Language of document : ECLI:EU:T:2023:538

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

13 septembre 2023 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant l’Union européenne – Marque verbale PROLACTAL – Marque nationale figurative antérieure Prolàctea – Motif relatif de refus – Similitude des signes – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 – Preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours – Article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 – Obligation de motivation – Article 94 du règlement 2017/1001 et article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux »

Dans l’affaire T‑549/22,

Prolactal GmbH, établie à Hartberg (Autriche), représentée par Mes H. Roerdink et S. Janssen, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. E. Markakis, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Prolàctea, SA, établie à Castrogonzalo (Espagne), représentée par Me J. Vicente Martínez, avocat,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mmes A. Marcoulli, présidente, V. Tomljenović et M. R. Norkus (rapporteur), juges,

greffier : M. V. Di Bucci,

vu la phase écrite de la procédure,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Prolactal GmbH, demande l’annulation de la décision de la cinquième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 10 juin 2022 (affaire R 752/2021‑5) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        Le 10 avril 2019, l’EUIPO a reçu notification de la désignation de l’Union européenne pour l’enregistrement international no 1475897 déposé par la requérante, avec priorité de la marque autrichienne AM 20515/2019 déposée le 22 mars 2019 pour la marque verbale PROLACTAL.

3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant des classes 5, 29 à 33, 35 et 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Préparations alimentaires pour nourrissons » ;

–        classe 29 : « Lait ; margarine ; viandes ; extraits de viande ; fruits conservés ; fruits congelés ; fruits secs ; fruits cuits ; légumes conservés ; légumes congelés ; légumes séchés ; légumes cuits ; œufs ; laitages ; poissons non vivants ; gibier non vivant ; gelées alimentaires ; confitures ; compotes ; lait en poudre ; fromages ; beurre ; huiles et graisses alimentaires ; volaille » ;

–        classe 30 : « Bonbons [confiseries] non médicamenteux ; miel ; épices ; glace à rafraîchir ; café ; thé ; cacao ; sucre ; riz ; sagou ; café de substitution ; sirop de sucre roux ; levures ; poudres à lever ; sel ; moutarde ; vinaigre ; farines ; préparations de céréales ; pain ; glaces alimentaires ; pâtisseries ; confiseries à base de farine ; riz, tapioca ; sauces [condiments] » ;

–        classe 31 : « Animaux vivants ; fruits et légumes frais ; cultures agricoles et aquacoles, produits d’horticulture et de sylviculture ; semences ; semences ; plantes naturelles ; fleurs ; produits alimentaires pour animaux ; malt » ;

–        classe 32 : « Bières ; eaux minérales et gazéifiées ; produits à boire sans alcool ; boissons aux fruits ; jus ; sirops et autres préparations sans alcool pour la confection de produits à boire » ;

–        classe 33 : « Produits à boire alcoolisés (à l’exception de bières) » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion d’affaires commerciales ; administration commerciale ; services administratifs ; services d’agences d’import-export » ;

–        classe 39 : « Services de conditionnement et d’entreposage de produits ; organisation de transport pour circuits de voyage ; services de transport et de stockage ».

4        Le 11 novembre 2019, l’intervenante, Prolàctea, SA, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits et services visés au point 3 ci-dessus.

5        L’opposition était fondée sur la marque espagnole antérieure reproduite ci-après, désignant les produits relevant des classes 5 et 29 et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 5 : « Sérums ; sérums antitoxiques ; ferments lactiques à usage pharmaceutique ; aliments et substances diététiques à usage médical ou vétérinaire ; aliments pour bébés ; compléments alimentaires pour êtres humains et animaux » ;

–        classe 29 : « Lait ; petit-lait ; babeurre ; petit-lait sec ; produits laitiers ; puddings à base de produits laitiers ; desserts lactés réfrigérés ; blanchisseurs [produits laitiers] pour boissons ; trempettes [dips] à base de produits laitiers ; desserts à base de produits laitiers ; pâtes à tartiner laitières ; crème en poudre ; succédanés de lait à usage non laitier ; ferments lactiques à usage culinaire ; crèmes artificielles (succédanés de produits laitiers) ; boissons à base de produits laitiers ; blanchisseurs de café principalement à base de produits laitiers » :

Image not found

6        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1).

7        Le 25 février 2021, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion pour les produits suivants :

–        classe 5 : « Préparations alimentaires pour nourrissons » ;

–        classe 29 : « Lait ; margarine ; laitages ; lait en poudre ; fromages ; beurre ; huiles et graisses alimentaires » ;

–        classe 30 : « Bonbons [confiseries] non médicamenteux ; café ; thé ; cacao ; café de substitution ; glaces alimentaires ; confiseries à base de farine » ;

–        classe 31 : « Produits alimentaires pour animaux » ;

–        classe 32 : « Produits à boire sans alcool ; boissons aux fruits ; jus ».

8        Le 23 avril 2021, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

9        Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours au motif qu’il existait un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent pour tous les produits en cause. Premièrement, elle a relevé que les produits en cause étaient soit identiques soit similaires à des degrés divers. Deuxièmement, elle a considéré que le territoire pertinent pour l’appréciation du risque de confusion était l’Espagne et que le public pertinent était composé du grand public et de professionnels, dont le niveau d’attention était moyen à l’exception des produits en cause compris dans la classe 5, à l’égard desquels le public pertinent fera preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne. Troisièmement, la chambre de recours a considéré que les signes en conflit présentaient à tout le moins un degré de similitude légèrement inférieur à la moyenne sur le plan visuel et un degré de similitude supérieure à la moyenne sur le plan phonétique. De même, ils évoquaient des concepts très similaires. Quatrièmement, elle a considéré que la marque antérieure présentait un caractère distinctif légèrement inférieur à la moyenne. Enfin, la chambre de recours a considéré que la requérante n’avait pas établi la coexistence sur le marché espagnol des deux marques en cause et, en tout état de cause, qu’elle n’avait pas démontré que la prétendue coexistence reposait sur l’absence de risque de confusion et qu’elle était pacifique.

 Conclusions des parties

10      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

11      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audience.

12      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque six moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué (UE) 2018/625 de la Commission, du 5 mars 2018, complétant le règlement 2017/1001 et abrogeant le règlement délégué (UE) 2017/1430 (JO 2018, L 104, p. 1), au motif que c’est à tort que l’EUIPO a conclu que les éléments de preuve produits pour la première fois au stade du recours devaient être considérés comme des éléments nouveaux et qu’ils étaient donc irrecevables.

14      Les deuxième et cinquième moyens, qu’il convient d’examiner ensemble, sont tirés de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique au motif, d’une part, que la décision de la chambre de recours de rejeter comme irrecevables les demandes de preuve de l’usage déposées par la requérante est disproportionnée par rapport aux conséquences qu’elle produit sur elle et, d’autre part, que le niveau de preuve de la coexistence des marques en conflit imposé par la chambre de recours excède ce que l’on pouvait attendre de la requérante.

15      Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001.

16      Le quatrième moyen est tiré de la violation de l’article 94 du règlement 2017/1001 et de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

17      Enfin, le sixième moyen est tiré de la violation de la jurisprudence pertinente relative à l’appréciation globale du risque de confusion, la chambre de recours n’ayant pas pris en considération toutes les circonstances de l’espèce.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625

18      Par son premier moyen, la requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours a violé les dispositions de l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 en rejetant les éléments de preuve mentionnés aux points 36 et 37 de la décision attaquée comme irrecevables au motif qu’ils avaient été déposés pour la première fois devant elle et ne remplissaient pas les exigences de l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001. Lesdits éléments de preuve portaient, d’une part, sur l’utilisation de la marque PROLACTAL de la requérante sur le marché espagnol et, d’autre part, sur la coexistence de cette marque avec la marque de l’intervenante sur le même marché.

19      Si la requérante admet avoir produit ces documents pour la première fois devant la chambre de recours, elle conteste qu’il s’agit de documents nouveaux et soutient que la chambre de recours a erronément considéré qu’elle n’avait produit aucune preuve documentaire devant la division d’opposition. À cet égard, la requérante soutient, en substance, que dans ses observations produites devant la division d’opposition aux fins d’étayer son allégation relative à la coexistence des marques en conflit elle a fait mention de sa raison sociale enregistrée en Autriche et de la marque autrichienne enregistrée sous la référence AT 121968. Selon la requérante, ces documents sont « facilement accessibles à tout un chacun dans les registres publics correspondants ».

20      En outre, la chambre de recours aurait considéré à tort que la requérante n’aurait pas fourni d’explication pour la production tardive de ces éléments de preuve. Selon la requérante, elle a expliqué dans sa réplique déposée devant la chambre de recours que ces documents « [venaient] uniquement compléter des faits et preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile ».

21      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

22      En outre, l’EUIPO fait valoir que les annexes A 11 et A 12 à la requête, comportant respectivement un extrait du registre autrichien des sociétés faisant état de l’enregistrement de la requérante comme société de droit autrichien et un extrait du registre autrichien des marques faisant état de l’enregistrement sous la référence AT 121968 de la marque figurative PROLACTAL, sont irrecevables, car soumises pour la première fois devant le Tribunal.

23      L’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 prévoit que l’EUIPO « peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile ».

24      Il découle du libellé de cette disposition que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation en application des dispositions du règlement 2017/1001 et qu’il n’est nullement interdit à l’EUIPO de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits [voir arrêts du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/OHMI et centrotherm Clean Solutions, C‑610/11 P, EU:C:2013:593, point 77 et jurisprudence citée, et du 2 juin 2021, Franz Schröder/EUIPO – RDS Design (MONTANA), T‑854/19, EU:T:2021:309, point 24 et jurisprudence citée].

25      En revanche, il ressort de manière tout aussi certaine dudit libellé qu’une telle invocation ou production tardive de faits et de preuves n’est pas de nature à conférer à la partie qui y procède un droit inconditionnel à ce que de tels faits ou preuves soient pris en considération par l’EUIPO. En précisant que l’EUIPO « peut » décider de ne pas tenir compte de telles preuves, ladite disposition investit en effet celui-ci d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre celles-ci en compte (voir arrêts du 26 septembre 2013, Centrotherm Systemtechnik/OHMI et centrotherm Clean Solutions, C‑610/11 P, EU:C:2013:593, point 78 et jurisprudence citée, et du 2 juin 2021, MONTANA, T‑854/19, EU:T:2021:309, point 25 et jurisprudence citée).

26      Partant, l’éventuelle prise en compte desdits éléments de preuve supplémentaires ne constitue en aucune manière une « faveur » accordée à l’une ou à l’autre partie, mais doit incarner le résultat d’un exercice objectif et motivé du pouvoir d’appréciation, dont l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 investit l’EUIPO (voir arrêt du 24 janvier 2018, EUIPO/European Food, C‑634/16 P, EU:C:2018:30, point 58 et jurisprudence citée).

27      L’exercice du pouvoir d’appréciation de l’EUIPO prévu à l’article 95, paragraphe 2, du règlement 2017/1001 est toutefois encadré par l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625, qui prévoit :

« Conformément à l’article 95, paragraphe 2, du règlement [2017/1001], la chambre de recours peut accepter des faits invoqués ou des preuves produites pour la première fois devant elle uniquement si ces faits ou preuves répondent aux exigences suivantes :

a)      ils semblent, à première vue, pertinents pour l’issue de l’affaire ; et

b)      ils n’ont pas été présentés en temps utile pour des raisons valables, en particulier lorsqu’ils viennent uniquement compléter des faits et preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile, ou sont déposés pour contester les conclusions tirées ou examinés d’office par la première instance dans la décision objet du recours. »

28      En outre, il y a lieu de relever qu’il appartient à la partie qui présente des faits et des preuves pour la première fois devant la chambre de recours d’exposer devant elle dans quelle mesure cette présentation satisfait aux conditions qui sont fixées à l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625 [arrêt du 6 octobre 2021, Kondyterska korporatsiia « Roshen »/EUIPO – Krasnyj Octyabr (Représentation d’un homard), T‑254/20, non publié, EU:T:2021:650, point 57].

29      Il convient d’examiner le respect, par la chambre de recours, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, des conditions cumulatives établies par l’article 27, paragraphe 4, du règlement délégué 2018/625.

30      En ce qui concerne l’appréciation de la condition liée à l’existence de raisons valables pour justifier la présentation tardive de preuves, prévue à l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625, la chambre de recours a constaté, au point 50 de la décision attaquée, que la requérante n’avait fourni aucune explication quant aux obstacles qui l’auraient empêché de produire ces éléments de preuve devant la division d’opposition, et ce d’autant plus que cela aurait été possible compte tenu de la date et de la nature des documents. La chambre de recours a également constaté, au point 44 de la décision attaquée, que les preuves produites par la requérante pour la première fois devant elle ne pouvaient être considérées comme complétant des preuves produites devant la division d’opposition, dès lors que la requérante n’avait produit aucune preuve documentaire devant la division d’opposition à l’appui de ses allégations selon lesquelles la marque demandée coexistait en Espagne avec les marques de l’intervenante.

31      S’agissant de l’appréciation du caractère complémentaire des preuves produites tardivement, également prévue à l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625, il convient de relever que, selon la jurisprudence, une preuve complémentaire est celle qui se caractérise par un lien avec d’autres preuves déjà présentées au préalable dans le délai imparti et qui vient s’ajouter à ces dernières preuves [voir, en ce sens, arrêts du 14 mai 2019, Guiral Broto/EUIPO – Gastro & Soul (Café del Sol et CAFE DEL SOL), T‑89/18 et T‑90/18, non publié, EU:T:2019:331, point 42, et du 9 septembre 2020, Kludi/EUIPO – Adlon Brand (ADLON), T‑144/19, non publié, EU:T:2020:404, point 56].

32      En l’espèce, s’il est vrai que la requérante a fait valoir devant la division d’opposition la coexistence des marques en conflit sur le territoire espagnol, elle n’a toutefois produit aucun élément de preuve au soutien de cette allégation, ainsi qu’elle-même l’admet. Dans ces circonstances, la chambre de recours a pu estimer à bon droit que les éléments de preuve présentés pour la première fois devant elle ne constituaient pas des preuves complémentaires au sens de l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625.

33      En outre, contrairement à ce que la requérante prétend, le fait d’avoir indiqué que les preuves produites devant la chambre de recours « [venaient] uniquement compléter des faits et preuves pertinents qui avaient déjà été soumis en temps utile » n’est pas de nature à justifier leur dépôt tardif. En effet, une telle affirmation ne permet pas à la chambre de recours de connaître, aux fins d’exercer son pouvoir d’appréciation, les raisons pour lesquelles la requérante n’a pas été en mesure de présenter ces preuves en temps utile.

34      Par ailleurs, doit également être rejeté l’argument de la requérante selon lequel les preuves produites pour la première fois devant la chambre de recours visaient à répondre aux considérations de la division d’opposition selon lesquelles « la coexistence formelle de certaines marques dans les registres nationaux ou de l’Union européenne n’[était] pas en soi particulièrement pertinente ». En effet, en répondant à l’argument de la requérante tiré de la coexistence de sa marque autrichienne PROLACTAL avec la marque espagnole antérieure de l’intervenante, la division d’opposition a souligné qu’il était nécessaire de démontrer la coexistence desdites marques sur le marché. Or, les preuves produites devant la chambre de recours non seulement n’étaient pas des preuves complémentaires, comme il a été constaté au point 32 ci-dessus, mais ne visaient pas non plus à « contester les conclusions tirées ou examinées d’office par la première instance dans la décision objet du recours » au sens de l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625.

35      Il s’ensuit que la condition énoncée à l’article 27, paragraphe 4, sous b), du règlement délégué 2018/625 peut être considérée comme n’ayant pas été remplie et que c’est dès lors à juste titre que la chambre de recours a rejeté les éléments de preuve présentés pour la première fois devant elle.

36      Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme non fondé sans qu’il soit nécessaire d’examiner la recevabilité des annexes A 11 et A 12 à la requête.

 Sur les deuxième et cinquième moyens, tirés de la violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique

37      Le principe de sécurité juridique exige qu’une réglementation soit claire et précise et que l’application de celle-ci soit prévisible pour tous ceux qui sont concernés (arrêt du 16 juin 1993, France/Commission, C‑325/91, EU:C:1993:245, point 26).

38      Ce principe a pour corollaire le principe de protection de la confiance légitime, lequel s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration de l’Union européenne, en lui fournissant des assurances précises, inconditionnelles et concordantes, émanant de sources autorisées et fiables, a fait naître dans son esprit des espérances fondées. Cependant, ces assurances doivent être conformes aux dispositions et aux normes applicables, des promesses qui ne tiendraient pas compte de ces dispositions n’étant pas de nature à créer une confiance légitime chez l’intéressé [voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, EU:T:2008:268, point 64 et jurisprudence citée].

39      En premier lieu, la requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours a violé les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique en rejetant ses demandes de preuve de l’usage.

40      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

41      Il convient de relever que, aux termes de l’article 47, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque antérieure de l’Union européenne ayant formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de dépôt ou la date de priorité de la demande de marque de l’Union européenne, la marque antérieure de l’Union européenne a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant que, à cette date, la marque antérieure soit enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque antérieure de l’Union européenne n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services. Aux termes du paragraphe 3 de cet article, ces règles s’appliquent également aux marques antérieures nationales, étant entendu que l’usage dans l’Union est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée.

42      Aux termes de l’article 10, paragraphe 1, du règlement délégué 2018/625, une demande de preuve de l’usage d’une marque antérieure au titre de l’article 47, paragraphe 2 ou 3, du règlement 2017/1001 n’est recevable que si elle est présentée comme une demande inconditionnelle dans un document distinct, dans le délai fixé par l’EUIPO conformément à l’article 8, paragraphe 2, de ce règlement délégué.

43      En outre, le Tribunal a jugé, dans une affaire concernant une procédure en nullité, qu’une demande de preuve de l’usage présentée dans le cadre d’un mémoire, et non pas comme une demande inconditionnelle dans un document distinct, conformément à l’article 19, paragraphe 2, du règlement délégué 2018/625, devait être considérée comme irrecevable. Or, l’article 10, paragraphe 1, de ce règlement délégué et son article 19, paragraphe 2, concernent tous deux la présentation d’une demande de preuve d’usage, le premier dans le contexte d’une procédure d’opposition et le second dans celui d’une procédure de nullité. Il y a lieu d’observer que lesdites dispositions imposent la même exigence concernant la présentation d’une telle demande, c’est-à-dire que cette dernière soit présentée comme une demande inconditionnelle dans un document distinct. Il convient donc de considérer que les exigences de ces dispositions peuvent être interprétées dans le même sens [voir ordonnance du 8 novembre 2022, Grupa « Lew »/EUIPO – Lechwerke (GRUPALEW.), T‑672/21, non publiée, EU:T:2022:705, point 48 et jurisprudence citée].

44      En l’espèce, la requérante a présenté devant la division d’opposition plusieurs demandes de preuve de l’usage de la marque antérieure. Toutefois, comme il ressort des points 27 à 33 de la décision attaquée et comme la requérante l’admet dans la requête, si la première demande a été déposée dans le délai imparti, elle n’a pas été présentée dans un document distinct, mais dans le cadre de ses observations du 18 août 2020 en réponse à l’opposition. Quant aux demandes ultérieures, elles ont été présentées postérieurement au 18 août 2020, date à laquelle a expiré le délai.

45      Selon la requérante, elle aurait dû bénéficier d’un délai afin de corriger l’irrégularité formelle consistant à ne pas avoir présenté la demande dans un document distinct.

46      À cet égard, il convient de relever que l’exigence de forme concernant la présentation des demandes de preuve de l’usage dans un document distinct vise à garantir une procédure contradictoire et à permettre aux instances de l’EUIPO de disposer de toutes les informations nécessaires pour pouvoir examiner adéquatement lesdites demandes.

47      En outre, l’existence d’un délai de forclusion, tout comme l’application stricte des règles de procédure, répond à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité de garantir l’équilibre des droits et des obligations des parties à la procédure.

48      Compte tenu de tout ce qui précède, il y a lieu de constater que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a rejeté les demandes de preuve de l’usage de la marque antérieure comme étant irrecevables.

49      En second lieu, la requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours a violé les principes de protection de la confiance légitime et de sécurité juridique en considérant, aux points 116 et 117 de la décision attaquée, que la coexistence de deux marques devait être fondée sur l’absence de risque de confusion dans l’esprit du public pertinent. Selon la requérante, la démonstration d’une coexistence paisible entre des marques reposant sur une absence de risque de confusion entre lesdites marques est d’une difficulté disproportionnée, voire impossible à apporter.

50      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

51      Il convient de rappeler qu’il n’est pas entièrement exclu que, dans certains cas, la coexistence de marques antérieures sur le marché puisse éventuellement éliminer le risque de confusion entre deux marques en conflit. Néanmoins, une telle éventualité ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’EUIPO, le demandeur de la marque de l’Union européenne a dûment démontré que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques antérieures dont il se prévaut et la marque antérieure de l’intervenante qui fonde l’opposition et sous réserve que les marques antérieures en cause et les marques en conflit soient identiques [voir arrêt du 2 octobre 2013, Cartoon Network/OHMI – Boomerang TV (BOOMERANG), T‑285/12, non publié, EU:T:2013:520, point 55 et jurisprudence citée].

52      Il ressort clairement de cette jurisprudence que la requérante, contrairement à ce qu’elle soutient, devait démontrer que la coexistence des marques qu’elle invoquait reposait sur l’absence d’un risque de confusion dans l’esprit du public pertinent.

53      C’est donc sans avoir violé le principe de sécurité juridique que la chambre de recours, en se fondant sur une jurisprudence constante du Tribunal, a rappelé aux points 116 et 117 de la décision attaquée les conditions qui doivent être remplies pour que la coexistence de marques puisse contribuer à amoindrir le risque de confusion dans l’esprit du public concerné.

54      En ce qui concerne l’allégation de la requérante tirée du caractère disproportionné, voire de l’impossibilité, de la démonstration d’une coexistence paisible entre des marques reposant sur une absence de risque de confusion entre lesdites marques, elle doit d’emblée être rejetée.

55      S’il appartient, certes, au titulaire de la marque contestée, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’EUIPO, de démontrer que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre la marque dont il se prévaut et la marque antérieure qui fonde la demande de nullité, il lui est loisible de procéder à cette démonstration en avançant un faisceau d’indices en ce sens. À cet égard, sont particulièrement pertinents les éléments attestant de la connaissance de chacune des marques en cause par le public pertinent avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée. En outre, dans la mesure où il ressort de la jurisprudence que la coexistence de deux marques doit être suffisamment longue pour qu’elle puisse influer sur la perception du consommateur pertinent, la durée de la coexistence constitue également un élément essentiel. Il convient également de relever que tout argument tiré d’une coexistence implique au préalable la démonstration, d’une part, d’une identité des marques antérieures avec les marques en conflit et, d’autre part, de l’usage effectif de la marque dont la requérante se prévaut sur le territoire pertinent. En outre, dans la mesure où seule une coexistence paisible entre les marques en cause peut être prise en compte, l’existence d’un contentieux entre les titulaires des marques antérieures empêche que la coexistence soit retenue [voir arrêt du 30 juin 2015, La Rioja Alta/OHMI – Aldi Einkauf (VIÑA ALBERDI), T‑489/13, EU:T:2015:446, points 80 à 82 et jurisprudence citée].

56      En l’espèce, force est de constater que la requérante n’a pas réussi à démontrer la coexistence des marques antérieures dont elle se prévaut et n’a pas non plus produit des éléments de preuve concernant la façon dont le public pertinent avait été confronté aux marques en conflit sur le marché.

57      Quant à la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime par la chambre de recours, il suffit de relever que la requérante ne fait nullement valoir, dans son recours, avoir reçu de la part des instances de l’EUIPO des assurances précises de nature à provoquer une confusion admissible dans son esprit.

58      Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter comme non fondés les deuxième et cinquième moyens.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement 2017/1001

59      La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours aurait dû constater que la marque antérieure était descriptive pour tous les produits relevant des classes 5 et 29 et qu’elle était dépourvue de tout caractère distinctif. Partant, la chambre de recours aurait dû rejeter l’opposition dans son intégralité.

60      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments de la requérante.

61      S’agissant de la question de savoir si la marque nationale antérieure possède un caractère distinctif quant aux produits concernés, il y a lieu de rappeler qu’il découle de la coexistence des marques de l’Union européenne et des marques nationales, ainsi que du fait que l’enregistrement de ces dernières ne relève pas de la compétence de l’EUIPO ni leur contrôle juridictionnel de la compétence du Tribunal, que, lors d’une procédure d’opposition à une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne, la validité des marques nationales ne peut être mise en cause. Il convient également de rappeler que l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement 2017/1001 prévoit explicitement, dans le cadre d’une procédure d’opposition, la prise en considération comme marques antérieures des marques enregistrées dans un État membre. Il s’ensuit que, pour ne pas enfreindre l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement 2017/1001, il doit être reconnu un certain degré de caractère distinctif d’une marque nationale invoquée à l’appui d’une opposition à l’enregistrement d’une marque de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI, C‑196/11 P, EU:C:2012:314, points 40, 46 et 47).

62      Partant, c’est à tort que la requérante estime que la chambre de recours aurait dû constater que la marque nationale antérieure était descriptive et dépourvue de caractère distinctif.

63      Il y a donc lieu de rejeter le troisième moyen comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation de l’article 94 du règlement 2017/1001 et de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux

64      La requérante fait valoir, en substance, que la chambre de recours n’a pas expliqué dans la décision attaquée pour quelles raisons elle n’avait pas pris en considération ses arguments relatifs au niveau requis de la preuve de la coexistence des marques et, partant, a violé l’article 94 du règlement 2017/1001 et l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux.

65      L’EUIPO et l’intervenante contestent ces arguments de la requérante.

66      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 94 du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE et de l’article 41, paragraphe 2, sous c), de la charte des droits fondamentaux, selon laquelle le raisonnement de l’auteur de l’acte doit apparaître de façon claire et non équivoque. Elle a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée [arrêt du 23 septembre 2020, CEDC International/EUIPO – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑796/16, EU:T:2020:439, point 186].

67      En outre, l’obligation de motivation n’impose pas aux chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. Il suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir, en ce sens, arrêt du 15 janvier 2015, MEM/OHMI (MONACO), T‑197/13, EU:T:2015:16, point 19 et jurisprudence citée].

68      Or, il ressort de la décision attaquée que la chambre de recours a exposé de manière claire et non équivoque les raisons l’ayant conduite à considérer que la requérante n’avait pas établi la coexistence sur le marché espagnol des deux marques en cause. Premièrement, elle a rappelé, aux points 38 à 42 de la décision attaquée, les dispositions applicables et la jurisprudence de la Cour et du Tribunal en matière de preuves produites tardivement dans les procédures devant l’EUIPO. Deuxièmement, aux points 43 à 53 de la décision attaquée, la chambre de recours a explicité que les éléments de preuve produits par la requérante pour la première fois au stade du recours aux fins de démontrer la coexistence des marques étaient irrecevables. Troisièmement, elle a rappelé, aux points 116 et 117 de la décision attaquée, les conditions qui doivent être remplies pour que la coexistence de deux marques puisse éventuellement contribuer à amoindrir le risque de confusion entre lesdites marques dans l’esprit du public pertinent. Enfin, quatrièmement, aux points 119 et 120 de la décision attaquée, la chambre de recours a rappelé que la requérante n’avait pas établi la coexistence sur le marché espagnol des deux marques en cause et a constaté que, en tout état de cause, la requérante n’avait pas démontré que la prétendue coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion et qu’elle était pacifique.

69      Dès lors, la chambre de recours a exposé les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée. La motivation exposée par la chambre de recours dans la décision attaquée a permis à la requérante d’en comprendre les motifs et d’introduire un recours contestant son bien-fondé, puis au Tribunal d’exercer son contrôle.

70      Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen comme non fondé.

 Sur le sixième moyen, tiré de la violation de la jurisprudence pertinente relative à l’appréciation globale du risque de confusion

71      La requérante fait valoir que la chambre de recours n’a pas pris en compte certaines circonstances pertinentes en l’espèce aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, à savoir :

–        que la requérante a essayé de rétablir la situation dans laquelle elle se trouvait deux ans avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement en raison d’un oubli de renouvellement de sa marque ;

–        que l’intervenante avait toléré l’existence de la marque de l’Union européenne antérieure de la requérante ainsi que sa présence sur le marché espagnol pendant des décennies ;

–        qu’il existe un grand nombre d’autres marques très similaires enregistrées pour des produits identiques ;

–        la réalité de fait entre les parties et non la réalité sur papier ;

–        le caractère descriptif des marques invoquées.

72      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

73      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, du même statut, et de l’article 177, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure du Tribunal, la requête doit, notamment, contenir l’objet du litige et un exposé sommaire des moyens invoqués. Ces éléments doivent être suffisamment clairs et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnances du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, EU:T:1993:39, point 20 ; du 21 mai 1999, Asia Motor France e.a./Commission, T‑154/98, EU:T:1999:109, point 49, et arrêt du 15 juin 1999, Ismeri Europa/Cour des comptes, T‑277/97, EU:T:1999:124, point 29).

74      Il ressort de la jurisprudence que des exigences analogues à celles exposées au point précédent sont requises lorsqu’un grief ou un argument est invoqué au soutien d’un moyen [voir arrêt du 23 février 2022, Lackmann Fleisch- und Feinkostfabrik/EUIPO – Schuju (Хозяйка), T‑185/21, non publié, EU:T:2022:89, point 39 et jurisprudence citée].

75      Or, force est de constater que l’affirmation générale de la requérante selon laquelle la chambre de recours a violé la jurisprudence pertinente relative à l’appréciation globale du risque de confusion n’est ni étayée ni démontrée. En effet, dans ses écritures, la requérante ne développe pas d’argumentation spécifique à cet égard ni n’identifie la jurisprudence à laquelle elle fait référence.

76      En outre, la requérante ne précise pas de quelle manière le fait d’avoir essayé de rétablir la situation antérieure, l’existence d’autres marques similaires ou « la réalité de fait entre les parties » devaient, en l’espèce, influer sur l’appréciation globale du risque de confusion.

77      S’agissant de la coexistence des marques sur le marché espagnol, il suffit de rappeler que la requérante, ainsi qu’il a été constaté au point 56 ci-dessus, n’a pas réussi à établir la coexistence des marques antérieures.

78      Quant au caractère prétendument descriptif des marques invoquées, il convient de rappeler qu’il a été constaté au point 62 ci-dessus que la requérante a estimé à tort que la chambre de recours aurait dû constater que la marque nationale antérieure était descriptive et dépourvue de caractère distinctif.

79      Partant, il y a lieu de rejeter le sixième moyen comme étant en partie irrecevable et en partie non fondé.

80      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

81      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

82      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’intervenante, conformément aux conclusions de cette dernière. En revanche, l’EUIPO n’ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens qu’en cas de convocation à une audience, il convient, en l’absence d’organisation d’une audience, de décider qu’il supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Prolactal GmbH est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Prolàctea, SA.

3)      L’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) supportera ses propres dépens.

Marcoulli

Tomljenović

Norkus

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 septembre 2023.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.