Language of document : ECLI:EU:C:2020:23

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

22 janvier 2020 (*)

« Pourvoi – Accès aux documents des institutions, des organes ou organismes de l’Union – Règlement (CE) no 1049/2001 – Article 4, paragraphe 2, premier tiret – Exception relative à la protection des intérêts commerciaux – Article 4, paragraphe 3 – Protection du processus décisionnel – Documents soumis à l’Agence européenne des médicaments dans le cadre d’une demande d’autorisation de mise sur le marché d’un médicament à usage humain – Décision d’accorder l’accès aux documents à un tiers – Présomption générale de confidentialité – Absence d’obligation pour une institution, un organe ou un organisme de l’Union européenne d’appliquer une présomption générale de confidentialité »

Dans l’affaire C‑175/18 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 6 mars 2018,

PTC Therapeutics International Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée par MM. G. Castle, B. Kelly, Mme K. Ewert, solicitors, ainsi que par Mme C. Thomas, barrister, et Mme M. Demetriou, QC,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant :

Agence européenne des médicaments (EMA), représentée initialement par MM. T. Jabłoński, S. Marino, S. Drosos, A. Spina et A. Rusanov, puis par MM. T. Jabłoński, S. Marino et S. Drosos, en qualité d’agents,

partie défenderesse en première instance,

European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs (Eucope), établie à Bruxelles (Belgique), représentée par Mme S. Cowlishaw, solicitor, et M. D. Scannell, barrister,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras (rapporteur), président de chambre, M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de juge de la quatrième chambre, MM. S. Rodin, D. Šváby et N. Piçarra, juges,

avocat général : M. G. Hogan,

greffier : M. M. Longar, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 mai 2019,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 septembre 2019,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi, PTC Therapeutics International Ltd demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 5 février 2018, PTC Therapeutics International/EMA (T‑718/15, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:66), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision EMA/722323/2015 de l’Agence européenne des médicaments (EMA), du 25 novembre 2015, accordant à un tiers, en vertu du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43), l’accès à un document contenant des données soumises dans le cadre d’une demande d’autorisation de mise sur le marché du médicament Translarna (ci-après la « décision litigieuse »).

 Le cadre juridique

 Le droit international

2        L’article 39, paragraphe 3, de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce figurant à l’annexe 1 C de l’accord de Marrakech instituant l’Organisation mondiale du commerce et approuvé au nom de la Communauté européenne par la décision 94/800/CE du Conseil, du 22 décembre 1994, relative à la conclusion au nom de la Communauté européenne, pour ce qui concerne les matières relevant de ses compétences, des accords des négociations multilatérales du cycle de l’Uruguay (1986-1994) (JO 1994, L 336, p. 1) (ci-après l’« accord ADPIC »), prévoit :

« Lorsqu’ils subordonnent l’approbation de la commercialisation de produits pharmaceutiques ou de produits chimiques pour l’agriculture qui comportent des entités chimiques nouvelles à la communication de données non divulguées résultant d’essais ou d’autres données non divulguées, dont l’établissement demande un effort considérable, les membres protégeront ces données contre l’exploitation déloyale dans le commerce. En outre, les membres protégeront ces données contre la divulgation, sauf si cela est nécessaire pour protéger le public, ou à moins que des mesures ne soient prises pour s’assurer que les données sont protégées contre l’exploitation déloyale dans le commerce. »

 Le droit de l’Union

3        L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) no 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins (JO 2000, L 18, p. 1), prévoit :

« Lorsqu’une autorisation de mise sur le marché est accordée pour un médicament orphelin en application du règlement (CEE) no 2309/93 ou lorsque tous les États membres ont accordé une autorisation de mise sur le marché pour ce médicament, conformément aux procédures de reconnaissance mutuelle prévues aux articles 7 et 7 bis de la directive 65/65/CEE ou à l’article 9, paragraphe 4, de la directive 75/319/CEE du Conseil du 20 mai 1975 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives aux médicaments, et sans préjudice des dispositions du droit de la propriété intellectuelle ou de toute autre disposition de droit [de l’Union], [l’Union européenne] et les États membres s’abstiennent, pendant dix ans, eu égard à la même indication thérapeutique, d’accepter une autre demande d’autorisation de mise sur le marché, d’accorder une autorisation de mise sur le marché ou de faire droit à une demande d’extension d’une autorisation de mise sur le marché existante pour un médicament similaire. »

4        Aux termes de l’article 1er, sous a), du règlement no 1049/2001 :

« Le présent règlement vise à :

a)      définir les principes, les conditions et les limites, fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé, du droit d’accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (ci-après dénommés “institutions”) prévu à l’article 255 [CE] de manière à garantir un accès aussi large que possible aux documents ».

5        L’article 4 de ce règlement, intitulé « Exceptions », dispose, à son paragraphe 2 et à son paragraphe 3, premier alinéa :

« 2.      Les institutions refusent l’accès à un document dans le cas où sa divulgation porterait atteinte à la protection :

–        des intérêts commerciaux d’une personne physique ou morale déterminée, y compris en ce qui concerne la propriété intellectuelle,

[...]

3.      L’accès à un document établi par une institution pour son usage interne ou reçu par une institution et qui a trait à une question sur laquelle celle-ci n’a pas encore pris de décision est refusé dans le cas où sa divulgation porterait gravement atteinte au processus décisionnel de cette institution, à moins qu’un intérêt public supérieur ne justifie la divulgation du document visé. »

6        L’article 14, paragraphe 11, du règlement (CE) no 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO 2004, L 136, p. 1), est libellé comme suit :

« Les médicaments à usage humain autorisés conformément aux dispositions du présent règlement bénéficient, sans préjudice du droit concernant la protection de la propriété industrielle et commerciale, d’une période de protection des données d’une durée de huit ans et d’une période de protection de la mise sur le marché d’une durée de dix ans portée à onze ans au maximum si le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché obtient pendant les huit premières années de ladite période de dix ans une autorisation pour une ou plusieurs indications thérapeutiques nouvelles qui sont jugées, lors de l’évaluation scientifique conduite en vue de leur autorisation, apporter un bénéfice clinique important par rapport aux thérapies existantes. »

 Les antécédents du litige

7        Les antécédents du litige et le contenu de la décision litigieuse sont exposés aux points 1 à 13 de l’arrêt attaqué. Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés de la manière suivante.

8        La requérante a conçu le médicament Translarna utilisé dans le traitement de la dystrophie musculaire de Duchenne.

9        Au mois d’octobre 2012, la requérante a présenté à l’EMA une demande d’autorisation de mise sur le marché (ci-après l’« AMM ») pour le Translarna. Après avoir, dans un premier temps, rejeté cette demande, l’EMA a décidé, le 31 juillet 2014, d’octroyer une AMM conditionnelle à la requérante.

10      Le 13 octobre 2015, l’EMA a informé la requérante qu’une société pharmaceutique souhaitait avoir accès à un rapport d’essai clinique figurant dans le dossier de demande d’AMM du Translarna (ci-après le « rapport litigieux »).

11      La requérante a demandé à l’EMA de considérer le rapport litigieux comme étant intégralement confidentiel. Cette demande a été rejetée par la décision litigieuse.

12      Par cette décision, l’EMA a accordé l’accès à l’intégralité du rapport, sous réserve de quelques occultations. Elle a estimé que la totalité du contenu de ce rapport ne pouvait pas bénéficier des exceptions au droit d’accès prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, la requérante n’ayant pas démontré que chacun des éléments de ce rapport constituait une information commerciale confidentielle.

13      L’EMA a considéré que la divulgation du rapport litigieux était conforme au règlement no 1049/2001, à sa politique de transparence et à l’accord ADPIC.

14      Elle a indiqué que la décision d’octroyer une AMM conditionnelle avait déjà été adoptée, de sorte que l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001 ne trouvait pas à s’appliquer.

15      Elle a signalé avoir, de sa propre initiative, occulté les références aux discussions sur l’élaboration de protocoles avec la US Food and Drug Administration (administration des denrées alimentaires et des médicaments, États-Unis d’Amérique), les numéros de lots, les matériels et équipements, les analyses exploratoires, la description quantitative et qualitative de la méthode de mesure de la concentration du médicament ainsi que les dates de début et de fin du traitement et d’autres dates susceptibles de permettre l’identification des patients.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 9 décembre 2015, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. Par acte séparé du même jour, elle a introduit une demande en référé au titre de l’article 278 TFUE en vue d’obtenir le sursis à exécution de la décision litigieuse.

17      Par ordonnance du 20 juillet 2016, PTC Therapeutics International/EMA (T‑718/15 R, non publiée, EU:T:2016:425), le président du Tribunal a ordonné le sursis à l’exécution de la décision litigieuse. Le pourvoi introduit contre cette ordonnance a été rejeté par une ordonnance du vice-président de la Cour du 1er mars 2017, PTC Therapeutics International/EMA [C‑513/16 P(R), non publiée, EU:C:2017:148].

18      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 29 mars 2016, la European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs (Eucope) a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante. Par ordonnance du 17 juin 2016, le président de la quatrième chambre du Tribunal a admis cette intervention.

19      À l’appui de son recours, la requérante soulevait cinq moyens.

20      En premier lieu, le Tribunal a examiné, aux points 27 à 75 de l’arrêt attaqué, le premier moyen, tiré de la méconnaissance de la présomption générale de confidentialité qui serait applicable au rapport litigieux et qui reposerait sur l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux de la requérante.

21      Au point 45 de cet arrêt, le Tribunal a relevé que le rapport litigieux n’était pas afférent à une procédure administrative en cours, l’AMM conditionnelle pour le médicament Translarna ayant été délivrée avant la date de demande d’accès à ce rapport. Il en a déduit que la divulgation de celui-ci ne pouvait altérer la procédure d’AMM.

22      Aux points 46 à 52 dudit arrêt, le Tribunal a relevé que la réglementation de l’Union en matière d’AMM ne régissait pas de manière restrictive l’usage des documents figurant dans le dossier d’une procédure d’AMM d’un médicament et que cette réglementation ne limitait pas l’accès à ce dossier aux « parties concernées » ou aux « plaignants ».

23      Il en a déduit, aux points 53 à 57 du même arrêt, qu’il n’existait pas de présomption générale de confidentialité des documents, notamment des rapports d’essais cliniques de médicaments à usage humain, faisant partie d’un dossier d’AMM.

24      Enfin, le Tribunal a écarté, aux points 58 à 75 de cet arrêt, les arguments de la requérante en faveur de l’existence d’une présomption générale de confidentialité du rapport litigieux.

25      En deuxième lieu, aux points 76 à 95 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a répondu au deuxième moyen, tiré du non-respect de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001 et fondé sur l’argument selon lequel le rapport litigieux devrait, dans son intégralité, être regardé comme une information commerciale confidentielle protégée par cette disposition.

26      Aux points 81 à 83 de cet arrêt, il a rappelé que le risque d’atteinte à un intérêt protégé devait être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique, et que l’application de l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 obligeait l’institution concernée à mettre en balance l’intérêt spécifique devant être protégé par la non-divulgation du document concerné et l’intérêt général à ce que ce document soit rendu accessible.

27      Il a rappelé que, selon sa jurisprudence, toute information relative à une société et à ses relations d’affaires ne saurait être considérée comme relevant de la protection dont doivent bénéficier les intérêts commerciaux.

28      Au point 89 dudit arrêt, le Tribunal a considéré que la requérante n’avait pas réussi à démontrer « que l’assemblage complet des données accessibles au public avec celles qui ne le sont pas constituait une donnée commerciale sensible », formant un « ensemble inséparable revêtant une valeur économique », dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux de la requérante.

29      Au point 90 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté l’argument selon lequel la divulgation du rapport litigieux fournirait aux concurrents « une feuille de route » sur la manière de remplir une demande d’AMM. Il a estimé que la divulgation du rapport litigieux n’apporterait aux concurrents de la requérante aucune information utile sur la stratégie de développement clinique à long terme et sur la conception des études en complément des données déjà publiquement disponibles sur le médicament Translarna, les modèles et méthodes utilisés dans l’étude clinique concernée étant fondés sur un savoir-faire largement disponible dans la communauté scientifique.

30      Aux points 91 à 93 de cet arrêt, le Tribunal a souligné que la requérante n’avait apporté aucun élément permettant de comprendre les raisons pour lesquelles les occultations effectuées par l’EMA n’étaient pas suffisantes. Il a rappelé que, selon la politique de l’EMA elle-même, cette dernière ne divulguait pas d’informations commerciales confidentielles, telles que les informations détaillées concernant la qualité et la fabrication des médicaments, de telle sorte que, même si une autre entreprise utilisait les données contenues dans le rapport litigieux, elle devrait néanmoins mener ses propres études et essais correspondants et développer avec succès son propre médicament. Il a indiqué que le médicament Translarna bénéficie d’une période d’exclusivité commerciale de dix ans après la délivrance de l’AMM, au cours de laquelle tout médicament similaire ne peut être mis sur le marché.

31      Enfin, le Tribunal a écarté, au point 94 dudit arrêt, l’argument selon lequel la divulgation du rapport litigieux permettrait aux concurrents de la requérante d’obtenir des autorités de pays tiers une AMM.

32      En troisième lieu, le Tribunal a répondu, aux points 96 à 103 de l’arrêt attaqué, au troisième moyen, tiré du fait que la divulgation du rapport litigieux porterait atteinte au processus décisionnel de l’EMA.

33      Il a constaté que, à la date de présentation par un tiers de la demande d’accès au rapport litigieux, la procédure d’octroi de l’AMM était close.

34      En quatrième lieu, le Tribunal a écarté, aux points 104 à 109 dudit arrêt, le quatrième moyen, tiré de l’absence de mise en balance par l’EMA des intérêts en présence.

35      En cinquième lieu, le Tribunal a écarté, aux points 110 à 113 de l’arrêt attaqué, le cinquième moyen, tiré du fait qu’une mise en balance appropriée aurait abouti à une décision de ne pas divulguer la moindre partie du rapport litigieux.

36      Par conséquent, le Tribunal a, par le point 1 du dispositif de l’arrêt attaqué, rejeté le recours.

 Les conclusions des parties

37      La requérante demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        d’annuler la décision litigieuse ;

–        de renvoyer ladite décision à l’EMA afin qu’elle adopte une nouvelle décision en consultation avec la requérante, et

–        de condamner la défenderesse aux dépens et aux autres frais exposés au titre de la présente affaire.

38      L’EMA demande à la Cour :

–        de rejeter le pourvoi comme en partie irrecevable en tant qu’il porte sur la demande tendant à « renvoyer ladite décision à l’EMA en vue d’un nouvel examen concernant l’expurgation des passages confidentiels en consultation avec [la requérante] » ;

–        de rejeter le pourvoi comme non fondé dans son intégralité, et

–        de condamner la requérante aux dépens afférents à la présente procédure.

39      Eucope demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué et

–        d’annuler la décision litigieuse.

 Sur le pourvoi

40      À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève cinq moyens. Par son premier moyen, elle considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’estimant pas que le rapport litigieux était protégé par une présomption générale de confidentialité. Par son deuxième moyen, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne jugeant pas que ce rapport était constitué d’informations commerciales confidentielles, dont la divulgation devait être refusée en application de l’exception au droit d’accès aux documents prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. Par son troisième moyen, elle fait valoir que le Tribunal a également méconnu l’article 4, paragraphe 3, de ce règlement en ne considérant pas que ledit rapport était protégé par l’exception au droit d’accès aux documents prévue à cette disposition. Par ses quatrième et cinquième moyens, qu’elle présente ensemble, elle considère que l’EMA a commis une erreur de droit en ne procédant pas à une mise en balance des intérêts en présence.

 Sur le premier moyen

 Argumentation des parties

41      Par son premier moyen, la requérante soutient, en premier lieu, que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’estimant pas que le rapport litigieux devait bénéficier d’une présomption générale de confidentialité.

42      Elle considère que, au point 64 de cet arrêt, le Tribunal a interprété de manière erronée son argumentation, la reconnaissance de l’application d’une présomption générale de confidentialité n’ayant pas, selon elle, pour conséquence de faire primer de manière absolue la protection de la confidentialité, dès lors qu’une telle présomption peut toujours être renversée dans un cas particulier.

43      En second lieu, la requérante soutient que, aux points 37 à 57 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a appliqué de manière erronée les éléments auxquels est subordonnée la reconnaissance en l’espèce d’une présomption générale de confidentialité.

44      Premièrement, elle relève que, si l’article 73 du règlement no 726/2004 prévoit que le règlement no 1049/2001 s’applique aux documents détenus par l’EMA, cela ne signifie pas que les documents faisant partie d’un dossier d’AMM sont présumés pouvoir être divulgués.

45      La requérante met en exergue le fait que le règlement no 726/2004 contient une série d’obligations de divulgation qui assurent une transparence suffisante au processus décisionnel de l’EMA et qui constituent des dispositions spécifiques et détaillées sur les informations devant être rendues accessibles au public, ce règlement ne prévoyant aucun droit général d’accès au dossier pour quiconque.

46      Deuxièmement, la requérante soutient que le Tribunal a commis, aux points 39 à 45 de l’arrêt attaqué, une erreur de droit en n’examinant pas si la perspective que des informations commercialement sensibles soient divulguées après la clôture de la procédure en question portait atteinte à celle-ci, la clôture de cette procédure étant sans incidence sur le caractère sensible de ces informations.

47      Troisièmement, elle fait valoir que le Tribunal, aux points 54 et 55 de cet arrêt, a commis une erreur de droit lorsqu’il s’est fondé sur la politique de l’EMA en matière d’accès aux documents, comme source de droit, pour justifier les comportements de celle-ci dans ce domaine.

48      Quatrièmement, la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir interprété le règlement no 1049/2001 conformément à l’accord ADPIC. Elle soutient que cet accord s’applique aux documents soumis par les demandeurs d’AMM et ne permet la divulgation d’informations confidentielles que lorsque cela est nécessaire pour protéger le public.

49      Cinquièmement, la requérante soutient que le Tribunal a apprécié de manière erronée, aux points 67 à 74 de l’arrêt attaqué, les justifications présentées par l’EMA.

50      L’EMA considère qu’il convient d’écarter l’argumentation de la requérante.

 Appréciation de la Cour

51      Il y a lieu de rappeler que, conformément à son considérant 1, le règlement no 1049/2001 s’inscrit dans la volonté exprimée à l’article 1er, deuxième alinéa, TUE de marquer une nouvelle étape dans le processus créant une union sans cesse plus étroite entre les peuples de l’Europe, dans laquelle les décisions sont prises dans le plus grand respect possible du principe d’ouverture et le plus près possible des citoyens (arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, point 34, ainsi que du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 73).

52      Cet objectif fondamental de l’Union est également reflété, d’une part, à l’article 15, paragraphe 1, TFUE, qui prévoit, notamment, que les institutions, les organes et les organismes de l’Union œuvrent dans le plus grand respect possible du principe d’ouverture, principe également réaffirmé à l’article 10, paragraphe 3, TUE et à l’article 298, paragraphe 1, TFUE, ainsi que, d’autre part, par la consécration du droit d’accès aux documents à l’article 42 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 74 et jurisprudence citée).

53      Il résulte du considérant 2 du règlement no 1049/2001 que la transparence permet de conférer aux institutions de l’Union une plus grande légitimité, efficacité et responsabilité à l’égard des citoyens de l’Union dans un système démocratique (voir, en ce sens, arrêts du 1er juillet 2008, Suède et Turco/Conseil, C‑39/05 P et C‑52/05 P, EU:C:2008:374, points 45 et 59, ainsi que du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 75).

54      À ces fins, l’article 1er de ce règlement prévoit que celui-ci vise à conférer au public un droit d’accès aux documents des institutions de l’Union qui soit le plus large possible (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 76 et jurisprudence citée).

55      Il ressort également de l’article 4 dudit règlement, qui institue un régime d’exceptions à cet égard, que ce droit d’accès n’en est pas moins soumis à certaines limites fondées sur des raisons d’intérêt public ou privé (arrêts du 16 juillet 2015, ClientEarth/Commission, C‑612/13 P, EU:C:2015:486, point 57, et du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 77).

56      De telles exceptions dérogeant au principe de l’accès le plus large possible du public aux documents, elles doivent être interprétées et appliquées strictement (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 78 et jurisprudence citée).

57      À cet égard, il convient de rappeler que, lorsqu’une institution, un organe ou un organisme de l’Union saisi d’une demande d’accès à un document décide de rejeter cette demande sur le fondement de l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par cette exception, le risque d’une telle atteinte devant être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 51 et jurisprudence citée).

58      Dans certains cas, la Cour a reconnu qu’il était toutefois loisible à cette institution, à cet organe ou à cet organisme de se fonder, à cet égard, sur des présomptions générales s’appliquant à certaines catégories de documents, des considérations d’ordre général similaires étant susceptibles de s’appliquer à des demandes de divulgation portant sur des documents de même nature (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 51 et jurisprudence citée).

59      L’objectif de telles présomptions réside ainsi dans la possibilité, pour l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union concerné, de considérer que la divulgation de certaines catégories de documents porte, en principe, atteinte à l’intérêt protégé par l’exception qu’il invoque, en se fondant sur de telles considérations générales, sans être tenu d’examiner concrètement et individuellement chacun des documents demandés (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 52 et jurisprudence citée).

60      Cependant, une institution, un organe ou un organisme de l’Union n’est pas tenu de fonder sa décision sur une telle présomption générale, mais peut toujours procéder à un examen concret des documents visés par la demande d’accès et fournir une motivation à cet égard (arrêt du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission, C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 67).

61      Il s’ensuit que le recours à une présomption générale de confidentialité ne constitue qu’une simple faculté pour l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union concerné, lequel conserve toujours la possibilité de procéder à un examen concret et individuel des documents en cause pour déterminer si, en tout ou en partie, ceux-ci sont protégés par une ou plusieurs des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001.

62      Ainsi, la prémisse sur laquelle est fondé le premier moyen est erronée en droit. En effet, en soutenant que « l’application de la présomption générale de confidentialité n’est pas facultative, en ce sens qu’elle s’applique en vertu du droit lorsqu’elle entre en jeu et que l’EMA doit en tenir compte lorsqu’elle adopte sa décision », la requérante méconnaît la portée qu’il convient de conférer à la règle d’examen des demandes d’accès aux documents, telle qu’elle ressort de l’arrêt de la Cour du 14 novembre 2013, LPN et Finlande/Commission (C‑514/11 P et C‑605/11 P, EU:C:2013:738, point 67), selon laquelle, au contraire, l’application d’une présomption générale de confidentialité est toujours facultative pour l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union saisi d’une telle demande.

63      En outre, l’examen concret et individuel est de nature à garantir que l’institution, l’organe ou l’organisme de l’Union a vérifié si la divulgation de tous les documents ou parties de documents auxquels l’accès était demandé pouvait porter concrètement et effectivement atteinte à l’un ou plusieurs des intérêts protégés par les exceptions mentionnées à l’article 4 du règlement no 1049/2001.

64      Or, en l’espèce, il est constant que l’EMA a effectué un examen concret et individuel de l’ensemble du rapport litigieux, qui l’a conduit à occulter des passages de celui-ci ayant trait aux références aux discussions sur l’élaboration de protocoles avec la US Food and Drug Administration, aux numéros de lots, aux matériels et équipements, aux analyses exploratoires, à la description quantitative et qualitative de la méthode de mesure de la concentration du médicament ainsi qu’aux dates de début et de fin du traitement et à d’autres dates susceptibles de permettre l’identification des patients.

65      Il ressort des considérations qui précèdent que, dans la mesure où par le premier moyen, la requérante reproche au Tribunal, en substance, une erreur de droit, en ce qu’il a considéré que le rapport litigieux ne bénéficiait pas d’une présomption générale de confidentialité, ce moyen ne saurait prospérer et doit être rejeté comme étant non fondé.

66      Pour le reste, dans la mesure où, par le premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés dans l’arrêt attaqué par lesquels le Tribunal a considéré qu’une présomption analogue à celles reconnues dans la jurisprudence de la Cour à l’égard d’autres catégories de documents ne saurait être reconnue à l’égard des documents détenus par l’EMA, tels que le rapport litigieux, ce moyen doit être rejeté comme étant inopérant.

67      En effet, ce volet de l’arrêt attaqué énonce, en réalité, des motifs surabondants, dès lors qu’il porte sur une question qui n’avait pas d’incidence sur l’issue du litige devant le Tribunal. À supposer que, contrairement à ce qu’a considéré le Tribunal, une présomption générale de confidentialité doive également être reconnue à l’égard des documents détenus par l’EMA, tels que le rapport litigieux, il ressort du point 61 du présent arrêt que l’EMA n’était pas tenue de se fonder sur une telle présomption, mais pouvait, comme elle l’a fait, procéder à un examen concret et individuel du document concerné, pour déterminer si et dans quelle mesure il pouvait être divulgué.

68      Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen

 Argumentation des parties

69      Par son deuxième moyen, la requérante soutient que le Tribunal a méconnu en l’espèce la protection des intérêts commerciaux conférée par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

70      En premier lieu, elle affirme que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne considérant pas que le rapport litigieux était, dans son intégralité, constitué d’informations commerciales confidentielles protégées par cette disposition.

71      En deuxième lieu, elle soutient que le point 83 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit dans la mesure où il ressortirait de ce point que le Tribunal a supposé que l’EMA avait effectué une mise en balance des intérêts défendus par la confidentialité commerciale avec ceux défendus par l’intérêt public supérieur à la divulgation du rapport litigieux. Or, l’EMA se serait uniquement fondée sur l’absence de caractère confidentiel de ce rapport pour estimer qu’il était possible de le divulguer, sans avoir procédé à une mise en balance des intérêts.

72      En troisième lieu, la requérante affirme que le Tribunal a commis une erreur de droit, en considérant, au point 85 de cet arrêt, que l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 était subordonnée à la gravité de l’atteinte portée aux intérêts commerciaux.

73      En quatrième lieu, la requérante estime que le Tribunal n’a pas pris en considération l’utilité du rapport litigieux ni le risque d’utilisation abusive de ce rapport par un concurrent afin d’apprécier si une atteinte à ses intérêts commerciaux était raisonnablement prévisible. Elle soutient que le Tribunal aurait dû examiner si un tel concurrent pouvait utiliser ledit rapport pour obtenir un avantage concurrentiel, notamment en dehors de l’Union.

74      En cinquième lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir, au point 90 dudit arrêt, méconnu le niveau de preuve requis en exigeant qu’elle démontre que le rapport litigieux contenait des informations innovantes ou nouvelles. Elle indique que le Tribunal n’a pas pris en considération les témoignages qu’elle avait soumis, desquels il ressortirait qu’il était raisonnablement prévisible que la divulgation de l’intégralité de ce rapport permettrait à ses concurrents d’obtenir des AMM plus aisément, notamment en dehors de l’Union.

75      En sixième lieu, elle reproche au Tribunal de ne pas avoir tenu compte du fait que l’EMA estimait, à tort, qu’elle exerce un pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle apprécie le caractère confidentiel des informations commerciales contenues dans un document dont la divulgation lui est demandée.

76      Eucope soutient, en substance, que l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC oblige les États signataires de cet accord à protéger les données non divulguées et que, ainsi, la partie ayant soumis ces données ne peut supporter la charge de prouver « avec une certitude absolue » qu’elles seront exploitées déloyalement dans le commerce.

77      L’EMA considère qu’il convient d’écarter les arguments de la requérante.

 Appréciation de la Cour

78      Il convient de relever que, dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante fait valoir, en premier lieu, que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’estimant pas que l’ensemble du rapport litigieux devait être considéré comme étant, dans son intégralité, constitué de données commerciales confidentielles.

79      Or, il y a lieu de rappeler que, par la décision litigieuse, l’EMA a accordé un accès partiel au rapport litigieux, occultant les données mentionnées aux points 15 et 64 du présent arrêt.

80      Aux fins de contester les motifs par lesquels le Tribunal s’est prononcé sur le bien-fondé de la divulgation des autres passages du rapport litigieux, la requérante se borne à considérer, en substance, que celui-ci, d’une part, a adopté une approche erronée pour déterminer si ce rapport contenait des données confidentielles, en ne tenant pas compte de la perspective raisonnablement prévisible que ce dernier serait utilisé de manière abusive par un concurrent, et, d’autre part, aurait dû déterminer si la combinaison des données contenues dans l’ensemble dudit rapport avait une valeur commerciale.

81      Certes, l’EMA ne saurait exclure d’emblée la possibilité que certains passages d’un rapport d’essai clinique, spécifiquement identifiés par une entreprise, puissent contenir des données dont la divulgation porterait atteinte aux intérêts commerciaux de celle-ci, au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001. En effet, dans la mesure où une telle entreprise identifierait un risque concret et raisonnablement prévisible que certaines données non publiées contenues dans un rapport tel que le rapport litigieux, qui ne relèveraient pas de l’état général des connaissances dans l’industrie pharmaceutique, soient utilisées dans un ou plusieurs États tiers par un concurrent de cette entreprise aux fins de l’obtention d’une AMM, profitant ainsi de manière déloyale du travail accompli par ladite entreprise, une telle atteinte pourrait être établie.

82      Toutefois, par son argumentation, la requérante n’expose pas les raisons pour lesquelles le Tribunal aurait commis une erreur de droit lorsqu’il a considéré que les passages du rapport litigieux qui avaient été divulgués ne constituaient pas des données susceptibles de relever de l’exception relative à la protection des intérêts commerciaux, prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, à défaut pour elle d’avoir concrètement et précisément identifié, devant l’EMA, ainsi que dans la requête présentée devant le Tribunal lui-même, lesquels de ces passages, s’ils étaient divulgués, pouvaient porter atteinte à ses intérêts commerciaux.

83      Au demeurant, l’argumentation de la requérante équivaut à invoquer une présomption générale de confidentialité en faveur de l’ensemble du rapport litigieux dans le cadre d’un moyen dirigé contre l’appréciation opérée par le Tribunal du résultat de l’examen concret et individuel au vu duquel l’EMA a décidé d’accorder un accès partiel à ce rapport. Eu égard à ce qui a été jugé aux points 64 et 65 du présent arrêt, cette argumentation doit être rejetée.

84      En deuxième lieu, la requérante soutient que le point 83 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit au motif que le Tribunal laisse supposer que l’EMA a effectué une mise en balance entre les intérêts commerciaux confidentiels de la requérante et l’intérêt public supérieur de la transparence, alors que, dans la décision litigieuse, l’EMA se serait seulement fondée sur l’absence de caractère confidentiel du rapport litigieux.

85      À cet égard, il ressort de l’ensemble des points 78 à 95 de l’arrêt attaqué, par lesquels le Tribunal a répondu au deuxième moyen du recours en annulation, que celui-ci a rappelé, aux points 78 à 85 de cet arrêt, la jurisprudence relative aux principes et aux règles d’examen des demandes d’accès à des documents en vertu du règlement no 1049/2001, y compris la règle relative à la mise en balance des intérêts, au point 83 de celui-ci, avant de considérer, au terme d’un examen figurant aux points 87 à 95 dudit arrêt, dans le cadre duquel cette règle n’a pas été appliquée, que la requérante n’avait pas démontré que l’EMA avait commis d’erreur lorsque celle-ci a considéré que les données contenues dans le rapport litigieux n’étaient pas confidentielles.

86      En outre, il peut être relevé que le Tribunal a précisé, au point 83 de l’arrêt attaqué, que la mise en balance des intérêts n’est effectuée que « lorsqu’une institution applique l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 ». Or, ainsi que le Tribunal l’a jugé à juste titre au point 108 de l’arrêt attaqué, dès lors que l’EMA n’avait pas conclu que le rapport litigieux devait être protégé par une ou plusieurs de ces exceptions, elle n’avait pas l’obligation de déterminer ou d’évaluer l’intérêt public à la divulgation de ce rapport, ni de le mettre en balance avec l’intérêt de la requérante à garder ledit rapport confidentiel.

87      L’argument de la requérante doit donc être écarté.

88      En troisième lieu, la requérante fait valoir, en substance, que le Tribunal a commis une erreur de droit, au point 85 de l’arrêt attaqué, en ayant considéré que l’application de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 était subordonnée à la gravité de l’atteinte portée aux intérêts commerciaux.

89      Or, il ressort d’une lecture d’ensemble des points 78 à 95 de l’arrêt attaqué, par lesquels le Tribunal a répondu au deuxième moyen du recours en annulation, que le point 85 de celui-ci figure parmi les points 78 à 85 de cet arrêt, par lesquels le Tribunal s’est borné à rappeler la jurisprudence relative aux principes et aux règles d’examen des demandes d’accès à des documents, formulées sur le fondement du règlement no 1049/2001.

90      Dans la mesure où la version en langue anglaise de l’arrêt attaqué, langue de procédure dans l’affaire T‑718/15, utilise le terme « gravement » (« seriously »), qui ne figure pas à l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 1049/2001, force est de constater que cet arrêt est entaché d’une erreur de droit. En effet, il ressort du libellé même de cette disposition qu’une simple atteinte aux intérêts visés est susceptible de justifier l’application, le cas échéant, de l’une des exceptions qui y sont énumérées, sans que cette ingérence doive atteindre un seuil de gravité particulier.

91      Toutefois, il ressort des points 87 à 95 dudit arrêt que, aux fins de statuer sur le deuxième moyen du recours en annulation, le Tribunal ne s’est aucunement appuyé sur le critère de gravité de l’atteinte portée aux intérêts commerciaux de la requérante pour juger que l’exception prévue à cet effet par l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001 n’était pas applicable en l’espèce. Dans ces conditions, l’erreur de droit commise par le Tribunal, évoquée au point 90 du présent arrêt, est sans incidence sur l’appréciation effectuée par celui-ci et ne saurait donc conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué.

92      En quatrième lieu, la requérante soutient que, afin de déterminer si la divulgation du rapport litigieux risquait de porter atteinte à ses intérêts commerciaux, le Tribunal a apprécié de manière erronée l’utilité de ce rapport et le risque de son utilisation abusive par les concurrents de celle-ci, notamment dans le cadre de procédures de délivrance d’AMM en dehors de l’Union.

93      Au point 91 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que le risque d’utilisation abusive du rapport litigieux par un concurrent ne constituait pas en soi un motif pour considérer qu’une information était confidentielle sur le plan commercial. Il a précisé par ailleurs que la requérante n’avait pas démontré l’insuffisance des occultations effectuées par l’EMA dans ce rapport.

94      À cet égard, il convient de souligner que, lorsqu’une institution, un organe ou un organisme de l’Union saisi d’une demande d’accès à un document décide de rejeter cette demande sur le fondement de l’une des exceptions prévues à l’article 4 du règlement no 1049/2001 au principe fondamental d’ouverture rappelé au point 52 du présent arrêt, il lui incombe, en principe, de fournir des explications quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par cette exception. En outre, le risque d’une telle atteinte doit être raisonnablement prévisible et non purement hypothétique (arrêt du 4 septembre 2018, ClientEarth/Commission, C‑57/16 P, EU:C:2018:660, point 51 et jurisprudence citée).

95      De la même manière, il incombe à une personne qui sollicite l’application de l’une de ces exceptions, par une institution, un organe ou un organisme auquel ledit règlement s’applique, de fournir, en temps utile, des explications équivalentes à l’institution, à l’organe ou à l’organisme de l’Union en cause.

96      Certes, ainsi qu’il a été jugé au point 81 du présent arrêt, le risque d’utilisation abusive des données contenues dans un document auquel l’accès est demandé peut porter atteinte aux intérêts commerciaux d’une entreprise dans certaines circonstances. Pour autant, eu égard à l’exigence de fournir des explications telles que celles visées au point 95 du présent arrêt, l’existence d’un tel risque doit être établie. À cet égard, une simple allégation non étayée relative à un risque général d’utilisation abusive ne saurait conduire à regarder ces données comme relevant de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, en l’absence de toute autre précision, produite par la personne qui sollicite l’application de cette exception devant l’institution, l’organe ou l’organisme en cause avant que celui-ci ne prenne une décision à cet égard, sur la nature, l’objet et la portée desdites données, susceptible d’éclairer le juge de l’Union sur la manière dont leur divulgation serait à même de porter concrètement atteinte d’une manière raisonnablement prévisible aux intérêts commerciaux des personnes concernées par ces mêmes données.

97      Or, ainsi qu’il ressort du point 82 du présent arrêt, la requérante n’a pas établi, dans sa requête devant le Tribunal, qu’elle avait fourni à l’EMA avant l’adoption de la décision litigieuse, et nonobstant le fait qu’elle a eu l’opportunité de prendre position sur l’éventuelle confidentialité de certains éléments contenus dans le rapport litigieux, des explications sur la nature, l’objet et la portée des données en cause qui permettent de conclure à l’existence du risque invoqué, eu égard, notamment, aux considérations exposées aux points 89 à 92 de l’arrêt attaqué dont il ressort que la divulgation de ces données n’était pas susceptible de porter atteinte aux intérêts légitimes de la requérante. En particulier, l’argument de la requérante ne saurait permettre d’établir que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a considéré, au point 89 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’avait pas démontré que l’assemblage complet des données accessibles au public avec celles qui ne le sont pas constitue une donnée commerciale sensible dont la divulgation porterait atteinte à ses intérêts commerciaux.

98      L’argument de la requérante doit donc être écarté.

99      En cinquième lieu, la requérante critique, d’une part, le niveau de preuve exigé par le Tribunal au point 90 de l’arrêt attaqué et, d’autre part, le fait que ce dernier n’a pas pris en considération les témoignages desquels il ressortirait qu’il était raisonnablement prévisible que la divulgation de l’intégralité dudit rapport permettrait à ses concurrents d’obtenir des AMM plus aisément, notamment en dehors de l’Union.

100    D’une part, il est certes vrai que le Tribunal a estimé, à ce point 90, que la requérante n’avait pas démontré la nouveauté des modèles, des analyses ou des méthodes contenus dans le rapport litigieux. Il a, ce faisant, confirmé l’appréciation de l’EMA selon laquelle les modèles et méthodes utilisés dans l’étude clinique concernée étaient fondés sur un savoir-faire « largement disponible dans la communauté scientifique ».

101    Il a précisé ensuite que le rapport litigieux ne contenait cependant aucune information sur la composition ou la fabrication du médicament Translarna, dès lors que l’EMA avait expurgé les données qui y étaient relatives, tout comme celles portant sur la stratégie de développement clinique à long terme ou la conception des études. C’est dès lors sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a écarté l’argument de la requérante selon lequel la divulgation du rapport litigieux fournirait aux concurrents de la requérante une « feuille de route » sur la manière de remplir une demande d’AMM pour un produit concurrent de celui de cette dernière.

102    D’autre part, s’agissant des témoignages produits par la requérante aux fins de démontrer le risque d’utilisation abusive que ferait courir à celle-ci la divulgation de l’intégralité dudit rapport, en permettant à ses concurrents d’obtenir des AMM plus aisément, notamment en dehors de l’Union, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, le Tribunal n’est pas tenu de fournir un exposé qui suivrait, de manière exhaustive et un par un, tous les raisonnements articulés par les parties au litige. Par conséquent, la motivation du Tribunal peut avoir un caractère implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles il n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle. En particulier, il n’incombe pas au Tribunal de répondre aux arguments invoqués par une partie qui ne sont pas suffisamment clairs et précis, dans la mesure où ils ne font l’objet d’aucun autre développement particulier et ne sont pas accompagnés d’une argumentation spécifique les étayant (voir, en ce sens, arrêts du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission, C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476, points 91 et 96, ainsi que du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, EU:C:2011:452, point 64).

103    Or, les témoignages en cause visent, en réalité, à appuyer l’argumentation de la requérante relative à l’application d’une présomption générale de confidentialité. Ainsi qu’il ressort des points 64, 65 et 83 du présent arrêt, cette argumentation ne saurait prospérer eu égard, notamment, au fait que l’EMA a effectué un examen concret et individuel de l’ensemble du rapport litigieux, le Tribunal ayant d’ailleurs écarté, pour cette même raison, un moyen tiré d’un prétendu défaut de motivation dans le chef de l’EMA par rapport au fait que celle-ci n’avait pas exposé les raisons pour lesquelles une telle présomption n’était pas applicable, aux points 67 à 70 de l’arrêt attaqué.

104    Dans ces conditions, il convient de constater que le Tribunal, ayant écarté ledit moyen, n’avait pas besoin d’examiner les témoignages en cause au regard de l’application d’une présomption générale de confidentialité. Par ailleurs, ces témoignages ne permettent d’identifier aucun passage spécifique du rapport litigieux dont la divulgation serait nuisible aux intérêts commerciaux de la requérante pour des raisons particulières, de sorte que le Tribunal n’avait aucune raison de les prendre en considération pour apprécier une argumentation plus spécifique relative à l’éventuelle confidentialité de tels passages.

105    En tout état de cause, conformément à ce qui a été jugé aux points 96 et 97 du présent arrêt, il incombait à la requérante de soumettre à l’EMA, au stade de la procédure administrative devant celle-ci, des explications sur la nature, l’objet et la portée des données dont la divulgation porterait atteinte à ses intérêts commerciaux. Or, il convient de relever que les témoignages en cause n’ont pas été présentés à l’EMA avant l’adoption de la décision litigieuse le 25 novembre 2015, dès lors qu’ils sont datés des 8 et 9 décembre 2015. Ainsi, le Tribunal était en droit de considérer, implicitement mais nécessairement, que ces documents n’étaient pas pertinents aux fins de son appréciation de la légalité de la décision litigieuse.

106    Par conséquent, ces arguments doivent être écartés.

107    En sixième lieu, si la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir tenu compte du fait que l’EMA estimait à tort qu’elle exerce un pouvoir discrétionnaire lorsqu’elle apprécie le caractère confidentiel des informations commerciales contenues dans un document dont la divulgation lui est demandée, il convient de constater que cet argument est fondé sur une prémisse erronée. En effet, il ressort de l’arrêt attaqué que l’EMA, loin d’exercer un pouvoir discrétionnaire au regard de la demande d’accès au rapport litigieux, a effectué un examen concret et individuel de ce rapport, afin de déterminer lesquelles des données qu’il contenait relevaient, selon elle, de l’exception prévue à l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001, l’EMA ayant alors refusé l’accès à ces données.

108    À cet égard, il convient, en outre, d’indiquer que la requérante avait été invitée par l’EMA à faire part de ses observations sur le caractère confidentiel des différentes données contenues dans ce rapport et qu’elle s’est abstenue de collaborer à cet effet.

109    L’argument de la requérante doit donc être écarté.

110    En septième lieu, Eucope invoque l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC pour relever qu’il oblige les membres de cet accord à protéger les données non divulguées, la partie ayant soumis ces données ne pouvant, dès lors, supporter la charge de prouver « avec une certitude absolue » qu’elles seront exploitées déloyalement dans le commerce.

111    À cet égard, il convient de relever, comme le Tribunal l’a rappelé à juste titre au point 62 de l’arrêt attaqué, et ainsi que M. l’avocat général l’a souligné au point 87 de ses conclusions, que, si l’article 39 de l’accord ADPIC ne peut pas être invoqué directement, les règles du droit de l’Union, et notamment l’article 4 du règlement no 1049/2001 dans le présent contexte, doivent toutefois être interprétées d’une manière conforme à cet accord dans la mesure du possible (voir, en ce sens, arrêt du 11 septembre 2007, Merck Genéricos – Produtos Farmacêuticos, C‑431/05, EU:C:2007:496, point 35).

112    S’il est vrai que l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC fait obligation aux membres de cet accord de protéger les données non divulguées résultant d’essais ou d’autres données non divulguées, dont l’établissement demande un effort considérable, contre l’exploitation déloyale dans le commerce, une telle circonstance n’est pas, par elle-même, de nature à faire regarder les données figurant dans un rapport d’essai clinique, tel que le rapport litigieux, comme étant des données dont le divulgation serait susceptible de porter atteinte aux intérêts commerciaux de la personne qui les a produites.

113    En effet, ainsi qu’il ressort du point 95 du présent arrêt, il incombe à une personne qui sollicite l’application par une institution, un organe ou un organisme de l’Union de l’une des exceptions visées à l’article 4 du règlement no 1049/2001 de fournir, en temps utile, des explications à cette institution, à cet organe ou à cet organisme quant à la question de savoir de quelle manière l’accès à ce document pourrait porter concrètement et effectivement atteinte à l’intérêt protégé par cette exception. Or, une telle exigence n’est pas incompatible avec l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC, compte tenu, notamment, de la période d’exclusivité des données prévues par l’article 14, paragraphe 11, du règlement no 726/2004.

114    En outre, l’article 39, paragraphe 3, de l’accord ADPIC n’a ni pour objet ni pour effet de définir la notion d’« intérêts commerciaux », au sens de l’article 4, paragraphe 2, premier tiret, du règlement no 1049/2001.

115    D’ailleurs, il ne ressort pas de l’arrêt attaqué que le Tribunal a fait peser sur la requérante la charge de prouver « avec une certitude absolue » que ses données seraient exploitées déloyalement dans le commerce.

116    Par conséquent, il y a lieu d’écarter cet argument et, par voie de conséquence, le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen

 Argumentation des parties

117    Par son troisième moyen, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en n’estimant pas que, dès lors qu’elle est titulaire d’une AMM conditionnelle et qu’elle doit régulièrement soumettre des demandes de renouvellement de son autorisation, dans le cadre desquelles elle doit présenter des études actualisées du rapport litigieux, ce dernier est protégé par l’article 4, paragraphe 3, du règlement no 1049/2001. Ainsi, la divulgation d’informations sensibles pourrait compromettre le processus décisionnel de l’EMA concernant ces demandes de renouvellement.

118    Elle relève qu’une décision ultérieure d’accorder une AMM « complète » doit tenir compte de toutes les études qui ont été produites par le demandeur et que la divulgation d’informations sensibles pourrait compromettre le processus d’octroi d’une telle AMM. 

119    Elle indique que la divulgation du rapport litigieux pendant la période d’exclusivité des données porterait gravement atteinte au processus décisionnel de l’EMA relatif aux demandes d’autorisation de médicaments génériques reçues pendant cette période, qui pourraient être fondées sur les données de ce rapport.

120    Enfin, la requérante reproche au Tribunal d’avoir fondé son raisonnement portant sur la question de savoir si le rapport litigieux serait utilisé dans le cadre du processus décisionnel relatif à la délivrance d’une AMM complète sur une base factuelle inexacte aux points 101 et 102 de l’arrêt attaqué.

121    L’EMA considère qu’il convient d’écarter les arguments de la requérante.

 Appréciation de la Cour

122    Par l’argumentation venant au soutien de son troisième moyen, la requérante considère que le processus décisionnel de l’EMA dans lequel s’inscrit le rapport litigieux n’est pas encore clôturé. Ce faisant, elle invoque une violation par le Tribunal de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, qui porte sur l’accès à un document ayant trait à une question sur laquelle une institution, un organe ou un organisme de l’Union n’a pas encore pris de décision.

123    Il convient de relever que le Tribunal a constaté à juste titre, au point 100 de l’arrêt attaqué, que le rapport litigieux avait été soumis par la requérante à l’EMA dans le cadre d’une demande d’AMM pour le médicament Translarna qui avait déjà été clôturée à la date de la demande d’accès à ce rapport.

124    Si la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir tenu compte du fait que le rapport litigieux était pertinent dans le processus décisionnel relatif aux demandes de renouvellement annuel de l’AMM conditionnelle, elle n’a toutefois pas fait valoir cet argument lors de son recours de première instance. Par conséquent, cet argument, invoqué pour la première fois dans le cadre du pourvoi devant la Cour, doit être rejeté comme étant irrecevable.

125    S’agissant de l’erreur de droit qu’aurait commise le Tribunal en se fondant sur des faits matériellement inexacts pour écarter, aux points 101 et 102 de l’arrêt attaqué, l’argument tiré de la pertinence du rapport litigieux dans le cadre d’une procédure d’AMM « complète », il y a lieu de rappeler, d’une part, que la Cour n’est pas compétente pour constater les faits et, d’autre part, que, sous réserve du cas de la dénaturation, l’appréciation de ceux-ci ne constitue pas une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2015, Stichting Corporate Europe Observatory/Commission, C‑399/13 P, non publié, EU:C:2015:360, point 26).

126    Or, dans son troisième moyen, la requérante n’identifie aucun fait spécifique que le Tribunal aurait dénaturé. En effet, dans la mesure où elle invoque la circonstance selon laquelle les données du rapport litigieux ont été regroupées avec celles d’un essai ultérieur en tant qu’élément de preuve à l’appui du maintien de l’AMM conditionnelle au cours du processus de renouvellement de celle-ci, il suffit de relever que cette circonstance ne prouve aucunement que le rapport litigieux sera utilisé dans le cadre du processus décisionnel distinct relatif à la délivrance d’une AMM complète.

127    La requérante considère également que c’est à tort que le Tribunal n’a pas tenu compte de la nécessité de protéger les données contenues dans le rapport litigieux tout au long de la période d’exclusivité de ces données, prévue à l’article 8 du règlement no 141/2000. Toutefois, un tel argument n’est pas de nature à démontrer que le Tribunal aurait méconnu les dispositions de l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement no 1049/2001, qui impose de refuser la divulgation à des tiers de documents faisant partie d’un processus décisionnel toujours en cours à la date à laquelle la décision sur leur demande d’accès est adoptée. En effet, il ne saurait être considéré qu’un processus décisionnel, au sens de cette dernière disposition, soit en cours pendant toute la durée de la période d’exclusivité prévue audit article 8 du règlement no 141/2000.

128    Enfin, si la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir apprécié l’argument selon lequel la divulgation du rapport litigieux pendant la période d’exclusivité des données porterait gravement atteinte au processus décisionnel des éventuelles demandes d’AMM pour des médicaments génériques pendant cette période, il convient de constater qu’elle vise ainsi des processus décisionnels distincts du processus décisionnel au cours duquel ce rapport a été produit, ce qui n’est pas de nature à remettre en cause le constat effectué par le Tribunal, au point 100 de l’arrêt attaqué, selon lequel ce dernier processus décisionnel, à savoir la procédure d’AMM conditionnelle du Translarna, était clôturé à la date de la demande d’accès audit rapport.

129    Par conséquent, le troisième moyen doit être écarté.

 Sur les quatrième et cinquième moyens

 Argumentation des parties

130    Par ses quatrième et cinquième moyens, la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir répondu à son argumentation selon laquelle, dès lors que l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement no 1049/2001 était applicable au rapport litigieux, l’EMA aurait dû procéder à une mise en balance des intérêts en présence pour déterminer si un intérêt public supérieur justifiait la divulgation de ce rapport, primant ainsi la confidentialité de celui-ci, avant de conclure à l’absence d’un tel intérêt public.

131    Elle relève que, dans la décision litigieuse, l’EMA s’est fondée sur des motifs pouvant illégitimement relever de la notion d’intérêt public supérieur, comme l’invocation de préoccupations générales de santé publique ou une paralysie presque totale des activités d’accès aux documents détenus par cette agence.

132    L’EMA considère qu’il convient d’écarter les arguments de la requérante.

 Appréciation de la Cour

133    Il convient de relever que, dans la mesure où, par son argumentation, la requérante fait valoir que l’EMA s’est fondée sur des motifs pouvant illégitimement relever de la notion d’intérêt public, elle ne critique aucun point des motifs de l’arrêt attaqué, mais se borne à contester le contenu de la décision litigieuse. Partant, ces griefs doivent être écartés comme irrecevables.

134    Pour le surplus, il suffit, pour écarter ces moyens, de constater que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit, au point 108 de l’arrêt attaqué, en considérant que, l’EMA n’ayant pas conclu que le rapport litigieux devait être protégé par les exceptions visées à l’article 4, paragraphes 2 ou 3, du règlement no 1049/2001, celle-ci n’était pas dans l’obligation de déterminer ou d’évaluer l’intérêt public à la divulgation de ce rapport, ni de le mettre en balance avec l’intérêt de la requérante à garder ledit rapport confidentiel.

135    Par conséquent, les quatrième et cinquième moyens du pourvoi doivent être rejetés.

136    Il résulte de tout ce que précède que, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir dirigée contre les conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’EMA de procéder à un nouvel examen de la décision litigieuse, le présent pourvoi doit être rejeté.

 Sur les dépens

137    En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.

138    Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

139    L’EMA ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’EMA.

140    Conformément à l’article 140, paragraphe 3, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, Eucope est condamnée à supporter ses propres dépens.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      PTC Therapeutics International Ltd est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par l’Agence européenne des médicaments (EMA).

3)      L a European Confederation of Pharmaceutical Entrepreneurs supporte ses propres dépens.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.