Language of document : ECLI:EU:T:2023:388

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

12 juillet 2023 (*)

« Clause compromissoire – Septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) – Frais de personnel – Remboursement des sommes versées – Éligibilité des coûts afférents aux consultants internes – Charge de la preuve »

Dans l’affaire T‑358/20,

Net Technologies Finland Oy, établie à Helsinki (Finlande), représentée par Me S. Pappas, avocat,

partie requérante,

contre

Agence exécutive européenne pour la recherche (REA), représentée par Mmes S. Payan-Lagrou et V. Canetti, en qualité d’agents, assistées de Me M. Le Berre, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. H. Kanninen (rapporteur), président, M. Jaeger et Mme M. Stancu, juges,

greffier : M. V. Di Bucci, greffier,

vu l’ordonnance du 18 août 2020, Net Technologies Finland/REA (T‑358/20 R, non publiée, EU:T:2020:369),

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

vu la décision du 28 octobre 2022 portant réouverture de la phase écrite de la procédure,

vu les questions écrites du Tribunal aux parties et leurs réponses à ces questions déposées au greffe du Tribunal les 1er décembre 2022, 6 janvier et 3 mars 2023,

vu la clôture de la phase écrite de la procédure le 31 mars 2023 ainsi que la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 272 TFUE, la requérante, Net Technologies Finland Oy, demande de constater, d’une part, que les coûts afférents aux consultants internes sont éligibles et, d’autre part, que la demande de remboursement des montants de 171 342,97 euros et de 17 134,30 euros au titre, respectivement, d’une contribution injustifiée et d’une indemnité forfaitaire est infondée.

 Antécédents du litige

2        La requérante est une société à responsabilité limitée de droit finlandais, active dans le domaine des télécommunications (conception, développement, mise en œuvre, exploitation et entretien des réseaux).

3        La convention de subvention portant la référence FP7SEC2012312484 (ci-après la « convention de subvention ») a été conclue le 30 août 2013 dans le cadre du septième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration (2007-2013) (ci-après le « septième programme-cadre »), en vue de la réalisation du projet « Inter System Interoperability for Tetra – TetraPol Networks » (« Interopérabilité des systèmes des réseaux [utilisant les normes] Tetra et Tetrapol », ci-après le « projet »), entre la société coordinatrice du consortium chargé de mettre en œuvre le projet et l’Agence exécutive européenne pour la recherche (REA).

4        La convention de subvention est entrée en vigueur le 30 août 2013. Le projet a été exécuté entre le 1er septembre 2013 et le 31 décembre 2016.

5        Le consortium chargé de la mise en œuvre du projet incluait des administrations nationales, des universités et des sociétés commerciales privées.

6        Net Technologies Etaireai Periorismenis Efthynis était l’un des membres du consortium chargé de la mise en œuvre du projet. Elle avait souscrit à la convention de subvention en tant que bénéficiaire.

7        Le 1er mai 2014, la requérante a repris les droits et obligations de Net Technologies Etaireia Periorismenis Efthynis et est ainsi devenue membre du consortium. La convention de subvention a été modifiée en ce sens.

8        Le même jour, la requérante a conclu, dans le cadre de la convention de subvention, cinq contrats de service avec des ingénieurs en télécommunications : [confidentiel] (1). La durée des contrats s’étendait du 1er mai 2014 au 31 décembre 2016.

9        Conformément à l’article 1er de ces contrats, « le co-contractant doit suivre toutes les directives relatives à la prestation de service données par la [requérante] », « [les] services sont prestés au lieu d’exécution du projet (Helsinki, Finlande) ou ailleurs selon un accord mutuel » et « le co-contractant appliquera les méthodes et la discipline de travail de la [requérante] ». Leur article 2 dispose que « le contractant fournira ses services conformément aux méthodes et procédures de la [requérante] et sous la direction du chef de projet » et que « le co-contractant conservera les relevés des heures de travail, élaborés selon les modèles de l’entreprise et validés par le chef de projet ».

10      L’article 3 desdits contrats indique le montant maximum que la requérante peut être amenée à payer à son co-contractant. En outre, cet article prévoit que la requérante paiera son co-contractant mensuellement sur la base des relevés des heures de travail validés par celui-ci.

11      Le 16 mars 2018, la REA a informé la requérante du lancement d’un audit financier concernant ses activités dans le cadre du projet. L’audit a eu lieu entre le 24 et le 26 avril 2018.

12      Le 30 janvier 2019, la REA a communiqué le projet de rapport d’audit à la requérante, lui donnant la possibilité de faire valoir ses observations dans un délai de 30 jours à compter de sa réception. Le projet prévoyait de considérer que les coûts des prestations de service de [confidentiel] n’étaient pas éligibles au titre de la convention de subvention, dès lors qu’ils constituaient une sous-traitance qui portait sur des parties essentielles du projet et qu’aucun recours à la sous-traitance n’avait été prévu à l’annexe I de la convention de subvention. En revanche, les coûts des prestations de service de [confidentiel], également considérés comme des coûts de sous-traitance, seraient éligibles, dès lors que sa contribution au projet devait être considérée comme mineure.

13      Par lettre du 28 février 2019, la requérante a présenté ses observations sur le projet de rapport d’audit. Elle a notamment contesté les conclusions du projet relatives à l’inéligibilité des coûts afférents aux prestations des quatre personnes mentionnées au point 12 ci-dessus.

14      Par lettre du 11 avril 2019, la REA a répondu aux arguments de la requérante et lui a transmis le rapport d’audit final.

15      Dans le rapport d’audit final, la REA a considéré que les coûts de la prestation de service de [confidentiel] étaient éligibles au titre de la convention de subvention en tant que sous-traitance, au motif que sa contribution au projet a été jugée mineure. Elle a, en revanche, considéré que les coûts des prestations des quatre autres consultants (soit 184 642,84 euros) étaient inéligibles, au motif que les critères relatifs à l’équivalence entre les coûts des consultants et les coûts de personnel, tels que définis dans le guide sur les questions financières liées aux actions indirectes du septième programme-cadre (ci-après le « guide FP7 »), n’étaient pas satisfaits. La REA a considéré que ces coûts équivalaient à une sous-traitance de fait étant donné que les activités en cause ne figuraient pas à l’annexe I de la convention de subvention en tant qu’activités de sous-traitance approuvées.

16      Par lettre du 2 mai 2019, la requérante a accusé réception du rapport d’audit final et contesté les conclusions de ce rapport concernant l’inéligibilité des coûts afférents aux contrats de service des quatre consultants.

17      Par lettre du 24 octobre 2019, la REA a répondu à la requérante, en lui confirmant les conclusions du rapport d’audit final.

18      Par lettre du 18 novembre 2019, la requérante a de nouveau contesté les conclusions du rapport d’audit final.

19      Le 21 novembre 2019, la REA a transmis à la requérante une lettre de préinformation faisant part de son intention de récupérer auprès d’elle 171 342,97 euros au titre d’une contribution injustifiée et 17 134,30 euros au titre de dommages-intérêts forfaitaires.

20      Par lettre du 23 décembre 2019, la REA a accusé réception de la lettre de la requérante du 18 novembre 2019 et a répondu à ses arguments, soit en renvoyant aux précisions qu’elle avait déjà apportées dans sa lettre du 24 octobre 2019, soit en apportant des précisions complémentaires.

21      Le 8 avril 2020, la REA a adressé à la requérante une nouvelle lettre de préinformation, au contenu similaire à celle envoyée le 21 novembre 2019 et lui a accordé un délai de quinze jours pour présenter de dernières observations.

22      Le 7 mai 2020, la REA a émis la note de débit no 3242005825 concernant le remboursement du montant de 171 342,97 euros au titre d’une contribution injustifiée et la note de débit no 3242005872 concernant le remboursement du montant de 17 134,30 euros au titre d’une indemnité forfaitaire (ci-après les « notes de débit contestées »), en fixant l’échéance pour le paiement au 22 juin 2020.

 Conclusions des parties

23      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer que la REA a manqué à ses obligations contractuelles en vertu de la convention de subvention ;

–        déclarer que les demandes formulées dans les notes de débit contestées sont infondées ;

–        déclarer que les coûts afférents aux consultants internes sont éligibles ;

–        condamner la REA aux dépens.

24      La REA conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens de l’instance, y compris ceux exposés dans le cadre de la procédure en référé.

 En droit

 Sur le droit applicable

25      Saisi dans le cadre d’une clause compromissoire en vertu de l’article 272 TFUE, le Tribunal doit trancher le litige sur la base du droit matériel applicable au contrat (voir arrêt du 2 mars 2022, VeriGraft/Eismea, T‑688/19, EU:T:2022:112, point 55 et jurisprudence citée).

26      En l’occurrence, conformément à l’article 9, premier alinéa, de la convention de subvention, celle-ci est régie par ses propres stipulations, par les actes du droit de l’Union européenne relatifs au septième programme-cadre, par le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1), par le règlement délégué (UE) no 1268/2012 de la Commission, du 29 octobre 2012, relatif aux règles d’application du règlement no 966/2012 (JO 2012, L 362, p. 1), par les autres dispositions du droit de l’Union et, à titre subsidiaire, par le droit belge.

27      En tant qu’annexe à la convention de subvention, les conditions générales de cette convention en font partie intégrante (ci-après les « conditions générales »). Conformément à l’article II.2, paragraphe 1, des conditions générales, dans les échanges avec la REA et la Commission européenne, les membres du consortium sont représentés par le coordinateur du consortium, sauf les exceptions expressément prévues par la convention de subvention.

28      L’article II.7 des conditions générales stipule ce qui suit :

« 1. Un sous-traitant est une tierce partie qui a conclu un accord commercial avec un ou plusieurs bénéficiaires en vue d’exécuter une partie des travaux du projet sans la supervision directe du bénéficiaire et sans lien de subordination.

[…]

2. Lorsqu’il est nécessaire pour les bénéficiaires de sous-traiter certains éléments des travaux à effectuer, les conditions suivantes doivent être respectées :

–        les contrats de sous-traitance ne doivent porter que sur l’exécution d’une partie limitée du projet ;

–        le recours à la sous-traitance doit être dûment justifié à l’annexe I eu égard à la nature du projet et à ce qui est nécessaire à sa mise en œuvre ;

[…] »

29      L’article II.14, paragraphe 1, des conditions générales, intitulé « Coûts éligibles du projet », prévoit ce qui suit :

« 1. Les coûts exposés pour l’exécution du projet doivent remplir les conditions suivantes pour être éligibles :

a)      ils doivent être réels ;

b)      ils doivent être engagés par le bénéficiaire ;

[...]

d)      ils doivent être déterminés conformément aux principes et pratiques usuels de comptabilité et de gestion du bénéficiaire [...] Les procédures internes de comptabilité et d’audit du bénéficiaire doivent permettre d’établir un rapprochement direct entre les coûts et recettes déclarés au titre du projet et les fiches financières et pièces justificatives correspondantes ;

d)      ils doivent être utilisés dans le seul but de réaliser les objectifs du projet et d’obtenir les résultats prévus, dans le respect des principes d’économie, d’efficience et d’efficacité ;

[...] »

30      L’article II.15, paragraphe 1, des conditions générales, relatif aux coûts directs, dispose que :

« 1. Les coûts directs sont tous les coûts éligibles qui peuvent être attribués directement au projet et sont définis en tant que tels par le bénéficiaire, conformément à ses principes comptables et à ses règles internes habituelles.

Pour ce qui est des frais de personnel, seuls peuvent être imputés les coûts des heures effectivement ouvrées au titre du projet par les personnes effectuant directement les travaux. Celles-ci doivent :

–        être directement engagées par le bénéficiaire conformément à sa législation nationale,

–        travailler sous la seule supervision technique et responsabilité du bénéficiaire, et

–        être rémunérées conformément aux pratiques habituelles du bénéficiaire. »

31      L’article II.22 des conditions générales prévoit des dispositions sur les audits et contrôles financiers.

32      L’article II.24 des conditions générales concerne l’indemnité forfaitaire. Cet article stipule, à son paragraphe 3, que « la REA notifie sa demande de paiement par lettre recommandée avec accusé de réception au bénéficiaire qu’elle juge redevable d’une indemnité forfaitaire » et que « [l]e bénéficiaire dispose d’un délai de trente jours pour répondre à la demande de l’Union ».

 Sur l’interprétation des chefs de conclusions de la requérante

33      Par son premier chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal de déclarer que la REA a manqué à ses obligations contractuelles en vertu de la convention de subvention. Or, au vu du contenu de la requête, ce chef de conclusions doit être interprété comme tendant, en substance, aux mêmes fins que les deuxième et troisième chefs de conclusions présentés par la requérante. Dès lors, il n’y a pas lieu de statuer sur le premier chef de conclusions dans la mesure où il fait double emploi avec les deuxième et troisième chefs de conclusions présentés par la requérante.

 Sur les moyens

34      À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, de la violation des règles relatives à l’éligibilité des coûts, le deuxième, de l’abus de droit et d’une exécution de la convention contraire au principe de bonne foi et, le troisième, de la violation du principe de proportionnalité.

35      Par son premier moyen, la requérante soutient en substance que la REA a interprété et appliqué de manière erronée les dispositions applicables à la convention de subvention, dès lors qu’elle a considéré que les coûts afférents à quatre consultants internes ne respectaient pas les critères d’éligibilité prévus par la convention de subvention et devaient, par conséquent, donner lieu à des demandes de remboursement.

36      Ce moyen se décompose, en substance, en trois branches. La première branche porte sur la pertinence, en l’espèce, des dispositions du guide FP7. La deuxième branche porte sur la violation du principe du contradictoire. La troisième branche porte sur l’éligibilité des coûts afférents aux quatre consultants internes (ci-après également les « coûts litigieux »).

 Sur la première branche du premier moyen

37      Dans la première branche du premier moyen, la requérante reproche à la REA de s’être fondée exclusivement sur les dispositions du guide FP7 et notamment sur les critères d’équivalence entre les frais de consultance et les frais de personnel qu’il énumère pour conclure à l’inéligibilité des coûts litigieux.

38      La requérante estime que les critères appliqués par la REA ne sont pas prévus par les conditions générales, notamment leurs articles II.14 et II.15 relatifs à l’éligibilité des coûts. Or, le guide FP7 serait un instrument simplement interprétatif. Partant, en introduisant des conditions supplémentaires, qui ne sont pas prévues dans les conditions générales, ce guide aurait limité illégalement la portée des dispositions des articles II.14 et II.15 desdites conditions, ainsi que des dispositions du règlement no 966/2012. La requérante fait remarquer, en outre, que ledit guide n’est pas mentionné par l’article 9 de la convention de subvention relative au droit applicable.

39      Enfin, la requérante soutient que, en tout état de cause, le guide FP7 n’a été porté à son attention que postérieurement à l’achèvement du projet.

40      La REA conteste s’être uniquement fondée sur le guide FP7 pour qualifier d’inéligibles les coûts litigieux. Elle se serait appuyée sur ce guide pour interpréter l’article II.15 des conditions générales. Plus particulièrement, la REA précise que, en ce qui concerne les frais de consultance, les critères prévus par ledit guide servent à déterminer si certains coûts qui ne sont pas explicitement couverts par les conditions prévues à l’article II.15 des conditions générales peuvent néanmoins être déclarés éligibles.

41      La REA souligne en outre que la requérante n’a, à aucun moment, contesté l’existence ou la pertinence du guide FP7. Selon la REA, ledit guide avait déjà été porté à la connaissance de la requérante en 2011 et en 2012, par l’intermédiaire de différents documents qui y faisaient référence, donc bien avant l’entrée en vigueur de la convention de subvention.

42      Il convient d’examiner, en premier lieu, la valeur juridique du guide FP7 et, en second lieu, la question de savoir si le guide FP7 a été porté à la connaissance de la requérante.

–       Sur la valeur juridique du guide FP7

43      Il ressort de l’article 9, premier alinéa, de la convention de subvention, que celle-ci ne fait pas expressément référence au guide FP7 en tant que source du droit applicable. De manière générale, il y a lieu d’observer que le guide FP7 n’est pas mentionné dans la convention de subvention ni dans les conditions générales.

44      Il convient de préciser que le guide FP7 ne peut pas être considéré comme un acte de l’Union relatif au septième programme-cadre au sens de l’article 9, premier alinéa, de la convention de subvention. À cet égard, le guide indique que son objectif consiste à aider les participants à comprendre et à interpréter les dispositions des conventions de subvention et qu’il ne peut pas déroger aux textes légaux. Il est encore précisé que le guide reflète l’interprétation faite par la Commission des stipulations des conventions de subvention et que seules les dispositions de celles-ci sont contraignantes.

45      Il s’ensuit que le guide FP7 n’est qu’un instrument d’orientation pour des projets sélectionnés en vue d’un financement, qui ne saurait déroger en aucun cas aux conditions établies dans les conditions générales et plus particulièrement aux exigences découlant du libellé de leurs articles II.14 et II.15 (voir, par analogie, arrêt du 21 décembre 2021, EKETA/Commission, T‑177/17, non publié, EU:T:2021:929, point 139).

46      Il n’en demeure pas moins que, bien qu’il n’ait pas une valeur contraignante, le guide FP7 relève du cadre dans lequel la convention de subvention a été conclue, dès lors qu’il est destiné à fournir, notamment, des exemples concrets ainsi que des suggestions relatives aux bonnes pratiques financières à appliquer lors de la mise en œuvre des projets financés dans le cadre du septième programme-cadre. En vertu du principe d’exécution de bonne foi des contrats, les indications fournies dans le guide FP7 doivent ainsi être prises en compte (voir, par analogie, arrêts du 10 mars 2021, Ayuntamiento de Quart de Poblet/Commission, T‑539/18, non publié, EU:T:2021:123, point 57, et du 20 octobre 2021, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission, T‑191/16, non publié, EU:T:2021:707, point 90 et jurisprudence citée).

–       Sur la question de savoir si le guide FP7 a été porté à la connaissance de la requérante

47      La requérante allègue qu’elle n’a été avisée de l’existence et du contenu du guide FP7 qu’au stade de l’audit, plus précisément le 30 janvier 2019 quand elle a reçu le projet de rapport d’audit. Il convient de comprendre cette allégation en ce sens que le guide FP7 ne lui serait pas opposable, dans la mesure où elle n’en avait pas connaissance lors de l’exécution du projet.

48      Il ressort du dossier que, par lettre du 16 juillet 2012, la REA a indiqué au représentant de la proposition qui, à la suite de la signature de la convention de subvention, est devenu le coordinateur du consortium, les documents nécessaires en vue de la préparation de la convention de subvention, en lui fournissant un lien Internet renvoyant auxdits documents. Parmi ces documents figurait le guide FP7. En outre, sous la rubrique « Informations clés pour les négociations », il était fait référence au point B.1 du guide FP7 en ce qui concerne l’article II.15 des conditions générales, relatif à l’identification des coûts directs et indirects. Enfin, la lettre d’invitation se référait aux notes d’orientation des négociations, qui citaient le guide FP7 en tant que document à consulter durant les négociations. Lesdites notes faisaient, de surcroît, plusieurs références à ce guide en ce qui concerne les questions spécifiques liées, notamment, aux coûts directs et indirects ainsi qu’aux frais de sous-traitance.

49      En outre, même si cette invitation n’a été adressée qu’au coordinateur du consortium, la requérante doit être regardée comme ayant été informée de la pertinence du guide FP7 par le biais de l’invitation aux négociations.

50      En premier lieu, il importe de relever que l’invitation aux négociations comportait une liste des participants au projet sur laquelle figurait le nom du prédécesseur en droit de la requérante. À cet égard, l’invitation demandait au représentant de la proposition d’informer les autres participants de la situation en cause. Surtout, conformément à l’article 1er, paragraphe 1, de la convention de subvention, le coordinateur du consortium était tenu de s’assurer que chaque entité juridique adhérant à cette convention en tant que bénéficiaire assumait les droits et obligations établis par la convention de subvention à compter de la date de son entrée en vigueur.

51      En second lieu, conformément à l’article II.2, paragraphe 1, des conditions générales, dans les échanges avec la REA et la Commission, les membres du consortium sont représentés par le coordinateur du consortium, sauf exceptions expressément prévues par la convention de subvention.

52      Dès lors, à supposer même que la requérante n’ait pas été informée par le coordinateur du consortium de la pertinence du guide FP7, cette question relèverait des rapports entre les participants au consortium et du contrat de consortium conclu à cette fin, de sorte que cette circonstance est dénuée de pertinence aux fins de la présente affaire.

53      Au regard de ce qui précède, il convient de conclure que le guide FP7 a été dûment porté à l’attention de la requérante avant la signature de la convention de subvention.

54      La première branche du premier moyen doit, par conséquent, être rejetée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner l’argument de la REA selon lequel l’appel à propositions au titre du septième programme-cadre mentionnait déjà le guide FP7.

 Sur la deuxième branche du premier moyen

55      La requérante allègue que la REA a violé le principe du contradictoire, tel qu’il découle de l’article 133 du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1), et de l’article II.24 des conditions générales, dès lors qu’elle n’a pas été en mesure de faire valoir ses observations avant l’émission des notes de débit contestées. Plus particulièrement, elle reproche à la REA de ne pas reconnaître avoir reçu les observations qu’elle a tentées, à plusieurs reprises, de lui faire parvenir entre le 17 décembre 2019 et le 24 avril 2020, et de lui avoir adressé, le 8 avril 2020, une seconde lettre de préinformation ne lui octroyant qu’un délai de quinze jours pour présenter ses observations.

56      La REA conteste cette argumentation.

57      L’article II.24, paragraphe 3, des conditions générales prévoit que, en cas de demande d’une indemnité forfaitaire, la REA notifie cette demande par lettre recommandée avec accusé de réception au bénéficiaire, qui dispose d’un délai de 30 jours pour y répondre.

58      En l’occurrence, le 21 novembre 2019, la REA a transmis à la requérante une lettre de préinformation lui faisant part de son intention de récupérer auprès d’elle 171 342,97 euros au titre d’une contribution injustifiée et 17 134,30 euros au titre d’une indemnité forfaitaire, et lui précisant les modalités du recouvrement. Elle a précisé que la requérante disposait de la possibilité de présenter ses observations dans les 30 jours à compter de la réception de cette lettre.

59      La requérante soutient avoir transmis, par courriel, ses observations à la REA le 17 décembre 2019.

60      Il est constant entre les parties que, entre les 30 décembre 2019 et 30 janvier 2020, elles ont eu un échange de courriels au sujet de l’envoi et de la réception des observations de la requérante. Ainsi, en réaction au courriel de la requérante du 30 décembre 2019, qui faisait référence à ses observations du 17 décembre 2019, la REA a répondu, le 8 janvier 2020, qu’il semblait qu’elle ne les avait pas reçues et a demandé à la requérante de les lui envoyer. Le 22 janvier 2020, la REA a invité à nouveau la requérante à lui faire parvenir ses observations. Dans sa réponse du même jour, la requérante a indiqué qu’elle avait procédé à l’envoi électronique de ses observations le 9 janvier 2020, mais qu’elle allait les envoyer à nouveau par un autre courriel. Le 29 janvier 2020, la REA a demandé à la requérante de transmettre sa réponse du 9 janvier 2020. Enfin, le même jour, la requérante a répondu qu’elle avait déjà envoyé les observations avec des pièces jointes par deux courriels et a indiqué qu’elle allait essayer à nouveau le lendemain. Le 30 janvier 2020, la REA a rappelé à la requérante qu’elle n’avait pas reçu ses courriels et a demandé à celle-ci de joindre ses courriels à sa réponse.

61      La requérante a produit devant le Tribunal le courriel daté du 17 décembre 2019 par lequel elle aurait envoyé ses observations à la REA. Ce courriel comprend, en pièces jointes, les observations de la requérante ainsi que ses annexes. En outre, la requérante a produit, en annexes à la requête, ses courriels des 9 et 30 janvier 2020 par lesquels elle aurait envoyé à nouveau ses observations du 17 décembre 2019. Le courriel du 30 janvier 2020 indique que la requérante aurait également transmis ses observations par un courriel du 22 janvier 2020.

62      Le 8 avril 2020, la REA a adressé à la requérante une nouvelle lettre de préinformation, au contenu identique à celle envoyée le 21 novembre 2019 quant à la demande de remboursement et d’indemnité forfaitaire. Cette lettre a fixé un délai de quinze jours pour présenter des observations. Ladite lettre précisait notamment que la REA avait pris la décision de poursuivre la mise en œuvre des conclusions de l’audit, aucun nouvel élément n’ayant été avancé par la requérante. La REA a souligné n’avoir reçu aucune réponse, ni par courrier postal ni par courrier électronique, à son courriel du 30 janvier 2020 qui invitait la requérante à envoyer la lettre accompagnée de ses observations qu’elle prétendait avoir envoyée le 17 décembre 2019.

63      La requérante allègue avoir présenté, le 24 avril 2020, ses observations par courriel, par l’intermédiaire du cabinet d’avocats qui la représente. À cet égard, elle produit devant le Tribunal ledit courriel qui indique contenir, en pièces jointes, les observations datées du 17 décembre 2019, des annexes et des courriels. À nouveau, la REA conteste avoir reçu ce courriel et produit, à cette fin, une attestation des services informatiques de la Commission.

64      Il ressort des éléments rappelés ci-dessus que la requérante était bien avisée que, selon la REA, celle-ci n’avait pas reçu ses observations datées du 17 décembre 2019. De surcroît, la REA a, plusieurs fois, demandé à la requérante de les lui envoyer.

65      Or, même si la requérante a cherché à diversifier, au sein de la REA, les destinataires de ses courriels, elle ne semble pas s’être inquiétée des raisons qui auraient pu expliquer les difficultés rencontrées dans sa communication électronique et n’a pas eu recours à d’autres moyens de communication pour l’envoi de ses observations, tels qu’un envoi par porteur, par voie postale ou par télécopie.

66      À cet égard, il convient de constater que l’envoi d’un courriel ne garantit pas sa réception effective par son destinataire. En effet, un courriel peut ne pas lui parvenir pour des raisons techniques. Même si l’expéditeur ne reçoit pas de message de type « non-réception », « non délivré au destinataire » ou d’un type similaire, cela ne signifie pas nécessairement que le courriel est effectivement parvenu à son destinataire (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2008, Sogelma/AER, T‑411/06, EU:T:2008:419, point 77). En outre, si l’expéditeur d’un courriel qui ne reçoit aucune confirmation de la réception ne donne aucune suite, il n’est normalement pas en mesure de prouver que ce courriel a été reçu et, le cas échéant, à quelle date (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2008, Sogelma/AER, T‑411/06, EU:T:2008:419, point 78).

67      Or, en l’espèce, la requérante ne produit aucun élément visant à établir que la REA a effectivement reçu ses observations ni, à tout le moins, qu’elle aurait pris des mesures appropriées afin de s’assurer de la bonne réception, par la REA, de ses observations.

68      Par ailleurs, il convient d’observer que la REA a fait preuve de diligence en laissant à diverses reprises la possibilité à la requérante, alors que le délai initial de 30 jours était déjà expiré, de remédier à la situation en envoyant à nouveau ses observations. Cette diligence est également démontrée par l’envoi de la seconde lettre de préinformation.

69      À la lumière de tout ce qui précède, il convient de conclure que la REA n’a pas violé le principe du contradictoire, tel qu’il découle de l’article II.24 des conditions générales. À cet égard, la circonstance que la seconde lettre de préinformation n’a accordé qu’un délai de 15 jours pour envoyer les observations est sans pertinence.

70      S’agissant de l’article 133 du règlement 2018/1046, invoqué par la requérante, il y a lieu de relever que son premier paragraphe dispose que, « [a]vant d’adopter toute mesure portant atteinte aux droits d’un participant ou d’un destinataire, l’ordonnateur compétent s’assure que le participant ou le destinataire a été mis en mesure de présenter ses observations ». Ainsi, cette disposition n’apporte aucun élément nouveau pour l’examen de la présente branche du premier moyen, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur son applicabilité ratione temporis.

71      Partant, la deuxième branche du premier moyen doit être rejetée.

 Sur la troisième branche du premier moyen

72      La requérante soutient que le premier des trois critères établis par l’article II.15 des conditions générales, à savoir celui d’être directement engagé par le bénéficiaire conformément à sa législation nationale, ne peut pas être appliqué aux consultants internes. Les deux autres critères, à savoir le fait de travailler sous la seule supervision technique et la responsabilité du bénéficiaire et d’être rémunéré conformément aux pratiques normales de ce dernier, étant remplis en l’espèce, cela suffirait à considérer que les coûts litigieux sont éligibles.

73      La requérante fait également valoir que le rapport d’audit final se réfère exclusivement aux critères prévus dans le guide FP7 et ne fait pas référence aux dispositions des articles II.14 et II.15 des conditions générales. Elle ajoute que, ce faisant, la REA semble chercher à appliquer cumulativement les exigences des articles II.7 et II.15 des conditions générales concernant les coûts de sous-traitance et les frais de personnel.

74      La REA conteste les arguments de la requérante.

75      Il convient de relever d’abord que, en vertu de la convention de subvention, les frais de personnel se distinguent des coûts de sous-traitance.

76      En effet, l’article II.15, paragraphe 1, des conditions générales stipule, au sujet des frais de personnel, que seuls les coûts des heures de travail effectuées par les personnes directement chargées des travaux au titre du projet peuvent être imputés à condition que ces personnes, premièrement, soient directement engagées par le bénéficiaire conformément à sa législation nationale, deuxièmement, travaillent sous les seules supervision technique et responsabilité du bénéficiaire et, troisièmement, soient rémunérées conformément aux pratiques normales du bénéficiaire.

77      En revanche, aux termes de l’article II.7, paragraphe 1, première phrase, des conditions générales, un sous-traitant est un tiers ayant conclu un accord commercial avec un ou plusieurs bénéficiaires en vue d’exécuter une partie des travaux du projet sans la supervision directe du bénéficiaire et sans lien de subordination.

78      Selon le paragraphe 2 de l’article II.7 des conditions générales, le recours à la sous-traitance doit être dûment justifié à l’annexe I de la convention de subvention.

79      En l’espèce, premièrement, la requérante ne conteste pas la conclusion du rapport d’audit final selon laquelle, en vertu de l’article II.7 des conditions générales, les coûts litigieux ne pouvaient pas être considérés comme éligibles à titre de sous-traitance, dans la mesure où une telle sous-traitance n’avait pas été prévue dans l’annexe I de la convention de subvention.

80      Deuxièmement, en ce qui concerne les frais de personnel, la requérante relève que la première condition prévue par l’article II.15, paragraphe 1, des conditions générales ne saurait être remplie, mais suggère néanmoins que l’éligibilité des coûts litigieux en tant que frais de personnel peut être examinée à la lumière des deux seules autres conditions prévues à cet article.

81      À cet égard, il convient de souligner que le guide FP7 interprète les deux autres conditions prévues à l’article II.15 des conditions générales en précisant que des frais de consultants peuvent être considérés comme équivalents à des frais de personnel et, dès lors, éligibles si sept critères cumulatifs d’équivalence sont remplis.

82      Dès lors, si le critère de recrutement direct n’est pas rempli, seule l’application des critères d’équivalence prévus par le guide FP7 pourrait permettre de considérer les coûts litigieux comme assimilés aux coûts de personnel.

83      En effet, il ressort du dossier que l’analyse de la REA quant à l’éligibilité des coûts litigieux a été réalisée en deux phases. Étant donné que la requérante les a qualifiés de frais de personnel, la REA a d’abord examiné le bien-fondé de cette qualification au vu des sept critères d’équivalence prévus par le guide FP7. Tous ces critères n’étant pas remplis selon la REA, elle a ensuite vérifié si les coûts litigieux pouvaient être considérés comme des frais de sous-traitance éligibles au sens de l’article II.7 des conditions générales.

84      Dès lors, il convient d’examiner le bien-fondé des motifs de la REA visant à considérer que les coûts litigieux ne remplissent pas tous les critères qui sont prévus par le guide FP7 pour considérer les frais de consultance comme équivalents à des frais de personnel.

85      Il ressort du rapport d’audit final et des écritures de la REA devant le Tribunal que cette dernière a estimé que les coûts litigieux ne remplissaient pas deux des sept critères cumulatifs. D’après le premier de ces deux critères, la personne physique doit travailler dans les locaux du bénéficiaire, sauf dans des cas spécifiques où le recours au télétravail a fait l’objet d’un accord entre les deux parties et à condition que cette pratique s’opère en pleine conformité avec les dispositions concernant le télétravail et les instructions données par le bénéficiaire. Selon le second critère, la rémunération est fondée sur les heures de travail plutôt que sur la livraison de réalisations ou de produits spécifiques et doit être inscrite dans les comptes du bénéficiaire.

86      Plus précisément, selon le rapport d’audit final, le premier de ces deux critères n’était pas rempli pour aucun des quatre consultants en cause (voir points 12 et 15 ci-dessus) alors que le second des deux critères n’était pas rempli pour deux d’entre eux [confidentiel].

87      S’agissant du premier critère, la requérante ne conteste pas que la personne physique doit travailler dans les locaux du bénéficiaire, sauf dans des cas spécifiques où la possibilité de recourir au télétravail a fait l’objet d’un accord entre les deux parties et à condition que cette pratique s’opère en pleine conformité avec les dispositions concernant le télétravail et les instructions données par le bénéficiaire. La requérante avance toutefois que, dans un environnement de travail mondialisé moderne, qui permet le travail à distance, l’exigence de travailler sur place semble beaucoup trop restrictive, dans la mesure où le télétravail peut être aussi efficace que le travail sur site.

88      En outre, la requérante soutient que plusieurs autres éléments plaident en faveur de la constatation selon laquelle les consultants internes en cause ont effectivement travaillé sous ses instructions et sa surveillance étroite. Dans ce cadre, elle produit les contrats de service conclus avec les consultants, qui prévoient qu’ils suivent toute instruction de l’entreprise concernant l’exécution des services et fournissent leurs services sous la direction complète du bénéficiaire, ainsi que certains courriels qu’elle a échangés avec les consultants, qui témoigneraient de la surveillance qu’elle a exercée et des instructions qu’elle leur a données. Elle invoque également le fait que les consultants disposaient d’une adresse électronique au nom de domaine de la société bénéficiaire, que certains d’entre eux mentionnaient, dans leur signature électronique, le site et les coordonnées de la bénéficiaire et que leur nom apparaît dans les éléments livrables du projet.

89      La REA fait valoir qu’aucune preuve ne permet d’établir qu’une quelconque partie du travail des consultants a été réalisée dans les locaux de la requérante à Helsinki. À cet égard, elle souligne également qu’aucune preuve de la conclusion de conventions de télétravail n’a été rapportée, alors qu’il ressort de l’argumentation de la requérante que les consultants ont largement recouru au télétravail.

90      En outre, la REA fait valoir que la requérante ne fournit pas d’indication pertinente afin d’étayer son allégation selon laquelle les consultants ont travaillé sous la supervision étroite du bénéficiaire.

91      Il ressort du rapport d’audit final que la REA a considéré que le critère selon lequel « la personne physique doit travailler dans les locaux du bénéficiaire, sauf dans des cas spécifiques où le recours au télétravail a fait l’objet d’un accord entre les deux parties et à condition que cette pratique s’opère en pleine conformité avec les dispositions concernant le télétravail et les instructions données par le bénéficiaire » n’était pas rempli pour les quatre consultants. À cet égard, le rapport d’audit final souligne l’importance de ce critère comme preuve de la tâche de surveillance qu’exerce le bénéficiaire sur les consultants internes. Il y a toutefois lieu de relever que la REA n’a pas soutenu que la requérante n’avait pas respecté le critère distinct, prévu par le guide FP7, selon lequel la personne physique doit travailler sous les instructions du bénéficiaire.

92      Or, selon la jurisprudence, le guide FP7 ne se limite pas, en établissant l’exigence de travailler dans les locaux du bénéficiaire, à manifester l’interprétation correcte de l’article II.15 des conditions générales, mais il ajoute formellement une exigence additionnelle que cette disposition ne prévoit pas (voir, en ce sens, arrêt du 17 janvier 2019, Aristoteleio Panepistimio Thessalonikis/ERCEA, T‑348/16 OP, non publié, EU:T:2019:14, points 105 et 106). Ainsi qu’il a été rappelé au point 45 ci-dessus, le guide FP7 ne saurait déroger aux conditions établies dans les conditions générales et plus particulièrement aux exigences découlant du libellé de leurs articles II.14 et II.15.

93      Il s’ensuit que c’est à tort que la REA a considéré que les coûts litigieux ne pouvaient pas être déclarés éligibles au motif que le critère relatif au travail dans les locaux du bénéficiaire n’était pas rempli.

94      Quant au critère selon lequel « la rémunération est fondée sur les heures de travail plutôt que sur la livraison de réalisations ou produits spécifiques et doit être inscrite dans les comptes du bénéficiaire », dans un premier temps, le rapport d’audit final expose des considérations au sujet des cinq consultants cités au point 8 ci-dessus. Premièrement, il est constaté qu’aucun des contrats de service ne spécifiait les heures de travail. Deuxièmement, le rapport d’audit final constate que les consultants ont enregistré leurs heures de travail. Selon ce rapport, cette circonstance seule ne permet toutefois pas de conclure, de façon décisive, que la rémunération était fondée sur les heures enregistrées dans les relevés. Le rapport ajoute que les taux horaires représentaient simplement les quotients de la rémunération approximative déclarée dans les contrats ou la somme des factures d’un consultant et de ses heures de travail telles qu’enregistrées dans les relevés. Dans un second temps, il est relevé que la multiplication des heures consacrées au projet par ce taux horaire donnait pour résultat la rémunération contractuelle approximative ou les montants facturés.

95      Il ressort du rapport d’audit final que ces considérations n’ont pas conduit, en elles-mêmes, la REA à constater que le critère en question n’est pas rempli. En effet, le rapport d’audit final indique que ce critère n’est pas rempli pour trois des cinq consultants cités au point 8 ci-dessus, dont [confidentiel], au motif que « les services ont été facturés au bénéficiaire » et que « [c]ela équivaut à de la sous-traitance de fait, dans le cadre de laquelle des paiements sont réalisés contre la fourniture de travaux contractuels (à savoir les factures), plutôt qu’à des contrats de travail dans le cadre desquels les paiements sont effectués sur la base de la réalisation de tâches spécifiques ».

96      La requérante estime que le critère selon lequel la rémunération doit être effectuée sur la base des heures de travail est satisfait en l’espèce.

97      En particulier, elle estime que la seule émission de factures par les consultants internes ne peut mener à la conclusion que ceux-ci n’ont pas été rémunérés en fonction de leurs heures de travail, mais à la suite de l’exécution de travaux contractuels. La requérante souligne encore que l’émission de factures est normale pour des travailleurs autonomes ayant conclu des contrats de service et non des contrats de travail.

98      La REA conteste les arguments de la requérante en se référant aux explications fournies dans le rapport d’audit final. Elle ajoute que les relevés de présence fournis par la requérante montrent que la plupart des consultants avaient enregistré une activité à plein temps pendant quelques mois, suivie de plusieurs mois d’inactivité complète sur le projet, ce qui confirmerait que les activités des consultants étaient axées sur la réalisation de travaux spécifiques. Quant aux factures, la REA observe qu’elles devraient être considérées comme une preuve que les consultants ont été rémunérés en fonction de l’exécution de travaux plutôt qu’en fonction de leurs heures de travail.

99      À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que, dans le cadre d’une convention qui contient une clause compromissoire au sens de l’article 272 TFUE, il incombe à la partie qui a déclaré les coûts à la REA pour l’attribution d’une contribution financière de l’Union d’apporter la preuve que lesdits coûts satisfont aux conditions financières des conventions de subvention (voir, en ce sens, arrêt du 27 avril 2022, Sieć Badawcza Łukasiewicz – Port Polski Ośrodek Rozwoju Technologii/Commission, T‑4/20, EU:T:2022:242, point 114 et jurisprudence citée).

100    Quant à la charge de la preuve, la REA n’ayant pas été directement témoin de l’exécution de ses tâches par la requérante, elle ne dispose pas d’autres moyens, pour contrôler l’exactitude des frais de personnel déclarés par celle-ci, que ceux devant résulter, notamment, de la production de relevés de temps, lesquels doivent, de ce fait, être fiables (voir arrêt du 21 décembre 2021, Datax/REA, T‑381/20, non publié, EU:T:2021:932, point 68 et jurisprudence citée).

101    Ce n’est que dans l’hypothèse où la partie requérante apporte des relevés de frais et d’autres renseignements pertinents qu’il incombe à la REA de démontrer qu’il y avait lieu d’écarter les dépenses litigieuses, en justifiant leur rejet notamment parce que ces relevés de frais ne sont pas exacts ou crédibles (voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2021, Ayuntamiento de Quart de Poblet/Commission, T‑539/18, non publié, EU:T:2021:123, point 64, et du 14 avril 2021, SGI Studio Galli Ingegneria/Commission, T‑285/19, non publié, EU:T:2021:190, point 50).

102    Ainsi, lorsque la REA présente, sur la base de constatations reprises dans un rapport d’audit, des indices concrets de l’existence d’un risque que le temps de travail déclaré ne remplisse pas les conditions d’éligibilité, l’inéligibilité est présumée et il appartient au co-contractant de démontrer, par des éléments probants, que les conditions d’éligibilité ont, au contraire, bien été respectées (voir, en ce sens, arrêts du 10 mars 2021, Ayuntamiento de Quart de Poblet/Commission, T‑539/18, non publié, EU:T:2021:123, point 65, et du 14 avril 2021, SGI Studio Galli Ingegneria/Commission, T‑285/19, non publié, EU:T:2021:190, point 51).

103    Un rapport d’audit doit, à cet égard, être analysé comme un élément de preuve justifiant l’inéligibilité des dépenses (arrêt du 14 avril 2021, SGI Studio Galli Ingegneria/Commission, T‑285/19, non publié, EU:T:2021:190, point 51).

104    Enfin, il ressort de la jurisprudence que le non-respect de l’obligation de présenter des relevés de temps de travail fiables pour justifier les coûts de personnel déclarés constitue un motif suffisant pour rejeter l’ensemble de ces coûts (voir arrêt du 27 avril 2022, Sieć Badawcza Łukasiewicz – Port Polski Ośrodek Rozwoju Technologii/Commission, T‑4/20, EU:T:2022:242, point 116 et jurisprudence citée).

105    C’est à la lumière de ces observations qu’il convient d’examiner l’argumentation des parties.

106    Il n’est pas contesté que des relevés d’heures ont été produits par la requérante pour les quatre consultants dont les coûts ont été déclarés inéligibles par la REA. Comme relevé au point 94 ci-dessus, la REA a exposé, dans le rapport d’audit final, certaines considérations pour mettre en doute la fiabilité de ces relevés d’heures, mais n’a toutefois pas considéré qu’elles établissaient, en elles-mêmes, que le critère en question n’était pas rempli.

107    Selon le rapport d’audit, l’élément déterminant, qui ne concernait que deux des quatre consultants, a été l’émission de factures pour leurs services. Cette circonstance démontrerait que les paiements ont été effectués sur la base de services fournis plutôt qu’en fonction des heures de travail. Or, comme la requérante le soutient à juste titre, l’émission de factures ne constitue pas une pratique anormale dans le cas de travailleurs autonomes, qui ont conclu des contrats de service et non des contrats de travail. À cet égard, le guide FP7 prévoit expressément que les frais de consultance peuvent être considérés comme des frais de personnel même si les consultants sont des travailleurs indépendants ou s’ils sont employés par un tiers. Partant, il ne saurait être déduit de cette seule circonstance que les deux consultants n’ont pas été rémunérés en fonction de leurs heures de travail.

108    Il s’ensuit que c’est à tort que la REA a considéré que les coûts litigieux ne pouvaient être déclarés éligibles au motif que le critère selon lequel la rémunération du bénéficiaire doit être fondée sur les heures de travail plutôt que sur la livraison de réalisations ou de produits spécifiques n’était pas rempli en ce qui concerne ces deux consultants.

109    Il résulte de tout ce qui précède que la REA ne pouvait pas, sur le fondement des motifs exposés dans le rapport d’audit final, d’une part, déclarer les coûts litigieux inéligibles et, d’autre part, imposer une indemnité forfaitaire.

110    Dans ces conditions, il convient d’accueillir la troisième branche du premier moyen et, par conséquent, les deuxième et troisième chefs de conclusions de la requérante, sans qu’il soit besoin d’examiner les deuxième et troisième moyens.

111    Partant, le recours doit être accueilli dans son intégralité.

 Sur les dépens

112    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La REA ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé, conformément aux conclusions de la requérante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Les coûts des consultants internes, rejetés par l’Agence exécutive pour la recherche (REA) pour un montant de 184 642,84 euros, constituent des coûts éligibles au titre de la convention de subvention, portant la référence FP7SEC2012312484, conclue en vue de la réalisation du projet « Inter System Interoperability for Tetra – TetraPol Networks ».

2)      Les notes de débit no 3242005825, concernant le recouvrement du montant de 171 342,97 euros au titre d’une contribution injustifiée, et no 3242005872, concernant le recouvrement d’un montant de 17 134,30 euros au titre d’indemnité forfaitaire, émises par la REA, sont dépourvues de fondement.

3)      La REA est condamnée aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

Kanninen

Jaeger

Stancu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.


1      Données confidentielles occultées.