Language of document : ECLI:EU:T:2020:319

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

8 juillet 2020 (*)

« Marchés publics de services – Procédure d’appel d’offres – Maintenance des installations de sécurité dans les bâtiments occupés et/ou gérés par la Commission en Belgique et au Luxembourg – Rejet de l’offre d’un soumissionnaire – Attribution du marché à un autre soumissionnaire – Critères de sélection – Illégalité d’une clause du cahier des charges – Égalité de traitement »

Dans l’affaire T‑661/18,

Securitec, établie à Livange (Luxembourg), représentée par Me P. Peuvrel, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par Mmes M. Ilkova et A Katsimerou et M. J. Estrada de Solà, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation, d’une part, de la décision de la Commission du 7 septembre 2018 de rejeter l’offre soumise par la requérante pour le lot no 4 du marché ayant fait l’objet de la procédure d’appel d’offres restreint HR/R1/PR/2017/059 et relatif à la « maintenance des installations de sécurité dans les bâtiments occupés et/ou gérés par la Commission européenne en Belgique et au Luxembourg » ainsi que, d’autre part, de la décision de la Commission du 17 septembre 2018 de refuser de fournir à la requérante les précisions qu’elle avait demandées dans le cadre de la même procédure le 11 septembre 2018,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. S. Gervasoni, président, P. Nihoul (rapporteur) et J. Martín y Pérez de Nanclares, juges,

greffier : M. L. Ramette, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 5 février 2020,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par un avis de marché publié au supplément du Journal officiel de l’Union européenne (JO 2018/S 064-141552), la Commission européenne a lancé une procédure d’appel d’offres restreint pour la « maintenance des installations de sécurité dans les bâtiments occupés et/ou gérés par la Commission européenne en Belgique et au Luxembourg ».

2        Le marché comportait sept lots, dont le quatrième, seul concerné par la présente affaire, était ainsi intitulé : « Maintenance en service intra-muros de la vidéosurveillance (CCTV caméra), du contrôle d’accès, des passages non gardés, volets intérieurs, tourniquet intérieur, porte sécurisée, serrures et cabinets métalliques de gestion des clés au Luxembourg ».

3        S’agissant de la sélection des candidats, première phase de la procédure d’appel d’offres, le point III.3.2.B, intitulé « Capacité professionnelle de l’équipe par candidat », du cahier des charges exigeait, au titre des « capacités minimales » requises, que le technicien « chef de site » du candidat détienne « un certificat de formation approfondie d’une plate-forme logicielle de la gestion de la sécurité de la société Nedap » (ci-après la « formation Nedap »). À titre de document justificatif, le candidat devait produire un tel certificat « ou une déclaration sur l’honneur que [ce certificat serait] obtenu, en cas d’attribution, au plus tard cinq jours après la signature du contrat ».

4        En ce qui concerne l’attribution du marché, seconde phase de la procédure d’appel d’offres, le cahier des charges prévoyait, au point IV.1, que « le marché [serait] attribué par lot à l’offre représentant le prix le plus bas parmi les offres régulières et conformes ».

5        Initialement, la date limite de réception des demandes de participation avait été fixée au 30 avril 2018. Par un avis rectificatif publié le 28 avril 2018, cette date a été reportée au 16 mai 2018.

6        Le 26 avril 2018, la requérante a déposé une demande de participation pour le lot no 4. Cinq autres candidats ont soumis des demandes de participation pour ce même lot.

7        Par courriels des 13 et 26 juin 2018, la Commission a demandé à la requérante des précisions sur sa candidature. Celle-ci les a apportées par courriels des 19 et 28 juin 2018.

8        Les 6 et 11 juillet 2018, la Commission a, sur la base des documents produits, constaté que tous les candidats, y compris la requérante, satisfaisaient aux critères de sélection et, par conséquent, les a invités à déposer leur offre pour le 6 août 2018 au plus tard.

9        Le 4 août 2018, la requérante a déposé son offre. Deux autres sociétés ont fait de même.

10      Par courriel du 7 septembre 2018, la Commission a informé la requérante que le marché avait été attribué à la société Omnisecurity SA, qui avait soumis l’offre la moins chère, et que le montant de son offre s’était révélé être de 48,55 % plus élevé que celui de l’attributaire. 

11      Par courriel du 11 septembre 2018, la requérante a demandé à la Commission de lui fournir de plus amples informations sur les motifs du rejet de son offre. En particulier, la requérante a demandé, d’une part, si l’attributaire détenait une certification Nedap comme l’exigeait le point III.3.2.B du cahier des charges, en affirmant que seules elle-même et une autre société, qui n’avait pas remis d’offre, détenaient cette certification au Luxembourg et, d’autre part, si l’attributaire avait recours à la sous-traitance et, dans l’affirmative, quel était le nom du sous-traitant.

12      Le 17 septembre 2018, la Commission a répondu à ce courriel en renvoyant à celui du 7 septembre 2018 qui contenait, selon elle, toutes les informations devant être communiquées aux soumissionnaires évincés, conformément à l’article 113 du règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), tel que modifié, en dernier lieu, par le règlement (UE, Euratom) 2015/1929 du Parlement européen et du Conseil, du 28 octobre 2015 (JO 2015, L 286, p. 1) (ci-après, tel que modifié, le « règlement financier »).

13      Dans le courriel du 17 septembre 2018, la Commission a précisé que tous les candidats invités à remettre une offre satisfaisaient aux critères de sélection, dont celui prévu au point III.3.2.B du cahier des charges, et que les informations quant à l’éventuel recours de l’attributaire à la sous-traitance seraient communiquées dans l’avis d’attribution.

14      Le contrat-cadre pour le lot no 4 a été signé avec l’attributaire le 19 septembre 2018. L’avis d’attribution de marché a été publié au Journal officiel le 30 octobre 2018 sous la référence 2018/S 209-476275.

 Procédure et conclusions des parties

15      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 novembre 2018, la requérante a introduit le présent recours.

16      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a invité les parties à déposer certains documents et leur a posé des questions écrites. Celles-ci y ont répondu dans le délai qui leur avait été imparti.

17      La requérante conclut en substance à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions contenues dans les courriels de la Commission des 7 et 17 septembre 2018 ;

–        ordonner « tous autres devoirs de droit requis en la matière » ;

–        condamner la Commission aux dépens.

18      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable en ce qu’il est dirigé contre la prétendue décision du 17 septembre 2018 ;

–        pour le surplus, rejeter le recours dans son intégralité comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’objet du recours

19      La requérante a dirigé son recours en annulation contre les décisions contenues dans deux courriels de la Commission, à savoir, d’une part, le courriel du 7 septembre 2018, par lequel celle-ci l’a informée que son offre n’avait pas été retenue et, d’autre part, le courriel du 17 septembre 2018, par lequel la Commission a répondu à sa demande d’informations.

20      La Commission estime que le recours doit être rejeté comme étant irrecevable dans la mesure où il est dirigé contre la décision contenue dans son courriel du 17 septembre 2018, au motif que, ayant une nature purement confirmative, cette décision ne peut être qualifiée d’« acte » au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE. En effet, dans ce courriel, la Commission se serait bornée à renvoyer aux informations contenues dans celui du 7 septembre 2018, par lequel elle avait fait part à la requérante du rejet de son offre, des motifs de ce rejet ainsi que de l’identité de l’attributaire.

21      La requérante s’en réfère à la sagesse du Tribunal, tout en affirmant que, selon elle, la décision contenue dans le courriel du 17 septembre 2018 constitue bien « un acte » au sens de l’article 263 du TFUE.

22      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence établie, un recours en annulation formé contre un acte purement confirmatif d’une décision antérieure qui n’a pas été contestée et est ainsi devenue définitive est irrecevable. Un acte est considéré comme purement confirmatif d’une décision antérieure s’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à la décision antérieure et n’a pas été précédé d’un réexamen de la situation du destinataire de cette décision (voir, en ce sens, arrêt du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 44 et jurisprudence citée).

23      Avant d’examiner la question de savoir si le courriel du 17 septembre 2018 contient une décision purement confirmative de celle contenue dans le courriel du 7 septembre précédent, il convient de vérifier si cette dernière décision était devenue définitive à l’égard de la requérante au moment de l’introduction du présent recours (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 1998, Waterleiding Maatschappij/Commission, T‑188/95, EU:T:1998:217, point 108).

24      En effet, dans le cas où la décision confirmée n’est pas devenue définitive au moment de l’introduction du recours en annulation, la personne intéressée est en droit d’attaquer soit la décision confirmée, soit la décision confirmative, soit l’une et l’autre de ces décisions (arrêts du 11 mai 1989, Maurissen et Union syndicale/Cour des comptes, 193/87 et 194/87, non publié, EU:C:1989:185, point 26, et du 31 mai 2017, DEI/Commission, C‑228/16 P, EU:C:2017:409, point 35).

25      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 263, dernier alinéa, TFUE, les recours en annulation doivent être introduits dans un délai de deux mois, à compter, suivant le cas, de la publication de l’acte, de sa notification à la partie requérante ou, à défaut, du jour où celle-ci en a eu connaissance. Ce délai doit éventuellement être augmenté d’un délai de distance, conformément à l’article 60 du règlement de procédure.

26      En l’espèce, le recours en annulation a été introduit le 7 novembre 2018, soit à une date à laquelle le délai de recours contre la décision contenue dans le courriel du 7 septembre 2018 était toujours en cours.

27      En application de la jurisprudence rappelée au point 24 ci-dessus, la requérante a donc pu diriger son recours non seulement contre la décision contenue dans le courriel du 7 septembre 2018, mais également contre celle contenue dans le courriel du 17 septembre suivant.

28      En conséquence, le recours est recevable tant en ce qu’il est dirigé contre la décision contenue dans le courriel du 17 septembre 2018 qu’en ce qu’il est dirigé contre celle contenue dans le courriel du 7 septembre précédent (ci-après les « décisions attaquées »).

 Sur le fond

29      Au cours de la procédure, la requérante a invoqué quatre moyens.

30      Dans le premier moyen, elle fait valoir que la Commission a violé l’obligation de motivation.

31      Le deuxième moyen se rapporte au point III.3.2.B du cahier des charges.

32      Dans le troisième moyen, la requérante soutient que les décisions attaquées ont été adoptées en violation des principes de transparence, d’égalité de traitement et de non-discrimination.

33      Dans le quatrième moyen, elle fait valoir, après avoir pu examiner le rapport d’évaluation des offres produit par la Commission dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, que l’offre finalement retenue était, au sens de la réglementation applicable aux marchés publics, anormalement basse, ce qui vicie, selon elle, la validité des décisions attaquées.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation 

34      La requérante estime que les décisions attaquées sont insuffisamment motivées, dès lors que le seul motif invoqué par la Commission pour justifier le rejet de son offre est qu’elle ne proposait pas le prix le plus bas parmi les offres reçues, ce prix étant de 48,55 % plus élevé que celui de l’offre de l’attributaire. La Commission n’aurait pas expliqué à la requérante à quels autres critères elle n’aurait pas satisfait et elle n’aurait pas non plus indiqué les postes de l’offre retenue dont le montant aurait différé de la sienne et qui auraient expliqué un écart de prix de 48,55 %. Cette motivation laconique ne lui aurait pas permis d’assurer valablement sa défense.

35      La requérante souligne en outre que, par courriel du 11 septembre 2018, elle a, conformément à l’article 113, paragraphe 3, premier alinéa, sous a), du règlement financier et à l’article 161, paragraphe 2, du règlement délégué (UE) no 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2012, L 362, p. 1), tel que modifié, en dernier lieu, par le règlement délégué (UE) 2015/2462 de la Commission, du 30 octobre 2015 (JO 2015, L 342, p. 7) (ci-après, tel que modifié, le « règlement délégué »), demandé à connaître les caractéristiques et avantages relatifs de l’offre retenue, mais que le courriel de la Commission du 17 septembre 2018 ne lui a pas apporté ces informations. Dans la réplique, elle fait en particulier valoir que la Commission est restée muette sur la question de savoir si le critère de la formation Nedap était rempli par l’attributaire, alors même qu’elle l’avait interrogée sur ce point dans son courrier du 11 septembre 2018.

36      L’argumentation de la requérante est contestée par la Commission.

37      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’administration a l’obligation de motiver ses décisions. Cette obligation de motivation implique, selon une jurisprudence bien établie, que, conformément à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, l’auteur d’un acte doit faire apparaître d’une façon claire et non équivoque le raisonnement qui sous-tend ledit acte, de manière, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de faire valoir leurs droits et, d’autre part, à permettre au juge d’exercer son contrôle (arrêts du 25 février 2003, Strabag Benelux/Conseil, T‑183/00, EU:T:2003:36, point 55 ; du 24 avril 2013, Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑32/08, non publié, EU:T:2013:213, point 37, et du 16 mai 2019, Transtec/Commission, T‑228/18, EU:T:2019:336, point 91).

38      En outre, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires de l’acte ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par celui-ci peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 150, et du 11 juillet 2013, Ziegler/Commission, C‑439/11 P, EU:C:2013:513, point 116).

39      En ce qui concerne les marchés publics conclus par les institutions de l’Union européenne, d’une part, l’article 113, paragraphe 2, du règlement financier dispose que le pouvoir adjudicateur communique à tout soumissionnaire écarté les motifs du rejet de son offre. D’autre part, en vertu de l’article 113, paragraphe 3, premier alinéa, sous a), du même règlement, le pouvoir adjudicateur communique à tout soumissionnaire qui ne répond à aucun critère d’exclusion et satisfait aux critères de sélection, et qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire et le prix payé ou la valeur du marché, selon ce qu’il convient. Sur ce dernier point, l’article 161, paragraphe 2, du règlement délégué précise que « le pouvoir adjudicateur communique les informations prévues à l’article 113, paragraphe 3, du règlement financier le plus tôt possible, et dans tous les cas dans un délai de quinze jours à compter de la réception d’une demande écrite ».

40      L’article 113, paragraphes 2 et 3, du règlement financier et l’article 161, paragraphe 2, du règlement délégué prévoient donc à l’égard des soumissionnaires évincés une motivation en deux temps. Dans un premier temps, le pouvoir adjudicateur informe les soumissionnaires évincés que leur offre a été rejetée et leur communique les motifs de ce rejet. Dans un second temps, en vertu de ces mêmes dispositions, si un soumissionnaire évincé qui ne répond à aucun critère d’exclusion et satisfait aux critères de sélection en fait la demande par écrit, le pouvoir adjudicateur communique, le plus tôt possible et dans tous les cas dans un délai de quinze jours à compter de la réception de cette demande, les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue ainsi que le nom de l’attributaire et le prix ou la valeur du marché (voir, en ce sens, arrêt du 26 avril 2018, European Dynamics Luxembourg et Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑752/15, non publié, EU:T:2018:233, point 27 et jurisprudence citée).

41      En l’espèce, il convient de constater que la première de ces étapes a été respectée par la Commission puisque, dans son courriel du 7 septembre 2018, celle-ci a écrit à la requérante : « Nous sommes au regret de vous informer que votre offre n’a pas été retenue, car il est ressorti de l’évaluation que celle-ci ne proposait pas le prix le plus bas parmi les offres reçues. »

42      Concernant les motifs du rejet de l’offre, cette information est suffisante compte tenu de ce que, comme il résulte du point IV.1 du cahier des charges, le seul critère d’attribution était le prix. La motivation du rejet de l’offre de la requérante ne devait dès lors se rapporter qu’à ce seul critère.

43      Quant aux informations devant être communiquées lors de la seconde étape, à savoir les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue, le nom de l’attributaire et le prix ou la valeur du marché, il apparaît qu’elles ont été transmises, en même temps que celles relevant de la première étape, dans le même courriel du 7 septembre 2018. Ce courriel énonce en effet également ce qui suit :

« À l’issue de l’évaluation des offres effectuée conformément au point IV.1 du cahier des charges et [au] point II.2.5 de l’avis de marché, la société Omnisecurity SA ayant soumis l’offre présentant le prix le plus bas et entièrement conforme aux exigences du cahier des charges a été désignée comme attributaire. En effet, le prix de votre offre s’est avéré de 48,55 % plus cher que celui de l’attributaire. »

44      Comme l’exige l’article 113, paragraphe 3, premier alinéa, sous a), du règlement financier, cette information comprend le nom de l’attributaire, à savoir la société Omnisecurity SA.

45      S’agissant du prix du marché, il convient de constater que la Commission ne l’a pas indiqué de manière explicite dans le courriel du 7 septembre 2018, ni d’ailleurs dans celui du 17 septembre suivant, mais que la requérante, connaissant le montant de son offre, pouvait aisément le déduire de la différence de prix indiquée dans le premier de ces courriels.

46      Quant aux caractéristiques et aux avantages relatifs à l’offre retenue, il importe de rappeler que, compte tenu de ce que, comme il a déjà été rappelé au point 42 ci-dessus, le seul critère d’attribution était le prix, l’avantage de l’offre retenue ne pouvait consister qu’en une différence de prix. Ainsi qu’il apparaît au point 43 ci-dessus, cette différence, de 48,55 %, a été mentionnée dans le courriel du 7 septembre 2018.

47      Dès lors qu’il contenait tous les éléments requis par l’article 113, paragraphes 2 et 3, du règlement financier, l’information fournie par le courriel du 7 septembre 2018 était suffisante au regard de l’obligation de motivation.

48      Cette conclusion ne saurait être mise en cause par les arguments suivants de la requérante.

49      En premier lieu, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir indiqué dans les courriels des 7 et 17 septembre 2018 les postes de l’offre retenue dont le montant différait de la sienne et qui expliquaient un écart de prix de 48,55 %.

50      À cet égard, il importe, tout d’abord, de relever que la requérante n’a pas formulé une telle demande dans son courriel du 11 septembre 2018. Pour cette première raison, il ne peut être reproché au pouvoir adjudicateur de ne pas y avoir répondu, dès lors que les seules informations à fournir par le pouvoir adjudicateur aux soumissionnaires évincé sont celles qui sont énumérées à l’article 113, paragraphes 2 et 3, du règlement financier.

51      Ensuite, selon une jurisprudence constante, il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle transmette à un soumissionnaire dont l’offre n’a pas été retenue une analyse comparative minutieuse de son offre et de l’offre retenue (voir arrêt du 4 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑629/11 P, non publié, EU:C:2012:617, point 21 et jurisprudence citée). De même, le pouvoir adjudicateur n’est pas tenu de fournir à un soumissionnaire évincé, sur demande écrite de ce dernier, une copie complète du rapport d’évaluation (voir arrêt du 4 octobre 2012, Evropaïki Dynamiki/Commission, C‑629/11 P, non publié, EU:C:2012:617, point 22 et jurisprudence citée).

52      Enfin, la révélation des prix unitaires de l’attributaire est de nature à nuire aux intérêts commerciaux de ce dernier ainsi qu’à une concurrence loyale entre les opérateurs (voir, en ce sens, arrêt du 9 avril 2014, CITEB et Belgo-Metal/Parlement, T‑488/12, non publié, EU:T:2014:195, point 46). Or, l’article 113, paragraphe 3, dernier alinéa, du règlement financier permet au pouvoir adjudicateur de ne pas communiquer certaines informations susceptibles de porter atteinte à de tels intérêts.

53      Dès lors, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir communiqué, dans les courriels des 7 et 17 septembre 2018, les postes de l’offre retenue dont le montant expliquait un écart de prix de 48,55 % avec l’offre de la requérante.

54      En deuxième lieu, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir, dans le courriel du 17 septembre 2018, répondu à ses demandes concernant, d’une part, « les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue » et, d’autre part, la question de savoir si le critère de la formation Nedap était rempli par l’attributaire.

55      S’agissant du grief relatif aux « caractéristiques et avantages relatifs de l’offre retenue », il importe de relever que, contrairement à ce qu’elle affirme, la requérante n’a pas formulé cette demande dans le courriel du 11 septembre 2018. De plus, il résulte du point 46 ci-dessus que, dès lors que, dans son courriel du 7 septembre 2018, la Commission a indiqué que « le prix de l’offre de la requérante s’est révélé 48,55 % plus cher que celui de l’attributaire », elle a fourni des informations suffisantes sur ce point.

56      Il ne saurait dès lors être considéré que la Commission a violé l’obligation de motivation pour le motif que, dans son courriel du 17 septembre 2018, elle n’a pas répondu à la demande de la requérante concernant les caractéristiques et avantages de l’offre retenue.

57      Quant au grief relatif à l’absence de réponse de la Commission sur la question concernant la formation Nedap de l’attributaire qui, pour sa part, figurait effectivement dans le courriel du 11 septembre 2018, il y a lieu de constater qu’il n’est pas fondé.

58      En effet, contrairement à ce qu’affirme la requérante, la Commission a indiqué, dans son courriel du 17 septembre 2018, que le comité d’évaluation avait dûment examiné si les candidats remplissaient les critères de sélection, y compris celui prévu au point III.3.2.B du cahier des charges. Il est donc inexact d’affirmer purement et simplement que la Commission n’a pas répondu à la demande de la requérante concernant la formation Nedap de l’attributaire.

59      Il ne saurait dès lors être considéré que la Commission a violé l’obligation de motivation pour la raison qu’elle n’a pas répondu, dans le courriel du 17 septembre 2018, à la question de savoir si le critère de la formation Nedap était rempli par l’attributaire.

60      En conséquence, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, relatif au point III.3.2.B du cahier des charges

61      Dans le deuxième moyen, la requérante met en cause la légalité des décisions attaquées pour des motifs relatifs au point III.3.2.B du cahier des charges.

62      Le moyen est divisé en trois branches.

–       Sur la première branche, concernant la régularité de la déclaration fournie par l’attributaire

63      Dans la première branche du deuxième moyen, la requérante soutient que le document produit par l’attributaire pour établir qu’il remplissait la condition prévue par le point III.3.2.B du cahier des charges n’est pas conforme à cette disposition.

64      À cet égard, il importe de relever que, comme il a été indiqué au point 3 ci-dessus, le point III.3.2.B du cahier des charges exigeait, pour le lot no 4, au titre des « capacités minimales » requises, que le technicien « chef de site » dispose « d’un certificat de formation approfondie d’une plate-forme logicielle de la gestion de la sécurité de la société Nedap ».

65      Afin de prouver qu’ils remplissaient la condition relative à la formation Nedap, les candidats devaient, selon la même disposition, fournir soit un « certificat de formation sur la plate-forme logicielle de la gestion de la sécurité de la société Nedap », soit « une déclaration sur l’honneur que celui-là [serait] obtenu, en cas d’attribution, au plus tard cinq jours après signature du contrat ».

66      Dans le mémoire en défense, la Commission a indiqué que l’attributaire avait choisi la seconde possibilité offerte par le point III.3.2.B du cahier des charges et qu’il avait ainsi fourni la déclaration sur l’honneur qui y est mentionnée.

67      Interrogée par le Tribunal sur ce point dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, la Commission a produit le document qu’elle considérait comme constituant cette déclaration. Ce document indique pour le technicien « chef de site » qui serait chargé de la mise en œuvre du marché :

« Certificat Nedap : non, cette application n’est pas déployée au Luxembourg actuellement. S’il s’avère nécessaire pour le futur, nous attestons ici que cette certification sera réalisée auprès de la société Nedap en temps utile. »

68      À l’audience, la requérante a soutenu, pour la première fois, que cette attestation n’était pas conforme aux exigences du cahier des charges. Tout d’abord, le document fourni par l’attributaire ne comporterait pas de « déclaration sur l’honneur ». Ensuite, le document ne comporterait aucun engagement de fournir le certificat dans les cinq jours suivant la signature du contrat, mais contiendrait seulement l’idée, exprimée d’une manière très vague, que la certification serait réalisée « s’il s’av[érait] nécessaire pour le futur » et « en temps utile ».

69      Ces arguments sont contestés par la Commission qui estime que, comme « cela aurait été un peu un formalisme d’exiger une rédaction précise », elle pouvait légitimement considérer, comme elle l’a fait dans la décision du 7 septembre 2018, sans demander de clarification à l’attributaire, que l’offre remise par celui-ci était « entièrement conforme aux exigences du cahier des charges ». Du reste, la Commission fait valoir que le grief ainsi soulevé par la requérante ne saurait être pris en compte dès lors que, ayant été invoqué à l’audience, il a été produit de manière tardive.

70      À cet égard, il convient de rappeler que, selon l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure.

71      L’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure prévoit en outre que, lorsque les éléments de droit et de fait qui justifient la production des moyens nouveaux sont connus après le deuxième échange de mémoires, la partie principale concernée produit les moyens nouveaux dès qu’elle a connaissance de ces éléments. En outre, cette disposition n’exclut aucunement que lesdits éléments aient pu être découverts, comme en l’espèce, à l’occasion d’une mesure d’organisation de la procédure (voir, en ce sens, arrêts du 15 octobre 2002, Limburgse Vinyl Maatschappij e.a./Commission, C‑238/99 P, C‑244/99 P, C‑245/99 P, C‑247/99 P, C‑250/99 P à C‑252/99 P et C‑254/99 P, EU:C:2002:582, point 370, et du 13 décembre 2016, European Dynamics Luxembourg et Evropaïki Dynamiki/Commission, T‑764/14, non publié, EU:T:2016:723, point 48).

72      En l’espèce, il convient de constater que le document contenant la prétendue déclaration sur l’honneur a été produit par la Commission le 9 août 2019, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure adoptée par le Tribunal après l’échange des mémoires.

73      À la suite de la production de ce document, le 24 septembre 2019, le Tribunal a invité la requérante à présenter ses observations « sur les documents et réponses » ainsi communiqués par la Commission.

74      Dans ses observations, comme elle l’a elle-même reconnu à l’audience, la requérante n’a cependant formulé aucun argument sur la forme ou le contenu de la déclaration figurant dans ce document.

75      Il s’ensuit que, contrairement à ce que prévoit l’article 84, paragraphe 2, du règlement de procédure, la requérante n’a pas formulé le grief concerné dès qu’elle a eu connaissance dudit document.

76      Pour cette raison, il y a lieu d’écarter le grief comme étant irrecevable.

77      La première branche du deuxième moyen doit donc être rejetée.

–       Sur la deuxième branche, concernant la certification fournie par l’attributaire

78      Dans la deuxième branche du deuxième moyen, la requérante soutient que la certification produite par l’attributaire postérieurement à la signature du contrat n’était pas conforme aux exigences prévues par le point III.3.2.B du cahier des charges. D’une part, le certificat n’aurait pas été produit dans les cinq jours suivant la signature du contrat. D’autre part, ledit certificat n’émanerait pas de la société Nedap, mais d’une autre société, non habilitée à délivrer de tels certificats, ainsi qu’il résulterait d’une correspondance échangée à ce sujet entre la requérante et des représentants de la société Nedap.

79      L’argumentation est contestée par la Commission.

80      À cet égard, il convient de rappeler que les marchés publics se déroulent en plusieurs étapes.

81      Premièrement, un cahier des charges est rédigé, qui précise, notamment, les prestations qui sont attendues de l’attributaire, les critères de sélection auxquels les candidats ou les soumissionnaires doivent satisfaire pour être admis à déposer une offre et les critères d’attribution en fonction desquels les offres seront évaluées.

82      Deuxièmement, les candidats qui ont remis une demande de participation sont sélectionnés sur la base des critères de sélection mentionnés dans le cahier des charges. Les candidats sélectionnés sont autorisés à remettre une offre.

83      Troisièmement, les offres reçues par le pouvoir adjudicateur sont appréciées au regard des critères d’attribution prévus par le cahier des charges et l’une d’entre elles est retenue pour l’attribution, puis le contrat est signé.

84      Enfin, le contrat signé est exécuté par l’attributaire.

85      Ainsi qu’il apparaît de la succession de ces différentes étapes, la question de savoir si un document produit par un attributaire après l’attribution du marché est conforme aux conditions du cahier des charges, à supposer que ces conditions soient valides, ne concerne pas la troisième étape, qui a trait à l’attribution du marché, laquelle est en cause dans le présent recours, mais la dernière, qui est relative à l’exécution des prestations faisant l’objet du marché et ne concerne donc pas les décisions attaquées.

86      Pour cette raison, il n’y a pas lieu d’examiner, dans le cadre du présent recours, si la certification produite par l’attributaire postérieurement à la signature du contrat était conforme aux exigences prévues par le point III.3.2.B du cahier des charges.

87      La deuxième branche du deuxième moyen doit donc être rejetée.

–       Sur la troisième branche, concernant l’illégalité du point III.3.2.B du cahier des charges

88      Dans la troisième branche du deuxième moyen, la requérante soulève une exception d’illégalité à l’encontre de la clause contenue dans le point III.3.2.B du cahier des charges, qui permet aux candidats de fournir, au stade de la sélection, une déclaration attestant que, si leur offre est retenue, ils produiront un certificat de formation Nedap dans les cinq jours suivant la signature du contrat.

89      Dans la réplique, la requérante a ainsi fait valoir que la possibilité offerte par le cahier des charges de fournir un certificat de formation Nedap postérieurement à la signature du contrat est « illogique, peu compréhensible, voire risquée, car de nature à laisser place à une insécurité du point de vue juridique et technique, laissant la porte ouverte aux pires aléas pour le cas où un attributaire ne respect[er]ait pas cette condition après avoir été retenu ».

90      À l’audience, la requérante a soutenu, en outre, que ladite clause était irréaliste, illicite et inéquitable en ce qu’elle permettait au pouvoir adjudicateur d’attribuer le marché à un soumissionnaire dont il ne pouvait être certain qu’il fournirait le certificat demandé et donc qu’il aurait la capacité d’exécuter le marché alors que d’autres soumissionnaires qui disposaient dudit certificat en étaient écartés.

91      La Commission estime que l’argument n’est pas fondé et que, en toute hypothèse, il est irrecevable, parce qu’il a été invoqué pour la première fois dans la réplique et énoncé d’une manière trop imprécise.

92      S’agissant de la recevabilité, il convient de rappeler que, selon l’article 84, paragraphe 1, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux est interdite en cours d’instance à moins qu’ils ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés en cours de procédure.

93      En l’espèce, il y a lieu de constater que c’est dans le mémoire en défense que la Commission a révélé, en réponse au deuxième moyen, que l’attributaire avait produit une déclaration sur l’honneur.

94      Avant cette déclaration, la requérante ne pouvait dès lors pas connaître le moyen exact par lequel l’attributaire avait justifié qu’il remplissait le critère relatif à la formation Nedap : un certificat délivré à l’attributaire lui-même, un certificat délivré à un sous-traitant, une déclaration sur l’honneur de l’attributaire ou une déclaration sur l’honneur d’un sous-traitant.

95      Dans ces conditions, il ne saurait être reproché à la requérante d’avoir invoqué pour la première fois dans la réplique le grief relatif à l’illicéité du point III.3.2.B, en ce qu’il permettait aux candidats de produire, au stade de la sélection, une déclaration sur l’honneur selon laquelle ils s’engageaient, en cas d’attribution, à obtenir un certificat de formation Nedap dans les cinq jours suivant la conclusion du contrat. Ce n’est en effet qu’à partir du moment où elle a connu le moyen effectivement utilisé par l’attributaire pour prouver qu’il remplissait ladite condition de sélection exigée que la requérante a pu développer son argumentation de manière précise et ciblée. La connaissance du recours effectif par l’attributaire à la modalité de la production d’une attestation sur l’honneur était nécessaire pour permettre à la requérante d’exciper utilement de l’illégalité de la disposition en cause du cahier des charges.

96      En ce qui concerne le second argument relatif à l’irrecevabilité, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’indication des moyens et de leur contenu, exigée par l’article 76, sous d), du règlement de procédure, doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, point 95 et jurisprudence citée).

97      Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il convient, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, point 95 et jurisprudence citée).

98      Cette règle énoncée à propos des moyens invoqués dans la requête concerne aussi les moyens nouveaux invoqués dans la réplique, lorsqu’ils résultent d’éléments de fait ou de droit qui se sont révélés pendant la procédure.

99      En l’espèce, il convient de constater que l’expression de l’argument en cause telle qu’elle ressort de la réplique est suffisamment précise pour permettre à la Commission et au Tribunal de comprendre que la possibilité donnée au candidat de prouver qu’il remplit la condition de formation prévue au point III.3.2.B du cahier des charges par la production d’une déclaration sur l’honneur est mise en cause dans la mesure où elle ne permet pas de s’assurer que l’attributaire remplit le critère de sélection avant la conclusion du contrat, avec le risque que le marché soit attribué à un soumissionnaire qui n’a pas la capacité technique de l’exécuter.

100    Pour ces raisons, il y a lieu de considérer que la troisième branche du présent moyen est recevable.

101    Sur le fond, la Commission soutient que la clause décrite au point III.3.2.B du cahier des charges doit être considérée comme étant valide en ce qu’elle permet aux candidats de déclarer sur l’honneur qu’ils s’engagent à obtenir la certification relative à la formation Nedap, si le marché leur est attribué, dans les cinq jours suivant la signature du contrat.

102    À cet égard, il convient de rappeler que les fonds provenant du budget de l’Union doivent être utilisés d’une manière permettant d’assurer que les ressources confiées aux institutions soient employées de la manière la plus optimale.

103    L’article 102, paragraphe 1, du règlement financier prévoit que les marchés publics financés totalement ou partiellement par le budget de l’Union respectent les principes de transparence, de proportionnalité, d’égalité de traitement et de non-discrimination.

104    Par cette disposition, le législateur de l’Union a entendu créer, pour les marchés publics, un cadre dans lequel les offres soumises par des entreprises dûment sélectionnées sont comparées afin de choisir celle qui est la mieux placée pour exécuter le marché.

105    De ces impératifs découle l’obligation, pour le pouvoir adjudicateur, de vérifier, au plus tard au moment de l’attribution, si le soumissionnaire qui a remis la meilleure offre satisfait, de manière effective, aux conditions qui sont exigées dans le cahier des charges.

106    Cette obligation n’est pas respectée lorsque, comme en l’espèce, le cahier des charges permet l’attribution du marché sur la base d’une déclaration fournie par un soumissionnaire et contenant l’engagement de satisfaire, après la signature du contrat, à une condition de capacité technique et professionnelle présentée comme étant « minimale » pour l’exécution du contrat.

107    En précisant que l’exigence ainsi présentée revêtait un caractère « minimal », le pouvoir adjudicateur a indiqué dans le cahier des charges que la détention du certificat concerné et, partant, la formation à suivre pour obtenir ce certificat constituaient une condition indispensable pour que le soumissionnaire soit en mesure d’exécuter, d’une manière satisfaisante, le marché concerné.

108    À cet égard, il convient de considérer, à la suite de ce que souligne la requérante, qu’une clause prévoyant la possibilité d’obtenir après la signature du contrat une formation professionnelle présentée comme étant « minimale » dans le cahier des charges ne peut être jugée conforme à l’égalité de traitement, car elle peut conduire à l’attribution du marché à un soumissionnaire ne remplissant pas cette exigence alors que d’autres participants, qui disposent de cette formation au moment de l’attribution, ne sont pas retenus.

109    Par ailleurs, le fait de vérifier, à un stade postérieur à l’attribution du marché, que l’attributaire possède effectivement les compétences professionnelles requises pour exécuter le contrat impliquerait, au mépris de la sécurité juridique, que, si l’attributaire se révélait incapable de fournir le certificat concerné, le contrat soit résilié, une nouvelle procédure devant alors être organisée pour assurer la réalisation du projet faisant l’objet par le marché en cause.

110    À cet égard, il convient de relever que, au cours des débats, des doutes ont été émis, d’une part, sur la conformité aux conditions fixées par le cahier des charges du document soumis par l’attributaire à la Commission après la signature du contrat et, d’autre part, sur le respect du délai de cinq jours prévu par ce même cahier des charges, l’attributaire ayant mis quinze jours pour entamer les démarches nécessaires et deux mois pour fournir le certificat demandé.

111    En tout état de cause, il y a lieu de souligner que l’obligation de vérifier au stade de l’attribution si le soumissionnaire retenu remplit les conditions de capacité exigées par le cahier des charges est prévue dans la réglementation elle-même.

112    En effet, l’article 110, paragraphe 1, du règlement financier dispose que les marchés sont attribués pour autant que le pouvoir adjudicateur ait vérifié, notamment, que le candidat ou le soumissionnaire répond aux critères de sélection indiqués dans les documents du marché.

113    De cette disposition, il résulte qu’aucun marché ne peut faire l’objet d’une attribution sans qu’il ait été dûment vérifié et établi que le soumissionnaire répondait aux conditions de capacité prévues par le cahier des charges.

114    En conséquence, il y a lieu de considérer que, en ce qu’elle permet que la vérification de la condition de formation Nedap soit effectuée après l’attribution du marché, la clause contenue au point III.3.2.B du cahier des charges est entachée d’illégalité.

115    À l’encontre de cette position, la Commission formule plusieurs arguments.

116    En premier lieu, elle soutient que, comme indiqué au point 3 ci-dessus, le cahier des charges autorisait, pour justifier l’existence de la formation visée par la clause, la production du certificat de formation lui-même ou celle d’une déclaration sur l’honneur que ce document serait obtenu dans les cinq jours suivant la signature du contrat. Ainsi, la possibilité de fournir une déclaration était prévue, selon la Commission, dans le cahier des charges, comme critère de sélection. Au terme de la procédure, elle aurait vérifié si l’offre retenue était conforme aux exigences contenues dans ledit cahier. La possibilité de fournir ladite déclaration s’y trouvant prévue, elle aurait considéré que le marché pouvait être attribué au soumissionnaire finalement retenu.

117    À cet égard, il convient de relever que, dans son exception d’illégalité, la requérante ne met pas en cause la compatibilité de la décision d’attribution avec le cahier des charges, mais, au sein de ce dernier, la légalité d’une clause prévoyant qu’un marché peut être attribué sur la foi d’une déclaration fournie par un soumissionnaire et contenant un engagement, c’est-à-dire une promesse de fournir, après la signature du contrat, un certificat attestant qu’il a suivi une formation visant à acquérir une compétence jugée « minimale » pour l’exécution du contrat.

118    Un tel engagement, d’une part, ne présente pas la fiabilité requise pour permettre l’attribution d’un marché dans des conditions assurant la sécurité juridique requise pour un bon usage des fonds de l’Union et, d’autre part, n’assure pas un traitement égal des participants, l’engagement de fournir un certificat attestant d’une formation ne pouvant être tenu pour équivalent, dans le cadre d’une comparaison objective, à la compétence découlant de cette formation.

119    En deuxième lieu, la Commission soutient que la clause attaquée visait à ouvrir le marché à des candidats qui, au moment de déposer leur demande de participation, n’étaient pas encore en possession du certificat de formation Nedap. Par ailleurs, cette formation ayant un coût, il convenait de ne pas contraindre à cette dépense des candidats dont l’offre ne serait peut-être pas retenue.

120    À cet égard, il convient de souligner que le souci d’épargner des frais aux candidats ne peut justifier une dérogation à l’égalité de traitement et à la sécurité juridique : le marché doit être attribué à l’entreprise dont l’offre est économiquement la plus avantageuse et qui a justifié sa capacité technique à l’exécuter. Lorsqu’il souhaite élargir le nombre de participants à un marché public, un pouvoir adjudicateur dispose de mécanismes qui sont admissibles au regard des règles et des principes applicables. En particulier, il peut prévoir des conditions de capacité technique et professionnelle plus larges, qui sont susceptibles d’être remplies par un plus grand nombre d’entreprises.

121    En troisième lieu, la Commission a soutenu à l’audience que, dans l’arrêt du 25 novembre 2014, Alfastar Benelux/Conseil (T‑394/12, non publié, EU:T:2014:992), le Tribunal avait admis la vérification d’un critère de sélection postérieurement à l’attribution du marché.

122    À cet égard, il convient de relever que l’arrêt cité par la Commission concernait, comme l’indique celle-ci, un marché où il était notamment requis du soumissionnaire qu’il dispose d’une habilitation de sécurité, laquelle habilitation pouvait être remplacée par une déclaration d’intention de prendre les mesures nécessaires pour en disposer (arrêt du 25 novembre 2014, Alfastar Benelux/Conseil T‑394/12, non publié, EU:T:2014:992, point 165).

123    Dans cette affaire, la requérante reprochait au Conseil d’avoir indiqué que, au stade de la sélection, les entreprises pouvaient se limiter à présenter une déclaration d’intention sans être tenues de démontrer qu’elles disposaient déjà, à ce stade de la procédure, pour l’ensemble du personnel concerné, de l’habilitation proprement dite (arrêt du 25 novembre 2014, Alfastar Benelux/Conseil, T‑394/12, non publié, EU:T:2014:992, point 202).

124    Dans ce cadre, le Tribunal a examiné si, au stade de la sélection, l’acceptation d’une déclaration d’intention était légitime au regard du large pouvoir d’appréciation qui est reconnu par la jurisprudence au pouvoir adjudicateur pour la détermination et l’évaluation des critères qui doivent être remplis par les entreprises à cette étape de la procédure.

125    Dans la présente affaire, la question est différente, puisqu’il ne s’agit pas de déterminer si une déclaration sur l’honneur pouvait être acceptée au stade de la sélection, mais bien de déterminer si le marché pouvait être attribué et si, ultérieurement, le contrat pouvait être signé, sur la seule foi d’une déclaration sur l’honneur, sans vérification de l’existence effective, en ce qui concerne le soumissionnaire dont l’offre était retenue, de la capacité technique exigée par le cahier des charges au titre des critères de sélection.

126    Sur ce point, le Tribunal n’a pas adopté, dans l’arrêt du 25 novembre 2014, Alfastar Benelux/Conseil (T‑394/12, non publié, EU:T:2014:992), cité par la Commission, une position différente de celle adoptée dans la présente affaire, puisqu’il a relevé que le Conseil avait « constaté », au stade de l’attribution, que la requérante « était déjà en possession des habilitations requises » (voir point 167 de l’arrêt), ce qui implique qu’une vérification ait été effectuée, à ce stade, sur la question de savoir si l’entreprise retenue disposait effectivement des capacités requises par le cahier des charges pour exécuter le contrat.

127    En quatrième lieu, la Commission a exposé que, au moment où a été rédigé le cahier des charges, les produits requérant la formation Nedap n’étaient pas encore installés dans le bâtiment concerné par le marché de sorte que cette formation n’aurait pas été nécessaire au début de l’exécution du contrat. Bien plus, il n’aurait pas été certain que les produits requérant la formation Nedap seraient installés au cours dudit contrat, de sorte que la formation relative à ses produits n’aurait peut-être pas été nécessaire.

128    À cet égard, il suffit de rappeler que les marchés publics doivent être attribués dans le respect des conditions et des exigences qui sont mentionnées au cahier des charges.

129    Or, le cahier des charges dont il est ici question exigeait, comme cela est indiqué au point 3 ci-dessus, au titre des « capacités minimales » requises, que le technicien « chef de site » du soumissionnaire détienne un certificat de formation approfondie Nedap.

130    Dès lors, comme il a été indiqué au point 114 ci-dessus, il convenait de vérifier, en application des dispositions mentionnées aux points 103 et 112 ci-dessus, si cette exigence technique était bien remplie par le soumissionnaire retenu avant que le marché soit attribué et le contrat signé.

131    Pour ces raisons, les arguments soulevés par la Commission doivent être écartés.

132    En conséquence, il y a lieu d’accueillir la troisième branche du deuxième moyen et d’annuler les décisions attaquées, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens soulevés par elle.

133    Dans son deuxième chef de conclusions, la requérante demande que le Tribunal ordonne « tous autres devoirs de droit requis en la matière ».

134    Cette demande ne présente cependant pas une précision suffisante en méconnaissance de l’article 76, sous d) et e), du règlement de procédure. De surcroît, à supposer que cette dernière demande doive être interprétée comme une demande d’injonction à l’intention du Parlement, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre d’un recours fondé sur l’article 173 du traité, le Tribunal n’est pas compétent pour adresser des injonctions aux institutions (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 1996, Bernardi/Parlement, T‑146/95, EU:T:1996:105, point 27).

 Sur les dépens

135    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

136    La Commission ayant succombé pour l’essentiel, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la Commission européenne du 7 septembre 2018 de rejeter l’offre soumise par Securitec pour le lot no 4 du marché ayant fait l’objet de la procédure d’appel d’offres restreint HR/R1/PR/2017/059 et relatif à la « maintenance des installations de sécurité dans les bâtiments occupés et/ou gérés par la Commission européenne en Belgique et au Luxembourg » ainsi que la décision de la Commission du 17 septembre 2018 de refuser de fournir à Securitec les précisions qu’elle avait demandées dans le cadre de la même procédure le 11 septembre 2018 sont annulées.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La Commission est condamnée aux dépens.

Gervasoni

Nihoul

Martín y Pérez de Nanclares

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

S. Papasavvas


*      Langue de procédure : le français.