Language of document : ECLI:EU:T:2004:339

Sommaires

Affaire T-84/03


Maurizio Turco
contre
Conseil de l'Union européenne


« Transparence – Accès du public aux documents du Conseil – Refus partiel d'accès – Règlement (CE) nº 1049/2001 – Exceptions »


Sommaire de l'arrêt

1.
Communautés européennes – Institutions – Droit d’accès du public aux documents – Règlement nº 1049/2001 – Exceptions au droit d’accès aux documents – Interprétation

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2)

2.
Communautés européennes – Institutions – Droit d’accès du public aux documents – Règlement nº 1049/2001 – Exceptions au droit d’accès aux documents – Protection des avis juridiques – Portée

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2)

3.
Communautés européennes – Institutions – Droit d’accès du public aux documents – Règlement nº 1049/2001 – Exceptions au droit d’accès aux documents – Protection des avis juridiques – Intérêt public supérieur – Notion – Charge de la preuve

(Règlement du Parlement européen et du Conseil nº 1049/2001, art. 4, § 2)

1.
Les termes « avis juridiques », visés à l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement, du Conseil et de la Commission, doivent être compris en ce sens que la protection de l’intérêt public peut s’opposer à la divulgation du contenu des documents rédigés par le service juridique du Conseil dans le cadre de procédures juridictionnelles mais également à toutes autres fins. S’il est vrai que les exceptions à l’accès aux documents doivent être interprétées et appliquées de manière restrictive, de façon à ne pas tenir en échec l’application du principe général consistant à conférer au public le plus large accès possible aux documents détenus par les institutions, ce principe exposé par la jurisprudence ne s’applique, toutefois, qu’à la définition de la portée d’une exception au cas où celle-ci est susceptible de donner lieu à plusieurs interprétations différentes. En l’espèce, l’expression « avis juridiques » ne présente en soi aucune difficulté d’interprétation, de sorte qu’il n’y a pas lieu de considérer que seuls les avis rédigés dans le contexte de procédures juridictionnelles y sont visés. L’interprétation contraire aurait pour conséquence de priver de tout effet utile la mention des avis juridiques parmi les exceptions prévues par le règlement nº 1049/2001.

(cf. points 60-62)

2.
Le libellé de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement, du Conseil et de la Commission, ainsi que l’interprétation qui résulte de sa confrontation avec le code de conduite concernant l’accès du public aux documents du Conseil et de la Commission et les décisions des institutions relatives à l’accès du public à leurs documents, adaptées antérieurement au règlement nº 1049/2001, démontrent que le législateur communautaire a souhaité, dans ce règlement, consacrer une exception relative aux avis juridiques distincte de celle relative aux procédures juridictionnelles. Or, la notion de « procédures juridictionnelles » ayant, dans le contexte du droit d’accès du public aux documents des institutions, déjà été interprétée, il doit être considéré que cette définition, dégagée dans le cadre de l’interprétation de la décision 94/90, relatif à l’accès du public aux documents de la Commission, est pertinente dans le cadre du règlement nº 1049/2001. Ainsi, les avis juridiques rédigés dans le contexte de procédures juridictionnelles étant d’ores et déjà compris dans l’exception relative à la protection des procédures juridictionnelles, la mention expresse des avis juridiques parmi les exceptions a nécessairement une portée distincte de celle de l’exception relative aux procédures juridictionnelles. Il s’ensuit qu’un requérant n’est pas fondé à faire valoir qu’un avis juridique se rapportant à l’activité législative d’une institution ne peut pas relever de l’exception relative aux avis juridiques au sens de l’article 4, paragraphe 2, deuxième tiret, du règlement nº 1049/2001. Toutefois, l’institution est tenue d’apprécier, dans chaque cas d’espèce, si les documents dont la divulgation est demandée relèvent effectivement des exceptions énumérées dans le règlement nº 1049/2001.

(cf. points 57-58, 64-66, 69)

3.
L’intérêt public supérieur, visé à l’article 4, paragraphe 2, du règlement nº 1049/2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, susceptible de justifier la divulgation d’un document portant atteinte à la protection des avis juridiques doit, en principe, être distinct des principes de transparence, d’ouverture et de démocratie ou de participation des citoyens au processus décisionnel, principes qui sont mis en oeuvre par l’ensemble des dispositions de ce règlement. À défaut, il incombe à tout le moins au demandeur de démontrer que, eu égard aux circonstances spécifiques de l’espèce, l’invocation de ces mêmes principes présente une acuité telle qu’elle dépasse le besoin de protection du document litigieux. En outre, bien qu’il soit possible que l’institution en cause identifie d’elle-même un intérêt public supérieur susceptible de justifier la divulgation d’un tel document, il incombe au demandeur qui entend se prévaloir d’un tel intérêt de l’invoquer dans le cadre de sa demande afin d’inviter l’institution à se prononcer sur ce point.

(cf. points 81-84)