Language of document : ECLI:EU:T:2014:587

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (huitième chambre)

4 juin 2014 (*)

« Aide judiciaire – Demande présentée antérieurement à un recours en annulation »

Dans l’affaire T‑516/13 AJ,

CW,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’aide judiciaire au titre de l’article 95 du règlement de procédure du Tribunal,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure, demandes et arguments des parties

1        Par acte enregistré au greffe du Tribunal le 18 septembre 2013, le requérant, M. CW, demande au Tribunal de l’admettre au bénéfice de l’aide judiciaire, en application des dispositions des articles 94 et 95 du règlement de procédure du Tribunal.

2        Cette demande se rapporte à un recours qui sera ultérieurement introduit devant le Tribunal [confidentiel] (1).

3        Dans ladite demande, en premier lieu, M. CW fait valoir qu’il est sans revenu et sans emploi. En deuxième lieu, il prétend qu’il possède une maison en Tunisie achetée à crédit, mais que celle-ci a été saisie par les autorités tunisiennes. En troisième lieu, il allègue qu’il dispose d’un appartement à Paris (France) pour l’achat duquel il a contracté un emprunt qu’il doit rembourser mensuellement à hauteur de 1 200 euros. En quatrième lieu, il affirme que « ses fonds sont épuisés ». Il ne disposerait en effet que d’un seul compte bancaire hors de Tunisie. Or, celui-ci, domicilié en France, aurait un solde nul. En cinquième lieu, « étant en instance de divorce », il verserait mensuellement à son épouse et à ses enfants la somme de 997 euros. En sixième lieu, il allègue vivre en Algérie chez sa mère et être à la charge de ses oncles et cousins.

4        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 décembre 2013, M. CW a déposé de nouvelles offres de preuve à l’appui de sa demande d’aide judiciaire.

5        Dans ses observations déposées au greffe du Tribunal le 6 janvier 2014, le Conseil de l’Union européenne ne soulève aucune objection à ce qu’il soit fait droit à la demande d’aide judiciaire. Cependant, relevant que, dans d’autres affaires similaires, le Tribunal a limité le montant de l’aide judiciaire à la somme de 10 000 euros, le Conseil demande qu’il soit fait de même en l’espèce.

6        En application de l’article 96, paragraphe 2, du règlement de procédure, la demande d’aide judiciaire dont il s’agit a été déférée à la huitième chambre du Tribunal par son président.

7        Le 4 mars 2014, le Tribunal a posé une série de questions écrites à M. CW par voie de mesures d’organisation de la procédure. Par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 avril 2014, ce dernier y a partiellement répondu. Il a par ailleurs demandé, à cette occasion, que sa demande d’aide judiciaire soit considérée comme se rapportant également au recours qu’il entend déposer contre [confidentiel].

 Sur la demande d’aide judiciaire

 Observations liminaires

8        [confidentiel]

9        [confidentiel]

10      [confidentiel]

11      [confidentiel]

12      [confidentiel]

13      [confidentiel]

14      [confidentiel]

 Sur l’admission au bénéfice de l’aide judiciaire

15      Aux termes de l’article 94, paragraphe 2, du règlement de procédure :

« Toute personne physique qui, en raison de sa situation économique, est dans l’incapacité totale ou partielle de faire face aux frais visés au paragraphe 1 a le droit de bénéficier de l’aide judiciaire.

La situation économique est évaluée en tenant compte d’éléments objectifs tels que les revenus, le capital détenu et la situation familiale. »

16      Il ressort de cette disposition que, pour qu’il soit fait droit à une demande d’aide judiciaire, il faut, en tout état de cause, que, compte tenu de ses revenus et de son patrimoine, le demandeur soit dans l’impossibilité de régler tout ou partie de ses frais d’assistance et de représentation en justice devant le Tribunal tout en subvenant aux besoins essentiels de sa famille.

17      En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que, chaque mois, après avoir subvenu à ses propres besoins, M. CW doit pourvoir à ceux de sa famille. En effet, d’une part, son épouse a présenté, devant le tribunal de première instance de Ben Arous (Tunisie), une demande en divorce. Or, s’il n’est pas établi qu’un jugement de divorce ait été rendu, il ressort des pièces du dossier que le « juge de conciliation » près le tribunal de première instance de Ben Arous a pris, à l’issue d’une « audience de conciliation », qui s’est tenue le 10 septembre 2012, une décision imposant, à titre de « moyens temporaires », à M. CW de verser à son épouse une pension alimentaire de 300 dinars tunisiens (TND), soit environ 134 euros, par mois et de contribuer à l’entretien de ses trois enfants mineurs, dont la garde a été confiée de manière provisoire à son épouse, en leur versant la somme de 1 000 TND, soit environ 449 euros, chaque mois. D’autre part, il ressort d’un « procès-verbal » établi à la suite de l’« audience de conciliation » que l’épouse de M. CW est « femme au foyer » et ne dispose donc pas de revenus propres.

18      Par ailleurs, il ressort d’une attestation établie le 17 février 2012 par un avocat près la Cour de cassation de la République tunisienne, dont il n’est ni établi ni allégué qu’il soit lié à M. CW, que les biens détenus par ce dernier en Tunisie ont été saisis « sans procédure préalable ».

19      Toutefois, en premier lieu, il ressort des écritures et d’un « procès-verbal » établi à la suite de l’« audience de conciliation » mentionnée au point 17 ci-dessus que M. CW détient un appartement à Paris, occupé, à titre de résidence principale, par son épouse et ses enfants, pour l’achat duquel il avait contracté un emprunt bancaire « qu’il a fini de […] rembourser au mois d’avril 2014 ». Or, il ressort des pièces du dossier que, puisque M. CW avait omis de payer des charges de copropriété d’un montant évalué à 12 384,30 euros le 21 mars 2014, l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble a engagé une procédure de saisie immobilière tendant à la vente par adjudication de cet appartement. Mais, à ce jour, cette vente n’a pas eu lieu.

20      En deuxième lieu, M. CW détient un compte bancaire à son nom propre au sein de l’Union. Or, [confidentiel] l’établissement bancaire teneur de compte a prélevé, le 8 juin 2011, une somme de 117 169,31 euros correspondant, approximativement, au solde créditeur du compte, précisant qu’il s’agissait là d’une « provision » pour « blocage ». Du fait de cette opération bancaire, le solde du compte est devenu nul. Par la suite, l’établissement bancaire a ponctionné la somme ainsi provisionnée en procédant à des virements sur le compte de M. CW afin de lui permettre de subvenir aux besoins fondamentaux de son épouse et de ses enfants, de régler les mensualités d’un prêt contracté antérieurement au gel de fonds pour l’achat de l’appartement parisien évoqué au point précédent et de couvrir ses frais d’avocat. Tel est, tout du moins, ce qui ressort des mentions portées sur les relevés bancaires produits devant le Tribunal, dans la colonne relative à la « nature des opérations » réalisées. En raison de ces virements, suivis de dépenses du même montant, le solde du compte a, depuis le 8 juin 2011, oscillé autour de zéro. Le dernier solde porté à la connaissance du Tribunal, daté du 13 décembre 2013, est d’ailleurs débiteur à concurrence de 9,65 euros. Cependant, rien ne démontre que M. CW ne dispose d’aucun avoir bancaire au sein de l’Union. En particulier, même en tenant compte de ce que M. CW reste redevable d’une somme de 12 384,30 euros à l’égard du syndicat de copropriétaires de l’immeuble dans lequel se trouve l’appartement parisien évoqué au point précédent, il n’est pas établi que la part restante de la somme provisionnée par l’établissement bancaire le 8 juin 2011 soit insuffisante pour couvrir des frais d’assistance et de représentation en justice.

21      En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, le 9 mai 2011, soit avant que l’établissement bancaire teneur du compte susmentionné ne prélève sur ce compte une somme de 117 169,31 euros à titre de « provision » pour « blocage », M. CW a réalisé trois virements bancaires vers un compte bancaire domicilié en Algérie. Certes, un de ces virements a fait l’objet d’une annulation. Toutefois, les deux autres virements ont permis de transférer vers l’Algérie une somme totale 46 350 euros hors de l’Union. Or, alors qu’il soutient résider actuellement en Algérie, M. CW n’a pas communiqué au Tribunal le montant de ses avoirs bancaires dans ce pays.

22      En quatrième et dernier lieu, par la voie d’une mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a invité M. CW à produire des avis d’imposition ou tout autre document émanant des services fiscaux de l’État dont il est résident fiscal, de nature à préciser le montant de ses revenus au titre des années 2012 et 2013. Toutefois, M. CW n’a pas déféré à cette invitation, de sorte que le Tribunal est dans l’impossibilité de vérifier si, comme il le prétend, il est dépourvu de toute source de revenu.

23      Dans ces conditions, M. CW ne peut être regardé comme étant, à ce jour, dans l’impossibilité de faire face à ses frais d’assistance et de représentation en justice devant le Tribunal tout en subvenant aux besoins essentiels de sa famille. Sa demande d’aide judiciaire doit donc être rejetée, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de l’extension dont cette demande a fait l’objet par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 avril 2014 (voir point 7 ci-dessus).

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL

ordonne :

La demande d’aide judiciaire dans l’affaire T‑516/13 AJ est rejetée.

Fait à Luxembourg, le 4 juin 2014.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

      D. Gratsias


* Langue de procédure : le français.


1      Données confidentielles occultées.