Language of document : ECLI:EU:T:2019:750

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

17 octobre 2019 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative fripan VIENNOISERIE CAPRICE Pur Beurre – Marque de l’Union européenne figurative antérieure Caprice – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] »

Dans l’affaire T‑628/18,

Viomichania mpiskoton kai eidon diatrofis E. I. Papadopoulos SA, établie à Moschato-Tavros (Grèce), représentée par Mes C. Chrysanthis, P. V. Chardalia et A. Vasilogamvrou, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mmes L. Lapinskaite, S. Palmero Cabezas et M. H. O’Neill, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Europastry, SA, établie à Sant Cugat del Vallès (Espagne), représentée par Me L. Estropá Navarro, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la cinquième chambre de recours de l’EUIPO du 8 août 2018 (affaire R 493/2018‑5), relative à une procédure d’opposition entre Viomichania mpiskoton kai eidon diatrofis E.I. Papadopoulos et Europastry,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, R. Barents et J. Passer (rapporteur), juges,

greffier : Mme R. Ūkelytė, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 octobre 2018,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 14 janvier 2019,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 janvier 2019,

à la suite de l’audience du 10 juillet 2019,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 30 juillet 2014, l’intervenante, Europastry SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

Image not found

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Farine et préparations à base de céréales ; produits congelés de boulangerie, pâtisserie et confiserie ».

4        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 171/2014, du 12 septembre 2014.

5        Le 10 décembre 2014, la requérante, Viomichania mpiskoton kai eidon diatrofis E. I. Papadopoulos SA, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement no 207/2009 (devenu article 46 du règlement 2017/1001), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque de l’Union européenne figurative antérieure, déposée le 13 octobre 2006 et enregistrée le 16 octobre 2008 sous le numéro 5 386 289, reproduite ci-après :

Image not found

7        La marque antérieure est enregistrée pour les produits relevant de la classe 30 et correspondant à la description suivante : « Fins biscuits fourrés en forme de cigarillos (gaufres fourrées en forme de cigarillos) ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001].

9        Par décision du 13 mai 2016, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

10      Par décision du 5 mai 2017 relative à l’affaire R 1246/2016‑5, la cinquième chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’opposition du 13 mai 2016 dans son intégralité, a renvoyé l’affaire devant celle-ci et a considéré qu’une nouvelle décision devait être adoptée au motif que ladite décision contenait des erreurs substantielles ainsi que des vices de procédure susceptibles d’en modifier le résultat, notamment dans le cadre de l’appréciation de la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure et de la question de savoir si les éléments présentés établissaient le caractère distinctif accru dont jouissait cette marque.

11      Par décision du 24 janvier 2018, la division d’opposition a rejeté l’opposition en considérant que, si les éléments de preuve démontraient que la marque antérieure avait fait l’objet d’un usage sérieux, ceux-ci ne permettaient pas de lui reconnaître un caractère distinctif accru. Puis, elle a considéré que les produits étaient identiques et similaires, à l’exception de la « farine », visée par la marque demandée, que les signes en conflit étaient différents sur le plan phonétique, mais présentaient des similitudes visuelle et conceptuelle limitées, et que, compte tenu de tous les facteurs pertinents, il n’existait aucun risque de confusion.

12      Le 16 mars 2018, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, contre la décision de la division d’opposition du 24 janvier 2018.

13      Par décision du 8 août 2018 (ci-après la « décision attaquée »), la cinquième chambre de recours a rejeté le recours.

14      Elle a considéré, aux points 37 et 39 de la décision attaquée, que le territoire pertinent était celui de l’Union européenne et que le public pertinent était composé du consommateur moyen doté d’un niveau d’attention moyen.

15      S’agissant de la comparaison des produits en cause, la chambre de recours a, au point 43 de la décision attaquée, fait sienne l’appréciation de la division d’opposition selon laquelle les produits étaient identiques ou similaires, à l’exception de la « farine », visée par la marque demandée, et a constaté que les parties n’avaient pas remis en cause une telle conclusion.

16      S’agissant de la comparaison des signes en conflit, elle a conclu, au point 54 de la décision attaquée, que ceux-ci présentaient, tout au plus, de très faibles similitudes. À cet égard, elle a relevé, au point 51 de la décision attaquée, sur le plan visuel, que la seule similitude résidait dans l’élément verbal commun « caprice », lequel se distinguait toutefois dans lesdits signes de par son emplacement spécifique dans ces signes, la police de caractère employée et les couleurs utilisées ainsi que de par leur taille et leur importance relative. Sur le plan phonétique, la chambre de recours a considéré, au point 52 de la décision attaquée, que les signes en conflit étaient similaires dans la mesure où l’unique élément verbal « caprice » serait prononcé dans la marque antérieure, tandis que, dans la marque demandée, ce même terme se prononcerait au milieu d’une longue suite d’éléments verbaux, à savoir au sein de l’expression « fripan viennoiserie caprice pur beurre ». Cela étant, elle a estimé qu’il était beaucoup plus probable que les consommateurs prononcent uniquement les éléments dominants sur le plan visuel, à savoir « caprice » pour la marque antérieure et « fripan » pour la marque demandée. Sur le plan conceptuel, la chambre de recours a estimé, au point 53 de la décision attaquée, à l’instar de la division d’opposition, que le mot « caprice » serait compris par les parties francophone et anglophone du public pertinent comme une référence à un « changement soudain ou imprévisible de l’attitude ou du comportement » ou par la partie francophone uniquement comme un « désir soudain pour quelqu’un ou quelque chose ». À cela, elle a ajouté que, pour la partie francophone du public pertinent, le mot « viennoiserie » désignait un type de pâtisseries et l’expression « pur beurre » serait comprise comme telle et que, indépendamment de tout contexte linguistique, le terme « fripan » n’avait aucun contenu sémantique clair.

17      S’agissant de l’appréciation du risque de confusion, la chambre de recours a estimé, à titre liminaire, aux points 58 à 60 de la décision attaquée, que si les éléments de preuve produits par la requérante, en ce compris la déclaration faite sous serment effectuée devant notaire par le directeur de son département des ventes, étaient clairement suffisants pour attester l’usage sérieux de la marque antérieure, ils ne permettaient pas de prouver un quelconque caractère distinctif accru et que l’appréciation du risque de confusion devait donc être fondée sur le caractère distinctif intrinsèque de ladite marque, qui devait être considéré comme normal. Ensuite, elle a relevé, aux points 62 et 63 de la décision attaquée, l’existence de différences flagrantes entre les signes en conflit et a estimé que la requérante n’avait pas présenté d’argumentation convaincante visant à établir que la présence de l’élément verbal commun « caprice » dans lesdits signes était suffisante pour engendrer un risque de confusion et que le public pertinent occulterait complétement les éléments figuratifs de la marque antérieure, décomposerait la marque demandée de manière à ne retenir qu’un seul élément mineur, ignorerait tous les autres éléments verbaux de plus grande taille ainsi que dominants de ladite marque et confondrait les signes en conflit sur la base de cet exercice mental complexe. À cet égard, elle a considéré, au point 64 de la décision attaquée, que l’élément verbal « fripan » était l’élément distinctif et dominant de la marque demandée, y compris lorsqu’il était examiné au regard de tous les autres éléments supplémentaires composant ladite marque, et que, par conséquent, l’argument de la requérante selon lequel l’élément « caprice » conservait un caractère distinctif et autonome n’était absolument pas convaincant. En outre, la chambre de recours a estimé, au point 65 de la décision attaquée, que les différences existant entre les signes en conflit, établies, en particulier, par les éléments verbaux supplémentaires présents dans la marque demandée, les éléments figuratifs et la position négligeable du seul élément commun « caprice », suffisaient à contrebalancer toute similitude entre lesdits signes. Elle a donc considéré que les consommateurs n’étaient susceptibles ni de confondre les marques en conflit ni de croire que les produits proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement.

 Conclusions des parties

18      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.

19      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens qu’il a exposés.

20      L’intervenante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        confirmer la décision attaquée dans son intégralité de sorte que soit maintenue la demande d’enregistrement de la marque de l’Union européenne ;

–        condamner la requérante à supporter les dépens de l’intervenante.

 En droit

21      À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

22      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

23      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

24      En l’espèce, ainsi que la chambre de recours l’a, à juste titre, constaté, aux points 37 à 39 de la décision attaquée, le territoire pertinent est l’Union européenne et le public pertinent est le consommateur moyen doté d’un niveau d’attention moyen. Par ailleurs, il y a lieu de constater l’identité ou la similitude des produits en cause, à l’exception de la « farine » visée par la marque demandée, ce qui n’est pas contesté par la requérante.

 Sur la comparaison des signes en conflit

25      La requérante soutient que la chambre de recours a omis de prendre en considération, dans la marque demandée, la position distinctive autonome de l’élément verbal « caprice » et le fait que les consommateurs seraient susceptibles d’accorder la plus grande attention audit élément verbal.

26      À ce titre, elle fait valoir que le terme précité n’est pas totalement négligeable eu égard à sa taille ainsi qu’à sa position dans la marque demandée et ne peut être considéré comme un élément ornemental. En outre, l’élément verbal « caprice » ne serait ni descriptif ni générique ou encore purement laudatif, mais serait, au contraire, doté d’un sens non courant et présenterait une certaine originalité lorsqu’il est employé à l’égard de denrées alimentaires. Ainsi, le terme en cause posséderait un caractère distinctif intrinsèque suffisant et conserverait dès lors une position distinctive autonome au sein de la marque demandée.

27      En outre, la requérante prétend que, pour faire référence à la marque demandée, le public pertinent est susceptible d’employer le mot « caprice », au lieu du terme « fripan », dans la mesure où ce dernier serait utilisé comme dénomination sociale ou comme « marque maison » pour de nombreux produits commercialisés par l’intervenante.

28      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

29      Selon une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

30      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en conflit, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539, point 43).

31      Quant à l’appréciation du caractère dominant d’un ou de plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35, et du 8 novembre 2016, For Tune/EUIPO – Gastwerk Hotel Hamburg (fortune), T‑579/15, non publié, EU:T:2016:644, point 36].

32      Par ailleurs, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et d’éléments figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits ou aux services en cause en citant les éléments verbaux qu’en décrivant les éléments figuratifs de cette marque [voir, en ce sens, arrêt du 12 mars 2014, Borrajo Canelo/OHMI – Tecnoazúcar (PALMA MULATA), T‑381/12, non publié, EU:T:2014:119, point 38 et jurisprudence citée].

33      En outre, la Cour a jugé, s’agissant de marques ayant un élément commun, lorsque cet élément est identique à l’une des marques en conflit, que, quand bien même cet élément ne saurait être considéré comme dominant l’impression d’ensemble, il doit être pris en compte dans l’appréciation de la similitude de celles-ci, dans la mesure où il constitue en lui-même la marque antérieure et conserve une position distinctive autonome dans la marque composée notamment de cet élément et dont l’enregistrement est demandé. En effet, dans l’hypothèse où un élément commun conserve une position distinctive autonome dans le signe composé, l’impression d’ensemble produite par ce signe peut conduire le public à croire que les produits ou les services en cause proviennent, à tout le moins, d’entreprises liées économiquement, auquel cas l’existence d’un risque de confusion doit être retenue (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2005, Medion, C‑120/04, EU:C:2005:594, points 30 et 36, et ordonnance du 22 janvier 2010, ecoblue/OHMI et Banco Bilbao Vizcaya Argentaria, C‑23/09 P, non publiée, EU:C:2010:35, point 45).

34      Cela étant, la Cour a précisé que cette jurisprudence particulière ne saurait affecter l’obligation de procéder à une évaluation globale de l’ensemble des composants des marques en conflit. En effet, il est de jurisprudence constante que l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public doit être appréciée globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce (voir ordonnance du 29 juin 2011, adp Gauselmann/OHMI, C‑532/10 P, non publiée, EU:C:2011:433, point 43 et jurisprudence citée).

35      Ainsi, même en présence de l’hypothèse mentionnée au point 33 ci-dessus, il y a lieu, dans chaque cas individuel, de déterminer, au moyen, notamment, d’une analyse des composants d’un signe et de leur poids relatif dans la perception du public visé, l’impression d’ensemble produite par le signe dont l’enregistrement est demandé dans la mémoire dudit public et de procéder ensuite, à la lumière de cette impression d’ensemble et de tous les facteurs pertinents de l’espèce, à l’appréciation du risque de confusion [voir arrêt du 16 novembre 2017, Galletas Gullón/EUIPO – Hug (GULLON DARVIDA), T‑456/16, non publié, EU:T:2017:811, point 82 et jurisprudence citée].

36      En l’espèce, force est de constater que l’impression d’ensemble produite par la marque demandée est différente de celle produite par la marque antérieure.

37      En effet, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, aux points 50 à 53 de la décision attaquée, premièrement, que l’élément verbal « fripan » occupe une position dominante dans la marque demandée, deuxièmement, que, sur le plan visuel, l’élément commun « caprice » se distingue par son emplacement ainsi que par la police de caractères employée et les couleurs utilisées, que la taille et l’importance relatives de ce composant sont différentes et que les signes en conflit diffèrent également au niveau de tous leurs autres composants et de toutes leurs autres caractéristiques, troisièmement, que, sur le plan phonétique, la marque antérieure sera prononcée « caprice » alors que la marque demandée sera prononcée « fripan viennoiserie caprice pur beurre », ou plutôt « fripan », et, quatrièmement, que, sur le plan conceptuel, l’élément « caprice » peut être compris par la partie francophone ou anglophone du public pertinent comme une référence à un « changement soudain ou imprévisible de l’attitude ou du comportement », ou par le public francophone comme un « désir soudain pour quelqu’un ou quelque chose », que l’élément « viennoiserie » désigne un type de pâtisseries, que l’élément « pur beurre » sera compris comme tel, alors que l’élément verbal « fripan » n’a aucun contenu sémantique clair.

38      Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé, au point 54 de la décision attaquée, que, dans l’impression d’ensemble qu’ils produisaient, les signes en conflit présentaient, tout au plus, de très faibles similitudes.

39      Dans ces circonstances, conformément à la jurisprudence citée aux points 34 et 35 ci-dessus, cette appréciation ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante tirés de l’existence d’une position distinctive autonome de l’élément verbal « caprice ».

40      Il convient d’ajouter, d’une part, que l’application de la notion de position distinctive autonome découlant de l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594, point 37), présuppose que la marque antérieure soit contenue dans la marque demandée [voir arrêt du 28 septembre 2016, Kozmetika Afrodita/EUIPO – Núñez Martín et Machado Montesinos (KOZMeTIKA AFRODITA), T‑574/15, non publié, EU:T:2016:574, point 45 et jurisprudence citée]. En l’espèce, la marque antérieure comporte, outre ledit élément verbal, un élément figuratif qui n’est pas contenu dans la marque demandée.

41      D’autre part, ainsi que le relève à juste titre l’EUIPO, la requérante reste en défaut de prouver l’affirmation selon laquelle l’élément verbal « fripan » est utilisé par l’intervenante en tant que dénomination de l’entreprise de celle-ci ou « marque maison ». En tout état de cause, force est de constater que cet élément ne fait pas partie intégrante, totalement ou partiellement, de la dénomination commerciale de l’intervenante, laquelle est Europastry, SA.

42      Ainsi, contrairement aux circonstances prévalant dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, EU:C:2005:594), la marque demandée est constituée non de la juxtaposition, d’une part, de la dénomination de l’entreprise de l’intervenante et, d’autre part, de la marque antérieure, mais d’éléments figuratifs ainsi que d’un ensemble d’éléments verbaux, dont l’élément verbal « caprice » également présent dans la marque antérieure n’est qu’un élément.

43      Par ailleurs, il convient de relever que, contrairement à ce qu’a fait valoir la requérante lors de l’audience, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur lorsqu’elle a estimé, au point 51 de la décision attaquée, que l’élément verbal commun « caprice » se distinguait non seulement par son emplacement spécifique, mais également par la police de caractères et les couleurs utilisées. S’il est vrai que les signes en conflit n’ont été enregistrés qu’en noir et blanc, ledit élément est pourtant d’une couleur différente dans lesdits signes, blanche dans la marque antérieure et noire dans la marque demandée.

44      Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l’appréciation faite par la chambre de recours en ce qui concerne la comparaison des signes en conflit, à savoir qu’ils présentaient de très faibles similitudes.

 Sur le risque de confusion

45      Selon la requérante, c’est à tort que la chambre de recours a jugé que le risque de confusion n’avait pas été établi.

46      Premièrement, la requérante fait valoir que le public pertinent est susceptible d’accorder une plus grande attention à l’élément verbal « caprice » en raison de son caractère distinctif intrinsèque nettement plus marqué, au lieu, d’une part, du terme « viennoiserie », de l’expression « pur beurre » ou de l’élément figuratif, lesquels seraient dépourvus de caractère distinctif et, d’autre part, du mot « fripan » qui serait utilisé pour de nombreux autres produits comme dénomination sociale ou comme « marque maison ». Par ailleurs, contrairement au terme « fripan », le terme « caprice » posséderait une certaine signification conceptuelle. À cet égard, la requérante fait valoir que les consommateurs sont susceptibles de se rappeler des éléments dotés d’une signification conceptuelle (tel ne serait pas le cas de ceux qui en sont dépourvus) et que la similitude conceptuelle est plus importante que les similitudes visuelle et phonétique et peut l’emporter sur les différences visuelles ou phonétiques, voire permettre de surmonter celles-ci.

47      Deuxièmement, elle fait valoir que la chambre de recours a omis de prendre en considération, dans son appréciation, l’intention de l’intervenante visant à créer un risque de confusion. Selon la requérante, la circonstance selon laquelle, à la suite de l’échec de l’enregistrement de la marque référencée 11 238 243, pour la majorité des produits relevant de la classe 30 et au motif qu’il existait un risque de confusion avec la marque antérieure, l’intervenante a réitéré ladite demande en ajoutant l’élément verbal « fripan », ce qui démontrerait son intention et son insistance à utiliser la marque Caprice. Cette intention serait également établie par les annexes 5, 6A et 6B déposées par la requérante devant l’EUIPO, qui démontreraient que l’intervenante continue à utiliser la marque en cause sur son site Internet, alors que sa demande d’enregistrement pour cette marque a été rejetée.

48      Troisièmement, la requérante fait valoir que la chambre de recours a omis de prendre en considération la déclaration faite sous serment effectuée devant notaire par le directeur de son département des ventes, contenant des informations relatives aux volumes des ventes, aux parts de marché et aux frais de publicité de la marque antérieure en Grèce ainsi que dans d’autres pays de l’Union. Ces éléments de preuve établiraient que la marque antérieure possède, si ce n’est une renommée accrue, au moins un caractère distinctif accru, ne serait-ce qu’en Grèce. Ladite déclaration aurait d’ailleurs été corroborée et étayée par d’autres preuves provenant de sources indépendantes, issues de sociétés du secteur médiatique et d’agences de publicité. En outre, l’exactitude des informations y figurant n’aurait pas été contestée par l’intervenante, aucun élément du dossier ne serait de nature à créer un doute quant à leur véracité et, de plus, il ne s’agirait pas d’une simple déclaration écrite, mais bien d’une déclaration sous serment effectuée devant un notaire qui, si elle s’avérait erronée, entraînerait des conséquences juridiques pour son auteur. La chambre de recours aurait donc commis une erreur d’appréciation en considérant que ladite déclaration ne constituait pas une preuve objective et en jugeant, sur cette base, que la marque antérieure ne possédait pas de caractère distinctif accru.

49      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments.

50      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast‑Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

51      Il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il a gardée en mémoire (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 26).

52      En l’espèce, compte tenu du principe d’interdépendance rappelé au point 50 ci-dessus, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours, au point 65 de la décision attaquée, selon laquelle il n’existe pas de risque de confusion entre les signes en conflit. En effet, si les produits en cause sont en partie identiques et en partie similaires, à l’exception de la « farine » visée par la marque demandée, les signes en conflit présentent, dans leur ensemble, des différences flagrantes sur les plans visuel et phonétique, de sorte que le public pertinent n’est pas susceptible de croire que les produits en cause proviennent de la même entreprise ou, du moins, d’entreprises liées économiquement.

53      Cette appréciation ne saurait être remise en cause par les arguments formulés à cet égard par la requérante.

54      Premièrement, dans la mesure où la requérante fait valoir que la similitude conceptuelle est plus importante que les similitudes visuelle et phonétique, il suffit de rappeler, à l’instar de l’EUIPO, que, selon la jurisprudence, il est probable que le contact visuel avec les marques soit prépondérant pour des produits de consommation courante [arrêt du 15 avril 2010, Cabel Hall Citrus/OHMI – Casur (EGLÉFRUIT), T‑488/07, non publié, EU:T:2010:145, point 54] et que, en tout état de cause, la simple association entre deux marques que pourrait faire le public par le biais de la concordance de leur contenu sémantique ne suffit pas en elle-même pour conclure à l’existence d’un risque de confusion (arrêt du 11 novembre 1997, SABEL, C‑251/95, EU:C:1997:528, point 26).

55      En l’espèce, eu égard, en particulier, à la position dominante de l’élément verbal « fripan » dans la marque antérieure et aux multiples différences entre les signes en conflit, en ce compris celles relatives à l’emplacement et la représentation graphique de l’élément verbal commun « caprice », la simple concordance sémantique entre ces signes, engendrée par l’élément verbal commun « caprice », ne suffit pas pour remettre en cause la conclusion mentionnée au point 38 ci-dessus.

56      Deuxièmement, il convient de rejeter comme inopérant l’argument de la requérante tiré d’une « intention » de l’intervenante visant à créer un risque de confusion entre les marques en conflit, qui serait démontrée par la tentative d’enregistrement, pour les produits désignés par la marque demandée en l’espèce, de la marque numéro 11 238 243, que l’intervenante continuerait à utiliser sur son site Internet, reproduite ci-après :

Image not found

57      En effet, d’une part, il ressort de la jurisprudence qu’un argument tiré de l’utilisation particulière d’une marque demandée n’est pas pertinent dès lors que l’examen doit concerner la marque telle qu’enregistrée [voir arrêt du 29 janvier 2013, Fon Wireless/OHMI – nfon (nfon), T‑283/11, non publié, EU:T:2013:41, point 46 et jurisprudence citée]. Est encore moins pertinente, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, l’utilisation d’une autre marque, comme celle visée au point 56 ci-dessus.

58      D’autre part, comme l’a déjà indiqué, à juste titre, la chambre de recours dans la décision du 5 mai 2017 (voir point 10 ci-dessus), la prétendue mauvaise foi de l’intervenante ne relève pas d’une procédure d’opposition.

59      En effet, l’article 52, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 [devenu article 59, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001] prévoit les causes de nullité absolue d’une marque de l’Union européenne, notamment lorsque le demandeur est de mauvaise foi lors du dépôt de sa demande d’enregistrement (arrêt du 11 juin 2009, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli, C‑529/07, EU:C:2009:361, points 34 et 35), de sorte que la mauvaise foi peut être invoquée dans le cadre d’une demande en nullité dirigée contre une marque enregistrée. Toutefois, la mauvaise foi du demandeur ne figure pas à l’article 41 du règlement no 207/2009 parmi les motifs d’opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne [arrêt du 12 octobre 2017, Moravia Consulting/EUIPO – Citizen Systems Europe (SDC‑554S), T‑316/16, EU:T:2017:717, point 32]. Dès lors, elle ne constitue pas un élément qui doit être pris en compte dans le contexte d’une procédure d’opposition introduite sur la base de l’article 8 du règlement no 207/2009 [voir arrêt du 6 octobre 2017, NRJ Group/EUIPO – Sky International (SKY ENERGY), T‑184/16, non publié, EU:T:2017:703, point 97 et jurisprudence citée].

60      Dès lors, l’argument de la requérante, tiré de la prétendue mauvaise foi de l’intervenante – présenté, dans son recours contre la décision de la division d’opposition du 24 janvier 2018 (voir point 12 ci-dessus) ainsi que dans la requête, comme l’argument tiré de l’« intention » de l’intervenante, mais qui reste toutefois, en réalité, un argument tiré de la mauvaise foi, ainsi que le confirme d’ailleurs l’argumentation utilisée par la requérante lors de l’audience – ne saurait prospérer.

61      Quant à l’argument avancé par la requérante lors de l’audience et tiré de ce que, selon la jurisprudence, il convient, pour des raisons de sécurité juridique et de bonne administration, de s’assurer que les marques dont l’usage pourrait être contesté avec succès devant des juridictions ne soient pas enregistrées, il suffit de relever que la jurisprudence citée par la requérante, à savoir les arrêts du 29 septembre 1998, Canon (C‑39/97, EU:C:1998:442, point 21), du 6 mai 2003, Libertel (C‑104/01, EU:C:2003:244, point 59), du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C‑29/05 P, EU:C:2007:162, point 48), et du 1er février 2018, Philip Morris Brands/EUIPO – Explosal (Superior Quality Cigarettes FILTER CIGARETTES Raquel) (T‑105/16, EU:T:2018:51, point 63), concerne des circonstances de fait différentes de celles de l’espèce. Cette jurisprudence n’a nullement remis en cause le principe énoncé au point 59 ci-dessus.

62      Troisièmement, s’agissant de l’argument de la requérante visant à la reconnaissance d’un caractère distinctif intrinsèque accru de la marque antérieure, il convient de rappeler tout d’abord que, ainsi qu’il découle du considérant 8 du règlement no 207/2009 (voir également considérant 11 du règlement 2017/1001), l’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque se révèle important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre [voir arrêt du 28 janvier 2016, Sto/OHMI – Fixit Trockenmörtel Holding (CRETEO), T‑640/13, non publié, EU:T:2016:38, point 95 et jurisprudence citée].

63      L’existence d’un caractère distinctif supérieur à la normale, en raison de la connaissance qu’a le public d’une marque sur le marché, suppose nécessairement que cette marque soit connue d’au moins une partie significative du public concerné, sans qu’elle doive nécessairement posséder une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001). Il ne saurait être indiqué d’une façon générale, par exemple en recourant à des pourcentages déterminés relatifs au degré de connaissance qu’a le public de la marque dans les milieux concernés, qu’une marque a un caractère distinctif élevé. Néanmoins, il y a lieu de reconnaître une certaine interdépendance de la connaissance qu’a le public d’une marque et du caractère distinctif de celle-ci en ce sens que, plus la marque est connue du public ciblé, plus le caractère distinctif de cette marque est renforcé. Pour examiner si une marque jouit d’un caractère distinctif élevé en raison de la connaissance qu’en a le public, il convient de prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, l’importance des investissements réalisés par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie les produits ou les services comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations des chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles (voir arrêt du 28 janvier 2016, CRETEO, T‑640/13, non publié, EU:T:2016:38, point 96 et jurisprudence citée).

64      Il doit également être rappelé que, dans le cadre de l’appréciation des moyens de preuve destinés à établir le caractère distinctif accru en raison de l’usage d’une marque, il n’est pas suffisant d’examiner ces éléments de façon séparée, mais qu’il convient de les apprécier dans leur ensemble (voir arrêt du 28 janvier 2016, CRETEO, T‑640/13, non publié, EU:T:2016:38, point 102 et jurisprudence citée).

65      En l’espèce, il ressort de la décision de la division d’opposition du 24 janvier 2018 (voir point 11 ci-dessus) que, afin de démontrer le caractère distinctif accru de la marque antérieure, la requérante a déposé les éléments de preuves, correspondant notamment à des factures, des courriels expédiés par des distributeurs, des études, des informations relatives aux dépenses publicitaires et aux volumes des ventes, des extraits de base de données nationales, des extraits de la base de données de l’EUIPO, des certificats faisant référence à des récompenses, des photographies promotionnelles ainsi que des jugements nationaux.

66      En outre, il ressort du point 11, cinquième tiret, et du point 33 de la décision attaquée que la chambre de recours a admis la recevabilité de trois éléments de preuve supplémentaires que la requérante a produits pour la première fois au stade du recours contre la décision de la division d’opposition, et correspondent aux annexes suivantes :

–        annexe 7 correspondant à une déclaration faite sous serment du directeur du département des ventes de la requérante ;

–        annexe 8 correspondant à une lettre d’une société de publicité sur les dépenses publicitaires concernant la marque antérieure à Chypre de 2009 à 2017 ;

–        annexe 9 correspondant à une lettre d’une société de publicité sur les dépenses publicitaires concernant la marque antérieure en Bulgarie de 2011 à 2016.

67      Or, c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé, au point 59 de la décision attaquée, que, dans leur ensemble, ces éléments de preuve semblaient sporadiques, sélectionnés de manière aléatoire et non organisés, de sorte que, s’ils étaient clairement suffisants pour attester l’usage sérieux de la marque antérieure, ils ne permettaient pas de prouver un quelconque caractère distinctif accru, ajoutant qu’aucune information sur la part de marché et aucune déclaration indépendante des chambres de commerce ou de l’industrie n’avait été produite.

68      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par la déclaration faite sous serment produite en tant qu’annexe 7.

69      En effet, il ressort de la jurisprudence qu’une déclaration établie dans l’intérêt de son auteur, telle que celle en cause en l’espèce, nécessite, afin d’avoir une valeur probante, d’être corroborée par d’autres éléments [voir, en ce sens, arrêts du 23 septembre 2009, Cohausz/OHMI – Izquierdo Faces (acopat), T‑409/07, non publié, EU:T:2009:354, point 57, et du 13 janvier 2011, Park/OHMI – Bae (PINE TREE), T‑28/09, non publié, EU:T:2011:7, point 68].

70      Dès lors que la déclaration en cause a été établie par le directeur du département des ventes de la requérante, c’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’elle devait être corroborée par d’autres éléments de preuve. Le fait que cette déclaration a été effectuée devant un notaire, de sorte que, si elle s’avérait inexacte, elle entraînerait des conséquences juridiques pour son auteur, ne modifie en rien cette conclusion.

71      Or, ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, si cette déclaration fournit des informations sur les dépenses publicitaires en Grèce, en Bulgarie, à Chypre, les volumes de ventes pour la Grèce, la Bulgarie, Chypre, la France, l’Italie et la Suède et les parts de marché sur le marché grec du biscuit sur la période de cinq ans (en volume et en valeur de ventes), seules certaines de ces affirmations sont étayées par des preuves objectives, à savoir celles relatives aux dépenses publicitaires en Bulgarie, corroborées par des preuves produites par une agence de publicité et présentées en tant qu’annexe 9, et à Chypre, corroborées par des preuves produites par une agence de publicité et présentées en tant qu’annexe 8, et celles relatives aux chiffres de ventes pour la France, l’Italie et la Suède, partiellement corroborées par des factures et d’autres preuves déposées devant la division d’opposition.

72      C’est également à juste titre que l’EUIPO fait valoir que, d’une part, les éléments de preuve relatifs aux volumes de ventes et aux dépenses publicitaires ne peuvent pas être considérés comme des éléments de preuve directs démontrant que la marque jouit d’un niveau élevé de caractère distinctif du fait de sa reconnaissance par le public et, d’autre part, les éléments de preuve présentés ne donnent aucune information sur les parts de marché de la requérante. Quant aux informations portant sur les parts de marché en Grèce, contenues dans la déclaration produite en tant qu’annexe 7, force est de constater que celles-ci ne sont corroborées par aucune preuve objective.

73      Cette appréciation n’est pas remise en cause par les autres arguments présentés par la requérante lors de l’audience.

74      D’une part, s’agissant des arguments tirés d’une violation des articles 95 et 97, paragraphe 1, sous f), du règlement 2017/1001, en ce que la chambre de recours n’a pas pris en compte la substance de ladite déclaration dans le cadre de son analyse, il découle de ce qui précède (voir notamment les points 17 et 68 à 72 ci-dessus) que la chambre de recours a pris cette déclaration en considération et ce d’une manière appropriée dans le cadre de l’examen du caractère distinctif de la marque antérieure.

75      D’autre part, s’agissant de l’argument tiré d’une méconnaissance du droit à un procès équitable, à supposer même qu’il soit recevable, ayant été invoqué pour la première fois lors de l’audience, ne constituant pas l’ampliation d’un moyen soulevé dans la requête et ne se fondant pas sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure, il ne saurait prospérer. En effet, force est de constater que la requérante a eu la possibilité, premièrement, de présenter la déclaration faite sous serment, devant la chambre de recours, laquelle a admis la recevabilité de cet élément de preuve supplémentaire, ainsi qu’il ressort du point 33 de la décision attaquée et ce qui n’est pas contesté par la requérante, deuxièmement, de présenter des arguments relatifs à la force probante de ladite déclaration aux fins de remettre en cause l’appréciation de la division d’opposition portant sur le caractère distinctif accru de la marque antérieure et, troisièmement, de contester l’analyse de la chambre de recours sur point, de sorte qu’aucune méconnaissance dudit droit n’est établie.

76      En conséquence, le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009 doit être rejeté, ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

77      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.


2)      Viomichania mpiskoton kai eidon diatrofis E. I. Papadopoulos SA est condamnée aux dépens.

Collins

Barents

Passer

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 octobre 2019.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.