, dans le contexte de l’exécution d’obligations contractuelles, le respect du principe de proportionnalité participe de l’obligation plus générale des parties à un contrat de l’exécuter de bonne foi. Par ailleurs, en vertu du droit belge, l’obligation d’exécuter de bonne foi les contrats, prévue à l’article 1134 du code civil, interdit à une partie d’exercer un droit d’une manière qui excède manifestement les limites de l’exercice normal de ce droit par une personne prudente et diligente (Cass. 16 novembre 2007, AR nr C.06.0349.F.1) (voir, en ce sens, arrêt du 24 octobre 2018, Nova/Commission, T‑299/15, non publié, EU:T:2018:713, point 140).

209    Or, compte tenu, d’une part, du fait que les projets faisant l’objet des conventions litigieuses ont été exécutés sans retard et conformément aux objectifs desdits projets, ce qui n’est pas contesté, et, d’autre part, des conséquences particulièrement graves devant résulter, pour la requérante, du recouvrement intégral des subventions, le Tribunal considère que la demande de dommages et intérêts, qui s’ajouterait audit recouvrement intégral, excède manifestement les limites de l’exercice normal du droit en cause.

210    Il s’ensuit que la demande en indemnisation doit être rejetée comme non fondée.

 Conclusion

211    Il résulte des considérations qui précèdent que l’intégralité des montants versés à la requérante au titre des conventions litigieuses doit être remboursée par celle-ci en raison des irrégularités commises par elle. Dès lors, les conclusions de la requérante, visant à entendre dire pour droit qu’elle n’est pas redevable des notes de débit nos 3241901815 et 3241901886, sont devenues inopérantes.

212    Au vu de tout ce qui précède, il convient, d’une part, de rejeter le recours principal et, d’autre part, de faire droit à la demande reconventionnelle de la Commission dans la mesure où celle-ci vise à entendre dire pour droit que les violations contractuelles imputées à la requérante sont des irrégularités au sens du point II.1 des conditions générales des conventions litigieuses et à obtenir le remboursement des sommes versées à celle-ci dans le cadre desdites conventions. La demande reconventionnelle sera rejetée pour le surplus.

 Sur les dépens

213    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, selon le paragraphe 3 du même article, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supportera ses propres dépens si les parties succombent, comme en l’espèce, sur un ou plusieurs chefs.

214    Dans les circonstances de l’espèce, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation de la cause en condamnant la requérante à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (dixième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours principal est rejeté.

2)      Les violations des conventions de subvention no 225023, relative à la réalisation du projet intitulé « ElDeRly-friEndly Alarm handling and monitorING (Dreaming) », et no 250449, relative à la réalisation du projet intitulé « Health monitoring and sOcial integration environMEnt for Supporting WidE ExTension of independent life at HOME (HOME SWEET HOME) », commises par Health Information Management (HIM) constituent des irrégularités au sens du point II.1 des conditions générales desdites conventions.

3)      HIM est condamnée à rembourser à la Commission européenne la somme de 512 799 euros.

4)      La demande reconventionnelle de la Commission est rejetée pour le surplus.

5)      HIM est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens exposés par la Commission.

Kornezov

Buttigieg

Hesse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 juin 2021.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.


1      Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.