Language of document : ECLI:EU:T:2012:552

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

17 octobre 2012(*)

« Clause compromissoire – Sixième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration – Contrats relatifs aux projets Amida, Bacs et Dirac – Coûts éligibles – Modèle des coûts additionnels – Salaire des chercheurs bénéficiant de contrats d’emploi à durée indéterminée – Absence de ressources propres du contractant »

Dans l’affaire T‑286/10,

Fondation de l’Institut de recherche IDIAP, établie à Martigny (Suisse), représentéе par Mes G. Chapus-Rapin et G. Couchepin, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. F. Dintilhac et A. Sauka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, une demande formée à titre principal sur le fondement de l’article 272 TFUE, visant à obtenir du Tribunal qu’il déclare que certains coûts exposés par la requérante dans le cadre de l’exécution des contrats n° 33812, relatif au projet Amida, n° 27140, relatif au projet Bacs et n° 27787, relatif au projet Dirac, conclus avec la Commission européenne dans le cadre du sixième programme-cadre pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et à l’innovation (2002-2006), établi par la décision n° 1513/2002/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2002 (JO L 232, p. 1), sont éligibles à un remboursement et que, en conséquence, la requérante n’a pas à rembourser les sommes de 98 042,45 euros au titre du contrat relatif au projet Dirac et de 251 505,76 euros au titre du contrat relatif au projet Amida, ainsi qu’une demande formée à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 263 TFUE, visant à obtenir, d’une part, l’annulation de la décision de la Commission par laquelle cette dernière a confirmé les conclusions d’un audit ayant déclaré les coûts litigieux inéligibles et, d’autre part, la condamnation de la Commission à diligenter un audit des projets devant être réalisé par une autre société que celle ayant réalisé l’audit initial,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich, président, Mmes I. Wiszniewska-Białecka et M. Kancheva (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        La requérante, Fondation de l’Institut de recherche IDIAP, est une fondation de droit suisse qui a pour objet de conduire des recherches fondamentales et appliquées dans les domaines de l’informatique avancée ainsi que de contribuer à la formation supérieure et au transfert de technologies dans ces domaines. Elle participe, depuis plusieurs années, à des projets de recherche subventionnés par la Communauté européenne ou par l’Union européenne.

2        La requérante a conclu avec la Commission des Communautés européennes, agissant pour le compte de la Communauté, plusieurs contrats dans le cadre du sixième programme-cadre de la Communauté pour des actions de recherche, de développement technologique et de démonstration contribuant à la réalisation de l’espace européen de la recherche et à l’innovation (2002-2006) établi par la décision n° 1513/2002/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2002 (JO L 232, p. 1) (ci-après le « sixième programme-cadre »), à savoir le contrat n° 33812, relatif au projet Amida, le contrat n° 27140, relatif au projet Bacs et le contrat n° 27787, relatif au projet Dirac (ci-après, pris ensemble, les « contrats en cause »).

3        L’article 2, paragraphe 2, de la décision n° 1513/2002 dispose :

« Les modalités de la participation financière de la Communauté sont régies par le règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes, complété par l’annexe III. »

4        Le point 2, cinquième alinéa, de l’annexe III du sixième programme-cadre dispose :

« La participation financière de la Communauté sera accordée dans le respect du principe de cofinancement, à l’exception des financements destinés à des études, conférences et marchés publics. »

5        Le titre VI de la première partie du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1, rectificatif au JO 2003, L 25, p. 43), régit les subventions octroyées par les institutions de l’Union.

6        Aux termes de l’article 113, paragraphe 1, du règlement n° 1605/2002, « [l]a subvention d’une action ne peut financer l’intégralité des coûts de l’action, sous réserve des dispositions du titre IV de la deuxième partie ».

7        Le règlement (CE) n° 2321/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif aux règles de participation des entreprises, des centres de recherche et des universités et aux règles de diffusion des résultats de la recherche pour la mise en œuvre du sixième programme-cadre de la Communauté européenne (2002-2006) (JO L 355, p. 23), établit des règles spécifiques concernant la participation des différents bénéficiaires des subventions couvertes par le sixième programme-cadre.

8        L’article 12 du règlement n° 2321/2002 dispose :

« Contrats et accords de consortium

1. La Commission conclut un contrat pour chaque proposition d’action indirecte sélectionnée. Ce contrat est établi conformément aux dispositions du sixième programme-cadre et du présent règlement, en tenant compte des spécificités des différents instruments concernés.

[…]

2. Le contrat fixe les droits et obligations de tous les participants conformément au présent règlement, en particulier les dispositions concernant le suivi scientifique, technologique et financier de l’action indirecte, la mise à jour de ses objectifs, l’évolution de la composition du consortium, le versement de la contribution financière de la Communauté, les conditions d’éligibilité des dépenses nécessaires le cas échéant, ainsi que les règles de diffusion et de valorisation.

[…] »

9        L’article 14, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 2321/2002 dispose :

« [P]our les projets intégrés et les autres instruments, à l’exception de ceux visés [sous] a) et b) et à l’exception des actions indirectes visées à l’article 9, paragraphe 2, [sous] b), [la contribution financière de la Communauté] prend la forme d’une subvention au budget, calculée comme un pourcentage du budget établi par les participants pour la réalisation de l’action indirecte, modulé suivant le type d’activité et en tenant compte du modèle de calcul des coûts utilisé par le participant concerné. »

10      L’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2321/2002 dispose :

« Les dépenses éligibles sont définies conformément à l’article 12, paragraphe 2, premier alinéa, et remplissent les conditions suivantes :

a)      elles doivent être réelles, économiques et nécessaires à la mise en oeuvre de l’action indirecte ;

b)      elles doivent être déterminées conformément aux principes comptables usuels du participant individuel ;

c)      elles doivent être inscrites dans la comptabilité des participants ou, lorsqu’il s’agit des ressources mises à disposition par des tiers comme prévu à l’article 8, paragraphe 2, troisième alinéa, dans les documents financiers correspondants desdits tiers […] »

11      L’article 13 des contrats en cause comporte une clause compromissoire selon laquelle le Tribunal ou la Cour de justice, selon le cas, est compétent pour régler les litiges entre la Communauté et les contractants relatifs à la validité, à l’application ou à toute interprétation du présent contrat.

12      Les contrats en cause sont, en vertu de leur article 12, régis par le droit luxembourgeois.

13      L’article 8, paragraphe 2, sous d), des contrats en cause prévoit que « [t]out paiement effectué à la fin d’une période de rapport accompagné d’un certificat d’audit sera considéré comme final sous réserve des résultats de tout audit ou contrôle qui pourrait être mis en œuvre en vertu de l’article II.29 ».

14      Conformément au contrat type prévu pour les conventions relevant du sixième programme-cadre [décision C (2003) 3884 de la Commission, du 23 octobre 2003], les contrats en cause comportaient plusieurs annexes, dont les conditions générales.

15      La partie B des conditions générales des contrats en cause contient les dispositions financières générales applicables auxdits contrats.

16      Aux termes de l’article II.19, paragraphe 1, des conditions générales, les coûts éligibles encourus pour la réalisation du projet doivent remplir certaines conditions.

17      Les coûts éligibles doivent ainsi être notamment réels, économiques et nécessaires à la réalisation du projet, déterminés conformément aux principes comptables usuels du contractant, encourus pendant la durée du projet et inscrits dans les comptes du contractant qui les a encourus, au plus tard à la date d’établissement du certificat d’audit visé à l’article II.26 des conditions générales.

18      L’article II.19, paragraphe 2, sous e), des conditions générales précise que les coûts déclarés, encourus ou remboursés pour un autre projet communautaire constituent des coûts non éligibles qui ne peuvent pas être imputés au projet.

19      En outre, les conditions générales établissent une distinction parmi les coûts éligibles entre les coûts directs et les coûts indirects.

20      S’agissant des coûts directs, il est stipulé à l’article II.20, paragraphe 1, des conditions générales que ceux-ci correspondent à tous les coûts qui satisfont aux critères établis par l’article II.19 desdites conditions, qui peuvent être identifiés par le contractant conformément à son système comptable et qui peuvent être attribués directement au projet.

21      L’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales précise que les coûts directs de personnel doivent être limités aux coûts réels du personnel affecté au projet lorsque le contractant a conclu avec ce personnel un contrat temporaire pour travailler sur un projet de recherche et de développement technologique ou un contrat temporaire pour achever un doctorat ou encore un contrat qui dépend, en tout ou partie, de financements extérieurs venant s’ajouter au financement normal récurrent du contractant. Dans ce dernier cas, les coûts imputés au projet doivent exclure tous les coûts pris en charge par le financement normal récurrent du contractant.

22      À cet égard, la note en bas de page n° 9 des conditions générales indique que les contrats dépendant en tout ou partie d’un financement extérieur peuvent être des contrats nécessaires pour permettre à du personnel permanent d’effectuer des travaux supplémentaires nécessaires à l’exécution du projet, dépendant d’une source de financement extérieure.

23      S’agissant des coûts indirects, l’article II.21, paragraphe 1, des conditions générales stipule que ces derniers sont tous les coûts qui satisfont aux critères établis par l’article II.19 desdites conditions qui ne peuvent pas être identifiés par le contractant comme étant directement attribués au projet, mais qui peuvent être identifiés et justifiés par son système de comptabilité comme étant encourus en relation directe avec les coûts directs éligibles attribués au projet.

24      De plus, l’article II.22, paragraphe 1, des conditions générales prévoit trois modèles de déclaration pour l’imputation au projet des coûts éligibles directs et indirects.

25      Il s’agit, premièrement, du modèle du coût complet, utilisé par les contractants pour imputer au projet les coûts éligibles directs et indirects, deuxièmement, du modèle du coût complet/taux forfaitaire, utilisé par les contractants pour l’imputation des coûts éligibles directs et d’un taux forfaitaire pour les coûts indirects, et, troisièmement, du modèle des coûts additionnels, utilisé par les contractants pour l’imputation des coûts directs additionnels éligibles, et d’un taux forfaitaire pour les coûts indirects.

26      Conformément à l’article II.19, paragraphe 3, des conditions générales, pour les contractants utilisant le système des coûts additionnels, les coûts éligibles qui servent de base à l’établissement de la contribution financière de l’Union sont, d’une part, les coûts directs visés à l’article II.20 qui viennent s’ajouter à leurs coûts récurrents et, d’autre part, la contribution aux coûts indirects visés à l’article II.21.

27      L’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales rappelle que les contractants qui utilisent le système des coûts additionnels ne peuvent imputer au projet que les coûts directs qui s’ajoutent à leurs coûts récurrents.

28      Pour ce qui est du choix entre les différents modèles de déclaration de coût, l’article II.22, paragraphe 2, des conditions générales prévoit que tous les contractants, à l’exception des personnes physiques, peuvent utiliser le modèle de déclaration du coût complet. Les contractants qui sont des PME (petites et moyennes entreprises), des organisations non commerciales ou sans but lucratif de droit public ou privé, ou des organisations internationales, peuvent utiliser le modèle du coût complet avec un forfait pour les frais généraux.

29      Les contractants en droit d’utiliser le modèle des coûts additionnels sont, conformément à l’article II.22, paragraphe 3, des conditions générales, les organisations non commerciales ou sans but lucratif de droit public ou de droit privé ou les organisations internationales qui n’ont pas un système comptable permettant de distinguer la part des coûts directs de celle des coûts indirects dans les frais qu’ils encourent dans le cadre du projet.

30      Selon l’article II.22, paragraphe 4, des conditions générales, l’application de ces modèles de déclaration doit être conforme aux principes établis aux articles II.19, II.20 et II.21 de ces mêmes conditions.

31      Il ressort de l’article II.25 des conditions générales que le taux maximal de la contribution financière de la Communauté pour les projet intégrés est, s’agissant des activités de recherche et de développement technologique ou d’innovation, de 50 % pour les coûts déclarés dans le cadre du système du coût complet/coût forfaitaire et de 100 % pour les coûts déclarés dans le cadre du système des coûts additionnels.

32      L’article II.26 des conditions générales stipule :

« 1. Pour chaque période pour laquelle un certificat d’audit est exigé, chaque contractant fournit un certificat d’audit préparé et certifié par un auditeur externe, attestant que les coûts encourus pendant cette période satisfont aux conditions prescrites par le présent contrat. Le certificat doit indiquer expressément les montants qui ont fait l’objet de la vérification […]

2. Chaque contractant est libre de choisir l’auditeur externe qualifié qui lui convient, y compris son auditeur externe habituel, à condition qu’il satisfasse à la totalité des conditions suivantes :

a)      l’auditeur externe doit être indépendant à l’égard du contractant ;

b)      l’auditeur externe doit être qualifié pour effectuer les contrôles légaux des documents comptables conformément à la huitième directive 84/253/CEE du Conseil, du 10 avril 1984, ou aux règles nationales similaires.

[…]

La certification effectuée par des auditeurs externes conformément au présent article ne réduit en rien la responsabilité des contractants aux termes du présent contrat ni les droits conférés à la Communauté par l’article II.29. »

33      L’article II. 29 des conditions générales stipule :

« 1. À tout moment au cours du contrat et jusqu’à cinq ans après la fin du projet, la Commission peut faire procéder à des audits, soit par des réviseurs ou auditeurs scientifiques ou technologiques externes, soit par les services de la Commission eux-mêmes, y compris l’OLAF. Ces audits peuvent porter sur des aspects scientifiques, financiers, technologiques et autres (tels que les principes de comptabilité et de gestion) se rapportant à la bonne exécution du projet et du contrat. Ces audits s’effectuent sur une base confidentielle. Les montants qui seraient dus à la Commission en raison des résultats de ces audits peuvent faire l’objet d’un recouvrement comme indiqué à l’article II.31.

[…]

6. En outre, la Commission peut effectuer des vérifications et inspections sur place, conformément au règlement (Euratom, CE) n° 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités, et du règlement (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF).

[…] »

34      Par lettre du 4 juillet 2008, la Commission a informé la requérante de sa décision de procéder à un audit financier portant sur les relevés de coûts soumis par la requérante dans le cadre des contrats en cause. Par cette même lettre, la Commission a également précisé le nom et les coordonnées d’une société néerlandaise et d’une société suisse (ci-après l’« auditeur local ») mandatées respectivement pour coordonner et conduire l’audit en question.

35      Du 20 au 22 octobre 2008, un audit financier portant sur les relevés de coûts soumis par la requérante pour la période allant du 1er octobre 2006 au 30 septembre 2007, en ce qui concerne le projet Amida, ainsi que pour la période allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007, en ce qui concerne les projets Bacs et Dirac, a été effectué par l’auditeur local.

36      Le rapport d’audit, établi par l’auditeur local le 23 novembre 2008, concluait à l’inéligibilité de certains des coûts que la requérante avait déclarés à la Commission aux fins de leur remboursement, en ce compris les coûts relatifs aux contrats d’engagement de chercheurs affectés aux projets faisant l’objet des contrats en cause pour une durée indéterminée (ci-après les « coûts litigieux »).

37      Par lettre du 9 décembre 2009, la Commission a informé la requérante qu’elle confirmait les conclusions de l’audit susmentionné. Elle a précisé les régularisations nécessaires pour les périodes auditées, en indiquant que les erreurs constatées donneraient lieu à une procédure d’extrapolation des résultats de l’audit aux périodes non auditées et aux autres projets du sixième programme-cadre auxquels la requérante a participé.

38      Par lettre du 26 février 2010, la requérante s’est opposée aux appréciations de la Commission et lui a demandé de les reconsidérer.

39      Par lettre du 11 mai 2010 adressée à la requérante, la Commission a indiqué que, après avoir examiné les contestations et les observations de la requérante, elle confirmait les conclusions de l’audit susmentionné et a invité celle-ci à lui transmettre, pour le 30 juin 2010 au plus tard, des relevés de coûts révisés.

 Procédure et conclusions des parties

40      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juin 2010, la requérante a introduit le présent recours.

41      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, la requérante a introduit une demande en référé, dans laquelle elle conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal de surseoir à l’exécution de la lettre du 11 mai 2010 et de constater qu’elle n’est pas tenue de restituer les sommes réclamées par la Commission jusqu’à ce que le Tribunal ait statué sur le recours principal.

42      Par ordonnance du 22 juillet 2010, le président du Tribunal a rejeté la demande en référé.

43      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 26 avril 2012.

44      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal :

–        annuler la décision de la Commission du 11 mai 2010 ;

–        déclarer que les coûts litigieux sont éligibles pour bénéficier des fonds externes de l’Union ;

–        déclarer qu’elle n’a pas à rembourser les sommes de 98 042,45 euros au titre du contrat relatif au projet Dirac et de 251 505,76 euros au titre du contrat relatif au projet Amida ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        à titre subsidiaire :

–        annuler la décision de la Commission du 11 mai 2010 ;

–        condamner la Commission à diligenter un nouvel audit et à confier celui-ci à une autre institution que la société ayant effectué l’audit d’octobre 2008 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

45      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Observations liminaires

46      Il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort des points 4 et 5 de la requête, le présent recours est introduit en vertu d’une clause compromissoire, au titre de l’article 272 TFUE.

47      Il est cependant précisé au point 6 de la requête que, dans l’hypothèse où ledit recours dépasserait la portée de cette disposition, il conviendrait de le considérer comme un recours en annulation fondé sur l’article 263 TFUE, à l’encontre de la décision de la Commission du 11 mai 2010.

48      À cet égard, la requérante a précisé lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, que le recours devait être interprété comme contenant une demande formée à titre principal sur le fondement de la clause compromissoire en vertu de l’article 272 TFUE et une demande formée à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 263 TFUE.

49      La requérante a également indiqué lors de l’audience qu’elle renonçait au premier chef des conclusions principales en ce que celui-ci visait à obtenir l’annulation de la décision de la Commission du 11 mai 2010 dans le cadre de la demande formée à titre principal sur le fondement de l’article 272 TFUE.

 Sur la demande formée à titre principal sur le fondement de l’article 272 TFUE

50      La requérante soulève deux moyens principaux, le premier, tiré d’une erreur d’appréciation quant au caractère non éligible des coûts litigieux au regard de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales des contrats en cause, et, le second, tiré de la violation des principes de la bonne foi et de protection de la confiance légitime et des règles générales d’interprétation des contrats. La requérante soulève, en outre, un moyen subsidiaire, tiré de la violation de l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), et des principes généraux du droit.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur d’appréciation quant au caractère non éligible des coûts litigieux

51      La requérante fait valoir, en substance, que les salaires versés aux chercheurs affectés aux programmes de recherche Amida, Bacs et Dirac, qu’elle a employés sur la base d’un contrat à durée indéterminée, constituent des coûts éligibles au financement octroyé en vertu des contrats en cause, conformément à l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales.

52      À l’appui de ce premier moyen, la requérante fait valoir que l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales n’impose pas la conclusion d’un contrat à durée déterminée pour autant que ce contrat soit lié implicitement ou explicitement à un financement extérieur.

53      En l’espèce, le lien entre les contrats de travail à durée indéterminée conclus avec les chercheurs qu’elle a employés et un financement extérieur découlerait d’un avenant auxdits contrats de travail précisant à quel projet de recherche spécifique le chercheur est affecté.

54      Ce lien découlerait également de la structure des coûts de la requérante qui serait totalement dépendante de financements extérieurs pour le financement du personnel de recherche.

55      Ainsi, les subventions publiques lui permettant de couvrir uniquement ses frais administratifs, elle devrait systématiquement obtenir de nouveaux contrats de financement pour engager des chercheurs, puis espérer les conserver dans son personnel.

56      L’engagement de ces chercheurs représenterait à l’égard de chaque nouveau contrat de financement un coût additionnel par rapport aux coûts qu’elle devrait supporter si elle ne participait pas au projet dont fait l’objet le contrat de financement.

57      Ce mode de fonctionnement serait rendu possible par la spécificité du droit suisse qui lui permettrait de résilier tout contrat de travail à durée indéterminée dans un délai maximal de trois mois, et ce sans donner de justification particulière, aux fins de tenir compte de la perte d’un financement ou de l’absence d’un nouveau financement.

58      Par ailleurs, la requérante fait valoir que, conformément aux dispositions des contrats en cause, elle a fourni chaque année durant l’exécution des projets un certificat d’audit produit par un auditeur indépendant attestant l’éligibilité de l’ensemble des coûts additionnels qu’elle a soumis.

59      La requérante avance également que la seule règle d’interprétation de la notion contractuelle de coûts éligibles consiste dans la définition qui en est donnée par l’article 14, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement n° 2321/2002.

60      La Commission conteste les arguments de la requérante.

61      Il ressort de l’article 14, paragraphe 2, du règlement n° 2321/2002 que les dépenses éligibles sont définies conformément à l’article 12, paragraphe 2, premier alinéa, de ce même règlement et qu’elles remplissent, en outre, les conditions fixées à l’article 14, paragraphe 2, sous a) à d), dudit règlement.

62      Or, aux termes de l’article 12, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement n° 2321/2002, le contrat fixe les conditions d’éligibilité des dépenses nécessaires.

63      Il convient, par conséquent, de vérifier si les coûts litigieux peuvent être qualifiés de coûts éligibles au regard des dispositions des contrats en cause.

64      En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que la requérante a choisi, afin de déclarer les coûts éligibles imputables aux projets sur lesquels portent les contrats en cause, le modèle des coûts additionnels.

65      Il convient donc de vérifier si les coûts litigieux constituent des coûts éligibles au sens de l’article II.19, paragraphe 3, des conditions générales.

66      À cet égard, il convient de relever que les coûts litigieux sont des coûts afférents à des contrats de travail à durée indéterminée conclus par la requérante avec du personnel scientifique. Or, il est constant entre les parties que, dans la mesure où les subventions versées à la requérante couvrent uniquement ses frais administratifs, de tels contrats de travail dépendaient totalement de financements extérieurs.

67      Par ailleurs, il ressort du dossier que les contrats de travail en question ont fait l’objet d’un avenant précisant à quel projet spécifique relatif aux contrats en cause chaque chercheur était affecté.

68      Dès lors, il apparaît que les coûts afférents aux contrats de travail conclus avec des chercheurs affectés aux projets relatifs aux contrats en cause correspondent à des coûts directs de personnel au sens de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales.

69      Toutefois, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article II.19, paragraphe 3, des conditions générales et à l’article II.20, paragraphe 2, première phrase, de ces mêmes conditions, les contractants utilisant le modèle des coûts additionnels ne peuvent imputer au projet que les coûts directs qui s’ajoutent à leurs coûts récurrents.

70      À cet égard, la requérante fait valoir que, dans le cadre du modèle des coûts additionnels, ses coûts récurrents correspondent aux coûts qu’elle exposerait si elle ne participait pas aux projets. Ainsi, les coûts directs de personnel qu’elle a exposés, en l’espèce, dans le cadre de sa participation aux projets auraient nécessairement un caractère additionnel.

71      Cette interprétation de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales doit cependant être rejetée.

72      En effet, il ressort de la requête que la requérante, dont l’objet est de conduire des recherches fondamentales et appliquées dans les domaines de l’informatique avancée ainsi que de contribuer à la formation supérieure et au transfert de technologies dans ces domaines, a choisi un mode de fonctionnement caractérisé par une dépendance totale de ses activités de recherche à l’égard des subventions qui lui sont octroyées au titre des programmes de recherches auxquels elle participe.

73      Or, un tel mode de fonctionnement implique que les coûts liés à l’activité de recherche de la requérante soient obligatoirement couverts par un financement extérieur. Il n’existe donc pas de coûts récurrents liés à l’activité de recherche, couverts par un financement normal récurrent, auxquels viendraient s’ajouter les coûts directs de personnel exposés par la requérante dans le cadre de sa participation à un projet.

74      Il ne saurait davantage être admis que les coûts récurrents de la requérante correspondent à ses seuls frais administratifs.

75      Si cette thèse devait être suivie, elle conduirait à ce que, conformément à l’article II.25 des conditions générales, les coûts litigieux soient éligibles au bénéfice d’un taux de remboursement maximal de 100 %.

76      À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article II.25 des conditions générales que le taux maximal de remboursement prévu pour les coûts directs encourus dans le cadre des activités de recherche et de développement technologique pour des projets intégrés, tels que ceux en cause en l’espèce, est limité à 50 % lorsque ces coûts sont déclarés conformément au modèle du coût complet.

77      Il y a également lieu de rappeler que, la requérante étant une organisation sans but lucratif de droit privé, il lui était loisible, conformément à l’article II.22, paragraphe 2, des conditions générales, de recourir au modèle de déclaration du coût complet.

78      Dans ces conditions, qualifier les coûts litigieux de coûts directs additionnels constituerait un détournement du modèle des coûts additionnels, qui ne vise pas à financer la totalité des coûts directs encourus par un contractant, mais uniquement ceux qui s’ajoutent à ses coûts récurrents et, par conséquent, serait contraire au principe de cofinancement visé au point 2, cinquième alinéa, de l’annexe III du sixième programme-cadre.

79      Partant, les coûts litigieux ne sauraient être considérés comme des coûts éligibles au sens de l’article II.19, paragraphe 3, des conditions générales.

80      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel elle aurait respecté les contrats en cause dans la mesure où elle a fourni, conformément à l’article 8 desdits contrats, des certificats d’audit produits par un auditeur indépendant qui attestaient de l’éligibilité de l’ensemble des coûts additionnels déclarés. Il convient en effet de relever que, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous d), des contrats en cause, tout paiement effectué à la fin d’une période de rapport accompagné d’un certificat d’audit sera considéré comme final sous réserve des résultats de tout audit ou contrôle qui pourrait être mis en œuvre en vertu de l’article II.29.

81      En outre, il est précisé à l’article II.26, paragraphe 2, des conditions générales que chaque contractant est libre de choisir l’auditeur externe qualifié qui lui convient, à condition que celui-ci soit indépendant du contractant et qu’il soit qualifié pour effectuer les contrôles légaux des documents comptables conformément à la huitième directive 84/253/CEE du Conseil, du 10 avril 1984, fondée sur l’article 54, paragraphe 3, [sous] g), du traité CEE, concernant l’agrément des personnes chargées du contrôle légal des documents comptables (JO L 126, p. 20), ou aux règles nationales similaires.

82      Il ressort également du dernier alinéa de cet article que la certification effectuée par des auditeurs externes ne réduit en rien la responsabilité des contractants aux termes du contrat ni les droits conférés à la Communauté, à l’article II.29 des conditions générales.

83      Or, conformément à l’article II.29, paragraphe 1, des conditions générales, à tout moment au cours du contrat et jusqu’à cinq ans après la fin du projet, la Commission peut faire procéder à des audits. Ces audits peuvent porter sur des aspects scientifiques, financiers, technologiques et autres, tels que les principes de comptabilité et de gestion, se rapportant à la bonne exécution du projet et du contrat.

84      Il s’ensuit que la production de certificats d’audit externe attestant de l’éligibilité de l’ensemble des coûts additionnels déclarés par la requérante ne prive pas la Commission de la possibilité de diligenter un audit à l’issue duquel elle peut remettre en cause l’éligibilité des coûts déclarés par la requérante.

85      Partant, le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le second moyen, tiré de la violation des principes de la bonne foi et de protection de la confiance légitime et des règles générales d’interprétation des contrats

86      La requérante soutient, en substance, que la volonté de la Commission d’imposer de façon rétroactive son interprétation de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales va à l’encontre des principes de la bonne foi et de protection de la confiance légitime et du principe d’interprétation « contra stipulatorem ».

87      La Commission conteste les arguments de la requérante.

88      S’agissant, tout d’abord, de l’argument de la requérante selon lequel, dans la mesure où il existe un doute quant à l’interprétation de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales et que cet article a été rédigé par la Commission, il conviendrait de l’interpréter en faveur de la requérante, conformément au principe de l’interprétation « contra stipulatorem », il y a lieu de constater qu’il ressort de l’examen du premier moyen que l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales ne laisse aucun doute quant au sens qu’il convient de donner à la notion de coûts directs additionnels aux termes des contrats en cause.

89      S’agissant, ensuite, de la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime, la requérante fait valoir que les services de la Commission auraient procédé, dans leur pratique antérieure, à des interprétations divergentes quant à l’éligibilité des coûts qui auraient créé une confiance légitime à son égard. Ces divergences d’interprétation auraient été démontrées par une association européenne devant le Parlement européen et reconnues par la Commission.

90      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, d’une part, l’interprétation des dispositions d’un contrat par une partie ne saurait s’imposer à une autre partie.

91      D’autre part, la requérante ne saurait se prévaloir des prétendues interprétations divergentes auxquelles les services de la Commission auraient procédé dans leur pratique antérieure dans la mesure où lesdites pratiques ne concernent pas concrètement le rapport juridique établi par les contrats en cause entre les parties au présent litige.

92      S’agissant, enfin, de l’argument de la requérante selon lequel l’interprétation de la Commission de l’article II.20, paragraphe 2, des conditions générales serait contraire au principe de la bonne foi, la Commission ayant accepté les déclarations de coûts relatifs aux contrats en cause contenus dans les rapports périodiques, prévus par l’article II.7, paragraphe 2, sous b), des conditions générales, chaque année sans jamais soulever la moindre objection, il convient de rappeler que, conformément à l’article 1134 du code civil luxembourgeois, applicable aux contrats en cause conformément à l’article 12 desdits contrats, les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi.

93      Toutefois, il y a lieu de relever que, conformément à l’article II.8, paragraphe 4, des conditions générales, l’approbation d’un rapport périodique n’implique pas l’exemption d’un audit ou d’un contrôle, qui peut être effectué conformément aux dispositions de l’article II.29 des conditions générales.

94      En outre, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’audit prévu par l’article II.29, paragraphe 1, des conditions générales ne vise pas spécifiquement à prévenir les cas de dol ou de fraude, mais peut porter sur des aspects notamment financiers et autres, tels que les principes de comptabilité et de gestion se rapportant à la bonne exécution du contrat.

95      À cet égard, il convient de relever que les cas de fraude sont spécifiquement visés par l’article II.29, paragraphe 6, des conditions générales, qui prévoit que la Commission peut effectuer des vérifications et des inspections sur place conformément au règlement (Euratom, CE) n° 2185/96 du Conseil, du 11 novembre 1996, relatif aux contrôles et vérifications sur place effectués par la Commission pour la protection des intérêts financiers des Communautés européennes contre les fraudes et autres irrégularités (JO L 292, p. 2), et du règlement (CE) n° 1073/1999 du Parlement européen et du Conseil, du 25 mai 1999, relatif aux enquêtes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) (JO L 136, p. 1).

96      Dans ces conditions, sauf à priver la Commission des droits qu’elle tire de l’article II.29, paragraphe 1, des conditions générales, il ne saurait être considéré qu’elle ait commis un quelconque manquement à la bonne foi en ne soulevant pas d’objection à l’égard des coûts déclarés comme éligibles par la requérante dans les rapports périodiques relatifs à l’exécution des contrats en cause.

97      Il s’ensuit que le second moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le moyen subsidiaire, tiré de la violation de l’article 6 de la CEDH et des principes généraux du droit

98      La requérante avance deux griefs à l’appui de son moyen subsidiaire, tirés, respectivement, d’une violation de l’article 6 de la CEDH et d’une violation des principes généraux du droit en raison des vices irréparables affectant la procédure d’audit.

99      À cet égard, en premier lieu, la requérante fait valoir que l’auditeur a eu une attitude contradictoire à son égard. Ainsi, après lui avoir indiqué, dans un premier temps, que les coûts litigieux seraient éligibles si elle parvenait à démontrer qu’elle était intégralement dépendante de financements extérieurs, l’auditeur aurait indiqué, dans son rapport définitif à la Commission, l’inéligibilité des coûts litigieux, et ce après qu’elle avait rapporté la preuve de sa dépendance totale à l’égard des financements extérieurs.

100    En deuxième lieu, la requérante soutient que l’audit n’a pas été conduit de manière impartiale. Selon la requérante, bien que l’auditeur aurait été convaincu de l’éligibilité des coûts litigieux, il aurait cependant conclu à leur inéligibilité sur la base d’instructions extérieures, ainsi que le responsable de l’audit l’aurait lui-même reconnu.

101    En troisième lieu, la requérante fait valoir que la Commission, bien qu’elle ait admis que le fait que les contrats de travail des chercheurs étaient à durée indéterminée n’était pas un obstacle à l’éligibilité des coûts litigieux, a confirmé les conclusions du rapport d’audit fondées sur le caractère indéterminé desdits contrats.

102    La Commission conteste les arguments de la requérante.

103    S’agissant, en premier lieu, du grief tiré de la violation de l’article 6 de la CEDH, il convient de rappeler que cette disposition garantit le droit à un procès équitable, qui a été réaffirmé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010, C 83, p. 389).

104    L’article 47, premier alinéa, de la charte des droits fondamentaux prévoit ainsi que « [t]oute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi […] »

105    Toutefois, il convient de relever que la requérante se limite à avancer, à l’appui du présent moyen, des arguments relatifs à de prétendus vices affectant la procédure d’audit sans expliquer en quoi de tels vices sont susceptibles d’affecter, en l’espèce, son droit à un procès équitable devant le Tribunal.

106    Or, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit, notamment, contenir un exposé sommaire des moyens invoqués. Elle doit, de ce fait, expliciter en quoi consiste le moyen sur lequel le recours est fondé, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du statut de la Cour et du règlement de procédure. Partant, compte tenu du fait que l’allégation de la requérante concernant la violation de l’article 6 CEDH manque de précision, il convient de rejeter ce grief comme étant irrecevable (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 19 novembre 2009, Denka International/Commission, T‑334/07, Rec. p. II‑4205, point 150).

107    S’agissant, en second lieu, du grief tiré de la violation des principes généraux du droit, force est de constater que la requérante n’indique pas quels sont les principes que la Commission aurait violés ni en quoi les prétendus vices affectant la procédure d’audit constitueraient une violation desdits principes.

108    Il s’ensuit que, au regard de la jurisprudence citée au point 106 ci-dessus, l’allégation de la requérante concernant la violation des principes généraux du droit manque de précision et qu’il convient, par conséquent, de rejeter également ce grief comme étant irrecevable.

109    Partant le moyen subsidiaire doit être rejeté comme étant irrecevable.

110    La demande formée à titre principal sur le fondement de l’article 272 TFUE doit donc être rejetée comme étant pour partie non fondée et pour partie irrecevable.

 Sur la demande formée à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 263 TFUE

111    À titre liminaire, il convient de relever que le deuxième chef des conclusions subsidiaires vise à ce que la Commission soit condamnée à diligenter un nouvel audit. Force est de constater que, par un tel chef de conclusions, la requérante cherche à obtenir du Tribunal qu’il adresse une injonction à la Commission. Or, selon une jurisprudence constante, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 263 TFUE, la juridiction de l’Union n’a pas compétence pour prononcer des injonctions a l’égard des institutions de l’Union (voir ordonnance du président du Tribunal du 18 novembre 2009, Hansen/Commission, T‑295/09 R, non publiée au Recueil, point 15, et la jurisprudence citée). Le deuxième chef des conclusions subsidiaires doit donc être rejeté comme irrecevable.

112    En ce qui concerne le premier chef des conclusions subsidiaires, visant à obtenir l’annulation de la décision de la Commission contenue dans sa lettre du 11 mai 2010, il y a lieu de relever ce qui suit.

113    Il convient de rappeler que, dans le cadre d’un recours en annulation, en vertu de l’article 263 TFUE, premier alinéa, première phrase, le juge de l’Union contrôle la légalité des actes législatifs, des actes du Conseil, de la Commission et de la Banque centrale européenne, autres que les recommandations et les avis, et des actes du Parlement européen et du Conseil européen destinés à produire des effets juridiques à l’égard des tiers (ordonnance du Tribunal du 31 août 2011, IEM/Commission, T‑435/10, non publiée au Recueil, point 26).

114    En revanche, les actes adoptés par les institutions qui s’inscrivent dans un cadre purement contractuel dont ils sont indissociables ne figurent pas, en raison de leur nature même, au nombre des actes dont l’annulation peut être demandée au juge de l’Union en vertu de l’article 263 TFUE. Ainsi, les recours qui tendent à l’annulation, sur le fondement de cet article, d’actes ayant une nature contractuelle ne sauraient être recevables (ordonnances du Tribunal du 3 avril 2006, International Institute for the Urban Environment/Commission, T‑74/05, non publiée au Recueil, point 50, et IEM/Commission, précitée, point 27).

115    Dans ces circonstances, il convient d’examiner si la lettre de la Commission du 11 mai 2010 figure au nombre des actes qui peuvent être annulés par le juge de l’Union, en vertu de l’article 263 TFUE, ou si, au contraire, elle revêt une nature contractuelle (voir, en ce sens, ordonnances International Institute for the Urban Environment/Commission, précitée, point 34, et IEM/Commission, précitée, point 30).

116    À cet égard, il y a lieu de considérer que la lettre contestée s’inscrit dans un cadre contractuel dont elle est indissociable. En effet, aucun élément ne permet de conclure, à sa lecture, que la Commission aurait agi en faisant usage de droits autres que ceux conférés par les contrats en cause. Par ladite lettre, la Commission s’est, en substance, bornée, sur la base de l’interprétation des faits et des stipulations pertinentes des contrats en cause, à informer la requérante que, après un examen des objections qu’elle avait formulées concernant l’audit de l’exécution des contrats en cause, elle confirmait sa conclusion selon laquelle les contrats de travail conclus avec les chercheurs employés par la requérante dans le cadre de l’exécution des contrats en cause ne répondaient pas aux exigences de l’article II.20, paragraphe 2, du modèle des contrats du sixième programme-cadre et confirmait également sa conclusion selon laquelle la requérante devait en conséquence lui soumettre des relevés de coûts révisés (voir, en ce sens, ordonnance International Institute for the Urban Environment/Commission, précitée, point 35).

117    En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande formée à titre subsidiaire sur le fondement de l’article 263 TFUE comme étant irrecevable.

 Sur les dépens

118    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens.

119    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Fondation de l’Institut de recherche IDIAP est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, les dépens exposés par la Commission européenne, en ce compris ceux afférents à la procédure de référé.

Dittrich

Wiszniewska-Białecka

Kancheva

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 17 octobre 2012.

Signatures


* Langue de procédure : le français.